Décision

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Décision

Saviolakis c. Moudji

2019 QCRDL 1311

 

 

RÉGIE DU LOGEMENT

Bureau dE Montréal

 

No dossier :

375505 31 20180117 T

No demande :

2627564

 

 

Date :

13 janvier 2019

Régisseur :

Bernard Duchesneau, juge administratif

 

Angela Saviolakis

 

Locatrice - Partie demanderesse

c.

Sylvain Thomas Moudji

 

Locataire - Partie défenderesse

 

D É C I S I O N

 

 

[1]      La demanderesse requiert la rétractation de la décision du 2 novembre 2018.

[2]      Elle explique que la juge a refusé la production de factures d'électricité et de Gaz Métro. Elle affirme que ces preuves auraient influencé la décision de la juge. Pour sa part, l'avocate du défendeur indique à la Cour s'être objectée à la production de ces éléments de preuve et la juge a retenu cette objection en raison du fait qu’aucun témoin n’était présent pour déposer ces documents.

[3]      En réplique, la demanderesse affirme que la juge a fait preuve de partialité et elle affirme être en désaccord avec la décision de celle-ci de refuser la production de certains éléments de preuve. Elle remet également en cause la crédibilité et la force probante que la juge Boucher a accordées à l’argumentation et à la preuve du défendeur.

[4]      À maintes reprises, les tribunaux ont déterminé que la rétractation est un moyen procédural exceptionnel, car le principe de l'irrévocabilité des jugements est important. Ce principe a été réitéré par la Cour d'appel du Québec :

« Le principe de l'irrévocabilité des jugements est nécessaire à une saine administration de la justice, d'où le sérieux que doivent avoir les motifs de rétractation. La procédure doit contribuer à la protection des droits des deux parties et la remise en question des décisions doit demeurer l'exception et ne pas devenir la règle. »[1]

[5]      Par ailleurs, les motifs de rétractation ne doivent pas être confondus avec l'appel de la décision. À cet effet, le Tribunal fait siens les propos de Me Francine Jodoin, régisseure, dans la cause O'Callagan c. Fattal[2]:

« Tel qu'expliqué lors de l'audience, la demande en rétractation ne doit pas constituer un appel déguisé de la décision rendue. Le tribunal n'a pas à juger de la justesse de celle-ci ni s'interroger sur les erreurs de faits ou de droit commises puisqu'il ne s'agit pas d'un appel de la décision rendue. Il s'agit plutôt de s'interroger sur l'application de l'article 89 précité et chercher à déterminer si la partie qui en fait la demande a pu démontrer un des motifs prévus à cette disposition.

(...)


Il apparaît clair au tribunal que le locataire remet maintenant en cause la preuve soumise à l'audience en raison des conclusions de la décision. Il a donc plutôt été pris par surprise par la décision et il appert qu'ayant connu d'avance ses conclusions, il se serait préparé différemment. Il demande d'ailleurs la possibilité d'avoir une nouvelle audience pour lui permettre d'apporter des preuves additionnelles. »[3]

[6]      En l’instance, il n'y a donc pas lieu de permettre la rétractation, car les motifs invoqués par la demanderesse sont de la nature d'un appel. En effet, il apparaît évident que la demanderesse remet en cause la justesse de la décision de la juge Boucher de refuser la production de certaines pièces tout comme la valeur probante que celle-ci a accordée au témoignage et à la preuve fournie par le défendeur. L’article 89 de la Loi sur la Régie du logement ne peut servir de procédure d’appel et ne couvre pas les motifs évoqués par la demanderesse.

[7]      À la lumière de ces principes, le Tribunal est d'avis que la demanderesse n'a pas établi, par preuve prépondérante, un motif sérieux de rétractation.

[8]      Enfin, on requiert du Tribunal qu'il interdise à la demanderesse de présenter toute autre demande dans le présent dossier conformément à l'alinéa 2 de l'article 63.2 de la Loi qui prévoit :

« 63.2. La Régie peut, sur requête ou d'office après avoir permis aux parties intéressées de se faire entendre, rejeter un recours qu'elle juge abusif ou dilatoire ou l'assujettir à certaines conditions.

Lorsque la Régie constate qu'une partie utilise de façon abusive un recours dans le but d'empêcher l'exécution d'une de ses décisions, elle peut en outre interdire à cette partie d'introduire une demande devant elle à moins d'obtenir l'autorisation du président ou de toute autre personne qu'il désigne et de respecter les conditions que celui-ci ou toute autre personne qu'il désigne détermine. »

[9]      L’avocate du défendeur fait valoir qu’une demande de rétractation entrainerait des frais additionnels pour son client.

[10]   La preuve présentée ne soutient pas une telle conclusion. Aussi faut-il rappeler qu'interdire à un justiciable de présenter une demande devant un tribunal est un remède extrême qui ne doit être utilisé qu'avec grande circonspection et rigueur, vu ses conséquences graves sur les droits du justiciable.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[11]   REJETTE la demande en rétractation;

[12]   MAINTIENT la décision rendue le 2 novembre 2018.

 

 

 

 

 

 

 

 

Bernard Duchesneau

 

Présence(s) :

la locatrice

le locataire

Me Oana Laura Groze , avocate du locataire

Date de l’audience :  

30 novembre 2018

 

 

 


 



[1]    Entreprises Roger Pilon inc. et al. c. Atlantis Real Estate Co., [1980] C.A. 218.

[2]    Adam O'Callagan c. Salim Fattal [2003] J.L. 265.

[3]    [2003] J.L. 265 et 267.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.