Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

RÉGION:

Montréal

MONTRÉAL, le 26 avril 1999

 

DOSSIER:

108624-71-9812

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Me Carmen Racine

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Pierre Gamache

 

 

Associations d'employeurs

 

 

Marcel Gagnon

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST:

114198005-1

AUDIENCE TENUE LE :

23 avril 1999

 

DOSSIER BRP :

62709318

À :

Montréal

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MANON DESJARDINS

2800, rue Chambly, #6

Montréal (Québec)

H1W 3J7

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

ET

 

 

 

 

 

CHUM PAVILLON NOTRE-DAME

1560, rue Sherbrooke est

Montréal (Québec)

H2L 4M1

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


DÉCISION

 

[1.]             Le 21 décembre 1998, la travailleuse, madame Manon Desjardins, conteste une décision rendue par la révision administrative de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 30 novembre 1998.

[2.]             Par cette décision, la révision administrative maintient la décision rendue par la CSST le 12 décembre 1997, décision par laquelle cette dernière refuse la réclamation de la travailleuse pour un événement survenu le 7 novembre 1997 au motif qu’il ne s’agit pas d’un accident du travail puisque la travailleuse choisit de se faire vacciner chez l’employeur.

[3.]             La travailleuse est présente à l’audience et représentée. L’employeur avise la Commission des lésions professionnelles de son absence à l’audience mais il adresse une courte lettre expliquant certains faits au soutien des décisions rendues dans ce dossier.

 

L’OBJET DE LA CONTESTATION

 

[4.]La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’elle a été victime d’une lésion professionnelle, le 5 novembre 1997, et d’une récidive, rechute ou aggravation, le 19 novembre 1997, et qu’elle a droit, en conséquence, aux indemnités prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles [1](la loi).

LES FAITS

 

[5.]La travailleuse est aide-alimentaire chez l’employeur. Le 21 novembre 1997, elle loge une réclamation à la CSST.

[6.]Elle indique à la rubrique « Date de l’événement initial » le 7 novembre 1997 et s’y exprime ainsi :

Le 5 nov. 97 je me présente au service de santé pour recevoir vaccin contre la grippe. Injection dans l’épaule gche. D° progressive par la suite. R.A.T. le 10-11-97. Après 9 jours de travail la D° n’a cessée d’augmenter. (sic)

 

 

 

[7.]Le 19 novembre 1997, la travailleuse consulte le docteur Saine. Il diagnostique une tendinite de l’épaule gauche « en réaction au vaccin influenza ». Il prescrit du repos et de la physiothérapie.

[8.]La travailleuse revoit le docteur Saine les 26 novembre et 3 décembre 1997 et, à la première visite, il confirme ce diagnostic de « tendinite post-injection » mais, à la deuxième visite, il indique plutôt un diagnostic de « douleur post-injection épaule G ».

[9.]Le 11 décembre 1997, la CSST communique avec l’employeur qui lui fournit les informations suivantes :

Elle m’informe que le vaccin n’est pas obligatoire et qu’il est, par contre, offert à tous les employés.

 

La raison pour laquelle la T a réagit ainsi est due au fait que la piqûre a été donnée trop haute. (sic)

 

 

 

[10.]         À cette même date, l’agent de la CSST évalue la réclamation et détermine que les articles 28 et 2 de la loi ne s’appliquent pas. En conséquence, le 12 décembre 1997, la CSST refuse la réclamation de la travailleuse. Cette décision est contestée par cette dernière.

[11.]         Le 30 novembre 1998, la révision administrative maintient cette décision au motif que, dans les circonstances, on ne peut parler de blessure survenue au travail de la travailleuse.

[12.]         De plus, le fait de recevoir volontairement une injection contre la grippe, alors que cette injection n’est ni obligatoire, ni imposée par l’employeur, ne peut être assimilé à un événement imprévu et soudain au sens de l’article 2 de la loi.

[13.]         La travailleuse est présente à l’audience.

[14.]         Elle est aide-alimentaire chez l’employeur depuis 10 ans et demi.

[15.]         En novembre 1997, elle travaille de 7h00 à 15h15.

[16.]         Le 5 novembre 1997, elle se présente au travail en parfaite forme.

[17.]         Elle voit la note de service affichée par l’employeur concernant la campagne de vaccination contre la grippe et, en conséquence, elle se rend au Bureau médical de l’employeur et y rencontre l’infirmière pour recevoir son vaccin.

[18.]         Elle dépose le communiqué affiché par l’employeur. Ce communiqué se lit ainsi :

CAMPAGNE DE VACCINATION ANTI-GRIPPALE

POUR LE PERSONNEL DU

CENTRE HOSPITALIER DE L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

Le Ministère de la Santé et des Services Sociaux renouvelle encore une fois cette année sa campagne de vaccination anti-grippale (anti-influenza) pour le personnel des établissements de santé. La campagne de vaccination se tiendra dans les trois campus du CHUM.

 

PERSONNEL VISÉ :

 

le personnel soignant et autres employés ou bénévoles ayant des contacts avec des bénéficiaires atteints de maladies chroniques (diabète et autres maladies métaboliques, cancer, déficit immunitaire, immunosuppression, néphropathie, maladies hématologiques, cardiaques ou pulmonaires)

 

le personnel atteint d’une maladie chronique

 

 

LIEU DE LA VACCINATION :

 

CAMPUS NOTRE-DAME

 

Service de santé et sécurité du travail (porte K-2205, 2e Mailloux)

 

 

DATES ET HEURES :

 

MARDI 3 novembre de 7h30 à 9h00 et de 11h00 à 13h00

 

VENDREDI 6 novembre de 7h30 à 10h30 et de 14h00 à 16h30

 

LUNDI 9 novembre de 11h00 à 14h00

 

MERCREDI 11 novembre de 8h00 à 10h00 et de 14h00 à 16h00

 

*prévoir 15 minutes d’attente  après la vaccination

 

 

 

[19.]         Donc, même si ce n’est pas une journée prévue à l’horaire décrit sur le communiqué, la travailleuse se rend, le 5 novembre 1997, vers 10h30, au service de santé de l’employeur.

[20.]         Elle reçoit ce vaccin à tous les ans depuis 7 ou 8 ans car elle est « asthmatique chronique » et ce vaccin lui permet d’avoir « moins la grippe l’hiver », d’être « moins malade » et donc plus disponible au travail.

[21.]         Au bureau de santé, on l’identifie selon son matricule et on lui fait signer un document attestant qu’elle a bien reçu le vaccin.

[22.]         Elle rencontre l’infirmière qui lui administre le vaccin sur le dessus de l’épaule. Elle estime que l’injection est faite beaucoup trop haute sur l’épaule.

[23.]         Elle ressent une brûlure et des douleurs mais elle a toujours une certaine douleur, durant deux ou trois jours, après l’administration d’un vaccin. Cependant, cette fois-ci, elle constate que les douleurs sont plus intenses et qu’elle a l’épaule enflée.

[24.]         En conséquence, le 7 novembre 1997, elle se rend à l’urgence de l’hôpital et y rencontre le docteur Ammara. Selon la travailleuse, ce médecin lui indique que l’infirmière a piqué dans un tendon et que c’est une erreur. De plus, ce médecin lui prescrit des anti-inflammatoires et un arrêt du travail de deux jours.

[25.]         La travailleuse dépose le certificat d’incapacité émis par ce médecin le 7 novembre 1997. La Commission des lésions professionnelles constate que le docteur Ammara diagnostique une « réaction post-vaccin influenza ». Il prescrit un arrêt du travail pour la journée du 7 novembre 1997 et ne fait aucune mention quant à une quelconque erreur médicale ou quant à la prescription d’anti-inflammatoires.

[26.]         Les 8 et 9 novembre 1997, la travailleuse est en congé (fin de semaine). Elle reprend le travail le 10 novembre 1997 mais elle constate que la douleur est toujours présente et augmente de jour en jour.

[27.]         Le 19 novembre 1997, elle consulte le docteur Saine.  Il inscrit dans ses notes que la travailleuse ressent une « douleur insertion du biceps épaule G ». Il mentionne également « l’injection aurait été donné ds le tendon ou autour du tendon ». Il diagnostique une tendinite en réaction au vaccin influenza et prescrit des traitements de physiothérapie.

[28.]         Le 21 novembre 1997, une radiographie de l’épaule gauche s’avère normale.

[29.]         Le 26 novembre 1997, le docteur Saine revoit la travailleuse. Il retient la présence d’une douleur post-injection peu améliorée par la physiothérapie. Il prescrit des anti-inflammatoires et la poursuite de la physiothérapie.

[30.]         Le 3 décembre 1997, le docteur Saine est consulté par la travailleuse. Il indique qu’elle va mieux.

[31.]         Le 12 décembre 1997, le docteur Saine note que la travailleuse est « coupée par la CSST ». Il ne fait aucune mention quant à l’état de santé de cette dernière.

[32.]         Le 15 décembre 1997, le docteur Saine revoit la travailleuse. Il note une amélioration graduelle.

[33.]         Le 7 janvier 1998, le docteur Saine précise que, le 22 décembre 1997, la travailleuse est examinée par le docteur Bergeron qui accepte l’arrêt du travail. Toutefois, la travailleuse désire retourner au travail pour des raisons monétaires. Le docteur Saine prescrit donc un retour au travail à l’essai le 12 janvier 1998.

[34.]         Effectivement, la travailleuse indique avoir été examinée par le docteur Bergeron du Bureau de santé de l’employeur et ce dernier prévoit la poursuite des traitements de physiothérapie.

[35.]         De plus, elle reprend le travail le 12 janvier 1998 et elle accomplit des travaux légers pour un mois et sa tâche régulière par la suite.

[36.]         Enfin, elle n’a jamais souffert de telles douleurs à l’épaule auparavant.

[37.]         Elle dépose différents textes médicaux.

[38.]         Ainsi, dans un extrait du Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (31ième édition 1996) (CPS), il est dit ce qui suit au sujet du vaccin grippal Fluviral :

Indications : On recommande la vaccination annuelle pour les groupes suivants : 1. Les adultes et les enfants présentant des troubles cardiaques ou pulmonaires chroniques (notamment la dysplasie broncho-pulmonaire, la fibrose kystique et l’asthme), assez graves pour nécessiter un suivi médical régulier ou des soins hospitaliers ; (…)

 

2. Les pensionnaires de foyers pour personnes âgées et autres établissements pour malades chroniques : (…)

 

3. Gériatrie : Les personnes de plus de 65 ans : (…)

 

4. Les membres du personnel soignant ayant de nombreux contacts avec des sujets qui se classent dans les 3 premiers groupes à risque susmentionnés.

 

(…)

 

Renseignements destinés aux patients : Les patients doivent être informés des effets secondaires les plus courants : Réactions locales : douleur et rougeur au site de l’injection qui peuvent durer jusqu’à deux jours. Réactions systémiques : fièvre, maux de tête, myalgie. (…)

 

A noter : Si ces symptômes persistent ou augmentent, on doit aviser les patients de consulter un médecin.

 

(…)

 

L’injection de 0,5 mL de Fluviral S/F se fait par voie i.m., ordinairement dans le muscle deltoïde.

 

 

 

 

 

 

[39.]         Dans un tableau relevant les principales réactions aux vaccins, il est noté les douleurs, les rougeurs, les enflures, la gêne dans les mouvements, la céphalée, la perte d’appétit, les myalgies, les frissons, les nausées, les vomissements, la diarrhée, les rougeurs et les démangeaisons.

[40.]         La travailleuse dépose également un autre document extrait du CPS portant sur les Effets secondaires associés à un vaccin : pharmacovigilance et déclaration. Il est noté que les vaccins peuvent présenter de nombreux effets indésirables qui doivent être rapportés dans une déclaration adressée à Santé Canada. Dans les réactions locales au site de l’injection, il est fait mention de « douleur intense et/ou œdème important qui dure 4 jours ou plus » et « qui s’étend au-delà de l’articulation la plus proche ».

[41.]         En outre, elle fournit des définitions des termes « ténosite » et « inflammation » retrouvées au Dictionnaire des termes de médecine (Garnier et Delamare, 1995, 24ième édition). Ainsi, la « ténosite » est une « inflammation d’un tendon » alors que l’ « inflammation » est l’ « ensemble des phénomènes réactionnels se produisant au point irrité par un agent pathogène » ou « un processus général réactionnel de tout ou partie de l’organisme à une agression, qu’elle soit chimique, physique, bactérienne, virale, antigénique. ».

[42.]         Enfin, elle dépose un extrait du volume de Wynn Kapit et Lawrence M. Wilson intitulé L’anatomie à colorier (2ième édition) dans le but d’identifier l’emplacement du muscle deltoïde.

[43.]         L’employeur est absent mais, dans un document écrit, daté du 19 avril 1999, et fourni à la Commission des lésions professionnelles le 20 avril 1999, il reprend les termes de la décision contestée et y ajoute les informations suivantes :

Dans cette décision, on y mentionne que la travailleuse a choisi de se faire vacciner alors que la vaccination anti-grippale n’est pas obligatoire ni imposée par l’employeur.  À ceci, il y a lieu d’ajouter que les aides en alimentation ne font pas partie de la clientèle ciblée pour recevoir ce vaccin, pas plus que les jeunes femmes de l’âge de madame Desjardins qui ne sont porteuses d’aucune maladie chronique ou débilitante. Toutefois, on ne refuse pas de l’administrer à nos employé(es) qui en font la demande, même s’ils (elles) ne font pas partie de la population cible selon les recommandations du ministère de la santé et des services sociaux. Donc, on ne peut certainement pas parler ici d’une blessure survenue par le fait ou à l’occasion du travail. (sic)

 

 

L’ARGUMENTATION DES PARTIES

 

[44.]         La représentante de la travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de modifier la décision rendue par la révision administrative et de reconnaître une lésion professionnelle le 5 novembre 1997 et une récidive, rechute ou aggravation le 19 novembre 1997. En effet, une jurisprudence abondante n’exige pas qu’une travailleuse dépose une réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation si elle a déjà déposé une réclamation pour une lésion initiale et si elle fournit à la CSST les attestations médicales nécessaires au soutien d’une récidive, rechute ou aggravation.

[45.]         Par ailleurs, elle soutient que la travailleuse est victime d’un accident à l’occasion de son travail puisque le vaccin n’est pas obligatoire mais recommandé par l’employeur et que la travailleuse, en s’y soumettant, respecte les obligations prévues à l’article 49 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail car elle prend les mesures nécessaires pour protéger sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique et qu’elle participe à l’identification et à l’élimination des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles sur le lieu de travail.

[46.]         De plus, la travailleuse fait partie du personnel ciblé par l’employeur puisqu’elle souffre d’une maladie pulmonaire chronique.

[47.]         Au surplus, la vaccination a lieu sur les lieux du travail, durant les heures de travail et la travailleuse est rémunérée durant cette période.

[48.]         Enfin, la vaccination bénéficie à l’employeur car la travailleuse est moins malade, moins absente et elle réduit les risques de contagion.

[49.]         La travailleuse est donc victime d’un accident à l’occasion du travail.

[50.]         Quant au lien existant entre la tendinite de la travailleuse et la vaccination, la représentante de la travailleuse souligne les extraits du CPS au sujet des effets secondaires des vaccins, la note du 19 novembre 1997 de docteur Saine quant au possible site d’injection du vaccin et les extraits du Dictionnaires des termes médicaux et elle en conclut qu’il existe un lien entre la tendinite diagnostiquée et le vaccin reçu par la travailleuse.

[51.]         Après avoir fourni des informations supplémentaires à la Commission des lésions professionnelles, l’employeur demande à cette dernière de maintenir la décision rendue par la révision administrative.

L'AVIS DES MEMBRES

 

[52.]         Le membre issu des associations patronales est d'avis de rejeter la contestation de la travailleuse puisque la tendinite découlant de l’injection du vaccin grippal ne peut être considérée comme une lésion professionnelle. En effet, elle n’est pas une blessure et n’arrive pas par le fait du travail de la travailleuse. De plus, le vaccin n’est pas obligatoire et la preuve ne révèle pas que la travailleuse ait reçu le vaccin décrit au CPS. Les articles 28 et 2 de la loi sont donc inapplicables.

[53.]         Le membre issu des associations syndicales est d’avis d’accueillir la présente contestation puisque, même si le vaccin n’est pas obligatoire, il y a eu erreur médicale manifeste. De plus, l’employeur bénéficie de ce vaccin, il est administré à son bureau de santé et la travailleuse est rémunérée à ce moment. Le vaccin est donc administré à l’occasion du travail. Enfin, il n’est pas nécessaire de prouver hors de tout doute qu’il y a eu un événement imprévu et soudain. La travailleuse n’a pas de problème en arrivant au travail et elle ressent des douleurs après l’administration du vaccin. Il existe donc un événement imprévu et soudain par présomption de fait.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

 

[54.]         La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si la travailleuse a été victime d’une lésion professionnelle, le 5 novembre 1997, et d’une récidive, rechute ou aggravation le 19 novembre 1997.

[55.]         En effet, même si la CSST et la révision administrative n’ont pas distingué ces deux périodes, les décisions sont rendues après le deuxième arrêt du travail de la travailleuse alors que la CSST possède toute l’information pertinente pour statuer à ce sujet.

[56.]         La Commission des lésions professionnelles doit donc se prononcer, en premier lieu, sur l’existence d’une lésion professionnelle le 5 novembre 1997.

[57.]         Pour pouvoir bénéficier de l’application de la présomption de lésion professionnelle prévue à l’article 28 de la loi, la travailleuse doit démontrer qu’elle souffre d’une blessure, arrivée sur les lieux de son travail, alors qu’elle est à son travail d’aide-alimentaire.

[58.]         Le diagnostic retenu par le docteur Ammara le 7 novembre 1997 est celui de réaction post-vaccin influenza. Or, ce diagnostic ne peut être assimilé à une blessure.

[59.]         De plus, cette réaction n’arrive pas lorsque la travailleuse est à son travail d’aide-alimentaire mais lorsqu’elle reçoit un vaccin contre la grippe.

[60.]         Le même raisonnement s’applique si on retient le diagnostic de tendinite proposé par le docteur Saine.

[61.]         La travailleuse ne peut donc bénéficier de l’application de la présomption de lésion professionnelle prévue à l’article 28 de la loi.

[62.]         La travailleuse a-t-elle été victime d’un accident du travail le 5 novembre 1997 ? La Commission des lésions professionnelles estime que non.

[63.]         Trois éléments sont essentiels à la reconnaissance d’un accident du travail : -un événement imprévu et soudain ; -survenu par le fait ou à l’occasion du travail ; -l’existence d’un lien entre la pathologie diagnostiquée et l’événement imprévu et soudain.

[64.]         Or, une analyse détaillée des faits exposés par la travailleuse ne permet pas à la Commission des lésions professionnelles d’identifier un événement imprévu et soudain les 5 novembre, 7 novembre ou 19 novembre 1997.

[65.]         D’une part, la vaccination est volontaire et non imposée par l’employeur. La travailleuse s’y présente de son plein gré.

[66.]         De plus, même si cette dernière souffre d’asthme, la preuve n’est pas suffisante pour conclure qu’elle fait partie du personnel ciblé par la vaccination. En effet, selon le CPS, la maladie pulmonaire chronique doit être assez grave pour nécessiter un suivi médical régulier ou des soins hospitaliers. Or, la Commission des lésions professionnelles ne possède aucune preuve à ce sujet.

[67.]         Au surplus, la preuve de l’erreur médicale ou de l’injection au mauvais site n’est pas concluante. Ainsi, le docteur Ammara ne fait aucune allusion à ce sujet dans son certificat du 7 novembre 1997. Il diagnostique une simple réaction post-vaccin. Le docteur Saine mentionne cette possibilité mais la formulation utilisée est loin d’être affirmative.

[68.]         Il n’y a donc pas de preuve prépondérante d’événement imprévu et soudain dans les faits décrits au dossier ou ceux décrits par la travailleuse.

[69.]         D’autre part, l’apparition d’une réaction post-injection, qu’elle soit qualifiée de douleur ou de tendinite, ne peut constituer un événement imprévu et soudain. Ce n’est pas la douleur ou la lésion ou la pathologie qui doit être imprévue et soudaine mais bien l’événement qui la cause.

[70.]         De plus, ces réactions ou « effets indésirables » sont bien décrits dans la littérature déposée par la représentante de la travailleuse et ne sauraient être qualifiés d’ « imprévus et soudains ».

[71.]         Or, en l’absence d’événement imprévu et soudain, la Commission des lésions professionnelles ne peut conclure à l’existence d’un accident du travail au sens de l’article 2 de la loi même si, par ailleurs, la vaccination est approuvée par l’employeur et que la travailleuse est sous le contrôle de ce dernier et est rémunérée durant cette activité.

[72.]         Enfin, la travailleuse ne peut bénéficier de l’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29 de la loi car, bien que la tendinite soit une pathologie décrite à l’annexe I de la loi, elle ne découle pas d’une répétition de mouvements ou de pressions sollicitant le site anatomique lésé.

[73.]         En outre, la preuve ne révèle pas que la réaction, la douleur ou la tendinite post-injection dont souffre la travailleuse est caractéristique du travail d’aide-alimentaire ou reliée aux risques particuliers de ce travail. La présente lésion ne peut donc être reconnue à titre de maladie professionnelle au sens des articles 2 et 30 de la loi.

[74.]         La Commission des lésions professionnelles confirme donc la décision rendue par la révision administrative et détermine que la travailleuse n’a pas été victime d’une lésion professionnelle le 5 novembre 1997. Elle ne peut, en conséquence, reconnaître une récidive, rechute ou aggravation le 19 novembre 1997.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

 

REJETTE la contestation de la travailleuse logée le 21 décembre 1998 ;

 

CONFIRME la décision rendue par la révision administrative le 30 novembre 1998 ;

 

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas été victime d’une lésion professionnelle le 5 novembre 1997 ; et, en conséquence :

 

 

 

 

 

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas été victime d’une récidive, rechute ou aggravation le 19 novembre 1997.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Me Carmen Racine

 

Commissaire

 

 

 

 

 

 

 

 

C.S.N.

Madame Joanne Lavigne

1601, rue Delorimier

Montréal (Québec)

H2K 4M5

 

 

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 



[1]L.R.Q., c. A-3.001.

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