Décision

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Décision

Yang c. Pyrame

2020 QCRDL 9199

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

504660 31 20200130 G

No demande :

2945266

 

 

Date :

17 mars 2020

Régisseure :

Lucie Béliveau, juge administrative

 

Wei Yang

 

Zhi Bing Su

 

Locateurs - Partie demanderesse

c.

Laurence Pyrame

 

Locataire - Partie défenderesse

D É C I S I O N   I N T E R L O C U T O I R E

 

 

[1]      Par un recours introduit le 30 janvier 2020 et un amendement le 4 février 2020, les locateurs demandent la résiliation du bail et la condamnation de la locataire pour des dommages matériels de 20 000 $ en raison des pertes et dégradations au logement, avec les intérêts au taux légal, l’indemnité additionnelle en vertu de la loi, le remboursement des frais de justice et l’exécution provisoire de la décision malgré l’appel.

[2]      Les parties sont liées par bail annuel de logement, lequel a été reconduit jusqu’au 30 juin 2020, au loyer mensuel de 425 $.

[3]      Le logement de trois pièces et demie (3½) est situé au sous-sol de l’immeuble.

DEMANDE PRÉLIMINAIRE

[4]      Le procureur de la défenderesse, la locataire en l’instance, explique que sa cliente ne s’est pas déplacée en raison de la conjoncture actuelle entourant la crise provoquée par le virus Covid-19 et des directives émises par le gouvernement concernant les personnes âgées puisqu’elle est âgée de 86 ans.

[5]      Le Tribunal fait partiellement droit à sa demande. En effet, étant donné l’objet de la demande et les photographies exposées par un des locateurs, la situation présente un caractère d’urgence et justifie le Tribunal d’émettre une ordonnance de sauvegarde en attendant que la cause soit entendue au fond.


APERÇU

[6]      Un des locateurs, présent à l’audience, prétend qu’il est urgent d’agir car le chien de la locataire perturbe la jouissance paisible des autres locataires de l’immeuble et que ceux-ci veulent tous quitter.

[7]      Par ailleurs, le locateur affirme que le chien de la locataire a causé des dommages au revêtement de plancher de bois francs dont la somme s’élève à plus de 20 000 $ et qu’il est urgent de lui donner accès au logement afin qu’il effectue les réparations.

[8]      Il affirme sous serment qu’aucun rapport d’inspection n’a été produit par la Ville de Montréal.

[9]      Or, durant l’audience, le procureur de la locataire obtient, par l’entremise de sa famille, un rapport émis par la Ville de Montréal qui détaille toutes les démarches entreprises dans ce dossier depuis le 15 janvier 2020.

[10]   Sans relater chacune des constations de ce rapport, il appert que la problématique est de nature structurale, qu’une dalle de béton s’affaisse et qu’elle doit être remplacée, mais pas avant que la source du problème d’infiltration d’eau ne soit détectée. On y relate la nécessité de mandater un ingénieur en structure, un électricien et un entrepreneur pour coordonner les travaux majeurs à faire dans ce logement.

[11]   Le rapport mentionne qu’un avis de non-conformité a été signifié par huissier aux locateurs en date du 21 janvier 2020.

ANALYSE ET DÉCISION

[12]   Au vu de la preuve photographique exposée à l’audience, le Tribunal constate que le logement représente une menace sérieuse pour la sécurité de la locataire et tel que permis par l’article 1917 du Code civil du Québec, le Tribunal déclare le logement impropre à l’habitation.

[13]   Cet article édicte :

« 1917. Le tribunal peut, à l'occasion de tout litige relatif au bail, déclarer, même d'office, qu'un logement est impropre à l'habitation; il peut alors statuer sur le loyer, fixer les conditions nécessaires à la protection des droits du locataire et, le cas échéant, ordonner que le logement soit rendu propre à l'habitation. »

[14]   Le Tribunal va donc émettre les ordonnances de sauvegarde afin de protéger les droits de la locataire en attendant que le logement redevienne propre à l’habitation et qu’elle puisse le réintégrer.

[15]   Le Tribunal ne peut passer sous silence la tentative du locateur d’induire le Tribunal en erreur en lui cachant l’avis de non-conformité qu’il a reçu de la Ville de Montréal et les directives qu’il a reçues à cet effet.

[16]   Il semble, à première vue, que le locateur voulait éviter d’assumer les frais de relocation de la locataire ou de lui payer une indemnité en lui faisant porter la responsabilité des dommages, ce qui ne semble pas être le cas.

[17]   En considération de l’âge de la locataire et de l’apparente mauvaise foi du locateur, le Tribunal va émettre des ordonnances assez restrictives pour protéger celle-ci.

[18]   Pour le moment, le Tribunal considère que l’indemnité payable à la locataire en raison de sa relocalisation représente le loyer payable dans l’endroit où elle sera relocalisée.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[19]   ORDONNE aux locateurs de faire les réparations au logement dans les plus brefs délais, afin de le rendre propre à l’habitation;

[20]   ORDONNE aux locateurs, à leur frais, de relocaliser immédiatement la locataire dans un endroit sécuritaire, tout en respectant les recommandations émises par le gouvernement concernant les personnes âgées en raison de la crise engendrée par le virus Covid-19 et ce, durant tout le temps des travaux de réfection et jusqu’à ce que le logement redevienne propre à l’habitation;


[21]   ORDONNE aux locateurs de payer les frais de déménagement et d’emballage des biens de la locataire et/ou les frais d’entreposage;

[22]   ORDONNE aux locateurs de relocaliser la locataire dans un endroit où elle peut emmener son chien;

[23]   ORDONNE aux locateurs d’aviser la locataire dès que le logement redevient propre à l’habitation;

[24]   ORDONNE aux locateurs de permettre à la locataire de réintégrer le logement dès que le logement redevient propre à l’habitation;

[25]   ORDONNE à la locataire de donner accès au logement après un préavis de 24 heures à cet effet et de remettre au locateur un double des clés du logement;

[26]   ORDONNE au maître des rôles de convoquer à nouveau les parties pour un rôle complet dès que les circonstances le permettront, en considérant l’âge de la défenderesse et les recommandations actuelles du gouvernement entourant les personnes âgées et reliées à la crise engendrée par le virus Covid-19, afin de statuer sur le fond de la demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

Lucie Béliveau

 

Présence(s) :

le locateur Wei Yang

Me Alexandre-Justin Demers, avocat de la locataire

Date de l’audience :  

17 mars 2020

 

 

 


 

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