Décision

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V.M. c. Directeur de l'état civil

2022 QCCS 3175

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

 

 

 

 :

500-17-119125-212

 

 

 

DATE :

26 août 2022

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

 J. Sébastien Vaillancourt, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

V... M...

et

J... P...

et

N... D...

Demandeurs

c.

LE DIRECTEUR DE L’ÉTAT CIVIL

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC

Défendeurs

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT SUR LA DEMANDE MODIFIÉE DES DEMANDEURS

POUR ORDONNANCE DE SAUVEGARDE

______________________________________________________________________

 

MISE EN GARDE : Interdiction de divulgation ou diffusion : le Code de procédure civile « C.p.c. » interdit de divulguer ou diffuser toute information permettant d’identifier une partie ou un enfant dont l’intérêt est en jeu dans une instance en matière familiale, sauf sur autorisation du Tribunal (articles 15 et 16 C.p.c.).

1.                 Contexte    

[1]               Dans le cadre d’une Demande en jugement déclaratoire, pourvoi en contrôle judiciaire et avis au Procureur général du Québec modifiée (le Recours principal), les demandeurs demandent au Tribunal de déclarer que le Code civil du Québec permet à un enfant d’avoir plus de deux parents, ou, subsidiairement, de déclarer inconstitutionnelles certaines dispositions de ce Code qui l’interdiraient.

[2]               Les parties s’affairent actuellement à mettre le dossier en état, ce qu’elles doivent faire au plus tard le 31 mars 2023 en vertu d’une ordonnance de gestion prononcée le 11 juillet 2022 par le soussigné[1], qui assure la gestion particulière de l’instance.

[3]               En cours d’instance, les demandeurs présentent une demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde. Cette demande, sur laquelle porte le présent jugement, s’inscrit dans le contexte suivant.

[4]               Suivant les procédures au dossier[2], madame M... et monsieur D... sont mariés depuis 2015. Ils sont les parents de trois enfants mineurs.

[5]               Quelques années après le mariage, madame M... rencontre madame P..., qu’elle présente ensuite à monsieur D.... Les trois débutent alors une relation amoureuse puis décident de cohabiter en 2020. Ils décideront ensuite d’avoir un enfant.

[6]               Madame P... tombe effectivement enceinte. Le père biologique est monsieur D.... Puisque les trois demandeurs souhaitent avoir les droits et obligations d’un parent à l’égard de l’enfant à naître, ils introduisent leur recours principal au mois de novembre 2021.

[7]               Le [...] 2022, madame P... donne naissance à l’enfant éventuellement prénommé X. Les demandeurs soumettent alors au défendeur, le Directeur de l’état civil (DEC), une déclaration de naissance dans laquelle ils désignent mesdames M... et P... comme mères de l’enfant, et ce, « sous toutes réserves et sans admission » en raison du fait « que le formulaire actuel du Directeur de l’état civil ne prévoit que la possibilité d’identifier deux parents »[3]. Monsieur D... ne déclare donc pas sa paternité.

[8]               Le 14 juin 2022, le DEC refuse d’établir la filiation telle que demandée au motif que monsieur D... a démontré son intention d’établir sa paternité à l’égard de l’enfant en introduisant le recours principal. Selon le DEC, le Code civil du Québec ne permet pas, en conséquence, d’établir la filiation à l’égard de madame M.... Dans ces circonstances, il ne dresse l’acte de naissance qu’avec la filiation maternelle biologique de madame P..., tout en avisant les parties que la paternité de monsieur D... peut aussi être établie si elles le désirent[4].

[9]               À la suite de l’introduction de la Demande pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, les parties s’entendent, « sous toutes réserves et sans admission », sur le prénom de l’enfant à être inscrit au registre de l’état civil – cette question ayant fait l’objet de discussions avec le DEC – et pour que celui-ci émette un acte de naissance indiquant que madame P... est la mère de l’enfant[5].

[10]           Le 20 juillet 2022, le DEC confirme l’inscription, suivant ces modalités, de la naissance de X au registre de l’état civil du Québec[6]. La filiation de l’enfant est ainsi uniquement établie à l’égard de madame P... de sorte que l’enfant ne possède, au registre de l’état civil, qu’un seul parent.

[11]           Par leur demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, les demandeurs demandent essentiellement que la maternité de madame M... soit établie dès maintenant à l’égard de X, en plus de celle de madame P..., et que cette filiation soit inscrite au registre de l’état civil par le DEC. Les conclusions de la demande modifiée se lisent ainsi :

ACCUEILLIR la présente Demande d’émission d’une ordonnance de sauvegarde modifiée;

ORDONNER la révision ou l’annulation de la décision du Directeur de l’état civil, rendue le (…) 20 juillet 2022, refusant la déclaration de naissance telle que soumise par les demandeurs et établissant la filiation uniquement à l’égard de la demanderesse J... P..., pièce P-3.3;

ORDONNER au Directeur de l’état civil de faire les inscriptions nécessaires au registre de l’état civil, afin d’établir la filiation des demandeurs à l’égard de la personne concernée, pour qu’il se lise comme suit :

 

Nom de famille :

X (…)

Prénoms :

X

Sexe :

Masculin

Lieu de naissance :

Ville A

Date de naissance :

[...] 2022

 

Nom de la mère :

V... M...

Nom de la mère :

J... P...

 

ORDONNER au Directeur de l’état civil d’émettre sans délai un acte de naissance conforme au jugement à être rendu;

PRENDRE ACTE de la réserve de droit des demandeurs quant à leur demande de reconnaissance tri-parentale sur le fond de la Demande (P-1);

PRENDRE ACTE du consentement de N... D... à l’établissement de la filiation de la personne concernée pendant l’instance et de façon permanente dans l’éventualité d’une décision défavorable finale sur le fond de la Demande en jugement déclaratoire, pourvoi en contrôle judiciaire et avis au Procureur général des Demandeurs;

ORDONNER au greffier de cette cour de notifier au Directeur de l’état civil tout jugement à être rendu, lorsque celui-ci sera passé en force de chose jugée;

DISPENSER, au besoin, les demandeurs de fournir un cautionnement;

ORDONNER que le jugement à être rendu valle jusqu’à jugement final sur la Demande en jugement déclaratoire, pourvoi en contrôle judiciaire et avis au Procureur général ;

LE TOUT avec les frais de justice.

[Transcription telle quelle, les italiques et caractères gras sont dans l’original]

[12]           Il importe de souligner que monsieur D... consent en effet à l’établissement de la filiation de l’enfant à l’égard de mesdames M... et P... seulement, et ce, tant pendant l’instance que de façon permanente si les demandeurs n’obtenaient pas gain de cause dans le cadre de leur recours principal[7].

[13]           Il ne s’agit donc pas, à ce stade des procédures, de décider si un enfant peut avoir trois parents – ce qui sera décidé par le juge du fond. Il s’agit plutôt de décider si madame M... peut être inscrite au registre de l’état civil à titre de mère de l’enfant, en plus de madame P..., sachant que monsieur D... souhaite aussi, mais seulement au moment du procès au fond, être inscrit au registre, à titre de père de l’enfant.

2.                 Position des demandeurs

[14]           Les demandeurs plaident qu’ils satisfont aux critères « de sursis d’une décision administrative – les critères de l’ordonnance de sauvegarde »[8], soit l’existence d’une question sérieuse à juger ou dune apparence de droit, l’existence d’un préjudice irréparable, la prépondérance des inconvénients et l’urgence.

[15]           En ce qui concerne la question sérieuse à trancher et l’apparence de droit, les demandeurs soutiennent que la filiation recherchée au stade de l’ordonnance de sauvegarde, soit la filiation à l’égard de deux personnes du même sexe, est reconnue par la loi. Ils ajoutent que la filiation peut être établie par reconnaissance volontaire en vertu des articles 526 et 527 C.c.Q. comme souhaite précisément le faire madame M....

[16]           Ils plaident aussi que le DEC a outrepassé ses pouvoirs en refusant d’établir la filiation recherchée par les demandeurs étant donné que la loi ne lui accorde aucun pouvoir discrétionnaire et qu’il ne possède à cet égard qu’un pouvoir lié. Selon eux, il aurait dû établir la filiation de l’enfant conformément aux informations inscrites à la déclaration de naissance, sans se poser de questions, vu les reconnaissances volontaires de maternité de mesdames M... et P.... En conséquence, la décision du DEC est ultra vires et doit être dès maintenant annulée.

[17]           Les demandeurs soutiennent par ailleurs que la décision du DEC cause un préjudice sérieux et irréparable à l’enfant puisqu’elle le prive de son droit fondamental et établi de bénéficier d’une filiation à l’égard de deux parents. Ils ajoutent que cette décision leur cause un préjudice sérieux et irréparable en ce qu’elle prive madame M... du bénéfice des prestations parentales, dont celles provenant du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP), ce qui l’empêche de bénéficier d’un congé parental qui lui permettrait de passer du temps avec l’enfant.

[18]           Les demandeurs plaident également que la prépondérance des inconvénients penche clairement en leur faveur puisque refuser l’établissement de la filiation à l’égard de madame M... « équivaut à annihiler le compromis valide et légitime qu’ils ont fait dans l’éventualité d’une décision défavorable sur le fond », alors que la reconnaissance du statut de mères à l’égard de mesdames M... et P... « ne cause aucun préjudice, la filiation à l’égard de deux personnes de même sexe étant reconnue au Québec »[9]. Ils concluent que le seul qui pourrait subir un préjudice à la suite de l’émission de l’ordonnance de sauvegarde recherchée est monsieur D... mais que puisque celui-ci y consent, il n’y a pas lieu d’en tenir compte.

[19]           Enfin, les demandeurs soutiennent que la décision du DEC les place « dans une situation intenable » et que cette situation ne peut subsister « vis-à-vis du RQAP »[10].

3.                 Position des défendeurs

[20]           De leur côté, les défendeurs soumettent plusieurs moyens de défense pour demander le rejet de la demande d’ordonnance de sauvegarde. Certains sont de l’ordre procédural, alors que d’autres concernent le mérite de la demande.

[21]           D’une part, les défendeurs soutiennent que la demande d’ordonnance de sauvegarde n’est pas le recours approprié et qu’elle est prématurée. D’autre part, et subsidiairement, ils soutiennent que si le Tribunal considère que le véhicule procédural est le bon et que la demande doit être analysée suivant les critères applicables à la demande d’ordonnance de sauvegarde, la demande doit néanmoins être rejetée au motif qu’elle ne satisfait pas à ces critères.

[22]           D’abord, les défendeurs soutiennent que la demande d’ordonnance de sauvegarde est en réalité un pourvoi en contrôle judiciaire déguisé à l’égard de la décision du DEC. Le véhicule procédural employé par les demandeurs n’est donc pas le bon.

[23]           Les défendeurs ajoutent que l’ordonnance de sauvegarde est un pouvoir de gestion du Tribunal qui lui permet, au cours de l’instance, de préserver les droits des parties. Une telle demande est donc toujours l’accessoire d’une demande principale, à être tranchée au fond. Or, aucune demande au fond n’est présentée par les demandeurs à l’égard de la décision du DEC de sorte qu’« Il n’y a aucune corrélation entre l’ordonnance recherchée et le litige sur le fond. »[11] Selon les défendeurs, les demandeurs ne peuvent donc pas présenter une demande d’ordonnance de sauvegarde à ce sujet[12]. Les défendeurs ajoutent que la demande des demandeurs étant de la nature d’une injonction, une ordonnance de sauvegarde ne peut être prononcée que lorsque les parties sont en attente d’une date d’audience pour procéder sur une demande d’injonction interlocutoire. Or, aucune demande d’injonction interlocutoire n’est présentée en l’espèce.

[24]           Les défendeurs ajoutent que la nature même des conclusions recherchées ne relève pas de celle d’une demande d’ordonnance de sauvegarde. En effet, une ordonnance de sauvegarde est, par définition, d’une durée temporaire qui ne peut excéder six mois[13]. Or, plaident-ils, la demande d’ordonnance de sauvegarde ne vise pas à « sauvegarder » les droits des demandeurs mais, plutôt, à trancher le fond du litige, au moins en partie, en établissant dès maintenant un lien de filiation entre l’enfant et madame M.... De plus, comment une telle filiation pourrait-elle être créée de façon temporaire et risquer d’être infirmée par un jugement final ? Prononcer l’ordonnance recherchée transformerait donc la filiation en un objet juridique mouvant, ce qu’elle n’est pas et ne doit pas être.

[25]           Subsidiairement, les défendeurs plaident qu’aucun des critères applicables à la demande d’ordonnance de sauvegarde n’est satisfait par la demande des demandeurs.

4.                 Analyse et décision

[26]           Les défendeurs ont raison de soulever le fait qu’il est particulier que les demandeurs recherchent la « révision ou l’annulation » de la décision du DEC alors que celle-ci ne fait l’objet d’aucune conclusion du recours principal. Toutefois, le lien entre la demande d’ordonnance de sauvegarde et le recours principal existe et ces demandes suivent toutes deux un fil conducteur : les demandeurs, dans le recours principal, demandent que la filiation de lenfant soit établie à l’égard de chacun d’eux, alors qu’ils demandent qu’elle le soit à l’égard de madame M... dans la demande d’ordonnance de sauvegarde. La demande d’ordonnance de sauvegarde est donc un premier pas vers leur objectif ultime.

[27]           Si cela avait été un enjeu, le Tribunal aurait demandé aux demandeurs de modifier dès maintenant leur recours principal pour y ajouter une conclusion visant la décision du DEC tel qu’ils ont déjà annoncé avoir l’intention de le faire. Toutefois, cela n’est pas nécessaire car même si le recours principal contenait une conclusion demandant la révision ou l’annulation de la décision du DEC, la demande d’ordonnance de sauvegarde aurait connu le même sort.

[28]           Les demandeurs réfèrent par ailleurs, dans leur plan d’argumentation, à une demande de sursis de la décision du DEC, bien que leur demande d’ordonnance de sauvegarde ne contienne aucune conclusion en ce sens. Encore une fois, cela est sans conséquence puisque la décision du Tribunal est la même, que la demande soit considérée comme une demande de sursis ou d’ordonnance de sauvegarde.

[29]           En effet, le Tribunal estime que la demande d’ordonnance de sauvegarde doit être rejetée. Voici pourquoi.

4.1   Principes de droit

4.1.1           La demande d’ordonnance de sauvegarde

[30]           Les demandeurs, sur qui repose le fardeau de preuve[14], doivent démontrer, pour obtenir une ordonnance de sauvegarde, que :

30.1.           la question à trancher est sérieuse;

30.2.           ils subiront un préjudice sérieux ou irréparable si l’ordonnance de sauvegarde n’est pas accordée;

30.3.           la prépondérance des inconvénients penche en leur faveur;

30.4.           il y a urgence à ce que l’ordonnance recherchée soit émise[15].

[31]           Ces conditions sont cumulatives. De plus, puisque la demande est de nature mandatoire, les demandeurs doivent établir qu’ils bénéficient d’une forte apparence de droit[16]. La Cour suprême, sous la plume du juge Brown, s’exprime ainsi à cet égard :

[17] Ceci m’amène à ce qu’implique l’établissement d’une « forte apparence de droit ». Les tribunaux ont utilisé diverses formulations, exigeant que le demandeur présente la preuve [TRADUCTION] « convaincante et manifeste d’une possibilité de succès » ; qu’il présente une preuve [TRADUCTION] « convaincante et manifeste » ou « exceptionnellement convaincante et manifeste » ; qu’il a [TRADUCTION] « nettement raison » ;  qu’il y a une [TRADUCTION] « forte probabilité » ou une « forte chance de succès » ; qu’il y a une [TRADUCTION] « grande assurance » quant au succès ; une [TRADUCTION] « perspective importante » de succès ; ou un succès [TRADUCTION] « presque assuré » . Toutes ces formulations ont en commun d’imposer au demandeur le fardeau de présenter une preuve telle qu’il serait très susceptible d’obtenir gain de cause au procès. Cela signifie que, lors de l’examen préliminaire de la preuve, le juge de première instance doit être convaincu qu’il y a une forte chance au regard du droit et de la preuve présentée que, au procès, le demandeur réussira ultimement à prouver les allégations énoncées dans l’acte introductif d’instance.[17]

[Renvois omis, le Tribunal souligne]

[32]           Le juge Jean-François Émond, de la Cour d’appel, écrivait ceci au sujet de l’ordonnance de sauvegarde en matière d’injonction[18]:

[57] En pareille matière, l’ordonnance de sauvegarde demeure un outil de gestion au sens de l’article 158 C.p.c. à la seule fin de permettre aux parties de passer rapidement de l’étape de l’injonction provisoire à celle de l’interlocutoire.

4.1.2           La demande de sursis

[33]           La demande de sursis d’une décision administrative est quant à elle assujettie aux mêmes critères, à l’exception de l’urgence. Ajoutons que le sursis est une mesure exceptionnelle[19].

4.2   Application des principes

4.2.1           La question sérieuse – la forte apparence de droit

[34]           Le Tribunal n’a pas à se demander, à ce stade-ci des procédures, si les demandeurs jouissent d’une forte apparence de droit d’avoir gain de cause sur leur demande principale de faire reconnaître le droit d’un enfant d’avoir trois parents, puisque ce n’est pas ce qu’ils demandent au moyen de leur demande pour ordonnance de sauvegarde. Il doit plutôt se demander s’ils bénéficient d’une forte apparence de droit d’obtenir, au fond, que madame M... soit reconnue comme mère de l’enfant, ayant en tête qu’à ce stade-ci, les dispositions en cause du Code civil sont présumées valides[20]. La demande d’ordonnance de sauvegarde doit donc être examinée à la lumière du droit actuel.

[35]           L’obligation de démontrer l’existence d’une forte apparence de droit est ici d’autant plus importante qu’une décision favorable aux demandeurs, à ce stade-ci, puis défavorable, au fond, entraînerait des modifications à l’acte d’état civil de l’enfant et une instabilité au registre d’état civil qu’il faut tenter d’éviter. En effet, une ordonnance de sauvegarde ne jouit pas de l’autorité de la chose jugée et ne lie pas le juge du fond[21].

[36]           Le Code civil prévoit actuellement, comme seuls moyens d’établissement de la filiation, la filiation par le sang, la filiation des enfants nés d’une procréation assistée et la filiation par adoption.

[37]           Il n’est pas contesté que la filiation de X, à l’égard de madame M..., ne peut être établie par le sang, les parents biologiques de l’enfant étant madame P... et monsieur D....

[38]           Par ailleurs, il n’est pas question, ici, d’adoption.

[39]           Il ne reste donc que la filiation de l’enfant né d’une procréation assistée.

[40]           Les articles 538 et 538.1 C.c.Q. prévoient ce qui suit à ce sujet :

538. Le projet parental avec assistance à la procréation existe dès lors qu’une personne seule ou des conjoints ont décidé, afin d’avoir un enfant, de recourir aux forces génétiques d’une personne qui n’est pas partie au projet parental.

538.1. La filiation de l’enfant né d’une procréation assistée s’établit, comme une filiation par le sang, par l’acte de naissance. À défaut de ce titre, la possession constante d’état suffit; celle-ci s’établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation entre l’enfant, la femme qui lui a donné naissance et, le cas échéant, la personne qui a formé, avec cette femme, le projet parental commun.

Cette filiation fait naître les mêmes droits et obligations que la filiation par le sang.

[41]           Le Tribunal comprend que madame P... est tombée enceinte à la suite d’une relation sexuelle avec monsieur D.... Peut-on conclure que les demandeurs ont convenu d’un « projet parental avec assistance à la procréation » ?

[42]           Pour que soit établie la filiation d’un enfant né d’une procréation assistée, l’article 538 C.c.Q. prévoit que le parent seul ou les conjoints doivent avoir eu recours aux forces génétiques d’une personne qui n’est pas partie au projet parental. Or, en l’espèce, monsieur D..., qui serait l’auteur des forces génétiques dans un tel scénario, est précisément partie au projet parental. Le chapitre de la filiation des enfants nés d’une procréation assistée n’est en conséquence d’aucun secours aux demandeurs à ce stade-ci des procédures. Comme l’écrit le juge Kasirer, alors de la Cour d’appel :

[87] […] Le juge a bien compris l’enjeu. Si M. M... était un tiers externe au projet parental de M. L... et Mme  R..., la procréation assistée servirait, d’une part, d’assise à la filiation de M. L... à l’égard de l’enfant et exclurait, d’autre part, la paternité du père biologique. En revanche, si le rôle de M. M... dans l’arrangement tripartite était incompatible avec ce projet parental, la filiation serait déterminée par le jeu des règles de la filiation par le sang.[22]

[Le Tribunal souligne]

[43]           Les demandeurs insistent par ailleurs sur le fait qu’il est maintenant établi, au Québec, qu’un enfant peut avoir deux parents du même sexe, et que madame M... devrait pouvoir reconnaître volontairement sa maternité, comme le permettent les articles 526 et 527 C.c.Q. :

§ 3.    De la reconnaissance volontaire

 

526. Si la maternité ou la paternité ne peut être déterminée par application des articles qui précèdent, la filiation de l’enfant peut aussi être établie par reconnaissance volontaire.

 

527. La reconnaissance de maternité résulte de la déclaration faite par une femme qu’elle est la mère de l’enfant.

 

La reconnaissance de paternité résulte de la déclaration faite par un homme qu’il est le père de l’enfant.

[44]           Il ne fait effectivement pas de doute qu’au Québec, un enfant peut avoir deux parents du même sexe. La question n’est pas là. Le véritable enjeu est de savoir si madame M..., qui ne possède pas de lien biologique avec l’enfant, démontre qu’elle bénéficie d’une forte apparence du droit de pouvoir reconnaître volontairement sa maternité.

[45]           Confrontés au fait que les articles 526 et 527 C.c.Q. se trouvent dans le chapitre premier, « De la filiation par le sang », alors qu’il ne peut s’agir de filiation par le sang dans le cas de madame M..., les demandeurs soutiennent, jurisprudence à l’appui[23], que les titres et sous-titres « n’ont pas vocation à modifier le sens que doivent recevoir les dispositions »[24] qui se trouvent dans les sections en question du Code civil.

[46]           De leur côté, les défendeurs plaident, au contraire, aussi jurisprudence à l’appui[25], que « Les chapitres du C.c.Q. sont présentés de façon architectonique, et [que] cette organisation sert à préciser la signification des articles s’y trouvant, donnant un sens à l’ensemble et leur donnant effet. »[26]

[47]           Le Tribunal estime qu’à ce stade des procédures, les demandeurs ne démontrent pas bénéficier d’une forte apparence du droit de pouvoir reconnaître volontairement la maternité de madame M... hors du cadre d’une filiation par le sang. Lui reconnaître une forte apparence du droit de le faire enlèverait toute signification à l’organisation de ce chapitre du Code civil.

[48]           C’est d’ailleurs aussi l’avis du professeur Alain Roy, qui écrit que « […] la reconnaissance volontaire est la quatrième et dernière preuve non judiciaire de la filiation par le sang. »[27]

[49]           En conséquence, à ce stade-ci des procédures, madame M... ne peut reconnaître volontairement sa maternité à l’égard de X au sens des articles 526 et 527 C.c.Q.

[50]           Bien que la question soit maintenant théorique, vu la conclusion du Tribunal sur la reconnaissance volontaire, il y a lieu de traiter sommairement de l’argument des demandeurs selon lequel le DEC « ne jouit pas de pouvoir discrétionnaire lui permettant de refuser la reconnaissance de la filiation demandée par les demandeurs » puisqu’il s’agit d’un pouvoir lié.

[51]           Selon l’auteur Patrice Garant :

Suivant d’éminents auteurs français, il y a pouvoir discrétionnaire : ʺ […] lorsqu’en présence de circonstances de fait données, l’autorité administrative est libre de prendre telle ou telle décision, a le choix entre ces décisions, autrement dit lorsque sa conduite ne lui est pas dictée à l’avance par le droit ʺ. Il y a pouvoir lié lorsque : ʺ […] selon qu’il se trouve en face de telle ou telle circonstance de fait, l’administrateur est tenu de prendre telle ou telle décision ; il n’a plus le choix entre plusieurs décisions, sa conduite lui est dictée d’avance par la règle de droit ʺ.[28]

[Renvois omis]

[52]           Le pouvoir du DEC provient de l’article 109 C.c.Q. :

109. Le directeur de l’état civil dresse l’acte de l’état civil en signant la déclaration qu’il reçoit, ou en l’établissant lui-même conformément au jugement ou à un autre acte qu’il reçoit. Pour l’établir, il procède, s’il y a lieu, à une enquête sommaire pour obtenir les informations requises.

 

Il date la déclaration, lui attribue un numéro d’inscription et l’insère dans le registre de l’état civil; elle constitue, dès lors, l’acte de l’état civil.

[Le Tribunal souligne]

[53]           Cette disposition prévoit que le DEC peut procéder à « une enquête sommaire ». Il n’est pas nécessaire, dans le cadre de la présente demande, de délimiter l’étendue du pouvoir du DEC de procéder à une enquête sommaire. À ce stade des procédures, on ne peut, toutefois, lui reprocher d’avoir pris en considération le fait que monsieur D..., qui possède un lien biologique avec l’enfant, entend établir sa paternité lors de l’audition au fond[29], et d’en avoir conclu que dans l’état actuel du droit, rien, dans la loi, ne permet d’établir la filiation de l’enfant à l’égard de madame M....

[54]           Le Tribunal ajoute que la deuxième phrase du premier alinéa de l’article 109 C.c.Q. a été ajoutée à cette disposition en 2004. Auparavant, cette disposition ne permettait pas au DEC de procéder à quelque enquête que ce soit. Comme l’écrit la Cour d’appel de l’Ontario, citée par l’auteur Pierre-André Côté, « En général, un tribunal doit présumer que le législateur exprime ce qu’il veut dire et veut dire ce qu’il exprime. »[30] Il faut donc en conclure que le DEC peut enquêter, bien que sommairement, et tirer des conclusions du résultat de son enquête.

[55]           En conclusion, même s’il est indéniable que la question à trancher soit sérieuse, les demandeurs n’ont pas démontré qu’ils bénéficient d’une forte apparence de droit.

4.2.2           Préjudice sérieux ou irréparable

[56]           Il est vraisemblable que madame M... subisse un préjudice si elle ne peut prendre un congé d’emploi pour être aux côtés de l’enfant pendant sa première année parce qu’elle n’a pas droit aux prestations parentales. Il est également vraisemblable que l’enfant subisse un certain préjudice du fait que madame M... ne pourra être à ses côtés en tout temps pendant cette période. Certaines remarques s’imposent toutefois.

[57]           Tout d’abord, la preuve ne permet pas de conclure que les demandeurs sont financièrement incapables d’assumer le coût d’un congé sans traitement de madame M.... Leurs avis de cotisation[31] démontrent bien qu’ils ont gagné des revenus de 95 500 $ (monsieur D...), 77 656 $ (madame M...) et 55 186 $ (madame P...) en 2021, mais cela ne prouve pas qu’il soit financièrement impossible pour eux que madame M... prenne un congé.

[58]           De plus, l’enfant pourra bénéficier de la présence de madame P..., si elle prend un congé, et il aurait pu bénéficier de la présence de monsieur D... s’il avait déclaré sa paternité au DEC. Ainsi, si monsieur D... est incapable de prendre un congé, cela découle de la décision des demandeurs de ne pas déclarer sa paternité[32]. On en retient donc que l’enfant aurait pu bénéficier de la présence de ses deux parents biologiques pendant sa première année n’eut été de cette décision.

[59]           Quant à l’argument des demandeurs suivant lequel ils pourraient être appelés à rembourser à l’État des prestations parentales auxquels ils estiment avoir droit, rappelons que cela ne serait pas le cas si monsieur D... déclarait sa paternité puisqu’alors, tant lui que madame P... auraient droit aux prestations. Ceci étant, si madame P... demande et reçoit des prestations malgré le présent jugement, elle aura évidemment à faire face aux conséquences de sa décision.

[60]           De plus, le Tribunal ne retient pas l’argument des demandeurs selon lequel le préjudice sera irréparable parce que pour madame M..., « n’ayant pas de lien biologique avec X, il est primordial de permettre d’établir des liens affectifs en bas âge »[33].

[61]           En effet, d’une part, le Tribunal ne voit pas pourquoi il est plus important d’établir des liens affectifs du seul fait qu’il n’y a pas de lien biologique. D’autre part, rien n’empêche madame M... d’établir des liens affectifs avec X malgré la décision du DEC. De plus, la preuve ne permet pas de conclure que madame M... serait incapable d’établir des liens affectifs si elle ne pouvait prendre un congé. Une telle preuve pourrait d’ailleurs être étonnante puisqu’elle pourrait signifier qu’un parent qui travaille pendant la première année de son enfant est incapable d’établir des liens affectifs avec lui.

[62]           Finalement, le Tribunal ne croit pas que l’enfant subira un préjudice irréparable si sa filiation n’est pas immédiatement établie à l’égard de madame M...[34]. Quant au fait qu’elle ne sera pas établie à l’égard de deux parents, il s’agit avant tout, rappelons-le, d’une conséquence de la décision des demandeurs de ne pas déclarer la paternité de monsieur D... au DEC.

[63]           Pour toutes ces raisons, le Tribunal estime que les demandeurs ne se sont pas déchargés de leur fardeau de démontrer l’existence d’un préjudice sérieux ou irréparable.

4.2.3           La prépondérance des inconvénients

[64]           Laquelle des parties subira le plus grand préjudice selon que l’ordonnance de sauvegarde est accordée ou refusée ?[35]

[65]           La demande d’ordonnance de sauvegarde, même si elle ne soulève aucun argument d’ordre constitutionnel, est présentée à l’intérieur d’un litige en matière constitutionnelle qui oppose les demandeurs à un organisme public, le DEC. Dans ces circonstances, la prépondérance de la preuve doit être examinée « sous un angle plus large et [on doit] tenir compte des intérêts du grand public auquel ces services sont destinés.»[36]

[66]           Il est manifeste que le rejet de la demande est susceptible de causer des inconvénients aux demandeurs : aucun droit parental n’est accordé à madame M..., elle ne peut percevoir de prestations parentales et la filiation de l’enfant à son égard n’est pas établie.

[67]           Toutefois, l’intérêt public subirait aussi des inconvénients si l’ordonnance recherchée était accordée: l’acte de l’état civil de l’enfant établi par l’ordonnance de sauvegarde qui, par définition, possède un caractère temporaire, devrait être modifié en cas de jugement au fond défavorable aux demandeurs. Cela donne au registre d’état civil un caractère temporaire qui ne peut être accepté et n’est pas dans l’intérêt public.

[68]           Dans ces circonstances, les demandeurs n’ont pas démontré que la prépondérance de la preuve les favorise.

4.2.4           L’urgence

[69]           Le Tribunal n’est pas convaincu qu’il soit urgent de prononcer l’ordonnance de sauvegarde recherchée par les demandeurs.

[70]           En effet, tel que déjà mentionné, le rejet de la demande d’ordonnance de sauvegarde n’empêche pas l’établissement d’un lien affectif entre l’enfant et madame M....

[71]           Il est vrai que le refus d’émettre l’ordonnance recherchée empêchera madame M... de percevoir des prestations parentales, mais la preuve ne permet pas de conclure à l’existence d’un préjudice à cet égard, d’autant plus que, tel que déjà mentionné, monsieur D... pourrait en percevoir s’il déclarait sa paternité.

* * * * * * * * * * * * * *

5.                 Remarques finales et conclusion

[72]           Par le présent jugement, le Tribunal ne conclut pas qu’un enfant n’a pas le droit d’avoir deux parents du même sexe. Tel que déjà mentionné, ce droit existe et est bien établi.

[73]           En réalité, la demande d’ordonnance de sauvegarde ne vise pas tant à sauvegarder les droits des demandeurs, mais plutôt à créer des droits, et plus particulièrement celui d’établir la filiation d’un enfant à l’égard d’une personne qui n’a aucun lien biologique avec lui alors que deux autres personnes, qui possèdent un lien biologique avec l’enfant, souhaitent aussi établir leur filiation. Accorder la demande des demandeurs pour ordonnance de sauvegarde, alors qu’aucune preuve complète n’a été administrée, conduirait à préjuger du fond, ce qu’il n’y a pas lieu de faire.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[74]           REJETTE la demande d’ordonnance de sauvegarde;

[75]           ORDONNE que toute version publiée du présent jugement assure l’anonymat des parties et des enfants de l’une ou l’autre d’entre elles;

[76]           LE TOUT sans frais de justice, vu la nature du litige.

 

 

__________________________________

 J. sÉBASTIEN VAILLANCOURT, j.c.s.

 

 

 

 

Me Marc-André Landry

Me Alexandra Criquet

Avocats des demandeurs

LCM AVOCATS INC.

 

 

Me Marie-France Le Bel

Me Éric Bellemare

Avocats des défendeurs

BERNARD, ROY (JUSTICE-QUÉBEC)

 

Date d’audience :

18 août 2022

 


[1]  2022 QCCS 2678.

[2]  Aucune preuve testimoniale n’a jusqu’à présent été administrée.

[3]  Demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, par. 5 et 6.

[4]  Pièce P-3.

[5]  Demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, par. 10.2.

[6]  Pièce P-3.3.

[7]  Il l’écrit tant dans la demande d’ordonnance de sauvegarde que dans sa déclaration sous serment qui l’accompagne.

[8]  Plan d’argumentation des demandeurs, titre I.

[9]  Demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, par. 66 et 67.

[10]  Id., par. 69 et 72.

[11]  Plan d’argumentation des défendeurs, par. 14.

[12]  À l’audience, l’avocat des demandeurs annoncent l’intention de ses clients de modifier leur recours principal pour y attaquer, au fond, la décision du DEC.

[13]  Art. 158 par. 8 C.p.c.

[14]  Art. 2803 C.c.Q.

[15]  La juge Marie St-Pierre, siégeant comme juge unique, résume les critères applicables dans Beauchemin c. Wart, 2018 QCCA 926, par. 13.

[16]  R. c. Société Radio-Canada, 2018 CSC 5, [2018] 1 R.C.S. 196, par. 15.

[17]  Id.

[18]  Limouzin c. Side City Studios Inc., 2016 QCCA 1810.

[19]  RJR - MacDonald inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311 et Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110.

[20]  Hak c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCA 2145, par. 105 (requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2020-04-09) 39016).

[21]  Droit de la famille — 21366, 2021 QCCA 453, par. 13.

[22]  Droit de la famille — 191677, 2019 QCCA 1386 (requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.A., 2020-04-02) 38860).

[23]  Law Society of Upper Canada c. Skapinker, [1984] 1 R.C.S. 357, par. 22 à 24, et 9270-5912 Québec inc. c. Municipalité du canton de Stanstead, 2022 QCCS 1017, par. 68.

[24]  Plan d’argumentation des demandeurs, par. 9.

[25]  Dell Computer Corp. c. Union des consommateurs, 2007 CSC 34, [2007] 2 R.C.S. 801.

[26]  Plan d’argumentation des défendeurs, par. 37.

[27]  Roy, Alain, Commentaire sur l'article 527 C.c.Q., EYB2014DCQ819 (le Tribunal souligne).

[28]  Garant, Patrice, Droit administratif, 7e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2017, p. 192.

[29]  Le DEC l’a appris à la suite de la notification du recours principal.

[30]  Ontario Ministry of Health and Long-Term Care/Ontario Health Insurance Plan v. Georgiou, (2002), 61 O.R. (3d) 285 (Ont. C.A.), cité dans Côté, Pierre-André, Interprétation des lois, 4e éd., Montréal, Les Éditions Thémis, 2009, p. 316.

[31]  Pièce P-6.

[32]  Il semble effectivement s’agir d’une décision commune des demandeurs (demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, par. 18).

[33]  Demande modifiée pour l’émission d’une ordonnance de sauvegarde, par. 62.

[34]  Plan d’argumentation des demandeurs, par. 16.

[35]  Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, p. 129, et RJR - MacDonald inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, p. 342.

[36]  Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.C.S. 110, p. 140.

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