DÉCISION
[1] Le 7 novembre 2000, monsieur Bruno Ainsley, le travailleur, conteste une décision rendue le 25 octobre 2000 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST en révision administrative confirme la décision du 13 septembre 2000 et déclare que le travailleur ne souffre pas d’une maladie professionnelle pulmonaire.
L'OBJET DE LA REQUÊTE
[3] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision rendue par la CSST en révision administrative et de déclarer qu’il est atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire.
LES FAITS
[4] Le 22 novembre 1999, le travailleur produit une réclamation à la CSST alléguant une maladie professionnelle pulmonaire. À l’annexe de sa réclamation, il y décrit ses expériences de travail chez l’employeur de 1967 à 1986.
[5] De 1967 à 1980, il occupait un poste dans l’atelier de réchappage de pneus. Il était en contact avec des produits chimiques comme le talc, le varsol et le caoutchouc brûlé. Il saupoudrait la poudre de talc sur le caoutchouc chaud et ramoli pour éviter que les pneus n’adhèrent entre eux. La ventilation dans l’atelier était inadéquate et il respirait une poussière fine et beaucoup de fumée de caoutchouc. Les masques étaient inadéquats. Ils servaient seulement à protéger la figure. La poussière et la fumée intense du caoutchouc brûlé entraient par les côtés et par en dessous du masque. La plupart du temps, il ne portait pas de masque.
[6] De 1980 à 1986, il était assigné au courrier. Entre autre, il avait comme fonction de trier le courrier pour l’expédier dans les différents départements.
[7] En 1986, le travailleur a cessé de travailler à la suite d’un accident cérébro-vasculaire qui l’a laissé invalide. Le travailleur mentionne qu’avant 1967, il a travaillé pendant près de cinq ans, six mois par année comme amianteur, dans une compagnie générale d’isolation à Chicoutimi.
[8] Le 17 novembre 1999, le docteur Desjardins fait parvenir une lettre au docteur Youssi Hanna, dans laquelle il rapporte le résultat de ses investigations. Il précise que la tomodensitométrie pulmonaire a montré des plaques pleurales sur les deux lignes axillaires nettement plus marquées à droite et aux deux régions diaphragmatiques. Il note aussi que le bilan fonctionnel respiratoire a montré un syndrome restrictif léger à modéré, d’allure extraparenchymateuse compte tenu d’une fonction échangeur normale au repos. Enfin, compte tenu de l’association de plaques pleurales et d’une exposition présumée à l’amiante antérieure avec un syndrome restrictif léger à modéré, il demande une évaluation par un comité des maladies pulmonaires de la CSST.
[9] Le 4 juillet 2000, le comité des maladies pulmonaires formé des pneumologues, Docteur Jean-Jacques Gauthier, docteur Jean-Luc Malo et du docteur Robert Amyot font passer des tests respiratoires au travailleur. En conclusion, il est indiqué une restriction des volumes pulmonaires sans répercussion sur la fonction échangeur.
[10] Le comité résume ainsi l’histoire de la maladie actuelle :
« Alors que le réclamant consultait un physio-thérapeute en 1986, suite à son accident cérébro-vasculaire, il a été référé au docteur Lazaro de l’Hôpital Notre-Dame pour investigation de douleurs au thorax. La radiographie pulmonaire aurait alors démontré un épaississement de la plèvre.
Monsieur Ainsley se plaint principalement d’une fatigue et dypnée progressive dans les dernières années. Il se dit dyspnéique en marchant sur un terrain plat, sur une distance inférieure à 100 mètres.
Cette dyspnée doit toutefois être mise dans le contexte d’une insuffisance cardiaque (fe VG rapportée par le réclamant à 28%) et également dans le contexte d’une claudication intermittente importante ainsi que de ses séquelles d’AVC.
Toujours sur le plan pulmonaire, il rapporte que la toux dont il souffrait s’est atténuée depuis son quadruple pontage de 1989. Il ne tousse qu’occasionnellement. Il n’a jamais présenté d’hémoptysie et ne présente pas de douleur pleurétique. Il ne présente pas de wheezing et n’est pas incommodé par des symptômes respiratoires nocturnes.
Sur le plan cardiaque, il ne présente pas de douleur rétro-sternale, pas de palpitation, pas d’orthopnée, pas de dyspnée paroxystique nocturne. Il présente toutefois de l’œdème des membres inférieurs qui s’estompe spontanément. Il rapporte des crampes aux mollets, qui surviennent au moindre effort et qui sont soulagées par le repos. Son poids est légèrement diminué à 118 livres pour un poids habituel à 128 livres. Il n’a pas présenté de sudation nocturne ni de perte d’appétit. Il rapporte toutefois une sensation de blocage oesophagien haut sans dysphagie franche au solide ni au liquide. Il ne présente pas de raucité de la voix. Il n’a pas présenté de fièvre ni de frisson récemment et ne présente pas de tendance aux infections récidivantes. »
[11] Le comité termine son expertise par les conclusions suivantes :
« Diagnostic : Il s’agit d’un réclamant qui a été exposé à la poudre de talc qui présente des plaques pleurales localisées et un syndrome restrictif.
Les membres du Comité ne croient pas que les plaques pleurales localisées puissent engendrer un syndrome restrictif chez ce réclamant. Son syndrome restrictif pourrait être expliqué par ses séquelles post-accident vasculo-cérébral d’autant plus qu’il ne peut circuler étant en chaise roulante.
Compte tenu qu’il n’existe aucune lésion parenchymateuse, les membres du Comité ne croient pas qu’il existe une amiantose ou une talcose ni aucune séquelle foinctionnelle respiratoire secondaire à son exposition professionnelle antérieure.
Ainsi donc, il n’existe aucune maladie pulmonaire professionnelle chez ce réclamant. »
[12] Le 23 août 2000, le comité spécial des présidents formé des docteurs Raymond Bégin, Marc Demeules et Gaston Ostiguy, pneumologues, ont étudié le dossier du travailleur. Le comité spécial des présidents entérine les conclusions émises dans le rapport d’expertise du 4 juillet 2000. Les membres du comité terminent par l’opinion suivante :
« En effet, les membres du comité reconnaissent que ce réclamant est porteur de plaques pleurales localisées mais que celles-ci ne constituent pas une maladie pulmonaire professionnelle. Il est porteur aussi d’un syndrome restrictif qui n’est pas secondaire à ses plaques pleurales localisées mais vraisemblablement secondaires aux séquelles post-accident cérébro-vasculaire.
L'AVIS DES MEMBRES
[13] Le membre issu des associations patronales et le membre issu des associations syndicales sont d’avis que la preuve est à l’effet que le travailleur n’est pas atteint d’une maladie pulmonaire professionnelle.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[14] La Commission des lésions professionnelles doit décider si le travailleur est atteint d’une maladie pulmonaire professionnelle. L’article 2 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles (la loi)[1] définit les notions de lésion professionnelle et de maladie professionnelle en ces termes :
« lésion professionnelle » : une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l'occasion d'un accident du travail, ou une maladie professionnelle, y compris la récidive, la rechute ou l'aggravation ;
« maladie professionnelle » : une maladie contractée par le fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail ou reliée directement aux risques particuliers de ce travail ;
[15] De la preuve, il ressort que la tomodensitométrie pulmonaire a montré la présence de plaques pleurales bilatérales. Cependant, la présence de plaques pleurales ne signifie pas que le travailleur soit porteur d’une maladie pulmonaire professionnelle mais seulement qu’il a pu être exposé à l’amiante.
[16] Les tests fonctionnels respiratoires démontrent que le travailleur est porteur d’un syndrome restrictif léger à modéré. Cependant, des 7 pneumologues qui ont examiné le travailleur, aucun ne relie cette condition à la présence des plaques pleurales localisées. Les docteurs Bégin, Desmeules et Ostiguy, pneumologues du comité spécial des présidents mentionnent que le syndrome restrictif dont le travailleur est porteur, est vraisemblablement secondaire aux séquelles post-accident cérébro-vasculaire.
[17] De plus, la Commission des lésions professionnelles retient de l’analyse faite de la radiographie pulmonaire et de la scanographie thoracique qu’il n’y a aucune lésion parenchy mateuse donc que ces tests ne démontrent aucune présence de talcose ou d’amiantose.
[18] Dans ce contexte, la Commission des lésions professionnelles conclut que la preuve médicale et factuelle au dossier est à l’effet que le travailleur n’est pas porteur d’une maladie professionnelle pulmonaire. En effet, le travailleur n’a pu démontrer qu’il avait contracté une maladie pulmonaire par le fait ou à l’occasion du travail et qui est caractéristique de son travail ou reliée directement aux risques particuliers de son travail.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
REJETTE la requête du travailleur, monsieur Bruno Ainsley;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail en révision administrative le 25 octobre 2000;
DÉCLARE que le travailleur n’est pas atteint d’une maladie professionnelle pulmonaire.
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Me Louise Turcotte |
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Commissaire |
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Mc Carthy Tétrault Me Fred W. Headon ll70, Peel Street Laval (Québec) H3B 4S8 |
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Représentant de la partie intéressée |
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