R. c. Fournier |
2018 QCCQ 1071 |
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COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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LOCALITÉ DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre criminelle et pénale » |
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N° : |
500-01-088108-136 |
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DATE : |
6 mars 2018 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
PIERRE DUPRAS, J.C.Q. |
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SA MAJESTÉ LA REINE |
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Poursuivante |
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c. SYLVAIN FOURNIER |
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Accusé |
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JUGEMENT RECTIFICATIF |
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[1] Vu le jugement rendu le 1er mars 2018;
[2] Vu l’erreur qui s’est glissée dans la désignation de la position des parties à la première page du jugement en ce qu’elles ont été identifiées respectivement comme étant « poursuivante-intimée » d’une part et « accusé-requérant » d’autre part, alors qu’elles étaient « poursuivante » et « accusé », sans autre qualification de leur position.
[3] Considérant que la désignation des parties aurait dû se lire simplement « poursuivante » et « accusé »;
[4] Considérant qu’il y a lieu de rendre un jugement rectificatif;
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
PRONONCE un jugement rectificatif;
SUBSTITUE les mots « poursuivante » et « accusé » à ceux qui apparaissent à la première page du jugement du 1er mars 2018 et qui désignent erronément les parties comme étant respectivement « poursuivante-intimée » et « accusé-requérant ».
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__________________________________ PIERRE DUPRAS, J.C.Q.
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Me Sarah Sylvain Laporte |
Directeur des poursuites criminelles et pénales |
Pour la poursuite |
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Me Brigitte Martin |
Sylvestre & Associés SENCRL Me Charles André Ashton Ashton Avocats Pour l’accusé
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Dates d’audience : du 27 novembre au 15 décembre 2017
R. c. Fournier |
2018 QCCQ 1071 |
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COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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LOCALITÉ DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre criminelle et pénale » |
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N° : |
500-01-088108-136 |
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DATE : |
1 mars 2018 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
PIERRE DUPRAS, J.C.Q. |
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SA MAJESTÉ LA REINE |
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Poursuivante-intimée |
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c. SYLVAIN FOURNIER |
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Accusé-requérant |
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JUGEMENT |
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[1] Sylvain Fournier est accusé sous deux chefs d’avoir causé la mort de Gilles Lévesque. Au premier, on lui reproche de l’avoir causée par négligence criminelle en ne prenant pas les mesures nécessaires alors qu’il dirigeait l’accomplissement ou l’exécution d’un travail ou d’une tâche, afin d’éviter qu’il n’en résulte des blessures pour autrui.
[2] Le second chef lui reproche d’avoir causé le décès de M. Lévesque en commettant un homicide involontaire coupable.
Aperçu
[3] Le sommaire introductif des faits qui suit est, pour sa majeure partie, tiré de la déposition de l’accusé; les modulations idoines, en fonction d’autres éléments de preuve, seront faites un peu plus loin dans cette rédaction.
[4] Sylvain Fournier est entrepreneur en excavation, l’entreprise dont il est le président s’appelle S. Fournier Excavation Inc. et emploie Gilles Lévesque[1]. Le 3 avril 2012, en compagnie de quelques employés, il se rend au 895, 54e Avenue à Lachine afin d’y remplacer une conduite d’égout.
[5] Il arrive sur les lieux tôt le matin, vers 7 h, avec Gilles Lévesque, Brian Montpetit et il sera suivi par un certain Éric Hamel.
[6] Le contrat[2] intervenu entre l’entreprise et le propriétaire de la résidence sise au 895 de la 54e Avenue, prévoit qu’on devra : « changer tuyau égout à partir de la valve jusqu’au tuyau égout de la rue. Creuser, transporter la terre, mettre pierre 0¾, compacter et renterrer [sic] ».
[7] Ainsi, les travaux commencent-ils de la façon suivante. Gilles Lévesque et un autre coupent, d’abord, l’asphalte à la scie mécanique tandis que Sylvain Fournier prépare la rétrocaveuse. M. Lévesque ramasse ensuite l’asphalte découpé pour le placer dans la pelle de la rétrocaveuse afin qu’il soit chargé dans un camion.
[8] Par après, on débutera le creusement de la tranchée nécessaire pour accéder à la tuyauterie à remplacer; les travaux commencent sur le terrain de la résidence près de la « valve à eau ». Sylvain Fournier manœuvre la rétrocaveuse pendant que, du bord de la tranchée où il se trouve, Gilles Lévesque repère les obstacles et les tuyaux.
[9] Une fois, cette portion du sol excavée, Gilles Lévesque, vers 8 h 30, descend dans le trou qui aurait alors 4 ou 5 pieds de profondeur. Après avoir déterré une partie de l’égout au pic, il change une portion du tuyau et remonte. L’exécution de ce travail aurait nécessité une vingtaine de minutes.
[10] Puis, tandis que Gilles Lévesque le guide par des signes, Sylvain Fournier reprend le creusement de la tranchée jusqu’au centre de la rue. Un nouveau tronçon du vieil égout est retiré vers 11 h.
[11] Après avoir envisagé d’arrêter le travail pour dîner, on décide de le continuer. Tandis que Gilles Lévesque s’emploierait à récupérer les éléments du système d’étançonnement qu’on entend utiliser, Sylvain Fournier s’éloigne, dit-il, de la tranchée pour se diriger vers une remorque attachée à un camion pour y récupérer des panneaux de contreplaqué. Ces panneaux doivent servir à compléter le système d’étançonnement.
[12] Il se dirige donc vers le camion et la remorque qui se trouvent à environ 75 pieds de la tranchée et fait un premier aller-retour entre la remorque et la tranchée.
[13] En revenant d’un second aller-retour, il ne voit plus Gilles Lévesque et affirme avoir entendu un cri : « Viens m’aider ». S’approchant, il le voit maintenant dans le trou là où se trouve le « main à l’eau » dans le milieu de la rue.
[14] Il y avait eu un éboulement sur lui, précise-t-il, il a les jambes prises dans la terre. Il lance le pic et une pelle dans la tranchée et descend à son tour pour enlever la pierre qui le recouvre.
[15] Alors qu’il s’activait à ce faire, il reçoit un appel téléphonique et se redressant, il a vu la paroi sud de la tranchée lui tomber dessus. Il recule de trois pas en criant « Cache-toi » à l’intention de M. Lévesque. En une fraction de seconde, c’est tombé, ajoute-t-il, il y a eu un second éboulement.
[16] Il ne voit plus Gilles Lévesque qui est complètement enseveli. Il panique et crie. Lui-même est coincé dans les matériaux éboulés jusqu’à la taille.
[17] Des secours arriveront bientôt, mais on mettra beaucoup de temps pour réussir à dégager Gilles Lévesque dont on ne pourra que constater le décès. Il est admis qu’il est décédé d’un traumatisme crâniocérébral contondant.
[18] Quant à Sylvain Fournier, il a subi des fractures aux deux jambes, a été hospitalisé durant une dizaine de jours, dont quelques-uns, aux soins intensifs. En outre, en raison de complications, il a été dans le coma durant deux journées.
La preuve
[19] Durant les audiences, seize témoins ont été présentés. Aux fins de l’analyse qui suit, le Tribunal regroupera la plupart des témoins à charge dans les ensembles suivants : les pompiers, les employés de la CNESST, le témoin civil et les experts. Ensuite, nous envisagerons la déposition des deux témoins de la défense, Éric Fournier et son frère Sylvain, l’accusé.
[20] Pour respecter l’ordre chronologique des choses, le premier témoin qui doit faire l’objet de notre attention est M. Dominico Primerano. Non seulement est-il le propriétaire du 895, 54e Avenue et signataire du contrat mentionné au paragraphe 6, mais il est, selon la preuve, le premier à porter secours aux deux hommes après l’éboulement.
[21] Ce jour-là, lui-même travaillait à faire des rénovations chez un voisin qui demeurait aussi dans la 54e Avenue, à environ 500 ou 600[3] pieds de chez lui, de l’autre côté de la rue. Il a fait quelques fois l’aller-retour entre sa maison et celle de son voisin de sorte qu’il a pu observer le chantier devant chez lui.
[22] Il raconte que tout semblait bien aller, Sylvain Fournier manœuvrait la rétrocaveuse, tandis qu’un autre - nécessairement M. Lévesque - regardait la façon par laquelle le trou était creusé.
[23] La dernière fois où il a fait le trajet à partir de son garage jusque chez son voisin, il n’a pas vu, dit-il, ni Sylvain Fournier ni son compagnon. Au moment où il est presque arrivé à la résidence où il travaillait, il a entendu deux appels au secours provenant d’une seule personne, pense-t-il.
[24] Surpris, il retourne à la tranchée et y voit Sylvain Fournier recouvert de terre jusqu’à la taille. Il estime qu’il n’aura mis qu’une minute pour y revenir puisqu’il a couru. Il ne voit rien d’autre.
[25] Il descend dans la fosse pour aider l’accusé et y retire un grand morceau d’asphalte. Quant à M. Lévesque, Sylvain Fournier lui indique qu’il est enterré à l’autre bout de la tranchée en le lui pointant du doigt. Il avait déjà compris qu’il était là en raison de l’amoncellement de terre à cet endroit.
[26] Il tente, donc, de creuser à la pelle à l’endroit indiqué pour secourir M. Lévesque, mais se rend bientôt compte que c’est impossible et retourne auprès de Sylvain Fournier qui est au téléphone pour tenter d’obtenir de l’aide. Un autre homme arrive bientôt pour l’aider à creuser puis finalement les pompiers apparaissent.
[27] Contre-interrogé à l’aide d’une déclaration antérieure, il reconnaît avoir dit aux policiers, « I saw both of them in the trench looking at something » sans qu’il ne soit invité à préciser à quel moment il a fait cette observation. De même, l’exercice lui a-t-il aussi rafraîchi la mémoire quant au prénom de M. Lévesque. Finalement, il reconnaît qu’il savait qui avait crié quand il est retourné, c’était Sylvain Fournier.
[28] Toujours respectant l’ordre chronologique de la séquence qui a suivi l’ensevelissement, le prochain témoin d’intérêt est M. Pilon, premier officier du Service d’incendie de Montréal à se présenter sur les lieux.
[29] Voici les faits saillants de sa déposition. Sur les lieux vers 12 h 08, il arrive de la caserne de Dorval. Aux premiers moments, il note cette tranchée excavée dans la rue et un homme du côté trottoir enseveli de terre jusqu’aux genoux. Quelqu’un dans la tranchée essaie de le sortir de là et un autre est dans la rétrocaveuse.
[30] Il « installe » un poste de commandement et assigne des tâches à ses hommes pour porter secours à Sylvain Fournier. Rapidement, deux pompiers vont descendre avec pelles et cordages pour tenter de le secourir. Il remarque que les parois de l’excavation sont assez droites, à 90 degrés, dit-il.
[31] Les pompiers ainsi descendus vont travailler environ 8 minutes jusqu’à ce que le chef des opérations, M. Cuerrier n’arrive, juge la situation trop dangereuse et ordonne à ses subalternes de sortir. Il faut préciser à ce stade qu’une équipe spécialisée, entraînée pour ce genre de sauvetage est en route.
[32] Au moment où sortent les pompiers, Sylvain Fournier était sur le point d’être transporté hors de la tranchée.
[33] Provenant aussi de la caserne de Dorval, le prochain témoin, le capitaine à la retraite M. Éric Payette, est, de même, arrivé sur les lieux avant l’équipe spécialisée.
[34] Même si c’est le lieutenant Pilon qui « prend » le poste de commandement, c’est lui qui est le supérieur imputable sur les lieux. Il observe donc à son arrivée que Sylvain Fournier, cellulaire à la main, est enseveli jusqu’à la taille. Il voit aussi le propriétaire des lieux et un autre homme dans la tranchée et la rétrocaveuse qui est manœuvrée pour déplacer des choses.
[35] Pour l’essentiel, son témoignage reprend et complète celui de M. Pilon, mais alors qu’on lui présente la pièce P-25, une photo d’éléments d’un système d’étançonnement ou d’étaiement, il ajoute ceci : juste avant l’arrivée de l’équipe spécialisée, il a vu un homme qui sortait un équipement semblable de la remorque et qui l’a déposé « pas loin du trou »; cet équipement n’était pas là avant.
[36] Il décrira cet homme en disant qu’il avait environ 38 ans, faisait environ 5’8’’ ou 5’9’’, pesait environ 180 livres et qu’il était peut-être le frère de Sylvain Fournier, ou le chauffeur de la pelle. Il l’a arrêté, précise-t-il, en lui disant, « Tu peux pas descendre avec ça ».
[37] À l’arrivée de l’équipe spécialisée, il a transmis l’information dont il disposait et n’a plus joué de rôle par la suite.
[38] Le pompier Hearson, quant à lui, est un de ceux qui de la première équipe de Dorval, sont descendus dans la tranchée sous la supervision des Payette et Pilon.
[39] Il décrit les tentatives faites pour secourir Sylvain Fournier avant que M. Cuerrier ne donne l’ordre de sortir de la fosse. Il rapporte que l’accusé se plaignait de douleurs aux jambes et en pointant l’extrémité de l’excavation disait qu’il y avait quelqu’un là.
[40] M. Hearson ajoute qu’alors qu’il creusait près des genoux de l’accusé, il a senti une odeur d’alcool sur sa personne. Il a reconnu qu’il était possible qu’à l’enquête préliminaire, il ait précisé qu’il s’agissait d’une légère odeur d’alcool.
[41] Les deux prochains pompiers faisaient partie, à la date dite, d’une équipe spécialisée à la caserne 47 dont les membres, seuls, avaient les compétences et la formation pour effectuer des sauvetages dans des tranchées. Il s’agit du capitaine à la retraite M. Marsolais et du lieutenant Castonguay. Puisque cette caserne est située près de l’angle Delorimier et Saint-Zotique, naturellement, ils arriveront à Lachine plus tard que leurs confrères de Dorval.
[42] Le capitaine établit ce qui suit. Son équipe était composée de onze personnes et s’est rendue sur les lieux dans trois véhicules. À son arrivée il voit Sylvain Fournier dans sa fâcheuse position qui se tord de douleur. Au sujet de Gilles Lévesque, il dit « Il est en arrière », mais M. Marsolais ne voit que de la terre.
[43] Tout de suite, il fait installer les panneaux, il n’y avait aucune chance à prendre, ajoute-t-il, la tranchée aurait pu céder d’un moment à l’autre et la terre tombe à 80 km à l’heure. Cependant, déjà, il était pratiquement sûr que l’autre victime, M. Lévesque, était morte.
[44] Une fois les panneaux d’étaiement installés on a procédé au sauvetage de M. Fournier, l’opération a duré une quarantaine de minutes. Tout de suite après l’évacuation de ce dernier, on a recommencé l’installation du système d’étaiement dans la zone où se trouvait M. Lévesque et on a mis deux heures et demie ou trois heures avant de le trouver; c’était, observe-t-il, tellement compact qu’il a fallu le déterrer jusqu’aux bottes pour le sortir de là.
[45] Au sujet de l’endroit où M. Lévesque a été retrouvé, il ajoute qu’il était au moins à 5 pieds de profondeur, il était à la droite de la tranchée à deux ou trois pieds de distance du tuyau; sa tête était quasi à la même hauteur que le tuyau. Par ailleurs, pour lui, les parois de l’excavation sont droites, l’une en face de l’autre.
[46] Quand on lui a présenté la photographie P-24 numéro 1 qui, pour les fins d’une meilleure compréhension, correspond à une vue d’un angle différent des éléments du système d’étançonnement représenté sur P-25, il reconnaît les avoir vus au sol près de la rétrocaveuse. Plus tard dans sa narration, abordant le sujet des panneaux de contreplaqué, il ajoutera qu’il a déduit, pour certains, qu’il s’agissait de ceux de l’entrepreneur.
[47] Pour l’essentiel, le témoignage de M. Castonguay corrobore celui de M. Marsolais.
[48] Le prochain ensemble de témoins dont nous allons considérer le propos, est composé d’employés de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail, ci-après la CNESST. Il s’agit de deux inspecteurs, messieurs Zarmoune et Barcena.
[49] Inspecteur en santé et sécurité depuis 2007, Pedro Barcena s’est rendu sur les lieux de l’événement le jour même, vers les 13 ou 14 h. À son arrivée, les pompiers avaient installé un périmètre de sécurité qu’il ne pourra franchir que vers 17 h environ. Il affirme qu’on s’affaire à sortir Sylvain Fournier de la fosse, mais il n’a pas le souvenir de l’avoir vu. Cette journée-là, il fera de nombreuses photographies[4] qui seront produites et commentées devant le Tribunal, de même il a pris quelques mesures de largeur et de profondeur.
[50] En ce qui concerne P-24 et ses deux premières photos, il y reconnaît un système d’étançonnement qui respecte les exigences de la CNESST[5], mais il n’y voit qu’un ensemble au lieu des deux qui sont nécessaires.
[51] Rappelant les exigences du Code de la sécurité pour les travaux de construction[6], il explique qu’à partir de 4 pieds de profondeur, une excavation doit être étançonnée. Cependant, s’il n’y a pas de danger, dit-il, au-delà des 4 pieds les parois peuvent être aménagées à 45 degrés, mais c’est un ingénieur qui doit le déterminer. De surcroît, si la structure d’étançonnement est en bois, ça prend toujours l’attestation d’un ingénieur.
[52] Le 3 avril 2012, il a observé que les parois étaient à 90 degrés, que la profondeur de la fosse excédait les 4 pieds et qu’il n’y avait pas d’étançonnement. La partie la plus profonde se trouvait vers l’égout de la ville et on a mesuré à 8 pieds de profondeur l’endroit où on pouvait faire le raccordement.
[53] Il a vu un énorme danger d’effondrement dans le rapport entre la profondeur, la largeur de la fosse et les angles des parois à 90 degrés. Pour lui, c’était une situation épeurante qui aurait nécessité, l’eut-il su, un arrêt de travail immédiat. En outre, le remblai du côté sud était collé aux rebords de la tranchée, ce qui créait une force supplémentaire. Au nord, le talus ainsi formé avait été déposé à 2 pieds environ du bord alors que le Code demande 3 pieds de marge.
[54] En terminant au chapitre de ses constats, il ajoute qu’il a vu quelqu’un sortir une pelle de la tranchée et qu’il a le vague souvenir qu’on en a aussi sorti un marteau; il complète son commentaire précisant que lorsqu’on excave, on termine le travail au pic et à la pelle.
[55] Hassan Zarmoune est un inspecteur de la CNESST. Le 3 avril 2012 en fin d’après-midi, il a été nommé « enquêteur processus » relativement à notre affaire, et, à ce titre, il avait la responsabilité de produire un rapport d’enquête à son employeur. Il se rendra sur les lieux une première fois, le 4 au matin vers 7 h 30. Lui aussi a fait de nombreuses photographies et mesures[7], puis un croquis.
[56] Il commente la photo P-19 numéro 35 pour en dire qu’elle représente bien les parois verticales de la tranchée.
[57] Il est retourné sur les lieux deux autres fois, dont le 13 avril au moment où le frère de Sylvain Fournier, Éric, a repris les travaux qui avaient été laissés en plan. Les photos du 13 avril illustrent l’utilisation de deux systèmes d’étançonnement : celui nécessitant des panneaux de contreplaqué et celui qui ressemble à une cage.
[58] D’autre part, il a affirmé que le 13 avril on a retrouvé à l’extrémité est de l’excavation, là où M. Lévesque a été enseveli, une pelle et une pioche.
[59] Enchaînant sur le thème proposé par son collègue Barcena, il réitère que si la tranchée dépasse 1,2 m (environ 4 pieds) et si on n’est pas dans le roc, on doit la sécuriser. Dans la terre, il y a un risque, il faut donc un système d’étançonnement ou une pente inspectée par un ingénieur et un aval constaté par un certificat. Il ajoute que le Code précise que le déblai doit être déposé à 1,2 m de la tranchée.
[60] En terminant, signalons que M. Zarmoune a demandé une analyse du sol à la firme Inspec-sol, analyse dont nous examinerons les conclusions un peu plus bas.
[61] Le dernier ensemble de témoins du ministère public qu’il reste à envisager est celui qui regroupe les experts.
[62] Le pathologiste judiciaire Jean-Luc Laporte nous a présenté les conclusions du rapport d’autopsie de M. Lévesque. L’admission signalée au paragraphe 17 reprend quasi intégralement cette conclusion en ce qu’elle constate que le décès de M. Lévesque est attribuable à ce traumatisme crâniocérébral contondant.
[63] Le paragraphe 60 ci-haut annonçait une analyse des sols préparée par la société Inspec-sol, en effet, elle a été présentée au Tribunal par l’ingénieur Kamel Hamouche qui est « directeur géotechnique associé » de cette entreprise.
[64] Pour les fins de l’exercice de synthèse auquel nous nous livrons présentement, il suffira de reproduire les quelques passages qui suivent des conclusions du rapport produit en preuve[8].
[65] Ainsi y lit-on que « les analyses de stabilité à long terme montrent que dans les matériaux rencontrés, une excavation de 2,60 m de profondeur avec des pentes subverticales présente un état de stabilité marginal avec un coefficient de sécurité de l’ordre de l’unité (FS=1,00). De telles pentes ne sont pas sécuritaires »[9].
[66] Puis : « La rupture de la paroi sud a été causée par la combinaison de pentes trop abruptes (subverticales) associées à la mise en place des déblais en crête. La pile mise en place avait une hauteur de 1,30 m et largeur [sic] de l’ordre de 6,00 m. Les calculs de stabilité montrent que l’ajout d’une telle surcharge réduit le facteur de sécurité de 14%. La valeur du coefficient de sécurité après l’ajout de la pile de déblais décroit de […] 1,00 et atteint une valeur de […] 0,86, ce qui implique une rupture de la paroi »[10].
[67] La preuve du ministère public s’est terminée par la déposition d’un autre expert, M. Claude Gou, un ingénieur qui avait reçu le mandat du DPCP de présenter la façon sécuritaire d’excaver une tranchée pour remplacer un tuyau d’égout[11].
[68] Au terme d’une revue des techniques sécuritaires pour faire pareille excavation, il conclut que : « la méthode de travail utilisée par l’entrepreneur au site de Lachine n’était pas sécuritaire en ce que […] les pentes de l’excavation étaient trop raides; aucun système de soutènement des terres n’a été utilisé; des matériaux ont été empilés trop près des limites de l’excavation »[12]. Dans cette logique, quand on lui a montré la photo P-25, qui pour mémoire présente un système d’étançonnement, reconnaissant les éléments métalliques de l’ensemble, il a dit que c’était un système incomplet auquel il manquait le blindage, c’est-à-dire les panneaux de contreplaqué.
[69] Finalement, il croit que le comportement de l’entrepreneur dans ce dossier n’était pas prudent et raisonnable[13].
[70] La défense a entrepris sa présentation par la déposition d’Éric Fournier, frère de l’accusé. Lui-même entrepreneur en excavation, sa compagnie s’appelle AJF Excavation. Au moment où il a commencé l’exploitation de son entreprise, il a acheté deux caissons (systèmes d’étançonnement).
[71] Peu avant le 3 avril, Sylvain Fournier lui avait téléphoné pour lui emprunter ses boîtes d’étanchéité (systèmes d’étançonnement). Gilles Lévesque était passé la veille du 3 pour les récupérer. M. Lévesque est venu chez lui avec un camion et il l’a aidé à placer le tout sur une remorque.
[72] Par la suite, il narre que le jour de l’événement vers 11 h 45 ou midi, il a reçu un appel téléphonique de Sylvain Fournier qui lui demande de venir, car il y a eu un accident. Il se rend sur les lieux dès que possible et y observe que son frère est à un pied du trottoir et qu’il est recouvert de terre jusqu’à la taille. Stéphane Aubry, un cousin à qui le témoin avait lui-même téléphoné, est déjà là et tente de dégager l’accusé. Il note aussi que Martin Fournier, un troisième frère, sort de la rétrocaveuse. Quelques pompiers sont présents, mais le périmètre de sécurité n’a pas encore été dressé.
[73] Il monte à son tour dans la rétrocaveuse dans le but d’enlever un gros morceau d’asphalte de l’endroit où se trouve M. Lévesque. Cependant, les pompiers vont le lui interdire, de même qu’ils feront sortir Stéphane Aubry de la fosse. Puis les pompiers vont éloigner les spectateurs d’environ 40 à 50 pieds. À cet endroit, il est maintenant avec plusieurs membres de la famille et Sylvain Fournier leur téléphone pour leur dire qu’il a froid.
[74] Interrogé à l’aide de la photo P-25, il dira que ce sont ses deux boîtes d’étanchéité composées de deux cylindres et de quatre « plates ». Il ajoutera qu’il y en avait une sur le bord de la tranchée et l’autre près de la remorque ou sur la remorque. C’est l’équipement que M. Lévesque était venu chercher la veille.
[75] De façon compatible à la preuve portée par les employés de la CNESST, il ajoute qu’aussitôt que tu dépasses les 4 pieds il faut mettre ça; si ça n’est pas possible, il faut faire des pentes à 45 degrés.
[76] Invité à examiner la photo P-26 numéro 4 du 13 avril 2012, il dira reconnaître une de ses boîtes d’étanchéité et penser que le contreplaqué est le sien. Après les événements du 3 avril 2012, Sylvain Fournier et lui ont décidé d’acheter ensemble une autre boîte et c’est celle qu’on voit sur la photo P-26 numéro 34.
[77] Le dernier témoin à être entendu par le Tribunal dans cette affaire a été l’accusé lui-même. Les extraits isolés ci-dessous tiendront compte que quelques faits tirés de sa déposition ont déjà été présentés dans la rubrique « Aperçu ».
[78] Ainsi, il connaissait M. Lévesque depuis 2003 ou 2004, il était le père d’une dame qu’il a fréquentée. À compter de 2004, il a travaillé pour lui jusqu’à 40 ou 50 heures semaine; il savait cependant qu’il n’avait pas de cartes de compétence et qu’il n’avait pas encore suivi son cours de sécurité au travail.
[79] Le 3 avril 2012, ce devait être le premier chantier de l’année chez M. Primerano qu’il connait professionnellement depuis 25 ans.
[80] La veille, il avait téléphoné à M. Lévesque pour qu’il prépare l’équipement pour le lendemain. Il s’agissait d’aller chez son frère Éric quérir les « jacks » (cylindres), avec les « plates » d’aluminium. Tout ça, explique-t-il, sert à retenir les parois de chaque côté. Il y avait, au surplus à prendre, 5 feuilles de contreplaqué qui lui appartenaient. C’est le lundi que M. Lévesque devait aller chercher le matériel décrit ci-dessus.
[81] Une fois sur les lieux à la date dite, les travaux vont débuter ainsi que la description en est faite à partir du paragraphe 7 ci-haut.
[82] Vers les 8 h 30, pendant que l’accusé creusait, Gilles Lévesque est allé chercher l’étançonnement et la « bouteille verte » c’est-à-dire le système hydraulique. Alors que le trou sur le terrain de M. Primerano a donc 4 ou 5 pieds de profondeur, on l’étançonne et M. Lévesque y descend pour remplacer une première partie de l’égout[14]. L’exécution de ce travail a requis une vingtaine de minutes environ. Fait à signaler, on aurait monté qu’un seul ensemble du système d’étançonnement et sans les boisages, l’accusé expliquant que le trou n’étant pas profond on y a installé que la structure métallique[15].
[83] Les travaux se sont poursuivis tels que décrits à l’ « Aperçu » et on creuse une fosse d’environ 34 ou 35 pieds de longueur par 48 pouces de largeur au sommet et 42 pouces de largeur au fond. Sylvain Fournier dit avoir déposé le déblai sur le nord de l’excavation comme d’habitude à 3 ou 4 pieds de distance puisqu’il faut le charger dans un camion pour l’évacuer; il affirme avoir fait de même pour le côté sud, c’est-à-dire avoir déposé le tout à 3 ou 4 pieds du trou.
[84] Puis arrivent les onze heures.
[85] Alors, ayant décidé qu’il était trop tôt pour le repas du midi on décide donc de poursuivre le travail. M. Lévesque, dit-il, est allé chercher le système d’étançonnement qu’on avait utilisé plus tôt dans la scène décrite au paragraphe 82. Il le prend aux abords de la première excavation et l’amène dans la rue là où on est maintenant rendus[16]. Pour illustrer son propos, il nous réfère à la photo P-5 numéro 14. L’accusé pendant ce temps dit être allé chercher les panneaux de contreplaqué nécessaires pour monter la « cage ». Il va les chercher à la remorque qui se trouve à 75, peut-être 100, pieds de la fosse. Il restait deux feuilles à débarquer de la remorque, car il avait déjà descendu les autres[17]. Par ailleurs, tout comme l’a affirmé son frère Éric, il précise que le second appareil d’étançonnement se trouve toujours près de la remorque en attendant qu’on l’y prenne.
[86] Il commence par en apporter un premier, car les panneaux sont trop lourds pour les transporter deux à la fois; il le dépose près de M. Lévesque. M. Lévesque sait comment les installer, il l’a fait souvent depuis qu’ils travaillent ensemble; d’ailleurs, il commence à clouer le panneau pour qu’il puisse s’accrocher à l’appareil d’étançonnement qu’il a déplié. Puis, il retourne à la remorque pour transporter le second panneau et c’est à son retour qu’il ne voit plus M. Lévesque.
[87] Entendant un appel à l’aide, il s’approche du trou et voit M. Lévesque les jambes ensevelies jusqu’au-dessus des genoux sous les débris de pierre et de terre. Il est dans la tranchée près du « main à l’eau »[18], dans le milieu de la rue. Il est accoté à l’extrémité est de la tranchée et son visage fait face à l’est[19]; il y avait eu un éboulement sur lui, ajoute-t-il. Il lui lance un pic et une pelle et contourne la fosse jusqu’aux marches de la résidence pour y descendre.
[88] Une fois rendu au fond de la tranchée, il essaie d’enlever les matériaux qui sont tombés sur son compagnon de travail. Lui-même a peur à ce moment qu’un nouvel « éboulis » ne survienne. Puis, selon sa narration, ce second éboulement se produira ensevelissant complètement M. Lévesque et le laissant coincé dans la position que l’on sait, c’est-à-dire enterré jusqu’à la taille à 10 ou 12 pieds de l’endroit où se trouvait M. Lévesque.
Conclusions relatives aux faits
[89] Quant à cette trame factuelle où seul Sylvain Fournier a survécu pour narrer les événements principaux, il nous faut, naturellement au départ, nous interroger sur la valeur à accorder à sa déposition tant sur le plan de l’honnêteté que sur celui de la fiabilité.
[90] Envisagée d’abord uniquement en elle-même, elle n’offre que peu d’éléments de nature à entraîner son rejet. Cependant, il y a, bien sûr, quelques incongruités qui en affaiblissent le poids. Par exemple, le fait qu’on a, au départ, monté le premier ensemble d’étançons, sans les boisages ou blindages, prétextant que la tranchée n’était pas profonde, apparaît difficile à croire aux yeux du Tribunal, autant quant à l’à-propos de la manœuvre qu’en ce qui concerne la valeur des explications fournies pour la justifier. Dans la même veine, on peut s’interroger sur cette logique qui a fait en sorte qu’on choisisse de n’installer qu’un seul ensemble d’étançons alors que l’autre serait resté dans ou aux abords de la remorque.
[91] Toutefois, ce n’est qu’en envisageant le témoignage de l’accusé par rapport à l’ensemble de la preuve qu’on peut prendre la réelle mesure de la qualité du propos qu’il a tenu devant le Tribunal.
[92] Ainsi, ce qu’il a soutenu en ce qui concerne la séquence dans laquelle le système d’étançonnement a été transporté près de la tranchée, doit aussi être considéré en tenant compte de la déposition du pompier Payette. Rappelons que ce dernier a rapporté avoir vu cet homme décrit au paragraphe 35 et 36, sortir de l’équipement semblable à celui photographié en P-25 de la remorque et le déposer au sol juste avant l’arrivée de l’équipe de pompiers spécialisés, bien après, donc, le ou les éboulements. La description offerte, tant de la scène que de l’individu, font en sorte que le Tribunal reconnaît à M. Payette une grande crédibilité.
[93] De même, quant à la séquence des événements qui entoure le nœud de l’affaire, le témoignage de M. Primerano nous fournit-il d’importants éléments d’information. Ainsi, ce dernier nous a dit avoir entendu deux appels au secours portés par la voix de l’accusé. Il affirme qu’en réaction, il s’est mis à courir en direction de la fosse et qu’il y sera en une minute environ; pour mémoire, il n’était pas très loin, entre 300 et 600 pieds de distance, en tout cas, à une ou deux maisons de là.
[94] Les premières observations, qu’il nous a narrées, rapportent l’accusé lui-même enterré jusqu’à la taille et M. Lévesque disparu, complètement enseveli.
[95] Puisque M. Primerano est sorti de chez lui, selon son estimation, de 1 à 4 minutes avant d’avoir entendu le cri qui va l’alerter et qu’il était nécessairement dans les parages, il est étonnant qu’il ne signale rien relativement à ce premier affaissement décrit par Sylvain Fournier. Par exemple, il ne rapporte pas avoir entendu de cri de M. Lévesque ou avoir vu l’accusé descendre précipitamment dans la fosse aux fins de porter secours à M. Lévesque tel que cela nous a été proposé.
[96] Tout ce qu’il dit c’est que sortant de son garage qui est devant la fosse, il marche vers la maison où il doit travailler et il ne voit ni l’un ni l’autre de messieurs Fournier et Lévesque et qu’il n’entend aucun bruit. Il aurait pu ne pas remarquer l’accusé qui pourrait, dans la logique de son propos, avoir été près de la remorque, mais rappelons que M. Lévesque, quant à lui, est censément aux abords de la fosse à préparer les boisages, à les clouer.
[97] Cependant, ce qui, au premier chef, retient l’attention du Tribunal en ce qui concerne la déposition de M. Primerano, c’est cette affirmation concédée[20] en contre-interrogatoire suivant laquelle il a vu les deux hommes au fond de la tranchée[21] en train d’examiner quelque chose. Sans toutefois que la réponse nous précise à quel moment il a fait cette observation, il reste que cette affirmation contredit la narration de l’accusé qui, en somme, ne se place jamais au fond de la tranchée[22].
[98] Le Tribunal retient de la combinaison des témoignages de messieurs Payette et Primerano que M. Lévesque et l’accusé se sont, à un certain moment de notre séquence retrouvés tous les deux, au fond de la tranchée sans que celle-ci ne soit étançonnée.
[99] Pour compléter l’exercice entrepris, le Tribunal relève aussi une contradiction entre la déposition de l’accusé d’une part et une certaine preuve photographique d’autre part. C’est qu’en effet, M. Fournier a soutenu que lors du creusement de la fosse, il plaçait les déblais à 3 ou 4 pieds de l’excavation alors que la photographie P-5 numéro 15 illustre que l’amoncellement se rendait, au contraire, tout près du côté sud du trou.
[100] D’autres éléments, de preuve circonstancielle cette fois, sont aussi à prendre en compte dans l’évaluation de la valeur à attribuer à la thèse dont la défense a fait la soutenance et qui est essentiellement portée par la déposition de l’accusé.
[101] Ainsi, rappelons que l’accusé a décrit M. Lévesque après le premier affaissement, pris dans les éboulis jusqu’au-dessus des genoux faisant face à l’est et accoté sur la paroi est de la tranchée[23]. Dans ces circonstances, il est difficile d’imaginer qu’il ait pu se déplacer d’autant plus que, selon le témoignage de Sylvain Fournier, il ne semblait pas pouvoir le faire. Or, son corps est retrouvé non pas tout près de la paroi est de la tranchée, mais quelques pieds plus loin. Au soutien de cette proposition, la photographie P-5 numéro 3 est éloquente. On y voit une échelle appuyée sur la paroi est et le corps de M. Lévesque plus loin. La distance est bien sûr difficile à évaluer à partir d’une simple photo, mais la pelle qui gît sur le sol et peut-être aussi la largeur des panneaux de contreplaqué, nous en donnent-ils un indice. De toute façon, aucune partie du corps de M. Lévesque n’est-elle « accotée » sur la paroi est ou encore près de de cette paroi[24].
[102] Au surplus, le pompier Marsolais qui a assisté à la découverte du corps de M. Lévesque a décrit sa position à deux ou trois pieds du tuyau et sa tête quasi à la même hauteur que le tuyau. Difficile d’imaginer comment sa tête aurait pu se retrouver à cette hauteur après un premier éboulement qui aurait recouvert les jambes de M. Lévesque jusqu’au-dessus des genoux.
[103] Toujours dans la rubrique de la preuve circonstancielle, deux documents déposés de consentement méritent maintenant notre attention. Il s’agit du « Registre d’appels cellulaires de l’accusé le 3 avril 2012 »[25] et du « Tableau du registre du cellulaire 514-[…] »[26]. Dans ce dernier cas, il s’agit d’un inventaire dressé par l’enquêteuse au dossier, madame Desrochers, des appels reçus et composés par l’accusé pendant qu’il était coincé dans la fosse.
[104] Sans qu’il soit nécessaire de commenter chacune des inscriptions qui y apparaissent, notons que l’accusé a téléphoné à différentes personnes alors qu’il est dans la position que l’on sait, mais qu’il n’a pas composé le 911.
[105] Même en tenant compte de la situation difficile dans laquelle se trouvait l’accusé, cette preuve de conduite post-délictuelle s’ajoute au faisceau des éléments décrits ci-dessus. En effet, ce n’est pas que Sylvain Fournier était dans l’impossibilité de le faire puisqu’il a composé de nombreux appels, mais c’est qu’il ne l’a pas fait alors que M. Lévesque est enseveli.
[106] Ce type de preuve peut servir à soutenir certaines inférences[27], par exemple qu’il a agi illégalement ou qu’il ne devrait pas être cru[28]. Tenant compte de l’ensemble des considérations énoncées plus haut, puis de cette preuve additionnelle, le Tribunal rejette la version des événements portée par l’accusé et conclut que l’accusé et M. Lévesque sont descendus dans la fosse pour y continuer l’exécution du travail entrepris sans que les mesures de sécurité exigées par le Code n’aient été mises en place.
[107] Le Tribunal ne croit pas la version des événements qu’il a présentée non plus qu’elle ne soulève de doute raisonnable chez lui. Dans cette logique, il rejette, donc, la thèse soutenue par la défense selon laquelle la mort de M. Lévesque serait le résultat d’un accident engendré par le comportement imprévisible de ce dernier.
Le droit et son application aux faits
[108] Voici d’abord les dispositions législatives et réglementaires pertinentes en ce qui concerne le deuxième chef, celui relatif à l’homicide involontaire coupable. Premièrement les alinéas 222 (5) a) et b) du Code criminel :
Homicide coupable
[...]
(5) Une personne commet un homicide coupable lorsqu’elle cause la mort d’un être humain :
a) soit au moyen d’un acte illégal;
b) soit par négligence criminelle;
[...]
[109] Puis l’article 3.15.3 du Code de sécurité pour les travaux de construction qui prévoit que :
3.15.3. 1. L’employeur doit s’assurer que les parois d’une excavation ou d’une tranchée sont étançonnées solidement, avec des matériaux de qualité et conformément aux plans et devis d’un ingénieur. Aucun étançonnement n’est exigé dans les cas suivants:
1 lorsque la tranchée ou l’excavation est faite à même du roc sain ou lorsqu’aucun travailleur n’est tenu d’y descendre;
2 lorsque les parois de la tranchée ou de l’excavation ne présentent pas de danger de glissement de terrain et que leur pente est inférieure à 45º à partir de moins de 1,2 m du fond;
3 lorsque les parois de la tranchée ou de l’excavation ne présentent pas de danger de glissement de terrain et qu’un ingénieur atteste qu’il n’est pas nécessaire d’étançonner, compte tenu de la pente, de la nature du sol et de sa stabilité. Une copie de l’attestation de l’ingénieur doit être disponible en tout temps sur le chantier de construction.
On entend par roc sain, un roc qui ne peut être excavé autrement qu’à l’aide d’explosifs.
[...]
[110] Finalement, les articles 51, 236 et 237 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail qui précisent que :
51. L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique du travailleur. Il doit notamment:
[…]
3° s’assurer que l’organisation du travail et les méthodes et techniques utilisées pour l’accomplir sont sécuritaires et ne portent pas atteinte à la santé du travailleur;
[...]
9° informer adéquatement le travailleur sur les risques reliés à son travail et lui assurer la formation, l’entraînement et la supervision appropriés afin de faire en sorte que le travailleur ait l’habileté et les connaissances requises pour accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié;
[...]
236. Quiconque contrevient à la présente loi ou aux règlements ou refuse de se conformer à une décision ou à un ordre rendu en vertu de la présente loi ou des règlements ou incite une personne à ne pas s’y conformer commet une infraction et est passible [...]
237. Quiconque, par action ou par omission, agit de manière à compromettre directement et sérieusement la santé, la sécurité ou l’intégrité physique d’un travailleur commet une infraction et est passible: [...]
[...]
[111] Cela établi, les composantes essentielles de l’infraction d’homicide involontaire coupable ont récemment été rappelées par notre Cour d’appel dans l’arrêt R. c. Charbonneau[29] :
C’est ainsi qu’il est désormais reconnu que l’homicide coupable découlant d’un acte illégal exige la preuve hors de tout doute raisonnable des éléments suivants : (1) une conduite qui constitue un acte illégal, (2) l’acte illégal a causé la mort d’un être humain, (3) l’acte illégal ne constitue pas une infraction de responsabilité absolue, (4) l’acte illégal est objectivement dangereux, (5) l’intention criminelle requise pour l’acte illégal sous-jacent et (6) … la prévisibilité objective de lésions corporelles en ce qui concerne une accusation d’homicide involontaire coupable.
[112] Par ailleurs, le cheminement du dossier de Sylvain Fournier, avant que ne débute son procès, l’a amené à la Cour supérieure à l’occasion d’une demande de contrôle judiciaire relativement à la citation à procès sur le chef lui reprochant la commission d’un homicide involontaire coupable. Cette demande a été rejetée le 31 octobre 2016 par le juge Cournoyer dans le dossier portant le numéro 500-36-007771-150[30]. Quelques passages de sa rédaction nous précisent le prisme à travers lequel l’infraction doit être envisagée et, à ce titre, méritent d’être repris :
[70] Lorsque l'acte illégal sur lequel se fonde une accusation d'homicide involontaire coupable est une infraction de responsabilité stricte objectivement dangereuse, la poursuite doit prouver hors de tout doute raisonnable que la conduite de l'accusé constitue un écart marqué à la conduite d'une personne raisonnable. Aucun renversement de fardeau de la preuve ne se justifie.
[…]
[80] Lorsque l'infraction sous-jacente sur laquelle se fonde une accusation d'homicide involontaire coupable consiste en une infraction de responsabilité stricte, la poursuite doit établir les éléments suivants : 1) la commission d'une infraction de responsabilité stricte objectivement dangereuse; 2) la conduite de l'accusé constitue un écart marqué à la conduite d'une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances; et 3) compte tenu de toutes les circonstances, une personne raisonnable aurait prévu le risque de lésions corporelles.
[…]
[83] La contravention à l'obligation d'étançonner solidement les parois d'une excavation établie à l'article 3.15.3 du Code de sécurité constitue une infraction de responsabilité stricte selon l'article 236 de la LSST.
[84] Cette infraction est objectivement dangereuse.
[85] L'omission de respecter cette obligation est un écart marqué à la conduite d'une personne raisonnable qui aurait dû prévoir le risque que posait l'omission de mettre en place un étançonnement solide.
[113] En somme, voici la grille qui fixe le fardeau de la couronne en ce qui a trait au second chef. Ainsi, devait-elle établir hors de tout doute raisonnable les éléments qui suivent:
I. La conduite qui constitue l’acte illégal.
II. La mort d’un être humain causée par cette conduite.
III. Que l’acte illégal est objectivement dangereux.
IV. Puisqu’il s’agit d’une infraction de responsabilité stricte, elle devait établir que la conduite de l’accusé constitue un écart marqué par rapport à la conduite d’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances.
V. Puis, que compte tenu de toutes les circonstances, une personne raisonnable aurait prévu le risque de lésions corporelles.
[114] Reprenant maintenant les facteurs isolés au paragraphe précédent, le Tribunal conclut de la preuve qui a été administrée, que la conduite de l’accusé constitue un acte illégal, une contravention claire aux obligations édictées à l’article 3.15.3 du Code de sécurité pour les travaux de construction, en ce que l’accusé, employeur de M. Lévesque, ne s’est pas assuré que les parois de la tranchée en cause, soient étançonnées solidement avec les matériaux requis suivant les exigences cristallisées au premier paragraphe du texte.
[115] Deuxièmement, cet acte illégal a, sans contredit, causé la mort de monsieur Lévesque.
[116] Troisièmement, l’acte illégal est objectivement dangereux ainsi qu’en a décidé la Cour supérieure.
[117] Le Tribunal conclut par ailleurs, en quatrième lieu, que la conduite de l’accusé représente un écart marqué par rapport à la conduite d’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances. Ainsi mesurée à l’aune du comportement qu’aurait eu cet étalon archétypal dans les mêmes conditions, la conduite de l’accusé se caractérise-t-elle par cet écart marqué par rapport à la norme. La personne raisonnable n’aurait pas adopté la ligne de conduite prise par l’accusé eut-elle été placée dans les mêmes circonstances, loin de là. D’ailleurs, la preuve révèle que plusieurs observateurs de la scène ont exprimé des inquiétudes au sujet de la configuration de la fosse et au fait qu’on a dû y descendre sans étançonnement.
[118] Pour mémoire, M. Pilon a raconté que M. Cuerrier a mis fin à ses manœuvres jugeant la situation trop dangereuse. Puis, le capitaine Marsolais a dit qu’en arrivant sur les lieux, il a fait installer les panneaux, car la tranchée aurait pu céder d’un moment à l’autre. M. Barcena a, quant à lui, qualifié la situation d’épeurante disant qu’elle aurait nécessité un arrêt immédiat des travaux. Le Tribunal réfère aussi le lecteur aux observations des experts, particulièrement à celle de M. Gou qui est reproduite au paragraphe 69.
[119] Cinquièmement, revenant notre analyse, le dernier ensemble de considérations nous amène à nous interroger sur la prévisibilité du risque de lésions corporelles. Dans la foulée de ce qui précède, le Tribunal estime que tout converge vers cette conclusion inéluctable, c’est-à-dire qu’une personne raisonnable dans les mêmes circonstances aurait prévu le risque de lésion corporelle.
[120] La géométrie de la fosse, sa largeur, sa profondeur, les angles des parois à 90 degrés, a-t-on établi, les dépôts de déblai sur les deux côtés à des distances insuffisantes par rapport à la réglementation en vigueur et surtout le fait qu’on doive terminer le travail d’excavation et de raccordement manuellement à 8 pieds de profondeur dans un espace de 42 pouces de largeur, convainquent le Tribunal qu’objectivement parlant, le risque de lésion corporelle était évident, patent pour l’observateur raisonnable placé dans les mêmes circonstances.
[121] En conséquence de ce qui précède, la couronne s’étant acquittée de son fardeau, le Tribunal déclare l’accusé Sylvain Fournier coupable du second chef de l’acte d’accusation.
[122] Cela étant, nous allons maintenant nous pencher sur les questions relatives au premier chef d’accusation et sur la négligence criminelle qui le caractérise :
Négligence criminelle
219 (1) Est coupable de négligence criminelle quiconque :
a) soit en faisant quelque chose;
b) soit en omettant de faire quelque chose qu’il est de son devoir d’accomplir,
montre une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui.
Définition de devoir
(2) Pour l’application du présent article, devoir désigne une obligation imposée par la loi.
[123] Revenant à la décision de notre Cour d’appel citée au paragraphe 111[31], le juge Gagnon a aussi rappelé à cette occasion les éléments essentiels de la négligence criminelle causant la mort :
[62] Cela dit, causer la mort par négligence criminelle (art. 219 C.cr.) nécessite la preuve (1) d’un comportement (un acte ou une omission de faire quelque chose qu’il est de son devoir légal d’accomplir) qui cause la mort d’un être humain et (2) le comportement fait montre d’une insouciance déréglée ou téméraire pour la vie ou la sécurité d’autrui[29]. La mens rea de l’infraction est établie par la preuve que le comportement en cause constitue un écart marqué et important par rapport à la norme de prudence que respecterait une personne raisonnablement prudente placée dans des circonstances[30] où l’accusé a, soit eu conscience du risque grave et évident sans pour autant l’écarter, soit ne lui a accordé aucune attention[31].
[124] De la même façon qu’en ce qui concerne l’infraction d’homicide involontaire au paragraphe 113, voici un sommaire des éléments essentiels que la couronne devait prouver hors de tout doute raisonnable pour s’acquitter de son fardeau :
I. Un acte ou bien une omission que l’accusé avait légalement le devoir d’accomplir.
II. Que cet acte ou cette omission a causé la mort d’un être humain.
III. Que le comportement en cause révèle une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie ou la sécurité d’autrui.
IV. La preuve d’un écart marqué et important par rapport à la conduite d’une personne raisonnablement prudente dans des circonstances où l’accusé soit a eu conscience d’un risque grave et évident sans pour autant l’écarter, soit ne lui a accordé aucune attention[32].
[125] Relativement à la seconde exigence, nous avons déjà conclu que le comportement de l’accusé avait causé la mort de M. Lévesque. Cela dit, ce comportement constituait-il cet acte ou cette omission qu’il était du devoir légal de Sylvain Fournier d’accomplir?
[126] Dans les suites de la catastrophe de la mine Westray le Parlement a adopté en 2003 l’article 217.1 du Code criminel qui édicte ce qui suit :
Obligation de la personne qui supervise un travail
217.1 Il incombe à quiconque dirige l’accomplissement d’un travail ou l’exécution d’une tâche ou est habilité à le faire de prendre les mesures voulues pour éviter qu’il n’en résulte de blessure corporelle pour autrui.
2003, ch. 21, art. 3.
[127] En lui-même, cet énoncé qui fixe l’obligation qui était faite à l’accusé est suffisant pour soutenir la conclusion selon laquelle son comportement, au jour dit, constitue une omission de faire quelque chose qu’il était de son devoir légal d’accomplir. Le Tribunal ajoute que ce devoir légal aussi moulé dans la législation provinciale reproduite au paragraphe 109, sert, de même, d’assise à notre raisonnement.
[128] En outre, le Tribunal conclut que l’accusé, en omettant de respecter les obligations susdites a démontré une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la sécurité et de la vie de M. Lévesque. Le comportement en cause se distingue nettement par l’indifférence, le détachement, le désintéressement et révèle une absence totale de considération envers ses conséquences prévisibles[33].
[129] Venant maintenant à cette référence qu’est la personne raisonnablement prudente placée dans les mêmes circonstances, le Tribunal conclut qu’en comparaison avec le comportement qu’elle aurait adopté, celui de l’accusé se caractérise par un écart marqué et important[34]. Le Tribunal conclut aussi que cette même personne raisonnablement prudente aurait prévu que ce comportement posait un risque grave pour la vie ou la sécurité d’autrui.
[130] Au soutien de ce qui précède, nous réitérons les observations formulées aux paragraphes 118 et 120 ci-haut.
[131] L’écart entre la conduite en cause et celle qui doit servir aux fins de comparaison est non seulement marqué, mais il est marqué et important. Cette norme, plus exigeante que celle qui est appliquée à d’autres infractions criminelles basées sur la négligence, requiert la preuve hors de tout doute d’un tel décalage pour en arriver à une détermination de culpabilité. Nous sommes en présence d’un pareil écart.
[132] Le Tribunal a retenu qu’aucune des mesures imposées par la réglementation ou par la loi n’a été mise en place pour assurer la sécurité de M. Lévesque. De surcroît, il retient que l’accusé n’a accordé aucune attention à ce risque grave et évident pour la sécurité de M. Lévesque qu’il a lui-même créé.
[133] L’omission de respecter ses obligations alors qu’il était tenu de prendre les mesures voulues pour éviter des blessures corporelles et, bien sûr, la mort de M. Lévesque établit cet écart marqué et important dont la preuve a été faite hors de tout doute raisonnable.
[134] Conséquemment, la couronne s’étant acquittée de son fardeau, Sylvain Fournier est aussi déclaré coupable sur le premier chef de l’acte d’accusation.
[135] Cependant, la règle qui prohibe les déclarations de culpabilité multiples conformément à l’arrêt Kienapple et sa descendance[35] entraînera un arrêt conditionnel des procédures sur le premier chef d’accusation.
POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL :
DÉCLARE que relativement au second chef d’accusation, l’accusé Sylvain Fournier est coupable de l’homicide involontaire qu’on lui reproche à l’égard de la mort de Gilles Lévesque.
ORDONNE l’arrêt conditionnel des procédures en ce qui concerne le premier chef d’accusation relatif à la négligence criminelle.
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__________________________________ PIERRE DUPRAS, J.C.Q.
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Me Sarah Sylvain Laporte |
Directeur des poursuites criminelles et pénales |
Pour la poursuite |
|
Me Brigitte Martin |
Sylvestre & Associés SENCRL Me Charles André Ashton Ashton Avocats Pour l’accusé
|
Dates d’audience : du 27 novembre au 15 décembre 2017
[1] Voir P-1, par. 5.
[2] Voir P-17.
[3] Il a aussi dit à une ou deux maisons de chez lui à 300 pieds.
[4] Voir P-24, P-25 et P-26.
[5] Voir P-23, p. 13.
[6] Chapitre S-2.1, r 4, article 3.15.3.
[7] Voir P-20 à P-22.
[8] Voir P-30.
[9] Idem, p. 14.
[10] Idem.
[11] Voir P-33, p. 1.
[12] Voir P-33, p. 10.
[13] Idem.
[14] Voir P-19, photographie no 19.
[15] Voir P-22, photographie no 50.
[16] Voir P-36.
[17] Sur P-24, photographies numéro 14 et 17, l’accusé pense y reconnaître son contreplaqué.
[18] Voir P-22, photographies no 6, 7, 8 et 9.
[19] Voir les annotations sur P-37.
[20] De l’avis du Tribunal, le témoin cherchait à éviter d’avoir à répondre et esquivait la question.
[21] Supra, par. 27.
[22] Conformément à l’enregistrement mécanique du 7 décembre 2017 à 14 h 30 et le reste de sa déposition.
[23] Voir P-37.
[24] Voir P-5, no 2 et 4.
[25] Voir P-3.
[26] Voir P-4.
[27] R. c. Barton, 2017 ABCA 216, par. 59.
[28] R. c. White, [1998] 2 RCS 72, par. 26.
[29] 2016 QCCA 1354, par. 60.
[30] 2016 QCCS 5456.
[31] R. c. Charbonneau, préc., note 28, par. 62.
[32] PARENT, H., Traité de droit criminel, t. 2, 3e éd., « La culpabilité », Montréal, Éditions Thémis, 2014, p. 413.
[33] Idem, p. 408.
[34] R. c. J.F., 2008 CSC 6, par. 9 et 16.
[35] Kienapple c. La Reine [1975] 1 R.C.S. 729; R. c. Prince [1986] 2 R.C.S. 480; R. c. Provo [1989] 2 R.C.S. 3.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.