Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Montréal

5 octobre 2005

 

Région :

Montréal

 

Dossier :

266312-72-0507

 

Dossier CSST :

127636959

 

Commissaire :

Lucie Couture, avocate

 

Membres :

Michel Gauthier, associations d’employeurs

 

Marcel Desrosiers, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Luis Alexander Chamorro Lopez

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Holiday Inn Crown Plaza

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 7 juillet 2005, monsieur Luis Alexander Chamorro Lopez (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision rendue le 20 juin 2005, par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]                Par cette décision, la CSST confirme celle rendue initialement le 24 mai 2005 et déclare que l’assignation temporaire proposée par Holiday Inn Crown Plaza (l’employeur) respecte les conditions prescrites par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

[3]                Le travailleur est présent à l’audience tenue à Montréal, le 22 septembre 2005. L’employeur est présent et représenté.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[4]                Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que l’assignation temporaire proposée par l’employeur ne respecte pas les conditions prévues à la loi et qu’en conséquence, il a droit à l’indemnité de remplacement du revenu.

L’AVIS DES MEMBRES

[5]                Le membre issu des associations d’employeurs, monsieur Michel Gauthier, est d’avis de rejeter la requête du travailleur. Il est d’avis que l’assignation proposée par l’employeur respecte les conditions prévues à la loi. Par conséquent, le travailleur était tenu de la faire. Il n’a donc pas droit aux prestations prévues par la loi.

[6]                Le membre issu des associations syndicales, monsieur Marcel Desrosiers, est d’avis de faire droit à la requête du travailleur. Il est d’avis que les conditions prévues à l’article 179 de la loi ne sont pas rencontrées. Par conséquent, le travailleur n’était pas tenu de faire l’assignation proposée par l’employeur et il a donc droit aux prestations prévues par la loi.

LES FAITS ET LES MOTIFS

[7]                La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si l’assignation temporaire proposée par l’employeur respecte les conditions prévues à la loi et si, par conséquent, le travailleur était tenu de la faire.

[8]                Le tribunal retient du dossier que le 21 janvier 2005, le travailleur subit un accident du travail au cours duquel il s’inflige, entre autres, une blessure à l’épaule avec une déchirure de la longue portion du biceps.

[9]                Le 2 février 2005, le médecin du travailleur, le docteur Dugas, donne son accord avec une assignation temporaire à un travail restreint ne demandant pas à l’employé de se servir de sa main ou bras blessé dans l’exécution de ses tâches. Aux trois questions inscrites sur le formulaire prévu par la CSST, le médecin répond par l’affirmative.

[10]           Le 21 février 2005, le docteur Dugas recommande un arrêt du travail tout en dirigeant le travailleur en orthopédie.

[11]           Le 16 mars 2005, le docteur Isler recommande un arrêt de travail tout en dirigeant le travailleur en physiothérapie.

[12]           Le 13 avril 2005, le docteur Isler réfère le travailleur au docteur Blanchette tout en maintenant l’arrêt de travail.

[13]           Le 4 mai 2005, l’employeur écrit au docteur Marc Isler afin de lui demander si le travailleur peut faire l’assignation temporaire (travaux légers) en attendant la confirmation du docteur Blanchette pour savoir s’il doit être réopéré. L’employeur suggère comme assignation temporaire, du travail de bureau, répondre au téléphone et coordination des activités. Le médecin écrit sur cette lettre qu’il est d’accord. Il faut préciser que dans cette lettre, l’employeur ne demande pas au médecin s’il considère que ce travail favorise la réadaptation du travailleur ni si ce travail ne comporte pas de danger pour la santé et la sécurité du travailleur compte tenu de sa lésion. Il ne s’agit pas en fait du formulaire proposé par la CSST pour les assignations temporaire, mais simplement d’une lettre adressée au médecin du travailleur.

[14]           Le 12 mai 2005, l’employeur demande au médecin traitant si le travailleur peut être assigné temporairement à un autre travail.

[15]           Le 16 mai 2005, le travailleur conteste l’assignation temporaire en évoquant le fait que l’horaire proposé ne respecte pas son quart de travail habituel, qui est de soir.

[16]           Le 17 mai 2005, une rencontre a lieu sur les lieux du travail où sont présents le travailleur, le président du syndicat, le représentant de l’employeur et le conseiller en réadaptation de la CSST. Lors de cette rencontre, l’employeur modifie le quart de travail et le travailleur est informé qu’il doit débuter l’assignation temporaire le 18 mai au soir. Le travailleur ne se présente pas.

[17]           Le 17 mai 2005, le travailleur écrit une lettre à la CSST dans laquelle il manifeste son désaccord avec l’assignation proposée. Il évoque comme motif de refus, le fait qu’il présente des attaques de porphyrie qui sont, selon lui, aggravées en période de stress. Il évoque aussi le fait d’une attitude hostile à son égard tant de la part de son employeur que de son syndicat. Il estime donc que ce milieu hostile n’est pas favorable à sa réadaptation dans la lettre qu’il écrit à la CSST.

[18]           Le 24 mai 2005, la CSST rend une décision dans laquelle elle déclare que l’assignation temporaire respecte les conditions prévues par la loi à savoir, que ce travail est favorable à la réadaptation du travailleur, qu’il ne comporte pas de danger pour la santé, la sécurité et l’intégrité du travailleur, compte tenu de sa lésion que le travailleur est raisonnablement en mesure de l’accomplir. Elle informe le travailleur qu’il doit la faire.

[19]           Le 27 mai 2005, le travailleur présente sa démission à son employeur. Il communique cette information à la CSST dans une lettre.

[20]           Le 20 juin 2005, la CSST, à la suite d’une révision administrative, confirme la décision du 24 mai 2005 et déclare l’assignation temporaire conforme à la loi.

[21]           Le 30 juin 2005, le travailleur conteste cette décision d’où la présente requête.

[22]           Lors de l’audience, le travailleur n’a soumis aucun argument en regard de la conformité de la procédure d’assignation temporaire faite par son employeur. Il a plutôt réitéré son incapacité à accomplir les tâches de l’assignation temporaire en évoquant le fait qu’il se sentait harcelé par son employeur, que cette situation lui causait beaucoup de stress et qu’il ne se sentait donc pas capable psychologiquement d’accomplir le travail proposé. Le travailleur a également évoqué le fait qu’il devait s’habituer à l’idée de ne plus retrouver la fonction normale de son bras et au fait qu’il devrait probablement être opéré. Il a aussi réitéré l’effet néfaste du stress en regard de sa maladie personnelle de porphyrie. Aucun certificat médical n’a cependant été présenté. Le travailleur a indiqué être toujours en attente de passer un nouvel examen par résonance magnétique et en attente d’un rendez-vous avec le docteur Blanchette. Finalement, le travailleur précise avoir demandé un congé sans solde plutôt qu’avoir à faire l’assignation temporaire, le temps qu’il se remette psychologiquement et physiquement. Ce congé lui a été refusé par son employeur. Le travailleur précise ne plus revoir le docteur Dugas. Il attend un rendez-vous avec le docteur Blanchette. Il ne travaille pas ailleurs malgré le fait qu’il ait démissionné de chez l’employeur. Il ajoute que ses indemnités de remplacement du revenu ont d’abord été coupées. Elles ont été rétablies par la suite. Il indique qu’en date des présentes, il se sentirait capable de faire le travail proposé n’eut été de sa démission.

[23]           L’employeur soumet, quant à lui, n’avoir nullement fait de harcèlement à l’encontre du travailleur. Il a simplement demandé au travailleur de faire un travail léger comme le lui permet la loi. Il soumet s’être conformé aux demandes du travailleur quant au respect de son quart de travail. Lors de la rencontre avec la CSST, le travailleur n’a opposé aucune autre raison justifiant son refus de faire l’assignation temporaire proposée. L’employeur soumet donc que le travailleur devait accomplir ce travail. Il soumet au surplus être dépourvu de moyens dans ce cas précis, puisque le travailleur a présenté sa démission. Il n’a donc pu l’assigner après cette démission.

[24]           Les articles 179 et 180 de la loi traitent de la question de l’assignation temporaire. Ils se lisent comme suit :

179. L'employeur d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle peut assigner temporairement un travail à ce dernier, en attendant qu'il redevienne capable d'exercer son emploi ou devienne capable d'exercer un emploi convenable, même si sa lésion n'est pas consolidée, si le médecin qui a charge du travailleur croit que:

1°   le travailleur est raisonnablement en mesure d'accomplir ce travail;

 

2°   ce travail ne comporte pas de danger pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion; et

 

3°   ce travail est favorable à la réadaptation du travailleur.

 

Si le travailleur n'est pas d'accord avec le médecin, il peut se prévaloir de la procédure prévue par les articles 37 à 37.3 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S-2.1), mais dans ce cas, il n'est pas tenu de faire le travail que lui assigne son employeur tant que le rapport du médecin n'est pas confirmé par une décision finale.

__________

1985, c. 6, a. 179.

 

 

180. L'employeur verse au travailleur qui fait le travail qu'il lui assigne temporairement le salaire et les avantages liés à l'emploi que ce travailleur occupait lorsque s'est manifestée sa lésion professionnelle et dont il bénéficierait s'il avait continué à l'exercer.

__________

1985, c. 6, a. 180.

 

 

[25]           Si un travailleur est en désaccord avec l’assignation proposée par son employeur, il doit se prévaloir des articles 37 à 37.3 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail[2], auxquels réfère l’article 179 de la loi. Ces articles se lisent, par ailleurs, comme suit :

            Demande au comité de santé et de sécurité

37.     Si le travailleur croit qu’il n’est pas raisonnablement en mesure d’accomplir les tâches auxquelles il est affecté par l’employeur, il peut demander au comité de santé et de sécurité, ou à défaut de comité, au représentant à la prévention et à l’employeur d’examiner et de décider la question en consultation avec le médecin responsable des services de santé de l’établissement ou, à défaut de médecin responsable, avec le directeur de santé publique de la région où se trouve l’établissement.

 

            Absence de comité.

S’il n’y a pas de comité ni de représentant à la prévention, le travailleur peut adresser sa demande directement à la Commission.

 

            Décision.

La Commission rend sa décision dans les 20 jours de la demande et cette décision a effet immédiatement, malgré une demande de révision.

____________

1979, c. 63, a. 37; 1985, c. 6, a. 525; 1992, c. 21, a. 302; 2001, c. 60, a. 167.

 

 

            Révision.

37.1.  Une personne qui se croit lésée par une décision rendue en vertu de l’article 37 peut, dans les 10 jours de sa notification, en demander la révision par la Commission conformément aux articles 358.1 à 358.5 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (chapitre A-3.001).

____________

1985, c. 6, a. 525; 1997, c. 27, a. 37.

 

 

            Procédure urgente.

37.2.  La Commission doit procéder d’urgence sur une demande de révision faite en vertu de l’article 37.1.

 

            Effet immédiat.

La décision rendue par la Commission sur cette demande a effet immédiatement, malgré qu’elle soit contestée devant la Commission des lésions professionnelles.

____________

1985, c. 6, a. 525; 1997, c. 27, a. 38.

 

 

            Contestation.

37.3.  Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission à la suite d’une demande faite en vertu de l’article 37.1 peut, dans les 10 jours de sa notification, la contester devant la Commission des lésions professionnelles.

____________

1985, c. 6, a. 525; 1992, c. 11, a. 48; 1997, c. 27, a. 39.

 

 

[26]           Le tribunal constate que lorsque le médecin du travailleur est d’accord avec une assignation temporaire mais que le travailleur n’est pas d’accord avec lui, le travailleur doit suivre la procédure prévue par la Loi sur la santé et la sécurité du travail pour tenter d’obtenir du Comité paritaire ou de la CSST une décision à l’effet contraire. Le travailleur ou l’employeur insatisfait de la décision peut en demander la révision à la CSST, ce qui fut fait en l’instance par le travailleur.

[27]           À la suite de la décision rendue par la CSST, à la suite d’une révision administrative, le travailleur ou l’employeur insatisfait doit contester cette décision devant la Commission des lésions professionnelles dans les dix jours de sa réception, ce qui fut également fait en l’instance par le travailleur.

[28]           Le tribunal considère que la question en litige se pose en regard de deux situations différentes. Il devra donc analyser la situation en regard de ces deux situations. La première question soulevée par le travailleur touche à sa capacité physique et psychologique d’exercer l’emploi proposé par l’employeur, à titre d’assignation temporaire. Il soumet, en effet, vivre une situation de stress qui peut occasionner une crise de porphyrie. De plus, il évoque que sa condition psychologique ne lui permettait pas d’accomplir le travail proposé.

[29]           Le tribunal constate que le travailleur n’a pas établi, de façon prépondérante, avoir subi du harcèlement de la part de son employeur. Il ne suffit pas d’évoquer du harcèlement pour le prouver. Le seul fait pour un employeur de demander au travailleur de faire une assignation temporaire ne peut être qualifié de harcèlement. Il s’agit d’un droit pour l’employeur qui peut ou non l’exercer.

[30]           Le tribunal est aussi d’avis que le travailleur n’a pas non plus établi, par une preuve médicale, qu’il était médicalement impossible pour lui de faire l’assignation proposée par son employeur. Aucun certificat médical n’a été mis en preuve. Il n’a pas établi que le travail proposé par son employeur était incompatible avec son état de santé personnel, tant au plan physique, que psychologique. Par conséquent, le tribunal ne peut convenir qu’il n’était pas en mesure de faire l’assignation proposée par son employeur.

[31]           Le tribunal doit ensuite se demander si la procédure d’assignation temporaire est conforme à la loi.

[32]           En vertu des dispositions de l’article 179 précité, pour être conforme, l’assignation temporaire doit être faite selon les dispositions qui sont énoncées à cet article.

[33]           À cet égard, la soussignée partage le point de vue exprimé par la commissaire Desbois, en regard des principes jurisprudentiels touchant à l’interprétation à donner à cet article 179. La commissaire Desbois s’exprime ainsi dans la décision, Premier Tech Industriel Ltée et Carrier[3] :

« […]

 

[34] Une revue de la jurisprudence sur la question permet, malgré quelques divergences, de dégager certains principes quant à l’interprétation à donner à l’article 179 de la loi, et même de rallier certaines positions à première vue opposées.  Ainsi, il ressort que l’assignation temporaire a pour objectif premier de favoriser la réadaptation du travailleur3, quoique, dans certaines décisions, on reconnaisse également celui de permettre à l’employeur de limiter les coûts de la lésion professionnelle4.

 

[35] En outre, il est généralement reconnu qu’un employeur doit préciser au médecin le travail spécifique qu’il entend assigner au travailleur, afin que le médecin puisse se prononcer à savoir si ce travail rencontre les critères énoncés à l’article 179 de la loi5.

 

[36] Par contre, on n’exige pas toujours que l’avis du médecin soit consigné sur le formulaire administratif prévu par la CSST, ni qu’il soit écrit, ni même qu’il comporte une réponse spécifique à chacune des trois questions reliées aux critères de l’article 1796.

 

[37] Finalement, une assignation temporaire semble devoir être favorable en regard de la réadaptation médicale mais également sociale et professionnelle du travailleur pour être considérée respecter l’article 179 de la loi7. Par contre, le seul fait qu’une assignation ne plaise pas à un travailleur n’est pas suffisant pour conclure que celle-ci n’est pas favorable à sa réadaptation8. Il y aurait ainsi, en quelque sorte, une présomption de faits
selon laquelle le fait pour un travailleur de retourner sur le marché du travail, particulièrement dans son milieu de travail, est favorable à sa réadaptation.

____________

3    Pièces d’auto Kenny inc. et C.S.S.T., [1998] C.L.P. 259 ; C.U.S.E. et Boilard, C.L.P. 124038-05-9909, 11 avril 2000, F. Ranger.

4       Komatsu international inc. et Gagnon, [1999] C.L.P. 130 ; Rivard et C.L.S.C. des trois vallées, [1999] C.L.P. 619 .

5    Société canadienne des postes et Thibault, [1987] C.A.L.P. 377 ;  Mueller Canada inc. et Lavoie, [1987] C.A.L.P. 506 ;  Jonquière et Corneau, [1989] C.A.L.P. 14 ;  Bourgault et Marcel Lauzon inc. [1992] C.A.L.P. 188 ;  Bombardier inc. et Côté, C.A.L.P. 35904 - 0-9201, 17 novembre 1993, M. Lamarre;  J.M. Asbestos inc. et Marcoux, C.A.L.P. 72559-05-9508, 26 juillet 1996, C. Demers;  Métallurgie Brasco inc. et Jomphe, C.L.P. 114861-01B-9904, 16 juin 2000, C. Bérubé;  Permafil ltée et Fournier, C.L.P. 148090‑03B-0010, 28 février 2001, M. Cusson.

6    Ville de Laval et Lalonde, C.A.L.P. 22936-61-9011, 20 juin 1991, M. Duranceau; Bourassa et Hydro-Québec, C.L.P. 111311-04-9903, 22 septembre 2000, M. Carignan.

7    Labonté et Prévost Car inc., C.A.L.P. 40654-03-9206, 27 novembre 1992, R. Ouellet; Desrochers et J.M. Asbestos inc., C.L.P. 110825-05-9902, 16 août 1999, F. Ranger.

8    Létourneau et Agrégats Dany Morissette inc., C.L.P. 124923-04-9910, 23 novembre 1999, A. Vaillancourt;  Fortier et A.F.G. Industries ltée, C.L.P. 116416-32-9905, 23 écembre 1999, G. Tardif;  Blier et Olymel Princeville, C.L.P. 125927-04B-9911, 23 ai 2000, P. Brazeau;  Pouliot et J.M. Asbestos inc., [2000] C.L.P. 1128 ;  Fortin et Accessoires d’ameublement AHF ltée, C.L.P. 146022-72-0009, F. Juteau. »

 

 

[34]           Qu’en est-il cependant en l’espèce?

[35]           Le tribunal constate qu’en mai 2005, l’employeur procède d’une façon différente de celle effectuée en février 2005. Il écrit une lettre au nouveau médecin qui a charge du travailleur, le docteur Isler, dans laquelle il demande simplement au médecin si le travailleur peut faire l’assignation temporaire (travaux légers), en attendant la consultation du docteur Blanchette. Sur cette lettre, l’employeur suggère comme assignation temporaire, un travail de bureau, répondre au téléphone et un travail de coordination des activités (inspection des chambres).

[36]           Le tribunal note qu’une mention « D’accord » apparaît sur la lettre, accompagnée d’une signature qui semble être celle du docteur Isler puisqu’elle est identique à celle se retrouvant sur les rapports médicaux au dossier. Le médecin ne donne toutefois pas son avis à savoir si ces postes répondent en tout point aux trois conditions énoncées à l’article 179 de la loi.

[37]           Cette opinion a été jugée conforme par la CSST puisque cette dernière rendait la décision du 24 mai 2005, qui a fait l’objet d’une décision par l’instance de révision de la CSST. Cette dernière décision ne discute cependant pas de cette question.

[38]           Le tribunal partage l’opinion de la commissaire Desbois, à l’effet qu’il n’est pas toujours nécessaire que le médecin donne son avis sur le formulaire de la CSST, ni que cet avis soit empreint d’un formalisme rigoureux. Il faut cependant que la preuve démontre que le médecin ait eu l’occasion de donner son opinion en regard d’une telle assignation temporaire.

[39]           En l’espèce, le tribunal est d’avis que le médecin a pu manifester son accord avec l’assignation proposée par l’employeur. L’avis qu’il exprime respecte ainsi l’esprit de l’article 179. Le tribunal estime que si le médecin avait été en désaccord avec les tâches proposées par l’employeur, il aurait pu manifester ce désaccord en refusant d’entériner les tâches proposées par l’employeur. S’il avait eu un doute sur les capacités du travailleur de les faire, il aurait pu questionner l’employeur sur ces tâches. De plus, si le travailleur avait un doute quant à l’avis exprimé par son médecin, il aurait pu soumettre, à l’audience, une attestation ou autre document médical de ce médecin, dans lequel ce dernier aurait infirmé l’avis donné en mai 2005. Cela n’a pas été fait.

[40]           Au surplus, le tribunal estime que le fait que l’employeur ait mentionné qu’il ne s’agissait pas de n’importe quels travaux légers, mais bien d’une assignation temporaire, laisse penser que le médecin était au courant que son avis visait cette situation particulière avec les conditions qu’elle impose.

[41]           Comme le tribunal estime que l’assignation respecte les conditions prévues à la loi, il est donc d’avis que le travailleur devait faire le travail proposé par son employeur.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête de monsieur Luis Alexander Chamorro Lopez;

CONFIRME la décision rendue le 20 juin 2005, par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE que l’assignation temporaire proposée par l’employeur, le 17 mai 2005 respecte les conditions prévues à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles et que le travailleur était donc tenu de faire les tâches proposées.

 

 

__________________________________

 

Me Lucie Couture

 

Commissaire

 

M. Mounir Greiss

Représentant de la partie intéressée

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]          L.R.Q., c. S-2.1

[3]          C.L.P. 232609-01A-0404, 25 février 2005, L. Desbois.

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