Commission scolaire des Premières-Seigneuries c. Commission des lésions professionnelles |
2016 QCCS 44 |
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COUR SUPÉRIEURE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
QUÉBEC |
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N° : |
200-17-022003-156 |
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DATE : |
7 janvier 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
JACQUES BLANCHARD, j.c.s. |
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COMMISSION SCOLAIRE DES PREMIÈRES-SEIGNEURIES |
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Demanderesse |
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c. |
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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES |
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Défenderesse |
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ÉLAINE ROY |
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LA COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL |
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Mises en cause |
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JUGEMENT sur requête en révision judiciaire |
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Introduction
[1] La Commission scolaire des Premières-Seigneuries (Commission) demande la révision judiciaire de la décision de la Commission des lésions professionnelles (CLP) rendue le 27 février 2015 dans le dossier 525498-31-1310.
[2] Par sa demande de révision, la Commission prétend d’une part, que la décision de la CLP doit être révisée et cassée puisqu’elle a décliné sa compétence pour déterminer si le lien d’emploi se continuait entre madame Élaine Roy et la demanderesse pendant la période de mise à pied comprise entre le 21 juin et le 21 août 2013 et, d’autre part, elle a erré en concluant que la travailleuse avait un motif valable de refuser l’assignation temporaire d’un travail (ATT).
Contexte
[3] Madame Roy occupe un poste permanent d’éducatrice au service de garde à la Commission depuis août 2006.
[4] À chaque année, madame Roy doit prendre ses vacances lorsque les élèves de l’école sont absents et pendant la période estivale, elle fait l’objet d’une mise à pied cyclique.
[5] Pendant l’année scolaire 2012-2013, madame Roy travaillait au service de garde de l’école Chabot où elle fut victime d’une entorse au genou gauche le 19 décembre 2012 qui a nécessité un arrêt de travail jusqu’au 13 janvier 2013.
[6] Suite à des complications liées à une thrombophlébite profonde, l’arrêt de travail de madame Roy est prolongé jusqu’au 22 avril 2013, date où elle débute une ATT à raison de deux jours par semaine.
[7] Le 2 mai 2013, la Commission autorise le choix de vacances de madame Roy, soit du 26 juin au 26 juillet 2013.
[8] Le 9 mai 2013, l’ATT de madame Roy prend fin puisqu’elle est à nouveau mise en arrêt de travail, et ce, pour une période indéterminée.
[9] Le 13 juin 2013, le médecin traitant de madame Roy autorise une nouvelle ATT soumise par la Commission laquelle débute le 17 juin 2013.
[10] Bien que la demanderesse ait déjà autorisé le choix de vacances de madame Roy, le 14 juin 2013, la Commission faisant suite à une communication téléphonique tenue le même jour, avise par écrit la travailleuse du maintien de son ATT pendant la période estivale :
Lors de notre discussion, nous vous avons proposé de continuer à exécuter votre assignation temporaire ou votre travail régulier et nous prenons note de votre décision à l’effet de vous prévaloir de vos vacances d’été et de reprendre votre assignation temporaire ou votre travail régulier uniquement au début de votre prochaine année scolaire. Puisque vous désirez prendre vos vacances pendant votre assignation temporaire, nous demanderons la suspension de tout versement d’indemnité de remplacement de revenu auprès de la CSST (LATMP, art. 142)[1].
[11] Comme indiqué dans la lettre du 14 juin 2013 transmise à madame Roy[2], la demanderesse demande à la Commission de la santé et de la sécurité au travail (CSST) de suspendre les indemnités de remplacement de revenu (IRR) de la travailleuse pour la période du 21 juin au 21 août 2013 considérant que cette dernière a décidé de prendre ses vacances pendant cette période[3].
[12] Le 26 juin 2013, la CSST refuse de suspendre les IRR de madame Roy pour la période du 21 juin au 21 août 2013 compte tenu de l’absence d’un formulaire d’ATT valide au dossier.
[13] Le 28 juin 2013, la Commission conteste cette décision et requiert le transfert du dossier à la Direction de la révision de la CSST (Révision administrative).
[14] Le 18 octobre 2013, la Révision administrative décide de ne pas suspendre le paiement de l’IRR octroyé à madame Roy pour la période du 21 juin au 21 août 2013.
[15] Le 28 octobre 2013, la Commission conteste la Révision administrative aux motifs qu’elle est mal fondée en faits et en droit et le 23 septembre 2014 une audience s’est tenue devant la CLP.
[16] Le 27 février 2015, la CLP rejette la requête formulée par la Commission dans le dossier 525498-31-1310 et déclare que la CSST était bien fondée de ne pas suspendre l’IRR versée à madame Roy du 21 juin au 21 août 2013[4].
[17] Le 7 avril 2015, la Commission dépose une requête en révision judiciaire devant la Cour supérieure, dont le Tribunal doit maintenant disposer.
La décision de la CLP
[18] Dans sa décision de 17 pages, la CLP commence par relater les faits du litige, elle résume ensuite les témoignages rendus par madame Roy et monsieur Jonathan Drolet, conseiller en ressources humaines à la Commission, et fait état de la preuve médicale soumise au dossier (paragr. 11 à 51).
[19] Après avoir exposé la position de la Commission, de madame Roy et de la CSST (paragr. 52 à 58), la CLP tranche les deux litiges portant sur les questions médicales de madame Roy et qui ne font pas l’objet de la présente requête en révision judiciaire (paragr. 59 à 66).
[20] Par la suite, elle explique, en regard du dossier qui fait l’objet du présent jugement, les motifs de sa décision (paragr. 67 à 79).
[21] Pour ce faire, elle reproduit les dispositions pertinentes de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) et détermine ensuite la question qu’elle doit trancher :
[69] Le tribunal doit donc déterminer si la travailleuse a refusé ou omis d’effectuer le travail assigné temporairement pendant la période estivale. Rappelons que sa capacité à effectuer le travail assigné n’est pas en litige.
[22] D’entrée de jeux, la CLP réfute l’argument soulevé par la Commission, soit l’examen de la continuité du lien d’emploi, en soulignant que celui-ci n’était pas essentiel à la solution du litige :
[70] D’entrée de jeux, il n’appartient pas au tribunal de décider si le lien d’emploi de la travailleuse avec son employeur se continue pendant sa période de mise à pied, puisque cette question relève d’un autre forum et n’apparait pas indispensable à la solution du présent litige.
[23] La CLP souligne au paragraphe suivant qu’elle demeure compétente pour analyser la portée du contrat de travail liant madame Roy à la Commission :
[71] Le tribunal demeure toutefois compétent pour examiner la portée du contrat de travail liant la travailleuse à son employeur. Incidemment, l’article 2 de la loi définit le travailleur comme une personne physique qui exécute un travail pour un employeur, moyennant rémunération, en vertu d’un contrat de travail.
[24] De l’avis de la CLP, ce cadre d’emploi mis en place par la Commission se veut une renonciation implicite de sa part d’offrir une ATT à madame Roy pendant la période estivale et que cette dernière avait un motif valable de ne pas effectuer le travail proposé par la demanderesse :
[72] En l’instance, le contrat de travail des éducatrices au service de garde est harmonisé avec le calendrier scolaire et prévoit une mise à pied cyclique pendant la période estivale. La travailleuse ne travaille donc que dix mois par année et ne reçoit aucune rémunération pendant les deux mois de sa mise à pied. Pour des raisons évidentes de disponibilité durant l’année scolaire, elle doit prendre ses vacances pendant les périodes où les élèves sont absents.
[73] En imposant ce cadre d’emploi, l’employeur assujettit implicitement l’exercice de son droit à l’assignation temporaire au contrat de travail intervenu avec la travailleuse. La jurisprudence de la Commission des lésions professionnelles admet que l’employeur peut renoncer implicitement à la possibilité d’offrir une assignation temporaire.
[74] Une telle renonciation s’infère notamment lorsque le contrat de travail prévoit une mise à pied cyclique sans aucune forme de rémunération ou que les vacances doivent être prises à un moment précis de l’année. Dans les deux cas, la travailleuse peut légitimement s’attendre à ne pas avoir à travailler pour l’employeur pendant la période en cause, même lorsqu’il s’agit d’un travail en assignation temporaire. De l’avis du tribunal, il s’agit certainement d’une raison valable au sens de l’article 142 de la loi, pour refuser l’assignation temporaire proposé (sic) par l’employeur.
[25] Considérant l’acceptation des vacances de madame Roy par la Commission, de la mise à pied cyclique et de la façon dont la travailleuse a abordé sa période de mise à pied en écoulant ses vacances et autres congés accumulés, la CLP est d’opinion que cette dernière avait droit au versement de l’IRR :
[75] Apparemment, c’est ce que l’employeur semble avoir compris en autorisant les vacances de la travailleuse à compter du 26 juin 2013. Pourtant, le choix des vacances n’est pas acquis d’emblée, puisqu’il est soumis à l’approbation de l’employeur dans tous les cas.
[76] Que ce soit consciemment ou par automatisme, l’approbation de l’employeur illustre bien la manière dont la travailleuse a toujours abordé sa période de mise à pied à la fin de l’année scolaire, soit en épuisant ses vacances et autres congés accumulés, comme le prévoit son contrat de travail.
[77] Le tribunal croit qu’il y a lieu de sauvegarder cette dynamique d’emploi qui prévaut depuis les sept dernières années et qui constitue manifestement une renonciation implicite de l’employeur à l’assignation temporaire pendant la période estivale.
[78] Cette solution s’impose d’autant que la durée du travail, et donc de l’exposition aux risques professionnels, n’est que de dix mois par année. Dans les circonstances du présent dossier, il apparait abusif de contraindre la travailleuse à effectuer une assignation temporaire pendant une période de l’année où l’employeur n’a jamais encouru le moindre risque d’accident, du fait de la mise à pied cyclique prévue au contrat de travail.
[26] La CLP conclut sa décision ainsi :
REJETTE la requête déposée par Commission scolaire des Premières-Seigneuries, l’employeur;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail du 18 octobre 2013, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la Commission de la santé et de la sécurité du travail était bien fondée de ne pas suspendre l’indemnité de remplacement du revenu versée à madame Élaine Roy, la travailleuse, du 21 juin au 21 août 2013.
La norme de contrôle
[27] Avant de procéder à la révision, le Tribunal doit déterminer la norme de révision applicable.
[28] La Commission soutient que la CLP a commis plusieurs erreurs révisables et que le Tribunal doit appliquer la norme de la décision correcte.
[29] Elle plaide que la CLP a décliné sa compétence pour déterminer si le lien d’emploi entre elle et madame Roy se continuait pendant la période de mise à pied comprise entre le 21 juin et le 21 août 2013.
[30] Elle souligne que la détermination de la présence de ce lien est le fondement même du droit pour un employeur de proposer une ATT et que cette détermination constituait la base du litige.
[31] La demanderesse prétend également que la conclusion de la CLP à l’effet que madame Roy avait un motif valable de refuser l’ATT offerte par la Commission est absurde.
[32] Pour les autres parties au présent litige, elles allèguent essentiellement que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable puisqu’en maintenant la décision de la CSST, soit de ne pas suspendre l’IRR versée à madame Roy, la CLP a interprété des dispositions de la LATMP.
[33] Pour établir la norme applicable, le Tribunal doit s’assurer du degré de déférence requis conformément aux enseignements jurisprudentiels en matière de contrôle judiciaire, lesquels peuvent se résumer ainsi :
- l’analyse relative à la norme de contrôle, qui permet de cerner l’étendue du contrôle auquel doit être soumise la décision du décideur administratif en cause, requiert l’examen de quatre facteurs contextuels : (1) la présence ou l’absence d’une clause privative ou d’un droit d’appel, (2) l’expertise du tribunal administratif relativement à celle de la cour de révision sur la question en litige, (3) l’objet de la loi et de la disposition particulière et (4) la nature de la question en litige, i.e. de droit, de fait ou mixte de fait et de droit[5];
- la pondération de ces quatre facteurs amènera l’application de l’une des deux normes de contrôle possibles, soit celle de la décision raisonnable ou celle de la décision correcte;
- la norme de la décision raisonnable implique un certain degré de déférence ; la cour de révision se demande si la décision entreprise et sa justification revêtent un caractère raisonnable, lequel tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit[6].
Elle est généralement de mise en présence d’une clause privative, d’une question touchant aux faits, au pouvoir discrétionnaire ou à la politique, d’une question de droit qui ne revêt pas une importance capitale pour le système judiciaire alors qu’il y a une clause privative et que le décideur œuvre dans le cadre d’un régime administratif distinct et particulier à l’égard duquel il possède une expertise spéciale, lorsque le droit et les faits s’entrelacent et ne peuvent être aisément dissociés, lorsque le tribunal administratif interprète sa propre loi constitutive ou une loi étroitement liée à son mandat dont il a une connaissance approfondie ou, encore, lorsqu’il s’agit de l’application d’une règle générale de common law ou de droit civil pour laquelle le tribunal administratif a acquis une expertise dans son domaine spécialisé[7];
- la norme de la décision correcte commande peu ou pas de déférence à l’égard du décideur administratif ; il y a une seule décision possible et il doit l'avoir prise[8].
Elle trouve généralement application en présence de questions touchant au partage des compétences entre le Parlement et les provinces, de véritables questions de compétence et de constitutionnalité, de questions de droit générales à la fois d'une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble[9] et étrangères au domaine d'expertise du décideur[10] et aux questions de la délimitation des compétences respectives de tribunaux spécialisés concurrents[11];
- il n’est pas nécessaire d’entreprendre l’analyse relative à la norme de contrôle si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à la catégorie de question en cause[12];
- il faut éviter de qualifier trop rapidement un point de question de compétence et de l’assujettir à un examen judiciaire plus étendu, lorsqu’il existe un doute à cet égard[13];
- la «compétence» s’entend au sens strict de la faculté du tribunal administratif de connaître de la question; ainsi une véritable question de compétence se pose lorsque le tribunal administratif doit déterminer expressément si les pouvoirs dont le législateur l’a investi l’autorisent à trancher une question[14];
- peu de questions appartiennent à la catégorie des véritables questions de compétence[15]; elles ont une portée étroite et se présentent rarement[16];
- sauf situation exceptionnelle, il convient de présumer que l’interprétation par un tribunal administratif de sa propre loi constitutive ou d'une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie est une question d'interprétation législative commandant la déférence en cas de contrôle judiciaire ou, en d’autres termes, l’application de la norme de la décision raisonnable[17];
- il appartient à la partie qui prétend soulever une véritable question de compétence d’établir les raisons pour lesquelles l’interprétation de sa loi constitutive ou d’une loi étroitement liée à son mandat spécialisé par le tribunal administratif ne devrait pas s’effectuer au regard de la norme de la décision raisonnable[18].
[34] Suivant ces principes, force est effectivement de constater qu’aucune véritable question de compétence ne se pose en l’espèce.
[35] La CLP devait décider de la contestation d’une décision de la CSST portant sur la suspension de l’IRR versée à madame Roy.
[36] Se faisant, la CLP a interprété et appliqué certaines dispositions de la LATMP aux faits mis en preuve et cela constitue une question mixte de fait et de droit qui échappe à la définition stricte du concept de «compétence» retenu par la Cour suprême depuis l’arrêt Dunsmuir[19].
[37] Enfin, en présence d’une clause privative[20] et considérant ce qui précède, il y a lieu d’appliquer la norme de la décision raisonnable et le Tribunal n’interviendra que si la décision de la CLP est déraisonnable, i.e. si son appartenance aux issues possibles acceptables ne peut se justifier en regard des faits et du droit.
Question en litige
[38] La question en litige que le Tribunal doit trancher est celle de savoir si la décision de la CLP dans le dossier 525498-31-1310 est déraisonnable.
Analyse et décision
[39] Le Tribunal rappelle que la décision visée par le contrôle est présumée raisonnable, sauf preuve du contraire[21].
[40] La requête en révision judiciaire n’est pas un appel, mais plutôt une demande à la Cour supérieure d’intervenir en vertu de ses pouvoirs généraux de surveillance et de contrôle.
[41] Ainsi, si la décision trouve une assise factuelle, voire que les conclusions factuelles sont raisonnables, étayées et découlent de l’appréciation de la preuve administrée par les parties, le Tribunal doit s’abstenir de s’ingérer dans l’exercice de la juridiction du décideur administratif[22].
[42] En l’espèce, le Tribunal est d’avis que la CLP était valablement saisie d’un recours pour lequel manifestement elle avait compétence en vertu de la LATMP et qui plus est, l’interprétation de cette loi relève au premier plan de son expertise.
[43] Par ailleurs, même si la CLP avait décliné sa compétence pour déterminer la continuation ou non du lien d’emploi entre la Commission et madame Roy pendant l’été, ce que le Tribunal ne décide pas, cet aspect est sans conséquence sur la décision entreprise, cette question n’étant pas indispensable, comme le soulignait la défenderesse, pour disposer du litige soumis à son attention, à savoir si la travailleuse avait une raison valable de refuser l’ATT que la Commission lui a assigné pour la période du 21 juin au 21 août 2013.
[44] Or, la CLP a tranché cette question et a conclu que madame Roy a fait valoir une raison valable pour refuser l’ATT proposée par la Commission.
[45] Sans adhérer nécessairement à tous les motifs de la CLP, lorsque le Tribunal examine globalement la décision de la défenderesse, il ne peut affirmer que l’approche prise par celle-ci, l’application des faits et l’appréciation qu’elle en a fait sont déraisonnables.
[46] Le Tribunal est d’opinion que la décision de la CLP revêt la qualité de la transparence et de raisonnabilité qui impose la déférence.
[47] La Commission devait démontrer que la décision de la CLP était déraisonnable, elle ne s’est pas déchargée de ce fardeau.
[48] En terminant, il est possible qu’une autre formation aurait fait une analyse différente de la preuve ou en aurait tiré des conclusions différentes, mais comme le rappelait récemment le juge Morissette de la Cour d’appel dans l’affaire Béton Brunet ltée[23] :
[41] Le rôle du premier décideur n’est pas d’emporter l’adhésion enthousiaste de toutes les parties qui s’affrontent devant lui mais d’apporter une solution raisonnable à un différend qui survient en application de la loi. Or, on ne mesure pas toujours tout ce qu’implique ce principe pourtant fermement ancré en droit administratif. Il implique notamment ceci. Dès lors qu’une pluralité de critères est en jeu, que chacun d’entre eux relève en priorité de l’appréciation de ce décideur, et qu’il se dégage de part et d’autre du litige quelque chose comme une équipollence des propositions, il faut accepter qu’un « résultat faisant partie des issues possibles » puisse consister en une chose de même que son contraire. (…) (soulignement du Tribunal)
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[49] REJETTE la requête en révision judiciaire avec dépens.
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__________________________________ JACQUES BLANCHARD, j.c.s. |
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Me Jean-François Dolbec BBD avocats - Casier 154 Procureurs de la demanderesse |
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Me Marie-France Bernier Verge Bernier 900, place d’Youville, bureau 800 Québec (Québec) G1R 3P7 Procureurs de la Commission des lésions professionnelles |
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Me Pierre-Luc Thibault Barabé Casavant 320, St-Joseph Est, bureau 100 Québec (Québec) G1K 9E7 Procureurs de la mise en cause Élaine Roy |
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Me Julie Rancourt Paquet Thibodeau Bergeron - Casier 187 Procureurs de la mise en cause Commission de la santé et de la sécurité du travail |
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Date d’audience : |
26 novembre 2015 |
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[1] Pièce R-5.
[2] Id.
[3] Pièce R-6.
[4] Pièce R-13.
[5] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, par. 64.
[6] Id., par. 47.
[7] Id., par. 47-55.
[8] Id., par. 44-50.
[9] Cette exception trouve rarement application.
[10] Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Canada (Procureur général),
2011 CSC 53, par. 16 et 18.
[11] Nor-Man Regional Health Authority Inc. c. Manitoba Association of Health Care Professionals,
2011 CSC 59, par. 35.
[12] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, précité, note 5, par. 62.
[13] Id., par. 35; Voir également Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ association, [2011] 3 R.C.S. 654, par. 33.
[14] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, précité, note 5, par. 59.
[15] Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ association, précité, note 13, par. 33.
[16] Id., par. 39 et 42.
[17] Id., par. 34 et 39; Voir également McLean c. Colombie-Britannique (Securities Commission), 2013 CSC 67, par. 21-22.
[18] Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ association, précité, note 13, par. 39.
[19] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, précité, note 5.
[20] Article 429.59 Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, RLRQ, c. A-3001.
[21] Université McGill c. Ong, 2014 QCCA 458, par. 36-37.
[22] Syndicat des paramédics et du préhospitalier de la Montérégie - CSN c. Coopérative des techniciens ambulanciers de la Montégérie (CETAM), 2012 QCCA 1326, par. 70.
[23] Béton Brunet ltée c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier (SCEP), section locale 700, 2015 QCCA 188; Voir également Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 R.C.S. 339, par. 59.
AVIS :
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