Asselin et Entretien ménager Philippe Paquet |
2012 QCCLP 392 |
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[1] Le 12 octobre 2010, madame Colette Asselin (la travailleuse) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle elle conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 6 octobre 2010 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST déclare irrecevable une demande de révision produite le 24 septembre 2010 à l’encontre d’une décision rendue le 10 février 2010. Cette décision du 10 février 2010 entérinait un avis émis par un membre du Bureau d’évaluation médicale (le docteur Jean-Pierre Lacoursière, orthopédiste) qui concluait que la lésion subie par la travailleuse le 16 avril 2008 était désormais consolidée à compter du 25 janvier 2010 et ce, sans traitements médicaux additionnels. L’avis du Bureau d’évaluation médicale énonçait également que la travailleuse conservait une atteinte permanente de 2,20 % en raison d’une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées. Le Bureau d’évaluation médicale retenait également l’existence des limitations fonctionnelles suivantes :
Madame Asselin devra éviter les activités qui impliquent de :
- soulever, porter, pousser, tirer de façon répétitive ou fréquente des charges de plus de 5 à 15 kilos;
- effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire, même de faible amplitude;
- monter fréquemment plusieurs escaliers;
- marcher en terrain accidenté ou glissant.
Elle devra éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente les activités qui impliquent de :
- travailler en position accroupie;
- ramper ou grimper;
- subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale (ex. : provoqués par du matériel roulant sans suspension).
[3] Par sa décision du 10 février 2010, la CSST déclarait, compte tenu de la date de consolidation de sa lésion et de l’existence de limitations fonctionnelles, que la travailleuse aurait droit de recevoir des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur sa capacité à exercer un emploi.
[4] Par ailleurs, par sa décision rendue en révision administrative le 6 octobre 2010, la CSST confirmait en partie une autre décision datée du 24 mars 2010 déclarant que la travailleuse est capable à compter du 23 mars 2010 d’occuper l’emploi convenable d’assembleuse de petits objets. La CSST déclarait que cet emploi convenable pouvait lui procurer un revenu annuel estimé à 20 856 $ au lieu de 24 500 $ comme il en avait été décidé initialement. La CSST déclarait qu’elle avait droit à des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle occupe un emploi ou au plus tard le 23 mars 2011. Enfin, la CSST déclarait qu’elle n’avait pas droit à des indemnités réduites de remplacement du revenu.
[5] À l’audience tenue à Québec, le 29 novembre 2011, la travailleuse était présente et représentée par maître Rénald Labbé. L’employeur, bien que dûment convoqué, était absent. La CSST était représentée par maître Julie Rancourt. Le tribunal a entendu lors de cette audience le témoignage de monsieur Jacinto Desouza, conjoint de la travailleuse, de la travailleuse elle-même, celui du docteur Rémi Corriveau, médecin traitant de la travailleuse, et enfin le témoignage de monsieur Louis-Philippe Auger, conseiller en réadaptation à la CSST.
[6] Le tribunal a permis au procureur de produire une argumentation écrite au soutien de leur position respective. Le procureur de la travailleuse, maître Rénald Labbé, a transmis une argumentation écrite au tribunal le 16 décembre 2011. Pour sa part, la CSST a transmis une argumentation écrite le 22 décembre 2011. Le tribunal a pris l’affaire en délibéré à cette date.
L’OBJET DE LA CONTESTATION
[7] La travailleuse demande d’infirmer la décision rendue par la Révision administrative le 6 octobre 2010.
[8] Dans un premier temps, la travailleuse demande d’être relevée du défaut d’avoir contesté la décision du 10 février 2010 entérinant un avis du Bureau d’évaluation médicale. La travailleuse prétend que sur le plan cognitif et de la compréhension du contenu des décisions, ses capacités sont très limitées et en conséquence, elle n’a pas été en mesure de présenter une contestation dans le délai de 30 jours prévu par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).
[9] La travailleuse demande par ailleurs d’infirmer la décision rendue par la CSST le 24 mars 2010 qui déclarait qu’elle était capable d’occuper l’emploi convenable d’assembleuse de petits objets. La travailleuse prétend plutôt par son témoignage et celui de son médecin, le docteur Rémi Corriveau, qu’elle n’a pas les capacités physiques ou psychologiques pour exercer un tel emploi qui n’est pas adapté aux limitations fonctionnelles retenues au dossier.
L’AVIS DES MEMBRES
[10] Dans un premier temps, le membre issu des associations syndicales de même que le membre issu des associations d’employeurs sont tous deux d’avis que la contestation déposée par la travailleuse le 24 septembre 2010, à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 10 février 2010 suite à un avis du Bureau d’évaluation médicale, est irrecevable.
[11] Les deux membres sont d’avis que les explications soumises par la travailleuse et son conjoint ne sont pas raisonnables compte tenu de la preuve présentée à l’audience. Les membres constatent que la travailleuse ne prétend pas ne pas avoir reçu la décision du 10 février 2010. Cette décision précisait clairement qu’elle disposait d’un délai de 30 jours pour contester auprès de la Révision administrative. Les membres sont d’avis que la travailleuse a démontré à plusieurs occasions au dossier qu’elle savait exprimer son désaccord auprès des agents de la CSST et pour communiquer avec un avocat afin de faire valoir ses droits. Rien sur le plan de la preuve ne permet d’établir de façon prépondérante qu’elle n’avait pas les capacités intellectuelles de comprendre le sens d’une décision qui lui était défavorable et qui lui avait été d’ailleurs expliquée par un agent de la CSST. Sa contestation à l’encontre de la décision du 10 février 2010 est donc irrecevable.
[12] Par ailleurs, les membres sont également d’avis de rejeter la contestation de la travailleuse en rapport avec l’emploi convenable retenu, soit celui d’assembleuse de petits objets. Les membres sont d’avis que l’emploi retenu respecte les limitations fonctionnelles énoncées au dossier de même que l’ensemble des critères de la définition d’emploi convenable utilisée dans la loi.
LES FAITS ET LES MOTIFS
[13] Le tribunal traitera dans un premier temps de la contestation déposée hors délai par la travailleuse le 24 septembre 2010 à l’encontre de la décision rendue le 10 février 2010 suite à un avis du Bureau d’évaluation médicale.
[14] Dans un deuxième temps, le tribunal traitera de la contestation de la travailleuse à l’égard de la question de l’emploi convenable retenu par la CSST, soit celui d’assembleuse de petits objets.
1 - LA CONTESTATION HORS DÉLAI DU 24 SEPTEMBRE 2010 À L’ENCONTRE DE LA DÉCISION DU 10 FÉVRIER 2010
[15] Le tribunal doit évaluer le bien-fondé de la décision de la Révision administrative du 6 octobre 2010 qui déclarait irrecevable une contestation de la travailleuse logée le 24 septembre 2010 à l’encontre de la décision du 10 février 2010.
[16] Il est manifeste en toute apparence que cette contestation du 24 septembre 2010 dépasse largement le délai de 30 jours prévu par la loi pour loger une contestation.
[17] Les dispositions applicables à la résolution du présent litige sont les articles 358 à 358.2 de la loi qui se lisent comme suit :
358. Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.
Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365 .
Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2 ni du refus de la Commission de renoncer à un intérêt, une pénalité ou des frais ou d'annuler un intérêt, une pénalité ou des frais en vertu de l'article 323.1 .
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1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14; 2006, c. 53, a. 26.
358.1. La demande de révision doit être faite par écrit. Celle-ci expose brièvement les principaux motifs sur lesquels elle s'appuie ainsi que l'objet de la décision sur laquelle elle porte.
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1997, c. 27, a. 15.
358.2. La Commission peut prolonger le délai prévu à l'article 358 ou relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter, s'il est démontré que la demande de révision n'a pu être faite dans le délai prescrit pour un motif raisonnable.
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1997, c. 27, a. 15.
[18] Sur la question du motif raisonnable, le tribunal s’en remet à l’interprétation suivante, notamment énoncée dans l’affaire Julien et Construction Nationair inc. (F) et C.S.S.T.[2] qui énonce ce qui suit :
[28] La notion de « motif raisonnable » n’étant pas définie à la loi, la jurisprudence retient qu’il doit s’agir d’un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure, de réflexion et de bon jugement et qu’à cet égard le comportement de la personne s’appréciera en fonction d’une personne prudente et diligente3.
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3 Viault et Le Bifthèque, C.L.P. 242031-32-0408, 18 janvier 2005, L. Langlois.
[19] Le tribunal est d’avis, après analyse du dossier du témoignage du conjoint de la travailleuse, monsieur Jacinto Desouza, de même que celui de la travailleuse, que cette dernière n’a présenté aucun motif raisonnable permettant d’expliquer son retard à contester la décision du 10 février 2010.
[20] Essentiellement, la travailleuse a tenté d’établir qu’elle possède des capacités limitées sur le plan cognitif et de la compréhension des enjeux du dossier l’empêchant de faire une saine administration de ses affaires. La travailleuse accumule les dossiers et les documents pêle-mêle sans véritablement comprendre leur utilité.
[21] Dans un premier temps, le tribunal fait le constat que la travailleuse n’a jamais prétendu ne pas avoir reçu la décision du 10 février 2010. Or, comme la travailleuse a reçu cette décision, le tribunal note que celle-ci précise bien en termes simples et faciles à comprendre ce qui suit :
Nous vous invitons à communiquer avec nous si vous avez besoin de renseignements supplémentaires au sujet de cette décision ou pour toute autre question. Vous ou votre employeur pouvez demander la révision de la décision par écrit dans les 30 jours suivant la réception de la présente lettre.
(nos soulignements)
[22] De façon générale, la travailleuse soumet que son conjoint ne lui a pas fait la lecture de la décision du 10 février 2010 et en conséquence il n’a pu adéquatement la conseiller sur la marche à suivre. La travailleuse soumet qu’elle ne loge jamais elle-même les contestations et qu’elle a un niveau de compréhension très faible des questions relevant de son dossier à la CSST.
[23] Le tribunal ne retient pas ces éléments de preuve. Le tribunal est d’avis que la preuve ne démontre pas que la travailleuse est incapable de voir à l’administration de ses affaires malgré ses capacités limitées.
[24] Une lecture attentive du dossier permet plutôt de démontrer que la travailleuse a eu plusieurs discussions avec les intervenants de la CSST, que ce soit les agents d’indemnisation ou le conseiller en réadaptation. Lors de ces discussions, la travailleuse demande des précisions ou des explications supplémentaires face aux actions entreprises par la CSST dans son dossier. La travailleuse formule des objections avec les intervenants démontrant parfois son désaccord ou son approbation relativement à différents aspects du dossier. Les notes évolutives démontrent également que la travailleuse a logé des appels téléphoniques à plusieurs reprises auprès de la CSST pour obtenir des informations complémentaires sur les décisions prises par cet organisme.
[25] Au surplus, en ce qui concerne précisément la décision du 10 février 2010, le dossier démontre que l’agente chargée du dossier a téléphoné à la travailleuse et elle lui a expliqué les conséquences de la décision du 10 février 2010 suivant l’avis du Bureau d’évaluation médicale.
[26] Une note évolutive du 11 février 2010 consignée par madame Cindy Turmel de la CSST rapporte qu’elle a logé un appel à la travailleuse dans le but d’expliquer les conséquences de l’avis rendu par le Bureau d’évaluation médicale et lui précise même qu’elle recevra une décision en ce sens.
[27] De plus, le 15 février 2010, la travailleuse logeait un appel à la CSST référant clairement à l’avis du Bureau d’évaluation médicale quant aux limitations fonctionnelles à retenir en lien avec la lésion. La travailleuse énonce même à l’agente qu’elle n’est aucunement en mesure de travailler en raison de l’importance de ses douleurs. Lors de cette conversation, la travailleuse précise en outre qu’elle ne peut demander de l’aide à son mari pour quoi que ce soit.
[28] Par ailleurs, bien que la travailleuse ait évoqué dans son témoignage qu’elle avait des capacités de lecture et d’écriture très limitées, celle-ci reconnaît à l’audience avoir demandé de l’aide à ses proches pour effectuer des démarches pour ses contestations auprès de la CSST. Par ailleurs, la travailleuse a démontré également la capacité de voir à la gestion de ses affaires quand elle a elle-même donné le mandat à un avocat dans le présent dossier de loger une contestation auprès du tribunal.
[29] Enfin, le tribunal constate que le conseiller en réadaptation impliqué dans le dossier, soit monsieur Louis-Philippe Auger, a clairement indiqué le 17 mars 2010 à la travailleuse qu’elle pouvait contester les décisions rendues dans son dossier, et ce, même si elle était en dehors du délai légal pour le faire. Or, malgré cette suggestion du 17 mars 2010, la travailleuse n’a déposé sa contestation que le 24 septembre 2010, soit très largement encore au-delà du délai de 30 jours prévu par la loi.
[30] Le tribunal est d’avis en conséquence que la travailleuse n’a démontré l’existence d’aucun motif raisonnable permettant de la relever de son défaut d’avoir logé une contestation dans le délai imparti par loi. Sa demande de révision du 24 septembre 2010 est donc irrecevable à l’encontre de la décision du 10 février 2010.
[31] En conséquence, la décision du 10 février 2010 doit être maintenue intégralement suite à l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale. Dans ce contexte, la date de consolidation de la lésion subie par la travailleuse le 16 avril 2008 demeure fixée au 25 janvier 2010 sans traitements médicaux au-delà de cette date. La travailleuse conserve par ailleurs une atteinte permanente de 2,20 % en raison d’une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées. Enfin, les limitations fonctionnelles retenues sont énoncées comme suit par le Bureau d’évaluation médicale :
EXISTENCE OU ÉVALUATION DES LIMITATIONS FONCTIONNELLES :
Madame Asselin devra éviter les activités qui impliquent de :
- soulever, porter, pousser, tirer de façon répétitive ou fréquente des charges de plus de 5 à 15 kilos,
- effectuer des mouvements répétitifs ou fréquents de flexion, d’extension ou de torsion de la colonne lombaire, même de faible amplitude,
- monter fréquemment plusieurs escaliers,
- marcher en terrain accidenté ou glissant.
Elle devra éviter d’accomplir de façon répétitive ou fréquente les activités qui impliquent de :
- travailler en position accroupie,
- ramper ou grimper,
- subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale (ex. : provoqués par du matériel roulant sans suspension).
[32] Dans ce contexte, l’analyse qui suivra portant sur le caractère convenable de l’emploi d’assembleuse de petits objets sera faite en fonction des conclusions médicales précitées retenues par le Bureau d’évaluation médicale et confirmées par la présente décision du tribunal.
2 - LA CONTESTATION DE LA TRAVAILLEUSE À L’ÉGARD DE L’EMPLOI CONVENABLE DÉTERMINÉ PAR LA CSST D’ASSEMBLEUSE DE PETITS OBJETS
[33] La travailleuse soumet que l’emploi retenu par la CSST n’est pas convenable et que dans les faits, compte tenu de son témoignage et celui de son médecin, le docteur Rémi Corriveau, elle est incapable d’effectuer tout emploi en raison de ses problèmes physiques et psychologiques.
[34] Le tribunal énonce immédiatement que, suite à l’analyse de l’intégralité du dossier et de la preuve présentée à l’audience, l’emploi retenu par la CSST, soit celui d’assembleuse de petits objets constitue un emploi convenable qui respecte la définition apparaissant à l’article 2 de la loi et qui se lit comme suit :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion;
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1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1; 2009, c. 24, a. 72.
[35] Le tribunal souligne d’emblée la particularité de ce dossier menant à une détermination unilatérale de l’emploi convenable par la CSST pour le motif de l’absence de collaboration de la travailleuse au processus de réadaptation.
[36] De cette définition, il ressort que l’emploi convenable peut être ainsi qualifié lorsqu’il répond aux quatre critères suivants :
1. il permet l’utilisation des capacités résiduelles du travailleur;
2. il permet l’utilisation des qualifications professionnelles du travailleur;
3. il présente une possibilité raisonnable d’embauche;
4. il présente des conditions d’exercice ne comportant pas de danger pour la santé, la sécurité ou l’intégrité physique du travailleur, compte tenu de sa lésion.
[37] Le tribunal retient également que l’emploi convenable doit constituer un emploi « approprié » qui doit tenir compte, dans la mesure du possible, de la réalité du travailleur, c’est-à-dire de ses caractéristiques personnelles, de ses acquis par le travail et de ses capacités de gain.
[38] La détermination de l’emploi convenable tire sa source de l’application des articles 145, 146 et 166 de la loi :
145. Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.
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1985, c. 6, a. 145.
146. Pour assurer au travailleur l'exercice de son droit à la réadaptation, la Commission prépare et met en œuvre, avec la collaboration du travailleur, un plan individualisé de réadaptation qui peut comprendre, selon les besoins du travailleur, un programme de réadaptation physique, sociale et professionnelle.
Ce plan peut être modifié, avec la collaboration du travailleur, pour tenir compte de circonstances nouvelles.
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1985, c. 6, a. 146.
166. La réadaptation professionnelle a pour but de faciliter la réintégration du travailleur dans son emploi ou dans un emploi équivalent ou, si ce but ne peut être atteint, l'accès à un emploi convenable.
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1985, c. 6, a. 166.
[39] Conformément à l’article 166 de la loi, après avoir conclu que l’emploi prélésionnel ne respecte pas les limitations fonctionnelles du travailleur, la CSST enclenche le processus de réadaptation prévu à l’article 171 de la loi qui se lit comme suit :
171. Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent et que son employeur n'a aucun emploi convenable disponible, ce travailleur peut bénéficier de services d'évaluation de ses possibilités professionnelles en vue de l'aider à déterminer un emploi convenable qu'il pourrait exercer.
Cette évaluation se fait notamment en fonction de la scolarité du travailleur, de son expérience de travail, de ses capacités fonctionnelles et du marché du travail.
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1985, c. 6, a. 171.
[40] Rappelons dans le présent dossier que le tribunal doit prendre pour acquis sur le plan médical les conclusions émises par le Bureau d’évaluation médicale dans son avis émis sous la plume du docteur Jean-Pierre Lacoursière, orthopédiste, le 2 février 2010. En conséquence, la lésion de la travailleuse survenue le 16 avril 2008 fut consolidée le 25 janvier 2010 et ne nécessitait aucun traitement additionnel. Cette lésion laissait une atteinte permanente de 2,20 % en raison d’une entorse lombaire avec séquelles fonctionnelles objectivées. Au chapitre des limitations fonctionnelles, celles-ci ont été énumérées plus avant dans cette décision.
[41] C’est dans ce contexte qu’une première décision du 10 février 2010 entérinait cet avis et informait la travailleuse qu’en raison de la présence de limitations fonctionnelles, elle recevrait des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur sa capacité à exercer un emploi.
[42] Cette décision fut émise le 24 mars 2010 par le conseiller en réadaptation, monsieur Louis-Philippe Anger. Celle-ci énonçait que la travailleuse ne pouvait reprendre son travail habituel et qu’une évaluation a été effectuée pour déterminer si elle était en mesure d’accomplir un autre emploi sur le marché du travail. La CSST retenait dans ce contexte un emploi convenable d’assembleuse de petits objets.
[43] Le témoignage de la travailleuse et de son médecin le docteur Rémi Corriveau a été entendu à l’audience de même que celui du conseiller en réadaptation, monsieur Louis-Philippe Auger, relativement au caractère convenable de cet emploi retenu par la CSST.
[44] Le tribunal constate un élément important à la lecture des notes évolutives du dossier, soit que la travailleuse s’estime d’emblée incapable d’exercer tout emploi. La travailleuse a manifestement une perception négative quant à sa propre capacité de retourner un jour dans un quelconque emploi sur le marché du travail. Les notes évolutives révèlent qu’à partir du 27 août 2009, la travailleuse multiplie les discours centrés sur l’invalidité complète et sur l’inemployabilité suite à la lésion professionnelle survenue le 16 avril 2008. Or, à cette date, l’avis du Bureau d’évaluation médicale qui sera seulement rendu en février 2010, on ne connaît toujours pas les séquelles précises que conservera la travailleuse suite à sa lésion professionnelle.
[45] Au surplus, le témoignage du conseiller en réadaptation entendu à l’audience, monsieur Louis-Philippe Auger, a témoigné de façon probante de cette perception personnelle de la travailleuse et de ce discours clairement orienté par elle vers l’inemployabilité. À l’occasion de chaque rencontre ou contact téléphonique, la travailleuse rappelle au conseiller en réadaptation son incapacité à retourner sur le marché du travail en raison de sa lésion physique ou de son manque d’instruction. Le témoin précise également que la volonté de participation de la travailleuse n’est pas présente. La travailleuse a renoncé par ses paroles et ses refus à participer à sa démarche d’exploration des possibilités professionnelles remettant ainsi à toutes fins pratiques le choix de l’emploi convenable à la seule discrétion du conseiller en réadaptation.
[46] Comme les dispositions législatives précitées le confirment, la collaboration de la travailleuse dans l’établissement d’un plan individualisé de réadaptation est souhaitable dans le contexte de l’article 146 de la loi. Toutefois, devant l’absence de collaboration réelle de la travailleuse, la CSST peut à l’occasion être justifiée de rendre la décision de façon unilatérale. C’est le cas dans le présent dossier, le tribunal estime que la CSST n’avait d’autre choix que de procéder de cette façon. Le tribunal s’inspire notamment des conclusions dans l’affaire Bergeron et Groupe Pro-B inc.[3], dans laquelle on peut lire ce qui suit :
[203] Le tribunal constate d’abord que la détermination de l’emploi convenable s’est faite de manière unilatérale, à la suite d’une seule rencontre avec le travailleur, laquelle s’est déroulée dans les bureaux de la CSST le 15 octobre 2009.
[204] Rappelons que l’article 146 de la loi, pour assurer au travailleur l’exercice de son droit à la réadaptation, stipule que la CSST doit préparer et mettre en œuvre un plan individualisé de réadaptation avec sa collaboration.
[205] Qu’en est-il en l’espèce? Le tribunal retient des notes évolutives d’octobre 2009 et du témoignage du travailleur que son attitude n’en est pas une de collaboration. Le tribunal constate que le travailleur veut qu’on le laisse tranquille. Comme en 2006 et tel que rapporté à la note évolutive du 11 octobre 2006, le travailleur ne veut pas non plus participer, en 2009, au processus de détermination de l'emploi convenable. Le travailleur démontre de l’avis du tribunal un manque évident de coopération, il refuse toute initiative de la CSST quant à son plan de réadaptation. Qui plus est, l’attitude du travailleur à l’audience confirme cette impression.
[206] Comme le souligne la Commission des lésions professionnelles11, le travailleur a l'obligation de collaborer avec la CSST aux fins de l'élaboration d'un plan individualisé de réadaptation selon l'article 146. Cette obligation implique, à tout le moins, la participation la plus empressée et efficace possible du travailleur dans la fourniture des informations pertinentes aux fins de l'élaboration d'un plan réaliste, soit celles relatives aux limitations fonctionnelles permanentes conservées à la suite de sa lésion professionnelle, celles relatives à ses goûts et aptitudes, de même que celles se rapportant à sa scolarité et à ses expériences de travail.
[207] En l'espèce, le travailleur ne cesse de questionner la conseillère en réadaptation, sur ses compétences professionnelles. Lorsqu’elle lui propose de regarder les titres d’emploi qu’elle a identifiés, le travailleur indique à la conseillère qu’il ne le fera pas. Lorsqu’elle lui propose de les apporter avec lui pour les regarder, le travailleur indique qu’il ne fera pas ce travail avec la conseillère. Lorsque la conseillère informe le travailleur qu’elle a imprimé la simulation de versement de l’indemnité réduite de remplacement du revenu, le travailleur ne veut pas regarder le document et ne veut pas l'apporter avec lui. Il lui répète « de faire ce que j’ai à faire ». Essentiellement ce que le travailleur souhaite c’est de pouvoir recevoir ses indemnités de remplacement du revenu jusqu’à 65 ans. L’ensemble de ces éléments permet de croire à une attitude négative de la part du travailleur et à une grande réticence à participer à la détermination d'un emploi convenable. Une telle attitude rend difficile l'élaboration d'un plan et révèle un refus évident de collaborer avec la CSST.
[208] Dans un tel contexte, le tribunal estime que la CSST pouvait, unilatéralement, déterminer un emploi convenable, puisque le travailleur fait défaut de collaborer à son plan de réadaptation. Elle doit, comme c’est le cas en l’espèce, chercher à susciter l’intérêt du travailleur et évaluer l'emploi qu'elle entend retenir en fonction des exigences permettant de qualifier l'emploi de convenable au sens de la loi12.
[209] Qui plus est, dans une note du 26 octobre 2009, la conseillère écrit qu’elle a fait un retour d’appel au travailleur à la suite de la décision. Elle écrit que la décision mentionne que le travailleur a participé à un processus. Or, le travailleur n’a pas pris part « à quoi que ce soit » et il souhaite que ce soit écrit au dossier. Il indique « qu’il nous poursuivra au civil si nous persistons à indiquer qu’il a collaboré. Il souhaite que ce soit clair qu’il n’a pas participé à rien » et estime que l’emploi convenable est selon lui une fabulation de la conseillère précédente.
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11 Lessard et CSST, [1995] C.A.L.P. 1718 .
12 Haraka et Garderie Les gardelunes, [1999] C.L.P. 350 ; Ahmed et Canadelle inc., C.L.P., 124178-73-9910, 15 mai 2000, F. Juteau; Mailloux et Dudley inc., C.L.P., 259967-62A-0504, 15 janvier 2007, J. Landry.
(nos soulignements)
[47] Par ailleurs, le tribunal doit tout de même évaluer le caractère convenable de l’emploi retenu par la CSST, soit celui d’assembleuse de petits objets.
[48] Le tribunal est d’avis suite à l’étude du dossier et après avoir entendu le témoignage probant du conseiller en réadaptation, monsieur Louis-Philippe Auger, que l’analyse quant à la détermination de l’emploi convenable a été faite de façon rigoureuse. Le conseiller en réadaptation s’est inspiré à la fois des données fournies dans l’extrait REPÈRES, soit un document officiel qui décrit la nature des tâches exercées par une assembleuse de petits articles et les conditions générales d’exercice de cette fonction. Le conseiller en réadaptation a également utilisé une étude de marché concernant les conditions générales d’exercice de l’emploi d’assembleur de petits articles.
[49] Le tribunal, avant d’entrer dans l’analyse des critères de l’emploi convenable, tient à faire un commentaire général sur le témoignage du docteur Rémi Corriveau entendu à l’audience pour le compte de la travailleuse. L’objectif de son témoignage visait à démontrer que la travailleuse ne conservait aucune capacité sur les plans physique et psychologique pour effectuer l’emploi d’assembleuse de petits objets ni même de retourner, dans un avenir prévisible, dans aucun emploi sur le marché du travail. Toutefois, le témoignage du docteur Corriveau a été rendu avec beaucoup d’émotivité et empreint d’une empathie démesurée à l’égard de la situation particulière de la travailleuse. Le médecin a témoigné comme s’il était lui-même un membre de la famille et, pour le tribunal, son témoignage coloré par des émotions très vives lui a enlevé manifestement son objectivité.
[50] Le tribunal rappelle le contenu des attentes du tribunal relatives au rôle des médecins experts qui témoignent à l’audience[4]. Le rôle de l’expert est d’éclairer le tribunal et de l’aider à évaluer la preuve qui relève de l’expertise que le tribunal lui reconnaît (article 3 des attentes). Par ailleurs, sur le plan des attentes générales, le tribunal s’attend à ce que l’expert respecte des exigences d’objectivité et d’impartialité (article 6.1.2). L’expert doit toujours se rappeler que son devoir premier est à l’égard du tribunal (article 6.3) et enfin, l’expert évite de se comporter en représentant de la partie qui l’engage s’abstenant entre autres de commenter les règles de droit applicables au cas soumis (article 6.4). Pour le tribunal, le témoignage, bien que sincère du docteur Corriveau, donnait l’impression qu’il prenait non seulement fait et cause pour la travailleuse, mais qu’il avait en fait beaucoup de difficultés à s’en dissocier dans la réalité. Dans ce contexte, son témoignage n’a pas de valeur probante et le tribunal ne peut retenir celui-ci rendu dans un contexte où l’objectivité n’a pas été mise de l’avant.
[51] Quant à l’appréciation des critères de l’emploi convenable, le tribunal souligne sur le plan de la capacité résiduelle, l’existence de limitations fonctionnelles de classe II émises par le docteur Lacoursière dans le cadre de son avis de février 2010. Il s’agit de limitations fonctionnelles au niveau lombaire qui sont déjà décrites plus avant dans cette décision.
[52] Le tribunal estime que les exigences physiques de l’emploi proposées, selon le document REPÈRES déposé à l’audience, énoncent qu’un tel emploi exige d’être capable de travailler en position assise et debout ou en marche et être capable de travailler dans des positions inconfortables, soit se pencher et s’accroupir. Cet emploi exige d’être capable de coordonner les mouvements de ses membres supérieurs et aussi être capable de soulever un poids d’environ 5 à 10 kilos. Le tribunal est d’avis qu’il y a adéquation entre les exigences physiques de l’emploi déterminé et les limitations fonctionnelles établies au dossier. Par ailleurs, le tribunal réfère à l’étude de marché déposée au dossier dans le cadre de l’audience. Cette étude de marché importée d’un dossier d’un autre travailleur donne un portrait général des conditions de travail et des perspectives d’emploi de l’emploi convenable choisi par la CSST. Il s’agit d’une preuve pertinente et fiable d’autant plus que cette démarche a été réalisée de façon contemporaine à la détermination de l’emploi d’assembleur de petits articles dans le présent dossier.
[53] Ce document, précise les exigences physiques du poste ainsi que la description de certaines tâches impliquées dans le travail d’assembleur de petits articles. Le tribunal retient le caractère peu exigeant sur le plan physique, tel qu’énoncé dans ce document :
3. Quelles sont les exigences physiques ?
Manipulation de poids
La moitié des répondants (50%) affirment que les assembleurs de petits articles doivent manipuler des poids de 5 kg et moins pendant une période représentant entre 67 et 100% du temps de travail.
La manipulation de poids de 5 kg et moins pendant une période représentant entre 34 et 66% du temps de travail combinée à la manipulation de poids de 5 à 10 kg pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail est relevée auprès de 3 répondants (25%).
La manipulation de poids de 5 kg et moins pendant une période représentant entre 67 et 100% du temps de travail combinée à la manipulation de poids de 10 à 15 kg pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail est relevée auprès d’un répondants (8%). [sic]
La manipulation de poids de 5 à 10 kg pendant une période représentant entre 67 et 100% du temps de travail combinée à la manipulation de poids de 10 à 15 kg pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail est relevée auprès d’un répondants (8%). [sic]
Positions assise et debout
Le tiers des répondants affirment que le travail se fait en position assise, soit 4 répondants du 12. Plus précisément, le travail se fait totalement en position assise pendant une période représentant entre 67 et 100% du travail pour 2 répondants (17%)
Le travail se fait en position assise pendant une période représentant entre 67 à 100% du temps de travail combinée à une position debout stationnaire pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail pour 1 répondant (8%).
Le travail se fait en position assise pendant une période représentant entre 34 à 66% du temps de travail combinée à une position debout stationnaire pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail pour 1 répondant (8%).
Par ailleurs, 7 répondants affirment que les assembleurs de petits articles doivent travailler en position debout stationnaire pendant une période représentant entre 67 à 100% du temps de travail et 1 répondant affirme que le travail se fait en position debout stationnaire pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail combinée à de la marche pendant une période représentant entre 34 à 66% du temps de travail.
Positions inconfortables (telles que s’accroupir et se pencher)
50% des répondants affirment qu’il n’y a pas de position inconfortable. 5 répondants sur 12 (42%) affirment qu’il y a des positions inconfortables pendant une période représentant entre 0 à 33% du temps de travail. 1 répondant (8%) affirme qu’il y a des positions inconfortables pendant une période représentant entre 34 à 66% du temps de travail.
[54] De plus, le tribunal retient le témoignage du conseiller en réadaptation, monsieur Louis-Philippe Auger. Ce dernier, dans l’exercice de ses fonctions de conseiller en réadaptation, a supervisé des stages en milieu de travail concernant précisément l’emploi d’assembleur de petits objets. Il a lui-même constaté la simplicité des tâches à effectuer ainsi que la facilité de manipulation des différents outils utilisés. Son témoignage est probant également sur le fait que ces emplois sont de type sédentaire et parfois offerts par des entreprises de travail adapté pour des personnes présentant un handicap physique ou mental.
[55] Quant au critère de la qualification professionnelle, le tribunal souligne que la qualification exigée pour occuper l’emploi convenable ne réfère à aucune formation spécifique et qu’une formation en cours d’emploi est généralement donnée par l’employeur.
[56] Il est vrai que la travailleuse n’est pas hautement scolarisée, mais les employeurs potentiels n’exigent pas nécessairement de secondaire ni d’expérience particulière dans le domaine. Le tribunal retient le témoignage du conseiller en réadaptation Auger affirmant que ce type d’emploi se retrouve à l’intérieur d’entreprises souvent adaptées offrant ce travail entre autres aux personnes présentant un handicap mental. La travailleuse serait donc tout autant en mesure d’accomplir ce travail que toute autre personne présentant un handicap.
[57] Le tribunal retient également l’analyse du conseiller en réadaptation démontrant que l’emploi d’assembleuse de petits objets permettra à la travailleuse de retrouver plusieurs compétences et aptitudes s’apparentant à l’exercice de son emploi prélésionnel à savoir un emploi manuel ou un emploi nécessitant l’utilisation d’outils, d’équipement et comportant des tâches répétitives. Il s’agit d’un emploi demandant de suivre des normes selon des étapes précises et déterminées et permettant de voir un résultat concret à la fin du travail effectué. Le tribunal est d’avis que ce critère est ainsi respecté.
[58] Quant aux possibilités raisonnables d’embauche, il appartenait à la travailleuse de faire la démonstration qu’il y avait absence de possibilités de dénicher un emploi de cette nature. Dans le présent dossier, la travailleuse a manifestement refusé de participer à l’élaboration de son programme de réadaptation. Celle-ci s’estime invalide et n’a fait strictement aucune démarche concrète pour trouver un emploi d’assembleuse de petits objets.
[59] Par ailleurs, le tribunal se doit de retenir les données du système REPÈRES attestant qu’en terme de perspective d’emploi pour la période 2008-2012 pour l’ensemble du Québec, les perspectives sont acceptables. Pour le tribunal, il s’agit d’un emploi approprié pour la travailleuse dont les conditions d’exercice sont sans danger pour sa santé et sa sécurité. L’ensemble des critères de la définition de l’emploi convenable est ainsi respecté.
[60] Le tribunal ne retient pas le témoignage flou, chaotique et général de la travailleuse de même que celui de son médecin visant à établir qu’elle serait désormais inemployable et qu’elle n’a aucune capacité résiduelle tant sur le plan physique que psychologique.
[61] Le tribunal ne retient pas l’expertise du docteur Jean-François Roy du 16 février 2011 relativement à la nature des limitations fonctionnelles plus particulièrement. En fait, le tribunal réitère que c’est l’avis du Bureau d’évaluation médicale du mois de février 2010 du docteur Lacoursière qui a été retenu et en conséquence, ce sont des limitations fonctionnelles de classe II qui servent de base à l’analyse du présent dossier. Par ailleurs, le tribunal note que le docteur Roy, contrairement à la travailleuse et au docteur Rémi Corriveau qui a témoigné à l’audience, ne déclare pas que la travailleuse est inemployable. Le docteur Roy affirme plutôt que la travailleuse est apte à un travail sédentaire qui l’autoriserait à changer ses postures au besoin. Le tribunal est d’avis que même en tenant compte de cette affirmation du docteur Roy, l’emploi d’assembleuse de petits objets correspond précisément à cet énoncé d’un travail relativement sédentaire qui permet de changer les positions au besoin.
[62] Quant aux difficultés de compréhension de la travailleuse et de sa condition psychologique, le tribunal est d’avis qu’il faut considérer la preuve au moment où fut rendue la décision de capacité à exercer un emploi, soit en mars 2010.
[63] La preuve médicale au dossier démontre plutôt que l’état psychologique de madame n’était pas en lien avec sa lésion professionnelle, tel qu’en fait foi la décision rendue le 3 février 2010 énonçant qu’après l’analyse de sa réclamation, la CSST déclarait que le diagnostic de trouble d’adaptation avec humeur anxio-dépressive n’était pas en lien avec la lésion survenue le 16 avril 2008.
[64] Par ailleurs, le diagnostic psychologique est apparu une seule fois au cours de la consolidation de la lésion de la travailleuse et aucune information médicale particulière ne laisse croire que celle-ci était porteuse d’une pathologie psychologique invalidante de façon contemporaine à la détermination de l’emploi convenable, soit en mars 2010. Le docteur Corriveau a témoigné à l’audience que la condition de la travailleuse se serait détériorée dans la dernière année du point de vue physique, mais également sur le plan psychologique. Il a également affirmé que la travailleuse avait des problèmes aux mains et aux pieds sans préciser le diagnostic précis puisque la travailleuse subit toujours des investigations à ce niveau. Le tribunal est d’avis que le témoignage du docteur Corriveau dresse un bilan médical postérieur à la décision portant sur la capacité à exercer l’emploi convenable qui n’a pas de pertinence puisqu’il faut se placer au moment de l’évaluation effectuée, soit en mars 2010.
[65] Le tribunal est donc d’avis que la travailleuse est capable d’exercer l’emploi convenable d’assembleuse de petits objets à compter du 23 mars 2010.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la contestation de madame Colette Asselin, la travailleuse, déposée le 12 octobre 2010;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 6 octobre 2010 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE irrecevable la demande de révision produite le 24 septembre 2010 à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 10 février 2010 faisant suite à l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale le 4 février 2010;
CONFIRME la décision rendue par la CSST le 24 mars 2010 déclarant que la travailleuse est capable d’occuper l’emploi convenable d’assembleuse de petits objets à compter du 23 mars 2010.
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JEAN-LUC RIVARD |
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Me Rénald Labbé |
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Représentant de la partie requérante |
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Me Julie Rancourt |
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VIGNEAULT THIBODEAU BERGERON |
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Représentante de la partie intervenante |
AVIS :
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