DÉCISION
[1] Le 14 avril 2000, monsieur Afonso Casimiro, (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d’une révision administrative le 22 mars 2000.
[2] Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a initialement rendue le 14 septembre 1999 et déclare que le 10 octobre 1998, le travailleur n’a pas subi une lésion professionnelle et qu’il n’a pas droit aux indemnités prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).
[3] À l’audience, seuls les procureurs de la CSST et de l’employeur Construction DJL inc. (l’employeur) étaient présents; le travailleur était absent quoique dûment convoqué.
L'OBJET DE LA CONTESTATION
[4] Selon les informations au dossier, le travailleur demande de reconnaître que le 10 octobre 1998, il a subi une lésion professionnelle et plus particulièrement, une maladie professionnelle pulmonaire.
QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[5] D’une part, dès le début de l’audience, la Commission des lésions professionnelles soulève d’office le fait que le travailleur a produit une réclamation alléguant être atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire et que la CSST n’a pas référé ce dernier à un comité des maladies professionnelles pulmonaires contrairement aux dispositions de l’article 226 de la loi.
[6] D’autre part, de son côté, le procureur de l’employeur soumet que la réclamation du travailleur reçue à la CSST le 14 décembre 1998 l’a été en dehors du délai prévu à l’article 272 de la loi.
LES FAITS CONCERNANT LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[7] Le travailleur occupe un emploi de cimentier-applicateur.
[8] Le 8 décembre 1998, il complète un formulaire de réclamation alléguant être victime d’une maladie professionnelle depuis le 10 octobre 1998 dans les termes suivants :
« Poumons-asme et O.R.L. Voici copie dossier Hospital Hotel Dieu et maladie proffessionnelle » (sic)
[9] Cette réclamation est reçue à la CSST le 14 décembre 1998 tel qu’il appert de l’estampille apparaissant au recto de ce document.
[10] Le travailleur transmet alors un extrait de son dossier médical de l’hôpital Hôtel-Dieu de Montréal. On y retrouve des notes d’observations médicales de l’urgence de l’Hôtel-Dieu en date du 2 mai 1998 pour « hémoptysie », des notes de consultation en pneumologie le 14 mai 1998, un rapport de radiographie pulmonaire subie le 14 mai 1998 daté du 30 juin 1998, un bilan de physiologie pulmonaire en date du 15 juin 1998, un rapport de tomodensitométrie pulmonaire en date du 30 juin 1998 et des notes d'observations médicales du département de pneumologie de l’Hôtel-Dieu en date du 1er septembre 1998.
[11] La lecture de ces documents permet de constater qu’à compter du mois de mai 1998, le travailleur subit une investigation pulmonaire comportant une première radiographie pulmonaire le 2 mai 1998 et une seconde le 14 mai 1998. Le rapport de cette dernière radiographie n’est complété que le 30 juin 1998 et mentionne ceci :
«Persistance de densités linéaires et réticulaires dans le segment antérieur du lobe supérieur droit correspondant à des bronchiectasies. Goitre plongeant en postérieur. Se référer à la tomodentitométrie qui a été faite le 1998-06-30 pour les détails de l’atteinte pulmonaire. »
[12] Les conclusions du bilan de physiologie pulmonaire en date du 15 juin 1998 sont à l’effet que le travailleur présente un syndrome obstructif modéré compatible avec le diagnostic de bronchiectasies.
[13] Les conclusions du rapport de tomodensitométrie pulmonaire en date du 30 juin 1998 sont à l’effet suivant :
« Bronchiectasies du segment antérieur du lobe supérieur droit, sans évidence de lésion endobronchique.
Atteinte pulmonaire, de type miliaire, diffuse, non spécifique. Malgré le fait que les régions sous-pleurales sont relativement épargnées, nous devons soulever fortement la possibilité d’une atteinte par tuberculose. Ceci est à corréler avec la clinique. Une bronchiolite ou des métastases nous apparaissent moins probable. Goitre plongeant.
Asymétrie de densité mammaire à droite. » (sic)
[14] Les notes d’observation médicales du département de pneumologie en date du 1er septembre 1998 font état d’une maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), d’asthme et de bronchiectasies au lobe supérieur droit (LSD). Une médication est prescrite au travailleur et des recommandations sont faites.
[15] Le 4 mai 1999, un agent de la CSST fait parvenir au travailleur un formulaire « Annexe à la réclamation du travailleur - maladie professionnelle pulmonaire ». Le travailleur complète ce formulaire et le transmet à la CSST le 13 mai 1999. Le travailleur fait alors référence à son exposition à divers matériaux tel que la poussière, le ciment, l’époxy, le charbon et des « produits toxiques ». Au chapitre intitulé « Information relative à votre maladie professionnelle », il donne le nom du docteur Pierre Leblanc, pneumologue au Campus Hôtel-Dieu et celui du docteur Suzanne Venne, généraliste du même centre hospitalier.
[16] À la même période, le travailleur fournit également à la CSST une liste détaillée de ses heures de travail enregistrées auprès de la Commission de la construction du Québec. Les notes évolutives du dossier de la CSST en juillet 1999 révèlent que cette dernière s’interroge alors sur l’opportunité de diriger le dossier du travailleur à un comité des maladies professionnelles pulmonaires. L’agent en charge du dossier s’exprime comme suit :
« J’ai vérifié avec BM pour compléter la demande d’expertise. Compte tenu de l’absence au dossier d’un document médical d’un médecin (pneumologue) qui relierait une maladie au travail effectué par le travailleur, il ne serait pas pertinent de référer le dossier au CMPP. »
[17] Le 27 juillet 1999, la CSST écrit au travailleur et lui demande s’il possède un document médical de son médecin reliant sa condition à son travail et, dans la négative, d’en obtenir un.
[18] Le travailleur n’ayant pas répondu à cette lettre, le 30 août 1999, la CSST écrit à nouveau au travailleur pour obtenir les renseignements demandés.
[19] Demeurant sans nouvelles du travailleur, le 14 septembre 1999, la CSST rend une décision concluant au refus de sa réclamation pour les motifs suivants :
« Il ne s’agit pas d’une maladie professionnelle. De plus, vous n’avez pas démontré que cette maladie est caractéristique du travail que vous exerciez ou qu’elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.
En effet, vous n’avez pas donné suite à nos lettres du 27 juillet et du 30 août 1999 vous demandant d’obtenir un rapport médical de votre médecin traitant qui relie votre condition actuelle à votre travail.
En conséquence, aucune indemnité ne vous sera versée. (…) »
[20] Le 21 septembre 1999, le travailleur transmet à la CSST deux lettres du docteur Leblanc datées du 17 septembre 1999 ainsi qu’un bilan de physiologie pulmonaire en date du 2 septembre 1999. L’une des lettres du docteur Leblanc est adressée au médecin-traitant du travailleur et mentionne ceci :
« Cher docteur,
J’ai eu l’occasion de voir ce patient à quelques reprises en 1998 et 1999 pour investigation d’une maladie pulmonaire obstructive chronique.
Ce patient est âgé de 37 ans et il est d’origine portugaise. Il présente une histoire de tabagisme importante et une histoire de prise d’alcool de façon régulière et importante (il s’est d’ailleurs présenté à la clinique externe au mois d’août en état d’éthylisme plus ou moins aigü). Il s’agit d’un patient qui a l’habitude de travailler dans la construction; un travail relativement lourd. Il est ennuyé par des bronchites à répétition, des infections des voies respiratoires supérieures quelquefois accompagnées d’hémoptysies et une dypsnée variable, d’allure asthmatique.
À l’examen, on note un patient en assez bon état général, dépendant de sa condition alcoolique. Le coeur est tout à fait normal. Au niveau pulmonaire, on note des sibilances expiratoires bilatérales, surtout en postérieur.
Sur le plan du bilan, la radiographie pulmonaire a toujours montré des lésions du lobe supérieur suggestives de bronchiectasies et ceci a été confirmé par une tomodensitométrie axiale qui a été faite à ce sujet. Ces bronchiectasies du segment antérieur du lobe supérieur droit ne présentent pas de lésion endobronchique et ne montrent pas d’évidence d’anomalie infectieuse active. D’ailleurs, le patient a eu des cultures pour recherche de BK et le Lowenstein s’est avéré négatif.
D’autre part, il a eu des tests de fonction respiratoire dont les derniers au mois de septembre 1999. Ces tests de fonction respiratoire ont mis en évidence une hyperinflation à volume résiduel qui est à 231% de la normale avec une obstruction quand même légère des voies aériennes périphériques, avec un VEMS à 80% de la normale mais un rapport VENS/CV abaissé à 66% et une réponse favorable aux bronchodilatateurs pouvant témoigner d’un phénomène asthmatique. La diffusion était tout à fait normale.
On a recommandé au patient de cesser son tabagisme, de travailler dans un environnement adéquat et de se traiter de façon continue avec du Combivent 2 inhalations qid et du Bécloforte 2 inhalations matin et soir. Nous avons des doutes sur la compliance de ce patient au traitement. Nous avons eu l’impression, d’après les renseignements donnés par des interprètes, qu’il voulait cesser son travail et voulait demander qu’il soit déclaré inapte à faire le travail qu’il fait actuellement au niveau de la CSST. Un rapport à ce sujet est adressé à la CSST avec ce résumé de dossier. Nous vous laissons le soin de voir au follow-up de ce patient. » (sic)
[21] Le 23 septembre 1999, le travailleur téléphone à la CSST et demande à cette dernière si elle a reçu « les documents de l’hôpital ». La CSST indique ne pas les avoir reçu et demande au travailleur de les annexer à sa lettre de contestation éventuelle.
[22] Le 28 septembre 1999, le travailleur conteste la décision rendue par la CSST le 14 septembre 1999.
[23] Le 21 octobre 1999, la CSST soumet le dossier au docteur A. Gilbert, médecin au service de son bureau médical. Après avoir pris connaissance de la lettre du docteur Leblanc ci-haut rapportée, le docteur Gilbert est d’avis qu’ « aucune référence ne peut être faite dans ce cas à une maladie pulmonaire professionnelle ».
[24] Le 22 mars 2000, la CSST confirme sa décision initiale du 14 septembre 1999 d’où le présent litige.
L'ARGUMENTATION DES PARTIES CONCERNANT LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[25] Dans un premier temps, le procureur de l’employeur plaide que la réclamation du travailleur en décembre 1998 a été faite en dehors du délai de six mois prévu à la loi puisque dès le mois de mai 1998, le travailleur a eu connaissance de ses problèmes de santé.
[26] Dans un deuxième temps, il plaide que la CSST n’avait pas les informations médicales nécessaires pour soumettre le dossier du travailleur à un comité des maladies professionnelles pulmonaires. Il souligne que le dossier médical du travailleur contient plusieurs diagnostics et qu’aucun médecin ne fait de lien entre ces diagnostics ou l’un d’eux et le travail du travailleur et ne complète de rapport médical destiné à la CSST à cette fin. Il souligne que le travailleur cherche un moyen de se faire déclarer inapte au travail et qu’il est peu collaborateur.
[27] Le procureur de la CSST plaide que le transfert du dossier du travailleur au comité des maladies professionnelles pulmonaires semble prématuré aujourd’hui. Il souligne qu’on ignore exactement de quelle maladie le travailleur souffre et sur quoi se base sa réclamation. Il plaide que le travailleur n’a pas fourni les informations demandées par la CSST et que sa contestation est abusive et dilatoire. Il soumet que le travailleur démontre un désintéressement de son dossier qui, tel que constitué, ne peut donner lieu qu’à un refus de sa réclamation.
L'AVIS DES MEMBRES CONCERNANT LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[28] Les membres issus des associations d’employeurs et des associations syndicales sont d’avis que la réclamation du travailleur a été faite dans le délai prévu à la loi.
[29] Ils sont également d’avis que le travailleur aurait dû être référé à un comité des maladies professionnelles pulmonaires conformément à l’article 226 de la loi puisqu’il a produit une réclamation alléguant qu’il est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION CONCERNANT LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES
[30] La Commission des lésions professionnelles dispose d’abord de la question concernant le délai de réclamation tel que soulevé par le procureur de l’employeur.
[31] À sa réclamation du 8 décembre 1998, le travailleur allègue la survenance d’une maladie professionnelle.
[32] L’article 272 de la loi prévoit ce qui suit :
272. Le travailleur atteint d'une maladie professionnelle ou, s'il en décède, le bénéficiaire, produit sa réclamation à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, dans les six mois de la date où il est porté à la connaissance du travailleur ou du bénéficiaire que le travailleur est atteint d'une maladie professionnelle ou qu'il en est décédé, selon le cas.
Ce formulaire porte notamment sur les nom et adresse de chaque employeur pour qui le travailleur a exercé un travail de nature à engendrer sa maladie professionnelle.
La Commission transmet copie de ce formulaire à chacun des employeurs dont le nom y apparaît.
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1985, c. 6, a. 272.
[33] Le point de départ du délai de l’article 272 est le moment où le travailleur a connaissance de la possibilité d’une relation entre la maladie dont il souffre et son travail.
[34] Le dossier médical du travailleur révèle qu’à compter du mois de mai 1998, ce dernier consulte pour hémoptysies. S’enclenche alors une investigation pulmonaire s’échelonnant jusqu’au 30 juin 1998, date de la tomodensitométrie pulmonaire subie par le travailleur. Ce n’est finalement que le premier septembre 1998 que le département de pneumologie du Campus Hôtel-Dieu émet ses observations et ses recommandations.
[35] Il est vrai que le travailleur était absent à l’audience et que son témoignage n’a pu être entendu. Cependant, le suivi médical dont il a fait l’objet pendant l’année 1998, permet de croire qu’il n’a pu avoir connaissance de la possibilité d’une relation entre ses problèmes pulmonaires et son travail avant que cette investigation ne soit terminée et que le département de pneumologie ne se soit prononcé à la suite de cette investigation.
[36] Il n’y a aucun élément de preuve au dossier qui permet de conclure que le travailleur ait eu cette connaissance avant la fin de son investigation pulmonaire soit le 30 juin 1998.
[37] La Commission des lésions professionnelles est donc d’avis qu’en l’espèce, la réclamation du travailleur a été faite dans le délai de six mois prévu à la loi, tout comme le reconnaissait d’ailleurs implicitement avant elle la CSST par ses décisions du 14 septembre 1999 et du 22 mars 2000; en effet, la CSST dispose du fond de la réclamation du travailleur sans aborder la question du délai ce qui, de l’avis de la Commission des lésions professionnelles, équivaut à une décision implicite de sa part quant au respect du délai de réclamation par le travailleur.
[38] La Commission des lésions professionnelles dispose maintenant de la question concernant la référence du travailleur à un comité des maladies professionnelles pulmonaires.
[39] L’article 226 de la loi prévoit ceci :
226. Lorsqu'un travailleur produit une réclamation à la Commission alléguant qu'il est atteint d'une maladie professionnelle pulmonaire, la Commission le réfère, dans les 10 jours, à un comité des maladies professionnelles pulmonaires.
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1985, c. 6, a. 226.
[40] L’article 229 de la loi prévoit que les radiographies des poumons du travailleur sont transmises au président du comité des maladies professionnelles pulmonaires. L’article 230 prévoit que le comité examine le travailleur et qu’il fait subséquemment un rapport écrit à la CSST.
[41] L’article 231 prévoit qu’à la réception du rapport du Comité des maladies professionnelles pulmonaires, la CSST soumet le dossier du travailleur à un comité spécial qui donne son avis à son tour.
[42] Finalement, l’article 233 édicte qu’aux fins de rendre une décision en vertu de la loi sur les droits du travailleur qui lui produit une « réclamation alléguant qu’il est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire », la CSST est liée par le diagnostic et les autres constatations établis par le comité spécial.
[43] De ces dispositions, la Commission des lésions professionnelles retient que dès qu’un travailleur dépose une réclamation alléguant qu’il est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire, la CSST doit référer celui-ci à un comité des maladies professionnelles pulmonaires puis à un comité spécial puisque seules les constatations établies par ce dernier comité ne la lieront aux fins de rendre une décision sur les droits du travailleur.
[44] En l’espèce, le travailleur a produit une réclamation faisant référence à de l’asthme et à une maladie professionnelle. Il a également complété une annexe à sa réclamation pour « maladie professionnelle pulmonaire ». On ne peut donc conclure que la réclamation du travailleur soit imprécise et ne permette pas d’en cerner l’objet.
[45] D’autre part, aux fins d’enclencher le processus d’évaluation prévu, ces dispositions n’obligent pas le travailleur à déposer un rapport médical attestant d’une relation entre ses problèmes de santé et son travail : les articles 226 et 233 ne réfèrent qu’à une « réclamation » du travailleur « alléguant qu’il est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire ». Quoiqu’il en soit, dans le présent cas, le travailleur a tout de même transmis un extrait de l’investigation pulmonaire dont il a fait l’objet en 1998, au soutien de sa réclamation. Il a également produit des lettres du docteur Leblanc, pneumologue, en septembre 1999.
[46] Dans l’affaire Cie de papier Québec et Ontario Ltée et Fortin[2], la Commission d’appel en matière de lésion professionnelle (la Commission d’appel) exprime l’opinion que le médecin qui a charge d’un travailleur a l’obligation de lui remettre le formulaire prescrit par la CSST mais que le défaut de s’acquitter de cette obligation ne peut priver le travailleur de son droit de produire une demande d’indemnisation pour maladie professionnelle pulmonaire.
[47] De même, dans l’affaire Philippe McKay et Héroux Inc.[3], la Commission d’appel est d’avis qu’il serait inacceptable de dénier au travailleur son droit de faire valoir ses prétentions par la seule omission d’une tierce partie sur laquelle il n’a aucun contrôle, en l’occurrence, le médecin qui doit lui remettre l’attestation comportant les éléments requis par l’article 199 de la loi.
[48] Dans l’affaire Massy et Ministère du Développement des ressources humaines[4], la Commission d’appel indique que la CSST a l’obligation de référer le travailleur à un comité des maladies professionnelles pulmonaires, face à une réclamation de ce dernier alléguant une maladie pulmonaire reliée à son travail. À cet effet, la Commission d’appel réfère au jugement rendu dans Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Commission d’appel en matière de lésions professionnelles et Marie Lamarre et al.[5] où la Cour supérieure s’exprime comme suit :
« […]
D’après le C.N., en vertu de l’article 226 de la loi, la C.S.S.T. doit référer à un comité des maladies professionnelles pulmonaires tout dossier dans lequel un travailleur produit une réclamation alléguant qu’il est atteint d’une « maladie professionnelle pulmonaire »; aucune telle référence n’a été faite au comité des maladies professionnelles pulmonaires par la C.S.S.T., malgré qu’une « maladie professionnelle » affectant les poumons était expressément invoquée par M. Mule, et ce comité n’a donc, à aucune moment, étudié le dossier à l’origine du présent litige.
La décision attaquée déclare que la C.A.L.P. est saisie de la détermination de l’admissibilité de la réclamation de M. Mule, et ce, malgré l’absence de l’étude du dossier par le comité des maladies professionnelles pulmonaires. D’après le C.N., cet état de choses constitue un excès de juridiction qui la rend nulle et ultra vires, donnant ainsi ouverture à la révision judiciaire par voie d’évocation devant ce tribunal. [p.1587]
Le C.N. a raison.
Face à une réclamation d’un travailleur alléguant une maladie pulmonaire qui est reliée à son travail, la C.S.S.T a l’obligation de référer le travailleur à un comité des maladies professionnelles pulmonaires.
[…] »
[49] Finalement, tenant compte des faits du présent dossier, la Commission des lésions professionnelles ne peut conclure à un désintéressement de la part du travailleur qui s’est quand même conformé à la demande d’informations supplémentaires de la CSST en septembre 1999 en produisant des lettres du docteur Leblanc. La Commission des lésions professionnelles ne peut non plus présumer du désintéressement du travailleur par le seul fait de son absence à l’audience.
[50] Pour toutes ces raisons, la Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’elle ne peut priver le travailleur de l’exercice de ses droits alors que la procédure d’évaluation médicale prévue aux articles 226 et suivants de la loi n’a pas été suivie. Elle est d’avis que le dossier du travailleur doit être retourné à la CSST pour que celle-ci se conforme à cette procédure.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la question préliminaire soulevée par l’employeur, Construction DJL Inc;
DÉCLARE que la réclamation du travailleur, monsieur Afonso Casimiro, est recevable;
ACCUEILLE la requête du travailleur;
INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail après révision administrative le 22 mars 2000;
DÉCLARE nulle la décision initiale rendue par la
Commission de la santé et de la sécurité du travail le 14 septembre 1999;
RETOURNE le dossier à la CSST pour que celle-ci réfère le travailleur à un comité des maladies professionnelles pulmonaires conformément à la loi.
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Me Danièle Gruffy |
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Commissaire |
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Me Stéphane Beauchamp BOURQUE, TÉTREAULT & ASS 435, Grande-Allée Est Québec (Québec) G1R 2J5 |
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Représentant de la partie intéressée |
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Me André Breton PANNETON
LESSARD 25, Boul.
Lafayette, 5ième étage Longueuil
(Québec) J4K 5B7 Représentant
de la partie requérante |
AVIS :
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