Lebel c. Banque de Nouvelle-Écosse |
2017 QCCQ 7373 |
COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-22-234308-164 |
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DATE : |
28 juin 2017 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
ENRICO FORLINI, J.C.Q. |
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JOSEPH EDOUARD LEBEL |
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Demandeur |
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c. |
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BANQUE DE NOUVELLE-ÉCOSSE |
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Défenderesse |
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RECTIFICATION DE JUGEMENT |
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Considérant l’article 338 du Code de procédure civile du Québec;
Considérant que par jugement rendu le 6 juin 2017, le Tribunal a rejeté la demande du demandeur Joseph Edouard Lebel;
Considérant que lors de l’impression du jugement, les paragraphes 36 et 37 du jugement n’ont pas, par inadvertance, été imprimés;
Considérant qu’il s’agit d’une erreur matérielle;
Considérant ladite omission, le Tribunal rectifie le jugement afin d’y inclure les paragraphes 36 et 37.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
RECTIFIE le jugement rendu le 6 juin 2017 pour y ajouter les deux paragraphes suivants :
[1] En l’espèce, la mise en demeure de la Banque de Nouvelle-Écosse datée du 26 avril 2016[1] ne remplit pas les conditions requises pour constituer un avis de déchéance de bénéfice du terme tel que requis par l’article 105 de la loi. La preuve révèle que la Banque n’a jamais transmis l’avis de déchéance exigé par la loi.
[2] Ainsi, la demande faite par M. Lebel en vertu de l’article 107 LPC est prématurée et sera rejetée pour ce seul moyen.
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__________________________________ ENRICO FORLINI J.C.Q. |
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M. Jean Benoit Dionne |
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Bureau d’aide juridique Maisonneuve-Mercier |
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Stagiaire pour le demandeur |
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Me Smaranda Mihalachi |
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Miller Thomson s.e.n.r.c.l. |
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Avocate de la défenderesse |
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Date d’audience : |
8 février 2017 |
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JF1182
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Lebel c. Banque de Nouvelle-Écosse |
2017 QCCQ 7373 |
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COUR DU QUÉBEC |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N° : |
500-22-234308-164 |
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DATE : |
28 juin 2017 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
ENRICO FORLINI, J.C.Q. |
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JOSEPH EDOUARD LEBEL |
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Demandeur |
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BANQUE DE NOUVELLE-ÉCOSSE |
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Défenderesse |
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JUGEMENT RECTIFIÉ |
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[1] Joseph Edouard Lebel demande au Tribunal l’autorisation en vertu de l’article 107 de la Loi sur la protection du consommateur (LPC)[2] de remettre à la Banque de Nouvelle-Écosse un véhicule automobile.
[2] La Banque de Nouvelle-Écosse conteste la demande notamment parce qu’elle soutient qu’elle est prématurée, car elle n’a jamais transmis l’avis de déchéance du bénéfice du terme. De plus, elle plaide que les conditions requises pour l’application du remède prévue à l’article 107 LPC ne sont pas remplies.
Questions en litige
a) La demande de remise de véhicule automobile faite par M. Lebel en vertu de l’article 107 LPC est-elle prématurée puisque la Banque de Nouvelle-Écosse n’a pas transmis d’avis de déchéance de bénéfice du terme?
b) Si la demande n’est pas prématurée, les conditions d’application de l’article 107 LPC sont-elles remplies?
Contexte
[3] Le 23 septembre 2013, M. Lebel conclut un contrat de vente à tempérament (Contrat de vente) en vertu duquel il fait l’achat d’un véhicule Chevrolet Cruze, année 2013 de Christin Automobile inc. Le Contrat de vente est cédé à la Banque de Nouvelle-Écosse. L’obligation totale de M. Lebel selon le Contrat de vente est de 24 613 $, incluant le capital et les frais de crédit, et prévoit des versements de 135,38 $ aux deux semaines[3].
[4] Le 21 novembre 2014, soit près de 14 mois après avoir pris possession du véhicule automobile, M. Lebel cesse de faire les paiements requis en vertu du Contrat de vente à tempérament.
[5] Par lettre datée du 26 avril 2016 transmise par ses avocats, la Banque de Nouvelle-Écosse informe M. Lebel qu’il est en défaut de respecter ses obligations découlant du Contrat de vente et l’invite à communiquer avec un de ses préposés afin d’en arriver à un règlement acceptable à la Banque, à défaut de quoi, la Banque l’avise qu’elle a donné mandat à ses avocats d’intenter contre lui des procédures judiciaires[4]. Enfin, la lettre de la Banque informe M. Lebel qu’il a un solde impayé de 16 267,05 $.
[6] Le 18 octobre 2016, M. Lebel introduit sa demande pour remise du véhicule à la Cour du Québec, chambre civile.
Analyse et décision
a) La demande de remise de véhicule automobile faite par M. Lebel en vertu de l’article 107 LPC est-elle prématurée puisque la Banque de Nouvelle-Écosse n’a pas transmis d’avis de déchéance de bénéfice du terme?
[7] La demande de M. Lebel est faite en vertu de l’article 107 LPC. Ce recours est encadré par les articles 104 à 110 de la loi :
104. Dans un contrat, une stipulation ayant pour effet d’obliger le consommateur en défaut à payer en tout ou en partie le solde de son obligation avant échéance, constitue une clause de déchéance du bénéfice du terme.
105. Le commerçant qui se prévaut d’une telle clause doit en informer le consommateur au moyen d’un avis écrit rédigé selon la formule prévue à l’annexe 2. Le commerçant doit joindre à cet avis un état de compte indiquant les renseignements prescrits par règlement.
106. La déchéance du bénéfice du terme ne prend effet qu’à l’expiration d’un délai de 30 jours après réception de l’avis et de l’état de compte prévus à l’article 105.
107. Si le consommateur ne remédie pas au fait qu’il est en défaut dans le délai prévu à l’article 106, le solde de son obligation devient exigible à moins que, sur demande du consommateur, le tribunal ne modifie les modalités de paiement selon les conditions qu’il juge raisonnables ou n’autorise le consommateur à remettre le bien au commerçant.
108. La demande doit être signifiée avant l’expiration du délai prévu à l’article 106.
109. La demande doit être instruite et jugée d’urgence en tenant compte notamment des éléments suivants :
a) le total des sommes que le consommateur doit débourser en vertu du contrat;
b) les sommes déjà payées;
c) la valeur du bien au moment où le consommateur est devenu en défaut;
d) le solde dû au commerçant;
e) la capacité de payer du consommateur; et
f) la raison pour laquelle le consommateur est en défaut.
110. La remise du bien au commerçant autorisée en vertu de l’article 107 éteint l’obligation contractuelle du consommateur et le commerçant n’est pas tenu de remettre le montant des paiements qu’il a reçus.
[8] Le consommateur partie à un contrat de crédit, qui est en défaut et qui ne remédie pas au fait qu’il est en défaut à l’intérieur du délai de 30 jours après la réception de l’avis de déchéance du bénéfice du terme prévu à l’article 106 LPC, peut être forcé à payer le solde de son obligation, à moins qu’il ne s’adresse au tribunal en invoquant l’article 107 LPC et que le tribunal accepte de modifier ses modalités de paiement ou l’autorise à remettre le bien au commerçant.
[9] La demande du consommateur doit être signifiée avant l’expiration du délai de 30 jours de la réception de l’avis de déchéance du bénéfice du terme (article 108 LPC).
[10] Le tribunal peut soit modifier les modalités de paiement selon les conditions qu’il juge raisonnables, ou autoriser le consommateur à remettre le bien au commerçant.
[11] Pour décider de la demande, le tribunal doit tenir compte notamment des éléments énumérés à l’article 109 LPC.
[12] En l’espèce, M. Lebel demande au Tribunal l’autorisation de remettre à la Banque le véhicule Chevrolet. Sa demande soulève la question suivante : la réception d’un avis de déchéance de bénéfice du terme est-elle une condition préalable à une demande de remise du bien (ou de modification des modalités de paiement) faite par un consommateur en vertu de l’article 107 LPC?
[13] Pour répondre à cette question, le Tribunal doit analyser le rôle de l’avis de déchéance du bénéfice du terme dans le contexte de contrats de crédit régis par la LPC.
[14] Le Contrat de vente auquel est partie M. Lebel est un contrat assorti d’un crédit assujetti notamment aux articles 66 à 150 LPC. Le contrat contient une clause de déchéance de bénéfice du terme[5].
[15] Pour ce prévaloir d’une clause de déchéance de bénéfice du terme stipulée dans un contrat de crédit, la LPC impose à tout commerçant une procédure qu’il doit impérativement suivre avant de réclamer du consommateur le solde de son obligation. Le législateur impose aux commerçants un formalisme, afin d’assurer une protection efficace des intérêts du consommateur[6].
[16] La loi exige que tout commerçant doit préalablement informer le consommateur au moyen d’un avis écrit rédigé selon la formule prévue à l’annexe II de la Loi (article 105 LPC).
[17] La loi prévoit également que la déchéance de bénéfice du terme ne prend effet qu’à l’expiration d’un délai de 30 jours après la réception de l’avis (article 106 LPC). Comme l’écrivent les auteurs Nicole L’Heureux et Marc Lacoursière :
Le défaut de donner l’avis ou sa non-conformité empêche l’arrivée de la déchéance du terme. L’avis régulier est une condition essentielle à l’exercice des droits du commerçant.[7]
[18] Ainsi, le solde de l’obligation du consommateur devient exigible à l’expiration du délai de 30 jours de la réception de l’avis de déchéance de bénéfice du terme, à moins que le consommateur remédie au fait qu’il est en défaut ou à moins qu’il se prévale du remède qui est prévu à l’article 107 LPC.
[19] Les pouvoirs dévolus au Tribunal en vertu de l’article 107 LPC sont tout à fait exorbitants du droit civil[8]. À maintes reprises, les tribunaux ont exigé, autant des commerçants que des consommateurs, qu’ils obéissent au formalisme et aux règles de mise en œuvre prévue à la LPC quant à la déchéance du bénéfice du terme et du droit du consommateur d’invoquer l’article 107 LPC.
[20] Par exemple, les tribunaux ont jugé que le délai de 30 jours prévu à l’article 107 LPC est un délai de rigueur[9]. Sauf si le consommateur a été empêché de se prévaloir du remède prévu à l’article 107 LPC par fraude, surprise ou autre cause semblable, le consommateur est forclos de le faire après l’expiration du délai de 30 jours de la réception de l’avis de déchéance de bénéfice du terme[10].
[21] De plus, les tribunaux ont aussi décidé que l’article 105 LPC est d’ordre public. Le créancier doit respecter les exigences de cet article pour demander et obtenir la déchéance de bénéfice du terme[11]. Les propos de la juge Claudine Roy dans Laurentian Bank of Canada c. Yunus[12] sont fort appropriés et il convient de les citer :
[38] Ces dispositions législatives constituent un mécanisme particulier à la mise en œuvre de la déchéance du terme, préalable à l'exercice du droit du commerçant.
[…]
[43] Les dispositions législatives en cause sont d'ordre public. On ne peut y déroger par des conventions particulières (art. 261 de la Loi). Elles doivent être interprétées libéralement. L'article 105 de la Loi impose une obligation impérative; il ne s'agit pas d'une simple formalité.
[44] Il existe plusieurs exemples jurisprudentiels où des institutions financières ont exercé des recours de la même nature que celui en litige ici et où des avis de déchéance du bénéfice du terme ont été envoyés aux consommateurs.
[45] En cas de défaut d'envoi d'un avis de déchéance du bénéfice du terme ou de l'envoi d'un avis non conforme à la Loi, les tribunaux ont considéré les actions irrecevables ou prématurées.
[…]
[62] Il s'agit simplement de constater que l'action est prématurée parce qu'elle n'a pas été précédée d'un avis de déchéance du bénéfice du terme.
(Références omises)
[22] L’affaire Banque de commerce canadienne impériale c. Thibeault[13] illustre bien le mécanisme particulier prévu à la LPC à la mise en œuvre de la déchéance de terme et le recours à l’article 107 de la loi.
[23] Dans cette affaire, en novembre 1980, M. Thibeault achète une automobile par le biais d’un contrat de vente à tempérament, financé par la Banque de commerce canadienne impériale. Il cesse de faire les paiements mensuels et en mars 1982 la banque lui transmet un avis de déchéance du terme. Après l’expiration du délai prévu à la loi, la banque intente une action réclamant le solde dû de 5 813 $.
[24] En défense, M. Thibeault invoque l’article 107 LPC et demande au Tribunal l’autorisation de remettre le véhicule automobile à la banque. La banque répond que M. Thibeault est forclos de faire une telle demande, car il n’a pas exercé ce droit à l’intérieur du délai de 30 jours de la réception de l’avis.
[25] Le juge de la première instance rejette la demande de la banque et autorise M. Thibeault à remettre le bien. Selon le juge, l’article 276 LPC permet au consommateur d’invoquer l’article 107 de la loi nonobstant l’expiration du délai de 30 jours[14].
[26] La banque en appelle de cette décision. Elle plaide que le délai de 30 jours prévu aux articles 106 et 107 LPC est un délai de rigueur de déchéance. La Cour d’appel du Québec lui donne raison. Les passages suivants de l’arrêt sont pertinents aux fins de la présente décision :
Ce droit est en réalité un moyen de défense, le consommateur ne pouvant le faire valoir qu’uniquement à l’encontre d’un avis de déchéance du terme et en aucun autre temps ou autres circonstances.
[…]
Enfin, les articles 104 à 110 constituent un mécanisme particulier à la mise en œuvre de la déchéance de terme. Ils créent, en faveur du consommateur, le droit de payer les arrérages, ou de faire réviser les modalités de paiement ou le droit d’être libéré de ses obligations sur remise du bien, sans qu’il y ait eu violation des obligations que la loi impose au commerçant.
En fait, les articles créent un mécanisme préjudiciel à toute action fondée sur la déchéance du terme. C’est un préalable à l’exercice du droit du commerçant.
[…]
Le mécanisme préjudiciel est autonome : avis au consommateur (article 105), délai de trente jours (article 106, requête du consommateur signifiée avant l’expiration du délai (article 108), instruite et jugée d’urgence (article 109). Et suivant la décision du juge, le consommateur se voit imposer de nouvelles modalités de paiement ou bien il est libéré de ses obligations, en raison de facteurs étrangers au contrat mais mis en regard du contrat lui-même.[15]
(soulignement ajouté)
[27] Dans Banque nationale du Canada c. Côté[16], la banque réclame de M. Côté 4 152 $ fondé sur une clause de déchéance de bénéfice du terme dans un contrat de prêt souscrit par M. Côté. La banque transmet un avis de déchéance de bénéfice du terme à M. Côté et ce dernier ne remédie pas à son défaut dans le délai de 30 jours prévu par la loi.
[28] M. Côté ne nie pas devoir le montant réclamé par la banque, mais plaide qu’il n’a pas la capacité financière de rembourser les sommes réclamées et il demande à la Cour, malgré l’expiration du délai de 30 jours, de réduire ses obligations et de l’autoriser à rembourser par des paiements mensuels inférieurs à ceux prévus au contrat de crédit.
[29] Le Tribunal rejette ce moyen de défense, car M. Côté ne s’est pas prévalu de l’article 107 LPC dans le délai prescrit par la loi. Le juge Bossé écrit :
Il [le droit d’obtenir la modification des modalités de paiement] s’agit d’un droit qui, à l’instar de celui d’obtenir l’autorisation de remettre le bien, le consommateur peut faire valoir uniquement à l’encontre d’un avis de déchéance du terme et aucun autre temps[17].
(soulignement ajouté)
[30] La question soulevée par la demande de M. Lebel ne semble pas avoir été tranchée par les tribunaux depuis l’entrée en vigueur de la LPC. Cependant, dans Gagné c. Associates finance Co. Ltd[18], la Cour supérieure se prononce sur cette question dans le contexte d’une demande faite par un consommateur en vertu de l’article 70 de la Loi de la protection du consommateur de 1971, la loi qui existait avant l’adoption de la LPC en 1978[19].
[31] La Cour rejette la demande du consommateur puisque le commerçant n’a pas transmis au consommateur l’avis de déchéance de bénéfice du terme :
Le procureur de la requérante a surtout insisté sur les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur, et en particulier, l’article 70 de cette loi. Cet article fait bien voir que la requête qui peut être présentée au Tribunal fait suite à l’avis qui aurait été donné en vertu de l’article 69 et que cette requête est pour faire échec à l’obligation que le débiteur aurait de payer le solde de son obligation, après l’expiration du délai de trente jours prévu par l’article 68. Les dispositions de l’article 69, quant à l’avis, sont de droit strict. Dans le présent cas, l’avis R-2 n’indique pas la décision du commerçant de se prévaloir de la déchéance du terme non plus que le droit du commerçant de se prévaloir de cette déchéance, à défaut par le consommateur de remédier au défaut dans les trente jours à la réception de l’avis. L’avis R-2 se limite à réclamer le montant en défaut, soit $431.02, et donne trente jours à la requérante pour remédier à ce défaut. Dans les circonstances, la requête sous l’article 70 ne peut être reçue.
[32] Les auteurs Nicole L’Heureux et Marc Lacoursière écrivent ce qui suit quant aux modalités d’exercice du droit prévu à l’article 107 LPC :
Le consommateur jouit d’un délai de 30 jours après la réception de l’avis et de l’état de compte soit pour remédier à son défaut (article 106), soit pour s’adresser au Tribunal par requête pour faire modifier ses paiements ou pour être autorisé à remettre le bien (article 107).
(soulignement ajouté)
[33] Le Tribunal constate que la formule prévue à l’annexe II de la Loi qui fixe, selon l’article 105 LPC, le contenu minimal de l’avis de déchéance de bénéfice du terme prévoit :
En conséquence, si le consommateur ne remédie pas à son défaut en payant la somme due dans les 30 jours qui suivent la réception du présent avis, le solde de son obligation, au montant de ..............$, deviendra exigible à ce moment.
Le consommateur peut cependant, par demande, s’adresser au tribunal pour faire modifier les modalités de paiement ou, s’il s’agit d’un contrat de vente assorti d’un crédit, pour être autorisé à remettre au commerçant le(s) bien(s) vendu(s).
Cette demande doit être signifiée et produite au greffe dans un délai de 30 jours après réception du présent avis par le consommateur.
(soulignement ajouté)
[34] Selon le Tribunal, il se dégage du texte des articles 104 à 108 LPC et de la jurisprudence citée ci-dessus, que le droit du consommateur de se prévaloir de l’article 107 LPC naît seulement après la réception de l’avis de déchéance de bénéfice du terme exigé par l’article 105 de la loi. En l’absence de cet avis, le droit du consommateur d’invoquer l’article 107 est prématuré.
[35] Tout comme la réception de l’avis par le consommateur est une condition préalable et essentielle à l’exercice par le commerçant de ses droits découlant d’une clause de déchéance de bénéfice du terme, la réception de l’avis est une condition préalable et essentielle au recours du consommateur en vertu de l’article 107 LPC. Le défaut de recevoir l’avis ou sa non-conformité empêche l’arrivée du terme et donc rend prématuré une demande en vertu de cet article.
[36] En l’espèce, la mise en demeure de la Banque de Nouvelle-Écosse datée du 26 avril 2016[20] ne remplit pas les conditions requises pour constituer un avis de déchéance de bénéfice du terme tel que requis par l’article 105 de la loi. La preuve révèle que la Banque n’a jamais transmis l’avis de déchéance exigé par la loi.
[37] Ainsi, la demande faite par M. Lebel en vertu de l’article 107 LPC est prématurée et sera rejetée pour ce seul moyen.
[38] Dans les circonstances, cela dispense le Tribunal de répondre à la deuxième question en litige.
[39] Considérant les motifs de rejet de la demande de M. Lebel, le Tribunal utilisera sa discrétion et rejettera sa demande sans frais.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[40] REJETTE la demande de Joseph Edouard Lebel;
[41] LE TOUT SANS FRAIS.
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Me Smaranda Mihalachi |
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Miller Thomson s.e.n.r.c.l. |
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Avocate de la défenderesse |
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Date d’audience : |
8 février 2017 |
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[1] Pièce P-2.
[2] Loi sur la protection du consommateur, RLRQ, c. P-40.1.
[3] Pièce P-1 : Contrat de vente à tempérament et contrat de vente.
[4] Pièce P-2 : Lettre du 26 avril 2016.
[5] Pièce P-1 : Contrat de vente, article 5 des Conditions de financement.
[6] Pierre-Gabriel JOBIN, La vente, 3e éd., Cowansville, Québec, Éditions Yvon Blais, 2007, para. 271.
[7] Nicole L’HEUREUX et Marc LACOURSIÈRE, Droit de la consommation, 6e éd., Cowansville, Québec, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 238.
[8] Nicole L’HEUREUX et Marc LACOURSIÈRE, Droit de la consommation, 6e éd., Cowansville, Québec, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 240.
[9] Société financière Wells Fargo Canada c. Tourigny, 2011 QCCQ 1579, para. 20.
[10] Banque de commerce canadienne impériale c. Thibeault, [1988] R.J.Q. 8, J.E. 88-37, p. 5-6 (C.A.); voir aussi Nicole L’HEUREUX et Marc LACOURSIÈRE, Droit de la consommation, précité, p. 240.
[11] Sécuritas, groupe immobilier inc. c. Roy, 2015 QCCQ 3197, para. 61-62.
[12] 2010 QCCS 1880. Voir aussi les décisions suivantes sur l’obligation de transmettre l’avis et le caractère prématuré d’une demande introduite par un commerçant alors que l’avis de déchéance n’a pas été reçu : Pointe-Gatineau c. Berthiaume, J.E. 98-1521 (C.S.); Caisse populaire St-René-Goupil c. Satyawan, J.E. 98-454 (C.S.); et Caisse populaire Lajeunesse c. Couillard, J.E. 78-459 (C.S.).
[13] [1988] R.J.Q. 8, J.E.88-37 (C.A.).
[14] Banque canadienne impériale de commerce c. Thibeault, [1983] C.P. 161, J.E. 83-399.
[15] [1988] R.J.Q. 8, J.E. 88-37, aux pages 4,5 et 7 (C.A.).
[16] [1989] R.J.Q. 195 (C.Q.), J.E. 89-192.
[17] Id., p. 6-7
[18] [1975] C.S. 759.
[19] L.Q. 1971, c. 74. Les articles 67 à 70 de l’ancienne LPC se lisaient comme suit :
67. Toute stipulation dans un contrat ayant pour effet d’obliger le consommateur en défaut à payer avant terme, en tout ou en partie, le solde de son obligation constitue une clause de déchéance de terme.
68. Le commerçant qui se prévaut d’une telle stipulation doit en donner avis au consommateur suivant les modalités prévues à l’article 69.
La déchéance ne prend effet qu’à l’expiration d’un délai de trente jours après réception de l’avis par le consommateur.
69. L’avis doit indiquer :
a) la date de l’avis;
b) le nom et l’adresse des parties;
c) le contrat à l’occasion duquel l’avis est donné;
d) le défaut du consommateur;
e) la décision du commerçant de se prévaloir de la déchéance de terme;
f) le droit du consommateur de remédier au défaut dans les trente jours de la réception de l’avis;
g) le droit du commerçant de se prévaloir de la déchéance de terme à défaut par le consommateur de se soumettre aux dispositions du paragraphe f.
70. Si le consommateur ne remédie pas au défaut dans le délai prévu à l’article 68, le solde de son obligation devient exigible à moins que le tribunal, sur requête du consommateur, ne modifie les modalités de paiement selon les conditions qu’il juge raisonnables.
Cette requête doit être signifiée et produite au greffe dans le délai prévu à l’article 68.
Elle doit être instruite et jugée d’urgence d’après les critères de l’article 39.
[20] Pièce P-2.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.