Décision

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Modèle de décision CLP - avril 2013

Doucet et Coffrages Paul Thibault inc.

2014 QCCLP 3414

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Longueuil

10 juin 2014

 

Région :

Montérégie

 

Dossier :

459891-62-1201

 

Dossier CSST :

137230595

 

Commissaire :

Me Francine Charbonneau

 

Membres :

Jean-Benoit Marcotte, associations d’employeurs

 

Sylvain Campeau, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

Guillaume Doucet

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Les coffrages Paul Thibault Inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 11 janvier 2012, monsieur Guillaume Doucet (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles (le tribunal) par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue à la suite d’une révision administrative le 30 novembre 2011.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme celles qu’elle a initialement rendues les 9 et 11 février 2011. Elle déclare que le travailleur n’a pas subi le 23 juin 2008 de lésion professionnelle et qu’il n’a pas droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la Loi). Elle déclare que le travailleur n’a pas subi de récidive, rechute ou aggravation le 31 janvier 2011 et qu’il n’a pas droit aux prestations prévues par la Loi.

[3]           L’audience s’est tenue à Longueuil, le 6 mai 2014, en présence du travailleur et de son avocat. Bien que dument avisée aux coordonnées apparaissant au dossier, dans un délai suffisant, sans retour de courrier, la société Les coffrages Paul Thibault Inc. (l’employeur) ne s’est pas présentée au temps fixé pour l’audition et n'a fait connaître aucun motif et donc aucun motif valable justifiant son absence. La Commission des lésions professionnelles a procédé à l’instruction de l’affaire et rend une décision selon l’article 429.15 de la Loi en pareils cas.

[4]            Le dossier a été mis en délibéré à la fin de l’audience le 6 mai 2014.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[5]           Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer sa réclamation recevable pour un motif raisonnable et de convoquer les parties à une audience sur le fond du litige.

L’AVIS DES MEMBRES

[6]           Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs sont du même avis. Le travailleur a fait la démonstration d’un motif raisonnable permettant de le relever du défaut de produire sa réclamation dans le délai légal. Ils accueilleraient la requête du travailleur et convoqueraient les parties à une audience sur le fond du litige.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[7]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si la réclamation du travailleur est hors délai ou si elle est recevable pour un motif raisonnable.

[8]           Le tribunal fait droit aux prétentions du travailleur et s’explique.

[9]           Aux fins de rendre sa décision, le tribunal retient de la preuve documentaire et testimoniale les faits et les motifs suivants.

[10]        Le travailleur est menuisier charpentier.

[11]        Le 23 juin 2008, au travail, des barres de fer heurtent sa jambe droite à la hauteur du genou. Le travailleur est alors âgé de 19 ans.

[12]         Le jour même, il cesse de travailler et il consulte un médecin.

[13]        Le docteur Richard évalue le travailleur le 23 juin 2008 en lien avec un événement survenu le même jour. Le médecin diagnostique une entorse au genou droit, prescrit un arrêt de travail jusqu’au 30 juin 2008 et remplit une attestation médicale initiale à l’intention de la CSST.

[14]        Le 30 juin 2008, la docteure Mathilde Bourdua voit le travailleur en suivi. Elle maintient le diagnostic d’entorse au genou droit, autorise le retour au travail et prévoit un suivi en date du 8 juillet 2008. Elle remplit un rapport médical d’évolution CSST.

[15]        Le 1er juillet 2008, il est de retour au travail.

[16]        Le 8 juillet 2008, la docteure Bourdua produit un rapport médical final. L’entorse au genou droit est consolidée en date du 9 juillet 2008, sans atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique ni limitations fonctionnelles. Le retour au travail régulier est autorisé.

[17]        Le 14 juin 2010, le travailleur consulte à l’urgence de la Clinique familiale des Hauts-Bois (pièce T-1). Selon les notes consignées ce jour-là, il travaille sur la construction. Depuis deux ou trois mois, il a des douleurs plus fréquentes - il y a deux ans, CSST genou droit- douleur au niveau du genou droit partie interne - œdème à l’activité - sensation rotule se déplace à la mobilisation. Il a l’impression que le genou lâche. Le médecin note des antécédents d’entorse au genou droit en juin 2008. Il y a douleur au genou droit au niveau du ménisque interne, sans laxité, sans épanchement avec une amplitude de mouvements normale. Le docteur conclut à une impression de déchirure du ménisque interne possible (?).

[18]        Le 26 juin 2010, le travailleur passe une imagerie par résonance magnétique du genou droit. Les résultats, tels que lus par la docteure Lucie Lafontaine, radiologiste, mettent en évidence : un épanchement intra-articulaire, des phénomènes d’entorse discrète du ligament croisé postérieur proximal, des phénomènes possibles de déchirure du ligament croisé antérieur quoique partielle atteignant environ 25 % de la substance aux dépens des fibres postérieures, une fine déchirure radiaire de la pointe méniscale du ménisque externe à la jonction des cornes antérieure et moyenne, une déchirure assez avancée bien qu’incomplète du ligament collatéral interne aux dépens des fibres moyennes et plus profondes, une déchirure méniscale impliquant la portion périphérique des cornes moyenne et postérieure en incidence principalement oblique par moment plus complexe. L’atteinte conjointe du ligament collatéral et du ménisque en interne occasionne un début de séparation ménisco-capsulaire.

[19]        Le 26 juin 2010, le travailleur passe une imagerie médicale. Les résultats, tels que lus par la docteure Lucie Lafontaine, radiologiste, mettent en évidence : un épanchement intra-articulaire par contre mieux visualisé à l’imagerie par résonance magnétique.

[20]        Le 29 novembre 2010, le travailleur consulte le docteur Jacques Desnoyers, chirurgien orthopédiste. Le médecin note sur le rapport médical CSST qu’il y a eu trauma le 23 juin 2008, qui selon la description, correspond à la déchirure du ligament collatéral interne et du ligament croisé antérieur. Le médecin indique sur le rapport médical que la déchirure du ligament croisé antérieur sera opérée.

[21]        Le 29 novembre 2010 également, le travailleur réclame à la CSST pour une récidive, rechute ou aggravation en date du 26 juin 2010 de l’événement initial en date du 23 juin 2008. Au soutien de sa réclamation, le travailleur déclare qu’une lourde charge, soit des barres de fer, a heurté sa jambe droite à la hauteur du genou et l’a écrasée contre le sol.

[22]        Le 24 janvier 2011, le travailleur informe la CSST qu’il sera opéré le 31 janvier 2011 au genou droit et qu’il sera en arrêt de travail pour une durée de six (6) mois.

[23]        Selon les notes évolutives consignées au dossier en date du 27 janvier 2011, l’employeur mentionne à la CSST qu’aucune déclaration n’est faite par le travailleur en lien avec un événement du 23 juin 2008 et que celui-ci a toujours été payé en journées régulières et non en maladie ou en accident du travail. Aucun contremaître n’est informé en 2008 d’un quelconque accident survenu le 23 juin 2008.

[24]        Selon les notes évolutives consignées au dossier en date du 7 février 2011, le travailleur mentionne à l’agente de la CSST qu’il n’y a pas eu de radiographie à l’époque. Il n’a pas rempli de rapport d’accident, mais il y avait plusieurs témoins, dont son employeur, monsieur Thibault, monsieur Philippe Castonguay et un autre collègue du prénom de Vincent qui a déplacé les barres de fer sur son genou.

[25]        Le 9 février 2011, la CSST rend une décision et refuse la réclamation du travailleur pour un accident du travail en date du 23 juin 2008.

[26]        Le 10 février 2011, l’agente CSST au dossier note que le 31 janvier 2011 est la date du dernier jour travaillé.

[27]        Le 11 février 2011, la CSST rend une décision et refuse la réclamation du travailleur pour une récidive, rechute ou aggravation en date du 31 janvier 2011 de l’événement du 23 juin 2008. Cette décision se fonde sur le fait que la lésion initiale du 23 juin 2008 a été refusée à titre de lésion professionnelle.

[28]        Le travailleur demande la révision des décisions CSST des 9 et 11 février 2011.

[29]        Le 30 novembre 2011, l’instance de révision de la CSST rend une décision.  En ce qui a trait à l’événement initial du 23 juin 2008, elle se déclare liée par le diagnostic d’entorse posé par le médecin qui a charge du travailleur, mais estime que le travailleur ne peut bénéficier de la présomption de lésion professionnelle (article 28 de la Loi) parce que le délai pour déclarer l’événement ne permet pas de conclure que la blessure du travailleur est survenue sur les lieux du travail alors qu’il est à son travail. Ces éléments ne permettent pas davantage de conclure que le travailleur a été victime d’un accident du travail. En l’absence de lésion professionnelle survenue le 23 juin 2008, il ne peut y avoir récidive, rechute ou aggravation.

[30]        Le travailleur en appelle de cette décision à la Commission des lésions professionnelles. Il s’agit de l’objet du présent litige.

[31]        Le 26 février 2014, le travailleur, par l’entremise de son avocat, demande à la Commission des lésions professionnelles de limiter l’audience à la question du hors délai de la réclamation. Selon la décision rendue, une audience sur le fond du litige pourra être fixée à une date convenue entre les parties.

[32]        Le 13 mars 2014, la Commission des lésions professionnelles a produit un nouvel avis convoquant les parties à une enquête et audition le 6 mai 2014 portant uniquement sur le délai de réclamation. Rappelons que la Commission des lésions professionnelles a le pouvoir, selon l’article 377 de la Loi, de décider de toute question de droit ou de fait nécessaire à l'exercice de sa compétence. Elle peut confirmer, modifier ou infirmer la décision contestée et, s'il y a lieu, rendre la décision, qui, à son avis, aurait dû être rendue en premier lieu.

[33]        À l’audience, le travailleur confirme qu’il a fait une seule réclamation à la CSST pour l’événement initial du 23 juin 2008 et pour la récidive, rechute ou aggravation.

[34]        Le travailleur n’a donc pas réclamé pour l’événement initial du 23 juin 2008 avant le 29 novembre 2010.

[35]        Un travailleur qui désire se prévaloir des bénéfices de la Loi doit soumettre une réclamation auprès de la CSST selon l’un ou l’autre des articles suivants, et ce, dans le délai qui y est indiqué :

270. Le travailleur qui, en raison d'une lésion professionnelle, est incapable d'exercer son emploi pendant plus de 14 jours complets ou a subi une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique ou, s'il décède de cette lésion, le bénéficiaire, produit sa réclamation à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, dans les six mois de la lésion ou du décès, selon le cas.

 

L'employeur assiste le travailleur ou, le cas échéant, le bénéficiaire, dans la rédaction de sa réclamation et lui fournit les informations requises à cette fin.

 

Le travailleur ou, le cas échéant, le bénéficiaire, remet à l'employeur copie de ce formulaire dûment rempli et signé. 1985, c. 6, a. 270.

 

 

271. Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui ne le rend pas incapable d'exercer son emploi au-delà de la journée au cours de laquelle s'est manifestée sa lésion ou celui à qui aucun employeur n'est tenu de verser un salaire en vertu de l'article 60, quelle que soit la durée de son incapacité, produit sa réclamation à la Commission, s'il y a lieu, sur le formulaire qu'elle prescrit, dans les six mois de sa lésion. 1985, c. 6, a. 271.

 

 

272. Le travailleur atteint d'une maladie professionnelle ou, s'il en décède, le bénéficiaire, produit sa réclamation à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, dans les six mois de la date où il est porté à la connaissance du travailleur ou du bénéficiaire que le travailleur est atteint d'une maladie professionnelle ou qu'il en est décédé, selon le cas.

 

Ce formulaire porte notamment sur les nom et adresse de chaque employeur pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle.

 

La Commission transmet copie de ce formulaire à chacun des employeurs dont le nom y apparaît. 1985, c. 6, a. 272.Dans le présent cas, c’est le délai de six mois prévu à l’article 270 de la loi qui s’applique étant donné que le travailleur soumet une réclamation pour une lésion professionnelle qui l’a rendu incapable d'exercer son emploi pendant plus de 14 jours complets. Le travailleur devait donc réclamer à la CSST dans les six mois de la lésion.

[36]        Dans le présent cas, c’est l’article 270 de la Loi qui s’applique puisque le travailleur produit une réclamation pour une lésion professionnelle qui l’a rendu incapable d'exercer son emploi pendant une période de plus de 14 jours complets, s’étendant entre les dates de l’événement et de la consolidation de la lésion.

[37]        L’événement est survenu le 23 juin 2008. Le travailleur devait réclamer à la CSST pour une lésion professionnelle le 23 décembre 2008 afin de respecter le délai de l’article 270 de la Loi. Le travailleur réclame deux ans et cinq mois plus tard, le 29 novembre 2010 bien à l’extérieur du délai imparti par la Loi.

[38]        La réclamation du travailleur est hors délai, comme il le reconnaît lui-même avant et durant l’audience.

[39]        Cela étant, le tribunal a le pouvoir de prolonger un délai que la Loi accorde pour l’exercice d’un droit ou de relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter sur démonstration d’un motif raisonnable pour expliquer le retard, et ce, en vertu dispositions des articles 352, 377 et 429.19 de la Loi.

[40]        La Loi ne définit pas ce qu’est un « motif raisonnable ». Dans l’affaire Vallier Roy et C.U.M.[2], la Commission d’appel en matière de lésions professionnelles a retenu une définition qui est largement suivie depuis, à savoir que la notion de motif raisonnable est « une notion large et permet de considérer un ensemble de facteurs susceptibles d’indiquer, à partir des faits, des démarches, des comportements, de la conjoncture, des circonstances, etc., si une personne a un motif non farfelu, crédible et fait preuve de bon sens, de mesure et de réflexion ». Le travailleur doit démontrer qu’il a agi avec diligence dans l’exercice de son droit.

[41]        À l’audience, le travailleur explique les motifs de son défaut de réclamer plus tôt.

[42]        En juin 2008, il est menuisier charpentier depuis un an. Il fait des coffrages. Des barres de fer sont placées sur le dessus de deux par quatre. Il veut prendre des deux par quatre, alors il soulève les barres de fer d’un côté, celles-ci tombent de l’autre côté et lui écrasent le genou. Le propriétaire est présent et le travailleur l’avise qu’il va à la clinique.

[43]        Il a vu le médecin le jour même. Celui-ci l’a mis en arrêt de travail et lui a demandé d’aller porter le billet médical à son employeur. Le travailleur a donné le rapport médical à son employeur la même journée en après-midi et en mains propres. Son employeur lui a dit : c’est beau, mais ne lui a donné aucune information sur les démarches CSST.

[44]        Il a été en arrêt de travail une semaine, puis la docteure Bourdua autorise le retour au travail le 1er juillet 2008 avec un rapport final en date du 8 juillet 2008 et monsieur Paul Thibault a payé.

[45]        Après le 1er juillet, son genou est endolori, mais supportable et le médecin lui dit que cela va se passer. Il consulte à nouveau en 2010. Il sent de la laxité. Le temps avance et le genou se détériore. Il est de plus en plus instable. Il a réclamé à la CSST en novembre 2010 à la suite de la consultation médicale.

[46]        Il attend pour réclamer. Il a donné le rapport médical à son employeur, monsieur Paul Thibault et aussi l’autre rapport médical autorisant le retour au travail. Il croit que c’est réglé, car il a été payé et il a remis les papiers à son employeur.

[47]        En juin 2008, il n’a jamais réclamé à la CSST avant. Il a appris qu’il n’y avait aucun dossier ouvert à la CSST pour 2008 quand il a parlé à l’agente. Il a consulté son représentant syndical pour savoir comment ouvrir le dossier CSST? Il se voit mal consulter monsieur Paul Thibault, car il n’est plus à son emploi depuis février 2009. Entre l’événement du 23 juin 2008 et la chirurgie, il n’a manqué aucun autre jour de travail sauf la première semaine.

[48]        L’employeur œuvre dans le coffrage du ciment. Il compte environ 35-40 employés, qui détiennent des cartes de compétence. Le travailleur a une carte de compétence de menuisier charpentier. Il est syndiqué auprès de la C.S.D. Il a remis le rapport médical à Paul Thibault. Ce rapport médical n’a pas été remis à la CSST et il n’y a eu aucune ouverture de dossier. Le travailleur a été payé son salaire régulier. Il n’a pas été payé CSST. Il n’a pas rempli de rapport d’accident ou inscrit l’événement au registre d’accident.

[49]        Le tribunal est d’avis que le travailleur a fait la démonstration qu’il a un motif raisonnable pour expliquer son défaut de réclamer plus tôt.

[50]        Au moment de l’événement initial, le travailleur a 19 ans et il ne connaît pas les us et coutumes de la CSST n’ayant jamais réclamé avant. Certes, il est de sa responsabilité de réclamer à la CSST, mais pour ce faire, il a droit à l’assistance de son employeur. Effectivement, l’employeur est tenu en vertu de l’article 270 de la Loi d’assister le travailleur dans la rédaction de sa réclamation et de lui fournir les informations requises à cette fin.

[51]        Le travailleur affirme qu’il a remis les rapports médicaux CSST à son employeur qui ne l’a pas renseigné sur les obligations à remplir en lien avec la réclamation CSST. Le travailleur croyait sincèrement que tout était réglé puisqu’il a été payé. L’employeur confirme à la CSST que le travailleur a été payé en journées régulières, pas en CSST ni en assurance maladie. L’employeur a donc versé au travailleur son salaire régulier alors que ce dernier n’a pas fourni de prestation de travail du 23 juin au 1er juillet 2008. L’employeur connaissait les motifs de l’absence du travail sinon il n’aurait pas versé le salaire régulier.

 

[52]        En vertu de l’article 268 de la Loi, l'employeur tenu de verser un salaire en vertu de l'article 60, ce qui est le cas de l’employeur en l’espèce, avise la CSST que le travailleur est incapable d'exercer son emploi au-delà de la journée au cours de laquelle s'est manifestée la lésion professionnelle et réclame par écrit le montant qui lui est remboursable en vertu de cet article. L'avis de l'employeur et sa réclamation se font sur le formulaire prescrit par la Commission. Ce formulaire porte notamment sur les nom et adresse du travailleur et de l'employeur, la date du début de l'incapacité, l'endroit et les circonstances de l'accident du travail, le revenu brut prévu par le contrat de travail du travailleur, le montant dû en vertu de l'article 60.

 

[53]        Les obligations imposées à l’employeur en vertu des articles 268 et 270 de la Loi sont d’une telle importance que le législateur a jugé bon d’en renforcer le respect par l’imposition d’une sanction pénale. Selon l’article 458 de la Loi, l'employeur qui contrevient à l’article 268 de la Loi commet une infraction et est passible d'une amende d'au moins 500 $ et d'au plus 1 000 $ s'il s'agit d'une personne physique, et d'une amende d'au moins 1 000 $ et d'au plus 2 000 $ s'il s'agit d'une personne morale.

[54]        En l’espèce, l’employeur n’a pas assisté le travailleur dans sa réclamation à la CSST et il n’a pas non plus avisé cette dernière de la survenance d’un événement en lui faisant parvenir son Avis et demande de remboursement.

[55]        Le travailleur a fait preuve de diligence dans le suivi de son dossier. Le défaut d’assistance de l’employeur ainsi que son défaut d’aviser la CSST de la survenance d’un événement imprévu et soudain représentent en l’espèce un motif raisonnable permettant au tribunal de relever le travailleur de son retard.

[56]        Pour ces raisons, la réclamation produite par le travailleur le 29 novembre 2010 est recevable. Il reste à déterminer si la lésion est de nature professionnelle. Le dossier est retourné au greffe du tribunal pour que les parties soient convoquées à nouveau et entendues sur le fond du litige. En conséquence, la requête du travailleur est acceptée et la décision de l’instance de révision de la CSST infirmée.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

 

ACCUEILLE la requête de monsieur Guillaume Doucet, le travailleur;

 

MODIFIE la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail rendue à la suite d’une révision administrative le 30 novembre 2011;

 

DÉCLARE que la réclamation produite le 29 novembre 2010 est recevable;

 

RETOURNE le dossier au greffe du tribunal pour que les parties soient convoquées à nouveau pour être entendues sur le fond du litige.

 

 

__________________________________

 

Francine Charbonneau

 

 

 

 

Maître Jean-Sébastien Brady

C.S.D.

Représentante de la partie requérante

 



[1]           RLRQ, c. A-3.001.

[2]           [1990] C.A.L.P. 916.

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