Décision

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Modèle de décision CLP - avril 2013

H.R. et Compagnie A (Fermée)

2013 QCCLP 5167

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Québec

21 août 2013

 

Région :

Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Bas-Saint-Laurent et Côte-Nord

 

Dossier :

502079-03B-1301

 

Dossier CSST :

102037991

 

Commissaire :

Jean-François Clément, juge administratif

 

Membres :

Ginette Denis, associations d’employeurs

 

Rémi Dion, associations syndicales

______________________________________________________________________

 

 

 

H... R...

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

[Compagnie A] (Fermée)

 

[Compagnie B]

 

[Compagnie C]

 

Parties intéressées

 

 

 

et

 

 

 

S.A.A.Q. - Raiche, Pineault, Touchette

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 31 janvier 2013, madame H... R... (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête à l’encontre d’une décision conjointe, rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) et la Société de l’assurance automobile du Québec, le 20 décembre 2012.

[2]           Par cette décision, la CSST déclare que la travailleuse n’a pas subi d’aggravation le 26 septembre 2011 et qu’il n’y a aucune augmentation de son atteinte permanente.

[3]           La Société de l’assurance automobile du Québec déclare ne pouvoir accepter cette rechute en relation avec l’accident d’automobile subi par la travailleuse, puisqu’aucune blessure au niveau pulmonaire n’a résulté de cet accident.

[4]           Une audience est tenue à Gaspé le 14 août 2013, en la seule présence de la travailleuse. Le délibéré débute le même jour.

 

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[5]           La travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’elle a subi une aggravation de sa condition pulmonaire le 26 septembre 2011. Elle demande également de recevoir une indemnisation en raison du fait qu’elle ne peut plus avoir de relations sexuelles depuis l’événement d’origine du 6 octobre 1992.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[6]           Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs partagent le même avis et rejetteraient tous deux la requête de la travailleuse.

[7]           Il n’existe aucune preuve médicale objective fiable de l’aggravation de la condition pulmonaire de la travailleuse, de sorte qu’elle n’a pas subi de récidive, rechute ou aggravation. En pareil cas, il ne saurait être question d’allouer un taux d’atteinte permanente supplémentaire visant notamment les problèmes sexuels de la travailleuse.

 

LES FAITS ET LES MOTIFS

[8]           La Commission des lésions professionnelles doit décider si la travailleuse a subi une lésion professionnelle le 26 septembre 2011 et s’il y a augmentation de l’atteinte permanente pour couvrir notamment le fait qu’elle ne peut plus avoir de relations sexuelles.

[9]           La notion de lésion professionnelle est ainsi définie à l’article 2 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) :

2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :

 

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation.

__________

1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.

 

 

[10]        Il n’est aucunement question d’un accident du travail ou de la survenance d’une nouvelle maladie professionnelle dans ce dossier.

[11]        La travailleuse allègue plutôt qu’il y a aggravation de sa condition pulmonaire des suites de la maladie qui a été reconnue comme étant d’origine professionnelle le 6 octobre 1992.

[12]        La date du 26 septembre 2011, déterminée pour la récidive, rechute ou aggravation alléguée découle d’un rapport médical produit par le docteur M. Lamarre, à cette date.

[13]        La notion de rechute, récidive ou aggravation n’est pas définie à la loi. Suivant la jurisprudence bien établie en la matière, il y a lieu de s’en remettre au sens commun de ces termes. La rechute est une reprise évolutive, la récidive est une réapparition alors que l’aggravation est la recrudescence de la lésion ou de ses symptômes y incluant la complication de la lésion initiale[2].

[14]        Il est depuis longtemps établi que la présence d’une rechute, récidive ou aggravation implique nécessairement une modification de l’état de santé par rapport à celui qui existait antérieurement[3].

[15]        C’est pourquoi le seul témoignage de la travailleuse ne suffit pas à prouver la rechute, récidive ou aggravation. Une preuve médicale doit supporter ses allégations[4].

[16]        Selon la jurisprudence la plus récente[5], la travailleuse doit démontrer une modification de son état de santé par la présence de signes nouveaux qui soient purement objectifs ou par la preuve de l’apparition, de la réapparition ou de l’intensification de signes cliniques déjà présents, même partiellement objectifs, lorsqu’ils sont fiables.

[17]        Par ailleurs, aux termes de la jurisprudence unanime, afin de prouver la rechute, récidive ou aggravation, la travailleuse doit démontrer un lien de causalité entre la lésion professionnelle initiale et la modification de son état de santé[6].

[18]        Cette démonstration peut être faite par le dépôt d’une opinion médicale  ou, à tout le moins, par présomption de fait, y incluant de faits médicaux, tirée d’un ensemble d’indices graves, précis et concordants[7].

[19]        Pour apprécier si un lien de causalité existe entre la lésion initiale et la condition ultérieure, il y a lieu, selon la jurisprudence unanime, de considérer les facteurs suivants[8] en retenant qu’aucun de ceux-ci n’est décisif en lui-même :

-          la gravité de la lésion initiale;

-          l’histoire naturelle de la lésion;

-          la continuité de la symptomatologie;

-          l’existence ou non d’un suivi médical;

-          le retour au travail, avec ou sans limitations fonctionnelles;

-          la présence ou l’absence d’une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique;

-          la présence ou l’absence de conditions personnelles;

-          la compatibilité entre la symptomatologie alléguée au moment de la rechute, récidive ou aggravation avec la nature de la lésion initiale;

-          le délai entre la rechute, récidive ou aggravation et la lésion initiale.

[20]        En somme, il parait au soussigné que la formulation adéquate du fardeau qui incombe la travailleuse est énoncée dans l’affaire Beauchamp[9] :

-       il lui faut prouver une modification de son état de santé par rapport à la situation qui prévalait au moment de la consolidation de la lésion professionnelle ainsi que,

-       l’existence d’un lien de causalité entre cette modification et la lésion professionnelle.

[21]        La travailleuse est reconnue porteuse d’une maladie professionnelle pulmonaire depuis le 6 octobre 1992, de la nature d’un asthme bronchite aux fruits de mer, particulièrement au fumet de cuisson des crevettes.

[22]        Le déficit anatomo-physiologique découlant de cette lésion professionnelle est établi initialement à 34 % par le Comité spécial des présidents, auxquels s’ajoutent 10,2 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie. La travailleuse reçoit alors une indemnité pour préjudice corporel de 20 251 $ en plus des intérêts.

[23]        Le 28 novembre 2000, une récidive, rechute ou aggravation est acceptée et le bilan des séquelles passe de 34 à 39 %, soit une aggravation de l’ordre de 5 % auxquels s’ajoutent encore une fois un pourcentage de 1,5 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie. Une nouvelle indemnité pour préjudice corporel de 2 925,72 $ est versée en plus des intérêts.

[24]        Le 11 mars 2004, le Comité spécial des présidents produit un rapport sur lequel il indique que le déficit anatomo-physiologique de la travailleuse demeure à 39 % et qu’il n’y a pas d’aggravation de son atteinte permanente. La récidive, rechute ou aggravation alléguée du 11 mars 2004 est donc refusée.

[25]        Le 15 février 2008, le Comité des maladies professionnelles pulmonaires réévalue la travailleuse et estime que le tableau clinique n’est pas modifié. Le déficit anatomo-physiologique demeure à 39 %.

[26]        Le 3 avril 2008, le Comité spécial des présidents entérine ces conclusions.

[27]        Le 2 mai 2012, la travailleuse produit une réclamation où elle mentionne ce qui suit :

Depuis bientôt 10 ans que je ne peux plus avoir aucune relation sexuelle à cause de ma condition pulmonaire, et ma condition de santé (asthme professionnel ne me permet pas de passer d’autres tests à Québec).

Je demande une évaluation sur dossier.

Merci à l’avance.

 

 

[28]        C’est cette réclamation qui fait en sorte que la CSST et la Société de l’assurance automobile du Québec rendent une décision conjointe le 20 décembre 2012, par laquelle la date de la rechute est fixée au 26 septembre 2011. Cette récidive, rechute ou aggravation est cependant refusée.

[29]        En matière de maladie professionnelle pulmonaire, le législateur a prévu une procédure spéciale d’évaluation aux articles 226 et suivants de la loi. L’article 226 se lit comme suit :

226.  Lorsqu'un travailleur produit une réclamation à la Commission alléguant qu'il est atteint d'une maladie professionnelle pulmonaire, la Commission le réfère, dans les 10 jours, à un comité des maladies professionnelles pulmonaires.

__________

1985, c. 6, a. 226.

 

 

[30]        En l’espèce, la travailleuse allègue être victime d’une récidive, rechute ou aggravation. Cependant, cette récidive, rechute ou aggravation serait en lien avec une maladie professionnelle pulmonaire reconnue au préalable. Le tribunal estime qu’il s’agit donc du prolongement de la maladie professionnelle pulmonaire déjà reconnue et qu’en conséquence, la CSST devait référer le dossier au Comité des maladies professionnelles pulmonaires puis au Comité spécial des présidents.

[31]        Lorsqu’il y a réévaluation, comme en l’espèce, la CSST statue donc sur l’existence d’une récidive, rechute ou aggravation de la maladie professionnelle pulmonaire et doit alors tenir compte du diagnostic et des autres constatations du Comité spécial des présidents qui la lie[10].

[32]        En conséquence, la CSST était liée par l’avis du Comité spécial des présidents, tel que prévu à l’article 233 de la loi. La CSST est liée par l’avis du Comité spéciale des présidents seulement sur le diagnostic et les autres constatations d’ordre médical, soit les limitations fonctionnelles, l’atteinte permanente et la tolérance du travailleur à un contaminant.

[33]        Toute autre question est d’ordre juridique et la CSST n’est pas liée en cette matière par l’avis du Comité spécial des présidents.

[34]        La travailleuse allègue une aggravation de son état pulmonaire et elle avait le fardeau de démontrer cette aggravation par une preuve prépondérante et, notamment, par un avis médical, puisque son seul témoignage ne suffit pas.

[35]        En l’espèce, la travailleuse ne s’est pas déchargée de son fardeau de démontrer une détérioration objective ou une modification objective de son état de santé.

[36]        Au contraire, six pneumologues sont d’avis que la preuve au dossier ne permet pas de conclure à une détérioration objective, tout comme en 2004 et 2008.

[37]        Le tribunal constate également que lors d’une visite médicale du 2 décembre 2011, soit peu de temps après la récidive, rechute ou aggravation alléguée, le médecin qu’elle rencontre au CLSC de Rivière-au-Renard indique qu’il n’y a aucune plainte aigue cette journée-là et qu’elle va bien dans l’ensemble. Il indique également que sa maladie pulmonaire est stable.

[38]        Il faut aussi dire que le rapport produit le jour même de la récidive, rechute ou aggravation alléguée par le docteur Lamarre le 26 septembre 2011 n’indique aucune détérioration de l’état de la travailleuse, mais seulement un « suivi pour asthme professionnel ».

[39]        En 2009, le pneumologue Steeve Goulet estime qu’il n’y a aucune modification à la condition respiratoire de la travailleuse.

[40]        Il la revoit le 28 mai 2012 et note qu’elle n’a pas eu besoin d’antibiotiques ni de Prednisone dans la dernière année. Elle a toutefois subjectivement prétendu à une augmentation de sa dyspnée. Malgré tout, au début de son rapport du 28 mai 2012, le docteur Goulet mentionne la présence d’un asthme professionnel chronicisé.

[41]        Or, la notion d’une lésion chronique fait échec à la constatation d’une récidive, rechute ou aggravation[11].

[42]        Il est vrai que la spirométrie pratiquée par le docteur Goulet démontrerait un volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) à 33 %, ce qui est plus bas que ce que la travailleuse peut fournir à son maximum. Cependant, il note la présence d’un indice de Tiffeneau qui avait tendance à augmenter, ce qui serait secondaire à un moins bon effort.

[43]        D’ailleurs, le docteur Goulet indique, le 5 décembre 2012, à l’agente d’indemnisation que de mémoire, la travailleuse est stable depuis quelques années maintenant. Cela est donc contradictoire avec sa possible trouvaille d’une détérioration de l’état de la travailleuse, à laquelle il hésite de conclure à cause d’un possible manque de fiabilité des tests. Tout cela ne convainc pas le tribunal de façon prépondérante de l’existence d’une détérioration objective de la condition de la travailleuse, surtout que six pneumologues sont d’avis contraire.

[44]        Les résultats de l’évaluation du docteur Goulet et son avis ne peuvent donc constituer aux yeux du tribunal, une preuve prépondérante d’aggravation de l’état de la travailleuse.

[45]        C’est là aussi l’avis du Comité des maladies professionnelles pulmonaires qui estime qu’il n’y a pas d’évidence de détérioration de la fonction respiratoire de la travailleuse et qui ne modifie pas le bilan de séquelles fixé antérieurement.

[46]        En septembre 2012, les trois pneumologues du Comité spécial des présidents mentionnent ce qui suit :

Nous avons, au dossier, des notes médicales de son pneumologue de même que des tests de fonction respiratoire qui ne nous convainquent pas qu’il y a eu modification de sa condition respiratoire depuis la dernière évaluation qui remonte en 2008.

 

 

[47]        Ils estiment donc ne pas avoir en leur possession les éléments nécessaires pour conclure à une détérioration de la fonction respiratoire de la travailleuse.

[48]        Le tribunal estime l’avis de ces six pneumologues prépondérant.

[49]        Il est vrai que la travailleuse ne s’est pas présentée devant le Comité des maladies professionnelles pulmonaires pour être réévaluée en bonne et due forme, avec une mesure des fonctions respiratoires et une épreuve d’effort.

[50]        Toutefois, cela résulte du choix personnel de la travailleuse qui croit ne pas pouvoir se déplacer, en raison de sa dyspnée qu’elle juge trop importante.

[51]        Pourtant, les limitations fonctionnelles émises au dossier n’empêchent aucunement la travailleuse de se déplacer pour un tel examen. Aucune preuve médicale n’explique pourquoi la travailleuse ne pouvait se rendre à l’examen qui était prévu. En omettant de s’y rendre, elle fait en sorte que le tribunal ne peut bénéficier d’une possible preuve objective d’une détérioration de sa condition.

[52]        En effet, les limitations fonctionnelles sont de se limiter à faire des efforts modérés et d’éviter l’exposition aux crevettes. Rien de tout cela n’empêche la travailleuse de se présenter devant le Comité des maladies professionnelles pulmonaires. Le fait de demeurer handicapée par la toux n’empêche pas non plus la travailleuse de s’y présenter.

[53]        Le 6 août 2012, la travailleuse affirme à la CSST qu’elle préfère ne pas passer d’autres tests et qu’elle voudrait que le Comité des maladies professionnelles pulmonaires rende sont rapport à la vue du dossier. C’est là le choix de la travailleuse, mais il fait en sorte que le tribunal ne bénéficie pas d’une possible preuve objective, fiable et prépondérante de l’existence d’une détérioration objective de sa condition.

[54]        La travailleuse mentionne à l’audience que son état est « toujours pareil comme c’était ». Elle mentionne ne plus pouvoir monter un petit escalier, mais fixe la date de ce fait à il y a plus de 15 ans. Il en va de même de son incapacité de marcher au ralenti. Le tribunal constate donc que même le témoignage de la travailleuse ne démontre aucune détérioration ou aggravation de son état de santé.

[55]        Cela étant dit, les éléments objectifs doivent prévaloir. Une indication contenue au dossier militant en faveur du fait qu’il faut préférer l’objectif au subjectif, réside dans l’avis du Comité spécial des présidents du 11 mars 2004. À ce moment, la travailleuse prétend à une aggravation marquée de ses symptômes, mais pourtant l’investigation objective ne fournit aucune évidence corroborant cette détérioration. Même que les signes d’obstruction bronchique se sont améliorés par rapport à la dernière évaluation.

[56]        Au surplus, le docteur Steeve Goulet mentionne le 6 février 2009 que la travailleuse est aux prises avec un asthme atopique sévère qui s’est greffé sur une composante d’asthme professionnel. C’est donc à dire que les problèmes pulmonaires de la travailleuse ne découlent pas seulement de sa lésion professionnelle, mais également d’un problème personnel.

[57]        Le tribunal conclut donc que la travailleuse n’a pas subi d’aggravation de sa condition pulmonaire le 26 septembre 2011.

[58]        En conséquence, l’atteinte permanente ne peut être augmentée. En effet, l’atteinte permanente a été évaluée pour les lésions antérieures et pour qu’on puisse augmenter cette atteinte, la travailleuse doit être victime d’une nouvelle lésion professionnelle.

[59]        L’article 83 de la loi se lit comme suit :

83.  Le travailleur victime d'une lésion professionnelle qui subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, pour chaque accident du travail ou maladie professionnelle pour lequel il réclame à la Commission, à une indemnité pour préjudice corporel qui tient compte du déficit anatomo-physiologique et du préjudice esthétique qui résultent de cette atteinte et des douleurs et de la perte de jouissance de la vie qui résultent de ce déficit ou de ce préjudice.

__________

1985, c. 6, a. 83; 1999, c. 40, a. 4.

 

 

[60]        Ainsi, la travailleuse a été indemnisée pour une atteinte permanente relative aux lésions professionnelles reconnues antérieurement. Pour avoir droit à une nouvelle atteinte permanente, elle doit subir une nouvelle lésion professionnelle.

[61]        Quant aux problèmes sexuels allégués par la travailleuse et à leur indemnisation, celle-ci mentionne à l’audience éprouver de tels problèmes depuis 1992 alors qu’au dossier, il est question que ces problèmes seraient apparus il n’y a qu’une dizaine d’années.

[62]        Cela est contradictoire et rend difficile l’objectivation de l’existence de tels problèmes.

[63]        De toute façon, la seule indemnité prévue à la loi pour ce genre de problèmes est l’indemnité pour préjudice corporel, qui tient compte du déficit anatomo-physiologique, du préjudice esthétique ainsi que des douleurs et de la perte de jouissance de la vie résultant du déficit anatomo-physiologique ou du préjudice esthétique.

[64]        Le tribunal le répète, en l’absence d’une nouvelle lésion professionnelle, aucune nouvelle atteinte permanente ne peut être accordée.

[65]        De toute façon, aucun déficit anatomo-physiologique ne pourrait être reconnu en vertu du chapitre 8 du Règlement sur le barème des dommages corporels[12], puisque la travailleuse n’a pas subi de lésion aux organes génitaux internes ou externes.

[66]        Les séquelles se situent plutôt au niveau de l’asthme bronchique et la travailleuse a été indemnisée en vertu du chapitre 17 de ce même règlement.

[67]        Malgré sa croyance, la travailleuse a été compensée pour ses problèmes d’ordre sexuel par l’octroi de deux indemnités pour préjudice corporel qui ont tenu compte d’un préjudice pour douleurs et perte de jouissance de la vie.

[68]        C’est par l’ajout d’un pourcentage forfaitaire au déficit anatomo-physiologique accordé pour la lésion professionnelle que le législateur a décidé d’indemniser les travailleurs pour les douleurs et perte de jouissance de la vie qui résultent de la lésion professionnelle.

[69]        Les troubles d’ordre sexuel entrent dans cette catégorie, de sorte que force est de constater que la travailleuse a déjà été indemnisée pour toutes les douleurs et perte de jouissance résultant de sa lésion professionnelle, incluant les troubles d’ordre sexuel.

[70]        Le montant de l’indemnité pour préjudice corporel se calcule donc selon les pourcentages fixés par le législateur dans le Règlement sur le barème des dommages corporels et le tribunal n’a aucune discrétion pour en déroger. L’article 84 de la loi prévoit ce qui suit :

84.  Le montant de l'indemnité pour préjudice corporel est égal au produit du pourcentage, n'excédant pas 100 %, de l'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique par le montant que prévoit l'annexe II au moment de la manifestation de la lésion professionnelle en fonction de l'âge du travailleur à ce moment.

 

Le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique est égal à la somme des pourcentages déterminés suivant le barème des préjudices corporels adopté par règlement pour le déficit anatomo-physiologique, le préjudice esthétique et les douleurs et la perte de jouissance de la vie qui résultent de ce déficit ou de ce préjudice.

 

Si un préjudice corporel n'est pas mentionné dans le barème, le pourcentage qui y correspond est établi d'après les préjudices corporels qui y sont mentionnés et qui sont du même genre.

__________

1985, c. 6, a. 84; 1999, c. 40, a. 4.

 

 

[71]        Il est possible que la travailleuse ne trouve pas les montants reçus suffisants par rapport aux problèmes qu’elle rencontre, mais il s’agit là d’un choix législatif sur lequel le présent tribunal n’a aucun contrôle. Le tribunal se doit d’appliquer la loi telle qu’elle est et non telle que les parties aimeraient qu’elle soit.

[72]        Comme l’accident d’automobile que la travailleuse a subi n’a aucunement impliqué une lésion au niveau pulmonaire, il ne saurait être question d’une rechute en lien avec le régime prévu par la Loi sur l’assurance automobile[13].

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de madame H... R..., la travailleuse;

CONFIRME la décision conjointement rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail et la Société de l’assurance automobile du Québec le 20 décembre 2012;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas subi de récidive, rechute ou aggravation le 26 septembre 2011;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas droit à une indemnité pour dommages corporels en l’absence d’une atteinte permanente supplémentaire à son intégrité physique;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas droit aux prestations prévues par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles;

DÉCLARE que le 26 septembre 2011, la travailleuse n’a pas non plus subi de rechute en lien avec son accident d’automobile;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas droit aux indemnités prévues par la Loi sur l’assurance automobile pour cette condition.

 

 

__________________________________

 

          Jean-François Clément

 

 

 

 

Me Kathleen Laroche

RAICHE, PINEAULT, TOUCHETTE

Représentante de la partie intervenante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Lapointe et Cie Minière Québec Cartier, [1989] C.A.L.P. 38; Lafleur et Transport Shulman ltée, C.L.P. 29153-60-9105, 26 mai 1993, J. L’Heureux; Les Salaisons Brochu inc. et Grenier, C.L.P. 28997-03-9105, 18 juillet 1995, M. Beaudoin; Mendolia et Samuelsohn ltée, C.L.P. 50266-60-9304, 23 août 1995, J.-Y. Desjardins.

[3]           Mendolia et Samuelsohn ltée, précitée, note 2; Belleau-Chabot et Commission scolaire Chomedey de Laval, [1995] C.A.L.P. 1341.

[4]           Guettat et Cie Minière Québec Cartier, C.A.L.P. 53020-61-9308, 18 août 1995, N. Lacroix; Belleau-Chabot et Commission scolaire Chomedey-Laval, précitée, note 3; Baron et Langlois & Langlois, C.A.L.P. 30990-62-9107, 23 octobre 1995, M. Lamarre; Lachance et Ministère de la Défense nationale, C.A.L.P. 56564-60-9401, 24 octobre 1995, M. Denis.

[5]           Cabana et Banque Nationale du Canada, C.L.P. 222389-71-0312, 28 juillet 2008, M. Zigby (décision sur requête en révision); Vigneault et Abitibi-Consolidated Scierie des Outardes, C.L.P. 253496-09-0501, 21 septembre 2005, G. Tardif; Guarna et Aliments Humpty Dumpty, C.L.P. 232909-61-0404, 2 août 2004, S. Di Pasquale.

[6]           Bélanger et Commission scolaire des Rives-Du-Saguenay, C.L.P. 325045-02-0708, 10 mars 2008, G. Morin; Lavoie et Club de golf Pinegrove inc., C.L.P. 317031-62-0705, 10 janvier 2008, R.L. Beaudoin; Côté et Neilson inc., C.L.P. 229412-01B-0403, 7 février 2005, J.-F. Clément; Girard et Commission scolaire de Rouyn-Noranda, C.L.P. 159855-08-0104, 21 juin 2002, P. Prégent; Lafond et Ministère des Transports du Québec, C.L.P. 135466-04B-0003, 6 mars 2002, L. Boucher; Bourque et EBC-SPIE Coparticipation, C.L.P. 122073-09-9908, 1er septembre 2000, M. Carignan; requête en révision rejetée; Chamberland et Résidence Jean-de-la-lande, C.L.P. 132784-73-0002, 6 juillet 2000, L. Desbois; Lapointe et Decorterre inc., C.L.P. 102372-03B-9807, 14 mai 1999, P. Brazeau; Lapointe et Cie Minière Québec Cartier, précitée, note 4; Boisvert et Halco inc., [1995] C.A.L.P. 19; Lafleur et Transport Shulman ltée, précitée, note 2.

[7]           Forester et Marinier Automobiles inc., [1997] C.A.L.P. 1642; Aubé et Commission scolaire de l’Énergie, C.L.P. 206476-04-0304, 21 octobre 2003, J.-F. Clément.

[8]           Boisvert et Halco inc, précitée note 6; Harrisson et Société des traversiers du Québec, C.L.P. 172015-01A-0111, 28 février 2003, D. Sams.

[9]           Beauchamp et Inspec-Sol, C.L.P. 352639-63-0807, 21 avril 2009, I. Piché.

[10]         Tapp et Noranda inc., 2011 QCCLP 1629; Chemin de fer nationaux et Mule, [1992] CALP 1581, requête en révocation accueillie 1992 CALP 1586 C.S.

[11]         Lafontaine et C.H.-C.H.S.L.D. de Papineau, C.L.P. 170168-07-0110, 27 août 2003, N. Lacroix, décision accueillant la requête en révision; Côté et Neilson inc., C.L.P. 229412-01B-0403, 7 février 2005, J.-F. Clément.

[12]         R.R.Q., c. A-3.001, r. 2.

[13]         L.R.Q., c. A-25.

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.