Hébert c. Vidéotron, s.e.n.c. |
2014 QCCQ 6408 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
SAINT-FRANÇOIS |
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LOCALITÉ DE |
SHERBROOKE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
450-32-016459-133 |
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DATE : |
26 juin 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
MADELEINE AUBÉ, J.C.Q. |
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MICHAEL HÉBERT, domicilié et résidant au […], Sherbrooke (Québec) […] |
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Demandeur |
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c. |
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VIDÉOTRON S.E.N.C., ayant un établissement au 612, rue St-Jacques, 17e étage, service légal, Montréal (Québec) H3C 4M8 |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur réclame des dommages-intérêts à la défenderesse (ci-après « Vidéotron »), à la suite de la demande de résiliation de son contrat de service[1], le 2 décembre 2011[2].
[2] La réclamation se détaille ainsi :
· dommages compensatoires incluant, notamment : - frais de poste[3] - frais d'avocat (11 avril 2012)[4] |
10,18 $ 143,72 $ |
300 $ |
· dommages exemplaires et punitifs |
6 500 $ |
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Total : |
6 800 $ |
[3] Vidéotron conteste la réclamation. Elle invoque qu’afin de corriger l’erreur de bonne foi quant à la date du débranchement requis par le demandeur, elle lui a crédité la totalité de la somme facturée en trop, soit 13,29 $, en mars 2012.
[4] Elle soutient que les dommages compensatoires de 300 $ et sa réclamation de 6 500 $ pour des dommages exemplaires sont injustifiés ou nettement exagérés.
[5] Le 29 novembre 2011, le demandeur transmet, par courrier recommandé, une demande de résiliation du service de câblodistribution « dès la réception de la présente » par Vidéotron[5]. Le 2 décembre 2011, Vidéotron reçoit la demande[6].
[6] Le 9 décembre 2011, un représentant de Vidéotron laisse un message sur le répondeur du demandeur demandant de communiquer avec lui par téléphone pour confirmer son identité, avant de procéder à sa demande de débranchement[7].
[7] Le 10 décembre 2011, le demandeur communique avec une représentante du service à la clientèle qui l’informe que, selon la politique de Vidéotron, le calcul pour le remboursement auquel il a droit se fera à compter du 10 décembre 2011, date de leur conversation. Le demandeur répond qu’il n’entend pas payer pour le service depuis la réception de la demande de résiliation de service, soit à compter du 2 décembre 2011.
[8] À la mi-janvier 2012, le demandeur reçoit la facture, datée du 6 janvier 2012, qui indique la fin du service au 10 décembre 2011[8].
[9] Le 25 janvier 2012, le demandeur envoie une lettre afin de se plaindre de la facturation après la réception de sa demande écrite de résiliation du service. Il demande alors le remboursement des jours facturés du 3 au 9 décembre 2011 et des dommages compensatoires de 200 $[9].
[10] En février 2012, le demandeur reçoit une réponse de Vidéotron, datée du 10 février 2012[10]. Vidéotron y réitère que les demandes de résiliation doivent être faites par téléphone.
[11] Vidéotron maintient que la date de fin de service est le 10 décembre 2011, date de la communication téléphonique avec le demandeur. Toutefois, elle accepte alors de rembourser 13,29 $ au demandeur, mais n’acquiesce pas à sa demande de dédommagement de 200 $[11].
[12] Le 24 avril 2012, Vidéotron reçoit une mise en demeure l'enjoignant de payer 300 $ en dommages compensatoires et 6 500 $ en dommages punitifs[12].
[13] Dans une correspondance datée du 14 juin 2012, Vidéotron indique que le cacul du remboursement constitue un malentendu[13].
[14] Outre sa propre demande de résiliation, le demandeur a mis en preuve qu’en octobre 2012, Vidéotron a utilisé la même méthode pour un tiers[14] qui n’a toutefois pas demandé de remboursement. Ce tiers a demandé, par lettre, la résiliation du service « dès la réception de la présente ». Cette lettre a été livrée à Vidéotron avec succès le 16 octobre 2012. Le service est facturé jusqu’au 22 octobre 2012.
[15] Le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la réclamation du demandeur en dommages compensatoires et en dommages punitifs.
[16] Outre les dispositions du Code civil du Québec, les relations entre les parties sont régies par la Loi sur la protection du consommateur[15] (ci-après « L.p.c. »).
[17] Les contrats de téléphonie cellulaire et de câblodistribution sont régis depuis 2010[16] par les articles 214.1 et suivants de la L.p.c.[17] :
Les articles 214.1 et suivants de la L.p.c. réglementent les conditions de formation et les conditions de fond des contrats d’exécution de services fournis à distance. Avec ces dispositions, le législateur vise notamment à réglementer les contrats de téléphonie cellulaire et de câblodistribution. Il s’agit de nouveaux produits qui étaient offerts aux consommateurs depuis peu de temps mais dont la popularité avait connu une croissance fulgurante.
[Caractères gras ajoutés]
[18] L'article 214.6 de la L.p.c., qui concerne spécifiquement la résiliation du contrat, édicte que le consommateur peut résilier le contrat à tout moment et à sa discrétion par la transmission d'un avis au commerçant :
214.6. Le consommateur peut, à tout moment et à sa discrétion, résilier le contrat en transmettant un avis au commerçant. Cette résiliation de plein droit prend effet à compter de la transmission de cet avis ou à la date indiquée à cet avis par le consommateur.
Toutes les sommes que le commerçant peut alors réclamer du consommateur, autres que le prix des services qui lui ont été fournis, calculé au tarif prévu au contrat, constituent l'indemnité de résiliation. À cette fin, le contrat de service ou de location d'un bien conclu à l'occasion ou en considération du contrat de service forme un tout avec ce dernier.
[19] En vertu de cette disposition, la résiliation prend effet à compter de la transmission de l'avis ou à la date indiquée par le consommateur.
[20] La preuve démontre que Vidéotron n’a pas respecté cette disposition de la L.p.c. Le demandeur a demandé la résiliation de son contrat, à la réception de l'avis. Vidéotron a reçu la demande de résiliation le 2 décembre 2011. Le 9 décembre 2011, elle laisse un message téléphonique, et ce n'est que le 10 décembre 2011 que la résiliation prend effet sur la facture du demandeur.
[21] Lorsque le demandeur se plaint, la position de Vidéotron, en février 2012, est sans équivoque, le service est facturé jusqu'à ce qu'un entretien téléphonique ait lieu avec le consommateur[18] :
La présente fait suite à votre plainte du 25 janvier 2012 par laquelle vous contestez la date d'arrêt de la facturation du compte cité en objet. À la réception de votre plainte, nous avons procédé à l'analyse de votre dossier. La facturation et la distribution des services du compte ont été arrêtées le 10 décembre dernier à la suite de votre entretien téléphonique avec une de nos conseillères du Service à la clientèle. En conséquence, la dernière journée facturée pour vos services de télédistribution est le 9 décembre 2011. Conformément aux explications fournies par notre conseillère, nos procédures exigent une confirmation de l'identité du client avant de procéder à une demande de modification reçue par écrit. Il faut comprendre que cette mesure vise avant tout à protéger notre clientèle. De plus, notre contrat d'abonnement, qui est disponible pour consultation sur notre site Internet et dont vous avez reçu copie au début de votre abonnement, stipule clairement que les demandes de résiliation doivent être effectuées par téléphone : 8.3 Le Client pourra, en tout temps et sur paiement du Prix des Services alors rendus et des Frais, s'il y a lieu, résilier le Contrat ou demander à Vidéotron un abonnement pour une autre catégorie de Services en composant le 1-888-VIDEOTRON. |
[22] En réponse à la mise en demeure, en avril 2012, Vidéotron invoque un malentendu, en ces termes[19] :
La présente fait suite à la vôtre que vous avez transmis à Vidéotron s.e.n.c. le ou vers le 24 avril dernier relativement à votre avis de désabonnement. À cet égard, nous comprenons que vous exigez de Vidéotron la somme de 6,800$ en ce qu'elle aurait, selon vous, de mauvaise foi facturé en trop certains frais de services. Or, il appert que Vidéotron a dûment corrigé la date de désabonnement de votre compte et ajusté certains frais de services, le tout en conformité avec votre demande. Si par ailleurs, Vidéotron a pour pratique de confirmer l'identité des personnes qui s'adressent à elle dans le cadre de ses affaires courantes, c'est notamment dans le but de protéger les informations personnelles de ses clients. Nous comprenons cependant mal comment vous pouvez d'un simple malentendu alléguer la mauvaise foi de Vidéotron et conclure que celle-ci ne respecterait pas les lois et ses clients. Enfin, sans admission aucune ni reconnaissance de responsabilité quelle qu'elle soit, mais uniquement dans un souci d'amélioration continue de son service, veuillez noter que Vidéotron a tout de même fait circuler une note parmi ses représentants du service à la clientèle afin rappeler que la date de désabonnement d'un compte doit correspondre à la date de l'avis écrit du client. [Transcription conforme] |
[23] À l’audience, le représentant de Vidéotron soutient qu’il n’y a pas de contravention à la L.p.c. En revanche, il indique qu’ils ont corrigé la situation dès qu’ils en ont été avisés. Il a demandé de bonifier la procédure de traitement des lettres. Il s’est assuré que les agents aient bien compris : quelque soit la source, la date de réception initiale s’applique.
[24] Il réitère qu’il s’agit d’un malentendu. Il admet que l’agent n’a pas tenu compte des modifications législatives, soit de débrancher à la date demandée.
[25] Il a procédé lui-même à un échantillonnage des demandes écrites de débranchement. Sur 400 dossiers sortis, il en a consulté 25 %, ce qui lui semble représentatif. Dans ces 100 dossiers, il n’a constaté aucune erreur entre la date de réception de la lettre et celle du débranchement. Il admet toutefois que souvent une date précise postérieure était indiquée.
[26] Il indique qu’en pratique, ils reparlent à tous ceux qui font une demande de résiliation, ce qui ne les empêche pas de débrancher à la date indiquée. Ils ont de l’information à donner au client, notamment de ne pas débrancher le téléphone avant le transfert, s’ils désirent garder le même numéro de téléphone ou pour le retour de l’équipement.
[27] Le Tribunal conclut que Vidéotron n'a pas respecté l'article 214.6 de la L.p.c. qui l'oblige à résilier le contrat à la date indiquée par le consommateur.
[28] L’article 272 de la L.p.c. prévoit que le consommateur peut notamment demander, si le commerçant manque à une obligation que lui impose la présente loi, des dommages-intérêts et des dommages punitifs :
272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l'article 314 ou dont l'application a été étendue par un décret pris en vertu de l'article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:
a) l'exécution de l'obligation;
b) l'autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;
c) la réduction de son obligation;
d) la résiliation du contrat;
e) la résolution du contrat; ou
f) la nullité du contrat,
sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs.
[29] Le demandeur a demandé la résiliation de son contrat à un moment déterminé. Il a mis l’énergie pour réclamer un montant minime pour faire respecter cette date, pendant plus de trois mois. Devant le refus de Vidéotron de le rembourser, il a engagé des dépenses. Le Tribunal lui accorde 300 $ en dommages compensatoires.
[30] La L.p.c. prévoit spécifiquement l'octroi de dommages punitifs. Contrairement à la Charte des droits et libertés de la personne, l’article 272 de la L.p.c. prévoit l'octroi de dommages punitifs, sans nécessité de démontrer le caractère intentionnel de l'atteinte[20].
[31] L’article 272 de la L.p.c. n’établit aucun critère ou règle encadrant l’attribution de ces dommages-intérêts. Il faut donc s’en rapporter aux dispositions de l’article 1621 du Code civil du Québec et déterminer quels critères d’attribution de ces dommages-intérêts permettraient à l’article 272 de la L.p.c. de remplir sa fonction.
[32] L'article 1621 du Code civil du Québec identifie les critères suivants :
1621. Lorsque la loi prévoit l'attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.
Ils s'apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l'étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.
[33] La Cour suprême, dans l'affaire Time[21], indique que les objectifs de la loi doivent être pris en compte :
a) Les objectifs de la loi
[…]
[159] L’identification des objectifs de la loi devient alors nécessaire pour s’assurer que les dommages-intérêts punitifs rempliront bien les fonctions prévues dans l’art. 1621 C.c.Q.
[34] La L.p.c. a un caractère d'ordre public et a pour but de protéger les intérêts du consommateur[22] :
Il faut particulièrement distinguer le titre I de la Loi qui régit le contrat de consommation et le titre II qui prohibe certaines pratiques de commerce. Le titre I a pour finalité la protection d'une catégorie de personnes qui traitent habituellement en situation d'infériorité économique et informationnelle sur le marché. Ce premier titre de la Loi peut relever de l'ordre public de protection. Il en est de même des mesures de protection du consommateur contenues dans le Code civil du Québec67. Le Titre II de la L.p.c., qui prohibe certaines pratiques de commerce, vise non seulement la protection d'une catégorie de personnes, mais également l'imposition d'une certaine conception de l'intérêt général. Il relève donc à la fois de l'ordre public de direction et de l'ordre public de protection68.
[Références omises]
[35] La nouvelle section VII du titre I de la L.p.c. qui régit les contrats conclus entre les entreprises de télécommunications et les consommateurs[23], a fait suite à plusieurs plaintes des consommateurs[24] :
Ces développements ont cependant causé plusieurs déceptions parmi les utilisateurs : contrat d'une complexité inutile et d'une technicité désarmante, erreurs de facturation1204, frais de résiliation très élevés, frais cachés1205, nouveaux frais ajoutés à la suite d'une modification unilatérale du contrat1206 et parfois, coupure de servoce1207. À la suite de plusieurs plaintes portées auprès de l'OPC, d'organismes consuméristes et même de médias, le législateur québécois est intervenu pour encadrer le contrat de téléphonie sans fil et, incidemment, les autres formes de contrats à exécution successive de service fourni à distance, comme les contrats de service de fournitures Internet et de systèmes d'alarme. […]
[Références omises]
[36] La Cour suprême nous invite également à considérer le comportement du commerçant avant la violation et de son attitude envers les consommateurs après celle-ci[25] :
[178] […]Ainsi, le tribunal appelé à décider s’il y a lieu d’octroyer des dommages-intérêts punitifs devrait apprécier non seulement le comportement du commerçant avant la violation, mais également le changement (s’il en est) de son attitude envers le consommateur, et les consommateurs en général, après cette violation. […]
[37] Bien qu’il soit légitime de rejoindre le consommateur pour l’informer de la procédure de retour de l’équipement ou du transfert de numéro de téléphone, rien n’empêche que, ce faisant, Vidéotron respecte la date de résiliation du service prévue, en respectant la L.p.c.
[38] Le demandeur a fait preuve d'une grande persévérance avant que Vidéotron lui crédite les journées de service facturées sans droit. Vidéotron a maintenu sa position pendant chacune de ses démarches. La preuve démontre également qu'en octobre 2012, elle agit de la même façon à l'égard d'un autre consommateur[26].
[39] Malgré les explications de Vidéotron, il semble improbable et un drôle de hasard que dans les deux cas soumis en preuve, celui du demandeur en décembre 2011 et celui d'un tiers en octobre 2012[27], Vidéotron ait agi de la même façon, sans que ce soit la façon de faire du service à la clientèle. Dans ces deux cas, la date de résiliation demandée n’a pas été respectée.
[40] La preuve ne démontre pas que Vidéotron ait pris les mesures correctives concrètes pour corriger la situation après la première plainte.
[41] Rappelant que les critères énumérés à l'article 1621 du Code civil du Québec ne sont pas exhaustifs, la Cour suprême mentionne quelques autres critères dont, notamment, les profits de l'auteur[28] :
[206] Il est également tout à fait acceptable, à notre avis, d’utiliser les dommages-intérêts punitifs, comme en common law, pour dépouiller l’auteur de la faute des profits qu’elle lui a rapportés lorsque le montant des dommages-intérêts compensatoires ne représenterait rien d’autre pour lui qu’une dépense lui ayant permis d’augmenter ses bénéfices tout en se moquant de la loi (Whiten, par. 72).
[…]
[209] […] Tout élément pertinent pour l’analyse peut être pris en considération, pourvu que la finalité de l’analyse demeure la même : s’assurer que la somme octroyée à titre de dommages-intérêts punitifs est rationnellement proportionnée aux objectifs poursuivis par son attribution dans une affaire donnée, compte dûment tenu des circonstances précises de cette dernière (Whiten, par. 74 et 111).
[42] Les résultats financiers de Vidéotron déposés par le demandeur[29] indiquent, dans les faits saillants de l’exercice 2011 :
Ø Vidéotron enregistre des revenus de 2,43 G$, soit une progression de 201,9 M$ (9,1 $) par rapport à 2010. Ø Bénéfice d'exploitation de 1,10 G$, en hausse de 51,5 M$ (4,9 %). Ø Bénéfice net attribuable à l'actionnaire de 469,0 M$, en baisse de 35,1 M$ (-6,9 %). Ø Vidéotron enregistre sa plus forte augmentation annuelle de clientèle depuis 2008 avec l'ajout de 375 800 unités de service, ce qui représente une hausse de 39,3 % de la croissance des unités de service par rapport à 2010. o Augmentation nette de 49 900 clients en télédistribution en 2011 (34 600 en 2010), dont 181 200 nouveaux clients au service numérique (135 500 en 2010), soit la plus forte croissance annuelle depuis le lancement de ce service en 1999. Les revenus totaux des services de télédistribution ont franchi le cap du milliard de dollars. o Hausse de 80 400 clients au service d'accès Internet par câble (81 500 en 2010). o Croissance de 91 000 clients en téléphonie par câble (100 300 en 2010). o Ajout de 154 500 lignes à la téléphonie mobile. Au 31 décembre 2011, le réseau 4G de Vidéotron était offert à près de sept millions de personnes au Québec et dans l'est de l'Ontario. [Références omises] |
[43] Les profits engendrés par cette pratique sont difficilement identifiables. Toutefois, la preuve démontre qu'en décembre 2011 et près d’un an plus tard, Vidéotron n’applique toujours pas la date indiquée par le consommateur pour terminer la facturation, comme le prescrit la L.p.c.
[44] La Cour Suprême du Canada, dans l'affaire Richard c. Time inc.[30], reconnaît une discrétion du juge dans la détermination du montant accordé qu'il doit exercer en considérant les circonstances de chaque cas :
[188] Le pourvoi souligne les difficultés que le calcul des dommages-intérêts punitifs présente pour le juge de première instance. Bien qu’il possède une discrétion en cette matière, le juge doit l’exercer judiciairement et aussi, autant que possible, respecter la pratique déjà établie par la jurisprudence et prendre en considération l’ensemble des circonstances particulières de chaque cas, et ce, en conformité avec les principes de dissuasion, de punition et de dénonciation des dommages-intérêts punitifs.
[…]
[190] On doit se rappeler que le tribunal de première instance jouit d’une latitude dans la détermination du montant des dommages-intérêts punitifs, pourvu que la somme fixée demeure dans des limites rationnelles, eu égard aux circonstances précises d’une affaire donnée. […]
[45] Il existe peu de jurisprudence concernant l'application des articles 214.1 à 214.11 de la L.p.c., entrés en vigueur en 2010. Ces décisions[31] n'accordent pas de dommages-intérêts punitifs, quoiqu'il soit possible de le faire, en vertu de l'article 272 in fine de la L.p.c.
[46] Une analyse plus générale de quantum de dommages-intérêts punitifs accordés en vertu de la L.p.c., excluant les décisions en matière de pratique interdite[32], montre une variation de 250 $ à 3 500 $[33].
[47] Après analyse de la jurisprudence, considérant que l'octroi de dommages punitifs a pour objet « de marquer la désapprobation particulière dont la conduite visée fait l'objet[34] » et considérant les trois objectifs poursuivis par les dommages punitifs : la punition, la dissuasion et la dénonciation[35], le Tribunal accorde au demandeur 3 000 $ en dommages punitifs.
[48] Vu la demande qui a été faite, le Tribunal accorde également, en sus de l'intérêt légal, l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, mais à compter du présent jugement[36] :
[146] Ainsi, la tendance jurisprudentielle majoritaire qui les accordait avant même l'entrée en vigueur du nouveau code et de son art. 1619 C.c.Q. est désormais bien enracinée. […]
[147] Cette jurisprudence ne fait cependant courir les intérêts, avec ou sans l’indemnité additionnelle, que de la date du jugement.
[…]
[151] Cette approche, retenue par la jurisprudence majoritaire, est tout à fait conforme à l'art. 1618 C.c.Q., qui énonce que la date de départ de l'intérêt légal et de l'indemnité additionnelle (si demandée) est celle de la mise en demeure ou toute autre date postérieure que le tribunal estime appropriée eu égard aux circonstances.
[152] Or, puisque la nature des dommages-intérêts punitifs n'est pas de compenser la victime, mais d’arrêter un montant à titre préventif dont la quotité ne peut être déterminée avant le jugement, il serait illogique qu'il porte intérêt rétroactivement (Pauline Roy, Les dommages exemplaires en droit québécois : instrument de revalorisation de la responsabilité civile, tome II, p. 465, thèse de doctorat, Université de Montréal, 1995; Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, supra, précité, no 1-598, p. 579). La même logique a d'ailleurs été appliquée en droit de la famille à la prestation compensatoire, par opposition à la créance alimentaire ou celle résultant du partage du patrimoine familial.
[Caractères gras ajoutés]
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[49] ACCUEILLE en partie la demande;
[50] CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de 300 $ en dommages compensatoires avec intérêts au taux légal de 5 % l'an et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, et ce, à compter du 24 avril 2012, soit la date de réception de la mise en demeure;
[51] CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de 3 000 $ en dommages punitifs avec intérêts au taux légal de 5 % l'an et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, et ce, à compter du présent jugement, soit le 26 juin 2014, ainsi que les frais judiciaires de 167 $.
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__________________________________ MADELEINE AUBÉ, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
12 mars 2014 |
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Annexe A
Nom des parties |
Contexte |
Dommages punitifs |
Loiseau c. Nautilus Plus inc., 2014 QCCQ 4247 |
Contrat de service d'entraînement personnalisé - Contrat non conforme à la L.p.c. |
500 $ |
Marionnet c. Ani-Puce, 2014 QCCQ 2683 |
Décès du chien de la demanderesse acheté de la défenderesse - Garantie de qualité |
500 $ |
Francoeur c. Passeport Détente inc., 2014 QCCQ 3225 |
Services de massothérapie - Impossibilité d'obtenir les services - Vendeur itinérant |
500 $ |
Boisvert c. Desrochers, 2014 QCCQ 516 |
Résiliation du contrat de service de garde en milieu familial |
300 $ |
Paré c. 9140-7551 Québec inc. (Automobiles du Cartier Nord et automobiles Capitol inc.), 2012 QCCQ 1981 |
Le vendeur n'a pas réduit du prix de vente les acomptes versés au prix d'achat d'une automobile - A fait signer un contrat de location plutôt qu'un contrat de vente |
1 500 $ |
Lacasse c. Surplus RD inc., 2012 QCCQ 12104 |
Résiliation du contrat d'achat de meubles - Bien endommagé - Mauvaise couleur |
250 $ |
Paradis c. Bijouterie Marise inc. (Mozart), 2012 QCCQ 6558 |
Résolution de la vente d'un bijou sur commande - Bague non conforme à la commande |
350 $ |
Éthier c. 9115-5168 Québec inc. (Sherbrooke Mitsubishi), 2012 QCCQ 536 |
Réclamation en exécution d'un contrat de garantie de remplacement souscrit à l'achat d'un véhicule neuf |
2 000 $ |
Breault c. Gestion Dreymax inc., 2011 QCCQ 3171 |
Résolution d'un contrat de vente d'une thermopompe - Vendeur itinérant - Problème au niveau des informations de financement |
1 000 $ |
Gauthier c. Senez, 2010 QCCQ 7456 |
Réclamation le remboursement d'un acompte versé et des dommages-intérêts suite à la non-exécution du contrat de fabrication d'armoires de cuisine conclu avec le défendeur |
3 500 $ |
Vinet c. Wonder Travel international inc., 2008 QCCQ 12094 |
Remboursement d'une somme déjà perçue pour l'émission de deux billets d'avion |
250 $ |
Plourde c. Société financière Wells Fargo Canada MAC F0401-040, 2007 QCCQ 12209 |
Montant payé en trop sur un prêt - Erreur de facturation |
1 000 $ |
[1] Pièce P-11.
[2] Pièce P-1.
[3] Pièce P-4.
[4] Pièce P-12.
[5] Pièce P-1.
[6] Pièce P-1.
[7] Pièce P-2.
[8] Pièce P-3.
[9] Pièce P-4.
[10] Pièce P-5.
[11] Pièce P-5.
[12] Pièce P-7.
[13] Pièce P-8.
[14] Pièce P-9.
[15] RLRQ, chapitre P-40.1.
[16] Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur et d’autres dispositions législatives, L.Q. 2009, c. 51.
[17] Luc Thibaudeau, « Le I-consommateur à la recherche de la protection adéquate », dans S.F.C.B.Q., vol. 380, Colloque national sur les recours collectifs : développements récents au Québec, au Canada et au Etats-Unis (2014), Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014, p. 573, aux pages 583-584, 596. Au même effet, voir Nicole L'Heureux et Marc Lacoursière, Droit de la consommation, 6e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 139-141 et 377-378.
[18] Pièce P-5.
[19] Pièce P-8.
[20] de Montigny c. Brossard (Succession), [2010] 3 R.C.S. 64, 2010 CSC 51, par. 48.
[21] Richard c. Time inc., [2012] 1 R.C.S. 265.
[22] Nicole L'Heureux et Marc Lacoursière, Droit de la consommation, 6e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 22.
[23] Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur et d’autres dispositions législatives, préc., note 16.
[24] Id., p. 377-378.
[25] Richard c. Time inc., préc., note 21.
[26] Pièce P-9.
[27] Pièce P-9.
[28] Richard c. Time inc., préc., note 21.
[29] Pièce P-10.
[30] Préc., note 21.
[31] Dussault c. Groupe Intégral inc., 2013 QCCQ 15828; Bouffard c. Fortin (Infofortin Télécom), 2013 QCCQ 6685; Beauchemin c. 9140-0887 Québec inc. (Alarme Microcom), 2012 QCCQ 13521; Wan c. Tutor Jam Canada inc., 2011 QCCQ 7876.
[32] Articles 215 et suivants de la L.p.c.
[33] Pour une liste des décisions, voir l'annexe A jointe au présent jugement.
[34] de Montigny c. Brossard (Succession), préc., note 20, par. 47.
[35] Id., par. 49 et 53.
[36] Genex Communications inc. c. Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, 2009 QCCA 2201. Au même effet, voir Chabot c. Émard, 2011 QCCA 725, par. 98.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.