Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Lévis

Le 18 octobre 2005

 

Région :

Chaudière-Appalaches

 

Dossier :

255477-03B-0502

 

Dossier CSST :

125782581

 

Commissaire :

Robin Savard, avocat

 

Membres :

Claude Jacques, associations d’employeurs

 

Marc Villeneuve, associations syndicales

 

 

Assesseure :

Johanne Gagnon, médecin

______________________________________________________________________

 

 

 

Robert Leclerc

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Soudure Rive-Sud enr.

 

Partie intéressée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]                Le 22 février 2005, monsieur Robert Leclerc (le travailleur) dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste la décision rendue le 20 janvier 2005 par la révision administrative de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST).

[2]                Par sa décision, la révision administrative se prononce sur deux décisions distinctes. D'abord, elle confirme la décision rendue le 23 septembre 2004 par la CSST et déclare que le travailleur est porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire de la nature d'une sidérose depuis le 29 janvier 2004.

 

[3]                D'autre part, la révision administrative confirme la décision rendue le 28 septembre 2004 par la CSST et déclare que sa lésion professionnelle du 29 janvier 2004 a entraîné chez le travailleur une atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique (APIPP) de 5,75 % et qu'il a droit à une indemnité pour dommages corporels s'établissant à 2552,43 $, à laquelle les intérêts courus depuis la date de réclamation pour sa lésion professionnelle s'ajouteront à ce montant.

[4]                À l'audience tenue le 13 juillet 2005, à Lévis, le travailleur est présent et assisté de son épouse, madame Lucille Leclerc. Soudure Rive-Sud enr. (l'employeur) est représenté par son président qui est monsieur Robert Leclerc. À la suite de l'audience, et tel que convenu avec le travailleur, la Commission des lésions professionnelles a reçu, le 18 juillet 2005, de la CSST, un complément de dossier concernant le travailleur pour une ou des réclamations qu'il a produites pour se voir reconnaître une maladie professionnelle pulmonaire. Ces documents ont été expédiés aux parties et aux membres du tribunal et un délai fut donné au travailleur pour qu'il puisse les commenter, par écrit, si nécessaire.

[5]                Le 2 août 2005, la Commission des lésions professionnelles a reçu un complément d'argumentation écrite du travailleur, auquel il joint certains autres documents à l'appui de ses prétentions. La cause est prise en délibéré le 16 août 2005.

 

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[6]                Dans le dossier concernant la décision rendue le 23 septembre 2004 par la CSST, qui donne suite à un avis du Comité spécial des présidents pour lequel la CSST est liée sur le diagnostic et les autres constatations de nature médicale prévues à l'article 231 , alinéa 3, de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1](la LATMP), le travailleur ne conteste pas le diagnostic reconnu, soit une sidérose, mais plutôt la date de cette maladie professionnelle pulmonaire qui devrait rétroagir vers le 1er septembre 1966 ou, au plus tard, en 1976.

[7]                Il demande donc à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que sa maladie professionnelle s'est manifestée pendant la période située entre 1966 et 1976.

[8]                Si tel est le cas, il demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que le pourcentage de déficit anatomo-physiologique (DAP), établi à 5 % par la CSST, devrait rétroagir à compter de la date de l'admissibilité de sa maladie professionnelle pulmonaire, auquel devrait s'ajouter les intérêts courus depuis cette date.

 

L’AVIS DES MEMBRES

[9]                Le membre issu des associations d'employeurs et le membre issu des associations syndicales sont d'avis de rejeter la requête produite par le travailleur et de confirmer la décision rendue par la révision administrative de la CSST, et ce, pour les mêmes motifs exposés dans celle-ci.

[10]           D'une part, ils sont d'avis qu'il n'y a aucune preuve médicale prépondérante démontrant que le travailleur était porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire avant le 29 janvier 2004, date de sa réclamation formulée auprès de la CSST et retenue comme date de sa maladie professionnelle pulmonaire.

[11]           D'autre part, ils sont d'avis que les éléments de preuve au dossier ne permettent pas d'établir, selon une prépondérance de preuve médicale, que le travailleur était porteur d'une sidérose qui était compensable depuis 1966 jusqu'à 1977, le tout en vertu de la Loi sur les accidents du travail (LAT) et le Règlement sur le barème des déficits anatomo-physiologiques de cette loi.

[12]           Ils sont aussi d'avis que les nouvelles informations obtenues par le travailleur depuis sa réclamation du 29 janvier 2004, sur le plan médical, permettent, à ce moment, de reconnaître une maladie professionnelle pulmonaire chez le travailleur, soit une sidérose, pour laquelle une présomption de maladie professionnelle est prévue à la section IV de l'annexe I, paragraphe 4, ce qui n'était pas le cas au moment de la réclamation produite par le travailleur, en 1976 et/ou 1977, où il fut vu par un comité de pneumologues.

[13]           Les membres sont d'avis que, fort probablement, même si le travailleur pouvait être porteur d'une sidérose en 1977 ou avant, celle-ci n'était pas compensable, selon la décision rendue le 23 mars 1977 par la CSST qui a expédié celle-ci au travailleur, à l'employeur de l'époque et aux médecins qui ont questionné et examiné le travailleur, notamment les docteurs Pierre Saint-Jacques, Roger T. Roberge et Christian Fortin, qui aurait été le dernier médecin traitant du travailleur à cette période.

[14]           Les membres sont d'avis que le travailleur n'ayant pas contesté cette décision, celle-ci ne peut être remise en doute, sauf si le travailleur demande une prolongation de délai auprès de la CSST qui devra acheminer son dossier à l'organisme compétent.

[15]           En somme, ils sont d'avis que la décision rendue par la révision administrative est bien fondée, c'est-à-dire que le travailleur est porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire depuis le 29 janvier 2004 et qu'il a droit à un pourcentage d'APIPP de 5,75 % qui correspond à une indemnité pour dommages corporels au montant de 2 552,43 $, auquel devront s'ajouter les intérêts courus depuis la date de sa réclamation produite pour une lésion professionnelle.

 

LES FAITS ET LES MOTIFS

[16]           Dans un premier temps, la Commission des lésions professionnelles doit décider depuis quand le travailleur est porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire, soit une sidérose, et si la CSST était justifiée de retenir le 29 janvier 2004 qui correspond à sa « Réclamation du travailleur » (RTR) produite devant cet organisme ?

[17]           Dans un deuxième temps, la Commission des lésions professionnelles doit décider si le montant des dommages corporels retenu par la CSST est bien fondé.

[18]           Après l'analyse de la preuve documentaire, incluant celle reçue de la CSST à la demande du soussigné, des documents déposés par le travailleur, des témoignages rendus par ce dernier et son épouse, madame Lucille Leclerc, et des arguments soumis par le travailleur à l'audience et dans sa lettre datée du 1er août 2005, la Commission des lésions professionnelles rejette sa requête portant sur les deux volets de la décision rendue le 20 janvier 2005 par la révision administrative de la CSST et confirme cette décision, et ce, en raison des faits et des motifs suivants: 

[19]           D'abord, il y a lieu de citer textuellement la décision rendue le 20 janvier 2005 par le réviseur administratif de la CSST qui fait un bon exposé des faits et des motifs qu'il retient pour confirmer les décisions rendues initialement par la CSST, soit celles des 23 et 28 septembre 2004, qui donnent suite notamment à un rapport du Comité spécial des présidents, daté du 30 juin 2004, qui a reconnu une sidérose chez le travailleur, à compter du 29 janvier 2004, et qui entraîne un pourcentage d'APIPP de 5,75 %. Cette décision se lit comme suit: 

R-1125782581-001

 

Le 1er octobre 2004, le travailleur demande la révision d'une décision rendue le 28 septembre 2004. Cette décision établit que la lésion professionnelle survenue le 29 janvier 2004 a entraîné une atteinte permanente à son intégrité physique et psychique (APIPP) de 5,75 %, dont 0,75 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie (DPJV), et établit qu'il a droit à une indemnité pour préjudice corporel de 2 552,43 $.

 

 

 

Ce que le travailleur conteste, c'est le montant des dommages corporels qui lui a été accordé.

 

R-125782581-002

 

Le 11 octobre 2004, le travailleur demande la révision d'une décision rendue le 23 septembre 2004. Cette décision est à l'effet de reconnaître que le travailleur est porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire, soit une sidérose et qu'il subsiste une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Le travailleur est admis au programme de réadaptation pour évaluation de sa capacité au travail. Il a droit à une indemnité pour dommages corporels. Une décision quant au pourcentage et à l'indemnité qui lui seront accordés sera rendue sous peu.

 

Ce que le travailleur conteste, c'est la date de reconnaissance de sa maladie professionnelle.

 

La Révision administrative dispose du présent litige en fonction de l'information contenue au dossier et des observations fournies par le travailleur.

 

Le travailleur a occupé un emploi de soudeur et aide-passeur de rivets de 1957 à 1977. Il a travaillé comme contremaître de 1990 à 1994. Depuis 1991, il est président d'une compagnie de soudure dont il est le seul actionnaire. Il travaille à l'occasion comme soudeur pour son entreprise mais de façon de plus en plus rare.

 

Le 29 janvier 2004, il produit une réclamation pour sa maladie. Il joint une attestation médicale avec le diagnostic de sidérose.

 

Le 14 mai 2004, le Comité des maladies pulmonaires professionnelle de Québec (CMPP) recommande de reconnaître que le travailleur est porteur d'une sidérose pulmonaire et qu'on devrait considérer cette reconnaissance de façon rétroactive. Le CMPP est d'avis que, selon les éléments au dossier, on pourrait considérer le diagnostic posé en 1972. Le CMPP accorde un déficit anatomo-physiologique (DAP) de 5 % pour une maladie irréversible. Le CMPP indique que le travailleur ne doit plus être exposé aux émanations de soudure. Le CMPP estime que les limitations fonctionnelles résultent surtout de la paralysie phrénique et exprime l'avis que le travailleur pourrait occuper un emploi exigeant des efforts légers seulement.

 

Le 30 juin 2004, le Comité Spécial des présidents est d'accord pour reconnaître que le travailleur est porteur d'une sidérose pulmonaire. Il accorde un DAP de 5 % pour une MPP à caractère irréversible. Il indique qu'un rapport de radiographie de dépistage soulevait la possibilité de la lésion de sidérose en 1972. Toutefois, ce travailleur avait été expertisé par un comité de CSST en 1977. Le comité constitué de cinq (5) membres avait conclu à l'absence de sidérose à ce moment. Le Comité Spécial des présidents est d'avis qu'il n'y a pas lieu d'appliquer ce diagnostic de façon rétroactive puisque par ailleurs, il n'y a pas d'autre document radiologique dans l'intervalle. Le Comité Spécial des présidents indique que le travailleur ne doit plus être exposé aux émanations de soudure et que les limitations fonctionnelles résultent surtout de la paralysie phrénique et qu'il pourrait occuper un emploi exigeant des efforts légers seulement. Finalement, le Comité Spécial des présidents propose une réévaluation dans trois ans.

 

Au soutien de ses demandes de révision, le travailleur allègue essentiellement qu'il présente des signes de sidérose depuis 1966. Il réfère à cet égard à une carte de la Ligue antituberculeuse de Québec datant du 1er septembre 1966. Il mentionne qu'il a passé des examens au fil des ans qui font état de sidérose pulmonaire, notamment à partir de 1972. Pour lui, il ne fait aucun doute que sa maladie date depuis fort longtemps et qu'elle devrait être reconnue non pas depuis 2004 mais à tout le moins depuis 1976. Il réfère également à une lettre de la docteure Julie Plante du 22 décembre 2004 faisant état d'une révision d'un examen radiologique fait à l'Hôpital Laval, le 17 mai 1976. Cette révision indique que l'aspect radiologique est compatible avec une sidérose pulmonaire. Il réfère aux divers documents au dossier faisant état de cette maladie depuis de nombreuses années.

 

D'autre part, il considère que l'indemnité reçue aurait été plus importante si on reconnaissait sa lésion rétroactivement. Il estime le montant reçu dérisoire en regard de sa condition.

 

R-125782581-002

 

La question en litige porte essentiellement sur la date de reconnaissance de la maladie pulmonaire professionnelle dont le travailleur est porteur.

 

À cet effet, aux fins de rendre sa décision, la Révision administrative, tout comme la CSST, est liée par le diagnostic et les autres constatations établis par le Comité Spécial des présidents.

 

Ainsi, la Révision administrative ne peut souscrire aux arguments du travailleur quant à l'effet rétroactif de sa maladie.

 

Par conséquent, la Révision administrative CONFIRME la décision rendue le 23 septembre 2004 et déclare que le travailleur est porteur d'une maladie pulmonaire professionnelle de la nature d'une sidérose à compter du 29 janvier 2004.

 

R-125782581-001

 

Aux fins de rendre sa décision, la Révision administrative rappelle qu'elle est liée par les conclusions du Comité Spécial des présidents émises le 30 juin 2004.

 

La Révision administrative est toutefois compétente pour vérifier la conformité de la procédure d'évaluation médicale, du bilan des séquelles, du pourcentage pour DPJV et du calcul de l'indemnité pour préjudice corporel.

 

Après vérification, la procédure d'évaluation médicale suivie dans le présent dossier respecte les dispositions de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

Le bilan des séquelles produit par le Comité Spécial des présidents est quant à lui conforme au Règlement sur le barème des dommages corporels.

 

En ce qui concerne le pourcentage pour DPJV, la Révision administrative précise qu'il est déterminé par le Règlement sur le barème des dommages corporels. Celui-ci fixe le pourcentage pour DPJV en fonction de l'importance de l'atteinte permanente du travailleur. Après vérification, le pourcentage pour DPJV attribué au travailleur est conforme.

 

Enfin, le montant de l'indemnité pour préjudice corporel est le résultat d'un calcul fait à partir de critères établis par la loi: l'âge du travailleur au moment de la lésion professionnelle, un montant fixé en regard de cet âge et le pourcentage d'APIPP du travailleur. Après vérification, le montant de l'indemnité pour préjudice corporel du travailleur s'avère exact.

 

Pour ces motifs, la Révision administrative CONFIRME la décision de la Commission rendue le 28 septembre 2004, déclare que la lésion du 29 janvier 2004 a entraîné une atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique du travailleur de 5,75 % et déclare que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel au montant de 2 552,43 $, plus intérêts.

 

[…] 

 

 

[20]           Or, tel que précisé par le réviseur administratif de la CSST dans sa décision ci-haut relatée, la Commission des lésions professionnelles ne peut aussi faire droit aux arguments soulevés par le travailleur à l'audience ni à son argumentation écrite du 1er août 2005 qui tient compte de la copie reçue d'un de ses dossiers antérieurs produits auprès de la CSST pour une sidérose ou une maladie professionnelle.

[21]           En effet, la Commission des lésions professionnelles ne peut faire rétroagir la date de la maladie professionnelle pulmonaire dont est atteint le travailleur, soit une sidérose reconnue par la CSST à compter du 29 janvier 2004, notamment en se basant sur des radiographies prises par des radiologistes qui agissent au nom de la Ligue antituberculeuse de Québec pour les employés de la compagnie Davie Shipbuilding ltd (l'un des employeurs du travailleur) ou encore par les autres radiologistes.

[22]           D'abord, dans cette carte remise au travailleur, par cet organisme, on y précise que l'étude de sa radiographie pulmonaire démontre des signes de sidérose pulmonaire, ce qui exprime plus une possibilité qu'une probabilité d'une maladie professionnelle pulmonaire.

[23]           D'autre part, le travailleur a passé d'autres tests et examens radiologiques auprès de différents médecins qui suspectaient, eux aussi, à cette époque, une possibilité de sidérose pulmonaire chez le travailleur.

[24]           C'est pour ces raisons que le travailleur a produit des réclamations à la CSST pour faire ouvrir des dossiers afin de savoir s'il est porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire ou autres contractées chez Davie Shipbuilding ltd ou encore ailleurs, dépendamment de la date où les réclamations ont été produites par le travailleur auprès de la CSST.

[25]           Or, l'une de ses réclamations a fait en sorte que la CSST, par l'entremise des médecins traitants du travailleur, a demandé au Comité spécial des présidents de Québec, composé des docteurs Roger Belleau, Dollard Bergeron, Claude Touchette, Marc Desmeules, Philippe Duval et André Tardif, tous pneumologues, de se prononcer sur quatre sujets, soit les suivants: 

.1)                Est-ce que le travailleur présente une maladie professionnelle ? La réponse du comité est « non ».

.2)                Existe-t-il un déficit fonctionnel ? La réponse du comité est « non »; 

.3)                Existe-t-il une ou des maladies associées ? La réponse du comité est « non »; 

.4)                Existe-t-il une incapacité compensable ? La réponse du comité est « non ».

[26]           Or, ce Comité spécial des présidents, composé de six pneumologues, retenait lors du questionnaire et de l'examen faits au travailleur, alors qu'il est âgé de 36 ans, qu'il travaille, depuis deux ans, comme contremaître des soudeurs chez Davie Shipbuilding ltd alors qu'auparavant, soit depuis 1956, il a toujours travaillé comme soudeur. Ils font aussi état que le travailleur fume un paquet de cigarettes par jour depuis l'âge de 16 ans mais a cessé il y a environ six mois, au moment où il se prononce le 2 février 1977.

[27]           Ces membres du comité font aussi mention que, depuis 1966, la Ligue antituberculeuse de Québec lui aurait dit qu'il présente des signes radiologiques de sidérose pulmonaire. Le travailleur leur explique les plaintes et les symptômes qu'il présente depuis quelques années concernant une pathologie qu'il veut voir faire reconnaître par la CSST.

[28]           Ensuite, ce comité procède à un examen physique qu'il considère comme étant dans les limites de la normale, si ce n'est quelques ronchies qui disparaissent à la toux, mais il y n'y a pas de sibilance.

[29]           Ce comité interprète aussi une radiographie pulmonaire comme suit: 

Au niveau du parenchyme pulmonaire, il y a possibilité de petites lésions micro-nodulaires aux deux zones inférieures. Il y a aussi possibilité d'hyperinflation. P 0/1 11 rl od.

 

 

[30]           Sur le plan physiologique, le comité retient que les tests de la fonction pulmonaire du travailleur montrent un bilan physiologique dans les limites normales.

[31]           Les membres du Comité spécial des présidents retiennent, comme recommandations, que le travailleur peut travailler au même endroit mais à condition que les concentrations de vapeur et de poussières soient en deçà des limites permises. Ils ne souhaitent pas une révision de son dossier et ajoutent que toutes ces considérations sont faites à la condition qu'elles soient acceptables du point de vue légal. Leur avis est daté et signé du 2 février 1977.

[32]           Or, la Commission des lésions professionnelles a vérifié, auprès de la CSST, si une décision a été rendue à la suite de ce rapport du Comité spécial des présidents du 2 février 1977, puisque le travailleur ne le savait pas ou ne s'en rappelait plus, car il n'y en avait aucune dans le présent dossier.

[33]           Après avoir reçu le dossier complet du travailleur, de la CSST, qui donne suite notamment au rapport de ce Comité spécial des présidents du 2 février 1977, on constate que la CSST a rendu une décision, le 23 mars 1977, qui fut adressée à monsieur Robert Leclerc dont l'adresse y apparaissant est la même que celle actuelle, tout comme le code postal. De plus, cette décision fut signée par monsieur Jean Girard et expédiée en copie conforme à l'employeur, Davie Shipbuilding ltd, ainsi qu'aux docteurs Pierre Saint-Jacques, Roger T. Roberge et Christian Fortin, qui sont tous des médecins qui ont eu charge ou traitants du travailleur.

[34]           Cette décision se lit comme suit: 

Monsieur,

 

La présente est pour vous aviser que suite aux examens médicaux que vous avez passés devant nos experts le 2 février 1977, ceux-ci en sont venus à la conclusion que selon les barèmes actuellement en vigueur, la diminution de vos fonctions respiratoires en relation avec votre travail n'entraîne aucun taux d'incapacité partielle permanente dans votre cas.

 

En outre, si vous avez subi une perte de salaire pour vous présenter à ces examens, il y aura lieu de demander à votre employeur de nous confirmer ce montant afin que nous puissions vous en effectuer le remboursement.

 

De plus, nos experts ne croient pas qu'il soit nécessaire de vous revoir dans l'avenir.

 

Finalement, une copie du rapport médical de nos experts a été adressée à votre médecin traitant, le Dr Christian Fortin.

 

Nous regrettons donc de ne pouvoir faire plus dans votre cas et nous vous prions d'agréer l'expression de nos sentiments les meilleurs.

 

L'agent d'indemnisation des

Maladies professionnelles,

 

Jean Girard

 

 

[35]           Selon le dossier reçu de la CSST, cette décision rendue par un agent d'indemnisation de la CSST n'aurait pas été contestée par le travailleur, en vertu de l'article 64 de la LAT qui lui permettait de le faire, à ce moment.

[36]           Ce que le travailleur plaide, dans sa lettre datée du 1er août 2005, c'est qu'il n'aurait pas reçu cette lettre ou cette décision de la CSST, sauf au moment où il a reçu le dossier de la CSST demandé par le soussigné. Si c'est le cas et tel que l'a mentionné la Commission des lésions professionnelles auprès du travailleur, celui-ci devrait demander une prolongation de délai auprès d'un bureau de révision de la LAT qui est l'organisme compétent pour entendre cette demande, surtout s'il veut faire rétroagir et reconnaître une maladie professionnelle pulmonaire, notamment une sidérose, à compter de 1977, et ce, en se basant sur les informations, les tests et les radiographies pulmonaires faits durant la période de 1966 à 1977.

[37]           Quoi qu'il en soit, la Commission des lésions professionnelles conclut que la preuve médicale au dossier du travailleur, des suites de sa réclamation produite le 29 janvier 2004, incluant la réinterprétation de la radiographie pulmonaire du 17 mai 1976, provenant de l'Hôpital Laval et dont la lecture fut faite le 10 février 2004 par le docteur Guy Carrier, radiologiste, n'est pas suffisante pour reconnaître que le travailleur était déjà porteur d'une sidérose compensable depuis le 17 mai 1976 ou encore en février 1977.

[38]           À ce sujet, il y a lieu de référer le travailleur au rapport du Comité spécial des présidents qui, fort probablement, a interprété cette radiographie du 17 mai 1976, puisque celle-ci se retrouve dans le dossier du travailleur à ce moment. Or, ces six membres du comité n'ont pu conclure, à ce moment, que le travailleur était porteur d'une sidérose ou encore d'une maladie professionnelle pulmonaire compensable, selon la LAT.

[39]           C'est donc l'investigation débutant en novembre 2003 et se poursuivant en janvier 2004 et suivants, sur le plan médical et radiologique, qui a permis à la CSST et aux médecins qui ont eu charge du travailleur, notamment la docteure Julie Plante, de faire reconnaître par la CSST, chez le travailleur, une maladie professionnelle, soit une sidérose.

[40]           En outre, la présomption de maladie professionnelle prévue à l'article 29 de la LATMP s'applique, puisque la sidérose est une des maladies pulmonaires listées à la section V, paragraphe 3, de l'annexe I de la LATMP.

[41]           En effet, on y stipule, à cette section V de l'annexe I de la LATMP, que les maladies pulmonaires causées par les poussières organiques et inorganiques, telle la sidérose (paragraphe 3 de la LATMP), peuvent être dues à un travail impliquant une exposition aux poussières et fumées ferreuses.

[42]           Par ailleurs, cette même présomption pour le diagnostic de sidérose n'était pas prévue à l'annexe D de la LAT qui énumère les maladies professionnelles listées et reconnues par la CSST avant le 19 août 1985 et pour lesquelles la présomption prévues à l'article 111.8 de la LAT peut s'appliquer.

[43]           En terminant, la Commission des lésions professionnelles constate aussi qu'entre 1977 jusqu'au 29 janvier 2004, le travailleur n'a produit aucune autre réclamation pour se faire reconnaître porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire auprès de la CSST et n'a produit aucun document médical pouvant soutenir cette preuve.

[44]           En conséquence et pour les mêmes motifs que ceux retenus par le réviseur administratif de la CSST, la Commission des lésions professionnelles conclut que le travailleur est porteur d'une maladie professionnelle pulmonaire, soit une sidérose, à compter du 29 janvier 2004 et qu'il a droit aux IRR et aux prestations prévues dans la LATMP, selon la teneur des rapports médicaux le justifiant.

[45]           D'autre part, l'autre litige est de déterminer si le DAP accordé par le Comité spécial des présidents qui s'est prononcé le 30 juin 2004, à la suite de la réclamation produite par le travailleur, le 29 janvier 2004, est bien fondé.

[46]           Pour les mêmes raisons que celles retenues par le réviseur administratif de la CSST, la Commission des lésions professionnelles conclut que le 5 % de DAP accordé par ce comité, pour une maladie professionnelle pulmonaire à caractère irréversible, soit une sidérose, selon le code 223001 du Règlement sur le barème des dommages corporels[2](le Règlement), adopté en vertu de la LATMP, est bien fondé. À ce pourcentage s'ajoute celui de 0,75 % à titre de DPJV, pour un total de 5,75 % d'APIPP qu'a droit le travailleur et qui représente, selon les calculs vérifiés par la Commission des lésions professionnelles et établis par la CSST, à une indemnité pour dommages corporels de 2552,43 $, à laquelle la CSST devra ajouter les intérêts courus depuis la date de la réclamation produite par le travailleur, soit le 29 janvier 2004.

[47]           En terminant, la Commission des lésions professionnelles tient aussi à préciser au travailleur qu'à l'époque de sa réclamation produite en 1975 et/ou 1977, pour faire reconnaître une sidérose, le Règlement sur le barème des déficits anatomo-physiologiques applicable à la LAT ne prévoyait pas ce genre de pathologies dans son barème, ce qui fait en sorte que le travailleur devait démontrer qu'une lésion analogue pouvait s'appliquer aux fins de déterminer un pourcentage de DAP, ce que n'a pas fait le travailleur à ce moment.

[48]           En outre, il faut se rappeler que le Comité spécial des présidents de février 1977, qui a questionné le travailleur, examiné et évalué l'ensemble de la preuve médicale dans son dossier, concluait alors à l'absence d'une maladie professionnelle chez lui; à l'absence d'un déficit fonctionnel et/ou de maladie associée;  et à l'absence d'une incapacité compensable qui, à l'époque, se faisait sous la forme d'un DAP et d'une incapacité partielle permanente (IPP) ou totale permanente (ITP), si le travailleur devenait invalide totalement.

[49]           En conséquence et pour les mêmes motifs, la Commission des lésions professionnelles conclut que la décision rendue le 22 février 2005 par la révision administrative de la CSST est bien fondée.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la requête produite par monsieur Robert Leclerc (le travailleur) le 22 février 2005 auprès de la Commission des lésions professionnelles; 

CONFIRME la décision rendue le 20 janvier 2005 par la révision administrative de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST); 

DÉCLARE que le travailleur a subi une lésion professionnelle, à l'occasion d'une maladie professionnelle pulmonaire reconnue à compter du 29 janvier 2004, soit une sidérose; 

DÉCLARE que le travailleur a droit à un pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique (APIPP) de 5,75 % pour sa maladie professionnelle pulmonaire reconnue; et

DÉCLARE que le travailleur a droit à une indemnité pour dommages corporels au montant de 2552,43 $, à laquelle la CSST devra ajouter les intérêts courus depuis la date de réception de sa réclamation produite pour une lésion professionnelle, soit depuis le 29 janvier 2004.

 

 

__________________________________

 

Me Robin Savard

 

Commissaire

 



[1]          L.R.Q., c. A-3.001

[2]          [1987] 119 G.O. II, 5576

 

 

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