Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

Guigua c. R.

2020 QCCA 1697

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

GREFFE DE

 

MONTRÉAL

N° :

500-10-006949-182

(750-01-047598-154)

 

DATE :

 4 décembre 2020

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

JULIE DUTIL, J.C.A.

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

LUCIE FOURNIER, J.C.A.

 

 

SAIF EDDINE GUIGUA

APPELANT - accusé

c.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

INTIMÉE - poursuivante

 

 

ARRÊT

 

 

[1]           L’appelant se pourvoit contre un verdict rendu le 29 novembre 2018 par l’honorable Stéphane Godri de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, district de Saint-Hyacinthe, lequel le déclare coupable de voies de fait, d’agression sexuelle et de menaces à l’égard de A.Z. (« la plaignante »). Il est acquitté des infractions de conduite dangereuse causant des lésions corporelles et de méfait public[1].

***

[2]           L’appelant et la plaignante se rencontrent en Tunisie en 2009 et s’y marient en 2012. Ayant déjà entamé des procédures d’immigration, l’appelant s’installe au Québec et parraine la plaignante pour qu’elle le rejoigne. Elle arrive au Canada le 15 août 2013.

[3]           La plaignante emménage alors avec l’appelant dans un appartement à Montréal. Elle débute des cours de francisation et de lancement d’entreprise, puis le couple déménage à Saint-Césaire, en décembre 2013. L’appelant et la plaignante font vie commune jusqu’en mars 2015.

[4]           Les actes reprochés à l’appelant se déroulent durant cette période[2] et sont décrits dans le jugement de première instance de la façon suivante :

Quant à l’agression sexuelle, il s’agit d’un événement unique qui a eu lieu pendant le mois de février 2014. La plaignante ne peut situer spécifiquement à quelle date l’événement se serait produit. Elle indique qu’au moment des événements, l’accusé était jaloux puisqu’elle avait parlé à quelqu’un en Tunisie qu’il croyait être en relation avec elle. Elle ne voulait pas qu’il l’approche puisqu’il ne lui faisait pas confiance.

L’accusé voulait pour sa part, avoir un rapprochement à caractère sexuel avec cette dernière. Voulant éviter la situation, elle s’est rendue dans la chambre à coucher. L’accusé aurait brisé la porte pour entrer, pris la plaignante au cou et l’a accotée au mur. Il a tenté de l’embrasser. Pendant ce temps, elle le repousse avec force. Il l’a saisie et l’a projetée sur le lit. Il est monté sur elle et a tenté de l’embrasser  nouveau et d’enlever sa jupe. Elle a réussi à s’en défaire en poussant avec ses jambes et s’est réfugiée dans la salle de bain.

Quant aux événements reliés aux infractions de voie de fait, le premier aurait eu lieu à Montréal en lien avec une demande de la part de l’accusé pour que la plaignante lui remette une somme d’argent. Le tout se serait produit à la sortie d’un guichet automatique dans le véhicule automobile du couple où l’accusé aurait giflé la plaignante puisqu’elle refusait de lui remettre la somme de mille dollars (1 000 $) demandée. L'accusé ne nie pas la demande d'argent et le fait qu'il se soit rendu avec la plaignante au guichet automatique à ce moment. Il nie, par contre, avoir giflé cette dernière en raison du refus de lui remettre la somme.

Lors du deuxième événement de voie de fait, l'accusé serait revenu à leur domicile dans un état normal. Étant très fâchée et agitée, après une brève discussion et alors que l'accusé quittait l'appartement, la plaignante aurait pris le téléphone pour faire comprendre à l'accusé qu'elle cherchait à le dénoncer puisqu'elle avait peur. L'accusé serait revenu vers elle et l'aurait giflée avec force au niveau du visage. Elle n'a jamais compris pourquoi il avait agi de la sorte. Elle aurait communiqué avec une amie, après l'événement, qui lui aurait suggéré de prendre une photo de ses blessures, ce qu'elle a fait. Le Tribunal a d'ailleurs été à même de constater qu'une des photos déposées qui, selon le témoignage de la plaignante, a été prise peu de temps après l’événement permet de constater des lignes verticales rouges au niveau des joues… au niveau de ses joues.

Un autre événement serait relié à une dispute entourant une demande de la plaignante pour avoir accès à la carte d'assurance pour qu'elle puisse se procurer une crème médicamentée en pharmacie. Il y aurait eu dispute verbale et insultes de part et d'autre et l'accusé l'aurait finalement poussée avec force au niveau du torse. Elle aurait perdu l'équilibre vers l'arrière et une table aurait été endommagée lors de sa chute. Lors de cet événement, la plaignante aurait appelé une intervenante de l'immigration qui aurait contacté les policiers demandant d'aller vérifier l'état de la plaignante. Cet aspect du témoignage de la plaignante est corroboré par la carte d'appel reliée à cette intervention des policiers. Lors de cet événement, elle a quitté avec ceux-ci et s'est rendue dans un centre d'hébergement pour la nuit.

Le dernier événement de violence décrit par la plaignante implique un coup de poing porté au niveau de l'œil et duquel aurait résulté une blessure à ce niveau. Une des photos permet de constater que son œil gauche semble enflé et bleu et quelque peu tuméfié. Selon son témoignage, cette photo a été prise vers vingt heures (20 h 00) le jour de l'événement qui lui aurait eu lieu entre quinze (15 h 00) et seize heures (16 h 00).

Quant aux menaces, la plaignante relate différents événements où l'accusé aurait tenu des propos tels :

            « ... je vais te tuer, t'enterrer ici et personne ne le saura et je vais t'égorger et t'enterrer... ».[3]

***

[5]           L’appelant reproche au juge d’avoir omis de tenir compte d’éléments de preuve qui lui étaient favorables, plus particulièrement la date sur une photo de la porte brisée lors de l’agression sexuelle et la publication sur Facebook, par la plaignante, d’un proverbe arabe signifiant que « les ruses des hommes peuvent détruire des montagnes, mais que les ruses des femmes peuvent détruire les hommes ».

[6]           L’omission de considérer tous les éléments de preuve se rapportant à la question ultime de la culpabilité est une erreur de droit[4]. Ces éléments doivent toutefois être « significatifs et favorables » à l’accusé pour qu’il en soit ainsi. Le simple fait de ne pas traiter d’un élément de preuve ou de ne pas le consigner est insuffisant pour constituer une telle erreur :

[32]      Le juge du procès n’est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve qu’il a examinés ou d’expliquer en détail l’appréciation qu’il a faite de chacun d’eux.  Comme l’a souligné le juge Binnie dans Walker, « [l]es motifs sont suffisants s’ils répondent aux questions en litige et aux principaux arguments des parties.  Leur suffisance doit être mesurée non pas dans l’abstrait, mais d’après la réponse qu’ils apportent aux éléments essentiels du litige » (par. 20).  L’arrêt Walker établit aussi clairement que le caractère suffisant des motifs du juge du procès est fonction des moyens limités permettant au ministère public de faire appel d’un acquittement (par. 2 et 22).  Comme l’a dit succinctement le juge Binnie, « [i]l faut prendre garde de ne pas s’arrêter aux lacunes apparentes des motifs formulés par le juge du procès lors de l’acquittement pour créer un motif d’“acquittement déraisonnable”, verdict que le tribunal ne peut prononcer en vertu du Code criminel » (par. 2).[5]

[Soulignement ajouté]

[7]           Il ne s’agit pas d’une erreur de droit facile à démontrer.

[8]           L’appelant plaide que la question de la date sur la photo de la porte est importante puisque la crédibilité et la fiabilité des témoignages contradictoires sont centrales en l’espèce. Il soutient que la plaignante a livré des versions contradictoires concernant l’endroit où se trouvaient les parties avant l’agression sexuelle. Au procès, elle a mentionné que l’accusé était dans le salon, qu’il a brisé la porte et est entré dans la chambre pour l’agresser sexuellement. Dans sa déclaration initiale aux policiers, elle mentionnait que l’événement commençait dans la chambre. Selon l’appelant, le fait que la date sur la photo de la porte brisée ne coïncide pas avec celle où la plaignante affirme l’avoir prise est important pour l’évaluation de la fiabilité et de la crédibilité du témoignage de cette dernière.

[9]           La preuve au dossier révèle que la signification des dates inscrites au dos des photographies est incertaine. La plaignante a fait imprimer plusieurs photos de son iPad en septembre 2015, avec l’aide d’une intervenante. Toutefois, la photo de la porte brisée ne s’y trouvait pas. Elle s’est souvenue par la suite l’avoir envoyée à une amie par Facebook et elle l’a récupérée.

[10]        Lors du procès, la plaignante a reconnu qu’elle n’avait pas mentionné aux policiers que la porte de chambre avait été brisée lors de l’agression sexuelle. Elle a expliqué qu’il manque beaucoup de détails dans cette déclaration initiale, car elle ne répondait qu’aux questions posées par l’enquêteur.

[11]        La Cour est d’avis que cet élément de preuve n’est ni significatif ni favorable à l’appelant. Il n’y a pas de réelle contradiction ou incohérence qui pouvait affecter la crédibilité ou la fiabilité du témoignage de la plaignante.

[12]        En ce qui a trait à la publication du proverbe sur Facebook, le juge a refusé le dépôt de la publication parce qu’elle n’avait pas suffisamment été identifiée. La plaignante n’avait pas de souvenir d’avoir publié ce proverbe. L’article 31.1 de la Loi sur la preuve au Canada[6] prévoit que la personne voulant faire admettre un document électronique en preuve doit en établir son authenticité, ce qui n’a pas été fait en l’espèce. Le juge n’a donc pas commis d’erreur à cet égard.

[13]        L’appelant plaide par ailleurs que le juge aurait erré en ayant recours à un critère d’appréciation de la preuve plus strict pour lui que pour la plaignante. Il aurait appliqué un double standard.

[14]        Comme la Cour l’a mentionné dans l’arrêt Gauvreau c R.[7], il s’agit là aussi d’un argument difficile à démontrer. Le simple fait de trancher une question de crédibilité ne peut constituer une erreur. Il faut indiquer précisément les passages où le juge applique le double standard.

[15]        La Cour est d’avis que le juge ne commet aucune erreur sur cette question et qu’il n’applique pas des standards différents en analysant le témoignage de l’appelant et celui de la plaignante. Il s’intéresse autant à la crédibilité qu’à la fiabilité de chacun d’eux.

[16]        D’une part, le juge estime que le témoignage de l’appelant « est tout sauf un récit franc et précis des événements »[8]. Il ajoute que « celui-ci était prêt à répondre à peu près n’importe quoi aux questions de la procureure de la Poursuite pour tenter de convaincre le Tribunal que dans les faits, c’était lui la réelle victime dans cette affaire »[9]. Le juge retient que l’appelant usait parfois de stratégies pour éviter carrément de répondre aux questions ou pour tenter de les déjouer[10]. Toutes ces conclusions touchent à la crédibilité d’un témoin et le juge pouvait donc à bon droit conclure qu’elle en était affectée.

[17]        L’appelant reproche en outre au juge de ne pas s’être prononcé quant à la fiabilité de son témoignage, se contentant de faire un lien direct avec sa crédibilité. Cet argument est voué à l’échec. Le juge n’a pas traité et confondu les concepts de crédibilité et de fiabilité. Lors de ses observations sur le témoignage de l’appelant, il note :

De plus, après une intervention du Tribunal indiquant à l’accusé d’éviter de longues explications, s’il ne se souvenait tout simplement pas d’un événement, subitement celui-ci semble avoir perdu tout souvenir de son vécu avec la plaignante. La série de questions qui a suivi a été répondue par des réponses telles : « Je ne le sais pas. », « Je ne m’en souviens plus. », « Ce serait plus prudent que je dise que je ne m’en souviens pas. ».[11]

[18]        Ce changement radical dans l’attitude de l’appelant, mais surtout ses soudains problèmes de mémoire, pouvaient amener le juge à remettre en question la fiabilité de son témoignage[12]. De toute façon, dès lors que le juge retient que l’appelant n’est pas crédible, il est clair que sa fiabilité en est également affectée :

Obviously a witness whose evidence on a point is not credible cannot give reliable evidence on that point. The evidence of a credible, that is, honest witness, may, however, still be unreliable.[13]

[19]        D’autre part, l’appelant plaide que le juge soumet le témoignage de la plaignante à un examen moins rigoureux tant en ce qui a trait à sa crédibilité qu’à sa fiabilité. Cet argument ne peut être retenu.

[20]        D’abord, le juge retient que la plaignante « a témoigné de façon candide et précise »[14]. Or, il n’appartient pas à la Cour d’écarter cette conclusion, sauf en présence d’une erreur manifeste et déterminante, ce qui n’est pas le cas en l’espèce[15]. L’appelant  plaide que le juge aurait dû s’intéresser à l’attitude de la plaignante en contre-interrogatoire. Ce reproche est sans fondement. Lorsque le juge traite de l’« attitude de confrontation » de l’appelant dans son jugement, c’est seulement en référence à ses oublis soudains dans son contre-interrogatoire. À l’opposé, le juge retient que le témoignage de la plaignante est précis et qu’elle a maintenu en grande partie la même version, bien qu’« elle fut longuement contre-interrogée »[16]. Il ne s’agit pas là de l’application d’un double standard.

[21]        L’appelant soutient également que le juge ne fait pas état et n’analyse pas les nombreuses contradictions dans le témoignage de la plaignante. Qu’en est-il?

1.    La morsure pendant l’agression sexuelle

[22]        L’appelant à raison de dire que la plaignante s’est contredite sur ce point. Lors de son interrogatoire, elle témoignait que l’appelant l’a mordu au mollet du pied droit alors qu’elle essayait de se déprendre. Pourtant, à l’enquête préliminaire, elle affirmait avoir été mordue au genou droit et, dans sa déclaration aux policiers, il était question du pied gauche. La plaignante a expliqué au procès qu’il n’y avait pas de différence pour elle entre le genou et le mollet et que lors de sa déclaration, elle s’est trompée.

[23]        Cette contradiction est bien considérée par le juge. La plaignante a toujours maintenu avoir été mordue à une jambe pendant l’agression sexuelle et le juge a conclu qu’il s’agissait d’un détail périphérique. Or, il lui revenait d’apprécier l’impact de cette contradiction sur sa crédibilité[17] et sa décision est raisonnable.

2.    Le début de la violence économique

[24]        L’appelant allègue ensuite que la plaignante s’est contredite quant au moment où la violence économique envers elle a débuté. Dans sa déclaration initiale aux policiers, elle indiquait avoir vécu de la violence économique dès son arrivée le 15 août 2013. Lors de son contre-interrogatoire, elle mentionne plutôt que rien n’est arrivé avant l’incident du retrait bancaire en décembre 2013, mais elle rectifie sa déclaration quelques instants plus tard et indique que la violence économique a débuté environ un mois après son arrivée au Québec.

[25]        La plaignante a mentionné, lors de son contre-interrogatoire, qu’elle ne connaissait pas l’expression « violence économique » et que c’est une intervenante de la maison d’hébergement qui lui a expliqué que le comportement de l’appelant correspondait à ce type de violence. Il s’agit encore ici d’un détail périphérique d’une importance relative à l’égard des infractions pour lesquelles l’appelant a été déclaré coupable.

3.    Le retrait bancaire

[26]        L’appelant allègue en outre que la plaignante se contredit en ce qui a trait à l’évènement lié au retrait bancaire en décembre 2013. S’il pouvait y avoir une certaine confusion au départ dans son témoignage, celle-ci a été dissipée par les précisions apportées par la plaignante au procès. L’appelant ne fait pas voir d’erreur révisable du juge.

4.    La prise de Viagra

[27]        Sans autre explication, l’appelant écrit dans son mémoire: « La plaignante mentionne pour la première fois au procès que Monsieur prend du Viagra et que cela aurait pu motiver l’agression sexuelle qu’il a commise sur elle ». La Cour est d’avis qu’il s’agit ici encore d’un élément périphérique.

[28]        Par ailleurs, la plaignante a expliqué pourquoi elle n’avait pas fait part de ce détail auparavant. Elle se demandait si le Viagra ne pouvait pas expliquer le comportement de l’appelant. Elle admet toutefois ignorer si ce dernier en avait pris à ce moment-là. Il s’agit ici simplement de la divulgation d’un nouveau détail dont la plaignante s’est souvenue, lequel n’a aucune incidence sur l’issue du procès.

5.    Le déroulement de l’agression sexuelle

[29]        L’appelant indique que la plaignante mentionne également pour la première fois au procès qu’il l’aurait accotée au mur avant de la projeter sur le lit lors de l’agression sexuelle. Encore une fois, l’appelant ne démontre pas l’importance de cet élément. La plaignante a expliqué les raisons pour lesquelles ce détail ne se trouve pas dans sa déclaration initiale aux policiers.

6.    Le déroulement d’un des épisodes de voies de fait

[30]        Enfin, l’appelant mentionne que le récit de la plaignante est contradictoire en ce qui a trait à un des épisodes de voies de fait, soit celui relatif à la dispute entourant son  accès à la carte d’assurance. Lors de l’enquête préliminaire, la plaignante a affirmé qu’elle serait tombée sur le dos directement sur la table, ce qui lui aurait occasionné une marque, tandis qu’au procès, elle soutient être tombée sur le sol tout près de la table.

[31]        La Cour est d’avis qu’il ne s’agit pas d’une contradiction majeure. Tel que le mentionne le juge Vauclair, dans l’arrêt LSJPA — 195[18], la lecture des notes démontre que le contre-interrogatoire a été méticuleux, qu’il a fait ressortir l’ensemble des contradictions, dont celle-ci, et qu’il est indiscutable que le juge était attentif à la preuve qui se déroulait devant lui, comme le révèlent ses interventions[19].

[32]        En somme, le juge n’a pas appliqué un standard différent pour apprécier le témoignage de l’appelant et celui de la plaignante. Sa conclusion que cette dernière a maintenu essentiellement la même version, à l’exception de quelques détails périphériques, mérite déférence en l’absence d’une erreur manifeste et déterminante. L’appelant n’a pas fait cette démonstration.

[33]        Le juge était pleinement conscient que le témoignage de la plaignante était imparfait. Il n’avait toutefois pas l’obligation de soulever et d’expliquer chacune des faiblesses de celui-ci[20]. Comme le mentionne la Cour, dans Ménard c. R., «l’analyse des contradictions n’est pas un exercice mathématique et le nombre de contradictions, quoique sujet à caution, n’est pas en soi un motif de rejet d’un témoignage»[21].

[34]        Il est à noter que le juge a évalué la fiabilité du témoignage de la plaignante. Son analyse l’a d’ailleurs amené à rejeter une partie de celui-ci concernant l’événement de conduite dangereuse, et à acquitter l’appelant sur ce chef.

[35]        Ce moyen d’appel doit échouer.

[36]        En guise de conclusion, dans son mémoire, l’appelant plaide que le verdict est déraisonnable puisqu’illogique ou irrationnel. Ce moyen d’appel doit être rejeté. Le juge a fait une analyse fouillée de la preuve et ses conclusions, qui reposent sur celle-ci, sont raisonnables et dénuées d’erreur factuelle.

[37]         Si la Cour conclut que le verdict n’est pas déraisonnable, l’appelant plaide l’erreur judiciaire. Au soutien de son argument, il indique que le défaut pour le juge d’analyser tous les éléments qui lui étaient favorables, de répondre à ses arguments et le fait d’analyser les témoignages avec un double standard équivaut à une erreur judiciaire.

[38]        L’appelant n’est pas parvenu à démontrer une erreur révisable dans le jugement de première instance sur ces questions. Ce dernier moyen d’appel doit également échouer. Comme le rappelait récemment la Cour, « [p]our repérer l’erreur judiciaire, les juges d’appel n’ont pas à "disséquer, décortiquer ni examiner à la loupe les motifs d’un juge de première instance" »[22].

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[39]        ACCUEILLE la requête pour permission d’appeler;

[40]        REJETTE l’appel.

 

 

 

 

JULIE DUTIL, J.C.A.

 

 

 

 

 

JOCELYN F. RANCOURT, J.C.A.

 

 

 

 

 

LUCIE FOURNIER, J.C.A.

 

Me Fernando Belton

BELTON AVOCATS INC.                                          

Pour l’appelant

 

Me Maxime Hébrard

DIRECTRICE DES POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES

Pour l’intimée

 

Date d’audience :

2 décembre 2020

 



[1]     R. c. Guigua, C.Q. Saint-Hyacinthe, no 750-01-047598-154, 29 novembre 2018, Godri, j.c.q. [jugement dont appel].

[2]     Jugement dont appel, p. 28, lignes 9-13.

[3]     Id. p. 30 à 33.

[4]     R. c. Walle, 2012 CSC 41, paragr. 46.

[5]     R. c. J.M.H., 2011 CSC 45, paragr. 32.

[6]     L.R.C. (1985), ch. C-5.

[7]     Gauvreau c R., 2017 QCCA 1414, paragr. 9.

[8]     Jugement dont appel, p. 37, lignes 5-7.

[9]     Jugement dont appel, p. 37, lignes 15-19.

[10]    Jugement dont appel, p. 37, lignes 23-25 et p. 38, lignes 8-9.

[11]    Jugement dont appel, p. 38, lignes 10-18.

[12]    Voir par exemple : Hubbard c. R., 2009 NBCA 28, paragr. 14.

[13]    R. v. Morrissey, [1995] O.J. no 639, paragr. 33 (C.A. Ont.). Voir aussi : R. v. Pelletier, 2019 SKCA 113, paragr. 139; R. v. H.C., 2009 ONCA 56, paragr. 41.

[14]    Jugement dont appel, p. 39, lignes 1-2.

[15]    R. c. Gagnon, 2006 CSC 17, paragr. 20.

[16]    Jugement dont appel, p. 39, lignes 1-8.

[17]    Zakaïb c. R., 2015 QCCA 190, paragr. 7.

[18]    LSJPA — 195, 2019 QCCA 379, paragr. 55.

[19]    Le juge mentionne expressément qu’il va « avoir à apprécier la réponse qui a été donnée » (Contre-interrogatoire d’A. Z., 17 mai 2018).

[20]    Levin c. R., 2019 QCCA 1607, paragr. 17;  LSJPA — 195, 2019 QCCA 379, paragr. 51; A.R. c. R., 2016 QCCA 1793, paragr. 19; Savard c. R., 2016 QCCA 380, paragr. 79, confirmé par R. c. Savard, 2017 CSC 21.

[21]    Ménard c. R., 2019 QCCA 1701, paragr. 14; voir aussi LSJPA — 195, 2019 QCCA 379, paragr. 53.

[22]    Bérubé-Gagnon c. R., 2020 QCCA 1389, paragr. 41.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.