Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉGION :

Montréal

MONTRÉAL, 23 décembre 2002

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER :

176220-71-0201

DEVANT LA COMMISSAIRE :

Me Huguette Rivard

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DES MEMBRES :

Sarto Paquin

 

 

 

Associations d’employeurs

 

 

 

 

 

 

 

Robert Côté

 

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ASSISTÉE DE L'ASSESSEUR :

Pierre Nadeau

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST :

119148955

AUDIENCE TENUE LE :

23 octobre 2002

 

 

 

 

EN DÉLIBÉRÉ LE :

7 novembre 2002

 

 

 

 

 

 

À :

Montréal

 

 

 

 

 

 

_______________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ROBERT MANDEVILLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

 

CHOMEDEY MÉTAL INC.

 

 

 

 

 

 

CLIMATISATION MORRISON (1988) INC.

 

 

 

 

 

 

DANAIR INC.

 

 

 

 

 

 

 

ENERQUIN AIR INC.

 

 

 

 

 

 

 

ENTREPRISE DE RÉFRIGÉRATION LS INC.

 

 

 

 

 

 

GROUPE CONSTRUCTION NATIONAL INC.

 

 

 

 

 

 

KOLOSTAT INC.

 

 

 

 

 

 

 

MÉCANIQUE R.H. LTÉE

 

 

 

 

 

 

 

SAYERS ET ASSOCIÉS QUÉBEC LTÉE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TOIT PROFILES MET. NOBEL ST-LAURENT

 

 

 

 

 

VENTILATION MANIC INC.

 

 

 

 

 

 

 

PARTIES INTÉRESSÉES

 

 

 

 

 

 

et

 

 

 

 

 

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL - SOUTIEN À L’IMPUTATION

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 

 


 

DÉCISION

 

 

[1]               Le 8 janvier 2002, le travailleur, monsieur Robert Mandeville, dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue le 5 décembre 2001 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST), à la suite d’une révision administrative.

[2]               Par cette décision, la CSST confirme une décision qu’elle a initialement rendue le 15 mars 2001, refusant sa réclamation pour maladie professionnelle pulmonaire du 13 novembre 2000.

[3]               À l’audience, tenue devant la Commission des lésions professionnelles le 23 octobre 2002, le travailleur était présent et représenté par Me Annie Gagnon.  Monsieur Mark De Angelis de Climatisation Morrisson (1988) inc. était présent et Me Sylvain Lamontagne représentait les employeurs Groupe Construction National inc. et Kolostat inc.

[4]               Un délai a été accordé aux parties afin de produire leur argumentation écrite.  Ce délai a été respecté et le dernier document a été reçu le 7 novembre 2002, date à laquelle la Commission des lésions professionnelles a pris le dossier en délibéré.

L'OBJET DE LA CONTESTATION

[5]               Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer qu’il a été atteint d’amiantose le 13 novembre 2000, une maladie professionnelle pulmonaire ou subsidiairement, que les plaques pleurales retrouvées chez le travailleur constituent une maladie professionnelle causée par les risques particuliers du travail qu’il a effectué.

LES FAITS

[6]               Le travailleur a fait plusieurs réclamations pour maladie professionnelle pulmonaire et il a été admis à l’audience que les faits versés dans la décision rendue le 28 mai 1999 par la Commission des lésions professionnelles, portant le numéro 87770-73-9704, étaient conformes. 

[7]               Pour une meilleure compréhension du dossier, un bref résumé de ces faits s’avère utile dans les circonstances de la présente affaire.

[8]               Le travailleur a débuté comme apprenti ferblantier en avril 1955.  Il a occupé des postes dans différentes compagnies au fil des ans.

[9]               Le 28 mai 1991, il dépose une réclamation à la CSST alléguant être victime d’une maladie professionnelle après avoir été exposé à la fibre d’amiante dans le cadre de son travail.  Un diagnostic d’amiantose probable est alors posé.

[10]           Lors d’un examen de routine, on découvre des plaques pleurales.  Il est noté qu’il présente des symptômes d’asthénieet de fatigabilité.  Un diagnostic d’amiantose pleurale probable est alors posé.

[11]           Une tomodensitométrie pulmonaire effectuée le 11 juin 1991 mettait en évidence de nombreuses plaques pleurales compatibles avec une exposition à l’amiante et des granulomes calcifiés la lingula.  Le parenchyme pulmonaire était sans particularité.

[12]           Le 24 octobre 1991, le Comité des maladies professionnelles pulmonaires notait que le travailleur faisait part d’une grande fatigue avec présence de dyspnéeoccasionnelle et variable, ainsi que de l’anxiété.

[13]           L’examen des poumons révélait de fines crépitations télé-inspiratoires et les données spirométriques se situaient dans les limites de la normale.  En conclusion, le Comité mentionnait un bilan fonctionnel respiratoire dans les limites de la normale, une tolérance à l’effort adéquate, une courbe pression/volume d’aspect normal et une anomalie de la pression transpulmonairemaximale, pouvant témoigner d’un manque de collaboration.  Le Comité concluait qu’il n’y avait pas assez d’éléments pour poser un diagnostic de pneumoconiose ou d’amiantose.  Il ne retenait pas d’atteinte permanente ni de limitation fonctionnelle. 

[14]           Les pneumologues suggéraient au médecin traitant de poursuivre l’investigation de façon à trouver une explication plus valable à l’asthénie importante dont se plaignait le travailleur.

[15]           Le 15 novembre 1991, les membres du Comité spécial des présidents concluaient qu’ils n’avaient pas assez d’éléments pour leur permettre de poser le diagnostic de maladie pulmonaire professionnelle et de pneumoconiose chez le travailleur et ils ne prévoyaient aucune atteinte permanente.

[16]           Le travailleur en a appelé de la décision qui a suivi le rapport de ce Comité, mais s’est désisté de cet appel par la suite. 

[17]           En 1992, une tomodensitométrie démontre plusieurs plaques pleurales calcifiées secondaires à l’exposition à l’amiante et un léger changement interstitiel aux deux bases pulmonaires, compatible avec une amiantose.

[18]           Le médecin alors rencontré, le docteur Rabinovitch, le 3 mars 1992 conclut que ces changements n’ont pas affecté la fonction pulmonaire du travailleur et ne causeront pas de symptômes.

[19]           En avril 1992, le travailleur se soumet à un test de tolérance à l’effort, stade 1, qui n’a pas dévoilé de problème cardiaque ni pulmonaire.

[20]           Le 7 mars 1994, le travailleur est examiné par le docteur Pierre Ernst, pneumologue, qui conclut que celui-ci a eu une exposition certaine à l’amiante qui a résulté en la présence de plaques pleurales bilatérales, un signe classique d’exposition « ces anomalies ne sont pas associées à des déficits pulmonaires cliniquement significatifs cependant.  L’atteinte de ce monsieur n’est pas comparable aux fibroses pleurales diffuses que l’on peut aussi voir chez certains sujets exposés à l’amiante.  L’absence de déficit aux tests de fonction pulmonaire confirme bien l’absence d’atteinte importante de l’état respiratoire chez ce monsieur.  »

[21]           Le docteur Margaret Becklake produit une expertise en date du 17 février 1995.  Elle indique au docteur Chartrand que le travailleur se plaint de plusieurs symptômes dont des difficultés respiratoires, variables depuis 1981, des crampes dans la poitrine liées à l’effort, une toux occasionnelle avec sensation d’étouffement et d’étourdissement, de même qu’une dyspnée variable et certains sillements, surtout à l’effort. 

[22]           En février 1995, la mesure de l’élasticité pulmonaire et la spirométrie sont normaux, mais l’examinateur souligne que le travailleur ne fournit pas l’effort maximal.

[23]           Le 16 février 1995, on fait état d’un phénomène d’hyperventilation lors des tests à l’effort.  Un nouveau bilan fonctionnel de base est normal, sauf pour des anomalies dues à un manque d’effort.

[24]           Le 22 mars 1995, une tomodensitométrie pulmonaire met en évidence des plaques pleurales calcifiées sans fibrose interstitielle et un nodule calcifié à la lingula.

[25]           De nouvelles épreuves à l’effort sont effectuées le 5 mai 1995.  Il est noté « This is an abnormal exercise showing mainly an abnormal pattern of breathing with very high ventilation during exercice and very fast frequency of breathing.  »  On fait état que cette association avait été rapportée auparavant chez des patients qui présentaient une amiantose minime avec des plaques pleurales et dans les cas d’hypertension pulmonaire.

[26]           Le 11 mai 1995, le radiologiste Kosiuk compare les radiographies simples effectuées les 2 avril 1991 et 19 janvier 1995, ainsi que les tomodensitométries des 20 février 1992 et 22 mars 1995.   Il conclut que ces tests ne révèlent pas de changement significatif entre ces époques.  Il indique cependant que la plus récente tomodensitométrie, faite en position ventrale et dorsale, révèle « subpleural interstitial changes suggestive of asbestosis.  » 

[27]           Le 18 mai 1995, le docteur Becklake considère que le cas du travailleur mérite une réévaluation par la CSST puisqu’il est porteur de plaques pleurales bilatérales avec des épanchements pleuraux bilatéraux liés à son exposition professionnelle à l’amiante, de même qu’une amiantose précoce dans les zones sous-pleurales.  Elle indique que les valeurs prédites pour des tests de volume pulmonaire et de spirométrie pour un individu de l’âge et de la taille de monsieur Mandeville, sont plus ou moins 20%.  Sans information sur les niveaux de ses tests antérieurs, elle est d’avis qu’il n’y a aucune façon de savoir si les niveaux des volumes et des tests spirométriques actuels représentent une diminution importante pour lui dans les dernières années ou si ces niveaux sont restés stables.  Les individus recrutés qui acceptent des travaux de col bleu comme emploi ont des tests de fonction pulmonaire au-dessus de 100%.  Elle note une évidence d’anomalies dans l’adaptation en exercice du travailleur.  Ces anomalies sont documentées dans deux laboratoires indépendants et à deux reprises à l’Hôpital Royal Victoria.  Elle est d’avis que ceci exclue un manque important de coopération de la part du travailleur.

[28]           Le 8 février 1996, le travailleur subit une épreuve d’effort sur tapis roulant.  L’épreuve est arrêtée pour cause de dyspnée hors de proportion.  Il est noté que le travailleur présente une faible résistance à l’effort et que l’électrocardiogramme est douteux.

[29]           Le 15 mai 1996, le travailleur produit une nouvelle réclamation à la CSST, allègue souffrir d’amiantose et se réfère au rapport du docteur Becklake. 

[30]           Le 30 août 1996, il se soumet à des épreuves de provocation bronchique.  Il est noté des variations dans l’effort fourni par le travailleur et on conclut qu’il existe une évidence de constriction bronchique à une faible concentration de méthacoline.

[31]           Le 6 septembrefévrier 1996, le docteur Cosio soumet le travailleur à des épreuves à l’effort.  Il note une hyperventilation anormale durant l’exercice « with a tremendous rise breathing frequency and plateauning on the tidal volume.  The nature of this ventilatory response is unclear, however voluntary hyperventilation could not be excluded.  »

[32]           Le 4 août 1997, le docteur Becklake écrit de nouveau au docteur Chartrand.  Selon les différents tests réalisés depuis les dernières années, elle est d’avis que le travailleur a subi une aggravation de sa condition.  Elle conclut qu’il est porteur de plaques pleurales qui sont devenues plus épaisses et plus étendues.  Il est également porteur de fibrose pleuro-viscérale diffuse, compte tenu de l’oblitération des angles costophréniques sur la radiographie de profil du 3 mars 1995.  Il y a également des épanchements pleuraux répétitifs manifestés par des douleurs thoraciques et elle ajoute une possibilité d’une amiantose précoce.  Ces conditions ont laissé des séquelles permanentes dans l’adaptation à l’effort qui empêchent le travailleur de reprendre son métier de ferblantier.  Il est aussi porteur d’une hyperréactivité bronchique sévère.

[33]           Le docteur Becklake remplit par la suite le formulaire pour la Régie des rentes du Québec.  Au niveau des diagnostics, elle indique que le travailleur souffre d’épaississements pleuraux avec plaques pleurales et de fibrose interstitielle bilatérale précoce qui semblent être radiologiquement stables au moins depuis 1992, mais qui peuvent toujours progresser.

[34]           Le 14 mai 1998, le Comité des maladies professionnelles pulmonaires étudie le dossier.  L’examen physique ne révèle pas de dyspnée, mais on note de légères crépitations aux poumons, surtout du côté droit.  Les tests fonctionnels respiratoires font état que le travailleur se dit épuisé par les épreuves à l’effort et on conclut que le bilan fonctionnel ne fait pas la démonstration d’anomalie significative et ceci, malgré la piètre collaboration du sujet et non la reproductibilité des tracés. 

[35]           Les pneumologues notent que les radiographies pulmonaires mettent en évidence des plaques pleurales sans épaississements pleuraux diffus et sans oblitération des angles costophréniques et que la tomodensitométrie pulmonaire ne fait pas la démonstration de pathologie au niveau de l’interstice.

[36]           Le Comité conclut que le travailleur est porteur de plaques qui sont des stigmates de son exposition à l’amiante, mais qu’elles ne représentent pas de maladie pulmonaire professionnelle.  Ces plaques ne donnent pas de modification significative de la fonction respiratoire.  Même si les plaques augmentent au cours des années, le Comité note que ceci est un processus très lent.  En 1991 et 1998, la capacité pulmonaire totale est restée la même et pour ce qui est de la capacité vitale forcée, compte tenu de la variabilité des valeurs obtenues et de leur manque de reproductibilité, il n’y a pas de différence significative.  Les radiographies et les tomographies ne font aucunement la démonstration d’épaississements pleuraux diffus, ni de fibrose pleuro - viscérale.  Il n’y a pas d’évidence d’épanchements pleuraux à répétition chez cet individu.  Il n’y a non plus aucune évidence de pathologie interstitielle chez le travailleur.  On rejette également les diagnostics d’hyperréactivité bronchique et le Comité conclue qu’il ne peut relier la symptomatologie à une maladie pulmonaire professionnelle, ni à l’exposition antérieure de ce travailleur à l’amiante.  Le Comité suggère que le médecin oriente ses recherches ailleurs pour trouver une explication valable à la symptomatologie incapacitante du travailleur.

[37]           Le 4 juin 1998, le Comité spécial des présidents révise l’ensemble du dossier y compris les opinions du docteur Becklake et constate qu’il n’a pas les éléments nécessaires pour poser un diagnostic de maladie professionnelle pulmonaire et précise que les plaques pleurales ne sont pas considérées comme une maladie professionnelle pulmonaire.  Cette réclamation n’a pas été accueillie par la Commission des lésions professionnelles en date du 28 mai 1999 et la requête en révision n’a pas non plus été accueillie en date du 11avril 2000.

Nouvelle réclamation - Tests

[38]           Le 13 novembre 2000, le travailleur soumet à la Commission des lésions professionnelles une réclamation pour maladie professionnelle pulmonaire avec une expertise du docteur Becklake, datée du 12 septembre 2000, afin de démontrer que la maladie dont le travailleur est porteur est caractéristique d’un travail qu’il a exercé et qu’elle est reliée aux risques particuliers de ce travail.  Cette maladie a évolué progressivement de 1991 à 1998 et à l’examen le plus récent à l’Hôpital Royal Victoria du 12 décembre 2000, au point où il y a des séquelles anatomiques.  L’évolution progressive a entraîné des séquelles fonctionnelles et un déficit anatomo-physiologique (DAP) maintenant évident plutôt à l’effort physique qu’au repos. Le docteur Bencklake s’appuie sur les tests de fonction pulmonaire qui se retrouvent dans tous les rapports issus de différents laboratoires, effectués par différents techniciens sur différents appareils.  Il appert qu’entre 1991 et le 11 août 2000, les tests ont une certaine cohérence en les regardant à long terme.  Ils ne sont pas nécessairement moins reproductibles que les résultats semblables sur d’autres sujets étudiés dans différents laboratoires. Le docteur Becklake commente certains examens qui ont été faits antérieurement et qui n’ont pas été retenus par la Commission des lésions professionnelles.  Il avait été décidé, en début d’audience, que les examens antérieurs ne seraient retenus dans la décision qu’à titre comparatif avec les nouveaux examens puisqu’il avait été mentionné que cette maladie peut évoluer.  Donc, à titre de comparaison seulement, ces rapports ne peuvent être commentés puisqu’une décision finale a été rendue à cet égard.

[39]           Le 27 juillet 2000, le travailleur subit une radiographie qui est comparée à celle effectuée le 27 mars 1997.  On fait état qu’il n’y pas de changement significatif en rapport avec les plaques pleurales.  « The left lower lobe calcified nodule is still present and has not changed.  There is evidence of minimal interstitial disease at the bases bilaterally and in retrospect they were present minimally in 1997.  This is consistent whit minimal asbestosis.  »

[40]           Le 11 août 2000, le travailleur subit encore un test de la fonction respiratoire de l’Hôpital Royal Victoria et le docteur Cosio fait état « The pressure volume curve shows that the curve is entirely within the normal envelope and the patient is able to pull maximum pressure of 39 cm of H2O which is 129% predicted which is within normal limits.  CONCLUSION :  Pressure volume curve is within normal limits suggesting that there is a normal mechanical conditions of the lung .»

[41]           Le 31 août 2000, des épreuves à l’effort sont effectuées à l’Hôpital Royal Victoria.  « The patient exercised to 827 ml/min which is 46% predicted and the exercise was stopped because the patient could not maintain the necessary speed on the bicycle.  At the time he claimed general fatigue.  The main abnormality seen during this exercise is the pattern of breathing showing the lack of an increase in tidal volume with all the ventilation increase being secondary to the increase in the respiratory rate.  The sudden increase in ventilation at the end of exercise is after the patient started having difficulties on the bicycle and the heart rate remaining the same or decreasing and is probably of no pathological significance only representing hyperventilation at the end of exercise.  CONCLUSION :  Exercise limitation secondary to a ventilatory abnormality compatible with a pleural plaque.  » (sic)

[42]           Le 8 novembre 2000, le travailleur subit un autre test de la fonction respiratoire à l’Hôpital Royal Victoria.  Le docteur Cosio, qui avait déjà examiné le travailleur auparavant, fait état que la fonction pulmonaire est dans les limites de la normale « with normal spinometry.  Lung volumes are within normal limits and normal diffusing capacity.  The methacholine challenge test is also normal with no drop in FEV 1 after 16mg/ml of methacholine.  »

[43]           Le 5 février 2001, les membres du Comité des maladies professionnelles pulmonaires interprètent la radiographie standard faite le même jour.  Ils constatent uniquement la présence de plaques pleurales dont ils mesurent, sur le cliché de profil, l’épaisseur et l’étendue.  Ils ne trouvent aucun épaississement pleural dans les angles costophréniques.

[44]           Le 8 février 2001, le travailleur rencontre les docteurs Gaston Ostiguy, André Cartier et Neil Colman, pneumologues pour le Comité B de Montréal des maladies professionnelles pulmonaires.  Ils font une revue du dossier depuis 1995 et remontent dans l’historique occupationnel à 1991.  Ils font état que le travail a exposé le travailleur, sans aucun doute, à l’amiante.

[45]           Au niveau du questionnaire cardio-respiratoire, on fait état qu’il est excessivement difficile à questionner.  On note que toute la symptomatologie alléguée est décrite avec un débit verbal incompatible avec une dyspnée importante. 

[46]           Au niveau de l’examen physique, à l’état général on note qu’il est eupnéique au repos et même à la conversation rapide.  Il n’est pas cyanosé.

[47]           À l’auscultation pulmonaire, on note un murmure vésiculaire de bonne qualité et de fines crépitations télé-inspiratoires à la région antéro-latérale de la base droite.  À l’auscultation cardiaque, les bruits sont normaux, sans souffle. 

Tests fonctionnels respiratoires

 

Ce bilan s’est limité à un bilan de base au repos.  En effet, compte tenu des effets secondaires que le réclamant rapporte à chaque fois qu’on lui fait faire un bilan à l’effort et qu’il lui prend plusieurs semaines à s’en remettre, les épreuves d’effort n’ont pas été répétées d’autant plus qu’elles avaient été faites en août 2000 et que les résultats ont été rapportés par le Dr Becklake dans son expertise en date du 12 septembre 2000.

 

Actuellement, il n’y a pas d’évidence d’obstruction des voies aériennes.  Les données spirométriques sont normales et certaines valeurs sont mêmes supra-normales comme la capacité vitale à 108% de la valeur prédite et la capacité pulmonaire totale à 111% de la valeur prédite.  La capacité de diffusion est normale à 85% de la valeur prédite même si on utilise les valeurs prédites de Crapo.

 

On a cependant mesuré les propriétés élastiques pulmonaires et la pression transpulmonaire maximale est redevenue à 30 comme dans le passé.  La compliance semi-statique est normale.  Les volumes pulmonaires ont été remesurés lors de la mesure des propriétés élastiques pulmonaires et les valeurs obtenues sont superposables à celles obtenues quelques jours précédemment.

 

Encore une fois, la capacité vitale est supra-normale à 116% de la valeur prédite et la capacité pulmonaire totale est à 108% de la valeur prédite.

 

Les gaz artériels de repos se situent également dans les limites de la normale.

 

Il n’y a aucun évidence de détérioration de la fonction respiratoire depuis 1991, compte tenu du vieillissement de 10 ans.

 

La meilleure capacité vitale est passée de 4.6 à 4.2 ce qui donne une perte de 400 ml/10 ans donc 40 ml/année.  (sic)

 

 

[48]           Au niveau des radiographies pulmonaires, en comparaison avec les radiographies pulmonaires antérieures allant jusqu’à 1995, « on réalise que les plaques pleurales ont augmenté particulièrement du côté gauche.  À noter qu’à chaque fois, les inspirations sont peu profondes et que les diaphragmes ne descendent même pas sous l’extrémité antérieure de la cinquième côte.  En postérieur, les diaphragmes se superposent à l’arc postérieur des neuvième côtes.  » (sic)

[49]           Le Comité note qu’une tomodensitométrie a été faite le 27 juillet 2000 et qu’elle a été comparée à plusieurs tomographies axiales antérieures faites à l’Hôpital Royal Victoria.  Les membres du Comité trouvent que cet examen confirme la présence des plaques pleurales bilatérales, mais il n’y a pas suffisamment d’anomalies dans le parenchyme pulmonaire pour leur permettre de poser un diagnostic de fibrose pulmonaire interstitielle ou d’amiantose et ceci même si à quelques reprises, les radiologistes ont suggéré la possibilité d’amiantose minime chez ce réclamant.

[50]           En conclusion, au point de vue du diagnostic, les membres du Comité font état avoir étudié longuement le dossier, avoir pris connaissance de la décision de la Commission des lésions professionnelles du 28 mai 1999 et de la décision en révision du 11 avril 2000 entérinant les conclusions de la précédente.

[51]           Ils ont également pris connaissance des nombreux bilans fonctionnels respiratoires et particulièrement de l’expertise médicale produite par le docteur Becklake en date du 12 septembre 2000.

[52]           Ils reconnaissent que le travailleur est porteur de plaques pleurales et que ces dernières ont progressé avec le temps, particulièrement du côté gauche.  « Cependant, les résultats des bilans fonctionnels respiratoires de même que la révision des radiographies pulmonaires et des tomographies axiales ne leur fournissent pas les éléments nécessaires pour poser un diagnostic de fibrose interstitielle ou d’amiantose.

Les membres du Comité ne croient pas que les plaques pleurales ont des répercussions sur la fonction respiratoire du réclamant.  Monsieur Mandeville conserve des données spirométriques qui sont supranormales.

 

Il n’y a pas d’évidence d’augmentation du recul élastique pulmonaire.  Les variations dans les pressions transpulmonaires maximales sont de l’ordre des variations habituelles inhérentes à la reproductibilité du test.

 

La symptomatologie rapportée par monsieur Mandeville est certainement hors de proportion avec celle que l’on devrait normalement retrouver chez quelqu’un qui est porteur de plaques pleurales et compte tenu également des données des bilans fonctionnels respiratoires.  Il est bon également de mentionner que parmi les symptômes mentionnés par monsieur Mandeville, il y a des céphalées, une incapacité de se concentrer, une fatigue extrême qui ne peuvent s’expliquer par la présence des plaques pleurales.

 

En ce qui concerne sa tolérance à l’exercice, cette tolérance a diminué au cours des années, mais monsieur Mandeville est plutôt inactif depuis 1991 et il n’est pas retourné au travail.  De plus, il n’a pas été possible de reproduire l’hyperxcitabilité bronchique puisqu’au mois d’août 2000, il n’avait pas d’hyperréactivité bronchique au test de provocation bronchique non spécifique à la méthacholine. » (sic)

 

 

[53]           Le 1er mars 2001, les membres du Comité spécial des présidents étudient le dossier du travailleur.  Ils ont pris connaissance des conclusions des expertises antérieures et particulièrement de la dernière produite par le Comité des maladies pulmonaires professionnelles du 8 février 2001.  Ils ont révisé attentivement les documents radiologiques et pris connaissance de la discussion produite par le Comité des maladies professionnelles pulmonaires.  Ils ont revu l’histoire occupationnelle, les données du questionnaire cardio-respiratoire, la médication, les habitudes et les antécédents personnels et familiaux.  La description de l’examen physique de même que les résultats des examens de laboratoire ont été notés.  Ils ont relu la radiographie pulmonaire et ils ont analysé les valeurs du bilan fonctionnel respiratoire.  À la suite de cet examen, ils entérinent les conclusions émises par le Comité des maladies pulmonaires professionnelles B de Montréal et ne reconnaissent pas de maladie pulmonaire professionnelle chez ce réclamant.  Dans ce contexte, aucun DAP de lui est accordé, ni limitations fonctionnelles.

[54]           Le Comité spécial des présidents était composé des docteurs Raymond Bégin, Marc Desmeules et Jacques-Jacques Gauthier, pneumologues.

[55]           Le travailleur a fait entendre le docteur Margaret Becklake, pneumologue et chercheure dans ce domaine depuis de nombreuses années, comme en fait foi son curriculum vitae déposé à l’audience. En plus de ses recherches de type épidémiologique, elle fait de la consultation médicale et suit des malades en clinique externe.

Témoignage et expertise du docteur Becklake

[56]           Le docteur Becklake témoigne à partir des constatations qu’elle a consignées dans son expertise du travailleur, effectuée le 12 septembre 2000.

[57]           Dans le test fait le 31 août 2000, à l’Hôpital Royal Victoria, le docteur Becklake fait état qu’à l’effort, le volume d’air augmente à chaque respiration et la fréquence augmente.  Si la personne souffre d’anxiété, elle se manifesterait au début et non seulement à la fin du test.  Or, le Comité des maladies professionnelles pulmonaires a fait état d’une réaction non-spécifique à de l’hyperventilation

[58]           Elle est d’avis que la condition respiratoire du travailleur s’est détériorée entre les derniers examens faits par un Comité des maladies professionnelles pulmonaires,  le 14 mai 1998 et ceux qui ont été réalisés en vue de son expertise du mois de  septembre 2000. La progression des lésions pleurales a causé des séquelles fonctionnelles qui se manifestent plutôt à l’effort.

[59]           Les principaux points sur lesquels elle diverge d’opinion avec les membres des comités de maladies professionnelles pulmonaires concernent l’examen critique des documents radiologiques, des épreuves fonctionnelles pulmonaires au repos et à l’effort, ainsi que sur les symptômes du travailleur.

[60]           Au sujet des examens radiologiques, elle rappelle que les tomographies axiales faites à l’hôpital Royal Victoria le 20 février 1992, le 22 mars 1995 et le 27 juillet 2000 ont toutes montré des images compatibles avec une amiantose minime, selon le radiologiste Kosiuk. Selon elle, il y aggravation de l’intégrité physique du travailleur en contradiction avec l’opinion des membres des comités des maladies pulmonaires qui ont interprété ces lésions comme 0/0, c’est‑à‑dire normales.

[61]           Au sujet des bilans fonctionnels respiratoires au repos, elle note que la diminution de la capacité vitale forcée a été 3 fois plus grande que prévue entre le 12 février 1999 à l’hôpital Général de Montréal et le 11 août 2000 à l’hôpital Royal Victoria. De plus, les valeurs du rapport VEMS / CVF sont toujours normales, ce qui reflète une évidence « modeste »  d’un profil restrictif comme on s’attend de voir dans les anomalies du parenchyme, de la plèvre ou de la paroie thoracique.

[62]           Pour supporter son diagnostic d'amiantose précoce, elle souligne les modifications de la mécanique pulmonaire qui suggèrent plutôt un processus parenchymateux pulmonaire qu’une atteinte pleurale. Ces changements sont une baisse de la compliance pulmonaire entre le 16 février 1996 et le 11 août 2000, associée à une augmentation de la pression maximale de recul élastique, passant de 30 centimètres d’eau en 1996 à 39 en 2000.

[63]           Au sujet des tests à l’effort, le docteur Becklake insiste beaucoup sur l’augmentation anormale de la fréquence respiratoire à l’exercice, plutôt qu’une augmentation proportionnelle du volume d’air courant. Elle ajoute : « Il est important de noter aussi la reproductibilité de cette adaptation anormale en exercice, évidente dans tous les tests effectués par le travailleur en cause depuis le 12 octobre 1991 jusqu’au 11 août 2000 dans trois (3) laboratoires différents du Québec.  »  Ces anomalies respiratoires à l’effort expliquent sur une base organique la dyspnée dont se plaint le travailleur, sans nécessité de rechercher une cause psychologique. La même explication vaut pour comprendre sa grande fatigue à l’effort.

[64]           En résumé, elle croit qu’il y a eu détérioration parce qu’il est admis de tous que les plaques pleurales se sont étendues et que ceci entraîne une rigidité de la paroi thoracique, se reflétant dans les anomalies fonctionnelles qu’elle a soulignées. Ces anomalies modifient l’adaptation du travailleur à l’effort.

[65]           Elle croit aussi qu’il y a présence d’amiantose, en se basant sur la présence de râles crépitants, d’images suggestives de cette maladie à la tomographie et sur les anomalies fonctionnelles, particulièrement à l’effort.

[66]           Le docteur Becklake soumet une littérature « The Relationship between Respiratory Impairment and Asbestos-Related Pleural Abnormality in an Active Work Force[1]» suggérant « That the most commun radiographic findings in asbestos-exposed, isolated pleural plaques are associated will a significant reduction in FEV, and FVC, which cannot be attributed to the presence of radiographic and sub radiographic pulmonary fribosis».  Dans cette condition, l’essoufflement à l’effort important serait statistiquement significatif en relation avec l’étendue des plaques pleurales indépendamment de maladie du parenchyme pulmonaire.  Elle soumet également une autre littérature « Expiratory Flow Limitation.  Detection and Clinical Implications[2] »  qui fait état « The highest pulmonary ventilation that a subject can achieve is ultimately limited by the highest flow rates that can be generated ».  Cette étude fait partie d’un symposium sur les maladies pulmonaires obstructives chroniques, ayant comme objectif d’en préciser la pathogénie, les mécanismes de production.  L’étude citée traite des méthodes de mesure de la réduction des débits expiratoires chez les sujets atteints d’une maladie pulmonaire obstructive chronique, une affection que le travailleur n’a pas.  L’auteur mentionne que la limitation des débits expiratoires, même à l’air courant, peut contribuer à expliquer la dyspnée de ces malades.  Le docteur Becklake croit qu’il y a une analogie à faire pour comprendre la dyspnée dont le travailleur se plaint.

L'ARGUMENTATION DES PARTIES

[67]           La représentante du travailleur plaide l’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[3] (LATMP) pour un diagnostic d’amiantose

[68]           Premièrement, l’exposition à l’amiante est reconnue par le Comité des maladies professionnelles pulmonaires en date du 8 février 2001 et, deuxièmement, l’expertise du docteur Becklake avec les examens récents, démontre des séquelles anatomiques, donc des anomalies d’adaptation des fonctions respiratoires à l’effort chez le travailleur.  Troisièmement, l’évolution des tests et des plaques pleurales démontre que ce n’est pas simplement l’âge ou l’inactivité du travailleur qui fait en sorte que le problème s’est aggravé.  Subsidiairement, elle plaide que les plaques pleurales représentent une maladie professionnelle due aux risques particuliers du travail du travailleur.

[69]           Le représentant de l’employeur plaide pour sa part que les plaques pleurales ne représentent pas une maladie professionnelle pulmonaire et qu’il n’a pas été démontré d’existence de séquelles relativement aux fonctions respiratoires du travailleur.  Il s’en reporte aux analyses du docteur Cosio en date du 11 août 2000 et aux rapports des six pneumologues du Comité des maladies professionnelles pulmonaires et du Comité spécial des présidents.  Ceux-ci ne retiennent pas suffisamment d’anomalies dans le parenchyme pulmonaire pour diagnostiquer une fibrose pulmonaire interstitielle ou une amiantose.

L'AVIS DES MEMBRES

[70]           Le membre issu des associations syndicales est d’avis qu’une décision antérieure fait état que les plaques pleurales ne sont pas une maladie professionnelle et que rien n’a été présenté en ce sens que le travailleur souffre d’une maladie professionnelle pulmonaire ou non et qu’il n’y avait pas assez d’éléments dans le dossier justifiant une dégradation de son état.

[71]            Le membre issu des associations d’employeurs est d’avis que six pneumologues ont pris connaissance des nouveaux examens du docteur Becklake, de tout le dossier, de même que de son expertise et que ceux-ci sont d’avis qu’il n’y a pas lieu de retenir une maladie professionnelle pulmonaire chez le travailleur en regard de sa réclamation du 13 novembre 2000.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

[72]           La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si le travailleur souffre d’une maladie professionnelle pulmonaire d’amiantose et subsidiairement si les plaques pleurales constituent une maladie professionnelle reliée aux risques particuliers de son travail.

[73]           À l’article 2 de la loi, on définit comme suit les notions de lésion professionnelle et de maladie professionnelle :

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation;

 

« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail;

 

 

[74]           L’article 29 se lit comme suit :

29. Les maladies énumérées dans l'annexe I sont caractéristiques du travail correspondant à chacune de ces maladies d'après cette annexe et sont reliées directement aux risques particuliers de ce travail.

 

Le travailleur atteint d'une maladie visée dans cette annexe est présumé atteint d'une maladie professionnelle s'il a exercé un travail correspondant à cette maladie d'après l'annexe.

________

1985, c. 6, a. 29.

[75]           L’article 30 se lit comme suit :

30. Le travailleur atteint d'une maladie non prévue par l'annexe I, contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui ne résulte pas d'un accident du travail ni d'une blessure ou d'une maladie causée par un tel accident est considéré atteint d'une maladie professionnelle s'il démontre à la Commission que sa maladie est caractéristique d'un travail qu'il a exercé ou qu'elle est reliée directement aux risques particuliers de ce travail.

________

1985, c. 6, a. 30.

 

 

[76]           Pour bénéficier de l’application de la présomption de maladie professionnelle prévue à l’article 29 de la loi, le travailleur doit démontrer qu’il est atteint d’une maladie visée à l’annexe 1 de la loi et qu’il a exercé un travail correspondant à cette maladie d’après l’annexe.

[77]           La section V de l’annexe I de la loi comporte la mention suivante :

SECTION V

 

 

MALADIES PULMONAIRES CAUSÉES PAR DES POUSSIÈRES

ORGANIQUES ET INORGANIQUES

 

MALADIES

GENRES DE TRAVAIL

1.       Amiantose, cancer pulmonaire ou mésothéliome causé par l'amiante:

un travail impliquant une exposition à la fibre d'amiante;

 

 

[78]           Dans la présente affaire, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que le diagnostic d’amiantose ne peut être retenu.  En effet, bien qu’il ne fait aucun doute que le travailleur ait été exposé à l’amiante, puisque ceci a été reconnu par tous les examinateurs au dossier, la présence de plaques pleurales ne permet pas de conclure à la présence d’une maladie pulmonaire professionnelle à elle seule.  Selon le docteur Becklake, la présence de plaques pleurales, la fibrose pleuro-viscérale et l’amiantose précoce ont été retrouvées chez le travailleur.

[79]           À la tomodensitométrie de 1995, on met en évidence des plaques pleurales calcifiées sans fibrose interstitielle et un nodule calcifié à la lingula.

[80]           En 2000, il est fait état qu’il n’y pas de changements significatifs en rapport avec les plaques pleurales, mais qu’il y a une minime fibrose interstitielle, mais qu’en rétrospective elle était présente minimalement en 1997.  On ajoute « Consistant with minimal Asbestosis », c’est-à-dire qu’on voit une possibilité d’amiantose.  Cependant six pneumologues se prononcent quant à cet examen et ils sont d’avis qu’il n’y a pas d’évidence d’amiantose.

[81]           Le travailleur est porteur de plaques pleurales importantes pour lesquelles il y a eu une augmentation par rapport aux examens précédents selon le Comité des maladies professionnelles pulmonaires.  Cependant, la Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’il n’y a pas d’atteinte fonctionnelle significative selon ces derniers.

[82]           Le docteur Becklake souligne une foule de détails qui n’ont pas été retenus par les autres observateurs du Comité des maladies professionnelles pulmonaires et du Comité spécial des présidents.  Le docteur Becklake doute que les membres du Comité aient examiné les clichés pulmonaires de profil, mais le rapport d’interprétation de ces radiographies, prises le 5 février 2001, indiquent clairement que l’on a examiné les clichés de profil pour mesurer l’épaississement et l’étendue des plaques pleurales.  On a noté aussi au cours du dossier que le travailleur avait des difficultés à passer des tests.  Le docteur Becklake fournit beaucoup d’hypothèses qui ne sont pas retenues par les six autres pneumologues.  Elle fait état de fibrose viscérale, mais les volumes pulmonaires sont toujours plus grands que la normale prédite et la capacité de diffusion demeure normale, selon le Comité des maladies professionnelles pulmonaires.  Les membres du Comité ont mentionné également qu’il n’y a pas suffisamment d’anomalies dans le parenchyme pulmonaire pour leur permettent de poser un diagnostic de fibrose pulmonaire interstitielle ou d’amiantose et ceci, même si à quelques reprises, les radiologistes ont suggéré la possibilité d’amiantose minime chez ce réclamant.  De plus, l’examen du docteur Cosio du 8 novembre 2000 rapporte un test de fonction pulmonaire normal.  Le test passé à l’Hôpital Royal Victoria le 17 août 2000, concernant toujours la fonction respiratoire, est également dans les limites de la normale, de même que celui effectué le 11 août 2000 pour les propriétés élastiques pulmonaires.  Les volumes pulmonaires ont été remesurés lors d’une nouvelle mesure des propriétés élastiques pulmonaires et les valeurs obtenues sont superposables à celles retenues quelques jours précédemment, selon le docteur Ostiguy dans son rapport au Comité des maladies professionnelles pulmonaires. Les membres du Comité sont d’avis qu’il n’y a aucune évidence de détérioration de la fonction respiratoire depuis 1991, compte tenu du vieillissement de dix ans.  Il en résulte que la capacité vitale, la capacité pulmonaire totale et la souplesse pulmonaire sont normales en 1995, en 2000 et en 2001.  Ceci ne supporte pas le diagnostic d’amiantose, ni celui de fibrose pleurale étendue. 

[83]           Quant aux plaques pleurales, l’article soumis par le docteur Becklake (T6) n’est pas pertinent puisque les tests de fonction pulmonaire du travailleur sont normaux.  Il n’y a pas eu démonstration de l’existence de séquelles sur la fonction respiratoire du travailleur, en particulier, sa capacité vitale demeure à 108% de la normale.

[84]           Ce Comité conclut et ne croit pas que les plaques pleurales ont des répercussions sur la fonction respiratoire du réclamant et que le travailleur conserve des données spirométriques supra-normales.

[85]           Comme les plaques pleurales dans le présent cas indiquent une exposition mais n’affectent pas de façon significative sa fonction respiratoire, on ne peut non plus conclure qu’il y a présence de syndrome restrictif ou d’atteinte du parenchyme, tel que mentionné par le Comité B dans ses conclusions qui ajoute que ce syndrome restrictif est habituellement la principale manifestation des pathologies pleurales secondaires à l’amiante.

[86]           Le docteur Becklake a beaucoup insisté sur l’augmentation de la fréquence respiratoire à l’effort, en l’absence d’une augmentation proportionnelle du volume d’air courant.  Elle y voit un signe de rigidité pleurale ou pulmonaire comme on pourrait retrouver dans une fibrose pleurale étendue ou dans une amiantose.  Par ailleurs, le rapport du Comité des maladies professionnelles pulmonaires, entériné par le Comité spécial des présidents, émet l’interprétation suivante de ce phénomène :

« En ce qui concerne le profil ventilatoire, cette augmentation de la ventilation à l’effort à partir de l’accélération de la fréquence respiratoire plutôt que d’une augmentation du volume courant, les membres du Comité trouvent qu’il s’agit d’une réaction non spécifique et qui pourrait être associée à un certain degré d’hyperventilation.  D’ailleurs, lors des derniers tests du mois d’août 2000, on voit que la PCO2 télé-expiratoire à l’effort est tombée à 30, 31 mm de Hg. » 

 

 

[87]           La Commission des lésions professionnelles estime comme prépondérante l’opinion des six pneumologues qui retiennent que la présence de plaques pleurales chez le travailleur ne constitue pas une maladie pulmonaire.

[88]           Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles ne peut conclure que le travailleur ait démontré qu’il est atteint d’une amiantose et celui-ci ne peut donc bénéficier de l’application de la présomption prévue à l’article 29 de la loi quant à une maladie professionnelle pulmonaire.

[89]           La représentante du travailleur nous demande d’analyser le dossier sous l’angle de la maladie professionnelle reliée aux risques particuliers du travail du travailleur.

[90]           Pour considérer une maladie professionnelle, il faut d’abord avoir une maladie.  Or, les six pneumologues ont mentionné qu’il n’y avait pas d’amiantose et que les plaques pleurales ne constituent pas comme telle une maladie.  Le mot « maladie » indique une altération de l’état de santé.  Or, les six pneumologues viennent nous dire que malgré la présence de plaques pleurales, à la suite d’une exposition à l’amiante, l’état de santé de ce travailleur n’est pas attribuable à ces plaques pleurales.  Il a été démontré qu’il n’y avait pas de répercussion significative sur la fonction respiratoire du travailleur.  De plus, les tests pulmonaires se sont avérés normaux.

[91]           Dans ces circonstances, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que le travailleur n’a pas démontré avoir souffert d’une quelconque maladie professionnelle en relation avec son travail, le 13 novembre 2000, et qu’en conséquence, il n’a donc pas droit aux bénéfices prévus par la loi.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête du travailleur, monsieur Robert Mandeville;

CONFIRME la décision initialement rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail 15 mars 2001, à la suite de sa révision administrative;

DÉCLARE que le travailleur n’a pas subi de maladie professionnelle pulmonaire le 13 novembre 2000 et qu’en conséquence, il n’a donc pas droit aux bénéfices prévus par la loi.

 

 

 

 

Me Huguette Rivard

 

Commissaire

 

 

 

 

 

OUELLET, NADON & ASSOCIÉS

(Me Annie Gagnon)

 

Représentante de la partie requérante

 

 

 

LEBLANC, LALONDE & ASSOCIÉS

(Me Sylvain Lamontagne)

 

Représentant des parties intéressées

 

 

 



[1]          J. BOURBEAU, P. ERNST, J. CHROME, B. ARMSTRONG et M.R. BECKLAKE, (1990) 142 American Review of Respiratory Disease, pp. 837 à 842.

[2]          J. MILIC-EMILI, « Expiratory Flow Limitation : Roger S. Mitchell Lecture », (2000) 117 Chest 219S, p. 219.

[3]          L.R.Q., c. A-3.001

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