Décision

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COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

RÉGION:

 

SHERBROOKE

SAINT-HYACINTHE, le 11 MARS 1999

 

DOSSIER:

 

104797-05-9808

DEVANT LE COMMISSAIRE :

Jean-Marc Dubois

 

 

 

 

ASSISTÉ DES MEMBRES :

Émile Provencher,

 

 

Associations d'employeurs

 

 

 

Daniel Robin,

 

 

Associations syndicales

 

 

 

 

 

 

DOSSIER CSST:

113311377-1

AUDIENCE TENUE LE :

18 février 1999

 

 

 

À :

Sherbrooke

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JULIA LAZARO

996, Argyll

Sherbrooke (Québec)  J1J 3J8

 

 

PARTIE REQUÉRANTE

 

 

 

 

ET

 

 

 

 

 

C.L.S.C. GASTON LESSARD

(Élizabeth O’Connor)

1200, rue King Est, #100

Sherbrooke (Québec)  J1G 1E4

 

 

PARTIE INTÉRESSÉE

 

 

 

 

ET

 

COMMISSION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL - ESTRIE

(Directeur régional)

1650, rue King Ouest, #300

Sherbrooke (Québec)  J1J 2C3

 

 

PARTIE INTERVENANTE

 

 

 

 


DÉCISION

 

[1.]             Le 13 août 1998, Mme Julia Lazaro, la travailleuse, conteste la décision rendue à la suite d’une révision administrative le 23 juin 1998 qui confirme la décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) datée du 22 octobre 1997 pour conclure que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle le 2 juillet 1997.

OBJET DE LA REQUÊTE

[2.]             La travailleuse demande d’infirmer la décision rendue en révision administrative et déclarer qu’elle a subi une lésion professionnelle le 2 juillet 1997.

LES FAITS

[3.]             La travailleuse est au service de l’employeur, C.L.S.C. Gaston Lessard, depuis 1990 comme psychologue.

[4.]             Son histoire médicale nous apprend que le 7 décembre 1987, elle subit une fusion postérieure de C3-C4 sur la base d’un diagnostic de luxation facettaire à ce niveau, lésion survenue lors d’un accident de la route.

[5.]             À la suite de cette intervention, la travailleuse fait l’objet d’un suivi médical qui l’amène à consulter en orthopédie les 13 janvier, 3 février et 4 octobre 1988.

[6.]             Les notes médicales concernant la consultation du 4 octobre 1988, indiquent ce qui suit :

« (…)

Cependant, patiente présente douleur lombaire basse comme pincement avec irradiation dans face postéro-latérale jambe droite depuis accident en novembre 87.  La douleur augmente en position debout, avec la marche.  Patiente boite en marchant à cause de la douleur.  Douleur disparaît en position couchée.  Pas d’augmentation avec toux ni éternuement.  Douleur augmente graduellement en extension depuis nov. 87.  Pas de soulagement par Ains, Tens.

(…) »

[7.]             Le 27 juin 1997, la travailleuse se présente au service de l’urgence et consultation externe du Centre Hospitalier Hôtel-Dieu de Sherbrooke où elle est examinée par le Dr Robert Corbeil qui pose un diagnostic d’entorse lombaire.  Les notes d’examen du Dr Corbeil font état d’un lasègue positif à 15 degrés au niveau du membre inférieur gauche et il prescrit une médication de comprimés de Robaxin.

[8.]             À compter du 3 juillet 1997, la travailleuse s’absente du travail et le 9 du même mois, elle produit un formulaire « Rapport d’invalidité » sur la base d’un rapport médical produit par le Dr Jean-François Joncas qui prévoit le 28 juillet 1997 comme date prévisible de retour au travail.

[9.]             Le Dr Joncas revoit la travailleuse le 16 juillet.  Il rapporte que l’état de cette dernière est relativement stable, c’est-à-dire qu’elle présente des douleurs au niveau de la fesse gauche irradiant dans le mollet et au talon.  Il diagnostique alors un pied tombant et poursuit la période d’invalidité.

[10.]         Les notes d’évolution médicale en date du 17 juillet 1997 indiquent que la travailleuse présente des douleurs lombaires avec sciatalgies gauche depuis trois semaines, après avoir soulevé une roche, et augmentation par les mouvements de rotation du tronc le lendemain.

[11.]         Le 22 juillet 1997, le Dr Yves Beaulieu examine la travailleuse.  Dans l’historique qu’il fait du dossier, il indique qu’à la fin du mois de juin 1997, la travailleuse a commencé à présenter un léger mal de dos qu’elle a associé aux travaux de jardinage.  Il précise que la douleur est devenue plus intense au début du mois de juillet lorsque, dans l’exercice de ses fonctions, la travailleuse s’est penchée pour prendre des documents dans le tiroir d’un classeur.

[12.]         Après avoir procédé à un examen plus complet, le Dr Beaulieu conclut que la travailleuse est fort probablement porteuse d’une hernie discale touchant le niveau L4-L5 avec compression radiculaire de L5 gauche.  Il note également un déficit neurologique sensitivo-moteur de la racine L5 gauche et suggère que tout ceci soit confirmé par une investigation scanographique.

[13.]         L’investiagation en question, faite dès le 23 juillet, révèle ce qui suit :

« Léger bombement circonférenciel de l’espace L3-L4 sans répercussion sur les éléments nerveux.

Ostéophytose postéro-latérale gauche en regard de L5-S1 avec séquestre probable de près de 1 cm en projection du corps vertébral de L5 du côté gauche, refoulant L5 gauche correspondante. »

[14.]         Le 5 août 1997, la travailleuse produit une réclamation alléguant avoir subi une lésion professionnelle le 2 juillet 1997.  La description de l’événement apparaissant sur le formulaire « Réclamation du travailleur » est ainsi libellée :

« Assise à mon bureau, j’ai fait un faux mouvement de côté en tentant d’obtenir un document dans un classeur.  La chaise a glissé.  Étant donné l’espace réduit, j’ai aussitôt ressenti une douleur très vive au niveau sciatique.  Croyant qu’il s’agissait d’une lombalgie ordinaire, j’ai consulté plusieurs pour en arriver au diagnostic : hernie discale. » (sic)

[15.]         La travailleuse témoigne que le 27 juin, elle avait mal à la jambe et au dos et que cette douleur est apparue insidieusement au cours de la journée mais le 2 juillet, la douleur est devenue plus importante.  Elle précise que le 27 juin, elle a décidé de consulter médicalement sur les conseils de son conjoint.

[16.]         La travailleuse affirme que quelques jours après le 27 juin, sans nécessité de médication, elle ne ressentait plus aucun malaise.

[17.]         Le 7 août 1997, le Dr Jacques Boucher, neuro-chirurgien, pratique une discoïdectomie radicale L5-S1 par la gauche.

[18.]         Le 13 février 1998, le Dr Boucher rapporte que la travailleuse a déjà souffert de certains maux de dos sans conséquence mais le 2 août 1997, en soulevant un poids de sa filière, elle a ressenti une douleur au dos et à la jambe.  Par la suite, elle a rapidement consulté et l’investigation a permis de diagnostiquer la hernie pour laquelle il y a eu intervention.

[19.]         Le Dr Maurice Crépaud, médecin de la Commission, témoigne que l’analyse qu’il fait du dossier l’amène à conclure que dès le 27 juin 1997, la travailleuse présente des signes d’irritation radiculaire qui se manifestent par un lasègue positif à 15 degrés.

[20.]         Le Dr Crépaud précise que le mouvement décrit par la travailleuse le 2 juillet 1997, soit le fait de se pencher avec un mouvement de rotation vers la gauche, a pu aggraver un peu la condition herniaire déjà présente.

[21.]         Le Dr Crépaud affirme que la diminution de dorsi-flexion observée à la suite de l’événement allégué le 2 juillet 1997 constitue un signe neurologique de compression additionnelle.

AVIS DES MEMBRES

[22.]         Les membres issus des associations d’employeurs et associations de travailleurs sont d’avis que la compression a peut-être exacerbé la douleur mais la condition de la travailleuse était déjà existante et il n’y a aucune preuve d’aggravation médicale.

[23.]         Les membres sont également d’avis qu’il y a absence de preuve d’un fait accidentel pouvant expliquer la survenance de la hernie discale pour laquelle la travailleuse a été opérée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

[24.]         Dans la présente instance, la Commission des lésions professionnelles doit décider si la travailleuse a subi une lésion professionnelle le 2 juillet 1997.

[25.]         L’article 2 de la Loi sur les accidents du travail et maladies professionnelles (L.R.Q. c.A-3.002) définit ainsi la lésion professionnelle :

« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation ;

 

 

[26.]         Le même article donne la définition suivante de l’accident du travail :

« accident du travail » : un événement imprévu et soudain attribuable à toute cause, survenant à une personne par le fait ou à l'occasion de son travail et qui entraîne pour elle une lésion professionnelle ;

[27.]         En l’instance, la travailleuse allègue que le 2 juillet 1997, il s’est produit un événement imprévu et soudain qui est la cause de l’aggravation d’une condition préexistante.

[28.]         La Commission des lésions professionnelles considère que la présence d’une condition personnelle ne constitue pas un obstacle à l’acceptation d’une lésion professionnelle.  Toutefois, comme il a été décidé dans l’affaire Lavoie et Communauté urbaine de Montréal (48078-62-9212, 95-06-28), J. L’Heureux, commissaire), dans la tâche de déterminer ce qui a le plus contribué à la pathologie décrite, il faut souspeser le rôle de la condition personnelle préexistante et celui de la lésion professionnelle.  L’aggravation d’une condition personnelle n’est pas une catégorie professionnelle qui s’ajoute à celles déjà décrites par le législateur.  Il faut obligatoirement qu’un accident du travail se soit produit ou qu’une maladie professionnelle se soit déclenchée.

[29.]         De plus, la Commission des lésions professionnelles est d’avis qu’en matière d’accident du travail, la règle du « Thin skule rule » ne peut s’appliquer que s’il est établi au départ que l’événement imprévu et soudain allégué aurait pu causer une telle lésion à n’importe quel travailleur.

[30.]         Dans le présent cas, nous sommes en présence d’une hernie discale rupturée qui a nécessité une discoïdectomie radicale, ce qui constitue une lésion importante.

[31.]         Par ailleurs, l’événement allégué, même s’il peut être qualifié d’imprévu et soudain au sens de la loi, est de nature bénigne et il ne peut, à lui seul, expliquer la lésion diagnostiquée.

[32.]         Le fait que la symptomatologie soit devenue plus apparente lors de cet événement ne signifie pas que l’on doive automatiquement qualifier la lésion professionnelle.

[33.]         À l’instar du Dr Crépaud, la Commission des lésions professionnelles est d’avis que dès le 27 juin 1997, la travailleuse présentait des signes neurologiques de sa hernie discale, contrairement à ce qu’elle prétend.

[34.]         La Commission des lésions professionnelles est également d’avis qu’il est invraisemblable de croire que la travailleuse était devenue complètement asymptomatique de la lésion consécutive aux travaux de jardinage qu’elle a exécutés et qui sont plus de nature à causer la lésion diagnostiquée que le simple fait de se pencher sur sa chaise pour accéder au tiroir de son classeur.

[35.]         En fait, contrairement à ce que mentionne le Dr Boucher, la preuve ne démontre pas que la travailleuse a effectivement soulevé une charge dans l’exercice de ses fonctions.

[36.]         Par ailleurs, la Commission des lésions professionnelles ne dispose d’aucune preuve médicale que le 2 juillet 1997, la travailleuse a aggravé la condition pour laquelle elle a consulté médicalement le 27 janvier 1997.

[37.]         De plus, la Commission des lésions professionnelles ne peut ignorer que dans un premier temps, la travailleuse n’a pas cru bon d’associer son mal au geste posé le 2 juillet 1997 en déclarant son invalidité sur la base d’activités personnelles.

[38.]         Dans les circonstances, la Commission des lésions professionnelles ne peut conclure que la hernie discale diagnostiquée chez la travailleuse constitue une lésion professionnelle au sens de la loi.

[39.]         POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

REJETTE la contestation de la travailleuse;

CONFIRME la décision rendue en révision administrative le 23 juin 1998;

DÉCLARE que la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle le 2 juillet 1997.

 

 

 

 

Jean-Marc Dubois

 

Commissaire

 

 

C.S.N.

(Jacques Lahaie)

180, Côte de l’Acadie

Sherbrooke (Québec)  J1H 4M9

 

 

 

Représentant de la partie requérante

 

 

 

 

PANNETON, LESSARD

(Martine St-Jacques)

1650, rue King Ouest, #300

Sherbrooke (Québec)  J1J 2C3

 

 

 

Représentant de la partie intervenante

 

 

 

 

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