O'Connor et Cri Environnement inc. |
2011 QCCLP 2977 |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Salaberry-de-Valleyfield |
19 avril 2011 |
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Région : |
Richelieu-Salaberry |
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408707-62C-1004 417636-62C-1008 |
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Dossier CSST : |
134421627 |
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Commissaire : |
Sonia Sylvestre, juge administrative |
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Membres : |
Pierre Gamache, associations d’employeurs |
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Sonia Éthier, associations syndicales |
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Assesseur : |
Paul Asselin, médecin |
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405597-62C-1003 408707-62C-1004 |
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417636-62C-1008 |
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Jean-Louis O’Connor |
Cri Environnement inc. |
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Partie requérante |
Partie requérante |
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et |
et |
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Cri Environnement inc. |
Jean-Louis O’Connor |
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Partie intéressée |
Partie intéressée |
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et |
et |
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Commission de la santé et de la sécurité du travail |
Commission de la santé et de la sécurité du travail |
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Partie intervenante |
Partie intervenante |
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Dossier 401982-62C-1002
[1] Le 12 février 2010, monsieur Jean-Louis O’Connor (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 8 février 2010, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 22 janvier 2010, suivant l’avis d’un membre du Bureau d'évaluation médicale du 18 janvier 2010, déclare que le diagnostic de la lésion professionnelle du 30 mars 2009 est celui d’entorse lombaire, que cette lésion est consolidée en date du 6 janvier 2010 sans nécessité de soins autre qu’une médication pour la gestion de la douleur et que le travailleur conserve une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique ainsi que des limitations fonctionnelles. Elle déclare également que la CSST est justifiée de poursuivre le versement de l’indemnité de remplacement du revenu au travailleur jusqu’à ce qu’elle se prononce sur sa capacité de travail.
[3] Par cette décision, la CSST confirme aussi une autre décision initiale rendue le 22 janvier 2010 et déclare que l’indemnité pour préjudice corporel à laquelle le travailleur a droit est de 1 416,65 $.
Dossier 405597-62C-1003
[4] Le 22 mars 2010, Cri Environnement inc. (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste cette même décision.
Dossier 405734-62C-1003
[5] Le 24 mars 2010, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 19 mars 2010, à la suite d’une révision administrative.
[6] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 11 février 2010 et déclare que le travailleur est capable, en date du 10 février 2010, d’exercer l’emploi convenable de manœuvre offert par l’employeur, à un revenu annuel de 49 038,00 $ et qu’il n’a plus droit au versement d’indemnité de remplacement du revenu à compter du 10 février 2010.
Dossier 408707-62C-1004
[7] Le 27 avril 2010, l’employeur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste cette même décision.
Dossier 417636-62C-1008
[8] Le 11 août 2010, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 6 août 2010, à la suite d’une révision administrative.
[9] Par cette décision, la CSST confirme celle qu’elle a initialement rendue le 20 mai 2010 et déclare que le travailleur n’a pas subi, le 12 février 2010, une récidive, rechute ou aggravation dont le diagnostic est une lombalgie. Elle confirme également une décision rendue le 21 mai 2010 et déclare que le travailleur n’a pas subi, le 19 février 2010, une récidive, rechute ou aggravation dont le diagnostic est un trouble d’adaptation.
[10] Une audience s’est tenue à Salaberry-de-Valleyfield le 13 janvier 2011 en présence du travailleur, de l’employeur et de leur représentant respectif. Le représentant de la CSST, partie intervenante, a préalablement avisé le tribunal de son absence à l’audience. La cause est mise en délibéré le 28 février 2011, date de réception de certains documents.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
Dossiers 401982-62C-1002, 405734-62C-1003 et 417636-62C-1008
[11] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que sa lésion professionnelle du 30 mars 2009 entraîne les limitations fonctionnelles établies par le docteur Marc-F. Giroux, neurochirurgien, dans son expertise du 11 février 2010. Il ne conteste pas les autres sujets faisant l’objet de la décision du 8 février 2010.
[12] Il demande également à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître que l’emploi de manœuvre chez l’employeur ne constitue pas un emploi convenable pour lui et de déclarer qu’il a subi une récidive, rechute ou aggravation les 12 février et 19 février 2010 tant au niveau physique que psychologique.
Dossiers 405597-62C-1003 et 408707-62C-1004
Moyen préalable
[13] L’employeur soulève un moyen préalable selon lequel l’avis du docteur Gilles Maurais, orthopédiste et membre du Bureau d'évaluation médicale, est irrégulier puisque dans un avis complémentaire du 25 novembre 2009, le docteur Goulet, médecin qui a charge, se déclare en accord avec les conclusions émises le 14 octobre 2009 par le docteur Claude Lamarre, chirurgien orthopédiste et médecin désigné de l’employeur.
[14] Subsidiairement, l’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de retenir l’opinion du docteur Lamarre, de reconnaître que la lésion professionnelle du travailleur est consolidée, sans séquelle, en date du 14 octobre 2009 et qu’à compter de cette date, il est apte à refaire son emploi prélésionnel. À défaut, il demande au tribunal de reconnaître que l’emploi de manœuvre offert par l’employeur constitue un emploi convenable pour le travailleur.
LA PREUVE
[15] Après avoir pris connaissance du dossier médico-administratif, des documents soumis à l’audience et postérieurement à celle-ci et après avoir entendu les témoignages du travailleur, des docteurs Marc-F. Giroux et Robert Labine, psychiatre, ainsi que de monsieur Jean Bouchard, vice-président chez l’employeur, le tribunal retient les faits suivants.
[16] Le travailleur est chauffeur de camion pour l’employeur, une entreprise de transport de matières dangereuses, depuis janvier 2008. À ce titre, il est également responsable du chargement des matières qu’il récupère chez divers clients.
[17] Le 30 mars 2009, il subit une lésion professionnelle alors qu’en manipulant un baril de terre contaminée de plus de 200 kg pour le centrer sur une palette, il ressent une douleur lombaire qui graduellement, s’étend jusqu’aux membres inférieurs. Il poursuit sa journée de travail et travaille également le lendemain.
[18] Le 1er avril 2009, devant la persistance des symptômes, le travailleur consulte, à une clinique sans rendez-vous, le docteur Montpetit qui pose le diagnostic d’entorse lombaire L5 gauche. Des traitements de physiothérapie sont prescrits et une assignation temporaire est autorisée. Celle-ci cesse le 11 avril 2009, suivant une détérioration de l’état du travailleur.
[19] Les notes de physiothérapie du 20 avril 2009 indiquent une légère amélioration de la condition depuis le début des traitements, mais précisent que les positions statiques augmentent les douleurs lombaires lesquelles s’accompagnent d’irradiation et de faiblesse aux membres inférieurs, plus à gauche qu’à droite. Une hernie discale est suspectée et une investigation ou infiltration est suggérée.
[20] Le 28 avril 2009, un scan lombaire est réalisé et démontre des signes de discopathie dégénérative significative au niveau L3-L4, sans évidence de compression radiculaire ni d’effet de sténose spinale très significatif, et une légère sténose spinale en L4-L5.
[21] Le 1er juin 2009, un examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM) est effectué et le rapport indique la présence d’un rétrolisthésis en L3-L4, L4-L5 et des hernies discales en L2-L3, L3-L4 et L4-L5 avec légère compression du sac dural. Il y a également une sténose foraminale droite en L4-L5.
[22] Le 8 juin 2009, le docteur Belleville maintient le diagnostic d’entorse lombaire et rapporte une exacerbation des symptômes. Le 11 juin 2009, le docteur Raymond retient quant à lui le diagnostic d’une hernie discale avec compression de la racine L5 selon l’IRM et une référence en orthopédie est produite.
[23]
Le 25 juin 2009, le travailleur est expertisé à la demande de l’employeur
par la docteure Pierrette Girard, chirurgienne orthopédiste, conformément à
l’article
[24] À l’examen subjectif, le travailleur lui rapporte une douleur lombaire importante qui descend dans la région postérieure des deux cuisses, puis dans la région interne des deux jambes avec engourdissement des deux pieds, surtout du gros orteil du pied gauche. Il l’informe que c’est le lendemain de l’accident que la douleur a commencé à descendre aux membres inférieurs. L’intensité de sa douleur au dos est toutefois plus importante que celle ressentie dans les jambes. Le travailleur lui mentionne également une intolérance aux positions stationnaires, assise ou debout, et des difficultés à la marche pour de longues périodes.
[25] À l’examen objectif, la docteure Girard note des amplitudes articulaires restreintes dans tous les sens, sauf les rotations qui sont à 30 degrés[1]. Les tests de tripode, Lasègue et straight leg raising (SLR) provoquent une douleur au niveau du dos, mais les myotomes, forces segmentaires et muscles des membres inférieurs sont symétriques et normaux. Selon la docteure Girard, l’examen physique ne démontre pas de signe franc d’irritation radiculaire.
[26] En conclusion, elle retient le diagnostic d’entorse lombaire et prévoit une consolidation de la lésion dans 4 à 6 semaines avec la poursuite de traitements conservateurs, telles la physiothérapie et l’ergothérapie.
[27] À ses notes médico-administratives, elle précise que la condition dégénérative visualisée à l’IRM ne constitue pas une déviation à la norme biomédicale pour un homme de 48 ans mais qu’il est autrement pour la présence d’hernies discales à trois niveaux. Elle est d’avis que le pronostic est mitigé compte tenu des conditions personnelles sous-jacentes chez ce travailleur et indique que ce dernier peut faire une assignation temporaire en position variable assise ou debout, sans faire de flexion-extension extrême ou répétitive du rachis lombaire et sans manutention de charge de plus de 10 kg et ce, jusqu’à complétion des traitements.
[28] Le 10 août 2009, le docteur Belleville autorise une nouvelle assignation temporaire. Les tâches proposées permettent notamment au travailleur d’alterner les positions assise et debout.
[29] Le 14 octobre 2009, le travailleur est expertisé à la demande de son employeur, mais cette fois par le docteur Claude Lamarre. À l’examen objectif, le travailleur lui rapporte que les engourdissements dans le premier orteil du pied gauche ont diminué d’environ 80 % suivant la prise de Lyrica. La douleur lombaire est toujours présente et augmente au cours de la journée, alors qu’il est en assignation temporaire. Il peut marcher, rester debout ou assis pendant 20 minutes et est en mesure de lever des poids jusqu’à 15 livres.
[30] À l’examen objectif, le docteur Lamarre indique d’emblée que le travailleur n’offre pas une coopération satisfaisante. L’examen des mouvements de la colonne lombaire est impossible, car il occasionne trop de douleurs selon le travailleur, ce dernier faisant à peine des ébauches de mouvements dans tous les plans. Par contre, en position assise, la flexion atteint 90 degrés et à plat ventre, l’extension atteint 30 degrés. Le moindre effleurement de la peau provoque des douleurs. Le Lasègue et le SLR sont à 20 degrés de chaque côté avec des douleurs au dos et le tripode est à 90 degrés de chaque côté.
[31] Dans son rapport d’expertise, daté du 19 octobre 2009, le docteur Lamarre conclut à une magnification importante de la douleur chez ce travailleur et énumère de nombreux signes de non-organicité mis en lumière lors de son examen. Il retient le diagnostic d’entorse lombaire sur une colonne qui présente des discopathies préexistantes et qui est maintenant résolue. Il est d’avis que cette entorse est consolidée en date du 14 octobre 2009, sans nécessité de traitements. Relativement à l’atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique et aux limitations fonctionnelles, il écrit :
La symptomatologie est très abondante, mais l’examen clinique est cependant dans les limites de la normale. Il n’y a aucune limitation objective des mouvements de la colonne lorsqu’on fait abstraction de la non-organicité. Il n’a aucune atteinte radiculaire, aucune atteinte médullaire, aucune atrophie musculaire, aucune modification des réflexes, aucune atteinte sensitive ou motrice. C’est pourquoi il ne persiste aucune atteinte permanente chez lui.
Il n’a aucune limitation fonctionnelle non plus.
[32] Le 19 octobre 2009, le travailleur consulte pour la première fois le docteur Goulet, à la clinique médicale sans rendez-vous où il est suivi. Ce dernier indique à son rapport médical le diagnostic d’une hernie discale, mais précise qu’aucun rapport d’IRM n’est au dossier. Il rapporte qu’il y a un plafonnement en physiothérapie et ergothérapie et que la force est « non évaluable » car le travailleur dit avoir trop de douleur dans le dos. Il écrit qu’une réorientation professionnelle est à envisager et il prévoit une consolidation de plus de 60 jours.
[33] Le 26 octobre 2009, une représentante de l’employeur transmet, par télécopieur, copie de l’expertise du docteur Lamarre au docteur Goulet en vue que ce dernier produise un rapport complémentaire.
[34] Ce même jour, le travailleur consulte le docteur Belleville qui rapporte une stabilité des symptômes et maintient les traitements de physiothérapie et d’ergothérapie. Il réfère le travailleur à la clinique de la douleur et prévoit un prochain rendez-vous dans 2 mois.
[35] Le 25 novembre 2009, la conseillère en réadaptation en charge du dossier du travailleur communique avec monsieur Jean Bouchard chez l’employeur afin de s’enquérir des possibilités de retour au travail advenant l’émission de limitations fonctionnelles permanentes contraires à l’emploi prélésionnel. Selon ce qui est rapporté à la note évolutive, il n’y a aucune possibilité pour le travailleur de réintégrer son emploi ou tout autre emploi après la consolidation de la lésion compte tenu d’une baisse de productivité et d’une réduction du personnel. Au moment de l’événement de mars 2009, le travailleur avait même été mis au courant d’une éventuelle mise à pied. À l’audience, monsieur Bouchard nuance ces propos et précise que ce ne sont pas tous les postes dans l’entreprise qui étaient visés par une réduction de personnel. Dans ce contexte, il s’explique mal pourquoi il est indiqué qu’aucune réintégration n’était possible. Il affirme que le travailleur avait été ciblé par une mise à pied compte tenu du poste qu’il occupait, mais aussi eu égard à son rendement plus ou moins satisfaisant à titre de camionneur.
[36] Toujours le 25 novembre 2009, en réponse à la demande de l’employeur, le docteur Goulet envoie une correspondance dans laquelle il écrit :
Je suis en accord avec les conclusions du Dr Claude Lamarre. C’est la concordance entre les trouvailles cliniques et radiologiques qui importent le plus. Devant une ambigüité ou discordance importante, je donne toujours priorité au tableau clinique. Les études ont démontré qu’il y a environ 30 % des patients adultes asymptomatiques ont une IRM normale, dont 27 % présente de protrusions discales. Dans le cas de M. O’Connor, il y a plusieurs discordances dont plusieurs sont inexplicables sur le anatomophysiologique et certaines trouvailles que je qualifie même de mise en scène. J’ai évalué monsieur tardivement dans l’évolution de sa maladie mais j’avais noté à mon dossier un doute sur les bénéfices secondaires (2009/10/19).
[37] Selon le sceau de réception estampillé, cette correspondance est reçue à la CSST le 1er décembre 2009.
[38] Le 2 ou 7 décembre 2009 (la date indiquée prête à confusion), une agente d’indemnisation remplit un formulaire de transmission du dossier à un membre du Bureau d'évaluation médicale. Il est indiqué à ce formulaire que l’envoi de la demande de rapport complémentaire au docteur Goulet s’est fait le 26 octobre 2009, mais qu’aucun rapport n’a été reçu. Le tribunal constate toutefois que ledit rapport complémentaire est cité dans l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale et donc, qu’il lui a été transmis.
[39] Le 14 décembre 2009, l’ergothérapeute produit une note d’évolution à l’attention du docteur Gaspard, chirurgien orthopédiste. Selon elle, un plateau a été atteint en ergothérapie et les capacités du travailleur demeurent inférieures aux exigences de son travail régulier. Elle rapporte que la douleur est augmentée à l’effort, aux positions prolongées, aux postures contraignantes et mouvements du dos.
[40] Relativement à ces dernières observations, le tribunal note que les nombreux rapports de physiothérapie/ergothérapie produits au dossier reprennent, presque de manière constante, ces mêmes constats.
[41] Le 16 décembre 2009, le docteur Gaspard prescrit une étude électromyagraphique (EMG), laquelle ne met pas en évidence de radiculopathie[2]. Celui-ci maintient l’assignation temporaire et recommande une cessation des traitements en attendant une infiltration épidurale. Il émet également un certificat médical où il précise que la condition médicale du travailleur l’empêche actuellement de voyager jusqu’à la consolidation de sa maladie. Le docteur Belleville réitère cette recommandation en avril 2010, considérant l’absence d’amélioration de l’état du travailleur.
[42]
Le 6 janvier 2010, le docteur Gilles Maurais, orthopédiste et membre du
Bureau d'évaluation médicale, rend un avis sur les 5 sujets énumérés à
l’article
[43] À l’examen objectif, le docteur Maurais retrouve des diminutions d’amplitudes articulaires de la colonne lombaire comparables à celles rapportées par la docteure Girard, à dix degrés près de différence en ce qui concerne la flexion et l’extension. Les divers signes et tests de mise en tension s’avèrent négatifs et l’évaluation des dermatomes et myotomes de L2 à S1 montre une force segmentaire, une sensibilité et des réflexes normaux et symétriques. Il n’y a aucune atrophie notée.
[44] Le docteur Maurais retient le diagnostic d’entorse lombaire, soulignant que l’IRM a démontré des phénomènes de discopathie lombaire multiétagée, et est d’avis qu’aucun traitement additionnel n’est nécessaire, sauf une médication pour la gestion de la douleur et consolide la lésion au 6 janvier 2010.
[45] En ce qui a trait à la présence d’une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique et de limitations fonctionnelles, il indique que le travailleur présente un syndrome douloureux important à caractère mécanique, des phénomènes d’ankyloses du rachis lombo-sacré sans évidence de radiculopathie active, ce qui l’amène à retenir un déficit anatomo-physiologique de 2 % pour entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées et des limitations fonctionnelles de classe II de l’IRSST, avec une limite de charge à 10 kg.
[46] Le 21 janvier 2010, le travailleur reçoit des infiltrations épidurales en L5-S1 bilatéralement, ce qui entraîne une exacerbation des symptômes douloureux selon le rapport médical émis par le docteur Belleville le 25 janvier 2010. Un arrêt de travail pour 3 semaines est prescrit.
[47] À compter du 4 février 2010, le travailleur est pris en charge par la docteure Côté. À l’audience, ce dernier explique avoir décidé de changer de médecin pour tenter d’obtenir d’autres solutions à ses problèmes, étant quelque peu insatisfait du suivi médical antérieur.
[48] La docteure Côté augmente la posologie de Lyrica et réfère le travailleur pour une évaluation en neurochirurgie. À ses notes cliniques, elle indique que le travailleur présente une entorse lombaire et hernie discale avec compression en L5, gauche, qu’il a des limitations fonctionnelles, que le Bureau d'évaluation médicale a consolidé la lésion et qu’il a eu des traitements de physiothérapie ainsi qu’une infiltration. Aucun arrêt de travail n’est recommandé.
[49] Le 9 février 2010, une visite chez l’employeur a lieu en vue de réintégrer le travailleur dans un autre emploi puisque suivant une analyse de la conseillère en réadaptation, celui-ci n’est plus en mesure d’occuper son emploi prélésionnel. Selon les notes évolutives, le travailleur informe les parties présentes que la docteure Côté lui a prescrit un arrêt de travail jusqu’à la fin mars, considérant ses douleurs.
[50] Lors de cette visite, l’employeur propose l’emploi de manœuvre (préposé au tri de produits chimiques) au département « labpack », au même salaire et horaire de travail que l’emploi prélésionnel. Ce travail consiste, à 90 % du temps, à transvider des contenants de produits chimiques dans des récipients appropriés, selon les directives d’un superviseur. Le travailleur doit aussi faire le tri de piles alcalines, déballer des cannettes d’aérosols ainsi que des boîtes contenant des inhalateurs pour également les trier. Lors de son assignation temporaire, le travailleur a occupé une partie de ces tâches en faisant le tri des piles alcalines.
[51] Ce poste a fait l’objet d’une étude par un ergonome mandaté par les représentants de l’employeur et selon le rapport versé au dossier, il respecte les limitations fonctionnelles émises par le docteur Maurais. Dans ce rapport, il est indiqué que les tâches de transvider les contenants se font en position debout, sur un plan de travail d’une hauteur variant de 40 à 45 pouces du sol. Pour le triage de piles alcalines, il est précisé que le travail s’exerce sur une table d’une hauteur de 44 pouces et en qui concerne les inhalateurs et cannettes d’aérosol, le travailleur a à les prendre ou les déposer sur un convoyeur d’une hauteur de 36 pouces du sol.
[52] Selon le travailleur, le travail de manœuvre s’exerce essentiellement debout et il est impossible de l’exécuter en position assise compte tenu des mouvements requis. Selon monsieur Bouchard, une adaptation de ce poste est possible par l’ajout d’un banc, afin de permettre une alternance des positions.
[53] Monsieur Bouchard explique que bien que les postes de manoeuvre soient occupés en partie par des employés d’un sous-traitant, certains travailleurs de l’employeur les exercent également. Ces postes sont toujours existants dans l’entreprise et comblés par du personnel de l’externe et de l’interne. Le salaire varie de 12 $/heure à 18 $ et 20 $/heure selon l’expérience.
[54] Le 11 février 2010, la CSST rend une décision déterminant que l’emploi de manœuvre offert par l’employeur constitue un emploi convenable pour le travailleur, que cet emploi lui procurera un revenu annuel estimé à 49 038 $ et qu’il est capable de l’exercer à compter du 10 février 2010. Dans la demande de révision de cette décision, le représentant du travailleur allègue notamment que l’emploi offert par l’employeur doit être réel et non un subterfuge pour mieux justifier un congédiement.
[55] Toujours le 11 février 2010, une expertise adressée au procureur du travailleur est réalisée par le docteur Marc-F. Giroux. Son examen de la mobilisation de la colonne lombaire est similaire à celui réalisé par le docteur Maurais. Il note l’absence de spasme lombaire et un examen sensitif des membres inférieurs dans les limites de la normale. Le test du tripode est à 90 degrés bilatéralement et le test du Lasègue atteint 80 degrés bilatéralement avec allégation de douleurs lombaires sans sciatalgie.
[56] Le docteur Giroux conclut à une entorse lombaire chez un patient avec une dégénérescence discale multiétagée. Il recommande un déficit anatomo-physiologique de 2 %, ainsi que les mêmes limitations fonctionnelles émises par le docteur Maurais auxquelles il ajoute celle d’éviter de maintenir des positions stationnaires, assise ou debout, excédant 30 minutes sans pouvoir bouger et d’éviter d’avoir à conduire plus d’une trentaine de minutes sans pouvoir changer de position.
[57] Tant à son expertise qu’à l’audience, le docteur Giroux attribue la nécessité d’émettre ces deux limitations fonctionnelles supplémentaires considérant la condition personnelle de dégénérescence discale qui a été rendue symptomatique suivant l’accident du 30 mars 2009.
[58] Il reconnaît que ni son examen, ni aucun autre examen au dossier ne laissent suspecter une quelconque atteinte irritative ou compressive radiculaire pouvant corroborer la présence d’une hernie discale. Toutefois, le tableau clinique de ce travailleur, depuis l’événement du 30 mars 2009, démontre que les conditions dégénératives révélées à l’imagerie sont maintenant symptomatiques compte tenu des douleurs référées persistantes. Les résultats de l’IRM de juin 2009 expliquent notamment que la douleur ressentie par le travailleur soit plus présente et intense au membre inférieur gauche, qu’au membre inférieur droit, même si aucun dermatome précis ne peut être identifié. Chez les patients porteurs d’une telle condition lombaire, les positions statiques prolongées sont souvent difficiles et dans le cas présent, il constate que cette intolérance est constamment rapportée par les divers examinateurs, physiothérapeutes et ergothérapeutes.
[59] Relativement à l’expertise du docteur Lamarre, le docteur Giroux précise n’avoir retrouvé à son examen aucun signe de non-organicité malgré la réalisation de certains tests croisés, et rappelle que les signes de Waddel sont souvent utilisés à mauvais escient. La présence de tels signes ne signifie pas que les douleurs ne sont par réelles. De plus, il estime qu’on ne peut comparer, comme l’a fait le docteur Lamarre, une flexion antérieure mesurée en position debout versus en position assise et que c’est cette dernière qui doit être privilégiée, étant plus représentative de l’état du travailleur.
[60] Le 12 février 2010, le travailleur consulte le docteur Goulet, à la clinique sans rendez-vous, en vue d’un renouvellement de médication. Ce dernier indique une exacerbation des symptômes suivant l’évaluation du docteur Giroux et note certaines discordances à son examen. Il recommande un travail adapté pour 2 jours.
[61] Le même jour, le travailleur communique avec la conseillère en réadaptation pour s’enquérir de ses droits, advenant que l’emploi convenable offert par l’employeur soit « bidon ». Il l’informe qu’il retournera à son poste dès le 15 février 2010, mais qu’il fera une demande de récidive, rechute ou aggravation.
[62] Il complète effectivement une réclamation pour récidive, rechute ou aggravation les 12 février, 17 et 18 février 2010 et produit une annexe dans laquelle il allègue une augmentation des douleurs suivant le retour au travail et une mauvaise ambiance de travail. Il a l’impression qu’il ne fait pas partie de la famille.
[63] Le 18 février 2010, considérant la présence de douleurs aiguës, le travailleur consulte le docteur Leroux à l’urgence d’un centre hospitalier. Ce dernier indique qu’il y a rechute de douleur depuis le retour au travail, que le travailleur se dit incapable de continuer et qu’il doit revoir son médecin le lendemain. Il note une diminution des amplitudes articulaires dans tous les sens sans préciser les degrés atteints, mais spécifie qu’il y a peu de flexion. La force et les sens sont normaux. Il prescrit un arrêt de travail de 2 semaines.
[64] Le 19 février 2010, le travailleur revoit effectivement la docteure Côté qui retient une cervicalgie posturale et augmentation de la lombalgie. Elle diagnostique également un trouble de l’adaptation, maintient un arrêt de travail pour une durée indéterminée et prévoit un suivi dans 6 semaines. À ses notes cliniques, elle rapporte des paresthésies aux doigts et prescrit une IRM cervicale. Elle écrit : « posture en flexion avant / tension cervicale ++, travail avec matières dangereuses debout prolongées relocalisation chez l’employeur; manœuvre, relation avec employeur difficile ++ ».
[65] Le 17 mars 2010, la docteure Côté prescrit des traitements de kinésiologie/ ergothérapie pour un conditionnement physique et émet une référence en psychiatrie, indiquant un trouble anxieux avec syndrome douloureux et entorse lombaire.
[66] Lors des visites subséquentes, elle maintient les diagnostics de lombalgie, entorse lombaire et trouble d’adaptation.
[67] Le 19 mars 2010, le travailleur consulte le docteur Biard, psychiatre, à l’urgence d’un centre hospitalier suivant une référence de la docteure Côté. À l’histoire de la maladie, le travailleur lui rapporte être retourné à un emploi qu’il estime être incapable de faire. Il est donc en arrêt de travail depuis un mois, sans revenu. Il raconte que depuis son accident de travail, il a subi beaucoup de démêlés avec son employeur et ne s’est pas senti supporté par la CSST. Il a vécu beaucoup de dénigrement et a l’impression que l’employeur attend uniquement que son dossier soit fermé à la CSST pour éventuellement le congédier.
[68] À l’examen mental, le docteur Biard indique que le patient est souffrant physiquement et a de la difficulté à rester assis en entrevue. Il ne présente aucune irritabilité. Selon ce médecin, le travailleur a réagi tout au long d’une façon tout à fait appropriée face à la situation et qu’il présente évidemment des éléments d’anxiété, mais sans syndrome dépressif majeur bien installé.
[69] Il conclut à un trouble anxieux greffé sur un syndrome douloureux relié à l’accident du travail. Ce trouble anxieux est exacerbé par un problème de harcèlement au travail et le travailleur semble tout à fait crédible face à la situation. Il est d’avis que le travailleur est actuellement traité de façon adéquate et qu’il n’y a pas lieu de modifier sa médication, étant amélioré par le Lyrica et Réméron. Sinon, une médication d’antidépresseur pourrait être prescrite et une référence en psychothérapie pour lui permettre de ventiler au sujet de ses problèmes est faite.
[70] Le 14 avril 2010, le travailleur est expertisé à la demande de son procureur par le docteur Labine, psychiatre. À l’histoire de la maladie, le travailleur allègue avoir été victime de harcèlement de la part de ses collègues et de l’employeur lors de ses retours au travail. Il s’est senti dévalorisé et avait l’impression que l’employeur cherchait une raison pour le congédier. Quant à ses douleurs, le travailleur précise que dans les semaines suivant l’accident, il croyait que sa condition s’améliorerait rapidement. À l’automne 2009, il a réalisé que ça perdurait et a commencé à se sentir moins bien psychologiquement, mais ne l’a pas mentionné à ses médecins. Au début de l’année 2010, le travailleur s’aperçoit que sa condition psychologique se détériore, il se sent démoralisé relativement au contexte chez l’employeur et n’arrive pas à croire qu’on lui fasse vivre un tel traitement. Il présente des problèmes financiers et mentionne qu’il est inquiet relativement aux limitations fonctionnelles qu’il présente.
[71] À son examen mental, le docteur Labine note que le travailleur ne paraît pas triste ou déprimé malgré les éléments de découragement dont il lui fait part, de même que l’inquiétude qu’il vit face à son avenir. Il n’y a pas plus d’évidence d’anxiété significative, à part que le travailleur a tendance à élaborer de façon détaillée.
[72] Son examen amène tout de même le docteur Labine à conclure à un trouble affectif majeur et épisode dépressif majeur en relation avec l’accident du travail et ses conséquences, soient les douleurs chroniques, le fait qu’il n’est plus en mesure de travailler comme camionneur ni d’effectuer les mêmes activités que dans le passé.
[73] À l’audience, le docteur Labine explique que les signes d’une dépression majeure ne sont pas apparents d’emblée et l’examinateur doit souvent questionner plus longuement certains patients, notamment les hommes ou personnes issues de milieux de travail particulier qui ont tendance à ne pas démontrer leur tristesse, ayant un sentiment de honte face à cela. Il attribue les résultats mitigés de son examen mental à cette facette de la personnalité du travailleur et à sa consommation d’antidépresseurs. C’est seulement suivant un questionnaire plus poussé qu’il a été en mesure d’émettre le diagnostic de dépression majeure.
[74] Selon l’histoire rapportée, il peut y avoir eu au début un trouble de l’adaptation avec une évolution vers une dépression majeure à l’automne 2009. Il est d’avis que cette évolution défavorable de la condition psychologique à l’automne 2009 est attribuable au fait qu’à cette époque, le travailleur réalise que sa condition médicale ne s’améliore pas, que ses douleurs perdurent ce qui l’inquiète face à son avenir, lui qui était très valorisé par son emploi de chauffeur de camion.
[75] Le mandat d’expertise, confié au docteur Labine, fait référence à de nombreux faits notamment qu’il y a eu un retour au travail chez l’employeur dans un emploi créé de toutes pièces habituellement donné à des sous-traitants, qu’il existe une preuve de force entre l’employeur et le travailleur pour lui faire occuper un emploi qui n’existe pas véritablement et ce, à un salaire élevé afin de forcer sa démission à cause des douleurs chroniques qu’il ressent et du harcèlement dont il est victime.
[76] En juillet 2010, le travailleur débute une psychothérapie avec madame Patricia Choquette, psychologue. À son rapport d’évolution du 29 décembre 2010, elle écrit qu’après 5 rencontres, le travailleur rapporte toujours la présence de douleurs constantes et que sa pensée est accaparée par des préoccupations concernant le futur et des ruminations quant aux conséquences de l’accident.
[77] Au plan purement physique, le tribunal note que le travailleur a eu des infiltrations en mai 2010 suivi d’un silence médical de plusieurs mois. Il y a reprise des consultations médicales le 22 novembre 2010, de même qu’une nouvelle IRM. En regard de ce suivi, le travailleur a produit une réclamation pour récidive, rechute ou aggravation le 25 novembre 2009 et celle-ci est toujours à l’étude par la CSST.
[78] Dans le cadre du présent litige, une seconde expertise du docteur Lamarre datée du 22 décembre 2010 est déposée en preuve par l’employeur.
[79] Le travailleur lui rapporte avoir débuté un emploi de pompiste depuis septembre 2010 et ne pas avoir de difficulté à accomplir ce travail. Il aimerait toutefois retourner travailler comme camionneur, mais non pour son ancien employeur. Le docteur Lamarre note qu’avant de procéder à l’examen, le travailleur lui demande de faire attention, car chaque examen qu’il a passé lui a occasionné beaucoup de douleurs.
[80] Le docteur Lamarre estime que les résultats de son examen physique sont comparables à ceux obtenus lors de son évaluation d’octobre 2009 alors qu’il retrouve une fois de plus plusieurs signes de non-organicité. Dans ce contexte, il maintient ses mêmes conclusions à savoir qu’il n’y a pas de déficit anatomo-physiologique ni limitations fonctionnelles consécutives à l’entorse lombaire subie le 30 mars 2009.
[81] Le travailleur témoigne à l’audience. Il affirme ne jamais avoir pris connaissance du rapport complémentaire rédigé par le docteur Goulet le 25 novembre 2009 et ne croit pas que ce dernier ne l’ait informé de sa position, ni aucun autre médecin d’ailleurs.
[82] Il explique se sentir incapable de faire l’emploi de manœuvre chez l’employeur, car l’exécution des tâches requiert toujours une position debout et il a subi une exacerbation de ses douleurs après l’avoir exercé pendant 3 jours.
[83] Il a fait une tentative de retour au travail à titre de camionneur en août 2010, mais a vite réalisé que sa condition médicale ne lui permettait plus. Il a aussi occupé un emploi pour un sous-traitant à l’aéroport de Dorval pendant 3 à 4 jours, qui nécessitait d’être debout ainsi que de faire des rotations du tronc, et cela a provoqué des douleurs intenses. Depuis septembre 2010, il occupe un emploi de pompiste où il peut alterner les positions. Son nouvel employeur l’exempte de soulever des poids. Il faisait 40 heures par semaine, mais suivant une récidive, rechute ou aggravation en novembre 2010, son horaire est maintenant réduit à 35 heures par semaine. Il précise que la posologie de Lyrica a été augmentée par la docteure Côté pour lui permettre d’effectuer un retour au travail.
[84] Il affirme avoir parlé de ses difficultés au travail dues au mauvais climat avec le docteur Belleville vers septembre ou octobre 2009, mais ce dernier n’a pas démontré beaucoup de sympathie. À titre d’exemples, il relate qu’un représentant de l’employeur l’a déjà injurié ou fait des commentaires désobligeants relativement à un éventuel retour au travail régulier et qu’il n’a pas été invité à participer à une assemblée portant sur la santé et sécurité du travail. Il ajoute qu’il se sentait dévalorisé lors de son travail en assignation temporaire. Les notes cliniques du docteur Belleville sont toutefois muettes quant à de quelconques allégations.
L’AVIS DES MEMBRES
[85]
Conformément à l’article
[86] Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d’avis de rejeter le moyen préalable invoqué par l’employeur puisque bien que le rapport complémentaire du docteur Goulet soit détaillé, ce dernier n’a pas informé le travailleur du contenu de son avis. Par conséquent, la CSST n’était pas liée par cet avis complémentaire et l’avis du Bureau d'évaluation médicale rendu le 6 janvier 2010 est régulier.
[87] Quant aux limitations fonctionnelles, le membre issu des associations d’employeur est d’avis de retenir des limitations fonctionnelles de classe 1. Selon lui, l’opinion du docteur Lamarre ne peut être retenue, car ce dernier n’a pu réaliser d’examen objectif complet, faute de collaboration du travailleur et il est le seul à ne pas émettre de limitations fonctionnelles. Par contre, l’avis du docteur Maurais, qui retient des limitations fonctionnelles de classe II, est basé sur un examen objectif peu détaillé et la preuve médicale ne supporte pas une aggravation permanente d’une condition personnelle dégénérative justifiant l’octroi de limitations fonctionnelles telles que suggérées par le docteur Giroux. La preuve médicale démontre que le travailleur s’est infligé une entorse lombaire, qu’il demeure avec une diminution d’amplitude, ce qui justifie tout au plus, l’octroi de limitations fonctionnelles de classe 1.
[88] Le membre issu des associations syndicales est d’avis de retenir les limitations fonctionnelles émises par le docteur Maurais, auxquelles doivent s’ajouter celles recommandées par le docteur Giroux puisque la preuve médicale rapporte, de manière constante, une intolérance pour le travailleur à conserver des positions assise et debout prolongées.
[89] En ce qui a trait à l’emploi de manœuvre offert par l’employeur, les membres sont d’avis qu’il constitue un emploi convenable au sens de la loi. Toutefois, selon la preuve prépondérante, le salaire associé à cet emploi est de 12 $ / heure pour un revenu annuel de 25 027 $ et non de 49 038,00 $. Par ailleurs, le membre issu des associations syndicales est d’avis que, faute de preuve probante, il n’est pas possible de déterminer si cet emploi respecte les limitations fonctionnelles émises par le docteur Giroux et qu’il y lieu de retourner le dossier à la CSST pour qu’une évaluation sur cet aspect soit effectuée. Pour sa part, le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que cet emploi respecte des limitations fonctionnelles de classe I et que le travailleur est apte à l’exercer depuis le 10 février 2009.
[90] Enfin, les deux membres sont d’avis que tant la preuve médicale que testimoniale ne supporte pas la reconnaissance de récidives, rechutes ou aggravations en date des 12 et 19 février 2010. Selon eux, il n’y a aucune preuve d’une modification objective de l’état physique du travailleur de manière contemporaine à cette période et le trouble d’adaptation ne peut être relié à l’événement, étant diagnostiqué plusieurs mois plus tard, sans qu’aucun symptôme ne soit rapporté par les médecins consultés pendant une longue période.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
Moyen préalable
[91] Le tribunal doit, dans un premier temps, disposer du moyen préalable soulevé par l’employeur et décider si l’avis du 6 janvier 2010 du docteur Maurais, membre du Bureau d'évaluation médicale, est régulier.
[92] La procédure d’évaluation médicale est prévue à la section 1 du chapitre 6 de la loi. Les articles pertinents à la présente affaire sont les suivants :
212. L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la Commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l'attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s'il obtient un rapport d'un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l'un ou plusieurs des sujets suivants :
1° le diagnostic;
2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;
3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;
4° l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur;
5° l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.
L'employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l'attestation ou du rapport qu'il désire contester.
__________
1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.
212.1. Si le rapport du professionnel de la santé obtenu en vertu de l'article 212 infirme les conclusions du médecin qui a charge du travailleur quant à l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de cet article, ce dernier peut, dans les 30 jours de la date de la réception de ce rapport, fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport complémentaire en vue d'étayer ses conclusions et, le cas échéant, y joindre un rapport de consultation motivé. Le médecin qui a charge du travailleur informe celui-ci, sans délai, du contenu de son rapport.
La Commission soumet ces rapports, incluant, le cas échéant, le rapport complémentaire au Bureau d'évaluation médicale prévu à l'article 216 .
__________
1997, c. 27, a. 5.
221. Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.
Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.
__________
1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.
224. Aux fins de rendre une décision en vertu de la présente loi, et sous réserve de l'article 224.1, la Commission est liée par le diagnostic et les autres conclusions établis par le médecin qui a charge du travailleur relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 .
__________
1985, c. 6, a. 224; 1992, c. 11, a. 26.
224.1. Lorsqu'un membre du Bureau d'évaluation médicale rend un avis en vertu de l'article 221 dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par cet avis et rend une décision en conséquence.
Lorsque le membre de ce Bureau ne rend pas son avis dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par le rapport qu'elle a obtenu du professionnel de la santé qu'elle a désigné, le cas échéant.
Si elle n'a pas déjà obtenu un tel rapport, la Commission peut demander au professionnel de la santé qu'elle désigne un rapport sur le sujet mentionné aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 qui a fait l'objet de la contestation; elle est alors liée par le premier avis ou rapport qu'elle reçoit, du membre du Bureau d'évaluation médicale ou du professionnel de la santé qu'elle a désigné, et elle rend une décision en conséquence.
La Commission verse au dossier du travailleur tout avis ou rapport qu'elle reçoit même s'il ne la lie pas.
__________
1992, c. 11, a. 27.
[93]
En résumé, la CSST demeure liée par l’opinion du médecin qui a charge
sur les cinq sujets définis à l’article
[94]
La Commission des lésions professionnelles a déjà reconnu qu’un médecin
qui a charge peut modifier son opinion dans le rapport complémentaire qu’il
complète conformément à l’article
[95] Toutefois, cette situation commande certaines exigences compte tenu des conséquences légales importantes qu’elle génère pour le travailleur. Ainsi, les nouvelles conclusions du médecin qui a charge auront un caractère liant dans la mesure où elles sont basées sur un examen médical relativement récent ou à tout le moins, sur une connaissance suffisante de la condition médicale du travailleur par ce médecin, qu’elles sont bien étayées et que le travailleur en ait été informé à l’époque de l’émission du rapport.[4]
[96] Ceci étant, qu’en est-il en l’espèce?
[97]
Il appert de la preuve que le rapport complémentaire du docteur Goulet a
été complété dans le délai prévu à l’article
[98] Dans ce rapport complémentaire, le docteur Goulet se dit d’accord avec les conclusions du docteur Lamarre.
[99] Le tribunal constate que le docteur Goulet est l’un des nombreux médecins qui a vu le travailleur dans le cadre de son suivi médical à une clinique sans rendez-vous. Même s’il l’a vu qu’une seule fois à l’époque, il est le dernier médecin consulté par le travailleur au moment où l’employeur transmet sa demande de rapport complémentaire. Dans ce contexte, la désignation du docteur Goulet à titre de médecin qui a charge, même si elle n’était pas la plus idéale, était la situation la plus raisonnable.
[100] Il y a donc lieu pour le tribunal d’évaluer le caractère liant ou non du rapport complémentaire rédigé par le docteur Goulet, médecin qui a charge, le 25 novembre 2009.
[101] D’emblée, le tribunal écarte l’argument de l’employeur voulant que le travailleur ne soit pas vraiment préjudicié du fait de ne pas avoir été informé à l’époque de l’opinion du docteur Goulet, puisque son dossier a tout de même été transmis au Bureau d'évaluation médicale et qu’un avis a été rendu.
[102] Dans l’optique où c’est précisément cet avis que l’employeur veut faire déclarer irrégulier, les circonstances entourant l’émission du rapport complémentaire du médecin qui a charge revêtent toute leur importance puisque, s’il s’avère liant, ce rapport entraînera des conséquences juridiques appréciables pour le travailleur.
[103] Le 19 octobre 2009, le docteur Goulet produit un rapport médical dans lequel il indique notamment qu’une réorientation professionnelle est à envisager et que la période de consolidation de la lésion est plus de 60 jours.
[104] Plus d’un mois plus tard, sans avoir revu le travailleur et après avoir pris connaissance de l’évaluation du docteur Lamarre, le docteur Goulet se rallie aux conclusions de ce dernier et, conséquemment, conclut que la lésion professionnelle est consolidée sans séquelle. Il explique que lui-même avait constaté des discordances inexplicables lors de son évaluation en octobre 2010 et avait un doute sur les bénéfices secondaires.
[105] Le tribunal retient qu’avant la rédaction de son rapport complémentaire, le docteur Goulet avait examiné le travailleur qu’à une seule occasion, et ce, un mois auparavant. Contrairement à la décision soumise par l’employeur[5], il ne s’agit pas d’une situation où ce médecin assurait déjà le suivi médical du travailleur depuis quelque temps et où l’on peut inférer qu’il connaissait très bien sa condition. Le docteur Goulet indique lui-même avoir évalué tardivement le travailleur dans l’évolution de son dossier et la conjoncture des faits ne permet pas d’établir qu’il avait une connaissance suffisante de l’état du travailleur, et de l’évolution de sa condition, lorsqu’il a rédigé le rapport complémentaire.
[106] Le tribunal note également qu’entre le moment où le docteur Goulet examine le travailleur et celui où il produit son rapport complémentaire, le travailleur consulte un autre médecin de la même clinique, lequel émet une référence à la clinique de douleur et donc, considère que des soins étaient toujours nécessaires.
[107] Qui plus est, jamais le travailleur n’a été informé de l’opinion du docteur Goulet ni par celui-ci, ni par quiconque.
[108] Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles estime qu’il serait contraire à l’esprit de la loi de reconnaître un caractère liant à l’opinion du docteur Goulet et de sceller le sort de la condition médicale du travailleur sur la foi de celle-ci.
[109] Pour ces motifs, la Commission des lésions professionnelles en vient à la conclusion que le rapport complémentaire du docteur Goulet n’avait pas de caractère liant, que la CSST était justifiée de soumettre le dossier au Bureau d'évaluation médicale et que l’avis rendu le 6 janvier 2010 par le docteur Maurais est régulier.
Les conclusions médicales
[110] La Commission des lésions professionnelles doit maintenant décider des questions d’ordre médical découlant de l’avis du docteur Maurais, membre du Bureau d'évaluation médicale. Plus particulièrement, elle doit déterminer la date de consolidation de cette lésion, l’existence ou non d’une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique ainsi que l’existence et l’évaluation de limitations fonctionnelles, le cas échéant.
[111] L’employeur demande de retenir que la lésion professionnelle est consolidée en date du 14 octobre 2009, sans séquelles permanentes, conformément à l’opinion de son médecin désigné, le docteur Lamarre.
[112] Ce dernier examine le travailleur les 14 octobre 2009 et 23 décembre 2010. À ces deux occasions, il rapporte que l’examen de la mobilité de la colonne lombaire est irréalisable compte tenu des allégations de douleur du travailleur. Face à la présence de nombreux signes de non-organicité, il conclut à un examen objectif dans les limites de la normale malgré les allégations de douleurs et ne retient pas l’existence de séquelles permanentes.
[113] Les évaluations du docteur Lamarre détonnent de l’ensemble des expertises produites au dossier puisqu’aucun autre expert ne rapporte la présence de signes de non-organicité ou d’une collaboration mitigée de la part du travailleur. Au contraire, la docteure Girard, qui évalue le travailleur quatre mois avant le docteur Lamarre, également à la demande de l’employeur, réalise un examen objectif complet, indiquant même que le travailleur collabore bien à celui-ci. Quant au docteur Giroux, il indique à l’audience ne pas avoir retrouvé la présence de signes de non-organicité après avoir réalisé des tests croisés.
[114] De l’avis du tribunal, la prévalence de signes de non-organicité n’est pas établie par une preuve prépondérante de sorte que l’opinion du docteur Lamarre doit être écartée puisqu’elle trouve essentiellement assise sur cette prémisse.
[115] Les docteurs Girard, Maurais et Giroux rapportent tous une mobilité réduite du rachis lombaire. Les amplitudes articulaires notées par la docteure Girard, en juin 2009, sont d’ailleurs comparables à celles établies par les docteurs Maurais et Giroux en janvier et février 2010 ce qui démontre, d’une part, l’absence d’évolution notable de la condition du travailleur malgré les traitements et, d’autre part, le caractère permanent des ankyloses de la colonne lombaire. De plus, le travailleur conserve un syndrome douloureux qui nécessite la prise de médication selon l’opinion du docteur Maurais, laquelle est soutenue par l’ensemble de la preuve.
[116] Pour les raisons précédemment mentionnées, le tribunal est d’avis que la preuve prépondérante démontre que la lésion professionnelle est consolidée en date du 6 janvier 2010, et ce, en respect de l’avis du docteur Maurais.
[117] Pour les mêmes motifs, il y a donc lieu d’attribuer un déficit anatomo-physiologique de 2 %, tel que retenu par le docteur Maurais, pour une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées (code 204 004).
[118] Quant à la présence et l’évaluation des limitations fonctionnelles, la preuve établit clairement que le travailleur est porteur d’une condition personnelle de dégénérescence discale multiétagée. Dès juin 2009, la docteure Girard prévoit une incidence de cette condition sur le dossier du travailleur en indiquant que le pronostic est mitigé.
[119] Dans son avis, le docteur Maurais retient des limitations fonctionnelles de classe II selon l’IRSST considérant, entre autres, le syndrome douloureux. La preuve démontre que le travailleur conserve des douleurs au dos, mais également aux membres inférieurs, davantage du côté gauche.
[120] Le tribunal retient l’opinion du docteur Giroux voulant que ces douleurs référées reflètent la manifestation de la condition personnelle de dégénérescence discale, même en l’absence d’atteinte irritative ou compressive radiculaire franche. L’événement du 30 mars 2009 a rendu symptomatique la condition dégénérative du travailleur et depuis, la symptomatologie douloureuse associée à cette condition persiste et nécessite une médication.
[121] Selon le docteur Giroux, une telle condition médicale entraîne souvent chez les gens une intolérance à conserver des positions statiques soit assise ou debout.
[122] Dans le cas du travailleur, cette intolérance est rapportée de façon précise par tous les experts et notée de façon quasi constante aux nombreux rapports de physiothérapie et d’ergothérapie au dossier. En juin 2009, la docteure Girard reconnaît d’ailleurs que le travailleur peut faire une assignation temporaire pourvu qu’il puisse adopter des positions variables assise ou debout. Or, dans la mesure où, tel que mentionné précédemment, il n’y a pas eu de véritable évolution favorable de la condition du travailleur postérieurement l’expertise de la docteure Girard, il y a lieu de reconnaître qu’il s’agit d’une limitation fonctionnelle permanente. Le tribunal note également que le docteur Belleville réitère, en avril 2010, l’avis du docteur Gaspard voulant que la condition médicale du travailleur l’empêche de voyager, et ce, compte tenu de l’absence de changement de sa condition.
[123] Par conséquent, le tribunal estime qu’il y lieu d’ajouter aux limitations fonctionnelles émises par le docteur Maurais, la limitation fonctionnelle d’éviter de maintenir des positions stationnaires assise ou debout excédant 30 minutes, sans pouvoir bouger, ce qui inclut d’avoir à conduire plus d’une trentaine de minutes sans pouvoir changer de position.
L’emploi convenable
[124] La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si l’emploi de manœuvre disponible chez l’employeur constitue un emploi convenable pour le travailleur et s’il est capable de l’exercer.
[125] En matière
de réadaptation professionnelle, les articles
170. Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent, la Commission demande à l'employeur s'il a un emploi convenable disponible et, dans l'affirmative, elle informe le travailleur et son employeur de la possibilité, le cas échéant, qu'une mesure de réadaptation rende ce travailleur capable d'exercer cet emploi avant l'expiration du délai pour l'exercice de son droit au retour au travail.
Dans ce cas, la Commission prépare et met en oeuvre, avec la collaboration du travailleur et après consultation de l'employeur, le programme de réadaptation professionnelle approprié, au terme duquel le travailleur avise son employeur qu'il est devenu capable d'exercer l'emploi convenable disponible.
__________
1985, c. 6, a. 170.
171. Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent et que son employeur n'a aucun emploi convenable disponible, ce travailleur peut bénéficier de services d'évaluation de ses possibilités professionnelles en vue de l'aider à déterminer un emploi convenable qu'il pourrait exercer.
Cette évaluation se fait notamment en fonction de la scolarité du travailleur, de son expérience de travail, de ses capacités fonctionnelles et du marché du travail.
__________
1985, c. 6, a. 171.
172. Le travailleur qui ne peut redevenir capable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle peut bénéficier d'un programme de formation professionnelle s'il lui est impossible d'accéder autrement à un emploi convenable.
Ce programme a pour but de permettre au travailleur d'acquérir les connaissances et l'habileté requises pour exercer un emploi convenable et il peut être réalisé, autant que possible au Québec, en établissement d'enseignement ou en industrie.
__________
1985, c. 6, a. 172; 1992, c. 68, a. 157.
[126] L’emploi offert par l’employeur doit, en plus d’être disponible, satisfaire aux critères prévus par la loi c’est-à-dire qu’il doit être approprié, permettre au travailleur d’utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, présenter une possibilité raisonnable d’embauche et ne pas compromettre sa santé, sécurité et intégrité physique compte tenu de sa lésion[6].
[127] En ce qui concerne le critère de la possibilité raisonnable d’embauche, la jurisprudence enseigne que dans le cas d’un emploi convenable disponible chez l’employeur, il faut se demander si le poste est bien réel, s’il offre une perspective de stabilité raisonnable à moyen terme et si le travailleur y a accès. Si ces conditions sont remplies, il n’y a aucune raison sérieuse de douter qu’il continue d’en être ainsi dans un avenir prévisible[7].
[128] Par ailleurs, bien que l’employeur n’ait pas l’obligation de créer un emploi convenable pour un travailleur accidenté, rien dans la loi ne l’empêche de le faire pour accommoder son travailleur et minimiser les coûts relatifs à la réadaptation. En pareilles circonstances, il faut s’assurer que l’emploi convenable offert existe ailleurs que chez l’employeur et que ses conditions d’exercice reflètent celles du marché du travailleur[8]. En effet, le travailleur doit avoir la possibilité d’exercer ce travail ailleurs que chez l’employeur et aux mêmes conditions advenant, par exemple, la perte de son emploi.
[129] En l’espèce, la preuve convainc le tribunal que l’emploi de manœuvre offert par l’employeur n’est pas un poste créé de toutes pièces dans le seul but de minimiser les coûts, puisque c’est un poste qui existait, au moment de la détermination de l’emploi convenable, et qui existe toujours dans l’entreprise. La preuve démontre également que le travailleur peut l’occuper, à l’instar d’autres travailleurs de l’employeur, même si certains postes sont aussi comblés par des travailleurs d’un sous-traitant. Ce dernier élément prouve, par ailleurs, que cet emploi convenable existe bel et bien aussi ailleurs sur le marché du travail.
[130] Tel que mentionné, les postes de manœuvre (préposé au tri de produits chimiques) existent toujours chez l’employeur et sont comblés, tant par des sous-traitants que par des travailleurs de Cri Environnement inc. Dans ce contexte, il n’y a aucune raison sérieuse de douter qu’il continue d’en être ainsi dans un avenir prévisible.
[131] Le représentant du travailleur allègue que cet emploi est un prétexte pour un éventuel congédiement. Il infère ses prétentions du fait que l’employeur avait initialement contesté l’admissibilité de la réclamation[9], qu’une mise à pied du travailleur était envisagées en mars 2009, compte tenu de son rendement insatisfait, et du salaire proposé de près de 50 000 $ qui ne reflète aucunement la réalité.
[132] Le tribunal estime que ces allégations sont davantage nourries par les perceptions du travailleur que par des faits objectifs et concrets mis en preuve. Les arguments soulevés ne permettent pas d’établir, de manière prépondérante, une intention réelle et tangible de l’employeur de congédier le travailleur. Ces prétentions ne permettent aucunement de conclure qu’il n’y a pas de possibilité raisonnable d’embauche pour le travailleur dans l’emploi de manœuvre offert par l’employeur.
[133] Toutefois, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que le salaire de cet emploi convenable est surévalué.
[134] Les dispositions pertinentes en regard du salaire de l’emploi convenable sont les suivantes :
49. Lorsqu'un travailleur incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion professionnelle devient capable d'exercer à plein temps un emploi convenable, son indemnité de remplacement du revenu est réduite du revenu net retenu qu'il pourrait tirer de cet emploi convenable.
Cependant, si cet emploi convenable n'est pas disponible, ce travailleur a droit à l'indemnité de remplacement du revenu prévue par l'article 45 jusqu'à ce qu'il occupe cet emploi ou jusqu'à ce qu'il le refuse sans raison valable, mais pendant au plus un an à compter de la date où il devient capable de l'exercer.
L'indemnité prévue par le deuxième alinéa est réduite de tout montant versé au travailleur, en raison de sa cessation d'emploi, en vertu d'une loi du Québec ou d'ailleurs, autre que la présente loi.
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1985, c. 6, a. 49.
50. Aux fins de déterminer le revenu net retenu que le travailleur pourrait tirer de l'emploi convenable qu'il devient capable d'exercer à plein temps, la Commission évalue le revenu brut annuel que le travailleur pourrait tirer de cet emploi en le situant dans une tranche de revenus et en considérant le revenu inférieur de cette tranche comme étant celui que le travailleur pourrait tirer de cet emploi convenable.
Cependant, si la Commission croit que le revenu brut annuel que le travailleur pourrait tirer de l'emploi convenable qu'il devient capable d'exercer à plein temps est supérieur au maximum annuel assurable établi en vertu de l'article 66, elle considère que ce revenu brut annuel est égal au maximum annuel assurable.
La Commission publie chaque année à la Gazette officielle du Québec la table des revenus bruts annuels d'emplois convenables, qui prend effet le 1er janvier de l'année pour laquelle elle est faite.
Cette table est faite par tranches de revenus dont la première est d'au plus 1 000 $ à partir du revenu brut annuel déterminé sur la base du salaire minimum en vigueur le 1er janvier de l'année pour laquelle la table est faite, la deuxième de 2 000 $ et les suivantes de 3 000 $ chacune jusqu'au maximum annuel assurable établi en vertu de l'article 66 pour cette année.
Le revenu supérieur de la première tranche de revenus est arrondi au plus bas 500 $.
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1985, c. 6, a. 50.
54. Deux ans après la date où un travailleur est devenu capable d'exercer à plein temps un emploi convenable, la Commission révise son indemnité de remplacement du revenu si elle constate que le revenu brut annuel que le travailleur tire de l'emploi qu'il occupe est supérieur à celui, revalorisé, qu'elle a évalué en vertu du premier alinéa de l'article 50 .
Lorsqu'elle effectue cette révision, la Commission réduit l'indemnité de remplacement du revenu du travailleur à un montant égal à la différence entre l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle il aurait droit s'il n'était pas devenu capable d'exercer à plein temps un emploi convenable et le revenu net retenu qu'il tire de l'emploi qu'il occupe.
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1985, c. 6, a. 54.
55. Trois ans après la date de cette révision et à tous les cinq ans par la suite, la Commission révise, à la même condition et de la même façon, l'indemnité de remplacement du revenu d'un travailleur jusqu'à ce que ce travailleur tire de l'emploi qu'il occupe un revenu brut annuel égal ou supérieur à celui qui sert de base, à la date de la révision, au calcul de son indemnité de remplacement du revenu ou jusqu'à son soixante-cinquième anniversaire de naissance, selon la première échéance.
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1985, c. 6, a. 55.
[135] L’établissement
du salaire d’un emploi convenable est nécessaire pour déterminer si le
travailleur a droit ou non à une indemnité réduite de remplacement du revenu,
conformément au premier alinéa de l’article
[136] Lorsqu’un emploi convenable est offert par l’employeur, le salaire associé à cet emploi n’est pas nécessairement le salaire prélésionnel, mais plutôt le salaire que peut tirer de cet emploi le travailleur. La détermination de ce salaire doit être juste, équitable et s’appuyer sur des données objectives.[10]
[137] En l’espèce, il est clair, selon les notes évolutives, que le salaire annuel offert de 49 038 $ correspond au salaire de l’emploi prélésionnel de camionneur. Ce salaire ne reflète pas les conditions salariales du marché du travail pour l’emploi de manœuvre (préposé au tri de produits chimiques). Selon les témoignages du travailleur et du représentant de l’employeur, le salaire initial, pour un manœuvre sans expérience, est d’environ 12 $ de l’heure. Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles estime que le salaire de l’emploi convenable doit être fixé à 25 027,20 $ (12 $ de l’heure X 40 heures X 52.14 semaines).
[138] Reste à déterminer si l’emploi de manœuvre respecte la capacité résiduelle du travailleur et plus particulièrement les limitations fonctionnelles découlant de sa lésion professionnelle.
[139] Selon la preuve prépondérante, cet emploi respecte les limitations fonctionnelles de classe II émises par le docteur Maurais. Toutefois, tel que décidé précédemment, le travailleur doit aussi éviter de maintenir des positions stationnaires, assise ou debout, excédant 30 minutes, sans pouvoir bouger. Or, la preuve, sur le respect de cette limitation fonctionnelle, est contradictoire.
[140] Selon le représentant de l’employeur, le poste de manœuvre peut être adapté par l’ajout d’un banc, permettant au travailleur d’alterner les positions. Selon le travailleur, la nature même de cet emploi rend impossible une telle adaptation.
[141] Il appert du rapport de l’ergonome au dossier que la tâche, qui consiste à transvider les contenants et qui représente 90 % de l’emploi, s’exerce en position debout.
[142] Toutefois, le rapport ergonomique est muet quant à la possibilité ou non d’exercer cette tâche en alternance, en position debout et assise. Notons qu’à l’époque, l’ergonome n’avait pas à évaluer cette limitation fonctionnelle.
[143] La CSST n’a pas eu l’opportunité de faire une analyse du poste de manœuvre, tenant compte de la nouvelle limitation fonctionnelle reconnue par la présente décision et le tribunal ne dispose pas d’une preuve suffisante et prépondérante pour trancher cette question. Dans ces circonstances, il y a lieu de retourner le dossier à la CSST pour qu’elle évalue, de la manière qu’elle jugera appropriée, si la limitation fonctionnelle additionnelle est respectée et qu’elle statue en conséquence, sur la capacité physique du travailleur à exercer l’emploi convenable de manœuvre chez l’employeur.
Les récidives, rechutes ou aggravations
[144] La Commission des lésions professionnelles doit également décider si le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation les 12 et 19 février 2010.
[145] Cette notion n’est pas définie par la loi. Selon la jurisprudence, elle réfère à une modification de l’état de santé du travailleur, par rapport à celle qui existait au moment de la consolidation de sa lésion professionnelle, et qui est en relation avec celle-ci.[11] La preuve de cette relation peut être faite par une opinion médicale ou par présomption de fait, incluant des faits médicaux, tirée d’un ensemble d’indices graves, précis et concordants[12].
[146] Par ailleurs, il est reconnu que le caractère continu et chronique d’une symptomatologie n’est pas, à lui seul, assimilable à une récidive, rechute ou aggravation[13].
[147] En l’espèce, au moment de la consolidation de sa lésion le 6 janvier 2010, le travailleur conserve des douleurs chroniques pour lesquelles il est compensé par l’attribution d’un déficit anatomo-physiologique de 2 % et d’une indemnité pour préjudice corporel.
[148] Le 11 février 2010, il est expertisé par le docteur Giroux et son examen objectif est tout à fait similaire à l’examen réalisé par le docteur Maurais le 6 janvier 2010. Il n’y a donc aucun changement objectif de sa condition.
[149] Le lendemain, 12 février 2010, le travailleur consulte le docteur Goulet, non pas compte tenu d’un changement important dans sa condition, mais essentiellement pour un renouvellement de médication. Ce dernier note alors une exacerbation des douleurs suite à l’examen réalisé la veille. Or, selon les propos du travailleur, rapportés par le docteur Lamarre en décembre 2010, il y a toujours eu augmentation de sa symptomatologie douloureuse suivant la réalisation d’expertises.
[150] De l’avis du tribunal, il n’y a aucune preuve médicale témoignant d’une modification objective de l’état du travailleur le 12 février 2010. La preuve réfère plutôt à une fluctuation des symptômes douloureux, en lien avec les activités réalisées, sans réel changement dans la condition physique.
[151] Le 15 février 2010, le travailleur reprend un travail et trois jours plus tard, soit le 18 février 2010, il consulte le docteur Leroux qui indique une rechute de douleurs. À ses notes cliniques, il rapporte une diminution des amplitudes articulaires dans tous les sens, sans en préciser les mesures faisant en sorte que le tribunal ne peut évaluer si objectivement, il y a une modification de la condition lombaire du travailleur.
[152] Le 19 février 2010, la docteure Côté traite d’une augmentation de lombalgie et de cervicalgie posturale. À ses notes cliniques, elle rapporte des paresthésies aux doigts, des postures en flexion, des tensions cervicales et prescrit une IRM cervicale. Bref, son examen est davantage centré sur la condition cervicale du travailleur. Or, aucune preuve n’a été faite que cette condition cervicale puisse être en relation avec la lésion professionnelle initiale. Quant à la condition lombaire, la simple mention d’une augmentation de la lombalgie par la docteure Côté est hautement insuffisante pour permettre de conclure à une récidive, rechute ou aggravation.
[153] C’est aussi le 19 février 2010 que le diagnostic de trouble de l’adaptation est posé pour la première fois par la docteure Côté, diagnostic qu’elle maintient par la suite. Ce diagnostic lie le tribunal de sorte qu’il y a lieu d’écarter l’opinion du docteur Labine quant au diagnostic de dépression majeure. Le docteur Labine reconnaît cependant que le travailleur a pu présenter un trouble d’adaptation à une certaine époque.
[154] Pour que cette condition psychologique soit reconnue à titre de récidive, rechute ou aggravation, le lien de causalité entre celle-ci et la lésion professionnelle ou ses conséquences sur la condition et capacité résiduelle du travailleur doit être établi par une preuve médicale prépondérante.
[155] Les tracasseries administratives, les recours judiciaires, la fin du versement de l'indemnité de remplacement du revenu, la perte d’un emploi à la suite d’une lésion professionnelle, les démarches visant à déterminer un emploi convenable ne peuvent fonder une réclamation pour une lésion psychologique consécutive à une lésion professionnelle initiale, à moins de démontrer que le travailleur a été soumis à des mesures abusives, illégales, dilatoires et discriminatoires[14].
[156] En l’espèce, plusieurs facteurs de stress sont avancés pour expliquer le trouble d’adaptation diagnostiqué chez le travailleur: les douleurs chroniques, le deuil de ses capacités antérieures, la détermination d’un emploi convenable chez l’employeur qu’il estime inapproprié et un contexte de relations de travail difficiles.
[157] La preuve médicale et testimoniale ne convainc pas le tribunal que le trouble d’adaptation est davantage relié aux douleurs chroniques du travailleur et à la perte de ses capacités résultant de sa lésion professionnelle qu’à toute autre cause, bien au contraire.
[158] Le tribunal estime très révélateur le fait que le diagnostic de trouble d’adaptation soit émis pour la première fois quelques jours seulement après le retour au travail dans un emploi convenable pour lequel le travailleur n’a jamais démontré d’intérêt réel. Déjà lors de la visite de poste, le travailleur invoquait un arrêt de travail incessant et quelques jours avant d’entreprendre ce travail, il avise la conseillère en réadaptation de son intention de produire une réclamation pour récidive, rechute ou aggravation.
[159] Le retour au travail dans l’emploi convenable, selon les perceptions du travailleur, s’exerce dans un contexte de relations de travail déjà plus ou moins harmonieuses et c’est, selon la preuve prépondérante, la principale cause du trouble d’adaptation diagnostiqué chez le travailleur.
[160] En effet, les notes cliniques de la docteure Côté du 19 février 2010, date à laquelle elle retient pour la première fois ce diagnostic, réfèrent à des relations difficiles avec l’employeur.
[161] Quant au rapport du docteur Biard, il met en lumière un travailleur dont les doléances sont davantage axées sur les démêlés avec son employeur, le manque de soutien de la part de la CSST, la crainte d’un éventuel congédiement plutôt qu’un travailleur aux prises avec des douleurs persistantes et incapacitantes qui le restreignent de manière importante dans ses activités.
[162] Le docteur Labine retient également que la condition psychologique du travailleur est en partie en relation avec ses problèmes chez l’employeur qu’il qualifie de harcèlement. Le mandat écrit qui lui est donné met d’ailleurs l’accent sur les agissements inadéquats de l’employeur et son intention, non prouvée, de congédier le travailleur, ce qui démontre tout le contexte conflictuel entourant le retour au travail chez l’employeur.
[163] Le docteur Labine évoque que les symptômes du trouble d’adaptation sont apparus en octobre 2009 lorsque le travailleur a pris conscience que sa condition médicale ne s’améliorait pas. Le tribunal écarte cette prétention puisque la preuve médicale contemporaine à octobre 2009 ne rapporte aucun symptôme d’une pathologie d’ordre psychologique. De plus, le tribunal ne retient pas l’explication voulant que le travailleur soit précisément le type de personne réticente à exprimer ses émotions alors que lui-même affirme en avoir parlé à son médecin qui a charge de l’époque, le docteur Belleville. Les notes cliniques de ce dernier ne corroborent toutefois pas cette affirmation. À tout événement, le tribunal retient du témoignage du travailleur que celui-ci aurait exprimé des sentiments face au mauvais climat de travail qui régnait. Il n’était alors pas question de sa condition lombaire douloureuse ou des ses incapacités.
[164] Ceci étant, aucune preuve n’a été administrée en vue d’établir que les situations vécues par le travailleur, lors de son assignation temporaire ou retour au travail dans son emploi convenable, débordaient du cadre normal de son travail, ni qu’il a été victime, de la part de son employeur ou de la CSST, d’abus, de harcèlement et de mesures discriminatoires, illégales, abusives et contraires à la gestion normale d’un dossier.
[165] Pour tous ces motifs, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que le travailleur ne s’est pas déchargé de son fardeau de démontrer que son trouble d’adaptation est relié à sa lésion professionnelle.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
Dossiers 401982-62C-1002 et 405597-62C-1003
ACCUEILLE la requête de monsieur Jean-Louis O’Connor, le travailleur;
REJETTE la requête de Cri Environnement inc., l’employeur;
MODIFIE la décision rendue le 8 février 2010 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la lésion professionnelle du 30 mars 2009 ayant entraîné une entorse lombaire est consolidée en date du 6 janvier 2010, sans nécessité de soins ou traitements autre qu’une médication pour la gestion de la douleur;
DÉCLARE que le travailleur conserve une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique de 2,20 % et qu’il a droit à une indemnité pour préjudice corporel de 1 416,65 $ plus intérêts;
DÉCLARE que les limitations fonctionnelles découlant de la lésion professionnelle sont les suivantes :
Éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente les activités qui impliquent de :
- travailler en position accroupie;
- ramper, grimper;
- subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale (ex : provoquées par du matériel roulant sans suspension)
Éviter les activités qui impliquent de :
- soulever, porter, pousser, tirer de façon répétitive et fréquente des charges de plus de 10 kg;
- effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire même de faible amplitude;
- monter fréquemment plusieurs escaliers;
- marcher en terrain accidenté ou glissant
Éviter de maintenir des positions stationnaires, assise ou debout, excédant 30 minutes, sans pouvoir bouger.
Dossiers 405734-62C-1003 et 408707-62C-1004
ACCUEILLE en partie la requête de monsieur Jean-Louis O’Connor;
REJETTE la requête de Cri Environnement inc.;
MODIFIE la décision rendue le 19 mars 2010 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que l’emploi de manœuvre chez l’employeur constitue un emploi convenable pour le travailleur, sous réserve de l’évaluation devant être faite par la CSST quant au respect de la limitation fonctionnelle d’éviter de maintenir des positions stationnaires assise ou debout excédant 30 minutes, sans pouvoir bouger;
DÉCLARE que le revenu brut annuel de l’emploi convenable est de 25 027,20 $;
DÉCLARE que le travailleur a droit au versement de son indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce que la CSST se prononce sur sa capacité physique à exercer l’emploi convenable, tenant compte de la nouvelle limitation fonctionnelle d’éviter de maintenir des positions stationnaires assise ou debout excédant 30 minutes, sans pouvoir bouger;
Dossier 417636-62C-1008
REJETTE la requête de monsieur Jean-Louis O’Connor;
CONFIRME la décision rendue le 6 août 2010 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que le travailleur n’a pas subi de récidive, rechute ou aggravation les 12 et 19 février 2010.
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Sonia Sylvestre |
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Me Michel Cyr |
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Représentant du travailleur |
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Me Carmen Poulin |
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Groupe AST inc. |
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Représentante de l’employeur |
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Vigneault Thibodeau Giard, Avocats |
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Représentants de la partie intervenante |
[1] Pour la docteure Girard, cela représente une diminution puisqu’elle établit la normale à 50 degrés.
[2] Rapport du docteur Chertkow daté du 3 février 2010.
[3] L.R.Q., c. A-3.001.
[4] Scierie Parent inc. et Duguay
[5] Paquette et Aménagement Forestier LF, C.L.P.
[6] Art.
[7] Brisebois et Volailles Grenville inc, C.L.P.
[8] Allard et Culture Trio inc.,C.L.P. 364051-31-0811, 8 juin 2009, A. Quigley.
[9] La contestation a été jugée irrecevable par l’instance de révision de la CSST puisque produite hors délai.
[10] Sampson et Déménagement & Entreprise Lakeshore
Can. [1995], C.A.L.P. 64; Mittal Canada inc. et Delisle,
C.L.P.
[11] Dubé et Entreprises du Jalaumé enr. et CSST,
C.L.P.
[12] Aubé et Commission scolaire de l’Énergie, C.L.P.
[13] Nadeau et Les scies nord-américaines inc.
222731-03B-0312, 1er novembre 2004, G. Marquis; Rancourt et Pointe-Nor inc. et CSST, C.L.P.
[14] Poulin et
Automobile Bonne Route inc., C.L.P.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.