R. c. Compagnie Électronique Hi-Fi
Loi de la radiocommunication |
2006 QCCQ 14521 |
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COUR DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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LOCALITÉ DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre criminelle et pénale » |
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Nos : |
500-73-001213-996 500-73-002177-042 |
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DATE : |
26 septembre 2006 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
GILLES CADIEUX, J.C.Q |
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500-73-001213-996
SA MAJESTÉ LA REINE |
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Poursuivante |
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c. |
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LA COMPAGNIE ÉLECTRONIQUE HI-FI et ABDUL KESODIA |
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Accusés
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500-73-002177-042
SA MAJESTÉ LA REINE Poursuivante c. S.M. ÉLECTRONIQUE HI-FI INC. et |
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ABDUL KESODIA Accusés |
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JC 1607 |
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JUGEMENT |
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[1] Dans le dossier 500-73-001213-996, la poursuivante a porté contre la Compagnie Électronique Hi-Fi inc. et Abdul Kesodia, les accusations suivantes :
1) À
Saint-Léonard, district de Montréal, le ou vers le 6 août 1999, ont
illégalement vendu un dispositif ou composante de celui-ci dans des
circonstances donnant à penser que l'un ou l'autre est utilisé en vue
d'enfreindre l'article
· un décodeur de télévision payante transmise par cablodistribution de marque Panasonic portant le numéro de série F08443493,
contrairement aux dispositions de l'alinéa
2) À Saint-Léonard, district de Montréal, le
ou vers le 23 septembre 1999, ont illégalement eu en leur possession au 4648,
rue Viterbe, à Saint-Léonard, du matériel ou dispositif ou composante de
celui-ci dans des circonstances donnant à penser que l'un ou l'autre est
utilisé en vue d'enfreindre l'article
· 21 systèmes complets permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite de marque Dish Network,
· 14 systèmes complets permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite de marque Sony DSS,
· 1 système complet permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite de marque Digital Satellite System,
· 30 LNB (Low Noice Block),
· 22 receveurs et 9 antennes de différentes marques,
contrairement aux dispositions de l'alinéa
[2] À l'ouverture du procès, la poursuivante a demandé la permission de retirer les accusations portées dans ce dossier contre la Compagnie Électronique Hi-Fi seulement. En conséquence, ces accusations sont retirées quant à la Compagnie Électronique Hi-Fi.
[3] L'accusé Abdul Kesodia a enregistré un plaidoyer de culpabilité quant au premier chef de la dénonciation. En conséquence, il est déclaré coupable de ce premier chef d'accusation.
[4] L'accusé Kesodia a maintenu son plaidoyer de non-culpabilité quant au deuxième chef d'accusation.
[5] Dans le dossier 500-73-002177-042, la poursuivante a porté contre S.M. Électronique Hi-Fi inc. et Abdul Kesodia, les accusations suivantes :
1) À
Montréal, district judiciaire de Montréal, le ou vers le 22 novembre 2003, sans
excuse légitime, ont illégalement importé des matériaux ou dispositifs ou
composantes de ceux-ci, dans des circonstances donnant à penser que l'un ou
l'autre sont utilisés en vue d'enfreindre l'article
· 48 récepteurs de télévision payante par satellite de marque Dish Network, avec leurs cartes d'accès et leurs télécommandes,
contrairement aux dispositions de l'alinéa
2) À Montréal, district judiciaire de
Montréal, le ou vers le 24 novembre 2003, sans excuse légitime, ont
illégalement eu en leur possession des matériaux ou dispositifs ou composantes
de ceux-ci, dans des circonstances donnant à penser que l'un ou l'autre sont
utilisés en vue d'enfreindre l'article
· un récepteur de télévision payante par satellite de marque Dish Network, modèle Dish 301-22D System, portant le numéro de série WAJEAA5SCGK avec sa carte d'accès et sa télécommande,
· un récepteur de télévision payante par satellite de marque Dish Network, modèle Dish 301-22D System, portant le numéro de série RAEDAM97231X avec sa carte d'accès et sa télécommande,
contrairement
aux dispositions de l'alinéa
[6] La Cour a entendu simultanément et de façon commune, la preuve dans les deux dossiers.
[7] Pour chacun des dossiers, les procureurs ont déposé une série d'admissions par écrit, signées par eux-mêmes et l'accusé Abdul Kesodia, personnellement et à titre d'administrateur, président et actionnaire majoritaire de la compagnie S.M. Electronique Hi-Fi inc.
[8] Compte tenu de ces admissions, la Cour tient pour prouvés, les fait suivants :
(8.1) L'identité de Abdul Kesodia et de la Compagnie S.M. Électronique Hi-fi inc. est admise. L'accusé Kesodia est administrateur, président et actionnaire majoritaire de cette compagnie.
(8.2) En 1999, l'accusé Kesodia opérait son commerce sous le nom de Électronique Hi-Fi au 4648, rue Viterbe, à Saint-Léonard, province de Québec, et était propriétaire de cette société en nom collectif.
(8.3) En 2003, l'accusé Kesodia et la compagnie S.M. Électronique Hi-Fi inc., opéraient leur commerce au 4524, rue Jean-Talon Est, à Saint-Léonard, province de Québec.
(8.4) La nature du commerce des accusés dans les deux dossiers consistait notamment en la vente de matériel et produits électroniques permettant la réception et le décodage de signaux de télévision par satellite.
(8.5) Le matériel est composé généralement d'une antenne parabolique et d'un décodeur qui se branchent au téléviseur de l'acheteur, afin de recevoir et décoder des signaux de télévision par satellite. Une carte d'accès amovible, connue aussi sous le nom de module d'accès conditionnel, contrôle le décodeur.
(8,6) Le matériel en possession des accusés reçoit et décode principalement des signaux de télévision par satellite diffusés par une entreprise américaine connue sous le nom de Dish Network.
(8.7) L'entreprise Dish Network n'est pas autorisée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) à diffuser des signaux de télévision au Canada.
(8.8) Cette entreprise, Dish Network, est un fournisseur de signaux autorisés aux États-Unis. En effet, ce radiodiffuseur américain utilise des satellites qui appartiennent à des sociétés américaines, sont exploités par celles-ci et occupent des créneaux orbitaux ayant été attribués aux États-Unis. Cependant, les empreintes de ces radiodiffuseurs SRD américains sont suffisamment larges pour que leurs signaux puissent être captés presque partout au Canada. Ainsi, l'« empreinte » des signaux de télévision par satellite de Dish Network déborde la frontière américaine et s'étend en partie au Canada.
(8.9) Comme tous les autres fournisseurs de signaux de télévision directe par satellite en Amérique du Nord, l'entreprise Dish Network encode ou « brouille » ses signaux afin qu'ils ne puissent être décodés sans autorisation et sans que ne soient versés les frais mensuels d'abonnement. Cette technologie, appelée la cryptographie ou l'encodage des signaux sert à transformer une communication en un message codé qui est destiné à n'être déchiffré que par une personne autorisée. Les radiodiffuseurs SRD utilisent ce procédé pour s'assurer que ce ne sont que les personnes autorisées et qui ont payé les droits appropriés, qui reçoivent leur programmation. En effet, ce procédé d'encodage implique l'utilisation des cartes à puces qui sont de la taille d'une carte de crédit et qui ont des fonctions similaires à celles d'un ordinateur. On peut donc y écrire une quantité variable d'informations, telles une sélection de programmes, des cotes parentales, des choix particuliers et des données financières.
(8.10) Le procédé technologique se résume comme suit : un centre de radiodiffusion appartenant à la compagnie Dish Network aux États-Unis diffuse des signaux de télévision qui ont fait l'objet d'une cryptographie vers un satellite américain en orbite. Ce satellite renvoie les signaux codés vers des antennes paraboliques ou « soucoupes » érigées sur les édifices des consommateurs. L'antenne parabolique conduit les signaux diffusés à un récepteur se trouvant généralement tout près de la télévision à l'intérieur de la maison. Dans ce récepteur est insérée une carte à puces fabriquée par NAGRA STAR, et lui appartenant encore, qui donnera la possibilité au récepteur de décoder les signaux envoyés par le centre de diffusion, selon que le consommateur a l'autorisation de recevoir lesdits canaux et qu'il a défrayé les frais y afférents. Ainsi, la fonction ultime desdites cartes est de reconnaître si le consommateur a l'autorisation de visionner ou pas les émissions demandées et, si oui, de traduire les ondes encodées diffusées par une compagnie en images claires sur son écran de télévision.
(8.11) Toutefois, il arrive que les cartes à puces utilisées aient subi des modifications non autorisées par la compagnie américaine afin d'être habilitées à décrypter les signaux de télévision payante, sans que leur détenteur n'ait à obtenir l'autorisation du diffuseur des signaux ou d'un distributeur licencié au Canada ce qui leur permet la réception de la programmation de Dish Network, sans autorisation et sans paiement de quelconques droits.
(8.12) Il arrive aussi que des citoyens canadiens reçoivent le signal d'abonnement non autorisé par la compagnie américaine Dish Network par le biais d'une fausse adresse américaine afin d'être habilités à décrypter les signaux de télévision payante, sans l'autorisation du diffuseur des signaux ou d'un distributeur licencié au Canada, ce qui leur permet la réception de la programmation de Dish Network, sans autorisation, mais en payant les droits appropriés.
(8.13) Afin de lutter contre l'interception non autorisée des signaux par satellite par les vendeurs et les utilisateurs, tous les fournisseurs de ce type de signaux, dont Dish Network, changent régulièrement la technologie qu'ils utilisent pour encoder leurs signaux. On parle alors de contre-mesure électronique (CME).
(8.14) En résumé, les utilisateurs des systèmes de Dish Network au Canada ont accès aux signaux de ce diffuseur américain en utilisant deux méthodes différentes.
(8.15) Une des méthodes consiste à donner un lieu de résidence américain à l'utilisateur du système en donnant à Dish Network une fausse adresse et/ou un faux numéro de téléphone aux États-Unis ou une adresse provenant d'un client immigrant ou celle d'un proche. Sur paiement des frais mensuels d'abonnement exigés, habituellement par carte de crédit, le décodeur est activé par Dish Network. L'utilisateur reçoit uniquement les canaux qu'il a choisis et pour lesquels il a payé.
(8.16) La deuxième méthode d'accès au service de Dish Network consiste à acheter une « carte noire » et à l'insérer dans le décodeur. Cette carte remplace la carte d'accès habituelle. Il s'agit d'une version modifiée de la carte qui permet à l'utilisateur de décoder et de regarder toutes les émissions de télévision offertes par Direct TV sans payer les frais d'abonnement. Seul le vendeur de la carte piratée reçoit de l'argent pour ce service.
(8.17) Les vendeurs de matériel de Dish Network au Canada qui aident leurs clients à obtenir le service en prétendant être des résidents américains sont connus dans l'industrie sous le nom d' « opérateurs sur le marché gris ».
(8.18) Ainsi, les accusés étaient des opérateurs sur ce qui est communément appelé « le marché gris ». En effet, les accusés possédaient et vendaient du matériel de décodage de signaux par satellite, tout en fournissant à leurs clients une fausse adresse américaine afin que ces derniers puissent s'abonner auprès de la compagnie Dish Network afin de capter leur signal d'abonnement; toutefois les clients immigrants fournissaient une adresse américaine ou celle d'un proche.
(8.19) Le 6 août 1999, monsieur Philip Ouimet, du bureau de surveillance de l'Association Canadienne des Distributeurs de Films, s'est rendu au commerce Électronique Hi-Fi situé au 4648, rue Viterbe, à Saint-Léonard, province de Québec. Il a procédé à l'achat d'un décodeur pirate de télévision payante transmise par câblodistribution de marque Panasonic portant le numéro de série F08443493. La personne qu'il a rencontrée, soit Patrick Célestin, lui a vendu ce décodeur pirate lui permettant de recevoir tous les canaux diffusés par Vidéotron, et cela, sans abonnement. Ce décodeur lui a coûté 240 $ incluant une garantie sur l'appareil.
(8.20) Le 23 septembre 1999, à son commerce situé au 4648, rue Viterbe, à Saint-Léonard, province de Québec, l'accusé Kesodia a eu en sa possession des matériaux ou dispositifs ou composantes de ceux-ci, à savoir :
· 21 systèmes complets permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite de marque Dish Network,
· 14 systèmes complets permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite de marque Sony DSS,
· 1 système complet permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite de marque Digital Satellite System,
· 30 LNB (Low Noice Block),
· 22 receveurs et 9 antennes de différentes marques.
(8.21) Le 31 mai 2003, vers 4h30, l'inspecteur Ron Flewer, de l'A.D.R.C., région de l'Ontario, constate l'importation d'un chargement de 300 récepteurs de signaux par satellites de marque Dish Network arrivant par le poste douanier de Sarnia, Ontario, à destination de la Compagnie Électronique Hi-Fi inc. de Montréal.
(8.22) Le 2 juin 2003, l'inspecteur Michel Renaud d'Industrie Canada a effectué une vérification dans les fichiers d'importation fournis par l'Agence des Douanes et du Revenu du Canada. Il a constaté que la compagnie S.M. Électronique Hi-Fi inc. a importé du matériel de réception de signaux satellites à plusieurs reprises soit en janvier, mars et avril 2003.
(8.23) Le 4 juillet 2003, la gendarme Savard et le gendarme Mathieu rencontrent monsieur Gilles Couturier, Directeur du terminal pour la compagnie Transport Manitoulin. Ce dernier confirme plusieurs livraisons effectuées au magasin S.M. Électronique Hi-Fi inc., depuis avril 2003. Il confirme également la livraison à effectuer le 7 juillet 2003.
(8.24) Le 8 juillet 2003, il y a une importation de 200 récepteurs de marque Dish Network constituée de 100 boîtes contenant des récepteurs avec cartes à puces et 100 boîtes contenant des antennes paraboliques, récepteurs et cartes à puces et 5 autres récepteurs qui semblaient avoir été retournés pour des réparations sous garantie.
(8.25) Le 9 juillet 2003, à l'extérieur du commerce S.M. Électronique Hi-Fi inc., on y observe un véhicule garé dans le stationnement, soit une fourgonnette de couleur blanche immatriculée FBA8055 appartenant à S.M. Électronique Hi-Fi inc. On observe également l'arrivée du camion de livraison de la compagnie Motor Express Montréal, filiale de Transport Manitoulin qui effectue une livraison au commerce de boîtes identifiées Dish Network, soit une cargaison de 3 palettes de 24 boîtes avec inscription Dish Network et 3 autres palettes de plus petites boîtes. La fourgonnette de couleur blanche, identifiée Master Satellite avec le numéro de téléphone (514) 726-6041 et des inscriptions de Bell ExpressVu, et immatriculée FY92638/Québec, appartient à monsieur Charles Ethier.
(8.26) Le 24 novembre 2003, une cargaison de 48 systèmes satellites modèle 301,69 « remote » et de 34 trousses de mise à jour, est importée par la Compagnie électronique Hi-Fi, à l'attention de Abdul. Le même jour, le caporal Bellefeuille reçoit la confirmation de la compagnie de transport que la cargaison est destinée au 4524, rue Jean-Talon Est, à Montréal en après-midi.
(8.27) Ainsi le 22 novembre 2003, à leur commerce situé au 4524, rue Jean-Talon Est, à Saint-Léonard, province de Québec, les accusés ont importé des matériaux ou dispositifs ou composantes de ceux-ci, à savoir :
· 48 récepteurs de télévision payante par satellite de marque Dish Network, avec leurs cartes d'accès et leurs télécommandes.
(8.28) Le 24 novembre 2003, à leur commerce situé au 4524, rue Jean-Talon Est, à Saint-Léonard, province de Québec, les accusés ont eu en leur possession des matériaux ou dispositifs ou composante de ceux-ci, à savoir :
· un récepteur de télévision payante par satellite de marque Dish Network, modèle Dish 301-22D System, portant le numéro de série WAJEAA5SCGK avec sa carte d'accès et sa télécommande,
· un récepteur de télévision payante par satellite de marque Dish Network, modèle Dish 301-22D System, portant le numéro de série RAEDAM97231X avec sa carte d'accès et sa télécommande.
[9] Ces admissions, consignées par écrit, sont complétées par une preuve testimoniale et documentaire qui établit les faits suivants :
(9.1) Lors de perquisitions effectuées au commerce de l'accusé Kesodia situé au 4648, rue Viterbe, à Saint-Léonard, et aussi à son commerce S.M. Électronique situé au 6245, boul. Métropolitain Est, à Saint-Léonard, les policiers ont saisi divers documents, disquettes et fichiers d'ordinateur représentant des formulaires d'activation de systèmes Dish Network vendus à des clients résidant dans la région de Montréal, mais qui avaient fourni pour fins d'activation une fausse adresse de résidence aux États-Unis. Ce fait est confirmé par des vérifications effectuées par le gendarme Daniel Lépine relativement à des factures de juin et août 1999, retrouvées dans un fichier de l'ordinateur de l'accusé Kesodia.
(9.2) Le gendarme Michel Michaud s'est présenté en juin 1999 comme acheteur potentiel au commerce de la rue Viterbe et s'est vu offrir un système américain Dish Network avec mention qu'à son défaut de pouvoir fournir une adresse de résidence aux États-Unis, le commerçant pourrait lui en fournir une. Il a finalement acheté, le 6 août 1999, un décodeur de télévision payante transmise par cablodistribution pour un montant de 250 $
(9.3) Au cours des mois de juillet et novembre 2003, la surveillance policière au commerce S.M. Électronique Hi-Fi inc. situé au 4524, rue Jean-Talon Est, a permis de constater la livraison à ce commerce de quantités importantes de systèmes Dish Network. Certains de ces systèmes ont ensuite été placés dans un véhicule appartenant à monsieur Charles Ethier qui opérait un commerce de vente et installation d'antennes satellites sous le nom de Master Satellite. Ces systèmes ont été livrés et installés chez des résidents de la région de Montréal.
(9.4) Lors de la perquisition effectuée le 24 novembre 2003 au commerce des accusés, les policiers ont retrouvé et saisi les 48 systèmes de réception et décodage de télévision payante par satellite de marque Dish Network avec leurs cartes d'accès et leurs télécommandes, que les accusés avaient importés des États-Unis le 22 novembre 2003, ainsi que la facture d'achat. On a aussi saisi les deux récepteurs avec cartes d'accès et télécommandes mentionnés au deuxième chef de la dénonciation dans le dossier 500-73-002177-042.
(9.5) Selon monsieur Michel Clavette, gestionnaire des programmes chez Industrie Canada et expert en technologie électronique, les systèmes Dish Network sont conçus spécifiquement pour le fournisseur américain Dish Network alors que les systèmes Sony DSS sont conçus selon la technologie du fournisseur américain Direct TV. Ces fournisseurs américains ne sont pas des distributeurs légitimes autorisés au Canada, au sens de la Loi sur la radiocommunication.
(9.6) Monsieur Michel Renaud, inspecteur chez Industrie Canada, confirme que les seuls distributeurs légitimes autorisés au Canada sont les fournisseurs Bell ExpressVu et Star Choice. Le système de réception et de décodage conçu pour chaque distributeur lui est spécifique et exclusif. Si les antennes et télécommandes sont permutables d'un système à l'autre, les récepteurs sont spécifiques à un distributeur et conçus exclusivement pour décoder les signaux qu'il transmet par satellite.
[10] Les accusés ont fait entendre cinq témoins pour établir les faits suivants :
(10.1) Madame Claudia De Paz, originaire du Guatemala, vit au Canada depuis dix ans. Depuis environ quatre années, elle opère le commerce Multi-Sat, par lequel elle vend à ses clients latino-américains hispanophones des systèmes complets Dish Network, qu'elle active en donnant une adresse aux États-Unis que le client lui fournit. Depuis quatre ans, les systèmes Dish Network lui sont fournis par les accusés. Ses clients résident dans la région de Montréal, mais recherchent des programmes en langue espagnole sur des canaux de diffusion provenant des pays latino-américains, programmation qui n'est pas offerte par les distributeurs légitimes autorisés au Canada, soit Bell ExpressVu et Star Choice.
(10.2) Monsieur Pakirathan Ganeshsuntharam, originaire du Sri Lanka, vit au Canada depuis 1995. Il a acheté un système Dish Network de l'accusé Kesodia, qui lui a fourni une fausse adresse de résidence aux États-Unis. Cela lui permet d'avoir des nouvelles de son pays d'origine, grâce à un canal de diffusion en langue tamil offert par Dish Network, mais non disponible auprès des distributeurs légitimes autorisés au Canada.
(10.3) Monsieur Hendry Castrillo, originaire du Costa Rica, vit au Canada depuis 1989. Il fournit à ses clients mexicains et guatémaltèques qui viennent travailler au Québec comme travailleurs agricoles saisonniers, diverses choses dont des journaux en langue espagnole et aussi des systèmes Dish Network, afin de leur permettre d'avoir accès à des canaux hispanophones de leurs pays. Il achète ces systèmes de l'accusé Kesodia à son commerce et ignore qui s'occupe d'activer ces systèmes. Selon lui, certains de ses clients rapportent ces systèmes dans leurs pays au moment de leur retour.
(10.4) Monsieur Mark Galanis vit au Canada depuis 1976 et opère une entreprise d'installation de systèmes satellites. Selon le témoin, le système américain Dish Network donne accès à plusieurs canaux originaux en langue grecque, donc à une programmation plus variée que celle offerte par les distributeurs autorisés au Canada.
(10.5) Monsieur Costantin Cevapsidis, d'origine grecque, a acheté un système Dish Network au commerce des accusés pour avoir accès aux chaînes de diffusion en langue grecque. Pour activer le système, il a fourni l'adresse d'un cousin qui vit aux États-Unis.
[11] L'accusé Abdul Kesodia est d'origine pakistanaise et vit au Canada depuis 1994. Il a commencé à vendre des produits électroniques en 1996, au 6245, Métropolitain Est, sous la raison sociale Électronique Hi-Fi, puis a ouvert un second magasin en 1998 au 4648, rue Viterbe, à Saint-Léonard. En 2000-2001, son commerce a déménagé au 4524, Jean-Talon Est et a été incorporé sous le nom de S.M. Électronique Hi-Fi inc. En novembre 2003, il avait deux places d'affaires, soit au 6245, Métropolitain Est et au 4524, Jean-Talon Est.
[12] En 1999, à son commerce de la rue Viterbe, il ciblait plus particulièrement les marchés ethniques, soit les clients d'origines grecque, italienne, latino-américaine et autres qui n'avaient pas accès aux canaux de diffusion de leurs pays d'origine par les distributeurs canadiens. À ces clients qui souvent ne parlaient ni l'anglais, ni le français, il vendait soit directement, soit par l'entremise d'un intermédiaire comme monsieur Hendry Castrillo, un système Dish Network sans modification. Il s'occupait de faire activer le système en donnant l'adresse que le client fournissait et qui était celle d'un parent résidant aux États-Unis. Si le client n'en connaissait pas, lui-même fournissait l'adresse américaine puisqu'il a de nombreux parents et amis vivant aux États-Unis. Il vendait aussi les systèmes des distributeurs légitimes autorisés au Canada, soit Bell ExpressVu et Star Choice.
[13] Lorsqu'ils importaient ces systèmes en provenance des États-Unis, les accusés payaient, outre les frais des courtiers en douanes, les droits exigés et plus particulièrement la taxe sur les produits et services, sur la valeur des biens importés, ce qui lui permettait de croire que l'importation de ces systèmes était légale.
[14] Monsieur Kesodia reconnait avoir acheté de la compagnie américaine Aswan Trading Inc. les 48 systèmes satellites Dish Network qui ont été importés le 22 novembre 2003. Ces systèmes étaient destinés aux clients d'origine ethnique étrangère, soit plus particulièrement aux travailleurs agricoles latino-américains.
[15] Après l'arrêt de la Cour suprême dans l'affaire Bell ExpressVu, rendu le 26 avril 2002, l'accusé Kesodia a communiqué avec son procureur pour obtenir des explications, sans toutefois se donner la peine de lire le jugement dont copie lui avait été transmise. Le contenu de cette opinion juridique n'a pas été mise en preuve, mais l'accusé croit avoir compris que l'affaire n'était pas encore réglée et demeurait ambiguë, d'autant plus que les services des douanes n'interdisaient pas l'importation de ces systèmes satellites américains.
[16] L'accusé croyait pouvoir importer ces systèmes pour ensuite les revendre à d'autres entreprises pour exportation à l'extérieur du Canada ou pour les revendre à des clients d'origine étrangère qui entendaient les rapporter dans leurs pays d'origine pour utilisation à l'extérieur du Canada. Toutefois, les factures produites par l'accusé Kesodia à l'appui de cette affirmation démontrent que la revente était faite à Incredible Electronic, une entreprise de l'Ontario, donc située au Canada, et à Digi-Sat, une entreprise de la région de Montréal.
[17] Prétendant avoir compris après cet arrêt de la Cour suprême qu'il n'avait pas le droit de vendre ses systèmes à des clients pour utilisation au Canada, l'accusé référait ces clients d'origine ethnique étrangère, mais résidant au Canada, à des entreprises comme Digi-Sat ou à madame Claudia De Paz ou encore à monsieur Charles Éthier, lesquels venaient toutefois s'approvisionner en systèmes satellites Dish Network au commerce des accusés.
[18] Par ailleurs, l'accusé Kesodia reconnaît que même en 2003, après l'arrêt de la Cour suprême, il continuait de vendre des systèmes satellites américains à des clients résidant au Canada qui, pour des fins d'activation, fournissaient une fausse adresse de résidence aux États-Unis. Il lui arrivait aussi de fournir une adresse aux États-Unis aux clients qui ne pouvaient pas fournir eux-mêmes une telle adresse.
[19] Les dispositions législatives pertinentes de la Loi sur la radiocommunication, L.R.C. 1985, c. R-2, sont :
2. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.
[…]
« distributeur légitime » La personne légitimement autorisée, au Canada, à transmettre un signal d’abonnement ou une alimentation réseau, en situation d’encodage, et à en permettre le décodage.
[…]
« encodage » Traitement électronique ou autre visant à empêcher la réception en clair.
[…]
« signal d’abonnement » Radiocommunication destinée à être reçue, directement ou non, par le public au Canada ou ailleurs moyennant paiement d’un prix d’abonnement ou de toute autre forme de redevance.
[…]
9. (1) Il est interdit :
[…]
c) de décoder, sans l’autorisation de leur distributeur légitime ou en contravention avec celle-ci, un signal d’abonnement ou une alimentation réseau;
[…]
10. (1) Commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, dans le cas d’une personne physique, une amende maximale de cinq mille dollars et un emprisonnement maximal d’un an, ou l’une de ces peines, ou, dans le cas d’une personne morale, une amende maximale de vingt-cinq mille dollars quiconque, selon le cas :
[…]
b) sans excuse légitime, fabrique, importe, distribue, loue, met en vente, vend, installe, modifie, exploite ou possède tout matériel ou dispositif, ou composante de celui-ci, dans des circonstances donnant à penser que l’un ou l’autre est utilisé en vue d’enfreindre l’article 9, l’a été ou est destiné à l’être;
[…]
(2.5) Nul ne peut être déclaré coupable de l'infraction visée aux alinéas 9(1)c), d) ou e) s'il a pris les mesures nécessaires pour l'empêcher.
[…]
11. En cas de perpétration par une personne morale d’une infraction à la présente loi, ceux de ses dirigeants, administrateurs ou mandataires qui l’ont ordonnée ou autorisée, ou qui y ont consenti ou participé, sont considérés comme des coauteurs de l’infraction et encourent la peine prévue pour une personne physique, que la personne morale ait été ou non poursuivie ou déclarée coupable.
[20] Les admissions consignées par écrit de l'accusé Abdul Kesodia, tant personnellement qu'à titre d'administrateur, président et actionnaire majoritaire de la compagnie S.M. Électronique Hi-Fi inc., de même que la preuve testimoniale et documentaire et les admissions faites par l'accusé Kesodia au cours de son témoignage établissent hors de tout doute raisonnable la possession par l'accusé Kesodia, en septembre 1999, ainsi que l'importation et la possession par l'accusé Kesodia et sa compagnie S.M. Électronique Hi-Fi inc., en novembre 2003, de systèmes complets permettant de décoder des signaux de télévision payante transmis par satellite par des distributeurs américains qui n'étaient pas des distributeurs légitimes autorisés au Canada.
[21] Il est également prouvé hors de tout doute raisonnable que l'accusé Kesodia en 1999 et lui-même et sa compagnie co-accusée, en 2003, étaient des opérateurs sur le « marché gris ». En effet, ils possédaient et vendaient des systèmes de décodage de signaux par satellite provenant de distributeurs américains à des clients résidant au Canada, qui fournissaient à la connaissance des accusés et parfois avec l'aide des accusés, une fausse adresse de résidence aux États-Unis, afin de pouvoir activer ces systèmes de décodage. L'accusé Kesodia fournissait lui-même une adresse postale d'un parent ou d'un ami demeurant aux États-Unis, lorsque le client n'était pas en mesure de fournir cette adresse postale.
[22] L'activation du système auprès du distributeur américain permettait ensuite à ces résidents canadiens de décoder les signaux de télévision payante par satellite provenant de ce distributeur américain. Leur utilisation se limitait à cette fin seulement, puisque le système de réception et de décodage de chaque distributeur est conçu exclusivement pour celui-ci.
[23]
L'utilisation de ces systèmes contrevient aux dispositions de l'article
[24] Les accusés ont importé et eu en leur possession ces systèmes de distributeurs américains, qui n'étaient pas des distributeurs légitimes autorisés au Canada, en vue de les vendre à des personnes résidant au Canada, en ayant connaissance de l'utilisation illégale qui en serait faite. Cette connaissance permet d'inférer que les accusés avaient l'intention de commettre les infraction reprochées.
[25]
L'accusé Kesodia prétend qu'en 1999, il ignorait que l'utilisation au
Canada d'un système de décodage de signaux de télévision par satellite d'un
distributeur américain était prohibée, en raison de la profonde division de la
jurisprudence sur ce sujet. Même après l'arrêt de la Cour suprême du 26 avril
2002 dans l'affaire Bell ExpressVu, il restait toujours en suspens la
question constitutionnelle à savoir si les articles
[26]
L'article
[27] Le juge Lamer s'est exprimé, à propos de ce moyen de défense, dans les arrêts Molis et Forster. Il écrit :
[…] le Parlement a choisi, par les termes clairs et
non équivoques de l'art. 19, de ne faire aucune distinction entre l'ignorance
de l'existence de la loi et celle de son sens, de sa portée ou de son
application. Le Parlement a aussi clairement exprimé la volonté que l'art.
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Un principe de notre droit criminel veut qu'une
croyance honnête mais erronée quant aux conséquences juridiques d'actes
délibérés ne constitue pas un moyen de défense opposable à une accusation
criminelle, même si l'erreur ne peut être attribuée à la négligence de
l'accusé : Molis c. La Reine,
[28] Dans l'arrêt Pontes, le juge Cory précise :
[…] En d'autres termes, une erreur sur ce qu'est la loi ne peut pas servir de moyen de défense.
L'application de ce principe mène à la conclusion
qu'un accusé ne peut pas invoquer comme moyen de défense qu'il s'est enquis de
façon raisonnable de la légalité de ses actes ou de sa situation. Ce moyen de
défense a été explicitement rejeté dans l'arrêt Molis c. La Reine,
[29] Enfin, le juge cite avec approbation ce qu'écrivait le juge Lamer dans l'arrêt Molis à propos de la diligence raisonnable comme moyen de défense en relation avec l'erreur de droit :
Il me paraît évident que nous sommes en présence d'une infraction qu'on ne doit pas considérer comme une infraction de responsabilité absolue et que, par conséquent, un accusé peut invoquer la diligence raisonnable comme moyen de défense. Mais je m'empresse d'ajouter que l'arrêt Sault Ste-Marie parle de la défense de diligence raisonnable par rapport à l'accomplissement d'une obligation imposée par la loi et non par rapport aux recherches sur l'existence d'une interdiction ou sur son interprétation. [je souligne.][5]
[30]
En conséquence, l'erreur de droit invoquée par l'accusé Kesodia en
raison de la jurisprudence contradictoire sur l'étendue de la prohibition de
l'article
[31] De même, le refus de la Cour suprême de se prononcer sur la question constitutionnelle dans l'arrêt Bell ExpressVu déjà cité, laissant en suspens tout le débat sur cette question, ne peut servir d'excuse aux accusés pour ignorer la prohibition édictée par l'article 9(1)c). La présomption de validité des lois s'applique et l'article contesté continue d'avoir force de loi tant qu'il n'est pas abrogé ou modifié par le Parlement ou déclaré invalide par le jugement final et définitif d'un tribunal compétent.
[32] L'erreur de droit provoquée par une personne en autorité peut être invoquée à titre d'excuse plutôt que comme moyen de défense complet, comme l'a reconnu le juge Lamer dans l'arrêt Jorgensen[6]. Ce moyen de défense a maintenant été reconnu par la Cour suprême dans l'arrêt Lévis (Ville) c. Tétreault, alors que le juge LeBel, s'exprimant pour la Cour, déclare :
Le juge en chef Lamer a assimilé cette défense à une excuse qui opère comme le moyen basé sur la provocation policière. Le caractère répréhensible de l'acte est établi. Cependant, le droit pénal se refuse à en imputer la responsabilité à son auteur en raison des circonstances qui l'ont produit. Le prévenu a droit alors à un arrêt des procédures plutôt qu'à un acquittement (Jorgensen, par. 37).
Après son analyse de la jurisprudence, le juge en chef Lamer définit les éléments constitutifs et les conditions d'ouverture de la défense. Il impose au prévenu l'obligation de démontrer la présence de six éléments :
(1) la présence d'une erreur de droit ou d'une erreur mixte de droit et de fait;
(2) la considération par son auteur des conséquences juridiques de l'acte accompli;
(3) le fait que l'avis obtenu provenait d'une personne compétente en la matière;
(4) le caractère raisonnable de l'avis;
(5) le caractère erroné de l'avis reçu;
(6) l'accomplissement de l'acte sur la base de cet avis.
(Jorgersen, par. 28-35)
Ce cadre d'analyse me paraît s'être imposé, bien que notre Cour ne se soit pas exprimée à son sujet dans l'arrêt Jorgersen[7].
[33] Au soutien de ce moyen de défense, l'accusé Kesodia prétend avoir été induit en erreur par le service canadien des douanes qui a permis l'importation des systèmes Dish Network, sans opposition, en percevant au passage les droits exigibles et la taxe sur les produits et services. De même, l'accusé reproche à l'Agence des services frontaliers du Canada d'avoir omis d'inclure ces systèmes de décodage dans la liste des marchandises prohibées ou à autorisation restreinte que l'on retrouve sur son site internet.
[34] Ces arguments sont sans valeur puisque l'importation de ces systèmes de décodage de signaux par satellite provenant de distributeurs américains n'est pas illégale en soi. L'importation ne devient illégale que dans la situation où ces systèmes sont importés pour être utilisés par des personnes résidant au Canada sur le territoire canadien. L'importation serait tout à fait légale si l'importateur a lui-même l'intention d'exporter ces produits à l'extérieur du Canada ou de les vendre au Canada à des personnes qui les apporteront à l'extérieur du pays pour les utiliser uniquement à l'extérieur du Canada.
[35] L'accusé Kesodia n'a pas démontré la présence des six éléments requis pour l'application de ce moyen de défense, selon le cadre d'analyse retenu par la Cour suprême.
[36] Les accusés reprochent au poursuivant d'avoir entrepris et poursuivi les procédures d'accusation dans ces dossiers, alors que la jurisprudence était contradictoire et ambiguë, et ce, même après l'arrêt de la Cour suprême du 26 avril 2002, puisque la question constitutionnelle n'a pas encore été déterminée. Ils reprochent aussi aux policiers de ne pas avoir communiqué avec leur comptable pour avoir accès aux livres de ventes de la compagnie.
[37] Dans l'arrêt Jewitt[8], la Cour suprême a reconnu l'existence de cette doctrine de common law selon laquelle une cour de justice possède le pouvoir discrétionnaire d'ordonner un arrêt des procédures contre un accusé lorsque contraindre cette personne à subir son procès, violerait les principes de justice fondamentaux qui sous-tendent le sens du franc-jeu et de décence de la communauté. L'utilisation de ce pouvoir serait nécessaire afin de prévenir une utilisation abusive des tribunaux par des procédures vexatoires et oppressives. Toutefois l'utilisation de ce pouvoir ne sera approprié que dans les cas les plus manifestes.
[38] En l'instance, il n'y a aucune procédure vexatoire et oppressive. La poursuivante est tout à fait justifiée de porter des accusations et de poursuivre les procédures pour faire appliquer une disposition législative valide et toujours en vigueur, qui n'a été ni abrogée, ni modifiée, ni invalidée par jugement final et définitif d'un tribunal compétent.
[39] Quant à l'absence de communication avec le comptable des accusés, les policiers n'ont commis aucune faute, ayant pu causer un préjudice aux accusés. Les documents comptables et livres de ventes sont en possession des accusés ou de leur comptable et peuvent être utilisés au soutien de leur défense, s'ils le jugent opportun. Il ne s'agit pas d'un cas où, en raison de la conduite de policiers, des éléments de preuve importants auraient été perdus ou détruits, ce qui compromettrait le droit d'un accusé à une défense pleine et entière.
[40] Les accusés n'ont démontré aucun abus de procédure et ce moyen doit également être rejeté.
[41] La poursuite a prouvé tous les éléments des infractions reprochées aux accusés. Les accusés ont eu en leur possession et ont importé des systèmes de décodage de signaux transmis par satellite provenant de distributeurs américains qui n'étaient pas des distributeurs légitimes autorisés au Canada.
[42]
Ils ont importé et eu en leur possession ces systèmes dans des
circonstances donnant à penser que ces systèmes étaient utilisés ou destinés à
l'être en vue d'enfreindre la prohibition édictée à l'article
[43] Les accusés connaissaient l'utilisation illégale qui en serait faite par les clients auxquels ils vendaient ou destinaient ces systèmes, ce qui démontre le caractère intentionnel des infractions reprochées.
[44] L'accusé Kesodia est l'administrateur, le président et l'actionnaire majoritaire de la compagnie S.M. Électronique Hi-Fi inc., et il a autorisé, consenti ou participé aux infractions reprochées et doit être considéré comme co-auteur des infractions commises en novembre 2003
EN CONSÉQUENCE, LA COUR :
DÉCLARE l'accusé ABDUL KESODIA coupable des infractions reprochées aux chefs 1 et 2 dans le dossier 500-73-001213-996;
DÉCLARE les accusés ABDUL KESODIA et la compagnie S.M. ÉLECTRONIQUE HI-FI INC. coupables des infractions reprochées aux chefs 1 et 2 dans le dossier 500-73-002177-042.
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__________________________________ GILLES CADIEUX, J.C.Q |
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Me Manon Lavoie Me Dennis Galiatsatos |
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Procureurs de la poursuivante |
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Me Louis Savoie |
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Procureur des accusés |
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[1] Bell ExpressVu c. R, [2002] 2 R.C.S. 555 (J. Iacobucci, par. 55).
[2] R.
c. Molis,
[3] R.
c. Forster,
[4] R.
c. Pontes,
[5] Id.
[6] R.
c. Jorgensen,
[7] Lévis (Ville) c. Tétreault, [2006] 1. R.C.S. 420, à la page 435.
[8] R.
c. Jewitt,
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