Toupin c. Marché IGA Bellevue |
2019 QCCQ 6011 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
ARTHABASKA |
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LOCALITÉ DE |
VICTORIAVILLE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
415-32-700344-180 |
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DATE : |
8 juillet 2019 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
PIERRE LABBÉ, J.C.Q. |
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FRANCINE TOUPIN |
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Demanderesse |
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c. |
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MARCHÉ IGA BELLEVUE |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Ayant fait une chute le 29 décembre 2016 sur un trottoir à la sortie du marché d’alimentation IGA Bellevue (la défenderesse), Francine Toupin (la demanderesse), lui réclame 12 489,54 $, soit 489,54 $ à titre de dommages matériels et 12 000 $ à titre de dommages personnels et moraux.
[2] La défenderesse conteste la demande, niant qu’elle eut été négligente.
LE CONTEXTE
[3] Le 29 décembre 2016, la demanderesse accompagnée de son conjoint s’est rendue chez la défenderesse. Deux entrées permettent d’accéder au marché d’alimentation. En se plaçant en façade du marché, la demanderesse a emprunté l’entrée du côté droit. L’accès extérieur est un trottoir avec une pente ascendante. La demanderesse n’a pas eu de difficulté pour accéder à l’entrée par cette pente dont le côté pour l’entrée paraissait normal.
[4] Selon le relevé météorologique du gouvernement du Canada pour Arthabaska, pour décembre 2016 produit par la défenderesse[1], il est tombé 8.2 cm de neige le 29 décembre 2016.
[5] Dans deux documents produits[2], la demanderesse a longuement détaillé les évènements. En résumé, la demanderesse a précédé son conjoint pour sortir de l’épicerie et elle n’avait pas de sac ou de paquet dans les mains. Il y avait un peu de neige au sol sur le trottoir et en l’empruntant du côté gauche, elle a perdu pied et a fait une chute. À ce moment, il était environ 16 h. Son conjoint l’a aidé à se relever et ils se sont dirigés à l’urgence de l’Hôtel-Dieu-d’Arthabaska afin que la demanderesse passe des radiographies.
[6] Au moment des évènements, la demanderesse portait des bottes d’hiver qu’elle avait achetées l’année précédente[3].
[7] Le conjoint de la demanderesse précise que sur le trottoir il y avait de la neige « tapée », non glacée, mais qui s’est avérée glissante.
[8] La demanderesse a subi une fracture du radius digital gauche et elle a dû porter un plâtre jusqu’au 3 février 2017. Elle a été sous les soins des médecins du 29 décembre 2016 au 18 mai 2017.
[9] Croyant qu’il y avait un problème au tunnel carpien gauche, le Dr Fleury a procédé à une opération, mais finalement ce dernier était en bon état.
[10] Le Dr Lebel, neurologue à Sherbrooke, a conclu le 3 mai qu’il s’agissait plutôt d’une lésion traumatique du nerf médian survenu lors de la fracture.
[11] Selon M. Carl St-Pierre, directeur de la défenderesse, cette dernière a un contrat avec une entreprise de Victoriaville pour le déneigement du stationnement du commerce[4]. Cependant, les trottoirs sont entretenus par les employés de la défenderesse, habituellement les emballeurs. Cet entretien se fait au besoin. Les emballeurs déneigent et au besoin, épandent des abrasifs.
[12] La journée du 29 décembre était plus achalandée qu’à l’habitude considérant que la veille du Jour de l’An approchait.
[13] Ce n’est que le lendemain que M. St-Pierre a été informé de l’incident de la demanderesse. Il n’a pas été informé le 29 décembre et il ajoute qu’il n’y a pas de caméra à cet endroit.
[14] L’assureur de la défenderesse a confié un mandat d’enquête à l’entreprise Indemnipro, soit à M. José Beaulieu. Celui-ci a fait son enquête et a conclu que la défenderesse n’avait pas commis de fautes.
[15] La demanderesse affirme qu’elle a encore des séquelles de cette fracture. Elle a perdu de la force dans le poignet gauche et ne peut soulever certaines choses. Elle précise que sa main gauche demeure sensible au froid et qu’elle a encore des douleurs. Les rapports médicaux font état d’engourdissement à l’annulaire et au majeur de la main gauche. Une infiltration au tunnel carpien n’a pas été efficace. L’opération mentionnée plus haut faite par le Dr Fleury pour le tunnel carpien de la demanderesse a eu lieu le 28 avril 2017.
[16] La demanderesse est limitée dans ses loisirs comme la pratique de la bicyclette et la marche à l’extérieur. Les douleurs persistent et elle doit prendre de l’acétaminophène le matin. Elle ne suit plus de traitement de physiothérapie.
ANALYSE
[17]
La demanderesse a le fardeau de convaincre le Tribunal, par une preuve
prépondérante, que la défenderesse a commis une faute dans l’entretien des
accès à son commerce d’alimentation et que cette faute à un lien de causalité
avec le préjudice subi, et ce, en vertu des articles
1457. Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s’imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui. Elle est, lorsqu’elle est douée de raison et qu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu’elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu’il soit corporel, moral ou matériel. Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d’une autre personne ou par le fait des biens qu’elle a sous sa garde.
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu’un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
2804. La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
[18] Le Tribunal retient de la preuve que le 29 décembre 2016, vers la fin de l’après-midi, le trottoir en pente qui permettait l’accès et la sortie au marché d’alimentation était enneigé et que le passage de la nombreuse clientèle de cette journée-là à fort probablement rendu la neige glissante. De plus, les emballeurs utilisent ce trottoir avec les chariots d’épicerie lorsque des clients demandent que leurs achats soient livrés à leur véhicule. Il est très probable que les emballeurs ont manqué de temps pour l’entretien du trottoir qui normalement, aurait dû être déneigé régulièrement afin que de la neige glissante ne s’y accumule pas.
[19] Par ailleurs, la demanderesse est la seule personne ayant fait une chute à cet endroit le 29 décembre 2016. Les bottes qu’elle portait n’étaient pas inappropriées. Elle n’avait aucun paquet ou sac dans les bras. Elle aurait dû porter une attention particulière à l’état du trottoir puisqu’elle l’avait emprunté pour accéder au marché d’alimentation.
[20] Après analyse de toute la preuve, le Tribunal en vient à la conclusion que la responsabilité doit être partagée à parts égales[5]. Il y a eu faute de la défenderesse dans l’entretien du trottoir et il y a également eu faute de la demanderesse en manquant de prudence dans ces conditions.
[21] La réclamation de la demanderesse pour les dommages personnels et moraux n’est pas exagérée considérant la preuve. Les dommages matériels ont également été prouvés.
[22] En conséquence, la demanderesse a droit à la moitié de la somme réclamée soit 6 244,77 $.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[23] ACCUEILLE en partie la demande.
[24]
CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de
6 244,77 $, plus les intérêts sur cette somme au taux légal, majoré
de l’indemnité additionnelle prévue à l’article
[25] CONDAMNE la défenderesse aux frais de justice.
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__________________________________ PIERRE LABBÉ, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
17 juin 2019 |
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AVIS :
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