Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

R. c. Tapin-Dubois

2020 QCCQ 2227

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre criminelle et pénale »

N° :

500-01-162907-171

 

DATE :

 4 JUIN 2020

 

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

MANLIO DEL NEGRO, J.C.Q.

 

______________________________________________________________________

 

 

LA REINE

Poursuivante

c.

MARTIN TAPIN-DUBOIS

Accusé

et

Me STÉPHANIE BISAILLON AUCLAIRE

et

Me MARIE-HÉLÈNE GIROUX

 

          Mises en cause

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT SUR CITATION POUR FRAIS À L’ÉGARD DE Me M.H. GIROUX

______________________________________________________________________

 

[1]          Il n’y a pas si longtemps, la Cour suprême faisait la remarque suivante quant aux délais du système de justice criminel :

 

[40]   Comme nous l’avons vu, une culture de complaisance vis-à-vis les délais a fait son apparition au sein du système de justice criminelle (voir, p. ex., Alberta Justice and Solicitor General, Criminal Justice Division, « Injecting a Sense of Urgency : A new approach to delivering justice in serious and violent criminal cases », rapport préparé par G. Lepp (avril 2013) (en ligne), p. 17; Cowper, p. 4; P. J. LeSage et M. Code, Rapport sur l’examen de la procédure relative aux affaires criminelles complexes (2008), p. 15; Canada, ministère de la Justice, « Rapport final sur l’examen prioritaire des dossiers du comité directeur sur l’efficacité et l’accès en matière de justice » (2006) (en ligne), p. 5-6). Les procédures et ajournements inutiles de même que les pratiques inefficaces et la pénurie de ressources institutionnelles sont acceptés comme la norme et occasionnent des délais de plus en plus longs. Cette culture des délais « cause un tort important à la confiance du public envers le système de justice » (LeSage et Code, p. 20). Elle [traduction] « récompense les mauvais comportements, frustre les gens bien intentionnés, rend les habitués du système cyniques et désillusionnés, et contrecarre les objectifs de réinsertion sociale du système » (Cowper, p. 48).[1]

                                                                           (Soulignements du Tribunal)

[2]          Il est clair que l’arrêt Jordan a donné un signe d’alerte à tous les participants du système de justice criminel qu’un changement de culture devrait être envisagé pour contrecarrer la complaisance systémique qui a souvent paralysé le déroulement efficace du système de justice pénale.

[3]          La Cour suprême a invité les participants au système de justice à travailler en concert afin d’accélérer le déroulement des procédures :

[116]    En fin de compte, tous les participants au système de justice doivent travailler de concert pour accélérer le déroulement des procès. Après tout, c’est l’ensemble de la société qui bénéficiera de ces efforts. Comme l’a écrit le juge Sharpe dans R. c. Omar, 2007 ONCA 117, 84 O.R. (3d) 493.

[traduction] Comme toutes les autres institutions publiques, le système judiciaire dispose de ressources limitées, et il en va de même pour les plaideurs et l’aide juridique. [. . .] Il est dans l’intérêt de tous les groupes concernés — les personnes accusées d’un crime, la police, l’avocat du ministère public, l’avocat de la défense et les juges de première instance et d’appel — de tirer le plus grand parti possible des ressources limitées dont dispose le système judiciaire.[2]

(Soulignements du Tribunal)

[4]          Peu de  temps après, la Cour suprême dans la cause de Cody[3] réitère que tous les intervenants associés au système judiciaire doivent collaborer afin de changer la culture de complaisance auparavant tolérée par le l’administration de la justice. À cet effet, la Cour suprême s’exprime comme suit à ce sujet :   

[35]  […] En effet, il n’est pas nécessaire que la conduite illégitime de la défense qui a été constatée constitue une faute professionnelle. La légitimité tire plutôt son sens du changement de culture exigé dans Jordan. Toutes les personnes associées au système judiciaire — y compris les avocats de la défense — doivent désormais accepter que de nombreuses pratiques qui étaient auparavant courantes ou simplement tolérées ne sont plus compatibles avec le droit garanti par l’al. 11b)  de la Charte.                                                      

[5]          Cela étant, la Cour souligne que les tribunaux, à l’instar des autres participants au système de justice, ont un rôle à jouer afin de modifier la culture en salle d’audience et d’aider à rendre le système de justice criminelle plus efficace.

[6]          Malgré que l’arrêt Jordan et les jugements qui ont suivi ont sonné un cri d’alerte à tous les intervenants du système judiciaire de collaborer ensemble pour rendre le système plus efficace et ainsi de réduire les délais et d’accélérer le déroulement des procédures et surtout d’utiliser les ressources judiciaires judicieusement, le Tribunal constate qu’encore aujourd’hui plusieurs intervenants œuvrant dans le système de justice criminelle n’ont pas encore saisi le message de la Cour suprême et continuent de mener leurs affaires comme bon leur semble sans se soucier des règles établies et sans aucune considération de leurs obligations envers la Cour et de l’administration de la justice.

[7]          Le cas en l’espèce est un exemple frappant de l’indifférence aux règles établies   qu’ont eue deux avocates de la défense à l’égard du Tribunal et de l’administration de la  justice, ayant agi pour l’accusé, monsieur Tapin-Dubois, dans le cas sous étude.

Bref historique des procédures

[8]          L’accusé Tapin-Dubois devait subir son procès devant le soussigné le 28 juin 2019. Le procès était prévu pour cinq heures. La poursuivante était représentée par Me Sylvie Dulude (Me Dulude) qui s’est déclarée prête à procéder. Par ailleurs, quatre témoins de la poursuite étaient présents pour rendre témoignage : un témoin civil et trois témoins policiers devaient témoigner pour la poursuite.

[9]          L’avocate de la défense représentant Tapin-Dubois était Me Stéphanie Bisaillon-Auclaire (Me Auclaire). Ce n’était pas la première fois que ce procès devait procéder. En effet, le Tribunal a constaté qu’auparavant le procès devait avoir lieu le 29 janvier 2019 et qu’il a été remis pour permettre à Me Auclaire de rentrer au dossier en remplacement d’un autre avocat représentant l’accusé à l’époque. À cette date, quatre témoins étaient présents, un témoin civil et trois témoins policiers. Le dossier a donc été remis au 23 avril 2019, pour une durée de cinq heures et une autre remise a eu lieu, puisque Me Auclaire n’était pas disponible en après-midi. Encore une fois, tous les témoins étaient présents à cette date.

[10]       Le procès a ainsi été remis devant le soussigné le 28 juin 2019 pour procéder. À cette date, Me Auclaire était absente. Par ailleurs, une stagiaire du bureau de Me Marie-Hélène Giroux (Me Giroux) a informé le Tribunal que Me Giroux était la nouvelle avocate au dossier et que cette dernière agirait dorénavant pour monsieur Tapin-Dubois et qu’au surplus, Me Giroux n’était pas disponible pour procéder et qu’elle a reçu de Me Giroux  des instructions de formuler une demande de remise au Tribunal.

[11]       Cela étant, une brève vérification du dossier de la Cour a permis au Tribunal de constater que Me Auclaire a omis de présenter une requête pour cesser d’occuper en bonne et due forme tel que l’exige l’article 109 du Règlement de la Cour du Québec[4].

[12]       Au surplus, Me Dulude a signalé au Tribunal que ni Me Auclaire ni Me Giroux ne l’ont avisée du changement d’avocat.

[13]       Le dossier de la Cour a également révélé que Me Giroux a omis de formuler une demande de remise de l’assignation des témoins selon l’article 28 du Règlement de la Cour du Québec[5].

[14]       En l’occurrence, le Tribunal n’a eu aucune autre alternative que de remettre la cause et de présenter des excuses aux témoins qui s’étaient déplacés pour témoigner dans cette cause pour la troisième fois.

[15]       Ce faisant, le Tribunal a cité l’avocate, Me Auclaire, pour outrage au tribunal pour son absence inexpliquée le jour du procès de son client alors que c’était la troisième fois que la cause devait procéder.

[16]       Le Tribunal a également cité l’avocate Me Giroux personnellement pour le paiement des frais occasionnés par la demande de remise irrégulière et non fondée formulée par sa stagiaire en droit, Mme Cynthia Payer.

[17]       L’audition pour outrage et frais à l’égard de Mes Auclaire et Giroux a été fixée au  17 décembre 2019.

[18]       Par la suite, lors de l’audition sur la citation pour outrage au Tribunal qui s’est tenue devant le soussigné le 17 décembre 2019, le Tribunal a acquitté Me Auclaire séance tenante de la citation pour outrage suite aux explications que celle-ci a données lors de son témoignage.

[19]       Me Giroux a aussi témoigné en défense à la citation au paiement personnel des dépens. Suite à l’audition dans cette affaire, la question en litige que le Tribunal aura à décider peut être formulée comme suit :

QUESTION EN LITIGE

Est-ce que le Tribunal est fondé à sanctionner l’avocate Giroux pour une condamnation personnelle au paiement des dépens eu égard à sa conduite fautive dans le cas sous étude?

ANALYSE ET DISCUSSION

LE DROIT

[20]       C’est un principe de droit bien connu que, dans certaines circonstances, les tribunaux ont le pouvoir de condamner personnellement un avocat au paiement des dépens en matière criminelle. À cet égard, dans Québec (Procureur Général) c. Cronier[6], la Cour d’appel, sous la plume de la juge l’Heureux-Dubé, statue comme suit :

Une cour supérieure a le pouvoir de maintenir son autorité et de contrôler sa procédure de manière à rendre la justice dans l’ordre et efficacement. Que ceci implique parfois la condamnation d’une des parties et même des procureurs aux frais d’une instance dans les cas d’abus ou de frivolité de la procédure, d’inconduite ou de malhonnêteté, ou d’autre motif oblique est une chose reconnue. Encore faut-il que les conditions d’exercice de ce pouvoir inhérent se rencontrent.

[21]       Récemment, dans Québec (Directeur des poursuites criminelles et pénales) c. Jodoin[7] (ci-après, Jodoin), la Cour suprême confirme que ce pouvoir appartient également aux tribunaux d’origine législative[8] et fait le résumé suivant :

                   [16]   Les tribunaux ont le pouvoir de veiller au respect de leur autorité. Cela inclut le pouvoir de gérer, contrôler et maîtriser les procédures qui se déroulent devant eux (R. c. Anderson, 2014 CSC 41, [2014] 2 R.C.S. 167, par. 58). Ils possèdent ainsi le pouvoir inhérent de réprimer les abus à cet égard (Young c. Young, [1993] 4 R.C.S. 3, p. 136) et d’empêcher que la procédure ne soit utilisée [traduction] « d’une manière qui serait manifestement injuste envers une partie au litige, ou qui aurait autrement pour effet de discréditer l’administration de la justice » : Canam Enterprises Inc. c. Coles (2000), 51 O.R. (3d) 481 (C.A.), par. 55, le juge Goudge, dissident, opinion approuvée par 2002 CSC 63, [2002] 3 R.C.S. 307. Il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire qui doit certes s’exercer avec retenue (Anderson, par. 59), mais qui permet à un tribunal « d’assurer l’intégrité du système judiciaire » (Morel c. Canada, 2008 CAF 53, [2009] 1 R.C.F. 629, par. 35).

[17]  Il est acquis que ce pouvoir appartient tant aux tribunaux jouissant d’une compétence inhérente qu’aux tribunaux d’origine législative (Anderson, par. 58). Il n’est donc pas réservé aux cours supérieurs et tire plutôt son fondement de la common law : Myers c. Elman, [1940] A.C. 282 (H.L.), p. 319; M. Code, « Counsel’s Duty of Civility : An Essential Component of Fair Trials and an Effective Justice System » (2007), 11 Rev. can. D.P. 97, p. 126.

                   [18]   Une jurisprudence bien établie reconnaît que la condamnation personnelle d’un avocat aux dépens découle du droit et du devoir des tribunaux de superviser la conduite des avocats présents devant eux et de signaler, et parfois de sanctionner, toute conduite de nature à mettre en échec l’administration de la justice ou y porter atteinte : Myers, p. 319; Pacific Mobile Corporation c. Hunter Douglas Canada Ltd., [1979] 1 R.C.S. 842, p. 845; Cronier, p. 110; Pearl c. Gentra Canada Investments Inc., [1998] R.L. 581 (C.A. Qc), p. 587. En tant qu’officiers de la cour, les avocats ont le devoir de respecter l’autorité des tribunaux. Le défaut des avocats d’agir en conformité avec leur statut peut obliger les tribunaux à sévir à leur endroit en sanctionnant leur inconduite (M. Code, p. 121).

[19]   L’exercice par les tribunaux de ce pouvoir de condamner personnellement un avocat au paiement des dépens ne se limite pas aux instances civiles; il s’étend aussi aux instances criminelles (Cronier). Bien qu’une telle situation soit rare, ce pouvoir peut donc viser parfois les avocats de la défense en matière criminelle : R. c. Liberatore, 2010 NSCA 26, 292 N.S.R. (2d) 69; R. c. Smith (1999), 133 Man. R. (2d) 89 (B.R.), par. 43; Canada (Procureur général) c. Bisson[1995] R.J.Q. 2409 (C.S.); M. Code, p. 122.

                                                                                     (Soulignements du Tribunal)

[22]       Selon la Cour suprême, il s’agit d’une mesure exceptionnelle :

                   [29]   Il s’ensuit, à mon avis, qu’une condamnation personnelle de l’avocat aux dépens ne peut se justifier que de manière exceptionnelle, en présence d’une atteinte sérieuse à l’autorité des tribunaux ou d’une entrave grave à l’administration de la justice. Ce critère élevé est respecté lorsqu’un tribunal est en présence d’une procédure mal fondée, frivole, dilatoire ou vexatoire, qui dénote un abus grave du système judiciaire ou une inconduite malhonnête ou malveillante, commis de propos délibéré par l’avocat. Ainsi, un avocat ne peut sciemment utiliser les ressources judiciaires à une fin purement dilatoire, dans le seul but de faire obstruction de manière calculée au bon déroulement du processus judiciaire.

                                                                                      (Soulignements du Tribunal)

[23]       Deux balises importantes encadrent l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire :

1)     L’avocat de la défense à l’obligation de défendre vigoureusement les droits de son client et une « section de la défense forte et indépendante au sein du barreau » est essentiel dans notre système de justice contradictoire. La condamnation personnelle aux dépens ne doit pas décourager l’avocat dans la défense de son client.[9]

2)     Les Tribunaux doivent s’abstenir « de faire indirectement le procès du dossier disciplinaire de l’avocat, voir sa carrière ».[10]

[24]       Concernant le processus à suivre, la Cour suprême donne les consignes suivantes :

[35]   Cela dit, il va de soi qu’un tribunal ne peut condamner personnellement un avocat  aux dépens sans respecter un certain processus et certaines garanties procédurales (Y.-M. Morissette, « L’initiative judiciaire vouée à l’échec et la responsabilité de l’avocat ou de son mandant » (1984), 44 R. du B. 397, p. 425). Il importe toutefois que ce processus demeure flexible et permette au tribunal de s’adapter aux circonstances de chaque affaire.

[36]  Ainsi, l’avocat passible d’une telle sanction devrait recevoir un avis préalable l’informant des allégations formulées à son endroit et des conséquences qui pourraient en découler. Cet avis devrait contenir des informations suffisantes sur les faits reprochés et sur la teneur de la preuve à leur appui. L’avis devrait être transmis suffisamment à l’avance pour permettre à l’avocat de se préparer adéquatement. Ce dernier devrait bien sûr avoir l’occasion de présenter des observations distinctes au sujet des dépens, et, le cas échéant, des éléments de preuve pertinents à cet égard. Idéalement, le débat relatif à la condamnation personnelle de l’avocat aux dépens ne devrait avoir lieu qu’une fois la procédure visée tranchée sur le fond.

 

[25]       Par ailleurs, le rôle du ministère public doit demeurer limité :

[38] […] il appartient autant aux parties qu’au tribunal de soulever le problème que pose la conduite d’un avocat. Toutefois, le rôle du ministère public est de présenter objectivement la preuve et les arguments pertinents sur ce point. L’opportunité et le pouvoir d’imposer une sanction appartiennent au tribunal en vertu de son rôle de gardien de l’intégrité de l’administration de la justice. Le ministère public doit se confiner à son rôle de poursuivant de l’accusé. Il ne doit pas devenir en plus le poursuivant de l’avocat de la défense.[11]

[26]       Dans Jodoin, la Cour suprême détermine que c’est à bon droit que le juge de première instance condamne l’avocat de la défense aux dépens dans les circonstances de cette affaire :

[42] […] la conduite de l’intimé dans ces dossiers était particulièrement répréhensible. Elle visait un but étranger aux requêtes entreprises. L’intimé était animé par une volonté d’obtenir une remise de l’audience plutôt que par une croyance sincère dans l’inimitié des juges qui étaient la cible de ses requêtes. Son comportement subséquent est compatible avec cette conclusion. Il est assez incongru, sinon inédit, de voir un avocat déposer le même jour, dans les mêmes dossiers, deux séries de requêtes sollicitant la délivrance de brefs de prohibition, alléguant un même motif de partialité, à l’encontre de deux juges différents. L’intimé a ainsi utilisé les recours extraordinaires à une fin purement dilatoire dans le seul but d’entraver de manière calculée le bon déroulement du processus judiciaire. Devant cela, le juge pouvait raisonnablement conclure que l’intimé a fait preuve de mauvaise foi et a abusé des procédures, portant ainsi sérieusement atteinte à l’administration de la justice.

[27]       Enfin, notons que la loi est différente en matière de poursuite sommaire. L’article 809 C.cr. prévoit explicitement que la Cour des poursuites sommaires peut, à sa discrétion, adjuger et ordonner le paiement des frais qu’elle estime raisonnables par le défendeur ou par le dénonciateur.

[28]       Dans le Traité général de preuve et de procédure pénales[12], les auteurs analysent succinctement l’ensemble du cadre légal concernant le pouvoir des tribunaux de sanctionner une inconduite par une condamnation personnelle de l’avocat aux frais.

[2960] Cela nous amène à examiner les pouvoirs des tribunaux de sanctionner une inconduite par une condamnation personnelle de l’avocat aux frais. Dans l’arrêt  Québec (Procureur général) c. Cronier, la Cour d’appel du Québec a indiqué que la Cour supérieure peut, en vertu de ses pouvoirs inhérents de surveillance et de contrôle, condamner une partie ou un procureur pour sanctionner la négligence ou l’inconduite ainsi que l’abus ou la frivolité des procédures, une approche acceptée par la Cour suprême. Les deux parties peuvent donc faire l’objet d’une ordonnance, mais seulement en cas d’inconduite. La Cour suprême a confirmé l’existence d’un pouvoir inhérent des tribunaux en matière de dépens, rappelant cependant le caractère exceptionnel de cette mesure. Ce pouvoir discrétionnaire découle de la Common law et il « appartient tant aux tribunaux jouissant d’une compétence inhérente qu’aux tribunaux d’origine législative ». Dans le contexte du droit criminel, il s’agit d’une sanction punitive, similaire à l’outrage au tribunal, mais aux conséquences moins sérieuses, offrant ainsi une alternative à la procédure plus rigoureuse de l’outrage, bien que rien n’interdise de les appliquer concurremment, voire en parallèle, avec des procédures disciplinaires du Barreau. La condamnation personnelle aux frais implique en principe des sommes peu élevées, même si ce sont uniquement les conduites graves de l’avocat qui y donnent ouverture. Une simple erreur de jugement n’est pas suffisante. La mesure vise plutôt à condamner la négligence grave ou une erreur grossière. Bref, il faut que l’on soit « en présence d’abus de procédures, de procédures frivoles, d’inconduites ou de malhonnêtetés, ou encore de mesures prises pour des motifs obliques, et ce, lorsqu’en résulte une atteinte sérieuse à l’autorité des tribunaux ou une entrave grave à l’administration de la justice ». Il s’agit d’un critère élevé puisque l’avocat doit agir de manière délibérée. En clair, un « avocat ne peut sciemment utiliser les ressources judiciaires à une fin purement dilatoire, dans le seul but de faire obstruction de manière calculée au bon déroulement du processus judiciaire. La Cour suprême invite toutefois à la prudence en rappelant deux réalités qui modulent le recours à la condamnation personnelle de l’avocat de la défense. Il faut d’abord se rappeler que ce dernier n’a aucune obligation d’aider le ministère public et qu’en remettant en question les décisions et prétentions des autres acteurs du système judiciaire, il joue un rôle essentiel dans notre système de justice contradictoire. Ensuite, c’est la conduite dans une affaire donnée qui doit être sanctionnée, le processus ne devant pas se transformer en audience disciplinaire « pour l’ensemble de son œuvre. »

                                                                               (Citations et références omises)

 (Soulignements du Tribunal)

ANALYSE DU TÉMOIGNAGE DE ME GIROUX

[29]       Me Giroux a témoigné pour répondre à la citation pour frais le 17 décembre 2019. Elle a choisi de fournir ses explications elle-même sans l’assistance d’un avocat. D’une manière générale, Me Giroux affirme que lorsqu’elle a accepté le mandat de représenter monsieur Tapin-Dubois, celui-ci et Me Auclaire lui avaient laissé entendre que la cause était pro forma et pas fixée pour procéder comme telle le 28 juin 2019. En conséquence, Me Giroux a tenu pour acquis que la cause était pro forma et elle a mandaté sa stagiaire pour formuler une demande d’ajournement lorsque la cause était fixée pour procès. Bref, elle affirme n’avoir pas été au courant du statut du dossier de son nouveau client et ajoute que si elle avait su, elle aurait certainement fait une demande de remise[13].

Me Marie-Hélène Giroux :

« Donc, le procès aurait de toute façon été remis. Si on s’était rendu compte que c’était un procès, on aurait fait une demande de remise de ce procès-là. »

[30]       Selon Me Giroux, suite à l’évaluation qu’elle a faite du dossier de son nouveau client, une remise était évidente, puisque, selon elle, ce n’était pas un cas où un procès aurait lieu[14]. Me Giroux s’exprime comme suit :

 Me Marie-Hélène Giroux :

« Je ne pense pas. Je pense que j’ai été claire et efficace, parce que de toute façon, il y aurait eu une remise qui aurait été faite et il n’y aurait pas eu de procès de fait, parce que c’était clair quand j’ai pris le mandat pour monsieur Tapin-Dubois qu’on n’irait pas en procès dans ce dossier-là, c’était clair que ça, c’était un cas pour négocier, et c’est ce qui a été fait. » 

(Soulignements du Tribunal)

[31]       La mise en cause, Me Giroux, fait face à une citation pour frais de justice dans la cause de son client, monsieur Tapin-Dubois.

[32]       Le Tribunal a eu l’opportunité d’observer et d’écouter les explications fournies par Me Giroux.

[33]       D’entrée en jeu, le Tribunal déclare, avec regret, mais sans aucune hésitation, que l’ensemble de la version donnée par Me Giroux manquait de transparence et de franchise. Selon toute vraisemblance, Me Giroux était prête à dire n’importe quoi afin de se déresponsabiliser des reproches que le Tribunal lui a transmis concernant son absence injustifiée lors du procès de son client qui devrait avoir lieu le 28 juin 2019.

[34]       Voici les raisons qui amènent le Tribunal à conclure ainsi :

[35]       Dès le début de son témoignage, elle affirme avoir agi avec diligence dans le dossier, tout en jetant le blâme sur sa consœur Me Auclaire et son client M. Tapin-Dubois qui l’ont induit en erreur en lui faisant savoir que la date était en effet « pro forma, et non pour procéder[15] » :

 Me Marie-Hélène Giroux :

« Oui. Alors, il est arrivé une confusion dans le dossier, j’ai  - -  on est intervenu dans le dossier de monsieur Tapin-Dubois, on avait été avisé par, je pense, son ex-avocate et monsieur que la date était pro forma. Je n’ai pas vérifié, malheureusement, j’aurais dû vérifier le plumitif que c’était le procès. Alors, ceci étant, j’ai envoyé ma stagiaire entrer au dossier. Depuis,  le dossier - tous les dossiers de monsieur Martin Tapin-Dubois ont été réglés, sans tenue de procès … Hum hum. … que ce soit ceux devant vous ou ceux devant madame la juge Custom. Alors, j’estime que la Cour et la justice n’a pas perdu d’argent là-dedans. J’ai fait preuve de diligence. »

(Soulignements du Tribunal)

[36]       Plus loin, dans son témoignage, elle réitère l’explication qu’elle s’est fiée sur la parole de Me Auclaire que le dossier était fixé pro forma[16] :

 Me Marie-Hélène Giroux :

« Je me suis fiée à la parole de l’autre avocate qui m’avait dit que… ou en fait, qui nous avons laissé entendre au bureau que le … c’était un dossier qui était fixé pro forma, et c’est la raison pour laquelle je n’étais pas là, parce que de toute façon, je ne pouvais être là puisque j’étais ailleurs à ce moment-là. »

[37]       L’analyse de cette partie de son témoignage, soit qu’elle était induite en erreur par sa consœur quant au statut de la cause comme étant fixée  pro forma, ne tient pas la route.

[38]       Le qualificatif conditionnel « je pense avoir été avisée par son ex-avocate » est boiteux et manque de solidité.

[39]       À cet effet, il ne faut pas perdre de vue que Me Auclaire a témoigné qu’elle n’a jamais parlé directement avec Me Giroux après qu’elle eût appris que son client Tapin-Dubois lui a retiré son mandat pour le représenter pour son procès. Me Auclaire affirme avoir écrit un courriel à Me Giroux pour l’aviser que son client désirait changer d’avocat. Elle témoigne également avoir reçu un message de Me Giroux dans sa boîte vocale le 18 juin 2019 lui laissant savoir que celle-ci avait reçu un mandat de l’accusé pour le représenter. Par la suite, le 19 juin 2019, elle reçoit un autre message de Me Giroux qui réitérait qu’elle avait reçu mandat de représenter l’accusé dans la cause sous étude.

[40]       En dernier lieu, Me Auclaire affirme être allée au bureau de Me Giroux afin de lui transmettre le dossier au complet le 20 juin 2019[17] :

 Me Stéphanie Bisaillon-Auclaire :

« Donc, le dix-neuf (19), ma consœur, Maître Giroux, me rappelle, me laisse un message à l’effet qu’effectivement, elle a le mandat de monsieur Tapin-Dubois, donc moi, je tente de la rappeler la même journée, je lui laisse un message sur sa boîte vocale également, et finalement, le vingt (20), je suis tout simplement allée porter les dossiers, la preuve au bureau de maître Giroux en après-midi. »

[41]       Qui plus est, Me Auclaire affirme ne pas avoir eu d’autres nouvelles de sa consoeur Me Giroux par la suite[18]. Dans l’esprit de Me Auclaire, il était clair que dorénavant, elle n’avait plus le mandat pour continuer à représenter l’accusé dans la cause sous étude et que Me Giroux était bien au courant que la cause était fixée pour procéder. À cet effet, Me Auclaire s’exprime comme suit :

 Me Stéphanie Bisaillon-Auclaire :

« Oui. Et par la suite, je n’ai jamais eu de nouvelles de maître Giroux, je n’ai pas tenté non plus de la recontacter. Pour moi, j’avais été déposé la preuve, donc c’était fait. »

[42]       L’analyse du témoignage de Me Auclaire permet au Tribunal de conclure que celui-ci était direct, cohérent et crédible. À cet effet, le Tribunal n’a aucune raison de douter de sa fiabilité ou franchise. Celle-ci était convaincu, à tort, qu’après que Me Giroux ait acceptée le mandat de représenter monsieur Tapin-Dubois elle n’était plus obligée de se présenter à la cour pour s’occuper de la cause de son client. Le Tribunal accepte, comme vraisemblable, la version de Me Auclaire sur le fait qu’elle n’a jamais parlé directement avec Me Giroux avant le 25 juin 2019 et que Me Giroux était au courant que la cause était fixée pour procéder et non pro forma. En effet, la trame factuelle des procédures au dossier appuie la version de Me Auclaire à l’effet que la cause était prévue pour procéder le 25 juin 2019, puisque celle-ci était l’avocate au dossier de l’accusé depuis le 29 janvier 2019 et, qu’auparavant, elle avait formulé deux demandes de remise elle-même avant que la cause soit fixée pour procéder une troisième fois le 28 Juin 2019.

[43]       Cela étant, il n’y a aucune raison valable que cette avocate induise en erreur sa consoeur qui la remplaçait en lui disant que la cause était fixée pro forma, alors que la cause était bel et bien fixée pour procéder. Me Auclaire a eu la courtoisie de transmettre la divulgation de la preuve, personnellement, au bureau de Me Giroux, manifestement, elle désirait collaborer avec celle-ci après que son client eut décidé de révoquer son mandat : alors, pourquoi vouloir tromper sa consœur sur le statut de la cause?

[44]       Par ailleurs, sans aucune vergogne ou retenue, Me Giroux affirme catégoriquement que « la Cour n’a pas perdu d’argent là-dedans. J’ai fait preuve de diligence »[19].

[45]       Que cette avocate de trente ans d’expérience affirme avoir agi avec diligence en l’occurrence, soit d’accepter un mandat de représenter un client détenu et qui, par surcroît, devait subir son procès dans une dizaine de jours sans prendre les précautions élémentaires de vérifier le statut de la cause est une histoire abasourdissante.

[46]       Qui plus est, sa façon de procéder doit être qualifiée comme étant une négligence grave et/ou une erreur grossière qui mérite d’être dénoncée et réprimandée.  D’autant plus, le comportement de Me Giroux, en l’occurrence, dénote un manque de civilité et de délicatesse à l’égard du devoir de l’avocat en tant qu’officier de la Cour et du système de justice.  

[47]       Dans un excellent article intitulé Counsel’s Duty of Civility : An Essential Component of Fair Trials and an Effective Justice System[20] , le professeur Michael Code maintenant juge à la Cour supérieure de l’Ontario fait siennes les commentaires du juge Rosenberg dans la cause de Felderhof qui s’exprime comme suit à l’égard du devoir des avocats à l’égard de l’administration de la justice et des tribunaux :

« Counsel are required to conduct themselves professionally as part of their duty to the Court, to the administration of justice generally and to their clients…. Counsel have a responsibility to the administration of justice, and as officers of the court, they have a duty to act with integrity, a duty that requires civil conduct … as officers of the court and as barristers and solicitors, defence counsel also have responsibilities to the court and to other counsel and they have a duty to uphold the standards of the profession. [Emphasis added][21]. »

[48]       Le juge Code analyse, dans certaines parties de son œuvre, le rôle et les obligations de l’avocat à l’égard de la Cour et les pouvoirs des tribunaux de sévir des sanctions en cas de manquement. Le juge Code cite à nouveau le jugement de la Cour d’appel d’Ontario dans la cause de Felderhof où le regretté juge Rosenberg définit le devoir de civilité que doit avoir un avocat, parmi d’autres, à l’égard de la Cour lorsque celui-ci agit comme un officier de la Cour.

[49]       Dans R. v. Felderhof, le juge Rosenberg s’exprime comme suit[22]:

« […] defence’s counsel’s obligation to his or her client to fearlessly raise every legitimate issue is not incompatible with these duties to the Court, to fellow counsel and to the profession. »

[50]       Quant au pouvoir du Tribunal de sanctionner pour frais, même avant l’affaire de Jodoin, le juge Code s’exprime comme suit concernant la condamnation pour frais à l’égard d’un avocat en cas de manquement envers la Cour[23] :

« In the leading modern English case, Ride Halgh v. Horsefield, Bingham, M.R. described “The court’s jurisdiction” to make a costs order against counsel as being “founded on breach of the duty owed by the solicitor to the court to perform his duty as an officer of the court promoting within his own sphere the cause of justice." The court of Appeal made it clear that the power is an exceptional one, stating that « It is only when, with all allowances made, an advocate’s conduct of court proceedings is quite plainly unjustifiable that it can be appropriate to make a wasted costs order against him. »

…….Accordingly, the common law jurisdiction clearly exists to make « wasted costs » orders in criminal cases. In. R. v. Cronier, L’Heureux-Dubé J.A., as she then was, reviewed the leading authorities and held, on behalf of the Quebec Court of Appeal, that the common law power to award costs in criminal proceedings exists “to censure, in a summary fashion, through the imposition of costs, the negligence or misconduct of the parties.” She held that such an award would be appropriate against either the lawyer or the party where there was “reprehensible conduct”, that is, in cases of the abuse of the frivolity of proceedings, of misconduct or dishonesty of taken for some other ulterior motive. »

The leading Ontario criminal cases are to similar effect. In R. v. Pawlowski, Chadwick J. followed Cronier and held that the common law costs jurisdiction relates to “the conduct of the parties before the court and had to be exception circumstances amounting almost to contempt of court.” On further appeal, Galligan J. A. gave the judgment of the Ontario Court of Appeal and agreed that the common law cost power exists, citing Cronier, but “could be exercised only where there was serious misconduct.” Mr. Justice Potts’ decision in R. v. Brown Shoe Co. of Canada Ltd. (No. 2) is to similar effect, holding that costs orders should be made at common law only « in cases analogous to contempt of court situations, with gravity equivalent to “misconduct” and “dishonesty. »

It can be seen that there is a strong history in our jurisprudence, whether at common law or under the Charter, and in both civil and criminal proceedings, of using costs orders as a remedial tool to punish and deter serious misconduct by counsel.

                                                                     (Soulignements du Tribunal)

[51]       Quant aux devoirs des tribunaux d’intervenir en cas de manquement des avocats à leurs devoirs et responsabilités en tant qu’officiers de la Cour et des sanctions applicables en l’espèce, le juge Code s’exprime comme suit[24] :

« […] If the judiciary also understands that they have a duty to stop those counsel who are unaware of their responsibilities as officers of the court, and that a range of escalating remedies is available, then those counsel will become educated or, at a minimum, they will be prevented from causing harm.[…] »

(Soulignements du Tribunal)

[52]       Tout au long de son témoignage, Me Giroux a insisté sur le fait qu’elle avait fait « preuve de diligence ». Le Tribunal lui a souligné qu’il n’était pas en accord avec ces prétentions. Bien au contraire, le Tribunal estime que sa façon de mener ses affaires est hautement fautive et insouciante à l’égard de ses devoirs envers le Tribunal et de l’administration de la justice.

[53]       Il est élémentaire de soutenir qu’un avocat de la défense qui accepte de représenter un client qui est, en l’occurrence, détenu dans sa cause, doit obligatoirement faire les vérifications d’usage auprès du plumitif de la Cour pour vérifier l’étape où le dossier est rendu lorsqu’on accepte d’assumer le mandat que celui-ci lui confie.

[54]    Lors de son témoignage pour expliquer son absence devant le Tribunal pour représenter son client, lors du procès le 28 juin 2019, Me Giroux témoigne qu’elle était dans un autre district le jour du procès de son client Tapin-Dubois. Dans ce contexte et afin qu’elle n’aggrave pas son sort, le Tribunal lui rappelle que ceci n’est pas exact puisque le procès-verbal dans la cause 500-36-009338-198 démontre qu’elle était effectivement dans le district judiciaire de Montréal, plus précisément, devant le Juge Michel Penou de la Cour supérieure de Montréal à ce moment.

[55]       Confrontée à cette affirmation, Me Giroux témoigne comme suit[25] :

 Me Marie-Hélène Giroux :

« J’étais ailleurs, dans une autre - dans un autre district. »

Le Tribunal :

« Pas vraiment, vous étiez au palais de justice à Montréal ce jour-là. »

Me Marie-Hélène Giroux :

« Je n’ai pas mon agenda. Redonnez-moi la date, je vais vous dire exactement où j’étais. Si j’avais été au palais de justice de Montréal avec un problème comme ça, maître Paillé m’aurait toute de suite contactée et je serais venue. C’était en juillet, ça, si je ne m’abuse, hein? »

Le Tribunal :

« Alors, vous étiez à Montréal, vous étiez devant le juge Penou? »

Me Marie-Hélène Giroux :

« Ah! Bien, c’est ça, bien donc, j’avais une assignation en tout cas, oui, peut-être. Mais si j’avais été devant le juge Penou … »

Le Tribunal :

« Vous étiez devant lui pour pas longtemps, par exemple. »

Me Marie-Hélène Giroux :

« C’est possible que ce ne soit pas moi qui sois allée devant le juge Penou, mais quelqu’un d’autre. »

Me Marie-Hélène Giroux :

« C’est … pouvez-vous me répéter la date, Monsieur le Juge, que je vérifie l’agenda? On parle du … du vingt-deux (22) juillet, je pense? …vingt-huit (28) juin. Vingt-huit (28)? Vingt-huit  (28) juin, j’ai aussi des dossiers qui procédaient au 602. »

Le Tribunal :

« Vous étiez dans le dossier de … Sébastien Leduc. … Sébastien Leduc.  Oui. Puis votre adversaire était maître Éric de Champlain? »

Me Marie-Hélène Giroux :

« Oui, mais de toute façon, peu importe où j’étais, l’idée c’est qu’on pensait que le dossier était pro forma, Monsieur le Juge, et donc, nous, on entrait dans le dossier et on fixait une date pour discuter avec la poursuite, ce qu’on a fait d’ailleurs, on a discuté avec la poursuite puis on a réglé tous les dossiers. »

(Soulignements du Tribunal)

[56]       Tout compte fait, cette partie du témoignage de Me Giroux est apparue comme étant douteux dans les circonstances. Selon toute vraisemblance, elle était prête à prétendre qu’elle n’était pas dans le district judiciaire de Montréal le 28 juin 2019 avant que le Tribunal lui rappelle qu’elle y était.

[57]       À certains moments, pendant son témoignage, Me Giroux tente de rationaliser son comportement fautif comme si de rien n’était[26] :

 Me Marie-Hélène Giroux :

« Alors donc, et ça arrive à tous les jours que des procès sont remis pour diverses raisons. Et de toute manière, ce procès-là aurait été remis, qu’on se soit rendu compte que ce soit une date de procès ou que ce soit une date de pro forma. »

[58]       Me Giroux a raison de prétendre que des procès sont remis à tous les jours, mais elle oublie que pour ce faire, il y a des règles procédurales à suivre. Qui plus est, il y a d’autres considérants aussi importants comme la civilité que doit avoir un avocat à l’égard du Tribunal et les autres acteurs du système de justice, les témoins compris. La  supposition qu’un ajournement puisse être accordé en claquant ses doigts, sans aucune autre formalité, est une prémisse reposant sur des expectatives erronées que plusieurs acteurs du système de justice ont pris pour acquis au cours du temps.

[59]       Dans cette optique, en omettant de respecter les règles établies quant aux demandes d’ajournement, c’est l’administration de la justice qui en prend un coup puisque ça implique la diminution du respect qu’a le public à l’égard des tribunaux et du système de justice et sape ainsi la légitimité du processus judiciaire.

[60]       Une autre partie troublante de la version donnée par Me Giroux est lorsqu’elle relate, qu’après avoir pris connaissance du dossier de son nouveau client, monsieur Tapin-Dubois, que c’était clair pour elle que ce n’était pas un cas pour procéder, mais plutôt un cas pour négocier un règlement pour son client.

[61]       À cet égard, voici comment s’exprime Me Giroux à ce sujet[27] :

 Me Marie-Hélène Giroux :

«  […] Je ne pense pas. Je pense que j’ai été claire et efficace, parce que de toute façon, il y aurait eu une remise qui aurait été faite et il n’y aurait pas eu de procès de fait, parce que c’était clair quand j’ai pris le mandat pour monsieur Tapin-Dubois qu’on n’irait pas en procès dans ce dossier-là, c’était clair que ça, c’était un cas pour négocier, et c’est ce qui a été fait. »

[62]       Pourtant, suite à la remise du procès du 28 juin 2019, l’affirmation de Me Giroux à l’effet que le dossier de son client était un dossier qui devait se régler ne semble pas être exact, puisque par la suite, le dossier de monsieur Tapin-Dubois a été fixé pour procéder pour deux jours d’audience, soit les 17 et 18 décembre 2019. Au surplus, Me Giroux a préparé une requête en exclusion de la preuve présentable lors du procès cédulé pour les 17 et 18 décembre 2019.

[63]       Cela étant, pour que les faits soient limpides, la date du procès a été annulée par la suite puisque M. Tapin-Dubois a plaidé coupable dans le dossier sous étude ainsi que dans l’ensemble des dossiers pendants contre celui-ci.

[64]       Pour ce qui concerne l’absence de Me Giroux lors du procès de son client Tapin-Dubois le 28 juin 2019, le Tribunal est bien conscient des motifs qui pourraient inciter un avocat de la défense à vouloir demander une remise. Sans prétendre que les motifs suivants soient exhaustifs, le Tribunal n’a qu’à penser aux motifs suivants : l’avocat est en attente de paiement de ses honoraires professionnels et ne désire pas procéder avant de recevoir le paiement de ses honoraires; l’avocat ne désire pas procéder devant le juge désigné à entendre la cause et faire ce qui est connu dans le jargon comme étant du « judge-shopping »; l’indisponibilité de l’avocat le jour du procès; l’avocat n’est pas préparé à procéder; finalement, la pratique odieuse de formuler des remises successives afin de décourager les témoins, de leur faire perdre confiance au système et ainsi espérer que ceux-ci ne se présentent pas pour rendre leur témoignage et que les accusés soient libérés faute de preuve.

[65]       Sous cet angle, le Tribunal n’a pas perçu aucun indice qui pourrait lui faire croire que la remise a été demandée pour un motif oblique; toutefois, l’analyse de l’ensemble  du témoignage de Me Giroux amène le Tribunal à conclure qu’il entretient des sérieuses réserves quant à la crédibilité de la version fournie par celle-ci.

[66]       Tel que mentionné précédemment, la Cour suprême a établi des balises encadrant l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire de condamner personnellement au paiement des avocats.

[67]       Théoriquement,  le Tribunal doit être soucieux de prendre en considération les facteurs suivants lors de l’analyse du comportement de l’avocat [28] :

                    i.          Le contexte particulier des procédures en matière criminelle.

                    ii.        Le principe en matière criminelle est l’absence de dépens. À cet effet, la Cour Suprême souligne que les tribunaux doivent retenir le contexte particulier des procédures criminelles qui diffèrent de celui de procédures civiles[29]. Le ratio pour ce barème en matière criminelle est que le rôle de l’avocate de la défense n’est pas comparable à celui de l’avocat en matière civile puisque le rôle de l’avocat de la défense est de contester vigoureusement les décisions et prétentions des autres acteurs du système judiciaire, vu les conséquences graves qu’elles peuvent avoir sur son client[30].

                   iii.        Bref, en matière criminelle, la condamnation personnelle aux dépens ne doit pas être visée à décourager l’avocat dans la défense des droits et intérêts de son client, notamment, son droit à une défense pleine et entière.

                   iv.        Les tribunaux doivent se tenir au fait propre à l’affaire dont ils sont saisis et s’abstenir de faire indirectement le procès du dossier disciplinaire de l’avocat, voire sa carrière.

[68]       Sous cet angle, le Tribunal doit se limiter à l’analyse de ces faits propres des  faits du cas sous étude et s’abstenir de faire l’analyse d’autres actes fautifs de l’avocat, à moins que ceux-ci puissent établir l’intention délibérée et la connaissance de l’avocat. Il doit par contre se rapporter uniquement à la question précise en jeu, à savoir la conduite de l’avocat[31].

APPLICATION AU CAS D’ESPÈCE

[69]       À la lumière de ce qui précède, le Tribunal considère que la conduite de Me Giroux, dans le cas sous étude, déroge d’une manière marquée et inacceptable à la norme de conduite raisonnable et attendue d’un acteur du système judiciaire[32]. D’après la preuve présentée, non seulement celle-ci a formulé une demande d’ajournement non conforme aux règles établies, mais là où les choses se corsent encore plus est le témoignage qu’a rendu Me Giroux devant le Tribunal afin d’expliquer la demande d’ajournement qu’elle a formulée. Plutôt que d’assumer ses fautes, elle a choisi de fournir une version bric-à-brac qui ne tenait pas la route.

[70]       L’analyse de son témoignage dans son entièreté amène le Tribunal à conclure, avec regret, que la version fournie par Me Giroux manque de sincérité, de franchise, d’honnêteté et de donner l’heure juste au Tribunal. En fait, son témoignage peut être qualifié comme étant qu’elle était prête à dire n’importe quoi pour se disculper des reproches formulés à son égard.

[71]        Me Giroux a choisi de se représenter elle-même lors de l’enquête sur la citation aux dépens. À cet égard, une expression bien connue et rendue célèbre par Abraham Lincoln peut se résumer comme suit : « A man/woman who is his own lawyer, has a fool for a client ». Cet adage est particulièrement encore plus approprié pour un(e) avocat(e)  qui choisit de se représenter soi-même.

[72]        Sous cet angle, le Tribunal ne peut s’empêcher à se questionner sur la décision de Me Giroux à se représenter elle-même dans la présente affaire sans l’assistance d’un avocat. Pourtant avant le début de l’audience le Tribunal lui a demandé si c’était son choix à se représenter seule et se l’était. Même si le Tribunal a essayé de la guider lorsque celle-ci s’est aventurée à vouloir témoigner qu’elle n’était pas au Palais de Justice de Montréal la journée du procès, le Tribunal ne pouvait pas, tout de même, donner des explications à sa place dans le dossier sous étude.

[73]       Elle a sans doute pensé que l’audience n’était qu’une partie de pêche, qu’elle pouvait sans doute tirer son épingle du jeu sans conséquence, tout comme elle a sans doute pensé qu’elle pouvait formuler une demande d’ajournement de la cause de son client en claquant ses doigts sans aucune autre formalité.

[74]       Ce n’est pas de gaieté de cœur que le Tribunal arrive à cette conclusion, puisque le Tribunal est bien conscient des répercussions que celles-ci peuvent avoir sur Me Giroux.

[75]        Le Tribunal est également conscient, bien sûr, que personne n’est parfait et que des erreurs en cours de route peuvent survenir dans la pratique quotidienne du droit criminel, surtout lorsqu’un avocat est occupé avec une pratique de première instance comme au niveau d’appel, comme semble être la pratique de Me Giroux.

[76]       Ceci étant dit, Me Giroux n’a démontré aucun remords pour le tort qu’elle a causé à l’égard de l’administration de la justice. Remarquons qu’elle a plutôt tenté de justifier son comportement en rejetant le blâme sur une jeune avocate qui a pourtant fait de son mieux pour assurer que la transition entre elle et Me Giroux se fasse convenablement.

[77]       Plutôt que d’assumer ses fautes et responsabilité pour le gaspillage de ressources judiciaires et des coûts sociétaux importants que la demande d’ajournement irrégulière a occasionnés à l’égard de l’administration de la justice, elle a plutôt choisi à se justifier à tout prix tout en minimisant son rôle dans cette affaire.

[78]       Une excuse présentée avec humilité aurait possiblement suffi, en l’occurrence, mais bien au contraire, son témoignage s’est transformé en un véritable fouillis, du n’importe quoi, un méli-mélo de demi-vérités, des explications cherchant à déformer la réalité, cherchant par tous les moyens à se déresponsabiliser à tout prix à l’égard d’un comportement indubitablement fautif de sa part. Bref, le Tribunal estime que, par le fait même, Me Giroux s’est moquée du système de l’administration de justice sans se soucier de son statut privilégié d’un officier de la Cour et comme membre du Barreau.

[79]       Le fait que cette version ait été donnée par un membre du Barreau est troublant. L’élasticité de sa franchise de donner l’heure juste est également troublante.

[80]        Ainsi, comme le Tribunal l’a souligné précédemment, toute personne a droit à l’erreur et l’erreur est de nature humaine. Bien que ce dicton soit vrai, il est aussi vrai qu’une erreur devient une faute lorsqu’on ne veut pas en démordre.

[81]       En raison de ce qui précède, lorsque le Tribunal analyse la demande d’ajournement fautive formulée par Me Giroux, jumelée à la version fournie par celle-ci lors de son témoignage, le Tribunal conclut que le manquement de Me Giroux à l’égard de l’administration de la justice dans ce dossier est particulièrement déplorable, ce que le juge L’Heureux Dubé décrit comme étant un « comportement répréhensible » dans le cause de Cronier. Par surcroît, ce manquement porte atteinte à l’administration de la justice et doit impérativement être dénoncé et sanctionné.

[82]       Dans la cause de Dennis, la Cour d’appel de l’Ontario a annulé une citation pour le paiement des dépens rendu contre un avocat pour avoir formulé une demande de remise la journée ou l’audition devait avoir lieu sans avoir avisé son confrère au préalable. La Cour d’appel a conclu que : « the exercise of the appeal judge’s discretion was unreasonable and did not meet the threshold for an award of costs against counsel personally[33]»

[83]       Il ne faut pas perdre de vu que dans la cause de Dennis, aucun témoin n’avait été assigné pour l’audition de l’appel et, en conséquence, l’entrave à l’égard de l’administration de justice doit être considérée comme étant beaucoup moins grave que le cas sous étude. D’autant plus que le témoignage rendu par Me Giroux en tant qu’officier de la justice est troublant.

[84]        La société a dû assumer des coûts importants liés à l’insouciance qu’a eue cette avocate à l’égard de l’administration de la justice.  En agissant de la sorte, elle a scellé son propre sort et le Tribunal doit sévir en conséquence et souhaiter qu’à l’avenir cette sanction serve à lui rappeler ses obligations en tant qu’officier de justice.  

[85]       Au surplus, l’imposition d’une sanction peut également servir comme un instrument dissuasif  à l’égard de tous les  acteurs du système de justice afin que ceux-ci soient avisés qu’un manquement fautif et/ou négligent sera dorénavant susceptible de sanctions.  

[86]       Cela étant, il est vrai que le Tribunal aurait pu se fermer les yeux et accorder la remise sollicitée machinalement sans se soucier des conséquences et se contenter que la Cour continue à évoluer dans la culture de complaisance bien enracinée dans le système de justice criminelle. À mon humble avis, c’est précisément cette mentalité de complaisance que l’arrêt Jordan et les arrêts suivants de la Cour suprême ont voulu changer afin que le gaspillage inutile de ressources judiciaires résultantes d’ajournements inutiles et délais ne soient plus la norme, mais plutôt l’exception.

[87]       Tout en reconnaissant le principe établi par la Cour Suprême que la condamnation de l’avocat aux dépens ne peut se justifier que de manière exceptionnelle, c’est précisément dans l’optique d’amorcer un changement de culture et afin  de responsabiliser les acteurs du système de justice  que le Tribunal doit prendre les mesures nécessaires afin de sensibiliser et responsabiliser les acteurs du système judiciaire de leurs devoirs à l’égard du Tribunal et de l’administration de justice. Le déroulement des opérations de la Cour est une affaire sérieuse, désormais il n’y aura plus de carte blanche laissée aux acteurs du système de justice à faire comme bien leur semble, ceux-ci doivent être avisés que l’ère du laissez faire est bel et bien terminé.

[88]        Ceci étant, le Tribunal doit maintenant quantifier le quantum des dépens occasionnés par la conduite fautive de Me Giroux quant à la demande de remise irrégulière.

[89]       En l’occurrence, de ce point de vue, le Tribunal n’a aucun barème ou tableau indicatif des coûts réels qu’a pu coûter la demande d’ajournement formulée par Me Giroux. Le Tribunal se demande quels sont les coûts réels engendrés pouvant être qualifiés comme étant des coûts sociétaux d’un procès cédulé pour procéder pour cinq heures au Palais de justice de Montréal? Comment le Tribunal doit-il quantifier ces coûts?

[90]       Récemment dans la cause de Massoud[34], le juge David, j.c.s., condamne l’avocat de l’appelant personnellement à payer les dépens au montant symbolique de $300 (qu’il devra remettre directement à CAVAC de Montréal) en raison de son « défaut de respecter les demandes répétées de la Cour afin que le dossier puisse progresser efficacement » En effet, l’avocat a omis de respecter l’échéancier fixé pour le dépôt des arguments écrits à quatre (4) reprises. Le juge David tient compte de la bonne foi de l’avocat qui a reconnu son comportement fautif.

[91]       À première vue, la présence de quatre témoins, les greffières, le constable spécial qui assure la sécurité dans la salle, le procureur du DPCP assigné au dossier, la réservation de la salle de Cour, l’huissier audiencier et enfin le juge désigné pour entendre la cause, combinée ensemble, peut indiquer que les procédures sous étude peuvent être perçues comme étant une opération considérablement dispendieuse pour le système de justice et la société.

[92]       Ceci étant, le Tribunal conclut que, même s’il estime que l’opération peut s’avérer  relativement dispendieuse, il n’est pas en mesure de quantifier un montant exact des coûts occasionnés comme tels dans le présent dossier. Tout comme le juge David a fait dans la cause de Massoud, le Tribunal va évaluer un montant de dépens jugé comme étant  symbolique dans les circonstances.

[93]       En conséquence, le Tribunal va rendre jugement qu’un montant forfaitaire de mille dollars (1 000,00 $) est juste et approprié dans les circonstances même si, sans aucun doute, le montant réel des frais occasionnés par le comportement fautif de Me Giroux sont beaucoup plus élevé que mille dollars (1 000,00 $).

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

condamne,  Me Marie-Hélène Giroux à payer personnellement  les dépens établis à mille dollars (1 000,00 $) au Procureur Général du Québec, dans un délai de soixante (60) jours du présent jugement.

ORDONNE que le présent jugement soit acheminé au Bureau des infractions et amendes du Palais de Justice de Montréal.

Ordonne  que le reçu du paiement de l’amende soit déposé au dossier de la Cour.

 

 

 

__________________________________

MANLIO DEL NEGRO, J.C.Q.

 

Me Sylvie Dulude

Directeur des poursuites criminelles et pénales

Pour la poursuivante

 

 

Me Noemi Tellier

Pour Me Stéphanie Bisaillon-Auclaire

 

Me Marie-Hélène Giroux

Se représente elle-même

 

Dates d’audience :

28 juin 2019, 5 juillet 2019, 26 juillet 2019, 17 décembre 2019 et 20 décembre 2019.

 



[1]    R. c. Jordan, 2016 CSC 27, par. 40.

[2]    Jordan, supra, note 1, par. 116.

[3]    2017 CSC 31, par. 35

[4]    Règlement de la Cour du Québec, RLRQ, c. C-25.01, r.9, art. 109. 

[5]    Id., art. 28.

[6]    [1981] AZ-81011145, p. 17-18 (C.A.); 1981 CanLII 3179 (QC CA).

[7]    2017 CSC 26.

[8]    Id., par. 17.

[9]    Jodoin, supra, note 7, par. 32.

[10]   Id., par. 33-34.

[11]   Jodoin, supra, note 7, par. 38.

[12]   Martin Vauclair et Tristan Desjardins, Traité général de preuve et de procédure pénales, 25e éd., Éditions Thémis et Éditions Yvon Blais, Montréal, 2018, n˚ 2960.

[13]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 50, lignes 21 à 23.

[14]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 52, lignes 11 à 18.

[15]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 40, lignes 23 et suivants et p. 41, lignes 1 à 13.

[16]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 42, lignes 16 à 23.

[17]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 13, lignes 16 à 23.

[18]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 13, ligne 25 et p. 14, lignes 1 à 2.

[19]    Notes sténographiques, 17 décembre 2019, p. 41, lignes 11 à 13.

[20]  Michael Code, Counsel’s Duty of Civility : An Essential Component of Fair Trials and an Effective Justice System , (2007) 11 Can Crim L Rev 97.

[21]   Id., p. 11.

[22]   2003 CanLII 37346, par. 94 (ON CA).

[23]   M. Code, supra, note 20, p. 16-17.

 

 

[24]   Id., p.26.

[25] Notes sténographiques, 17 décembre 2019, page 42, ligne 25, page 43 et page 44, lignes 1 à 13.

 

[26]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, page 51, lignes 9 à 13.

[27]   Notes sténographiques, 17 décembre 2019, page 52, lignes 11 à 18.

[28]   Jodoin, supra, note 7, par. 31-32-33-34

[29]   Id., par. 31.

[30]   Id., par. 32.

[31]   Jodoin, supra, note 7, par. 33 et 34.

[32]  Id., par. 27.

[33]   R. v. Dennis, 2019 ONCA 109, par. 7.

 

[34]   Massoud c. Ville de Montréal, 2019 QCCS 2345.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.