Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Mauricie-

Centre-du-Québec

SAINT-ROMUALD, le 23 mai 2000

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

125769-04B-9911

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Pierre Brazeau

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Denis Gagnon

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Serge St-Pierre

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

117374710

AUDIENCE TENUE LE :

20 avril 2000

 

DÉLIBÉRÉ LE :

4 mai 2000

 

 

 

 

 

 

À :

Arthabaska

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MONSIEUR BRUNO GIGUÈRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

OLYMEL PRINCEVILLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 1er novembre 1999, monsieur Bruno Giguère (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles, une contestation écrite d'une décision rendue le 27 octobre 1999 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) agissant en révision en application de l'article 358.3 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.R.Q., c. A-3.001) (la LATMP).

[2]               Par cette décision, la «CSST en révision» rejette une demande de révision logée par le travailleur le 6 octobre 1999 et confirme une décision rendue par la CSST en première instance le 28 septembre 1999, décision par laquelle celle-ci détermine que le travailleur n'était pas justifié de refuser l'assignation temporaire effectuée en date du 30 août 1999 par «Olymel Princeville» (l'employeur), le médecin ayant charge du travailleur, le docteur Lorenzo Caron, ayant conclu par l'affirmative à l'existence des trois conditions respectivement prévues aux paragraphes 1° à 3° de l'article 179 de la LATMP.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[3]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d'infirmer la décision de la «CSST en révision», de déclarer qu'il n'était pas raisonnablement en mesure d'accomplir le travail faisant l'objet de l'assignation temporaire en cause, qu'il n'avait donc pas à exercer ce travail, et qu'il a ainsi conservé d'emblée son droit de recevoir l'indemnité de remplacement du revenu pendant la période en cause, en application de l'article 44 de la LATMP.

[4]               Le travailleur et l'employeur étaient présents et dûment représentés par procureur à l'audience tenue par la Commission des lésions professionnelles le 20 avril 2000, alors que la CSST était absente bien qu'ayant été informée de la tenue de cette audience.

[5]               La présente contestation a par ailleurs fait l'objet d'une enquête et d'une audition commune avec celles administrées dans le cadre des dossiers de la Commission des lésions professionnelles portant respectivement les numéros 125927-04B-9911, 132663-04B-9911 et 127652 - 04B‑9911.

LES FAITS

[6]               La Commission des lésions professionnelles se réfère d'abord à l'ensemble de la preuve médicale, administrative et factuelle colligée au dossier tel que constitué, en retenant plus spécialement pour valoir comme s'ils étaient ici au long récités, les notes évolutives de la CSST pour la période s'étendant du 12 octobre 1999 au 27 octobre 1999, le formulaire «Réclamation du travailleur» produit à la CSST le 31 août 1999 ainsi que son annexe manuscrite, l'attestation médicale initiale émise par le médecin ayant charge du travailleur en date du 29 août 1999, le formulaire «Assignation temporaire d'un travail» et l'autorisation dûment signés par le médecin ayant charge du travailleur, le docteur Lorenzo Caron, en date du 30 août 1999, la contestation par le travailleur de l'assignation temporaire en cause le 31 août 1999 et, enfin, la décision rendue par la CSST en première instance le 28 septembre 1999 ainsi que la contestation de cette décision par le travailleur le 6 octobre 1999.

[7]               La Commission des lésions professionnelles se réfère également au résumé des faits tels que retenus et relatés par la «CSST en révision» dans la décision qui est contestée en l'instance. Ce résumé se lit comme suit :

«(…)

 

Monsieur Giguère travaille au poste de parer les picnis lorsqu'il est victime d'un accident du travail le 30 août 1999. Il s'inflige alors une blessure au pouce droit et la réclamation est acceptée par la CSST.

 

Il consulte le Dr Caron le 30 août 1999. Ce dernier pose le diagnostic de plaie de 2 cm au pouce droit, procède à la mise en place de points de suture et indique: "aucun travail aujourd'hui, travaux légers 1 semaine." Il signe le formulaire d'assignation temporaire proposée par l'employeur et le 7 septembre 1999, il revoit le travailleur et prescrit un retour au travail régulier à compter du lendemain.

 

Selon les documents au dossier, le travailleur, dans le cadre de l'assignation temporaire, doit étamper à l'aide d'un petit marteau (moins de 5 livre) le sceau de l'établissement sur la fesse du porc. Le travail est à la chaîne, est de jour à raison de 8 heures par jour et la température ambiante est de 23°.

 

Le 31 août 1999, le travailleur conteste cette assignation temporaire. Il mentionne qu'il est droitier et que ce travail exige l'utilisation de ses deux mains, qu'il ne croit pas que ce travail soit favorable à sa guérison, que les tâches proposées et remises au médecin ne sont pas définies et qu'il y a un risque de se frapper ou de s'accrocher le pouce et de mouiller son pansement.

 

Son représentant fait observer que la lésion du travailleur est à un doigt de la main droite et que le travailleur tient le marteau de la main gauche mais que devant peser sur un bouton de la main gauche (pour changer de rail) il doit transférer son marteau dans sa main droite et qu'il se cogne alors le doigt. Il précise également que dans le cadre de cette assignation temporaire ; "Des fois, les cochons sont à l'envers et qu'ils doivent les virer pour pouvoir les étamper et qu'ils ont alors à utiliser les deux mains. Le syndicat est contre une assignation temporaire qui peut aggraver la condition d'un travailleur et les médecins ne voient pas toujours les conditions de travail."

 

(sic)

 

(…)»

 

 

[8]               Enfin, la Commission des lésions professionnelles prend évidemment aussi en compte les documents déposés en preuve à son audience du 20 avril 2000 sous les cotes T-1 et T-2, soit les notes évolutives du médecin ayant charge du travailleur relativement à des consultations effectuées en date des 30 août 1999 et 7 septembre 1999 et la description de tâches détaillée de l'emploi assigné au travailleur en l'espèce, soit «étamper les porcs 237 (abattage)» rédigée par le représentant syndical du travailleur de même qu'un croquis reproduisant sommairement les lieux de travail en cause, ainsi que les témoignages entendus à cette audience, soit celui du travailleur lui-même en preuve principale et en contre-preuve, celui de monsieur Jacques Dubé, collègue de travail du travailleur, et celui de monsieur Richard Couture, contremaître au département de l'abattage.

[9]               Au-delà des faits déjà relatés par la «CSST en révision» dans la décision qui est contestée en l'instance, le travailleur allègue que la lésion professionnelle subie le 30 août 1999 avait nécessité quatre points de suture, la prise de médicaments anti-inflammatoires et le port d'un pansement recouvrant tout son pouce, le tout tel qu'en font foi les notes médicales évolutives produites en preuve sous la cote T-1.

[10]           Reprenant essentiellement les éléments de sa contestation du 31 août 1999, le travailleur allègue être droitier et que le travail en cause exige à l'occasion de manipuler les carcasses de porcs en utilisant les deux mains.

[11]           Le travailleur précise qu'en raison de la manipulation d'un bouton suspendu et non fixé, bouton qu'il devait tenir dans sa main et presser avec son pouce pour faire avancer les carcasses de porc sur la «chaîne des retenus», il ne pouvait constamment manipuler de sa main gauche le marteau servant à étamper les porcs et devait donc régulièrement utiliser sa main droite, ce qui lui causait des difficultés assez importantes en raison de sa blessure mais surtout en raison du pansement qu'il portait à son pouce droit.

[12]           Le travailleur ajoute que le port de ce pansement à son pouce droit empêchait qu'il puisse se laver les mains aussi souvent qu'il était requis de le faire dans ce type de tâches.

[13]           Procédant à expliquer à la Commission des lésions professionnelles le motif pour lequel il devait manipuler les carcasses de porcs en utilisant ses deux mains, le travailleur allègue qu'il devait séparer les carcasses en se dépêchant parce que les pattes des porcs s'enchevêtraient.

[14]           Le travailleur affirme également qu'il devait manipuler un crochet au bout d'un long manche pour débloquer occasionnellement des carcasses qui ne descendaient pas d'elles-mêmes sur la chaîne principale.

[15]           Le travailleur allègue par ailleurs qu'après moins d'une demi-journée de travail en assignation temporaire sur une période d'arrêt de travail qui devait durer six ou sept jours, il a vu le contremaître pour l'informer qu'il refusait de continuer à faire le travail en cause et que ce dernier lui aurait alors dit «tu sais ce que tu as à faire».

[16]           Le travailleur allègue aussi que son collègue de travail lui aurait dit à quelques reprises de «se tasser» parce qu'il l'empêchait d'accéder à l'encrier, lui demandant de se placer dans les marches donnant accès à la plate-forme où le travail devait s'effectuer.

[17]           En réponse aux questions du procureur de l'employeur, le travailleur dit ne pas se souvenir avec précision de la durée de son travail effectué en assignation mais se souvenir d'avoir travaillé approximativement une demi-journée avant de contester.

[18]           Le travailleur affirme aussi que le travail en cause s'effectuait à tour de rôle ou en alternance aux heures ou aux demi-heures avec le titulaire du poste «doublé» et qu'il effectuait à peu près la moitié du travail.

[19]           Le travailleur allègue enfin avoir rencontré le contremaître, Michel Roy, aux fins de la contestation de son assignation temporaire, le 31 août 1998.

[20]           En réponse aux questions du membre issu des associations d'employeurs, le travailleur précise qu'il avait déjà fait le travail en cause et qu'il n'éprouvait aucun problème pour «étamper» mais bien seulement pour séparer les carcasses de porcs, ajoutant qu'il n'avait pas le temps de demander de l'aide pour faire effectuer ce travail par son collègue parce que la chaîne principale fonctionnait sans arrêt.

[21]           Appelé à témoigner par le travailleur à l'audience du 20 avril 2000, monsieur Jacques Dubé, titulaire du poste d'étampeur de porcs auquel le travailleur était assigné temporairement, a essentiellement procédé à décrire sommairement ses tâches et son mode de fonctionnement avec le travailleur.

[22]           Monsieur Dubé confirme la disposition des lieux de travail tel que reproduite sur le croquis produit en preuve sous la cote T-2 et allègue se souvenir que le travailleur et lui se remplaçaient pour effectuer le travail en cause mais que ce dernier avait de la difficulté à retenir le bouton servant à faire avancer les carcasses de porc sur la chaîne des retenus, parce que ce bouton était suspendu dans le vide et non fixé et que le travailleur ne pouvait le manipuler à cause de son problème au pouce droit.

[23]           Monsieur Dubé allègue se souvenir que le travailleur avait mal au pouce et qu'il est parti pour ce motif au cours de la première journée de son assignation.

[24]           Monsieur Dubé s'est par ailleurs employé à décrire longuement les problèmes particuliers de l'enchevêtrement des carcasses de porcs qui se présentaient avant que soit apporté un correctif à une époque dont il n'a pas le souvenir exact, en l'occurrence un mécanisme de blocage permettant d'éviter l'enchevêtrement des carcasses nécessitant la manipulation de celle-ci avec les deux mains et une force assez importante pour les séparer à bout de bras.

[25]           Monsieur Dubé explique à la Commission des lésions professionnelles qu'il devait également manipuler les carcasses de porcs avec ses deux mains pour les redresser avant de les étamper parce que celles-ci se présentaient souvent dans un angle qui ne permettait pas de le faire sans les redresser.

[26]           Monsieur Dubé ajoute qu'il a par ailleurs été surpris de voir arriver pour travailler avec lui le 31 août 1998, un travailleur avec un énorme pansement au pouce droit et un seul gant porté à l'autre main.

[27]           Appelé à témoigner par l'employeur, monsieur Richard Couture, contremaître depuis 1995 au département de l'abattage, confirme essentiellement la description de tâches et le croquis produits en preuve sous la cote T-2.

[28]           Monsieur Couture allègue par ailleurs que, selon lui, il est plausible qu'environ 5 % des porcs puissent être détournés sur le rail des retenus, pour différents problèmes nécessitant un examen par le vétérinaire de service.

[29]           Monsieur Couture affirme cependant ne pas être au courant des problèmes relatés par monsieur Dubé en ce qui a trait au replacement des porcs et que ce dernier ne l'a jamais informé qu'il éprouvait des problèmes avec les carcasses provenant de la rail des retenus.

[30]           Il allègue toutefois être informé qu'à l'occasion il est nécessaire de donner un coup avec un crochet pour ramener une carcasse immobilisée à la roulette de la rail principale.

[31]           Monsieur Couture ajoute que le travailleur en assignation temporaire peut toujours travailler à son rythme et qu'aucun objectif de productivité ne lui est fixé.

[32]           Interrogé en contre-preuve, le travailleur confirme qu'il ne pouvait porter un gant à sa main droite en raison du pansement encombrant à son pouce droit (une catin) et que l'emploi en cause impliquait de se laver les mains fréquemment, ce qu'il ne pouvait faire en raison de ce pansement.

[33]           Le travailleur allègue enfin que l'installation du mécanisme de blocage empêchant l'enchevêtrement des carcasses de porcs était déjà en place lors de son assignation temporaire le 31 août 1999.

 

L'AVIS DES MEMBRES

[34]           Le membre issu des associations d'employeurs et le membre issu des associations syndicales sont tous les deux d'avis que la preuve disponible établit de façon prépondérante que le travailleur n'était pas raisonnablement en mesure d'accomplir les tâches ayant fait l'objet de l'assignation temporaire effectuée par l'employeur le 30 août 1999.

[35]           Les deux membres sont en fait d'avis que la blessure même et surtout, le port d'un pansement relativement encombrant au pouce droit rendaient très difficile par ce dernier la manipulation du marteau servant à étamper les porcs, celle du bouton suspendu servant à faire avancer les carcasses de porcs sur la rail des retenus et celle avec les deux mains des carcasses de porc lorsque requis de les redresser avant de les étamper.

[36]           Les deux membres considèrent également que le port du pansement au pouce droit du travailleur empêchait en quelque sorte ce dernier de respecter les pratiques d'hygiènes normalement requises par les tâches en cause, soit le port de gants aux deux mains et le lavage fréquent des mains.

[37]           De plus, le membre issu des associations syndicales met fortement en doute le fait qu'une assignation temporaire puisse être de quelque manière «favorable à la réadaptation» d'un travailleur qui a été victime d'une lésion professionnelle ne causant que quelques jours d'incapacité, comme c'est le cas en l'espèce.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[38]           La question dont la Commission des lésions professionnelles doit disposer dans le cadre de la présente instance, consiste à déterminer si le travailleur était ou non justifié de refuser d'exécuter les tâches auxquelles il a été assigné temporairement par l'employeur le 30 août 1999.

[39]           L'article 179 de la LATMP prévoit ce qui suit :

179. L'employeur d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle peut assigner temporairement un travail à ce dernier, en attendant qu'il redevienne capable d'exercer son emploi ou devienne capable d'exercer un emploi convenable, même si sa lésion n'est pas consolidée, si le médecin qui a charge du travailleur croit que :

 

  le travailleur est raisonnablement en mesure d'accomplir ce travail;

  ce travail ne comporte pas de danger pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion; et

  ce travail est favorable à la réadaptation du travailleur.

 

Si le travailleur n'est pas d'accord avec le médecin, il peut se prévaloir de la procédure prévue par les articles  37 à 37.3 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S‑2.1), mais dans ce cas, il n'est pas tenu de faire le travail que lui assigne son employeur tant que le rapport du médecin n'est pas confirmé par une décision finale.

________

1985, c. 6, a. 179.

[40]           À la simple lecture de la disposition législative précitée, la Commission des lésions professionnelles doit constater et retenir d'emblée que le législateur y donne à l'employeur le droit d'assigner temporairement un travail à un travailleur qui a été victime d'une lésion professionnelle et qui est rendu incapable d'exercer son emploi en raison de cette lésion.

[41]           Il ressort de plus de la disposition législative en cause que cette assignation temporaire peut se faire en attendant que le travailleur redevienne capable d'exercer son emploi ou un emploi convenable et ce, même si la lésion professionnelle subie n'est pas consolidée.

[42]           De plus et surtout, il appert tout aussi clairement que cette assignation temporaire par l'employeur ne peut se faire qu'à la condition expresse que le médecin ayant charge du travailleur «croit» que le travailleur est raisonnablement en mesure d'accomplir le travail assigné, que ce travail est sans danger pour sa santé, sa sécurité et son intégrité physique compte tenu de sa lésion et qu'il est favorable à sa réadaptation.

[43]           Toutefois, si le travailleur n'est pas d'accord avec les conclusions du médecin en ayant charge sur l'un ou l'autre des trois éléments précités, il peut alors exercer le recours prévu par les termes des articles 37 à 37.3 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (L.R.Q. c. S-2.1) (la LSST), lesquels se lisent comme suit :

37.       Si le travailleur croit qu'il n'est pas raisonnablement en mesure d'accomplir les tâches auxquelles il est affecté par l'employeur, il peut demander au comité de santé et de sécurité, ou à défaut de comité, au représentant à la prévention et à l'employeur d'examiner et de décider la question en consultation avec le médecin responsable des services de santé de l'établissement ou, à défaut de médecin responsable, avec le directeur de la santé publique de la région où se trouve l'établissement.

 

               S'il n'y a pas de comité ni de représentant à la prévention, le travailleur peut adresser sa demande directement à la Commission.

 

               La Commission rend sa décision dans les 20 jours de la demande et cette décision a effet immédiatement, malgré une demande de révision.

_____________

1979, c. 63, a. 37; 1985, c. 6, a. 525; 1992, c. 21, a. 302.

 

 

            37.1.    Une personne qui se croit lésée par une décision rendue en vertu de l'article 37 peut, dans les 10 jours de sa notification, en demander la révision par la Commission conformément aux articles 358.1 à 358.5 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (chapitre A-3.001).

            _____________

            1985, c. 6, a. 525; 1997, c. 27, a. 37.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

            37.2     La Commission doit procéder d'urgence sur une demande de révision faite en vertu de l'article 37.1.

 

               La décision rendue par la Commission sur cette demande a effet immédiatement, malgré qu'elle soit contestée devant la Commission des lésions professionnelles.

            ___________

            1985, c. 6, a. 525; 1997, c. 27, a. 38.

 

 

            37.3     Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission à la suite d'une demande faite en vertu de l'article 37.1 peut, dans les 10 jours de sa notification, la contester devant la Commission des lésions professionnelles.

            ___________

            1985, c. 6, a. 525; 1992, c. 11, a. 48; 1997, c. 27, a. 39.

 

 

[44]           En d'autres termes, la Commission des lésions professionnelles doit considérer que, dans la mesure où le médecin ayant charge du travailleur autorise l'assignation temporaire proposée par l'employeur, en affirmant qu'il croit dans l'existence des trois éléments prévus aux paragraphes 1° à 3° de l'article 179 précité, l'employeur a le droit d'assigner temporairement le travailleur à l'emploi ainsi autorisé par le médecin en ayant charge, ce dernier ayant toutefois, dans ce cas et de façon tout à fait exceptionnelle, ouverture à contester les conclusions de son propre médecin en utilisant le recours prévu par les termes des articles 37 à 37.3 précités de la LSST.

[45]           En l'espèce, il est évident que, en l'absence d'une preuve au contraire, la condition prévue par le 1er alinéa de l'article 179 de la LATMP a été satisfaite tel qu'en font foi les formulaires d'assignation temporaire et d'autorisation dûment signés par le docteur Lorenzo Caron, médecin ayant charge du travailleur, en date du 30 août 1999, en relation avec l'emploi de «étampeur de porcs».

[46]           Il reste donc à la Commission des lésions professionnelles à déterminer si la preuve disponible établit de façon prépondérante l'inexistence ou le caractère erroné de l'une ou l'autre des conclusions du médecin ayant charge du travailleur quant aux trois éléments prévus par les paragraphes 1° à 3° de l'article 179 de la LATMP et si le travailleur était ou non, en conséquence, justifié de refuser en date du 31 août 1999 d'accomplir le travail auquel il avait été assigné temporairement par son employeur le jour précédent.

[47]           La Commission des lésions professionnelles retient d'abord que les situations principalement décrites par monsieur Jacques Dubé, collègue de travail du travailleur, comme nécessitant la manipulation des carcasses de porcs avec les deux mains afin de les séparer n'existaient plus lors de l'assignation temporaire de ce dernier le 31 août 1999, la preuve disponible établissant de façon prépondérante que les changements ou correctifs ayant éliminé ces situations avaient été réalisés avant le mois d'août 1999, et la Commission des lésions professionnelles ne prend donc pas ces situations en compte aux fins de rendre la présente décision.

[48]           Cependant, la Commission des lésions professionnelles ne peut ignorer que la manipulation du marteau d'environ 5 livres servant à étamper les porcs de même que l'utilisation occasionnelle d'un crochet au long manche servant à faire avancer les porcs accrochés à la roulette sur le rail principal et l'utilisation des deux mains parfois requise pour redresser les carcasses de porcs se présentant dans un angle ne permettant pas de les étamper sans les redresser constituent tous des éléments qui rendent très difficile de conclure que le travailleur était raisonnablement en mesure d'accomplir le travail en cause compte tenu de sa lésion au pouce droit.

[49]           De plus, la Commission des lésions professionnelles retient également comme étant un élément déterminant en l'instance, le port par le travailleur d'un pansement encombrant à son pouce droit, pansement empêchant le travailleur de porter des gants aux deux mains et de se laver fréquemment les mains tel que requis par les pratiques d'hygiènes inhérentes à ce poste de travail.

[50]           Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles considère d'emblée que, si l'assignation temporaire en cause n'implique aucun risque pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique du travailleur et qu'elle aurait autrement pu être favorable à sa réadaptation, la nature même des séquelles physiques et des traitements rendus nécessaires par la lésion professionnelle en cause font que le travailleur n'est pas raisonnablement en mesure d'accomplir le travail auquel il a été assigné et elle conclut sur cette base que le médecin ayant charge du travailleur a erré quant à l'existence de cette première des trois conditions sur lesquelles devait être fondée son autorisation de cette assignation temporaire.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la contestation écrite logée par monsieur Bruno Giguère le 1er novembre 1999;

INFIRME les décisions respectivement rendues par la «CSST en révision» et la CSST en première instance le 27 octobre 1999 et le 28 septembre 1999;

DÉCLARE que monsieur Bruno Giguère n'était pas raisonnablement en mesure d'accomplir l'emploi auquel il a été assigné temporairement par «Olymel Princeville» le 30 août 1999;

et

CONSTATE que monsieur Bruno Giguère a en conséquence conservé son droit de recevoir l'indemnité de remplacement du revenu pendant la période en cause, en application de l'article 44 de la LATMP.

 

 

 

 

 

Pierre Brazeau

 

Commissaire

 

 

 

 

C.S.N.

(M. Jacques Lahaie)

180, Côte de l'Acadie

Sherbrooke  (Québec)

J1H 2T3

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

OGILVY RENAULT

(Me Louis Ste-Marie)

500, rue Grande-Allée Est, bur. 520

Québec  (Québec)

G1R 2J7

 

Représentant de la partie intéressée

 

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