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Décision

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Camping Koa Montréal-Ouest c. Gauthier

2015 QCCA 1261

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

N° :

500-09-024190-142

(760-17-002739-111)

 

DATE :

30 juillet 2015

 

 

CORAM :

LES HONORABLES

GENEVIÈVE MARCOTTE, J.C.A.

JEAN-FRANÇOIS ÉMOND, J.C.A.

ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.

 

 

CAMPING KOA MONTRÉAL-OUEST

APPELANTE - Demanderesse-intimée

c.

 

MARC GAUTHIER

INITMÉ - Défendeur-requérant

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           L’appelante se pourvoit contre un jugement rendu le 19 décembre 2013 par la Cour supérieure, district de Beauharnois (l’honorable Marie-France Courville) qui accueille le moyen déclinatoire de l’intimé à l’encontre d’une requête en injonction interlocutoire et permanente cherchant à lui ordonner de quitter un terrain sur lequel il a fait installer une maison mobile.

[2]           Pour les motifs du juge Mainville, auxquels souscrivent les juges Marcotte et Émond, LA COUR :

[3]           ACCUEILLE l’appel;

[4]           INFIRME le jugement de la Cour supérieure rendu le 19 décembre 2013 dans le dossier 760-17-002739-111;

[5]           DÉCLARE la Cour supérieure compétente pour entendre la requête en injonction permanente de l’appelante;

[6]           RETOURNE le dossier à la Cour supérieure afin que la requête en injonction permanente de l’appelante puisse être entendue dans les meilleurs délais;

[7]           CONDAMNE l’intimé aux dépens tant en première instance qu’en appel.

 

 

 

 

GENEVIÈVE MARCOTTE, J.C.A.

 

 

 

 

 

JEAN-FRANÇOIS ÉMOND, J.C.A.

 

 

 

 

 

ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.

 

Me Jean-Gabriel Mercier-Rancourt

RANCOURT LEGAULT JONCAS

Pour l’appelante

 

Me Dany Montpetit

PERRAS COUILLARD AVOCATS

Pour l’intimé

 

Date d’audience :

Le 10 juin 2015

 


 

 

MOTIFS DU JUGE MAINVILLE

 

 

[8]           L’appelante, Camping Koa Montréal-Ouest, se pourvoit contre un jugement rendu le 19 décembre 2013 par la Cour supérieure, district de Beauharnois (l’honorable Marie-France Courville). Ce jugement accueille le moyen déclinatoire de l’intimé, Marc Gauthier, à l’encontre d’une requête en injonction interlocutoire et permanente cherchant à lui ordonner de quitter un terrain sur lequel il a fait installer sur des blocs une maison mobile de type « Bonneville ».

[9]           Bien que les parties aient signé depuis 1999 divers baux indiquant que le terrain en cause était loué à des fins de villégiature, la juge de première instance a conclu, à la lumière de la preuve qui lui a été soumise, que l’intention véritable des parties était plutôt de louer le terrain à des fins résidentielles. Puisque l’article 1892 du Code civil du Québec (« C.c.Q.  ») assimile le bail d’un terrain destiné à recevoir une maison mobile à celui d'un logement, la juge a conclu que le litige relevait de la juridiction exclusive de la Régie du logement par l’effet de l’article 28 de la Loi sur la Régie du logement[1].

[10]        La seule véritable question en litige dans cet appel est de savoir si le bail en cause tombe sous l’exception énoncée au 3e alinéa de l’article 1892 du C.c.Q. concernant le bail d’un logement loué à des fins de villégiature.

Le contexte du litige

[11]        L’appelante exploite un emplacement à Coteau-du-Lac aménagé comme camping depuis 1990. Le camping comprend environ 120 emplacements, dont 18 sont loués pour 12 mois alors que les autres sont loués à la journée ou pour des périodes pouvant s’échelonner jusqu'à 6 mois.

[12]        La section du camping comprenant les 18 emplacements loués pour 12 mois est ouverte à longueur d’année et son déneigement est effectué par l’appelante. Sont aussi offerts des services d’eau potable, d’eaux usées et de collectes d’ordures, le tout fourni durant toute l’année par l’appelante.

[13]        En 1999, l’intimé, qui passait jusqu’alors ses étés au camping Choisy à Rigaud dans une roulotte à sellette, cherche un emplacement pour l’hiver. Il loue un terrain de l’appelante parmi les 18 emplacements qui permettent la villégiature d’hiver. Un bail est alors signé entre les parties, lequel indique que le terrain en cause est loué à des fins de villégiature. Pendant quelques années, l’intimé installe sa roulotte au camping Choisy pour l’été et au camping de l’appelante pour l’hiver.

[14]        À compter de l’hiver 2001, l’intimé installe sa roulotte chez l’appelante de manière définitive. Il renouvelle alors son bail qui indique toujours que le terrain est loué à des fins de villégiature. En 2006, lorsque l’appelante aménage certains emplacements de manière à offrir des services d’eau potable et d’eaux usées, il remplace sa roulotte par une maison mobile de type « Bonneville » qu’il installe sur des blocs de ciment. Il y ajoute un auvent et un abri « Tempo » pour les mois de novembre à avril.

[15]        En 2008, l’intimé met sa maison mobile en vente par l’intermédiaire d’un agent d’immeubles. La fiche descriptive de la maison mobile indique que le terrain sur lequel elle est installée est loué et spécifie qu’un « contrat de villégiature doit être accepté par le propriétaire »[2]

[16]        En 2010, une promesse d’achat intervient entre l’intimé et un tiers, mais cette vente ne se réalisera pas, car la Ville de Coteau-du-Lac avise l’acquéreur potentiel que la maison mobile contrevient au règlement de zonage de la Ville. En effet, la Ville soutient que le règlement interdit d’occuper une maison mobile dans le secteur en cause[3].

[17]        À la suite de ces évènements, à l’été 2011, lors de la période de renouvellement de son bail, l’intimé refuse de signer un nouveau bail annuel à des fins de villégiature pour le terrain en cause. En conséquence, le 21 septembre 2011, l’appelante lui expédie une mise en demeure le sommant de quitter le terrain au plus tard le 31 octobre 2011. Le lendemain, l’intimé demande à la Régie du logement d’invalider cette expulsion et de confirmer sa compétence pour entendre l’affaire au motif que le terrain n’est pas loué à des fins de villégiature.

[18]        Quelques jours plus tard, l’appelante dépose une requête en injonction interlocutoire et permanente auprès de la Cour supérieure demandant une ordonnance enjoignant à l’intimé de quitter le terrain. L’intimé dénonce alors un moyen déclinatoire au motif que le litige relève de la compétence exclusive de la Régie du logement.

[19]        Notons qu’à la suite de récriminations de la Ville, les propriétaires de l’appelante, Mme Lyne Joannette et M. Christian Renaud, signent une entente avec la Ville en 2012 par laquelle ils reconnaissent qu’en vertu des règlements de zonage applicables, les installations permanentes et les maisons mobiles ne sont pas autorisées sur les sites de camping. Ils s’engagent, entre autres, à titre de propriétaires, à entreprendre des démarches pour faire cesser les usages et les installations qui ne sont pas conformes aux règlements et à démolir ou à déménager hors du site les constructions permanentes installées sur le site de camping, notamment les constructions répondant à la définition de « maison mobile », au plus tard le 30 avril 2020, à en informer par écrit les personnes concernées et à s’assurer que la clientèle comprenne bien qu’elle ne peut y élire domicile, ni y habiter à l’année[4].

Le jugement de la Cour supérieure

[20]        La juge de première instance cite abondamment le texte du professeur Pierre-Gabriel Jobin portant sur le louage[5] pour conclure qu’un bail annuel n’est pas un obstacle à la location à des fins de villégiature, mais qu’un lieu de villégiature peut néanmoins être soumis aux règles du bail d’un logement si le locateur y consent, au moins implicitement.

[21]        La juge s’exprime comme suit aux paragraphes 26 à 27 de son jugement, énonçant la méthodologie qu’elle entend suivre pour en arriver à une décision :

            [26] L’une des parties ne peut imposer unilatéralement à l’autre des fins particulières pour lesquelles elle loue, pour exiger ensuite une contrepartie subséquente. De même, les parties à un bail ne peuvent modifier unilatéralement la destination des lieux loués.

            [27] L’intention s’infère d’ententes écrites ou verbales liant les parties. Elle peut aussi s’inférer de documents ou de déclarations émanant des parties, tout comme de leurs agissements lors de la formation ou de l’exécution du bail.

            [28] Le Tribunal doit donc analyser l’intention des parties, tant au moment de la conclusion du bail que pendant son exécution pour déterminer si l’emplacement du défendeur est loué à des fins de villégiature.

Ce faisant, la juge ne traite pas de la question du fardeau de preuve applicable.

[22]        La juge reconnaît que les baux indiquent clairement que le terrain est loué à des fins de villégiature et que, de plus, les baux pour 2008-2009 et 2009-2010 indiquent que « le locataire déclare qu’il n’a pas l’intention d’y élire sa résidence principale ».

[23]         Cependant, la juge constate qu’à compter de 2001, l’intimé s’est de fait installé en permanence sur le terrain que lui loue l’appelante. Quoiqu’il s’agisse là d’un usage contraire au bail, elle conclut néanmoins que ce changement d’affectation des lieux loués était connu et voulu par les deux parties[6].

[24]        La juge reconnaît que les représentants de l’appelante n’étaient pas présents au terrain de camping l’hiver et qu’ils ne pouvaient donc pas vérifier l’usage du terrain par l’intimé durant cette période. Néanmoins, la juge est d’avis que l’appelante a fait « de l’aveuglement volontaire » quant à l’usage du terrain comme résidence permanente et qu’elle ne s’est pas opposée à cet usage[7].

[25]        En l’occurrence, la juge de première instance conclut que le terrain en cause est loué par l’intimé comme lieu de résidence principale. Elle décline donc la compétence sur le litige vu l’article 28 de la Loi sur la Régie du logement.

Analyse

[26]        La principale disposition législative pertinente aux fins de cet appel est l’article 1892 du C.c.Q., qui prévoit, notamment, ce qui suit (soulignements ajoutés) :

1892. Sont assimilés à un bail de logement, le bail d'une chambre, celui d'une maison mobile placée sur un châssis, qu'elle ait ou non une fondation permanente, et celui d'un terrain destiné à recevoir une maison mobile.

Les dispositions de la présente section régissent également les baux relatifs aux services, accessoires et dépendances du logement, de la chambre, de la maison mobile ou du terrain, ainsi qu'aux services offerts par le locateur qui se rattachent à la personne même du locataire.

Cependant, ces dispositions ne s'appliquent pas aux baux suivant :

1 ° Le bail d'un logement loué à des fins de villégiature;

[…]

[27]        Quoique l’exclusion vise le « bail d’un logement loué à des fins de villégiature », elle s’étend aussi à un terrain loué à des fins de villégiature et destiné à recevoir une maison mobile[8]. En effet, le 1er alinéa de l’article 1892 du C.c.Q. énonce que le bail d’un terrain destiné à recevoir une maison mobile est assimilé à un bail de logement. Il en découle que l’expression « bail d’un logement » énoncée au 3e alinéa de cet article en regard de la location à des fins de villégiature comprend le bail d’un terrain loué à des fins de villégiature et destiné à recevoir une maison mobile. Ceci ne fait d’ailleurs pas l’objet d’un débat entre les parties.

[28]        Le C.c.Q. ne définit pas le concept de villégiature. Le sens usuel de ce terme doit donc prévaloir. Ainsi, le concept de villégiature comprend, notamment, celui d’un séjour de repos, de vacances ou aux fins de récréation à la campagne ou dans un lieu de plaisance[9].

[29]        Ce concept rejoint, entre autres, celui du « chalet », de la « maison de campagne », du « condo à la plage »[10]. Il s’agit donc d’un lieu que l’on habite sporadiquement ou de façon répétée pour des fins de villégiature (même pour de longues périodes), mais qui ne constitue pas le domicile ou la résidence habituelle du locataire.

[30]        Le fait qu’un bail soit conclu pour une année entière n’est pas un obstacle à ce qu’il soit considéré comme un bail à des fins de villégiature. C’est l’usage auquel l’immeuble est destiné qui compte[11].

[31]        Afin de déterminer si un bail a été conclu à des fins résidentielles ou à des fins de villégiature, il importe d’examiner quelle était l’intention des parties quant à l’usage des lieux lors de la conclusion du bail.

[32]        Le libellé du bail est un facteur important et souvent déterminant afin de déceler l’intention commune des parties. Ainsi, l’usage auquel l’immeuble sous bail est destiné s’infère principalement du contrat convenu entre les parties.

[33]        Cependant, ce libellé ne peut faire obstacle à une preuve d’une intention contraire jumelée à un usage contraire[12]. De plus, compte tenu du caractère impératif des dispositions du C.c.Q. portant sur les règles particulières au bail d’un logement[13], les règles de preuve sont assouplies lorsqu’il s’agit d’établir que la destination véritable des lieux loués est celle d’un logement. Comme le signale le professeur Pierre-Gabriel Jobin[14] :

Or, c’est le tribunal, et non les parties, qui a le dernier mot sur la qualification juridique d’une convention. Sera donc retenue la véritable destination envisagée par les parties, malgré une stipulation contraire. D’ailleurs, par dérogation à la règle de l’article 2863 du Code civil, le locataire pourra dans un tel cas apporter une preuve testimoniale contredisant les termes d’un écrit, car on est en matière de fraude à la loi et il s’agit de rétablir, par tous les moyens de preuve, la vérité.

[34]        Cela dit, la personne qui signe un bail énonçant que le logement est loué à des fins de villégiature et qui cherche à établir que la véritable destination envisagée par les parties était plutôt celle d’un logement résidentiel assume le fardeau de le prouver. En effet, l’article 2829 du C.c.Q. énonce que l’acte sous seing privé fait preuve, à l’égard de ceux contre qui il est prouvé, de l’acte juridique qu’il renferme et des déclarations des parties qui s’y rapportent directement.

[35]        Ainsi, même s’il n’est pas nécessaire d’établir un commencement de preuve par écrit au sens de l’article 2863 du C.c.Q. afin de prouver la destination véritable des lieux loués envisagée par les parties lors de la conclusion du bail écrit, le fardeau de preuve repose néanmoins sur celui qui cherche à contredire les énoncés du bail qu’il a signé et qui indiquent une destination autre.

[36]        Il ne s’agit pas simplement d’établir que la destination des lieux loués a changé à la suite d’une décision unilatérale de l’une des parties au bail. En effet, l’article 1856 du C.c.Q. prévoit que ni le locateur ni le locataire ne peuvent, au cours du bail, changer la forme ou la destination du bien loué.

[37]        Un locataire ne peut donc changer le régime juridique du bail d’un logement loué à des fins de villégiature en modifiant unilatéralement la destination des lieux loués en y résidant de façon permanente[15]. Le locataire doit plutôt établir par prépondérance de preuve que le locateur connaissait cette nouvelle destination des lieux loués et y a consenti[16].

[38]        Ainsi, le bail de villégiature écrit ne peut être contredit que par une preuve claire et convaincante[17] établissant par prépondérance des probabilités non seulement que la destination de l’immeuble est celle d’un logement résidentiel, mais aussi que cette destination est à la fois connue et consentie par le cocontractant, en l’occurrence ici le locateur. En effet, les impératifs de sécurité et de stabilité des transactions justifient une approche prudente dictée par le droit de la preuve lorsqu’il s’agit de contredire un écrit signé par les parties ou d’en modifier les termes[18].

Qu’en est-il en l’espèce?

[39]        L’intimé a signé à répétition des baux qui indiquent que le terrain en cause est loué à des fins de villégiature. L’intimé a aussi signé à deux reprises des baux contenant des déclarations écrites énonçant qu’il n’a pas l’intention d’y élire sa résidence principale. De plus, l’adresse de l’intimé apparaissant sur ces baux est située à Rigaud, donc ailleurs qu’au camping de l’appelante.

[40]        De 2008 à 2010, l’intimé met sa maison mobile en vente. La fiche descriptive de la maison avertit les acheteurs potentiels que celle-ci est placée sur un terrain loué à des fins de villégiature et qu’il appartient à l’acheteur éventuel de convenir avec l’appelante d’un nouveau bail à des fins de villégiature.

[41]        La preuve révèle aussi qu’avant l’intervention de la Ville, l’intimé n’a jamais communiqué à l’appelante son désaccord quant à la destination de villégiature du terrain.

[42]        Néanmoins, la juge de première instance écarte les dispositions du bail quant à la destination du terrain en invoquant l’aveuglement volontaire de l’appelante en ce qui a trait au changement d’affectation du terrain fait unilatéralement par l’intimé. Elle en déduit que l’appelante a donc connu et voulu ce changement d’affectation.

[43]        La juge n’a cependant pas identifié le fardeau de preuve applicable. Cette omission l’amène à n’imposer aucun fardeau de preuve particulier à l’intimé. Cette erreur de droit en regard du fardeau de preuve applicable entraîne des erreurs mixtes de fait et de droit dans son analyse de la preuve.

[44]        En effet, l’intimé devait établir par une preuve claire et convaincante non seulement que la destination du terrain avait changé, mais aussi que l’appelante le savait et y avait consenti. Or, « l’aveuglement volontaire » ne constitue pas une preuve claire et convaincante, surtout dans un contexte où l’intimé ne s’est jamais opposé au bail de villégiature, a déclaré au contrat ne pas avoir l’intention d’élire sa résidence principale sur le terrain en cause et n’a pas dénoncé explicitement à l’appelante le changement de destination du terrain.

[45]        Dans ces circonstances, l’appelante était justifiée de se fier aux déclarations écrites et signées par l’intimé qui étaient inscrites au bail. Il ne lui appartenait pas de faire une enquête ou d’établir un système de surveillance afin de confirmer si ces déclarations étaient véridiques.

[46]        Je propose donc d’accueillir l’appel, d’infirmer le jugement de la Cour supérieure, de déclarer la Cour supérieure compétente pour entendre la requête en injonction permanente de l’appelante, de retourner le dossier à la Cour supérieure afin que la requête en injonction permanente de l’appelante puisse être entendue dans les meilleurs délais et de condamner l’intimé aux dépens tant en première instance qu’en appel.

 

 

 

 

ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.

 



[1]     Loi sur la Régie du logement, R.L.R.Q., c. R-8.1

[2]     Pièce R-9, mémoire de l’appelante, p. 318. 

[3]     Pièce R-9, mémoire de l’appelante, p. 350. 

[4]     Pièce R-12, mémoire de l’appelante, p. 375 et 376.

[5]     Pierre-Gabriel Jobin, Le louage, 2e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 1996.

[6]     Jugement de la Cour supérieure, par. 33.

[7]     Ibid., par. 39-41.

[8]     Camping Normand inc. c. Croteau, 2013 QCCQ 1727, par. 73.

[9]     Le Nouveau Petit Robert définit « villégiature » ainsi : « Séjour de repos, à la campagne ou dans un lieu de plaisance (ville d’eaux, plage…). Maison de campagne où l’on va en villégiature Lieu de ce séjour. » Le Petit Larousse Grand Format définit ce mot ainsi : « Séjour à la campagne, à la mer, etc., pour prendre du repos, des vacances…Lieu d’un tel séjour. »

[10]    Camping Normand inc. c. Croteau, supra, note 7, par. 76.

[11]    P.-G. Jobin, supra, note 4, p. 43 : « Ainsi, on a décidé que le fait pour le bail d’être conclu pour toute une année n’est pas un obstacle à ce qu’il soit considéré comme un louage pour fins de villégiature… »

[12]    Art. 1425 et 1426 C.c.Q.

[13]    Art. 1893 C.c.Q.

[14]    P.-G. Jobin, supra, note 4, p. 44.

[15]    P.-G. Jobin, supra, note 4, p. 44.

[16]    Notons, entre autres, le deuxième alinéa de l’article 2803 du C.c.Q. qui énonce que celui qui prétend qu’un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit préciser les faits sur lesquels sa prétention est fondée.

[17]    F.H. c. McDougall, [2008] 3 R.C.S. 41, 2008 CSC 53, par. 46. Il est bien établi que les règles de common law et celles du droit civil sur le degré de preuve sont semblables : Jean-Claude Royer et Sophie Lavallée, La preuve civile, 4e éd., Cowansville, Yvon Blais, 2008, p. 134.

[18]    Québec (Agence du Revenu) c. Services Environnementaux AES inc., 2013 CSC 65, [2013] 3 R.C.S. 838, par. 49; Sobeys Québec inc. c Coopérative des consommateurs de Ste-Foy, 20015 QCCA 1172, [2006] R.J.Q. 100 (C.A.), par. 52-56.

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