Corriveau et Ministère du Conseil exécutif | 2023 QCCFP 12 | ||
COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE | |||
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CANADA | |||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||
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DOSSIER N° : | 2000040 | ||
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DATE : | 16 juin 2023 | ||
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DEVANT LA JUGE ADMINISTRATIVE : | Nour Salah | ||
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Johanne Corriveau | |||
Partie demanderesse | |||
et | |||
ministère du Conseil exécutif | |||
Partie défenderesse | |||
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DÉCISION | |||
(Article 81.20, Loi sur les normes du travail, RLRQ, c. N-1.1.) | |||
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[1] Le 5 mai 2023, Mme Johanne Corriveau dépose une plainte de harcèlement psychologique à la Commission de la fonction publique (Commission), en vertu de l’article 81.20 de la Loi sur les normes du travail (LNT), à l’encontre de son ancien employeur, le ministère du Conseil exécutif (MCE).
[2] Le 17 mai 2023, le MCE soulève un moyen préliminaire concernant l’absence de compétence de la Commission pour entendre ce recours, car Mme Corriveau serait une fonctionnaire syndiquée.
[3] Le 18 mai 2023, la Commission demande à Mme Corriveau de lui transmettre par écrit, d’ici le 8 juin 2023, ses commentaires concernant la recevabilité de la plainte.
[4] La Commission lui indique également que le dossier sera pris en délibéré au plus tard le 9 juin 2023, et ce, même en l’absence de commentaires de sa part.
[5] Mme Corriveau ne fait parvenir aucun commentaire à la Commission.
[6] Cette dernière juge qu’elle n’a pas compétence pour entendre ce recours.
ANALYSE
[7] En vertu de l’article 81.20 de la LNT, deux conditions doivent être remplies par Mme Corriveau afin que la Commission puisse se saisir de sa plainte de harcèlement psychologique. D’abord, elle doit être une fonctionnaire, soit une personne nommée en vertu de la Loi sur la fonction publique[1]. De plus, elle ne doit pas être régie par une convention collective :
81.20. Les dispositions des articles 81.18, 81.19, 123.7, 123.15 et 123.16 sont réputées faire partie intégrante de toute convention collective, compte tenu des adaptations nécessaires. Un salarié visé par une telle convention doit exercer les recours qui y sont prévus, dans la mesure où un tel recours existe à son égard.
En tout temps avant le délibéré, une demande conjointe des parties à une telle convention peut être présentée au ministre en vue de nommer une personne pour entreprendre une médiation.
Les dispositions visées au premier alinéa sont aussi réputées faire partie des conditions de travail de tout salarié nommé en vertu de la Loi sur la fonction publique (chapitre F‐3.1.1) qui n’est pas régie par une convention collective. Ce salarié doit exercer le recours en découlant devant la Commission de la fonction publique selon les règles de procédure établies conformément à cette loi. La Commission de la fonction publique exerce à cette fin les pouvoirs prévus aux articles 123.15 et 123.16 de la présente loi.
Le troisième alinéa s’applique également aux membres et dirigeants d’organismes.
[8] Or, le MCE indique que Mme Corriveau était une fonctionnaire syndiquée lors de la dernière manifestation alléguée de harcèlement psychologique, soit le 21 octobre 2021.
[9] Incidemment, elle ne respecterait pas la deuxième condition de l’article 81.20 de la LNT puisqu’elle était régie par la Convention collective des fonctionnaires 2015-2020 (convention collective). À ce titre, elle était donc représentée par le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec.
[10] Puisque Mme Corriveau n’offre aucune réponse quant aux arguments invoqués par le MCE et qu’elle a, de plus, indiqué être une fonctionnaire syndiquée dans son formulaire de plainte déposé à la Commission, cette dernière est d’accord avec la position de l’employeur.
[11] La Commission considère que, conformément à la convention collective qui régissait Mme Corriveau au moment des faits pertinents au litige, sa plainte de harcèlement psychologique est de la compétence exclusive d’un arbitre de grief.
[12] La Commission ne peut donc pas se saisir de la plainte déposée par Mme Corriveau puisqu’elle ne respecte pas une des conditions prévues par l’article 81.20 de la LNT.
[13] La Commission a d’ailleurs rendu de nombreuses décisions constatant son absence de compétence pour entendre tout recours d’un fonctionnaire syndiqué[2].
[14] Finalement, la Commission souligne qu’elle est un tribunal administratif qui n’a qu’une compétence d’attribution. Elle ne peut donc exercer que la compétence qui lui est accordée expressément par le législateur[3].
POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE :
DÉCLARE qu’elle n’a pas compétence pour entendre la plainte de Mme Johanne Corriveau.
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| Original signé par : ______________________________ Nour Salah |
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Mme Johanne Corriveau | |
Partie demanderesse | |
Me Édith Létourneau Procureure du ministère du Conseil exécutif | |
Partie défenderesse | |
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Date de la prise en délibéré : 9 juin 2023 |
[1] RLRQ, c. F-3.1.1.
[2] Levesque et Institut de la statistique du Québec, 2023 QCCFP 6; Desouvrey et Ministère de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration, 2022 QCCFP 13; Cossette et Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, 2019 QCCFP 56.
[3] Pierre Issalys et Denis Lemieux, L’action gouvernementale – Précis de droit des institutions administratives, 3e édition, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2009, p. 421-423.
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