[1] L’appelante et les appelants incidents se pourvoient contre un jugement rendu le 21 août 2015 et rectifié le 2 septembre 2015 par la Cour supérieure, district de Montréal (l’honorable Pepita G. Capriolo), lequel accueille en partie une action collective en réclamation d’une somme d’argent, de dommages moraux et de dommages punitifs.
[2] Pour les motifs du juge Parent, auxquels souscrivent les juges Giroux et Schrager, LA COUR :
[3] ACCUEILLE en partie le pourvoi et le pourvoi incident.
[4] MODIFIE les paragraphes [101] et [106] du jugement pour qu’ils soient dorénavant ainsi rédigés :
[101] SCINDE le groupe en cinq sous-groupes :
Sous-groupe a : Les membres qui ont gardé le service IHVE, ont dépassé la limite de 100 Go par mois et ont payé des frais supplémentaires;
Sous-groupe b : Les membres qui ont résilié leur contrat et qui ont engagé des frais de résiliation;
Sous-groupe c : Les membres qui ont migré au service IHV et ont payé les frais supplémentaires jusqu’à concurrence du cap afin de maintenir leur accès illimité à l’Internet;
Sous-groupe d : Les membres qui ont continué à utiliser le service IHVE sans engager de frais supplémentaires n’ayant pas dépassé 100 Go par mois;
Sous-groupe e : Les membres de A, B, C ou D qui se sont abonnés après le 28 juin et qui n’ont pas été informés de la limite d’utilisation projetée au moment de leur abonnement ou renouvellement d’abonnement au service IHVE.
DÉCLARE qu’un membre peut faire partie de plus d’un sous-groupe selon les périodes, mais ne peut, pour la même période, appartenir à plus d’un sous-groupe, sauf pour le sous-groupe E.
[106] ORDONNE à Vidéotron de déposer au greffe de la Cour supérieure le montant des taxes perçues relatives à la facturation excédentaire mentionnée au paragraphe précédent auprès des membres du sous-groupe A, avec intérêt légal ainsi que l’indemnité additionnelle depuis le 22 août 2007 dans un délai de 30 jours du présent jugement.
[5] BIFFE les paragraphes [110] et [111] du jugement.
[6] LE TOUT, sans frais de justice tant sur l’appel principal que sur l’appel incident.
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MOTIFS DU JUGE PARENT |
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[7] Le jugement entrepris accueille l’action collective découlant de la décision de l’appelante Vidéotron de modifier unilatéralement les conditions de l’un de ses forfaits Internet (Internet Haute Vitesse Extrême, ou IHVE). Il condamne Vidéotron à verser aux membres du groupe divers montants à titre de réparation contractuelle, en dommages compensatoires et en dommages punitifs[1]. En appel, Vidéotron conteste l’ensemble des conclusions du jugement. Les intimés forment un appel incident pour que soient augmentés certains des dommages alloués.
[8] En 2007, Vidéotron compte un peu plus de 830 000 abonnés à ses différents forfaits Internet, dont le forfait IHVE. L’une des particularités de ce forfait est d’offrir, pour un montant mensuel fixe, l’accès illimité à la bande passante, dont l’étalon de mesure est le giga-octet (Go).
[9] D’autres forfaits mensuels, moins coûteux, comprennent un accès limité à la bande passante. En outre, les forfaits se distinguent aussi par la vitesse d’accès au réseau, calculée en mégabits par seconde (Mbit/s) ou en kilobits par seconde (Kbit/s). Les forfaits offrant les meilleurs accès à la bande passante ainsi que les vitesses d’accès les plus rapides exigent des coûts mensuels plus élevés[2].
[10] Il convient de souligner que les clients qui s’engagent par contrat à durée déterminée, laquelle varie de 12 à 24 mois, obtiennent une réduction du coût du forfait. En outre, ceux qui ajoutent à leur forfait Internet d’autres services offerts par Vidéotron, tels la téléphonie résidentielle, la téléphonie mobile ou le service de câblodistribution, bénéficient d’un rabais multiservice. C’est le cas de l’intimé Savoie qui était abonné à trois services offerts par Vidéotron, dont le forfait IHVE.
[11] Depuis au moins le début de 2007, Vidéotron observe une augmentation considérable de la consommation de la bande passante par ses abonnés au forfait IHVE. Ainsi, environ 8 000 des 38 000 abonnés au forfait utilisent plus de 100 Go par mois en moyenne. Cela s’explique notamment par l’usage d’applications qui permettent le partage du contenu des ordinateurs des utilisateurs (applications peer to peer, ou P2P). Cette pratique occasionne des téléchargements et des téléversements qui occupent la bande passante de manière importante. La situation est exacerbée par le fait que plusieurs utilisateurs du P2P omettent de fermer ces applications lorsqu’ils cessent d’utiliser leurs ordinateurs. D’autres utilisateurs continuent ainsi d’accéder à leurs postes, accroissant de manière encore plus importante l’utilisation de la bande passante. Cela cause un ralentissement général du réseau pour l’ensemble des utilisateurs.
[12] À cette époque, le phénomène de visionnement en ligne (streaming), lequel exige une vitesse d’accès rapide et stable, est également en forte croissance. Or, la très forte consommation de la bande passante par une faible fraction de la clientèle nuit à l’accès au réseau pour la majorité.
[13] Confrontée à ces problèmes technologiques, Vidéotron envisage, à compter d’avril 2007, la possibilité de plafonner la consommation mensuelle de la bande passante pour ses abonnés au forfait IHVE. Elle prend la décision, le 28 juin 2007, de modifier son forfait IHVE en abolissant l’accès illimité à la bande passante. Elle choisit d’imposer un tarif de 1,50 $ par Go consommé au-delà de la limite mensuelle qu’elle fixe à 100 Go[3]. Vidéotron estime que ces changements devraient régler le problème qu’elle qualifie de « consommation abusive » de la bande passante par une minorité de sa clientèle IHVE. Cette décision n’est toutefois pas annoncée immédiatement, puisque l’aspect technique de sa mise en œuvre doit être peaufiné.
[14] Finalement, le 14 août 2007, Vidéotron avise ses abonnés IHVE, dont ses 33 244 clients liés par un contrat à durée fixe[4], qu’elle modifie les conditions de leur forfait, à compter du 1er octobre 2007. Ainsi, comme elle l’avait planifié, Vidéotron confirme que l’accès illimité à la bande passante est réduit à 100 Go par mois, une somme de 1,50 $/Go étant payable au-delà de cette limite (laquelle peut donc être dépassée). La vitesse d’accès demeure la même.
[15] Dès le 22 août 2007, la demande d’autorisation d’exercer l’action collective est introduite. Les intimés soutiennent que Vidéotron ne peut modifier unilatéralement les conditions des contrats IHVE à durée déterminée, malgré la présence d’une clause contractuelle le permettant.
[16] Vidéotron maintient le cap. Dans les trente jours suivant l’envoi de l’avis de modification du forfait, 866 clients résilient leur contrat sans frais et 1 918 autres migrent vers un autre forfait de Vidéotron, Internet Haute Vitesse (IHV). Ils paient un frais supplémentaire mensuel de 30 $, haussé par la suite à 50 $, pour conserver leur accès illimité à la bande passante, mais à une vitesse inférieure à celle du forfait IHVE.
[17] D’octobre 2007 à juin 2008, 566 autres clients résilient leur contrat IHVE à durée fixe. Ayant excédé la période de résiliation sans frais prévue au contrat, ils doivent verser à Vidéotron des frais de 120 $.
[18] Enfin, Vidéotron perçoit 1 225 201 $ des 8 994 clients qui ont dû verser 1,50 $/Go pour leur consommation mensuelle excédentaire à compter du 1er octobre 2007, malgré leur contrat IHVE à durée déterminée alors en vigueur.
[19] Le 30 mai 2011, l’action collective est autorisée. Aux fins de l’appel, il suffit de mentionner que le groupe inclut toutes les personnes physiques résidant au Québec qui, en date du 1er octobre 2007, étaient abonnées au service IHVE de Vidéotron en vertu d’un contrat à durée déterminée de douze mois ou plus conclu avant l’annonce de la modification du forfait le 14 août 2007.
[20] Le jugement accueille la demande, bien qu’il reconnaisse la problématique qui a incité Vidéotron à modifier son forfait : l’utilisation excessive de la bande passante par une faible partie de la clientèle nuisait à la qualité de l’accès au service Internet pour la vaste majorité. Vidéotron a choisi la solution la plus appropriée pour résoudre ce problème, selon la juge.
[21] Cela étant, elle considère néanmoins que Vidéotron a contrevenu aux articles 12 et 40 de la Loi sur la protection du consommateur (LPC)[5]. Elle accepte l’argument selon lequel la clause 3.9 du contrat permettant sa modification unilatérale est contraire aux dispositions d’ordre public de la LPC. S’appuyant sur l’article 272 LPC, la juge prononce contre Vidéotron une série de condamnations qui varient selon cinq sous-groupes :
Sous-groupe a : Les 8994 membres qui ont gardé le service IHVE et qui ont dépassé la limite de 100 Go par mois ont droit au remboursement des frais supplémentaires versés à Vidéotron, totalisant 1 225 201 $;
Sous-groupe b : Les 566 membres qui ont résilié leur contrat IHVE après le 1er octobre 2007 obtiennent le remboursement des frais de résiliation de 120 $, un montant forfaitaire de 5 $ par mois jusqu’à l’échéance de leur contrat initial et le remboursement, le cas échéant, du rabais multiservice perdu pour cette période;
Sous-groupe c : Les 1 918 membres qui ont migré au service IHV obtiennent, jusqu’à l’échéance de leur contrat initial, le remboursement des frais supplémentaires payés pour maintenir leur accès illimité à la bande passante ainsi que 10 $ par mois, pour la même période, pour la réduction de la vitesse d’accès à Internet;
Sous-groupe d : Les membres qui ont continué à utiliser le service IHVE sans engager de frais supplémentaires et sans dépasser 100 Go par mois obtiennent, jusqu’à l’échéance de leur contrat, un remboursement de 5 $ par mois pour la modification du contrat les privant de l’accès illimité à la bande passante sans frais supplémentaires;
Sous-groupe e : Les 6 254 membres qui se sont abonnés après le 28 juin 2007 sans avoir été informés de la limite d’utilisation projetée, au moment de leur abonnement ou du renouvellement de leur abonnement au service IHVE, obtiennent chacun 500 $ à titre de dommages punitifs, soit un total de 3 127 000 $[6].
[22] Le jugement accorde une large place à la présomption absolue de préjudice dont bénéficient les membres en vertu de l’article 272 LPC. La juge arbitre certains montants de dommages, plus précisément ceux relatifs à la perte d’accès illimité à la bande passante (5 $/mois) et à la réduction de la vitesse d’accès à Internet (10 $/mois).
[23] La condamnation pour dommages punitifs repose sur les articles 228 et 272 LPC. La juge estime que Vidéotron aurait dû mettre en garde les futurs abonnés de sa décision de mettre fin au service Internet illimité avant la conclusion du contrat IHVE. Par son inaction, elle a passé sous silence un fait important. La juge refuse toutefois d’accorder des dommages punitifs à tous les membres du groupe. Vidéotron n’a pas agi avec insouciance ni n’a fait preuve d’une grave négligence en décidant de modifier unilatéralement le forfait IHVE.
[24] Vidéotron soulève les moyens d’appel suivants :
1. La juge de première instance a-t-elle erré en concluant que l’appelante avait violé les articles 12 et 40 de la Loi sur la protection du consommateur?
2. La juge de première instance a-t-elle erré en prononçant des condamnations en faveur des membres des sous-groupes B, C et D?
3. La juge de première instance a-t-elle erré en octroyant des dommages-intérêts punitifs aux membres du sous-groupe E?
[25] Les appelants incidents formulent quatre questions :
4. La juge de première instance a-t-elle erré en ne limitant pas temporellement l’appartenance à un groupe?
5. La juge de première instance a-t-elle erré en n’accordant pas l’indemnité additionnelle sur le remboursement des taxes payées par les membres du sous-groupe A?
6. La juge de première instance a-t-elle erré en omettant d’indemniser les membres du sous-groupe B ayant un rabais multiservice?
7. La juge de première instance a-t-elle erré en refusant de condamner l’intimée incidente à des dommages-intérêts punitifs en faveur des membres des sous-groupes A, B, C et D?
1. La juge de première instance a-t-elle erré en concluant que l’appelante avait violé les articles 12 et 40 de la Loi sur la protection du consommateur?
[26] L’appelante plaide que la juge a erré dans l’interprétation des articles 12 et 40 LPC, puisque la clause de modification unilatérale l’autorisait à imposer des frais imprévus au contrat initial et à modifier les biens et services qui y sont décrits. En ce sens, la juge n’aurait pas dû conclure à une contravention à la LPC.
[27] Vidéotron admet ainsi implicitement qu’en l’absence d’une clause valide permettant la modification unilatérale des conditions du contrat, sa décision annoncée en août 2007 contrevient aux articles 12 et 40 LPC ce qui, du reste, ne saurait faire de doutes.
[28] Revoyons d’abord les dispositions législatives de la LPC pertinentes à l’examen de ce premier moyen :
11.2. Est interdite la stipulation prévoyant que le commerçant peut unilatéralement modifier le contrat à moins que cette stipulation ne prévoie également:
a) les éléments du contrat pouvant faire l’objet d’une modification unilatérale;
b) que le commerçant doit, au moins 30 jours avant l’entrée en vigueur de la modification, transmettre au consommateur un avis écrit, rédigé clairement et lisiblement, contenant exclusivement la nouvelle clause ou la clause modifiée ainsi que la version antérieure, la date d’entrée en vigueur de la modification et les droits du consommateur énoncés au paragraphe c;
c) que le consommateur pourra refuser cette modification et résoudre ou, s’il s’agit d’un contrat à exécution successive, résilier le contrat sans frais, pénalité ou indemnité de résiliation, en transmettant un avis à cet effet au commerçant au plus tard 30 jours suivant l’entrée en vigueur de la modification, si la modification entraîne l’augmentation de son obligation ou la réduction de l’obligation du commerçant.
Toutefois, à moins qu’il ne s’agisse d’un contrat de service à durée indéterminée, une telle stipulation est interdite à l’égard d’un élément essentiel du contrat, notamment la nature du bien ou du service faisant l’objet du contrat, le prix de ce bien ou de ce service et, le cas échéant, la durée du contrat.
La modification d’un contrat faite en contravention des dispositions du présent article est inopposable au consommateur.
Le présent article ne s’applique pas à une modification d’un contrat de crédit variable visée à l’article 129.
12. Aucuns frais ne peuvent être réclamés d’un consommateur, à moins que le contrat n’en mentionne de façon précise le montant.
[…]
40. Un bien ou un service fourni doit être conforme à la description qui en est faite dans le contrat. |
11.2. Any stipulation under which a merchant may amend a contract unilaterally is prohibited unless the stipulation also
(a) specifies the elements of the contract that may be amended unilaterally;
(b) provides that the merchant must send to the consumer, at least 30 days before the amendment comes into force, a written notice drawn up clearly and legibly, setting out the new clause only, or the amended clause and the clause as it read formerly, the date of the coming into force of the amendment and the rights of the consumer set forth in subparagraph c; and
(c) provides that the consumer may refuse the amendment and rescind or, in the case of a contract involving sequential performance, cancel the contract without cost, penalty or cancellation indemnity by sending the merchant a notice to that effect no later than 30 days after the amendment comes into force, if the amendment entails an increase in the consumer’s obligations or a reduction in the merchant’s obligations.
However, except in the case of an indeterminate-term service contract, such a stipulation is prohibited if it applies to an essential element of the contract, particularly the nature of the goods or services that are the object of the contract, the price of the goods or services or, if applicable, the term of the contract.
Any amendment of a contract in contravention of this section cannot be invoked against the consumer.
This section does not apply to the amendment of a contract extending variable credit as provided for in section 129.
12. No costs may be claimed from a consumer unless the amount thereof is precisely indicated in the contract.
[…]
40. The goods or services provided must conform to the description made of them in the contract.
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[29] Par ailleurs, la clause 3.9 du contrat prévoit :
Modifications - Vidéotron pourra, sur préavis d’au moins trente (30) jours au client transmis par courrier électronique à son adresse de messagerie Vidéotron ou transmis par la poste au client, modifier les Services ou toute autre disposition de la présente convention y compris les frais et tarifs stipulés au paragraphe 3.1. Aucun préavis ne sera toutefois requis à l’égard d’une modification des Services lorsque les prestations de Vidéotron en regard de ceux-ci demeurent semblables et qu’elles n’ont aucune conséquence sur les frais payables par le client. En acquittant le relevé de compte qui accompagne tout avis de modification de la présente convention, le client est irrévocablement présumé avoir accepté la modification. Le client pourra par contre, à l’intérieur du délai de trente (30) jours, résilier la présente entente ou en demander la modification de la manière prévue au paragraphe 11.4 ci-après, à défaut de quoi il sera irrévocablement présumé avoir accepté les modifications visées par l’avis.[7]
[Je souligne]
[30] Il n’est pas contesté que le contrat liant Vidéotron à ses membres ne mentionne pas la possibilité que soient imposés des frais de 1,50 $/mois pour la consommation mensuelle de la bande passante au-delà de 100 Go, dans le cas du forfait IHVE. La description de ce forfait ne souffre pas d’ambiguïté : le consommateur peut accéder à la bande passante de manière illimitée.
[31] Vidéotron argue que la clause modificatrice fait en sorte qu’on ne peut parler de contravention aux articles 12 et 40 LPC. Ainsi, le consommateur serait libre de refuser l’augmentation tarifaire en résiliant le contrat sans frais, pourvu qu’il agisse dans les trente jours de l’avis de modification. En outre, une fois modifié comme le permet la clause litigieuse, le bien ou le service demeurerait conforme à sa nouvelle description.
[32] Dit autrement, un commerçant ne pourrait jamais contrevenir aux articles 12 et 40 LPC par l’effet d’une clause de modification unilatérale sans restriction insérée au contrat de consommation.
[33] Avec égards, le législateur n’a pas voulu un résultat aussi absurde, qui va à l’encontre des principes fondamentaux en matière de législation visant la protection des consommateurs. J’y reviendrai.
[34] Revenant aux arguments au soutien de la validité de la clause de modification unilatérale, Vidéotron concède que cette stipulation contrevient à l’article 11.2 LPC, mais ajoute que cette disposition n’était pas en vigueur au moment du litige, ce qui est exact. Elle en déduit qu’en l’absence d’interdiction formelle, la clause 3.9 était valide et opposable aux membres du groupe.
[35] Elle a tort.
[36] Rappelons d’abord que l’adoption de cette disposition visait à accroître la protection des consommateurs. Lors de l’étude détaillée de l’article 11.2 LPC en commission parlementaire, la ministre de la Justice, responsable du projet de loi, indique :
Donc, depuis quelques années, de plus en plus d'entreprises insèrent dans les contrats d'adhésion qu'elles concluent avec des consommateurs certaines clauses qui leur confèrent des avantages excessifs. C'est le cas, notamment, des clauses qui permettent au commerçant de modifier unilatéralement le contrat. Ces clauses permettent au commerçant d'imposer au consommateur des conditions contractuelles auxquelles celui-ci n'a pas consenti initialement.
Dans le cas d'un contrat de service à durée déterminée, le consommateur pourrait être tenu de respecter de nouvelles conditions pendant de nombreuses années. Le seul recours accordé par le commerçant au consommateur qui refuserait les modifications apportées à son contrat de service est la résiliation du contrat. Une telle résiliation entraînera généralement pour le consommateur le paiement de frais de résiliation et, dans la mesure où le service résilié est une composante d'un bouquet de services, la perte de l'avantage financier associé à un tel bouquet.
Cette mesure propose que les clauses de modification unilatérale soient encadrées. Ainsi, un commerçant ne pourrait prévoir au contrat une clause qui lui permet de modifier unilatéralement les éléments essentiels de celui-ci. Il pourrait toutefois prévoir une clause lui permettant de modifier unilatéralement des éléments du contrat qui ne sont pas essentiels.
Dans le cas d'un contrat de service à durée indéterminée, les clauses de modification unilatérale seraient permises même à l'égard d'éléments essentiels du contrat comme le prix ou la nature du service faisant l'objet du contrat.
Dans les cas où la clause de modification unilatérale serait permise, celle-ci devra indiquer les éléments du contrat qui pourront faire l'objet d'une modification et que le consommateur pourra résilier le contrat sans frais dans un délai… — nous, on propose de 30 jours — après avoir été avisé qu'une modification sera adoptée au contrat si la modification entraîne l'augmentation de son obligation.[8]
[Je souligne]
[37] Même avant l’adoption de l’article 11.2 LPC, la validité de telles stipulations demeurait soumise aux règles générales édictées au Code civil du Québec et à la LPC.
[38] Il ne fait aucun doute que le principe de la liberté contractuelle permet aux parties de modifier les conditions initialement convenues à leur entente. En ce sens, l’article 1439 C.c.Q. énonce :
1439. Le contrat ne peut être résolu, résilié, modifié ou révoqué que pour les causes reconnues par la loi ou de l’accord des parties. |
1439. A contract may not be resolved, resiliated, modified or revoked except on grounds recognized by law or by agreement of the parties.
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[39] Hormis les causes reconnues par la loi, qui ne sont pas pertinentes en l’espèce, le principe du consensualisme s’impose au moment de modifier le contrat.
[40] Cet accord des volontés peut survenir postérieurement à la conclusion du contrat, alors que les parties négocient des modifications à l’entente initiale. Dans ce contexte, les nouvelles conditions du contrat font, en principe, l’objet d’un consentement éclairé des parties.
[41] On peut envisager une seconde hypothèse, où une stipulation au contrat initial prévoit sa modification éventuelle. Ce type de clause répond au besoin de souplesse souvent nécessaire en matière contractuelle, alors que les conditions initiales peuvent nécessiter des modifications au fil du temps, selon des circonstances et des paramètres que les parties peuvent toutefois anticiper. Ainsi, une clause établissant un droit à la modification unilatérale du contrat doit être conforme à l’article 1373 C.c.Q. qui exige que toute obligation soit déterminée ou déterminable :
1373. L’objet de l’obligation est la prestation à laquelle le débiteur est tenu envers le créancier et qui consiste à faire ou à ne pas faire quelque chose.
La prestation doit être possible et déterminée ou déterminable; elle ne doit être ni prohibée par la loi ni contraire à l’ordre public. |
1373. The object of an obligation is the prestation that the debtor is bound to render to the creditor and which consists in doing or not doing something.
The debtor is bound to render a prestation that is possible and determinate or determinable and that is neither forbidden by law nor contrary to public order.
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[42] Les auteurs Baudouin, Jobin et Vézina examinent les clauses contractuelles de modification unilatérale sous l’angle de la déterminabilité de la prestation :
442 - Principe - Selon le principe de la force obligatoire du contrat, les parties ne peuvent, sauf entente entre elles, modifier unilatéralement les termes de leur contrat ou les modalités de son exécution. La force obligatoire emporte comme conséquences non seulement qu’elles soient liées dans le temps, mais aussi quant au contenu de leur engagement. Il existe toutefois, là aussi, plusieurs exceptions à cette règle.
La première découle d’une stipulation en vertu de laquelle l’une des parties au contrat aura le droit de lui apporter, à elle seule, une modification, avec ou sans préavis au cocontractant. L’objectif est généralement d’assurer de la souplesse à l’accord et de lui permettre de s’adapter à des changements de situation. La clause de sauvegarde, ou clause de hardship, pour imprévision, en est l’exemple typique. Fréquente en pratique, la clause de modification unilatérale fait pourtant l’objet de peu de jurisprudence et de doctrine. Le principe de la liberté contractuelle permet cette clause, sous certaines réserves. Sa validité peut être contestée par exemple si, dans un contrat d’adhésion ou de consommation, on démontre qu’elle constitue une clause abusive (art. 1437 C.c.Q.). La validité de la clause peut aussi être mise en doute si son objet n’obéit pas à l’exigence fondamentale que toute obligation doit être déterminée ou déterminable (art. 1373, al. 2 C.c.Q.). Enfin, la bonne foi peut être invoquée lors de la mise en œuvre de la clause, car elle ne doit pas devenir un instrument au service de l’arbitraire d’une partie (art. 1375 C.c.Q.).[9]
[Je souligne]
[43] La validité de la stipulation attribuant une faculté de modification unilatérale à l’une des parties exige que son objet soit « déterminable ». Dans son ouvrage, Gérard Cornu définit ce terme :
Qui est indéterminé à un moment donné, mais qui peut ultérieurement être fixé par application de facteurs arrêtés dès ce moment-là. Ex. le prix de vente est déterminable si, n’étant pas fixé dans son montant lors de la conclusion de celle-ci, cette fixation peut ensuite résulter de critères que les parties avaient prévus en contractant sans qu’il soit nécessaire qu’elles aient à se mettre d’accord là-dessus. Ant. Indéterminable.[10]
[Je souligne]
[44] La clause de modification unilatérale doit énoncer des circonstances suffisamment précises et fixer des critères permettant d’anticiper les modifications éventuelles à l’entente pour faire disparaître l’indétermination. Cette exigence rejoint les propos des auteurs Lluelles et Moore :
2218. La nécessaire détermination de la modification unilatérale. Le droit général des contrats soumet l’efficacité de la clause de modification unilatérale à une condition que ne connaît pas la clause de révocation unilatérale : le caractère déterminable de son objet. […]
2219. Par cette exigence commune à tous les contrats, y compris aux contrats conclus de gré à gré, le droit des obligations veut éviter que l’un des contractants ne soit dans l’incapacité d’appréhender dans le temps les circonstances et les contours de la modification pré-autorisée. Il en va de l’intelligence du consentement. C’est pourquoi la clause doit pouvoir fournir à chaque partie des indices prédéterminés qui lui permettent « de se faire une idée ». Mais on veut aussi éviter que le contrat ne devienne un instrument d’arbitraire au profit d’un contractant. D’où la nécessité pour la clause de prévoir des critères de modification objectifs.
2220. La clause autorisant un contractant à modifier en tout temps toute clause du contrat ne peut, bien entendu, passer avec succès l’épreuve de la détermination. La portée de l’autorisation est trop vague — et trop vaste. […] elle risquerait d’être frappée de nullité, puisqu’elle donnerait « aux obligations de l’une des parties un caractère potestatif rendant l’accord de volontés parfaitement illusoire ».[11]
[Je souligne]
[45] En somme, la clause de modification unilatérale ne peut être conçue de manière à permettre à l’un des cocontractants d’imposer, en cours d’exécution du contrat, des modifications aux conditions essentielles de l’entente sur une base unilatérale et purement discrétionnaire. Il en va du consentement éclairé des parties au moment de la modification, consacré à l’article 1439 C.c.Q. On peut concevoir, comme le permet d’ailleurs l’article 11.2 LPC, que la clause de modification unilatérale et discrétionnaire assortie d’un droit de résolution ou de résiliation, contenue à un contrat à durée indéterminée, respecte dans certaines circonstances, les exigences de la loi. En effet, dans un tel contexte, le refus des modifications proposées permet la terminaison de l’entente, ce qui participe de l’essence du contrat à durée indéterminée. Cette situation équivaut à un avis de terminaison du contrat à durée indéterminée, à défaut d’entente sur les changements demandés par l’un des cocontractants.
[46] Cependant, dans un contrat à durée déterminée, on ne peut permettre à une partie de se soustraire à ses obligations par l’imposition de modifications aux conditions essentielles de l’entente initiale.
[47] Consciente de cette difficulté, Vidéotron a d’ailleurs soutenu à l’audience que le contrat en l’espèce ne constitue pas un véritable contrat à durée déterminée, mais plutôt un contrat à durée indéterminée sui generis. En termes simples, ce contrat engage le consommateur pour une durée déterminée et il ne peut mettre fin à l’entente avant son échéance sans engager des frais importants. En revanche, Vidéotron peut obtenir, en tout temps et sans frais, la résiliation du contrat avant son échéance si le consommateur n’accepte pas les modifications qu’elle peut lui imposer de manière purement arbitraire. Deux poids, deux mesures. La juge a, à juste titre, conclu que la clause 3.9 du contrat, qui permet cette hypothèse, ne peut être opposée aux membres.
[48] La clause de modification unilatérale est également inopposable aux membres du groupe puisqu’elle emporte leur renonciation aux droits conférés par les articles 12 et 40 LPC, ce que prohibent les articles 261 et 262 LPC :
261. On ne peut déroger à la présente loi par une convention particulière.
262. À moins qu’il n’en soit prévu autrement dans la présente loi, le consommateur ne peut renoncer à un droit que lui confère la présente loi.
|
261. No person may derogate from this Act by private agreement.
262. No consumer may waive the rights granted to him by this Act unless otherwise provided herein.
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[49] Ainsi, comme on l’a vu, la clause de modification unilatérale stérilise les articles 12 et 40 LPC. Telle qu’interprétée par Vidéotron, cette clause empêcherait les membres de se prévaloir des dispositions d’ordre public prévues à la LPC pourvu qu’elle transmette un avis de modification et qu’elle permette aux membres de résilier leur entente.
[50] Le droit d’obtenir les biens et services décrits au contrat, en contrepartie des frais qui y sont énoncés, naît dès la conclusion de l’entente. Ce droit n’est pas à géométrie variable. La proposition selon laquelle la clause 3.9 permettrait la réduction des obligations du commerçant heurte de plein fouet l’article 262 LPC. Le consommateur renoncerait aux droits qu’il a acquis à la conclusion du contrat initial, sans avoir la moindre idée des modifications qui l’attendent. Comme mentionné plus tôt, l’absurdité à laquelle conduit l’argument en démontre le caractère infondé.
[51] En somme, la clause 3.9 du contrat liant les parties ne peut servir d’échappatoire à la responsabilité de Vidéotron découlant de ses contraventions aux articles 12 et 40 LPC.
2. La juge de première instance a-t-elle erré en prononçant des condamnations en faveur des membres des sous-groupes B, C et D?
[52] Vidéotron plaide, subsidiairement à son argument concernant la validité de la clause de modification unilatérale du contrat, que la juge a erré en accordant des indemnités aux membres des sous-groupes B, C et D. Selon Vidéotron, la preuve offerte ne permettait que l’adjudication d’une indemnité aux membres du sous-groupe A.
[53] Avant d’analyser l’argumentation de Vidéotron pour chacun des sous-groupes, il convient de discuter brièvement des principes de droit régissant l’octroi des mesures de réparation énoncées à l’article 272 LPC :
272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l’article 314 ou dont l’application a été étendue par un décret pris en vertu de l’article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:
a) l’exécution de l’obligation;
b) l’autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;
c) la réduction de son obligation;
d) la résiliation du contrat;
e) la résolution du contrat; ou
f) la nullité du contrat,
sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.
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272. If the merchant or the manufacturer fails to fulfil an obligation imposed on him by this Act, by the regulations or by a voluntary undertaking made under section 314 or whose application has been extended by an order under section 315.1, the consumer may demand, as the case may be, subject to the other recourses provided by this Act,
(a) the specific performance of the obligation;
(b) the authorization to execute it at the merchant’s or manufacturer’s expense;
(c) that his obligations be reduced;
(d) that the contract be rescinded;
(e) that the contract be set aside; or
(f) that the contract be annulled,
without prejudice to his claim in damages, in all cases. He may also claim punitive damages.
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[54] Dans l’affaire Time[12], la Cour suprême met en perspective les mesures de réparation contractuelles prévues au premier alinéa et le recours en dommages-intérêts compensatoires du second alinéa.
[55] Quant aux mesures de réparation contractuelles, la Cour suprême confirme la jurisprudence de notre Cour ayant établi que « tout manquement à une obligation imposée par la loi entraîne l’application d’une présomption absolue de préjudice pour le consommateur »[13]. À cet égard, elle mentionne que :
La nature des obligations dont la violation peut être sanctionnée par le biais de l’art. 272 L.p.c. est essentiellement de deux ordres. […] Ces obligations se retrouvent principalement au titre I de la loi. La preuve de la violation de l’une de ces règles de fond permet donc, sans exigence additionnelle, au consommateur d’obtenir l’une des mesures de réparation contractuelles prévues à l’art. 272 L.p.c. Comme la juge Rousseau-Houle l’a affirmé dans l’arrêt Beauchamp, « [l]e législateur présume de façon absolue que le consommateur subit un préjudice par suite d’un manquement par le commerçant ou le fabricant à l’une ou l’autre de ces obligations et donne au consommateur la gamme des recours prévue à l’article 272 » (p. 744). […] Contrairement à l’art. 271 L.p.c., l’art. 272 ne permet pas au commerçant de soulever l’absence de préjudice en défense pour ce qui est des contraventions aux dispositions du titre I […].[14]
[Je souligne]
[56] Ainsi, la présomption absolue de préjudice dispense le consommateur de faire une preuve du dommage subi dans les cas où il demande l’une des mesures de réparations contractuelles prévues aux paragraphes a) à f) de l’article 272 LPC[15].
[57] La Cour suprême distingue ces recours des réclamations en dommages-intérêts compensatoires :
[125] En cas de contravention par un commerçant ou un fabricant à une obligation visée par l’art. 272 L.p.c., le consommateur peut demander au tribunal de lui accorder des dommages-intérêts compensatoires. […] Le texte de l’art. 272 L.p.c. contient les mots « sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas ». Cette expression, qui ne souffre d’aucune ambiguïté, signifie que le recours en dommages-intérêts, qu’il soit de nature contractuelle ou extracontractuelle, est autonome par rapport aux mesures de réparation contractuelles spécifiques prévues aux al. a) à f) de l’art. 272. […]
[126] L’autonomie du recours en dommages-intérêts prévu à l’art. 272 L.p.c. ne signifie cependant pas que l’exercice de ce recours n’est assujetti à aucun encadrement juridique. […] Ensuite, lorsque le consommateur choisit de réclamer des dommages-intérêts au commerçant ou au fabricant qu’il poursuit, l’exercice de son recours demeure soumis aux règles générales du droit civil québécois. En particulier, pour obtenir des dommages-intérêts compensatoires, il faut que le dommage subi soit susceptible d’évaluation ou quantifiable.[16]
[Je souligne]
[58] Une demande en dommages-intérêts demeure donc régie par le droit commun et le consommateur doit faire la preuve de son préjudice et du lien de causalité entre celui-ci et la contravention à la LPC.
[59] Déjà, en 2010, la Cour d’appel énonçait ce principe :
En l'espèce, la juge de première instance n'a pas accordé de dommages compensatoires et il n'y a pas lieu de modifier sa décision à cet effet. La LPC n'a pas pour effet d'écarter les principes qui sous-tendent l'évaluation des dommages. L'attribution de dommages-intérêts compensatoires dépend de l'existence d'un préjudice, préjudice qui n'a pas été prouvé par l'intimée.[17]
[60] En résumé, le manquement à une obligation prévue à la LPC dans le cadre d’une relation contractuelle permet, de ce seul fait, d’octroyer l’une des mesures de réparations prévues au premier alinéa de l’article 272 LPC vu la présomption absolue de préjudice. Si le consommateur estime que le manquement lui a occasionné des dommages, il doit en faire la preuve et établir le lien de causalité avec ce manquement. Il convient maintenant d’étudier la situation de chaque sous-groupe en appliquant ces principes.
Sous-groupe B
[61] Rappelons que ce sous-groupe comprend les 566 abonnés au forfait IHVE qui ont résilié leur contrat à durée déterminée avant son échéance, mais après le 1er octobre 2007. Ils ont dû verser à Vidéotron 120 $ à titre de frais de résiliation, somme dont la juge ordonne le remboursement. La preuve démontre que le total des frais de résiliation que doit ainsi rembourser Vidéotron s’élève à 68 117,05 $[18].
[62] Comme certains des membres du sous-groupe B bénéficiaient d’un rabais multiservice, la résiliation du forfait IHVE a réduit, sinon annihilé, le rabais. La juge ordonne à Vidéotron de fournir les informations pertinentes à cet égard et ajoute que les membres visés par cette situation ont droit au remboursement pour la perte du rabais multiservice jusqu’à l’échéance de leur contrat IHVE. Le montant total de cette condamnation, quoique déterminable, n’est pas en preuve. On sait cependant que l’intimé Savoie avait droit à un rabais mensuel de 6 $ en étant abonné à trois des quatre services de Vidéotron.
[63] Enfin, la juge considère que chaque membre qui a résilié son contrat IHVE a perdu le bénéfice de l’accès illimité que lui assurait l’entente ferme avec Vidéotron jusqu’à son échéance. La juge arbitre cet avantage à 5 $ par mois et en ordonne le remboursement, dont le montant total peut être calculé à partir de la liste des membres du sous-groupe B[19].
[64] Vidéotron soutient d’abord que toutes les ordonnances concernant le sous-groupe B souffrent d’un vice fatal, soit l’absence de preuve du lien de causalité entre la modification unilatérale du contrat IHVE et la décision de chaque membre de résilier ce contrat. La juge aurait erronément adopté la prémisse d’une présomption absolue de préjudice et, partant, de l’absence de nécessité de preuve du lien de causalité.
[65] Or, selon Vidéotron, les contrats ayant été résiliés, il ne saurait être question de mesures de réparations contractuelles. Les indemnités constituent des dommages compensatoires au sens du deuxième alinéa de l’article 272 LPC. Les règles usuelles de la responsabilité civile trouvent application, notamment en ce qui concerne la preuve du lien de causalité.
[66] Vidéotron souligne que plusieurs des 566 membres ont résilié leur contrat longtemps après l’avis de modification du forfait transmis le 14 août 2007, certaines résiliations ayant eu lieu jusqu’en juin 2008[20]. Dans ce contexte, elle plaide qu’il n’est pas possible de présumer que toutes ces résiliations sont attribuables aux modifications des conditions du forfait IHVE. Elle conclut pour ce motif que la juge devait rejeter les réclamations de ces membres, les intimés ayant échoué à satisfaire leur fardeau de preuve pour chacun d’eux.
[67] Vidéotron remarque que les intimés avaient sans doute anticipé cette difficulté en demandant un recouvrement individuel pour ces membres. Dans ce contexte, chacun aurait dû prouver le lien de causalité et Vidéotron aurait eu l’occasion de contester cette prétention. Reconnaissant que la juge n’était pas liée par le mode de recouvrement proposé par les intimés, Vidéotron y voit néanmoins une confirmation de son argumentation concernant l’individualité du lien de causalité et une explication de l’absence de preuve administrée par les intimés à ce sujet.
[68] Vidéotron plaide subsidiairement que la preuve ne permettait pas d’arbitrer à 5 $ par mois la perte du bénéfice à l’accès illimité à la bande passante.
[69] Dans un premier temps, il convient d’examiner la nature des indemnités accordées aux membres du sous-groupe B. Les frais de résiliation de 120 $ font partie des conditions du contrat. Ils sont exigibles du consommateur au moment de la résiliation de l’entente avant son échéance, à moins que la résiliation ne découle d’une modification unilatérale imposée par Vidéotron et que le consommateur agisse dans les 30 jours, le contrat énonçant :
11.3 Résiliation dans le cadre d'une promotion - Advenant que malgré les dispositions du paragraphe 11.2, le client résilie un abonnement effectué dans le cadre d'une promotion avant la fin de la Période de promotion, le client devra payer à Vidéotron, à titre de dommages-intérêts, les pénalités suivantes :
[…]
11.3.3 dans le cas où la Période de promotion est de 12 mois, une pénalité de 120 $·plus les taxes applicables si le client met fin à son abonnement entre le premier et le douzième mois de la Période de promotion;
11.4 Modification - Dans les cas d'application du paragraphe 3.9, le client pourra soit résilier cette convention ou soit demander à Vidéotron qu'elle modifie les Services fournis au client ou la durée de son abonnement, avec effet à la date de transmission du préavis transmis au client à l'Adresse de messagerie Vidéotron et ce, pourvu que le client ait transmis un avis écrit à cet effet à Vidéotron dans les trente (30) jours de la réception du préavis.
[Je souligne]
[70] Le paragraphe 11.4 du contrat explique donc pourquoi les 866 abonnés au forfait IHVE qui ont résilié l’entente dans le délai prévu à cette clause n’ont payé aucuns frais de résiliation.
[71] Mais cela signifie-t-il que ceux qui résilient postérieurement, mais avant l’échéance du contrat, doivent verser des frais de résiliation? Une réponse négative s’impose. En effet, les membres du sous-groupe B qui ont résilié l’entente avec Vidéotron ont, eux aussi, été victimes des contraventions aux articles 12 et 40 LPC. La résiliation est survenue après l’entrée en vigueur des modifications que leur a illégalement imposées Vidéotron à compter du 1er octobre 2007.
[72] De ce fait, les membres du sous-groupe B avaient droit à la résiliation du contrat au sens de l’article 272 LPC, sans la nécessité de démontrer l’existence d’un préjudice quelconque. Or, le droit à la résiliation en vertu de cette disposition implique nécessairement que le consommateur n’a pas à engager de frais du fait de cette résiliation. S’il n’en allait pas ainsi, la réparation ne serait pas complète. L’imposition aux membres du sous-groupe B de frais de résiliation les prive du droit à la résiliation prévu à la LPC. Le fait que ces consommateurs ont choisi la résiliation ne doit pas les priver du droit à la résiliation sans frais.
[73] Ainsi, la condamnation de Vidéotron au remboursement des frais de résiliation constitue un accessoire indissociable de la résiliation. Tout comme les abonnés qui ont résilié leur contrat avant le 1er octobre 2007 n’ont pas engagé de frais, ceux l’ayant fait par la suite ont droit au même traitement.
[74] La situation est différente pour les deux autres postes d’indemnités, soit la perte du rabais multiservice et la perte de bénéfice du contrat, qui constituent des dommages compensatoires pour lesquels une preuve du lien de causalité devait être établie, soit de manière directe, soit par présomption de fait découlant de la preuve. Vu l’absence d’analyse de cet aspect au jugement, il convient d’étudier la preuve au dossier.
[75] Cet examen révèle qu’aucune preuve directe du lien de causalité entre la décision de Vidéotron de modifier le forfait IHVE et la décision des 566 membres concernés de résilier leur contrat n’a été administrée. De fait, aucun de ces membres n’a témoigné en ce sens.
[76] Cela étant, la preuve du lien de causalité peut être établie par présomptions, comme le souligne la Cour dans l’arrêt Biondi[21] :
[121] Le lien de causalité entre la faute et le préjudice peut être prouvé par présomptions de fait, pour autant qu'elles soient graves, précises et concordantes. Ces présomptions sont laissées à l'appréciation du tribunal et s'appliquent au recours collectif de la même façon qu'à tout autre recours civil.
[77] Certains faits pointent en direction des modifications au contrat imposées par Vidéotron pour expliquer la résiliation. Ainsi, l’avis de modification du 14 août 2007 passe sous silence le choix qu’avaient les consommateurs de refuser les modifications et de résilier sans frais le contrat dans les trente jours de l’avis. Cela peut expliquer l’inaction de certains membres. En outre, cet avis n’indique nulle part qu’à défaut d’agir dans les trente jours, ou en payant leur prochaine facture, ce qui se fait bien souvent par virement automatisé, les membres sont présumés avoir irrévocablement accepté les changements.
[78] Ce silence de Vidéotron n’est pas sans conséquence, car il a privé les abonnés au forfait IHVE d’une mise en garde qui s’imposait dans les circonstances. Il est pour le moins étonnant qu’une information aussi cruciale ait été escamotée. Vidéotron savait qu’elle imposait une modification à une condition essentielle du forfait. L’explication donnée par la présidente de Vidéotron selon laquelle les consommateurs pouvaient consulter leur contrat ne convainc pas. Il paraît inique que Vidéotron plaide l’insuffisance de la preuve du lien de causalité liée à la tardiveté des résiliations alors que son défaut d’agir avec transparence auprès de ses clients peut expliquer leur retard à demander la résiliation du contrat IHVE.
[79] Ces constats ne permettent toutefois pas de conclure à une présomption, même réfragable, de lien de causalité entre les résiliations des contrats des membres du sous-groupe B et les contraventions de Vidéotron à la LPC. Diverses circonstances peuvent aussi expliquer la résiliation des contrats : déménagement dans un secteur non desservi par Vidéotron, ou avec une autre personne déjà connectée à Internet, choix de transférer chez un compétiteur, etc.
[80] En somme, la preuve ne permet pas de conclure, ni directement ni par voie de présomption, à l’existence probable d’un lien de causalité entre les modifications apportées par Vidéotron au forfait IHVE et la décision des membres du sous-groupe B de résilier leur contrat. Les condamnations en dommages pour les pertes de rabais multiservice et de l’avantage conféré par le forfait ne pouvaient être prononcées.
Sous-groupe C
[81] Ce regroupement comprend les abonnés au forfait IHVE qui ont choisi de migrer vers un autre forfait offert par Vidéotron, soit Internet Haute Vitesse (IHV). En outre, pour maintenir un accès illimité à la bande passante, ces membres ont versé un frais mensuel excédentaire de 30 $, haussé quelques mois plus tard à 50 $, faisant en sorte que le total versé mensuellement dépassait celui de leur forfait IHVE. Précisons que la vitesse d’accès offerte par le forfait IHV est plus lente que celle du forfait IHVE[22].
[82] La juge estime que Vidéotron doit rembourser à ces membres les frais excédentaires requis pour maintenir l’accès illimité à la bande passante. Elle évalue de plus à 10 $ par mois la valeur attribuable à la perte de vitesse d’accès subie par les membres et ordonne à Vidéotron de leur verser cette somme jusqu’à l’échéance initiale de leur contrat IHVE.
[83] Insistant à nouveau sur le fait que les indemnités constituent des dommages compensatoires selon l’article 272(2) LPC, Vidéotron souligne que dans ces circonstances, la juge ne pouvait se fonder sur la présomption absolue de préjudice pour accorder des indemnités aux membres du sous-groupe C. Or, ajoute-t-elle, aucune preuve ne démontre de préjudice.
[84] Ces arguments de Vidéotron sont infondés. Il est manifeste que les membres du sous-groupe C souhaitaient maintenir les avantages du forfait IHVE, comme le démontre leur choix de payer les frais supplémentaires exigés par Vidéotron pour obtenir l’accès illimité à la bande passante. Ils ont droit au remboursement de l’excédent payé pour cet accès au même titre que les membres du sous-groupe A ont droit au remboursement des frais excédentaires illégalement encaissés par Vidéotron.
[85] Par ailleurs, il ne fait aucun doute que le remboursement de ces frais ne prend pas en compte le ralentissement de la vitesse d’accès lié au passage au forfait IHV. À cet égard, Vidéotron a tort d’affirmer qu’il y a absence complète de preuve concernant le préjudice ainsi subi par les membres du sous-groupe C. Les intimés ont invité la juge à s’inspirer des coûts des divers forfaits Internet offerts par Vidéotron en 2007, suggestion qu’elle a manifestement retenue. L’indemnité fixée pour la perte de vitesse d’accès trouve appui sur la différence mensuelle de 15 $ entre les forfaits IHVE et IHV. La juge a choisi d’attribuer le tiers de cette somme, soit 5 $, à l’avantage procuré par l’accès illimité à la bande passante, indemnité accordée aux membres des sous-groupes B et D, et le solde, soit 10 $ par mois, à la vitesse supérieure d’accès offerte par le forfait IHVE.
[86] Bien qu’imparfaite, cette approche repose sur une assise factuelle non contestée : l’évaluation que Vidéotron établit pour chacun de ses forfaits et, partant, la valeur ajoutée des avantages technologiques que procure le forfait IHVE sur le forfait IHV. La répartition de cet avantage entre la bande passante et la vitesse d’accès relève d’un exercice discrétionnaire de la juge qui ne commande pas l’intervention de la Cour.
Sous-groupe D
[87] Le sous-groupe D comprend les membres qui n’ont pas, au 1er octobre 2007, résilié leur contrat IHVE, mais qui, contrairement à la situation envisagée au sous-groupe A, n’ont pas dépassé la consommation maximale de 100 Go/mois imposée à compter de cette date.
[88] Vidéotron plaide qu’ils n’ont subi aucun dommage, n’ayant versé aucuns frais excédentaires. Or, cet argument escamote l’article 40 LPC qui oblige le commerçant à livrer le bien ou le service décrit au contrat. En cas de contravention, les membres ont droit à une mesure de réparation contractuelle, vu la présomption absolue de préjudice de l’article 272(1) LPC. En l’espèce, les membres ont obtenu un service de moindre valeur que celui pour lequel ils ont contracté et payé. Cela justifiait la juge d’appliquer la mesure de réparation contractuelle qu’est la réduction de l’obligation. Comme je l’ai indiqué pour les membres du sous-groupe C, les données comparatives concernant le coût des divers forfaits offerts par Vidéotron permettent la conclusion réduisant de 5 $ par mois les obligations des membres du sous-groupe D, soit la valeur attribuée par la juge à l’accès illimité à la bande passante.
3. La juge de première instance a-t-elle erré en octroyant des dommages-intérêts punitifs aux membres du sous-groupe E?
[89] Rappelons que la juge conclut que Vidéotron avait l’obligation, à compter du 28 juin 2007, d’aviser ses nouveaux clients ainsi que ceux dont le contrat devait être renouvelé, de sa décision de limiter l’accès à la bande passante. Or, la preuve démontre que ce ne fut pas le cas avant le 14 août 2007. Pour cette raison, Vidéotron est condamnée à verser des dommages punitifs de 500 $ à chaque membre qui a souscrit au forfait IHVE à compter du 28 juin 2007 sans être avisé de la décision de Vidéotron.
[90] L’argumentation de Vidéotron pour contester cette ordonnance s’articule en trois temps.
[91] D’une part, Vidéotron soutient qu’elle a agi de bonne foi. Bien qu’elle ait pris la décision de limiter l’accès à la bande passante le 28 juin 2007, il a fallu attendre en août 2007 pour confirmer la faisabilité technique de cette approche et pour déterminer la date à laquelle la décision entrerait en vigueur. Il était donc impossible d’annoncer sa décision le 28 juin 2007.
[92] En second lieu, Vidéotron soulève une incongruité au jugement. Le dispositif vise aussi bien les nouveaux clients que ceux qui ont renouvelé leur contrat dans l’intervalle visé. Or, les motifs ne traitent que des nouveaux contrats. Il s’agirait selon Vidéotron d’une erreur de la juge. Comme ses motifs se rattachent au contexte entourant la conclusion de nouveaux contrats, la condamnation aurait dû se limiter à ceux-ci. La différence est importante, soit 1,3 M $.
[93] Enfin, Vidéotron plaide subsidiairement que le montant de la condamnation en dommages punitifs est excessif selon les critères prévus à la loi, tels qu’interprétés par la jurisprudence. En outre, la juge aurait commis une erreur de droit en fixant les dommages punitifs pour chaque membre du sous-groupe E, sans connaître le montant total de la condamnation.
[94] La juge fonde la condamnation en dommages punitifs sur un manquement de Vidéotron à l’article 228 LPC :
228. Aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, dans une représentation qu’il fait à un consommateur, passer sous silence un fait important. |
228. No merchant, manufacturer or advertiser may fail to mention an important fact in any representation made to a consumer.
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[95] La juge décrit le manquement à cette disposition, qu’elle qualifie de faute grave :
[85] Les membres de ce sous-groupe se sont abonnés au forfait IHVE sur la base de la publicité de Vidéotron. Ils ont dû confirmer leur intention de s’abonner lors d’une conversation téléphonique avec un préposé. Vidéotron avait pris la décision d’implanter le nouveau système de facturation et plafonnage. Il ne restait qu’à en mettre en œuvre la réalisation technique. Les nouveaux abonnés auraient dû être informés de la probabilité d’une modification en cours de contrat. Ils ne l’ont pas été. Il s’agit là d’un comportement « insouciant ou sérieusement négligent ».
[Je souligne]
[96] Avant d’en arriver à ce constat, la juge cite de larges extraits de l’arrêt de la Cour suprême dans Marcotte, qu’il convient de reproduire ici :
[91] Dans l’arrêt Richard, la Cour énonce des lignes directrices permettant de déterminer les situations dans lesquelles une contravention à la L.p.c. ouvre la porte aux recours prévus à l’art. 272. Quant aux dommages-intérêts punitifs, la Cour affirme que « les violations intentionnelles, malveillantes ou vexatoires, ainsi que la conduite marquée d’ignorance, d’insouciance ou de négligence sérieuse de la part des commerçants ou fabricants à l’égard de leurs obligations et des droits du consommateur sous le régime de la L.p.c. peuvent entraîner l’octroi de dommages-intérêts punitifs [en vertu de l’art. 272] » (par. 180 (nous soulignons)). Les consommateurs n’ont pas à « prouver l’intention de tromper du commerçant » pour que l’art. 272 s’applique (par. 128).
[92] La violation en cause dans les présents pourvois consiste, dans le cas des banques du groupe A, à n’avoir pas mentionné les frais de conversion, soit une contravention à l’art. 12 L.p.c. Il s’agit d’une violation de fond qui va à l’encontre de l’objectif de la Loi qui doit permettre aux consommateurs de faire des choix éclairés. Elle ne concerne pas la formation du contrat de consommation. En l’espèce, la contravention à l’art. 12 surpasse le manquement aux exigences de forme prescrites par la L.p.c. Elle n’est pas liée aux modalités de paiement ni au calcul ou à l’indication des frais de crédit ou du taux de crédit, qui sont expressément visés par l’art. 271. Elle résulte, à tout le moins, d’un comportement d’ignorance ou d’insouciance, selon le critère établi dans l’arrêt Richard. Partant, c’est l’art. 272, et non l’art. 271, qui s’applique.
[…]
[108] Avec égard, nous arrivons à une autre conclusion à la lumière des constats de fait tirés par le juge du procès. La L.p.c. est une loi d’ordre public; les obligations et les objectifs qui y sont prévus doivent entrer en ligne de compte dans la décision qui condamne une partie aux dommages-intérêts punitifs pour manquement à cette loi.
[109] En conséquence, avec égard, il n’est pas nécessaire d’établir un comportement antisocial ou répréhensible pour que des dommages-intérêts punitifs soient attribués en vertu de la L.p.c. Il faut plutôt examiner le comportement global du commerçant avant, pendant et après la violation, pour déterminer s’il a adopté une attitude « laxiste, passive ou ignorante à l’égard des droits du consommateur et [de leurs propres] obligations », ou un comportement « d’ignorance, d’insouciance ou de négligence sérieuse ».[23]
[Je souligne]
[97] La preuve permettait amplement à la juge de conclure à l’insouciance de Vidéotron en ne dénonçant pas sa décision concernant l’accès illimité à la bande passante, et ce, même si l’aspect technique demeurait à préciser. Sa décision constituait un « fait important » au sens de l’art. 228 LPC. Vidéotron ne pouvait ignorer qu’à cette époque, elle était le seul fournisseur à offrir un accès illimité à la bande passante pour un forfait fixe, ce qui lui procurait un avantage concurrentiel qui s’est d’ailleurs traduit par 3 654 nouveaux abonnements du 28 juin au 14 août 2007, en plus de 2 600 renouvellements de contrats.
[98] Dans l’évaluation du comportement global de Vidéotron, on peut également tenir compte de son mutisme dans son avis de modification du 14 août 2007 quant au droit de résilier sans frais les contrats à durée fixe, ce qui tend à démontrer l’insouciance retenue par la juge.
[99] En somme, Vidéotron ne démontre aucune erreur de droit ni d’erreur révisable dans l’appréciation de la preuve qui justifierait d’écarter la condamnation en dommages punitifs.
[100] Cela étant, le dispositif du jugement vise tous les contrats renouvelés à compter du 28 juin pour lesquels les membres n’ont pas été avisés de la limite d’utilisation de la bande passante, alors que les motifs s’attardent davantage au cas des nouveaux abonnés[24]. Selon Vidéotron, les passages suivants du jugement illustrent la méprise de la juge à ce sujet :
[4] Par ailleurs, relativement aux dommages punitifs, la requête introductive d’instance amendée traite de façon distincte les membres qui se sont abonnés pour une première fois au service IHVE de ceux qui ont renouvelé leur abonnement après que la Direction de Vidéotron ait pris la décision de limiter à 100 Go par mois l’utilisation de l’Internet et qui n’ont pas été avisés de cette limite. Ce sous-groupe n’avait pas été autorisé comme tel et le Tribunal traitera de cette question séparément. [25]
[Gras dans l’original]
[101] Vidéotron plaide que le raisonnement de la juge au soutien de la condamnation pour dommages punitifs ne vaut que pour les nouveaux abonnés. Or, malgré l’absence de motifs précis concernant les cas de renouvellements de contrats, il n’en demeure pas moins que Vidéotron pouvait et devait aviser tous ses clients de la situation avant leur engagement. La preuve révèle qu’elle pouvait facilement aviser les clients visés par les renouvellements par courrier électronique avant l’échéance de leur contrat. Ces consommateurs jouissent du même droit à une information juste et complète en vertu de l’article 228 LPC que les nouveaux abonnés. Vidéotron a passé sous silence un fait important, faisant preuve d’un comportement insouciant ou sérieusement négligent envers tous ses clients.
[102] Vidéotron plaide enfin que le montant accordé à titre de dommages punitifs est excessif, soit 3 127 000 $ (6 254 membres X 500 $/membre), montant global qui, du reste, était inconnu de la juge au moment du prononcé du jugement. Vidéotron soutient que la juge s’en est tenue au seul critère de sa situation patrimoniale afin de fixer un montant indéterminé de dommages punitifs, faisant abstraction des autres facteurs prévus à la loi.
[103] L’article 1621 C.c.Q. énonce les critères de fixation des dommages punitifs :
1621. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.
Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.
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1621. Where the awarding of punitive damages is provided for by law, the amount of such damages may not exceed what is sufficient to fulfil their preventive purpose.
Punitive damages are assessed in the light of all the appropriate circumstances, in particular the gravity of the debtor’s fault, his patrimonial situation, the extent of the reparation for which he is already liable to the creditor and, where such is the case, the fact that the payment of the reparatory damages is wholly or partly assumed by a third person.
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[104] La juge énonce correctement les principes applicables en la matière, comme en fait foi sa référence aux extraits pertinents de l’arrêt Time. Cela étant, la fixation des dommages punitifs à 500 $ par membre du sous-groupe E paraît reposer essentiellement sur la gravité de la faute et la situation patrimoniale de Vidéotron.
[105] La juge affirme ignorer le montant total de la condamnation, puisqu’au moment de prononcer son jugement, le nombre de membres faisant partie du sous-groupe E est inconnu. Cette lacune l’empêche de soupeser au moins deux des facteurs énoncés à l’article 1621 C.c.Q.
[106] D’une part, la fonction préventive des dommages punitifs dépend principalement de leur importance. Il coule de source qu’en ignorant le montant total de la condamnation en dommages punitifs, il est pour le moins hasardeux de s’avancer sur son caractère préventif ou dissuasif.
[107] Par ailleurs, il est tout aussi difficile de comparer l’étendue des dommages punitifs avec la réparation à laquelle est déjà tenu le débiteur si on ignore l’un des deux éléments.
[108] Ces simples constats démontrent que la juge fait erreur en prononçant une condamnation en dommages punitifs pour chaque membre sans en connaître de manière suffisamment précise le total.
[109] Cela n’emporte pas que sa conclusion est erronée. Ainsi, la juge tient compte de la gravité de la faute de Vidéotron. Dans Time, la Cour suprême souligne que cet élément « constitue sans aucun doute le facteur le plus important »[26].
[110] Par ailleurs, Vidéotron confirme à l’audience les données globales permettant l’analyse du quantum. Ainsi, en tenant compte des nouveaux contrats (3 654 membres) et des renouvellements (2 600 membres), la condamnation en dommages punitifs s’élève à 3 127 000 $.
[111] Il est intéressant de noter que les 6 254 clients paient un forfait de 64,90 $/mois pour un contrat à durée fixe de 12 mois, ce qui apporte des revenus annuels de 4 870 615,20 $, en excluant les gains futurs de Vidéotron provenant de la rétention d’une partie de cette clientèle lors des renouvellements de contrats ainsi que les autres services qu’elle utilise en plus d’Internet.
[112] Dans ce contexte, le facteur suivant évoqué par la Cour suprême dans Time doit être considéré :
[206] Il est également tout à fait acceptable, à notre avis, d’utiliser les dommages-intérêts punitifs, comme en common law, pour dépouiller l’auteur de la faute des profits qu’elle lui a rapportés lorsque le montant des dommages-intérêts compensatoires ne représenterait rien d’autre pour lui qu’une dépense lui ayant permis d’augmenter ses bénéfices tout en se moquant de la loi (Whiten, par. 72).[27]
[113] L’aperçu des revenus encaissés par Vidéotron auprès des membres du sous-groupe E, dans un contexte où elle savait qu’elle se donnait un avantage concurrentiel unique en offrant un service Internet illimité, ainsi que son bénéfice d’exploitation annuel qui excède 1G $ s’ajoutent à la gravité de la faute considérée par la juge. Cela permet de conclure que la condamnation pour dommages punitifs de 3 127 000 $ n’est pas à ce point excessive qu’elle commande l’intervention de la Cour.
4. La juge de première instance a-t-elle erré en ne limitant pas temporellement l’appartenance à un groupe?
[114] Les intimés soulignent par ce moyen l’absence de cloisonnement qui doit prévaloir entre les sous-groupes. Ainsi, un membre peut, selon les périodes, appartenir à divers sous-groupes.
[115] Un simple exemple permet d’illustrer le propos. Ainsi, un membre peut ne pas avoir résilié son contrat IHVE avant le 1er octobre 2007, ne pas avoir dépassé sa consommation en octobre 2007 (sous-groupe D), l’avoir dépassée en novembre et avoir payé des frais de 1,50 $ par mois par Go au-delà de la limite de 100 Go (sous-groupe A), et avoir ensuite décidé de migrer vers le forfait IHV (sous-groupe C). Il pourrait avoir plutôt choisi de ne pas migrer et de résilier son contrat (sous-groupe B).
[116] Dans la première hypothèse, ce membre fait partie, successivement, des sous-groupes A, D et C alors que dans le second cas de figure, il se retrouve dans les sous-groupes A, D et B.
[117] Vidéotron fait valoir le risque d’enrichissement indu des membres. Or, il ne saurait être question de double indemnisation dans ces circonstances. Refuser de reconnaître la perméabilité des sous-groupes entraînerait au contraire un risque, voire une certitude, de sous-indemnisation.
[118] En outre, le dispositif du jugement ne cloisonne pas explicitement les sous-groupes. Pour éviter toute ambiguïté, il convient de préciser leur perméabilité et d’indiquer qu’un même membre peut faire partie de plus d’un sous-groupe selon la période où est analysée sa situation.
5. La juge de première instance a-t-elle erré en n’accordant pas l’indemnité additionnelle sur le remboursement des taxes payées par les membres du sous-groupe A?
[119] Les intimés plaident la règle selon laquelle l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. doit être accordée, à moins que le jugement ne motive son refus. Or, le jugement est muet sous cet aspect concernant les taxes versées à Vidéotron sur les frais de surconsommation facturés aux membres.
[120] Vidéotron soutient que le jugement adhère implicitement à son argumentation voulant qu’elle ne doive verser aucune indemnité additionnelle sur les taxes, puisqu’elle les a remises aux instances compétentes.
[121] L’argument ne résiste pas à l’analyse. D’une part, la juge ne fournit aucune explication concernant ce qui semble davantage s’apparenter à une erreur d’inattention qu’à l’expression de la volonté de refuser l’indemnité de l’article 1619 C.c.Q. En outre, l’argument de Vidéotron fondé sur la remise des taxes ne saurait justifier le refus d’accorder l’indemnité additionnelle, puisque ces montants ont été déboursés à Vidéotron. Le traitement subséquent qu’en fait cette dernière est sans pertinence. Il y a lieu d’intervenir pour prévoir l’octroi de l’indemnité additionnelle sur le remboursement des taxes payées par les membres du sous-groupe A.
6. La juge de première instance a-t-elle erré en omettant d’indemniser les membres du sous-groupe B ayant un rabais multiservice?
[122] Les intimés estiment que le dispositif du jugement n’est pas conforme aux conclusions que la juge a tirées dans ses motifs, où elle détermine que les membres du sous-groupe B ont droit d’être indemnisés pour la perte des rabais multiservice[28]. Vidéotron relève l’absence de preuve à cet égard, les intimés ayant d’ailleurs demandé le recouvrement individuel pour ce sous-groupe. Elle réitère l’argument selon lequel aucune condamnation ne doit être prononcée pour les membres du sous-groupe B faute de preuve de lien de causalité.
[123] Vu la conclusion sur l’appel principal qui rejette cette partie de la réclamation des membres du sous-groupe B, l’appel incident sur cette question devient sans objet.
7. La juge de première instance a-t-elle erré en refusant de condamner l’intimée incidente à des dommages-intérêts punitifs en faveur des membres des sous-groupes A, B, C et D?
[124] Les intimés soutiennent que la conduite de Vidéotron dépassait la simple faute. Ils soulèvent entre autres qu’elle ne se souciait pas de ses clients, qu’elle a persisté et modifié unilatéralement le contrat IHVE malgré la signification de la demande d’autorisation d’exercer une action collective et qu’elle a ainsi joui de revenus supplémentaires substantiels.
[125] Vu la gravité de l’atteinte aux objectifs fondamentaux de la LPC et la situation patrimoniale de Vidéotron, les intimés estiment qu’une condamnation en dommages-intérêts punitifs de 100 $ par membre est justifiée ce qui, au total, représente 3 324 400 $.
[126] Les arguments des intimés sont sérieux. En effet, rappelons que pour justifier sa décision d’affaires de modifier unilatéralement les conditions des contrats à durée déterminée, Vidéotron a allégué être victime de l’utilisation abusive de la bande passante par certains clients. Or, il apparaît pour le moins singulier que Vidéotron parle d’utilisation abusive du service alors qu’elle en fait la promotion sur la base d’un accès illimité! Cela explique sans doute pourquoi elle n’a pas utilisé la stipulation au contrat IHVE permettant justement de le résilier en cas d’utilisation abusive.
[127] On peut aussi s’étonner du fait qu’avant d’adopter la solution ultime de modifier unilatéralement les conditions du contrat, Vidéotron n’ait pas transmis un préavis formel à la minorité de ses clients qui s’adonnait à des pratiques de « consommation excessive », ne serait-ce que pour les sensibiliser à l’importance de fermer leurs applications P2P lorsqu’ils n’utilisaient pas leur ordinateur et les mettre en garde des conséquences possibles du défaut de modifier leurs habitudes de consommation. Cette démarche simple et accessible, vu la connaissance de Vidéotron des coordonnées de ses clients, aurait pu constituer une étape préalable à la mesure radicale adoptée. Cela étonne d’autant que le contrat IHVE prévoyait l’envoi d’un préavis de 30 jours pour mettre en garde le client s’adonnant à une consommation excessive :
4.5. Utilisation abusive du service Internet de Vidéotron - Le client s'engage à ne pas utiliser les services d'accès Internet de Vidéotron de façon abusive et contraire à l'usage normal compte tenu du type d'abonnement de façon à perturber les services d'accès Internet fournis aux autres clients de Vidéotron et ce, nonobstant le service Internet auquel il est abonné. Vidéotron peut, dans les 30 jours de la transmission d'un avis au client à cet effet à l'adresse de messagerie Vidéotron, interrompre le service d'accès Internet auquel le client est abonné dans l'éventualité où ce dernier ne se conforme pas aux exigences de Vidéotron stipulées dans ledit avis.
[Je souligne]
[128] De la même façon, comme déjà mentionné, le mutisme de l’avis de modification du mois d’août concernant le droit des clients de résilier sans frais le contrat dans un délai de 30 jours ne manque pas d’étonner, venant d’une entreprise soucieuse d’agir en toute transparence.
[129] Ces observations auraient sans doute pu amener la juge à conclure différemment sur le sort de la demande en dommages punitifs pour l’ensemble des membres du groupe. Cela étant, jouissant d’une position privilégiée en regard de la preuve administrée, elle a exercé sa discrétion en expliquant son refus d’octroyer des dommages punitifs à la suite de la modification unilatérale du contrat IHVE en contravention avec les articles 12 et 40 LPC :
[80] Dès ses premières communications à ses employés, Vidéotron les avait mis en garde de ne pas promouvoir la migration vers le IHV. Le but recherché était manifestement de limiter l’utilisation et non de rechercher de nouveaux profits. La surconsommation par certains provoquait des inconvénients à la majorité des utilisateurs. Vidéotron aurait pu, se prévaloir de la clause d’abus du contrat :
4.5 Utilisation abusive du service Internet de Vidéotron - Le client s'engage à ne pas utiliser les services d'accès Internet de Vidéotron de façon abusive et contraire à l'usage normal compte tenu du type d'abonnement de façon à perturber les services d'accès Internet fournis aux autres clients de Vidéotron et ce, nonobstant le service Internet auquel il est abonné. Vidéotron peut, dans les 30 jours de la transmission d'un avis au client à cet effet à l'adresse de messagerie Vidéotron, interrompre le service d'accès Internet auquel le client est abonné dans l'éventualité où ce dernier ne se conforme pas aux exigences de Vidéotron stipulées dans ledit avis.[29]
[81] Elle a choisi de ne pas procéder par cette route. Une erreur de gestion peut-être, mais difficilement qualifiable de malicieuse ou insouciante. Les quelques tentatives faites pour parler directement à des clients surconsommateurs s’étaient mal déroulées selon la preuve présentée à l’audition.
[82] Vidéotron a cru se protéger en assortissant sa clause modificatrice d’un droit à la résiliation sans pénalité. Cela s’est avéré inefficace dans le contexte de la LPC, mais on peut certainement qualifier cette interprétation de possible et sa défense de bonne foi.
[130] Ces constats de la juge méritent déférence et les intimés ne démontrent pas d’erreurs manifestes et déterminantes qui justifient l’intervention de la Cour.
[131] Dans ce contexte, je propose donc que l’appel soit accueilli partiellement par la modification des paragraphes [101] et [106] pour qu’ils soient dorénavant libellés ainsi :
[101] SCINDE le groupe en cinq sous-groupes :
Sous-groupe a : Les membres qui ont gardé le service IHVE, ont dépassé la limite de 100 Go par mois et ont payé des frais supplémentaires;
Sous-groupe b : Les membres qui ont résilié leur contrat et qui ont engagé des frais de résiliation;
Sous-groupe c : Les membres qui ont migré au service IHV et ont payé les frais supplémentaires jusqu’à concurrence du cap afin de maintenir leur accès illimité à l’Internet;
Sous-groupe d : Les membres qui ont continué à utiliser le service IHVE sans engager de frais supplémentaires n’ayant pas dépassé 100 Go par mois;
Sous-groupe e : Les membres de A, B, C ou D qui se sont abonnés après le 28 juin et qui n’ont pas été informés de la limite d’utilisation projetée au moment de leur abonnement ou renouvellement d’abonnement au service IHVE.
DÉCLARE qu’un membre peut faire partie de plus d’un sous-groupe selon les périodes, mais ne peut, pour la même période, appartenir à plus d’un sous-groupe, sauf pour le sous-groupe E.
[106] ORDONNE à Vidéotron de déposer au greffe de la Cour supérieure le montant des taxes perçues relatives à la facturation excédentaire mentionnée au paragraphe précédent auprès des membres du sous-groupe A, avec intérêt légal ainsi que l’indemnité additionnelle depuis le 22 août 2007 dans un délai de 30 jours du présent jugement;
[132] Il conviendrait également de biffer les paragraphes [110] et [111] du jugement. Enfin, je suggère que l’arrêt soit prononcé sans frais de justice en appel, tant sur l’appel principal que sur l’appel incident, vu leur sort mitigé.
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ÉTIENNE PARENT, J.C.A. |
[1] Union des consommateurs c. Vidéotron, s.e.n.c., 2015 QCCS 3821 [Jugement entrepris].
[2] Le tableau comparatif produit sous P-2 décrit les quatre forfaits offerts par Vidéotron en 2007; on constate que les coûts mensuels de base varient de 26,95 $ à 79,95 $.
[3] Pièce D-75.
[4] Il s’agit de contrats de 12 ou 24 mois.
[5] Loi sur la protection du consommateur, RLRQ, c. P-40.1 [LPC].
[6] Comme nous le verrons plus loin, le montant total de la condamnation en dommages punitifs était inconnu lors du prononcé du jugement entrepris.
[7] Pièce P-1, « Conditions d’abonnement » tirées du site Internet de Vidéotron s.e.n.c., M.A., vol. 1, p. 140 [Pièce P-1]; Pièce D-1, Guide d’utilisation Internet par câble, M.A., vol. 1, p. 170 [Pièce D-1].
[8] Assemblée nationale, Journal des débats, 39e lég., 1re session, vol. 41, no 10, 4 novembre 2009, p. 6 (K. Weil).
[9] Jean-Louis Baudouin, Pierre-Gabriel Jobin et Nathalie Vézina, Les obligations, 7e éd., Cowansville, Yvon Blais, 2013, p. 533-534, no 442.
[10] Gérard Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, 11e éd., Paris, Presses universitaires de France, 2016, « déterminable ».
[11] Didier Lluelles et Benoît Moore, Droit des obligations, 2e éd., Montréal, Thémis, 2012, p. 1279-1280, nos 2218-2220.
[12] Richard c. Time Inc., 2012 CSC 8, paragr. 111-128 et 145 (Time]; Caroline Jonnaert et Julie Maronani, « L’arrêt Richard c. Time Inc. ou quand les petits caractères ne sont pas la formule gagnante », (2012) 24 C.P.I. 641, p. 659.
[13] Time, supra, note 12, paragr. 112; Nichols c. Toyota Drummondville (1982) inc., [1995] R.J.Q. 746, p. 749 (C.A.).
[14] Time, supra, note 12.
[15] Voir aussi au même effet : Banque de Montréal c. Marcotte, [2014] 2 R.C.S. 725, paragr. 93.
[16] Time, supra, note 12, paragr. 125-126.
[17] Brault & Martineau inc. c. Riendeau, 2010 QCCA 366, paragr. 42.
[18] Pièce D-79C.1.
[19] Ibid. cette pièce indique la date de la résiliation et la date d’échéance du contrat de chaque membre.
[20] Un décompte de la liste des résiliations, produite sous la pièce D-79C.1, permet de constater qu’environ 25 % des résiliations sont survenues en 2008, soit plus de trois mois après la date d’entrée en vigueur des modifications le 1er octobre 2007.
[21] Montréal (Ville de) c. Biondi, 2013 QCCA 404.
[22] En aval, IHV offre une vitesse de 7 Mbit/s au lieu de 10 Mbit/s pour IHVE, alors qu’en amont, IHV offre une vitesse de 820 Kbit/s au lieu de 900 Kbit/s pour IHVE.
[23] Banque de Montréal c. Marcotte, 2014 CSC 55.
[24] Jugement entrepris, paragr. 85.
[25] Id., paragr. 4.
[26] Time, supra, note 12, paragr. 200.
[27] Id., paragr. 206.
[28] A.A.I., p. 31, paragr. 19-22.
[29] Pièce P-1.