Décision

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Modèle de décision CLP - avril 2013

Michaud et Québec (Ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale)

2015 QCCLP 2847

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

22 mai 2015

 

Région :

Lanaudière

 

Dossiers :

517758-63-1307      529244-63-1312

 

Dossier CSST :

123927741

 

Commissaire :

Claude-André Ducharme, juge administratif

 

Membres :

Conrad Lavoie, associations d’employeurs

 

Christian Pitel, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Céline Michaud

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION RELATIVE À UNE REQUÊTE EN RÉVISION OU EN RÉVOCATION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 3 octobre 2014, madame Céline Michaud (la travailleuse) dépose une requête par laquelle elle demande à la Commission des lésions professionnelles de réviser une décision qu’elle a rendue le 20 août 2014.

[2]           Par cette décision, la Commission des lésions professionnelles confirme une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 29 mai 2013 à la suite d’une révision administrative et déclare que madame Michaud n’a pas droit au remboursement des frais de déneigement et de tonte du gazon (dossier 517758-63-1307).

[3]           La Commission des lésions professionnelles confirme également une autre décision de la CSST rendue le 20 novembre 2013 à la suite d’une révision administrative et déclare que madame Michaud n’a pas droit au remboursement des frais d’acquisition et d’entretien de ses chiens (dossier 529244-63-1312).

[4]           La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience le 15 mai 2015 à Joliette en présence de madame Michaud et de son frère, monsieur Richard Michaud, lequel s’est présenté comme étant son représentant. Le Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale (l’employeur) n’était pas représenté à l’audience.

L’OBJET DE LA REQUÊTE

[5]           Madame Michaud demande de réviser la décision rendue le 20 août 2014 et de déclarer qu’elle a droit au remboursement des frais de déneigement et de tonte du gazon ainsi que des frais d’acquisition et d’entretien de ses chiens.

L’AVIS DES MEMBRES

[6]           Le membre issu des associations d’employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d’avis que la requête doit être rejetée.

[7]           Ils retiennent que les conclusions auxquelles en vient la juge administrative résultent de son interprétation de la règle de droit applicable et de l’appréciation de la preuve et ils considèrent que madame Michaud n’a pas démontré que la décision rendue le 20 août 2014 comporte des vices de fond qui justifient sa révision.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[8]           La Commission des lésions professionnelles doit décider s’il y a lieu de réviser la décision rendue le 20 août 2014.

[9]          Le pouvoir de la Commission des lésions professionnelles de réviser ou de révoquer une décision qu’elle a rendue est prévu par l’article 429.56 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi), lequel se lit comme suit :

429.56. La Commission des lésions professionnelles peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu’elle a rendu :

 

1°   lorsqu’est découvert un fait nouveau qui, s’il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente;

 

2°   lorsqu’une partie n’a pu, pour des raisons jugées suffisantes, se faire entendre;

 

3°   lorsqu’un vice de fond ou de procédure est de nature à invalider la décision.

 

Dans le cas visé au paragraphe 3°, la décision, l’ordre ou l’ordonnance ne peut être révisé ou révoqué par le commissaire qui l’a rendu.

__________

1997, c. 27, a. 24.

 

 

[10]       Cet article apporte une dérogation au principe général énoncé par l’article 429.49 de la loi voulant qu’une décision de la Commission des lésions professionnelles soit finale et sans appel. Une décision ne peut être révisée ou révoquée que si l’un des motifs prévus par l’article 429.56 est établi.

[11]       Madame Michaud n’a pas invoqué un motif particulier à l’audience, mais les explications qu’elle a données font en sorte que le bien-fondé de sa requête doit être examiné en regard du troisième motif, soit celui qui autorise la révision d’une décision lorsque celle-ci comporte un vice de fond qui est de nature à l’invalider.

[12]        La jurisprudence a retenu que cette notion de « vice de fond qui est de nature à invalider la décision » est une erreur manifeste de fait ou de droit qui a un effet déterminant sur le sort du litige[2]. Elle indique de plus qu’il ne peut s’agir d’une question d’appréciation de la preuve ou d’interprétation des règles de droit parce que le recours en révision n’est pas un second appel[3].

[13]       Dans l’arrêt Bourassa c. Commission des lésions professionnelles[4], la Cour d’appel rappelle ces règles comme suit :

21.       La notion [de vice de fond de nature à invalider une décision] est suffisamment large pour permettre la révocation de toute décision entachée d’une erreur manifeste de droit ou de fait qui a un effet déterminant sur le litige. Ainsi, une décision qui ne rencontre pas les conditions de fond requises par la loi peut constituer un vice de fond.

 

22.       Sous prétexte d’un vice de fond, le recours en révision ne doit cependant pas être un appel sur la base des mêmes faits. Il ne saurait non plus être une invitation faite à un commissaire de substituer son opinion et son appréciation de la preuve à celle de la première formation ou encore une occasion pour une partie d’ajouter de nouveaux arguments1.

_______________

1.     Voir: Y. OUELLETTE, Les tribunaux administratifs au Canada, Procédure et Preuve, Montréal, Les Éditions Thémis, 1997, p. 506-508.  J.P. VILLAGI, dans Droit public et administratif, Vol. 7, Collection de droit 2002-2003, Éditions Yvon Blais, 2002, p. 127-129.

 

 

[14]        La Cour d’appel a réitéré cette position dans les arrêts Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Fontaine[5] et CSST c. Touloumi[6].

[15]        Comme l’indique la Commission des lésions professionnelles dans la décision Savoie et Camille Dubois (fermé)[7], la Cour d’appel invite la Commission des lésions professionnelles à faire preuve d’une très grande retenue dans l’exercice de son pouvoir de révision.

[16]        Cela signifie que la conclusion que retient un juge administratif de son appréciation de la preuve ou de son interprétation des règles de droit ne peut pas être révisée à moins qu’il ne soit établi qu’elle est fondée sur une erreur manifeste et déterminante.

[17]        Rappelons brièvement les éléments suivants du dossier. Au début des années 2000, alors qu’elle occupait un emploi d’enquêteuse chez l’employeur, madame Michaud a été victime de menaces de la part d’individus soupçonnés de fraude. Elle a subi un stress post-traumatique que la CSST a reconnu comme lésion professionnelle en retenant le 5 avril 2003 comme date de la lésion. Celle-ci a été consolidée le 3 mars 2006 sans séquelles permanentes.

[18]        Le 26 septembre 2006, madame Michaud subit une récidive, rechute ou aggravation dont le diagnostic est celui de stress post-traumatique chronique, trouble somatoforme et trouble de conversion. La lésion est consolidée le 3 juillet 2009 avec une atteinte permanente à l’intégrité psychique de 60,75 % et des limitations fonctionnelles qui amènent la CSST à reconnaître à madame Michaud le droit de recevoir l’indemnité de remplacement du revenu jusqu’à l’âge de 68 ans.

[19]        Le rapport d’évaluation médicale qui est à l’origine de ces décisions de la CSST provient du psychiatre traitant de madame Michaud, le docteur Martin Thibodeau. La juge administrative qui a rédigé la décision du 20 août 2014 réfère à ce rapport dans les termes suivants :

[18]      Pour revenir au Rapport d’évaluation médicale du docteur Thibodeau, on y lit qu’au moment de la consolidation, la travailleuse a des manifestations importantes du stress post-traumatique, à savoir des réminiscences, des symptômes d’évitement phobique, des symptômes traduisant une activation neurovégétative et de multiples plaintes somatiques. Elle consomme toujours des médicaments à savoir du Zoloft (200 mg) et du Seroquel. Le suivi psychologique se poursuit hebdomadairement.

 

[19]      Le médecin note également que la travailleuse éprouve une grande fatigabilité qui la contraint notamment pour diverses tâches domestiques dont la tonte du gazon. Cette tâche doit être faite sur deux jours. La travailleuse mentionne également sa peur d’être attaquée, notamment lorsqu’elle est occupée à l’extérieur de son domicile, ce qui explique la présence nécessaire de ses chiens afin qu’ils la protègent. Il octroie un déficit anatomophysiologique de 45 % pour un syndrome névrotique de groupe 3 (grave).

 

[20]      Le docteur Thibodeau poursuit en notant une multitude de situations dans lesquelles la travailleuse craint pour sa sécurité et qui l’empêchent d’évoluer de manière normale en société. Plusieurs troubles d’attention ou de fatigabilité sont relatés. Le médecin rapporte que la travailleuse a abandonné des cours d’agilité canine parce que c’était trop demandant physiquement. Ce résumé suffit pour le moment. Nous reviendrons sur les notes plus contemporaines du docteur Thibodeau concernant les litiges dont le tribunal est saisi.

 

 

[20]        La juge administrative mentionne ce qui suit concernant les réclamations qui faisaient l’objet du litige.

[22]      À l’audience, la travailleuse témoigne sur les faits entourant les réclamations dont le tribunal est saisi.

 

[23]      À propos des chiens, elle mentionne avoir fait l’achat du premier en 2001. À la fin de l’année 2002, elle l’a confié à une amie notamment parce qu’elle était incapable, selon ses dires, de le sortir à l’extérieur. Cette situation perdure jusqu’en 2006, année où elle reprend le chien prêté à son amie qui ne peut plus le garder et où elle décide d’en acheter un deuxième. En février 2007, elle achète un troisième chien qu’elle garde dans son lit, sans quoi, elle ne dort pas.

 

[24]      La travailleuse explique que le besoin d’avoir des chiens coïncide avec le fait, qu’en 2006, son ex-conjoint a cessé ses visites au domicile, ce qu’il faisait régulièrement afin de s’assurer que tout allait bien pour elle et leur fille dont elle avait la garde. Il l’aidait aussi à entretenir son domicile. Quand ces visites ont cessé, elle a senti le besoin d’avoir les chiens. Elle s’est occupée de les entraîner comme gardien, du moins pour deux d’entre eux. Leur présence lui permet également de sortir, de marcher à l’extérieur, de se rendre à l’épicerie, etc.

 

[25]      Concernant la tonte du gazon et le déneigement, la travailleuse affirme qu’elle s’occupait de ces travaux antérieurement. Elle a acheté sa maison en 2003 et elle y habite toujours avec sa fille. Néanmoins, elle affirme que ces tâches prenaient plusieurs heures à être exécutées en raison des douleurs ou des étourdissements qu’elle éprouvait. Elle devait demander l’aide des voisins ou celle de son ex-conjoint pour les faire. Depuis 2010, elle a donné ces travaux à forfait.

 

 

[21]        La juge administrative décide que madame Michaud n’a pas droit au remboursement des frais de déneigement et de tonte du gazon parce que l’article 165 de la loi prévoit le remboursement de frais d’entretien courant du domicile en présence d’une atteinte permanente physique. Elle écrit :

[90]      En l’espèce, malgré le témoignage du docteur Nowakowski qui a expliqué comment les troubles psychiques de la travailleuse ont des répercussions sur sa capacité à effectuer des travaux comme la tonte du gazon ou le déneigement, il demeure qu’elle n’y a pas droit.

 

[91]      En effet, la travailleuse ne conserve aucune atteinte permanente physique à la suite de ses lésions professionnelles. À ce titre, son représentant a reconnu que les douleurs physiques, bien qu’elles soient mentionnées au Rapport d’évaluation médicale du docteur Thibodeau, n’ont pas été reconnues par la CSST. En conséquence, elle n’a pas droit au remboursement qu’elle réclame pour les frais d’entretien.

 

 

[22]        Elle réfère à une décision de la Commission des lésions professionnelles qui va dans ce sens.

[23]        En ce qui concerne la demande de madame Michaud d’être remboursée pour les frais reliés à ses chiens, la juge administrative estime que cette demande doit être analysée à titre de mesure de réadaptation sociale à laquelle elle aurait droit dans le contexte de la récidive, rechute ou aggravation du 26 septembre 2006.

[24]        Au départ, en référant à une décision de la Commission des lésions professionnelles, elle refuse la demande de remboursement parce que celle-ci a été faite plus de quatre ans après la consolidation de la lésion professionnelle et que, si un plan de réadaptation a été mis en place à l’époque, il n’y a aucune preuve de circonstances nouvelles justifiant de le modifier.

[25]        La juge administrative poursuit :

[100]    Quoi qu’il en soit, même si la travailleuse avait produit sa demande avant 2013, le tribunal l’aurait refusé pour les motifs suivants.

 

[101]    La jurisprudence du tribunal a indiqué, à plus d’une reprise, que la liste prévue à l’article 152 de la loi n’est pas exhaustive et que d’autres mesures peuvent être tenues en compte pour aider à la réadaptation sociale d’un travailleur8. De l’avis du tribunal, l’achat d’un chien et les frais qui s’y rattachent peuvent constituer une telle mesure comme cela a été décidé dans la seule décision rendue par le tribunal à ce sujet et qui a été déposée par le représentant de la travailleuse, soit l’affaire Gauthier et 2745992 Canada inc.9.

 

[102]    Dans cette affaire, la Commission des lésions professionnelles devait décider du droit du travailleur au remboursement du coût d’achat d’un chien dressé. Il était aux prises avec un déficit anatomophysiologique physique de 84 % et porteur de limitations de classe 4 de l’IRSST. De plus, le travailleur conservait un déficit anatomophysiologique psychique de 15 %. Enfin, il était atteint d’une surdité professionnelle pour laquelle il s’était vu octroyer une atteinte permanente à l’intégrité physique de 72 %.

 

[103]    Il demande à la CSST le remboursement du coût d’acquisition d’un chien dressé pour le sécuriser et lui tenir compagnie. La présence du chien lui permettrait aussi de savoir si un téléphone sonne ou si un visiteur se présente chez lui. Enfin, il précise qu’il possédait déjà un chien qui était décédé peu de temps auparavant. Son remplacement lui permettrait de sortir plus souvent à l’extérieur tout en étant rassuré.

 

[104]    On le voit, les circonstances rapportées dans cette affaire sont différentes de celles qui nous occupent, le travailleur ayant, d’une part, déjà eu un chien dressé au moment où il demande son remplacement. De plus, il est porteur d’atteintes physiques non négligeables et il a démontré que l’animal pouvait être utile pour compenser certaines d’entre elles. Il est vrai que la Commission des lésions professionnelles souligne, dans cette affaire, le caractère protectif et socialisant de la mesure qu’elle accorde, mais le tribunal est d’avis que c’est l’ensemble des conditions très particulières du travailleur, comme cela est souligné, qui a permis d’accueillir sa réclamation.

 

[105]    En l’espèce, les faits se présentent différemment. En effet, le tribunal retient que, de manière contemporaine à l’événement d’origine, survenu en 2000, la travailleuse n’a pas senti le besoin de s’acheter un chien avant l’an 2001 et qu’elle s’en est départie dès l’année 2002. La travailleuse prétend qu’elle était incapable de sortir le chien à cette époque, mais le tribunal constate qu’elle avait repris son travail à ce moment-là, ce qui semble incohérent avec l’allégation d’une incapacité à s’occuper du chien. Quoi qu’il en soit, le fait de se départir du chien durant quatre années ne démontre pas le besoin de protection et de socialisation exprimé par la travailleuse à l’audience ni les avis des docteurs Thibodeau et Nowakowski à ce sujet tout au moins pour cette époque.

 

[106]    Arrive l’année 2006 durant laquelle la travailleuse récupère son animal vraisemblablement parce que son amie ne souhaitait plus le garder. Elle tente d’expliquer cette reprise par les visites plus espacées de son ex-conjoint, mais le tribunal ne retient pas une telle explication. En effet, il n’y a aucune preuve probante que l’ex-conjoint habitait avec elle et qu’une séparation serait survenue en 2006. Le fait que les visites aient cessé ou qu’elles aient été espacées ne justifie pas la demande de la travailleuse. Rappelons également, qu’à cette époque la travailleuse occupait toujours ses tâches et que la lésion professionnelle n’était pas consolidée. Il est ainsi difficile de justifier une telle mesure à titre de réadaptation sociale.

 

[107]    Ajoutons que la lecture des notes du docteur Thibodeau pour l’année 2008 ne permet pas d’apprendre que la présence des chiens soit utile à titre de mesure de réadaptation ou autrement. Au surplus, au Rapport d’évaluation médicale qu’il signe, en 2009, il reprend uniquement les propos de la travailleuse selon lesquels elle attache souvent son chien à l’extérieur lorsqu’elle est occupée à tondre le gazon et qu’elle ressent alors un sentiment de protection. Toutefois, nulle part il n’est démontré que la travailleuse a fait dresser les chiens pour sa protection. Elle a plutôt choisi des cours d’agilité canine ce qui semble être un objectif différent de celui d’une protection animale.

 

[108]    Cette preuve n’est donc pas probante quant à la nature du lien entre la présence des chiens et la lésion professionnelle. Ajoutons que l’attention du tribunal n’a pas été attirée sur des notes subséquentes dans lesquelles cette question aurait été analysée.

 

[109]    Concernant l’aspect socialisant des chiens, le tribunal note que, de manière contemporaine à la rédaction du Rapport d’évaluation médicale, la psychologue Normandin n’est pas nécessairement d’accord avec les conclusions du docteur Thibodeau concernant la capacité pour la travailleuse de retourner travailler. De plus, elle indique clairement que celle-ci est plus fonctionnelle qu’elle ne le dit. C’est exactement la conclusion à laquelle le tribunal en arrive après avoir pris connaissance du dossier et avoir entendu la travailleuse.

 

[110]    De plus, le 5 juin 2012, la psychologue Normandin rédige un rapport dans lequel elle indique que la travailleuse a connu des changements significatifs de sa condition. Au niveau social, elle a élargi son cercle, elle s’efforce d’échanger avec ses voisins et elle a aidé sa fille qui vivait le deuil de son père. Ces propos, que la soussignée juge dignes de foi, ne coïncident pas avec les observations du docteur Thibodeau et Nowakowski lorsqu’ils affirment que les chiens sont nécessaires à la socialisation de la travailleuse. Manifestement, le suivi thérapeutique a joué un rôle important à ce chapitre et le fait de promener des chiens peut aider en ce sens, mais pas au point où la travailleuse, les docteurs Nowakowski et Thibodeau ainsi que son représentant le prétendent.

 

[111]    Le tribunal, par ces commentaires, ne cherche pas à écarter les nombreux constats des médecins concernant l’état psychique de la travailleuse et la multitude de symptômes qui s’y rattache, mais il est d’avis que la présence des chiens ne remplit pas la fonction qu’ils leur attribuent plusieurs années après qu’elle en ait fait l’acquisition.

 

[112]    Devant une telle preuve, la soussignée est d’avis que la travailleuse n’a pas démontré de manière probante que la CSST devait défrayer les coûts rattachés à ses chiens. Le tribunal ne nie pas que les chiens fassent partie de sa vie comme pour de nombreuses personnes dans la société, mais il y a absence de preuve qu’ils puissent l’aider à surmonter les conséquences personnelles et sociales de la lésion professionnelle. La séquence des événements et les propos de la psychologue Normandin ne permettent pas de conclure en ce sens.

 

[113]    Pour les mêmes motifs, le tribunal ajoute qu’il ne peut octroyer le remboursement des frais réclamés par le biais du cinquième paragraphe de l’article 184 de la loi.

__________

8               Mathieu et Désourdy Duranceau ent. Inc., C.L.P. 112847-62A-9903, 14 septembre 1999, J. Landry; Julien et Construction Nationair inc. (fermé), C.L.P. 120819-32-9907, 7 août 2000, G. Tardif; Letendre et Relizon Canada inc., [2004] C.L.P. 1769; Du tremble et Toitures Protech, C.L.P. 239633-64-0407, 20 juin 2005, R. Daniel.

9               C.L.P. 377310-71-0905, 16 juin 2010, M. Zigby (révision rejetée, 2011 QCCLP 2832). [sic]

 

 

[26]        Dans la requête qu’elle a déposée à la Commission des lésions professionnelles, madame Michaud soumet des arguments visant à établir qu’elle a droit au remboursement des frais de déneigement et de tonte du gazon ainsi que des frais reliés à ses chiens. Elle commente également certains passages de la décision du 20 août 2014 et note une erreur que la juge administrative aurait commise relativement à la cohabitation avec son ex-conjoint, mais elle n’identifie aucune erreur manifeste qui aurait pu avoir un effet déterminant sur la décision rendue.

[27]        Elle a transmis avec sa requête plus de 150 pages de différents documents médicaux qui sont déjà au dossier ou, s’ils n’y sont pas, ne peuvent être pris en considération étant donné que le recours en révision ne permet pas le dépôt de nouveaux éléments de preuve.

[28]        Madame Michaud a également déposé à la Commission des lésions professionnelles le 7 mai 2015 et lors de l’audience du 15 mai, deux autres piles de documents du même genre accompagnés de commentaires.

[29]        Lors de l’audience, madame Michaud a donné des explications sur les événements survenus au début des années 2000 qui sont à l’origine de sa lésion professionnelle ainsi que sur les problèmes psychiques et physiques qu’elle rencontre et qui font en sorte, selon elle, qu’elle a droit au remboursement des frais qu’elle réclame.

[30]        Bien qu’invitée à le faire à différentes reprises, madame Michaud n’a pas identifié d’erreurs manifestes dans la décision du 20 août 2014 et elle n’a même pas abordé celle-ci.

[31]        Elle a déposé des décisions de la Commission des lésions professionnelles, mais celles-ci ne sont d’aucune utilité à son recours.

[32]        De toute évidence, madame Michaud a déposé sa requête en révision parce qu’elle est insatisfaite des conclusions retenues par la juge administrative et qu’elle veut obtenir une décision lui étant favorable, mais cette situation ne peut pas donner ouverture à la révision de la décision.

[33]        Dans la mesure où les conclusions auxquelles en arrive la juge administrative résultent de son interprétation de l’article 165 de la loi en ce qui concerne les frais de déneigement et de tonte du gazon et de son appréciation de la preuve en ce qui a trait aux frais reliés aux chiens, et étant donné qu’aucune erreur manifeste et déterminante n’a été identifiée, la Commission des lésions professionnelles en vient à la conclusion que la requête en révision de madame Michaud doit être rejetée.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête en révision de madame Céline Michaud.

 

 

__________________________________

 

Claude-André Ducharme

 

 

 

 

Richard Michaud

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Jean Hébert

ROBITAILLE, TANGUAY (JUSTICE-QUÉBEC)

Représentant de la partie intéressée

 



[1]           RLRQ, c. A-3.001.

[2]           Produits forestiers Donohue inc. et Villeneuve, [1998] C.L.P. 733; Franchellini et Sousa, [1998] C.L.P. 783.

[3]           Sivaco et C.A.L.P., [1998] C.L.P. 180; Charette et Jeno Neuman & fils inc., C.L.P. 87190-71-9703, 26 mars 1999, N. Lacroix.

[4]           [2003] C.L.P. 601 (C.A.).

[5]           [2005] C.L.P. 626 (C.A.).

[6]           C.A. 500-09-015132-046, 6 octobre 2005, jj. Robert, Morissette, Bich.

[7]           C.L.P. 224235-63-0401, 12 janvier 2006, L. Nadeau.

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