Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Laurentides

Laval, le 15 mars 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

128155-64-9912-R

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Santina Di Pasquale

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

René F. Boily

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Claudette Lacelle

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

079872297

AUDIENCE TENUE LE :

7 mars 2001

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER BR :

62707031

À :

St-Antoine

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE PRÉSENTÉE EN VERTU DE L'ARTICLE 429 .56 DE LA LOI SUR LES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET LES MALADIES PROFESSIONNELLES (L.R.Q., chapitre A-3.001)

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

YVES CHALIFOUX

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

FONDOIR LAURENT (FERMÉ)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE

LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL - LAURENTIDES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 16 juin 2000, monsieur Yves Chalifoux (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il demande une révision ou révocation de la décision rendue le 17 mai 2000.

[2]               Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles rejette la contestation du travailleur, confirme une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), le 17 novembre 1999, à la suite d'une révision administrative et déclare qu'en date du 30 octobre 1996, le travailleur n'a pas été victime d'une lésion professionnelle.

[3]               Les parties ont demandé d'être entendues sur la requête en révision conformément au troisième alinéa de l'article 429.57 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., ch.A-3.001) (la loi).  Le travailleur était présent et représenté par procureur à l'audience et la CSST était représentée par procureure.

 

L'OBJET DE LA REQUÊTE

[4]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de révoquer la décision rendue le 17 mai 2000 parce qu'il n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre lors de l'enquête et audition qui au eu lieu le 5 mai 2000 et qu'en plus, la décision est entachée de vices de fond de nature à l'invalider.

[5]               À l'appui de sa requête, le travailleur soumet que les faits rapportés dans la décision attaquée sont inexacts et incomplets.  De plus, il soumet que son représentant lui a dit qu'il n'avait pas besoin de se présenter à l'audience et n'a pu donc témoigner afin de clarifier certains faits et fournir des renseignements supplémentaires.

 

LES FAITS

[6]               Le 17 novembre 1999, la CSST, à la suite d'une révision administrative, rend une décision par laquelle elle confirme la décision rendue initialement par la CSST le 18 novembre 1997 et déclare que le travailleur n'a pas subi une rechute, récidive ou aggravation le 30 octobre 1996.  Dans la décision la CSST indique que le travailleur prétend être en dépression depuis le 17 novembre 1995 mais elle conclut que le travailleur n'a pas prouvé que sa condition psychologique est reliée à sa condition lombaire.

[7]               Le 3 décembre 1999, le travailleur, par l'entremise de son représentant, monsieur Benoit Marier, dépose une contestation à la Commission des lésions professionnelles à l'encontre de la décision rendue par la CSST le 17 novembre 1999.

[8]               Sur le formulaire de contestation, monsieur Marier répond oui aux questions suivantes :

«X Oui Non ® J'aimerais tenter un RÈGLEMENT À L'AMIABLE par la  CONCILIATION

 

 

 X Oui    Non ® Veuillez rendre une DÉCISION SUR DOSSIER»

 

 

 

[9]               Cependant, il ajoute à l'espace réservé pour les noms des témoins, ce qui suit :

«La partie appelante se réserve le droit de faire entendre tout témoin ou expert ou de déposer tout écrit et documents médicaux qu'elle jugera pertinents.»

 

 

 

[10]           Le 20 janvier 2000, le représentant du travailleur fait parvenir à la Commission des lésions professionnelles un document qui se lit ainsi :

«Demande de décision sur dossier

 

La partie appelante ne sera pas présente à

l'audition tenue devant la Commission des

lésions professionnelles.

 

Demande de décision sur dossier advenant

l'échec du processus de conciliation.  Les

éléments de la preuve documentaire, tant

factuelle que médicale, soumis à l'appréciation

de la Commission des lésions professionnelles,

consistent en l'ensemble des documents déposés

et contenus au dossier préparé pour l'audience.

 

La Commission des lésions professionnelles peut

néanmoins procéder à  l'instruction de l'affaire et

rendre une décision.

 

****************************************

Prière de me contacter après le 21

février 2000 pour tenter de régler le

dossier en conciliation.  En voyage en

Asie, Guangzhou, Chine.


1984.01.25

________________________________________

                        (Date de la lésion, accident, événement)

 

 

            (S)_____Yves Chalifoux___________________________________

(signature de la partie demanderesse ou appelante)

 

 

(S)______Benoit Marier___________________________________

            (signature du représentant)

 

 

                       Le 20 janvier 2000

________________________________________

                       (Date)

 

 

c.c.      : Monsieur Yves Chalifoux»

 

 

 

[11]           Le travailleur a admis à l'audience que c'est bien sa signature qui apparaît sur le document.

[12]           Le 3 mai 2000, Me Robert Morin, procureur de la CSST communique avec le commissaire pour s'assurer qu'il n'y aura pas d'enquête et audition.  La note évolutive qui est au dossier de la CSST se lit ainsi :

«00-05-03: en préparant le dossier je constate que Marier a demande décision sur

dossier DONC je tél à Daniel Martin qui fera vérifier par un techn, si Marier persiste

dans ses intentions, si oui m'en informera pour que je produise arg. écrite;

00-05-04: tél de Daniel Martin me confirme que décision sur dossier demandée par Marie DONC arg. écrite produite par csst ce jour;

00-05-09: acc. réc. clp de notre abs à aud»

 

 

[13]           Le 3 mai 2000, la note suivante est envoyée par télécopieur à monsieur Marier, représentant du travailleur, par la Commission des lésions professionnelles :

«S.V.P. Nous confirmer si vous allez être présent à l'audition prévue le 5 mai prochain

à 15h00.  Dans le cas contraire une décision sera rendue sur dossier, tel que

demandé le 20 janvier 2000.»

 

 

[14]           Monsieur Marier retourne le document à la Commission des lésions professionnelles le 4 mai 2000 par télécopieur avec la mention suivante :

«demande de décision sur dossier. Merci

(S) Benoit Marier 04 mai 2000»

 

 

[15]           La CSST produit donc une argumentation écrite le 4 mai 2000.

[16]           Le 17 mai 2000, la Commission des lésions professionnelles rend sa décision et rejette la contestation du travailleur.

[17]           Le travailleur demande la révision ou révocation de cette décision par un document daté du 14 juin 2000 qui se lit ainsi :

«          J'ai reçu par courrier le 23 mai 2000 la décision de la commission concernant l'audition de mon dossier csst # 079872297-1 le 05 mai 2000.  Je vous fais part de mon désaccord concernant cette décision pour l'événement du 30 octobre 1996.

 

            Veillez consulté le rapport médicale de décembre 1983 du Dr. Ginette Thibeault, qui souligne des problèmes cervico-dorsals dus à mon travail depuis au moins le mois de février 1983.

 

            Entre autre selon mon avis et selon ce que j'ai lu et pris connaissance dans la décision que vous m'avez envoyer, je considère que la commission ne peu rendre une telle décision avec les faits incomplets et d'autres inexacts contenu dans ce document.

 

            Ce que je me pose également comme question c'est pourquoi selon l'information que j'ai reçue de M. Marier je n'avais pas a me présenté à cette audition ? Et pourquoi vous avez informé mon représentant M. Benoît Marier que ce n'était pas nécessaire qu'il ce présente lui non plus à l'audition ? Ils nous auraient été possible de vous fournir certains faits qui diffères de ceux contenus dans le document de décision que vous m'avez fait parvenir.» (sic)

 

 

 

[18]           À l'audience, le travailleur témoigne et précise qu'il est l'auteur du document daté du 14 juin 2000.  Il explique que lorsqu'il a reçu la décision de la Commission des lésions professionnelles, il l'a lue et a constaté que certains faits étaient inexacts.  Il relate que quelques semaines avant la date prévue pour enquête et audition sur le fond, il a communiqué avec monsieur Marier pour savoir ce qu'il devait apporter comme documents à l'audience et il lui a répondu que ce n'était pas nécessaire pour lui d'être présent.  Il lui a dit que la loi avait changé et que c'est maintenant différent que dans le temps de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles; qu'il se présenterait seul.  Il ajoute que quelques jours avant l'audience il a recommuniqué avec son représentant et celui-ci lui a dit que la CSST avait communiqué avec lui pour lui dire que même le représentant n'avait pas à se présenter car le dossier était complet.   Après avoir reçu la décision, il a communiqué avec son représentant qui lui a dit qu'il n'y avait rien à faire.  Il a décidé de demander la révision lui-même.

[19]           Le travailleur déclare également qu'il a rencontré le docteur Tanguay pour la première fois le 17 novembre 1995.  Il suivait un cours de formation et a fait une crise de panique.  Il a consulté alors le docteur Tanguay et ce médecin lui a prescrit des antidépresseurs, doit du «Luvox».  La CSST a remboursé le coût de ses médicaments en 1995 et 1996.  Il produit des documents à l'appui de son affirmation.

[20]           Le travailleur soumet aussi qu'il a reçu des indemnités de remplacement du revenu environ jusqu'au début de novembre 1996.

[21]           Interrogé par le procureur de la CSST, le travailleur indique que d'une certaine façon ça faisait son affaire de ne pas avoir à se présenter à l'audience devant la Commission des lésions professionnelles car il prenait des médicaments tous les jours et n'était pas en bonne forme.  Il déclare que lorsqu'il a signé le document du 20 janvier 2000, soit la demande de décision sur dossier, il croyait que ça voulait dire que lorsqu'il allait se présenter à l'audience le tribunal aurait en main tous les documents.

 

L'AVIS DES MEMBRES

[22]           La membre issue des associations syndicales et le membre issu des associations d'employeurs sont d'avis de rejeter la requête en révision.  D'une part, la preuve ne démontre pas qu'il y a eu violation des règles de justice naturelle.  Le travailleur a choisi de ne pas se faire entendre, il a consenti à ce qu'une décision soit rendue sur dossier.  De plus, son consentement n'était pas vicié par une incompréhension quelconque puisque c'est lui-même qui a rédigé la requête en révision dans le dossier, document qui est bien articulé.

[23]           D'autre part, le travailleur n'a pas démontré que la décision de la Commission des lésions professionnelles est entachée de vices de fond de nature à l'invalider.  Les rapports des docteurs Imbeault et Giroux ne sont pas ignorés; ils sont mentionnés dans la section des faits et le tribunal en a tenu compte.  De plus, le commissaire n'a pas fait d'erreur lorsqu'il indique que selon le médecin du travailleur la détérioration de la condition psychologique est principalement associée à la cessation des versements de prestations de la CSST.  En effet, ce que le commissaire devait décider c'est s'il y avait eu détérioration à partir du 30 octobre 1996 et il a répondu par la négative après une bonne analyse de la preuve.

 

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[24]           La Commission des lésions professionnelles doit décider s'il y a lieu de réviser ou révoquer la décision rendue le 17 mai 2000.

[25]           L'article 429.56 de la loi prévoit ce qui suit :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu :

 

  lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

  lorsqu'une partie n'a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

  lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l'ordre ou l'ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l'a rendu.

________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[26]           Cette disposition doit s'interpréter à la lumière de l'article 429.49 de la loi qui édicte que la décision de la Commission des lésions professionnelles est finale et sans appel.

[27]           En l'instance, le travailleur soumet deux motifs à l'appui de sa requête.  Le premier motif étant qu'il n'a pu se faire entendre lors de l'enquête et audition du 5 mai 2000, puisque son représentant lui a dit qu'il n'était pas nécessaire de se présenter.

[28]           La Commission des lésions professionnelles, dans l'affaire Côté et Jack Victor inc.[1], déclare ce qui suit :

«Récemment, la Cour supérieure(1) rappelait que la violation des principes de justice naturelle et du devoir d'agir équitablement est considérée comme un excès de juridiction.  Le droit d'être entendu, soit le respect de la règle audi alteram partem est la première règle de justice naturelle qui doit être observée. Toutefois, elle n'a pas un caractère absolu.

 

Citant les propos du professeur Patrice Garant, dans son livre Droit administratif, elle souligne que, eu égard à la règle audi alteram partem, une partie peut y renoncer soit expressément, soit implicitement, soit par sa négligence.

 

C'est dans ce sens que la Commission des lésions professionnelles a d'ailleurs interprété l'expression «pour des raisons jugées suffisantes» énoncées au paragraphe 2 de l'article 429.56 de la Loi.(2)»

_______________

1. Laliberté et associés inc c. Commission des lésions professionnelles et Jean-Marc Dubois Cour supérieure, Montréal, 500-05-045973-987, 5 février 1999, Madame le juge Suzanne Courteau.

 

2. La Fondation Marie-Soleil et Jonathan inc et Poirier et CSST 89376-08-9706 et 100797-08-9805, C.L.P. 15 janvier 1999, Jean-Guy Roy, commissaire.

 

 

 

[29]           En l'instance, la Commission des lésions professionnelles considère que le travailleur a renoncé expressément à son droit d'être entendu.  En effet, la preuve révèle qu'il a signé un document le 20 janvier 2000 intitulé «Demande de décision sur dossier».  Il est indiqué clairement que la partie appelante ne sera pas présente à l'audience devant la Commission des lésions professionnelles.

[30]           Le travailleur, lors de l'audience sur la requête en révision, prétend qu'il n'a pas compris que par ce document il demandait au tribunal de rendre une décision sur dossier.  Il croyait, dit-il, que ce document énonçait que le tribunal aurait tous les documents en mains lorsqu'il allait se  présenter devant la Commission des lésions professionnelles.

[31]           La Commission des lésions professionnelles peut difficilement accepter cette prétention du travailleur.  D'une part, il était représenté par monsieur Marier, qui n'est pas un avocat, mais qui est un représentant que le travailleur connaît depuis plusieurs années.  Il est peu probable que monsieur Marier ait fait signer un document au travailleur sans lui en expliquer la teneur et encore moins crédible que le travailleur accepte de signer ce document sans demander des explications.  De plus, l'entête du document s'intitule «Demande de décision sur dossier» et est écrit en gros caractères.  Le travailleur a sûrement lu, à tout le moins, le titre avant d'y apposer sa signature.

[32]           D'autre part, bien que le travailleur soumette qu'il n'a pas compris la signification de ce document et qu'il a été donc victime d'un représentant négligent et incompétent, les agissements du travailleur après qu'il a reçu la décision, tendent à démontrer que celui-ci n'est pas une personne démunie, à la merci de son représentant.  En effet, le travailleur, après avoir reçu la décision, communique avec son représentant qui lui dit qu'il n'y a rien à faire.  Toutefois, le travailleur écrit une lettre bien articulée, à la Commission des lésions professionnelles, par laquelle il demande une révision de la décision dans les délais établis par la jurisprudence.  Force est de conclure que le travailleur, seul et non représenté, a fait les démarches nécessaires pour obtenir une nouvelle décision.  Ce n'est pas le portrait d'un individu démuni, incapable de comprendre ce que veut dire «demande de décision sur dossier».

[33]           La Commission des lésions professionnelles est plutôt d'avis que le travailleur, de concert avec son représentant de l'époque, ont décidé de demander une décision sur dossier.  D'ailleurs, le représentant du travailleur, dans le formulaire de contestation qu'il fait parvenir à la Commission des lésions professionnelles en décembre 1999, indique qu'il désire une décision sur dossier.  Par la suite, le 20 janvier 2000, il y a une demande formelle par le travailleur et son représentant d'une décision sur dossier.  Quelques jours avant l'audience, la Commission des lésions professionnelles communique avec le représentant du travailleur pour s'assurer que c'est bel et bien une décision sur dossier qui est demandée et le représentant, la veille de l'audience répond par l'affirmative.

[34]           La Commission des lésions professionnelles considère qu'il n'y a pas eu violation des règles de justice naturelle.  Si le travailleur n'a pas été entendu c'est parce qu'il a choisi, avec son représentant, de ne pas se présenter à l'audience.  En toute probabilité, cette stratégie a été préconisée par le représentant du travailleur mais le tribunal est convaincu que le travailleur était d'accord avec cette façon de procéder.  C'est après avoir reçu la décision que le travailleur a réalisé qu'il aurait été préférable de se présenter à l'audience.  Or, il se peut fort bien que le travailleur a été mal conseillé par son représentant, cependant, la requête en révision n'est pas le moyen approprié pour remédier à ce manquement.  Toutes les occasions ont été données au travailleur pour se présenter devant le tribunal et faire valoir ses prétentions.  Il a préféré ne pas se présenter.

[35]           La Commission des lésions professionnelles conclut donc que le travailleur n'a pas démontré qu'il n'a pu se faire entendre, pour des raisons jugées suffisantes.

[36]           Le deuxième motif invoqué à l'appui de la présente requête est que la décision est entachée d'un vice de fond de nature à l'invalider.

[37]           La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles, en s'inspirant de celle des tribunaux supérieurs et des autres tribunaux chargés d'interpréter des dispositions similaires, a conclu que les termes «vice de fond ou de procédure de nature à invalider la décision» doivent s'interpréter dans le sens d'une erreur manifeste en fait ou en droit, ayant un effet déterminant sur la décision[2].

[38]           Le pouvoir de révision ne peut donc servir de prétexte à l'institution d'un appel déguisé de la décision attaquée, ni permettre de substituer une nouvelle interprétation à celle retenue par le premier commissaire.

[39]           La procureure du travailleur soumet que la décision contient des erreurs de faits qui sont déterminantes sur l'issu du litige.  Elle soumet que certaines affirmations concernant la condition psychologique du travailleur sont fausses.  Elle réfère le tribunal au paragraphe 54 de la décision, qui se lit ainsi :

«La Commission des lésions professionnelles est également d'avis que le travailleur n'a pas soumis de preuve prépondérante établissant une relation entre sa condition psychologique et les lésions professionnelles antérieures.  D'ailleurs, il n'a été reconnu à la suite de ces lésions, aucune séquelle permanente reliée à une lésion psychologique.  De plus, de l'avis même du docteur Tanguay, la détérioration de la condition psychologique serait principalement associée à l'arrêt de prestations de la CSST et le refus de payer certains médicaments.  Ces éléments ne militent donc pas en faveur de la reconnaissance d'une lésion professionnelle.»

 

 

[40]           Le travailleur déclare qu'il est suivi par le docteur Tanguay depuis 1995 et la CSST a remboursé le coût des médicaments prescrits pour sa condition psychologique jusqu'en 1996.  Donc, ce qui est soumis c'est que le commissaire a fait une erreur lorsqu'il conclut que la détérioration de la condition psychologique serait principalement associée à l'arrêt de prestations de la CSST et le refus de payer certains médicaments.

[41]           La Commission des lésions professionnelles considère que la décision visée par la présente requête ne contient pas une erreur de fait.  La question en litige était de savoir si le travailleur avait subi une rechute, récidive ou aggravation le 30 octobre 1996.  C'est à cette date que le tribunal devait se placer pour déterminer s'il y avait eu aggravation.

[42]           Or, selon les notes évolutives, la CSST a cessé de verser l'indemnité de remplacement du revenu au travailleur en date du 19 octobre 1996.  De plus, selon les documents déposés à l'audience concernant le remboursement du médicament «Luvox», le dernier remboursement couvre la période du 28 juillet 1996 au 30 août 1996.

[43]           Donc, l'affirmation du docteur Tanguay n'est pas inexacte, puisqu'en date du 30 octobre 1996, le travailleur ne recevait plus d'indemnité de remplacement du revenu.  En ce qui concerne le refus de payer certains médicaments, la Commission des lésions professionnelles ne peut affirmer avec certitude s'il s'agit du «Luvox» et si le travailleur a été remboursé après le 30 août 1996.  Quoi qu'il en soit, même si le travailleur a continué à être remboursé pour le «Luvox», ce fait ne change rien à la décision.  La Commission des lésions professionnelles déclare que la preuve prépondérante ne permet pas d'établir une relation entre la condition psychologique et les lésions professionnelles antérieures et de plus, il appert du dossier que c'est pour des raisons humanitaires que la CSST a accepté de rembourser le «Luvox».  Bref, si erreur il y a, ce que le tribunal ne croit pas, cette erreur n'est pas déterminante sur l'issu du litige.

[44]           Finalement, la procureure du travailleur soumet que la Commission des lésions professionnelles n'a pas tenu compte des opinions des docteurs Imbeault et Giroux dans sa décision, ce qui constitue une erreur de droit manifeste et déterminante.

[45]           La décision attaquée fait amplement état des rapports des docteurs Imbeault et Giroux et plusieurs extraits de ces rapports sont cités dans la décision.   Le commissaire ne mentionne pas ces opinions de façon explicite dans les motifs de la décision puisqu'il ne les a pas retenues.  Il évalue l'ensemble de la preuve et conclut que le travailleur n'a pas soumis une preuve prépondérante permettant d'établir qu'il a subi une rechute, récidive ou aggravation le 30 octobre 1996.  Il indique que le travailleur a consulté des médecins qui ont posé des diagnostics mais il ne s'agit pas d'une preuve d'aggravation.  Il conclut que le travailleur présentait un tableau en octobre 1996 similaire à celui présent lors de la consolidation.

[46]           Il est manifeste, à la lecture de la décision, que la preuve constituée des rapports des docteurs Imbeault et Giroux n'a pas été ignorée.  Elle a été appréciée dans son ensemble et en tenant compte de l'opinion du médecin traitant du travailleur.  La décision est suffisamment motivée et s'appuie sur la preuve.  La Commission des lésions professionnelles considère que le travailleur n'a pas démontré que la décision du 17 mai 2000 est entachée d'un vice de fond de nature à l'invalider.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête en révocation ou révision du travailleur, monsieur Yves Chalifoux.

 

 

 

 

 

Santina Di Pasquale

 

Commissaire

 

 

 

 

 

 

Me Marie-Ange Lavallée, avocate

236, rue Parent, bureau 19

Saint-Jérôme (Québec)

J7Z 1Z7

 

Représentante de la partie requérante

 

 

 

Panneton, Lessard

( Me Corinne Lambert )

85, rue de Martigny Ouest, 6e étage

Saint-Jérôme (Québec)

J7Y 3R8

 

Représentante de la partie intervenante

 

 

 



[1]           C.L.P. no. 106916-62-9811, le 6 octobre 1999, Pauline Perron, commissaire.

[2]           Produits Forestiers Donohue et Villeneuve,  [1998] C.L.P. 733 .

AVIS :
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