D.B. et Compagnie A |
2010 QCCLP 3289 |
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Dossier 393602-04-0911
[1] Le 9 novembre 2009, M. D... B..., le travailleur, dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 3 novembre 2009 à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme une décision qu’elle a rendue initialement le 7 octobre 2009 à la suite d’un avis du Bureau d’évaluation médicale (BEM) du 23 septembre 2009 et déclare qu’elle est justifiée de poursuivre le versement de l'indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité du travailleur d’exercer son emploi, étant donné qu’il demeure avec des limitations fonctionnelles en regard de sa lésion physique et déclare que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente en regard de la lésion psychologique.
Dossier 395886-04-0912
[3] Le 4 décembre 2009, le travailleur dépose une requête à la Commission des lésions professionnelles par laquelle il conteste une décision de la CSST rendue le 16 novembre 2009 à la suite d’une révision administrative.
[4] Par cette décision, la CSST traite de trois décisions qu’elle a rendues initialement.
[5] Elle conclut d’abord que la demande de révision du 29 octobre 2009 concernant la base salariale a été logée hors délai et conclut qu’aucun motif raisonnable n’a été démontré permettant de relever le travailleur de son défaut et déclare en conséquence irrecevable la demande de révision du 29 octobre 2009.
[6] La CSST confirme par ailleurs une décision rendue initialement le 9 octobre 2009 et déclare que la lésion professionnelle du 23 mai 2005 a entraîné une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique du travailleur de 5,75 % et que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel de 3 231,62 $ plus intérêts.
[7] La CSST confirme enfin une décision rendue le 19 octobre 2009 et déclare que depuis le 15 octobre 2009, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuses pouvant lui procurer un salaire annuel estimé à 20 800 $.
[8] Une audience s’est tenue le 5 mars 2010 à Trois-Rivières en présence du travailleur qui n’est pas représenté. [La Compagnie A], l’employeur, bien que dûment convoqué est absent à l’audience.
[9] La CSST, qui conformément à l’article 429.16 de la loi est intervenue, est représentée à l’audience.
L’OBJET DES CONTESTATIONS
Dossier 393602-04-0911
[10] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision de la CSST rendue en révision administrative et de déclarer que le processus d’évaluation médicale menant à l’avis du BEM est irrégulier. Il allègue qu’il n’y avait pas de litige entre la Dre Marie-Claude Pinard et le Dr Alain Sirois.
[11] Il demande de retenir l’ensemble des conclusions du Dr Alain Sirois, psychiatre, médecin désigné par la CSST.
Dossier 395886-04-0912
[12] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles d’infirmer la décision de la CSST rendue le 16 novembre 2009 à la suite d’une révision administrative et de déclarer que sa demande de révision du 29 octobre 2009 concernant la base salariale a été logée dans le délai prévu par la loi. Il demande en conséquence de retenir la base salariale de 55 200 $ et réviser rétroactivement à octobre 2003 la base salariale de 53 500 $ retenue par la CSST.
[13] Le travailleur demande par ailleurs au tribunal de retenir les conclusions du Dr Sirois et de déclarer que sa lésion a entraîné une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique de 15 %.
[14] Le travailleur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que l’emploi de répartiteur de dépanneuses n’est pas un emploi convenable et de déclarer qu’il est incapable de l’exercer.
LES FAITS
[15] Du dossier constitué par la Commission des lésions professionnelles, du témoignage du travailleur rendu à l’audience et de la preuve médicale, le tribunal retient les éléments suivants, lesquels lui apparaissent pertinents à la solution des litiges qui lui sont soumis.
[16] Le 15 octobre 2003, le travailleur qui est tuyauteur chez l’employeur qui est âgé de 49 ans est victime d’un accident du travail.
[17] Alors qu’il conduit un chariot élévateur non muni d’un système de suspension, le travailleur percute un nid-de-poule qu’il n’a pas vu et qui lui a causé une entorse lombaire diagnostiquée le lendemain par la Dre Marie-Claude Pinard.
[18] Une radiographie effectuée le 16 octobre 2003 révèle la présence d’une très importante arthrose péri-vertébrale L3-L4 et L4-L5.
[19] Un arrêt de travail et des traitements de physiothérapie sont prescrits.
[20] Le 21 octobre 2003, le travailleur produit une réclamation à la CSST, laquelle est acceptée par cette dernière.
[21] Il appert des notes évolutives que la base salariale retenue par la CSST est le maximum annuel assurable de 53 500 $. Il appert également d’une note du 24 octobre 2003 que l’agent d’indemnisation de la CSST, M. Alain Garceau, a rencontré le travailleur et qu’il a discuté notamment avec ce dernier de la base salariale retenue. M. Garceau écrit que le travailleur lui a dit qu’il gagnait plus de 53 500 $ par année et qu’il lui a expliqué que ce montant était le maximum assurable.
[22] Aucune contestation écrite de la base salariale du travailleur ne se retrouve à cette époque au dossier.
[23] Le 4 décembre 2003, une tomodensitométrie lombaire est effectuée, laquelle révèle la présence d’une petite hernie discale L4-L5 comprimant la racine L5 gauche.
[24] Le 9 janvier 2004, le travailleur est expertisé par le Dr Mario Giroux, chirurgien-orthopédiste, à la demande de l’employeur. Lors de cet examen, le travailleur rapporte au médecin qu’il présente une diminution de ses douleurs au niveau de la région lombaire avec la persistance de limitations fonctionnelles. Il lui mentionne avoir eu des douleurs au niveau du membre inférieur gauche dans les deux premières semaines suivant son accident. Par la suite, sa douleur se manifeste principalement au niveau de la région lombaire basse.
[25] Le Dr Giroux émet l’opinion que le travailleur présente une entorse dorsolombaire aggravée par une condition personnelle d’arthrose dorsolombaire. Il suggère toutefois de poursuivre l’investigation afin d’éliminer d’autres diagnostics.
[26] Le docteur Giroux écrit :
« […]
Selon le fait accidentel écrit par monsieur B... c’est-à-dire un contrecoup au niveau de la colonne dorsolombaire, nous croyons que l’hypothèse la plus probable est celle qu’il avait une fragilité dorsolombaire bien objectivée par les différentes radiographies qui démontrent des ostéophytes à multiples niveaux au niveau dorsal et lombaire, et une augmentation de la cyphose dorsale.
Les différentes trouvailles radiologiques démontrent qu’il y avait des phénomènes dégénératifs importants au niveau de la colonne dorsolombaire. Le contrecoup peut avoir provoqué à ces endroits de l’inflammation. Il s’agit donc de zones qui présentaient des signes dégénératifs sévères.
[…] »
[27] Le docteur Giroux est d’avis que la lésion n’est pas consolidée.
[28] Le 9 février 2004, la CSST reconnaît qu’il y a une relation entre la hernie discale L4-L5 et l’événement survenu au travail le 15 octobre 2003.
[29] Le 19 février 2004, le travailleur subit un examen par résonance magnétique qui révèle une discopathie dégénérative.
[30] Une scintigraphie osseuse du 15 mars 2004 est interprétée comme pouvant révéler un léger phénomène ostéodégénératif ou un microtraumatisme.
[31] Le 28 mai 2004, le travailleur consulte le Dr Marc Antoniades, orthopédiste, qui diagnostique une entorse dorsolombaire sur processus dégénératif.
[32] Le 8 juin 2004, la Dre Pinard parle d'entorse lombaire avec amélioration de la tolérance à l'effort, mais douleurs résiduelles non améliorées. Elle note que des rendez-vous en physiatrie et orthopédie sont prévus. Elle ne consolide pas la lésion.
[33] À la demande de la CSST, le 11 juin 2004, le travailleur est évalué par le Dr Jacques-Étienne Des Marchais. Ce médecin retient le diagnostic d’entorse dorsolombaire. Il est d’avis que la lésion est consolidée le 11 juin 2004 avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles.
[34] La CSST demande un avis du BEM en s’appuyant sur le rapport du Dr Des Marchais qui infirme celui de la Dre Pinard du 8 juin 2004.
[35] Le 25 août 2004, le travailleur est donc examiné par le Dr Jean-Pierre Lacoursière, orthopédiste et membre du BEM. Dans son avis du 31 août 2004, le médecin fait l’historique du dossier médical du travailleur et mentionne notamment qu’avant l’événement du 15 octobre 2003, le travailleur n’a jamais présenté de problème à la colonne vertébrale. Le travailleur a toujours œuvré comme tuyauteur, surtout sur des contrats industriels et commerciaux.
[36] Au moment de l’examen par le membre du BEM, le travailleur prend des médicaments et il est prévu qu’il doit recevoir une péridurale le lendemain. Il est aussi toujours suivi en physiothérapie.
[37] Le Dr Lacoursière rapporte que le travailleur présente des douleurs dorsales, sans irradiation vers le haut, ni vers le bas. Il se plaint également de douleurs lombaires irradiant au membre inférieur gauche. Les douleurs l’éveillent la nuit. Elles sont augmentées par les positions statiques debout ou assises prolongées ou penchées vers l’avant. Les douleurs sont aussi augmentées par la marche excédant 10 ou 15 minutes. Tous les mouvements répétitifs de flexion, d’extension ou de rotation du tronc augmentent la douleur. Il en est de même de la levée de charge.
[38] L’examen physique objectif révèle des mouvements limités de la colonne lombaire en flexion et en extension et une difficulté à marcher sur la pointe des pieds et sur les talons. Pour se relever de la position penchée, le travailleur doit appuyer ses mains sur ses cuisses. Le tripode est positif à gauche. En position assise, la flexion et l’extension sont complètes.
[39] Le médecin conclut que le travailleur présente des douleurs dorsales et lombaires incapacitantes. Il présente également des signes de tension et d’irritation au niveau du membre inférieur gauche.
[40] Le Dr Lacoursière retient un diagnostic d’entorse dorsolombaire greffée sur une discopathie dégénérative L4-L5 et L5-S1 et une hernie discale L5 gauche, acceptée par la CSST. Cette lésion n’est pas consolidée et le traitement par épidurale thérapeutique recommandé par la physiatre Josée Fortier est indiqué.
[41] Le travailleur reçoit par la suite des épidurales et les traitements en physiothérapie se poursuivent.
[42] Le 22 novembre 2004, la Dre Fortier émet le rapport médical final. Elle consolide la lésion ce même jour, avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles.
[43] Le 7 décembre 2004, la Dre Fortier examine le travailleur et produit un Rapport d’évaluation médicale. Elle rapporte que le travailleur présente toujours une douleur lombaire gauche irradiant jusqu’au membre inférieur gauche dans le territoire S1 et L5. Le travailleur présente également de fréquents blocages lombaires et dorsaux. Il ne fait plus de sport et trouve même difficile de prendre sa voiture.
[44] La Dre Fortier reconnaît les limitations fonctionnelles suivantes :
« Le patient devra éviter de :
> soulever, porter, pousser, tirer des charges répétitives ou fréquentes de plus de 10 livres;
> travailler en position accroupie;
> ramper, grimper;
> effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, extension ou torsion de la colonne lombaire;
> subir des vibrations de basse fréquence ou des contrecoups à la colonne vertébrale. »
[45] Le déficit anatomophysiologique est évalué à 5 % pour une hernie discale non opérée et une flexion antérieure limitée à 80 °.
[46] Dans la conclusion de son rapport d ‘évaluation, la Dre Fortier écrit qu’elle a réévalué le travailleur le 14 mars 2005 et que sa condition s’était détériorée. Elle rapporte alors une flexion antérieure de 50 °. Elle ajoute que le travailleur se plaint de douleurs importantes l'empêchant d'avoir une qualité de vie intéressante et que son moral est à la baisse.
[47] Le 23 décembre 2004, la CSST reconnaît au travailleur le droit à la réadaptation.
[48] Le 24 mars 2005, la CSST rend une décision par laquelle elle déclare que la lésion professionnelle entraîne pour le travailleur une atteinte permanente de 5,75 %.
[49] Le 4 avril 2005, la Dre Fortier avise la CSST qu’elle n’est plus le médecin du travailleur et qu’il sera suivi par son médecin de famille.
[50] Le 4 avril 2005, la CSST reconnaît que le travailleur a subi une récidive, rechute ou aggravation le 13 mars 2005. Cette décision est cependant infirmée le 28 juin 2005, à la suite d’une révision administrative. Le travailleur conteste cette décision. Le 11 août 2006, la Commission des lésions professionnelles confirme la décision rendue à la suite d’une révision administrative et déclare que le travailleur n’a pas subi de lésion professionnelle le 13 mars 2005[1].
[51] Le 13 avril 2005, la Dre Pinard dirige le travailleur en neurochirurgie et en orthopédie. Elle prescrit de plus au travailleur des consultations en psychologie afin qu’il fasse le deuil de ses capacités physiques à la suite de l’accident du travail du 15 octobre 2003.
[52] Il appert des notes évolutives du dossier que le travailleur mentionne à l’agente de la CSST qu’il a beaucoup de difficulté à accepter sa condition actuelle, qu’il a eu des idées suicidaires qui sont encore présentes. Il se dit « fini », compte tenu de sa condition physique, sociale, professionnelle et financière. Il raconte que peu de temps après l’événement, il a divorcé ce qui a entraîné la perte de beaucoup d’amis. Il ne voit pas de solution pour s’en sortir, mais se dit ouvert à collaborer en psychologie.
[53] C’est dans ce contexte que la CSST accepte de payer pour un suivi en psychologie de 10 rencontres.
[54] Le 12 mai 2005, la Dre Claudine Morand, physiatre, suggère une évaluation des capacités du travailleur par une équipe multidisciplinaire. Elle suggère de plus un suivi psychologique et prescrit un antidépresseur.
[55] Le 24 mai 2005, le travailleur consulte la Dre Pinard. Elle diagnostique une hernie discale avec sciatalgie résolue. Elle note la présence de douleurs résiduelles et ajoute le diagnostic de trouble d’adaptation avec humeur triste secondaire. Le 7 juin 2005, elle reprend le diagnostic de trouble d’adaptation avec humeur triste et augmente la dose d’antidépresseur.
[56] En juin 2005, le travailleur est évalué à la Clinique de réadaptation de Trois-Rivières. Des douleurs constantes sont rapportées et le sommeil est perturbé. Le travailleur présente des difficultés au niveau des activités de la vie quotidienne. Il ne fait plus de sport, ni de sorties sociales. Il est aussi noté que le moral est très bas, le patient présentant des idées suicidaires.
[57] Le travailleur produit le 25 juillet 2005 une réclamation à la CSST pour une lésion psychologique qu’il dit en lien avec la perte de ses capacités à la suite de l’accident du travail.
[58] Le 22 août 2005, à sa demande, le travailleur est examiné par le Dr Patrice Montminy, chirurgien orthopédiste. À l’examen clinique, le médecin rapporte des mouvements de la colonne lombaire très limités. Une hypoesthésie globale du membre inférieur gauche est aussi notée. Le Dr Montminy indique que les signes de Waddell se sont avérés positifs à 4 familles sur 5. Selon le médecin, il est clair que le patient évite la douleur, ce qui explique les limitations de mouvement.
[59] À son avis, il n’y a pas évidence claire de récidive, rechute ou aggravation le 13 mars 2005. Il se dit d’accord avec l’évaluation des séquelles, sauf qu’il ajouterait aux limitations fonctionnelles celle de ne pas demeurer en position fixe debout ou assise plus de 30 minutes.
[60] Par ailleurs, le Dr Montminy est d'avis que le travailleur doit faire l’objet d’un suivi en psychologie ou en psychiatrie pour l’aider à faire le deuil de son emploi antérieur de tuyauteur.
[61] Le travailleur entreprend un suivi avec la psychologue Martine Lecœur. Dans son rapport d’évolution du 2 septembre 2005, la psychologue indique que l’objectif des rencontres est de traiter les symptômes dépressifs et de fournir au travailleur les outils nécessaires pour restaurer son image, lui redonner confiance dans son potentiel et ses ressources, renforcer la perception de contrôle interne et trouver des stratégies d’adaptation à sa condition physique actuelle.
[62] Après quelques rencontres, la psychologue note que le travailleur est davantage en mesure d’analyser et de comprendre les sentiments et les émotions qui l’ont conduit à la dépression et de faire des liens avec la lésion professionnelle et ses conséquences au niveau physique.
[63] Le 8 septembre 2005, la Dre Pinard retient les diagnostics d’entorse dorsolombaire avec douleur résiduelle limitante et de dépression majeure secondaire. Elle reprend ces mêmes diagnostics le 6 octobre 2005.
[64] Le 14 septembre 2005, à sa demande, le travailleur est examiné par le Dr Patrice Montminy, chirurgien-orthopédiste. À l’état actuel, il rapporte que le travailleur demeure avec une douleur lombaire basse bilatérale et une douleur dorsale nettement plus centrale avec un point douloureux précis. La douleur lombaire vient irradier de façon occasionnelle dans le membre inférieur gauche surtout lors des mouvements de rotation fait en position debout.
[65] À l’examen physique, la mobilité de la colonne cervicale est limitée en flexions latérales droite (à 40°) et gauche (à 28°) et en rotations droite (à 30°) et gauche (à 40°).
[66] La mobilité de la colonne lombaire est limitée en flexion antérieure (à 18°), en extension (à 4°), en flexions latérales droite (à 22°) et gauche (à 20°) et en rotations droite (à 30°) et gauche (à 26°).
[67] L’examen de la colonne dorsale apparaît normal, avec toutefois un point douloureux relativement superficiel en interépineux à D-10.
[68] L’examen des hanches, genoux et chevilles est normal.
[69] À l’examen neurologique, il y a hypoesthésie globale du membre inférieur gauche. L’examen des forces motrices démontre que « le patient laisse aller au niveau de son membre inférieur gauche. » Il n’y a pas d’atrophie musculaire. Les réflexes sont normaux. Il n’y a aucun signe d’irradiation. L’examen vasculaire est normal.
[70] Le Dr Montminy conclut :
« […]
Au niveau de l’examen de ce jour, nous nous retrouvons avec des composantes non organiques très significatives à un point tel qu’on ne peut pas se baser sur les données objectives de l’examen physique. Il est parfaitement clair que monsieur B... évite la douleur, ce qui explique les limitations sévères retrouvées au niveau de sa colonne lombaire.
On doit donc considérer que dans ce dossier, il n’y a pas d’évidence claire de rechute-récidive-aggravation d’une hernie discale L4-L5 gauche non opérée, ce qui est le diagnostic retenu.
Les DAP qui avaient été accordés lors de l’expertise étaient conformes et comme je le mentionnais, je ne peux pas aujourd’hui modifier des DAP considérant les composantes de non-organicité.
Il est par contre évident que monsieur B... doit faire l’objet d’un suivi en psychologie ou psychiatrie pour l’aider à faire le deuil de con emploi antérieur de tuyauteur, qui ne lui sera pas permis par les limitations fonctionnelles quand même très significatives qui ont été fixées par le docteur Fortier. Dans ce dossier, on parle de limitations fonctionnelles de classe I à plusieurs endroits mais il s’agit de limitations fonctionnelles de classe I qui comportent une limitation de poids de moins de 5 kilogrammes.
Personnellement, je crois que l’on devrait aussi ajouter une limitation à savoir que monsieur ne devrait pas occuper un emploi. Il aurait à demeurer en position fixe soit debout, soit assis pour des périodes supérieures à 30 minutes. […] » [sic]
[71] Le 26 octobre 2005, à la demande de la CSST, le travailleur est examiné par un psychiatre, le Dr Alain Sirois. Il rapporte dans son rapport d’évaluation que le récit que fait le travailleur de sa maladie physique concorde avec les documents qu’il a consultés.
[72] Le Dr Sirois écrit que, selon le travailleur, les premiers symptômes physiques sont apparus dans les semaines qui ont suivi les traitements par épidurale, soit à l’automne 2004. Le travailleur associe ces symptômes au fait d’avoir été immobilisé pendant de longues périodes en raison de la douleur. Le travailleur décrit des symptômes de tristesse, de découragement, d’irritabilité avec tendance à s’isoler, une perte progressive d’espoir d’une récupération éventuelle de sa capacité physique et de son autonomie. La situation s’est aggravée à la période des Fêtes 2004, alors qu’il s’est retrouvé seul à sa résidence.
[73] À cette époque, le travailleur consulte régulièrement la Dre Pinard qui lui propose de prendre un antidépresseur ce que refuse le travailleur qui se croit capable d’affronter seul la situation. Toutefois, la situation s’aggrave et le sommeil est perturbé par des périodes d’angoisse. Des sentiments de tristesse s ‘installent provenant, selon le travailleur, de la conscience d’une perte d’autonomie, de la frustration de ne plus pouvoir pratiquer de sports, des problèmes d’incapacité sexuelle et au fait de devoir compter davantage sur l'aide de tiers pour l'exécution de tâches domestiques.
[74] Des pensées à thématique suicidaire sont apparues, à cette même période, sans intention de passage à l’acte.
[75] Le Dr Sirois relate que c’est en mai 2005 que la Dre Pinard pose le diagnostic de trouble d’adaptation avec humeur triste et qu’elle recommande un traitement par antidépresseur. Le travailleur commence également un suivi en psychologie.
[76] Le travailleur a cessé un temps la prise de médicament, ce qui a eu pour effet d’aggraver les symptômes dépressifs. Le travailleur a donc accepté de reprendre son antidépresseur. La prise de ce médicament, l’amélioration du sommeil par la prise d’un autre médicament et les rencontres avec la psychologue Lecœur ont eu pour effet de provoquer une certaine amélioration de sa condition.
[77] Au moment de l’examen par le Dr Sirois, le travailleur est en attente d’une consultation en neurochirurgie sur laquelle il compte pour obtenir un traitement qui parviendra à le soulager des douleurs lombaires. Il se dit persuadé que son humeur serait améliorée s'il souffrait moins et s’il pouvait retrouver ses capacités.
[78] Le Dr Sirois rapporte que le travailleur n’a jamais consulté en psychologie ou en psychiatrie avant l’événement accidentel.
[79] Il conclut au diagnostic suivant, selon les cinq axes :
« Axe I : Trouble d’adaptation avec humeur dépressive d’intensité sévère, chronique, en rémission partielle au moment de l’examen.
Axe II : Il n’y a pas d’évidence à l’effet que le travailleur soit porteur d’un trouble de la personnalité mais on doit considérer les antécédents de mort prématurée de la mère, d’insécurité et de carence affective jusqu’à l’âge adulte constituent un facteur aggravant des symptômes dépressifs réactionnels et augmentent la probabilité de la régression des mécanismes d’adaptation dans le sens de la dépendance dont il faudra tenir compte dans la suite du plan de traitement.
Axe III : Séquelles douloureuses et fonctionnelles d’un problème dorsolombaire subi lors de l’événement le 15 octobre 2003.
Axe IV : Facteurs stresseurs environnementaux et psychosociaux impliqués dans la production du diagnostic noté à l’axe I : douleurs chroniques, incapacité physique, perte d’emploi, isolement social découlant à la fois d’une incapacité physique et de facteurs personnels tels que le départ des enfants de la maison et de la séparation.
Axe V : Évaluation globale du fonctionnement : antérieure à l’événement : 80 à 85, actuelle : 60. »
[80] Le Dr Sirois écrit que les symptômes dépressifs et les idées suicidaires sont apparus dans le contexte de la chronicisation des douleurs et de l’incapacité physique à partir du moment où le travailleur a commencé à désespérer d’obtenir la guérison par les traitements entrepris. Il ajoute que le travailleur est un individu porteur de carences affectives relativement sévères qui le prédisposent à réagir avec une sensibilité démesurée aux situations réelles ou imaginaires de négligence et d’abandon, ce qui paraît expliquer les conflits décrits par certains intervenants mais également les liens de dépendance problématique susceptibles de s’établir dans le contexte du suivi psychothérapeutique qui se prolonge.
[81] À son avis, la lésion n’est pas consolidée. Pour l’instant, et dans l’attente d’une consultation médicale en lien avec la lésion physique, il y a lieu de poursuivre le traitement par médicament et le suivi psychologique.
[82] Le 7 novembre 2005, après avoir reçu le rapport d’expertise psychiatrique du Dr Sirois, le médecin de la CSST, la Dre Lemay, procède à l’analyse médicale du dossier. Elle écrit que selon l’opinion du Dr Sirois, il y a lieu de reconnaître la condition psychologique en lien avec la lésion physique. Elle ajoute que la condition physique a eu un impact au niveau psychiatrique.
[83] Le 8 novembre 2005, le travailleur consulte le Dr Éric Truffer, neurochirurgien. Ce dernier est d’avis qu’aucune solution chirurgicale n’est envisageable.
[84] Le 8 décembre 2005, la CSST rend une décision par laquelle elle accepte la réclamation du travailleur pour une lésion psychologique pour un diagnostic de dépression majeure secondaire s’étant manifestée le 23 mai 2005. Cette décision est toutefois infirmée le 4 avril 2006, à la suite d’une révision administrative. Dans une décision de la Commission des lésions professionnelles du 2 mai 2007[2], déclare que le travailleur a subi le 23 mai 2005, une récidive, rechute ou aggravation de la lésion initiale survenue le 15 octobre 2003, soit une dépression majeure secondaire et qu’il a droit en conséquence aux indemnités prévues par la loi en regard de ce diagnostic.
[85] Le 23 décembre 2005, le travailleur est admis en réadaptation.
[86] Le 3 janvier 2006, la psychologue Lecœur produit un rapport d’évolution. Elle écrit que le travailleur continue d’utiliser la thérapie pour faire face à sa situation et s’accommoder de ses conséquences. Elle suggère la poursuite du traitement.
[87] Le 8 février 2006, la Dre Pinard maintient le diagnostic de trouble d’adaptation secondaire avec humeur dépressive. Elle assure le suivi médical régulier du travailleur et le diagnostic psychologique est maintenu.
[88] Le 28 avril 2006, la psychologue Lecœur produit un autre rapport d’évolution. Elle note que le travail accompli par le travailleur et son évolution en regard des objectifs qui avaient été fixés confirment que les symptômes dépressifs qu’il présente sont en lien direct avec la lésion professionnelle et les conséquences qu’elle entraîne aux niveaux physique, social et professionnel.
[89] Dans le cadre du processus de réadaptation, la CSST reconnaît que le travailleur n’est pas en mesure d’occuper son emploi habituel. Une rencontre du travailleur a lieu le 11 septembre 2006 afin de discuter de son plan individualisé de réadaptation.
[90] Dans la note évolutive du 11 octobre 2006, la conseillère en réadaptation rapporte que depuis le 22 février 2005, six rencontres avec le travailleur ont eu lieu afin de discuter de l’analyse de ses capacités de travail, évaluer ses possibilités professionnelles, expliquer l’application de la loi, expliquer la détermination d’un emploi convenable et discuter de la recherche d’une solution de retour au travail. Elle écrit : « Le travailleur n’a manifesté aucun intérêt à s’impliquer dans la détermination d’un emploi convenable ou dans la mise en place de mesures de réadaptation facilitant son retour en emploi au cours de ces rencontres. Il se considère totalement invalide. » [sic]
[91] La CSST procède le 11 octobre 2006 à la détermination unilatérale, d’un emploi convenable, en considérant les critères de la loi. Compte tenu des limitations fonctionnelles reconnues par la Dre Fortier, elle retient, dans une décision rendue le 24 octobre 2006, l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuse et considère que le travailleur est capable d’occuper cet emploi à compter du 23 octobre 2006.
[92] Cette décision est confirmée le 5 décembre 2006, à la suite d’une révision administrative, mais la Commission des lésions professionnelles dans sa décision du 2 mai 2007[3] déclare prématurée et sans effet la décision rendue initialement le 24 octobre 2006 concernant la capacité de travail et la détermination de l’emploi convenable et déclare en conséquence sans objet la décision de la CSST rendue en révision administrative le 5 décembre 2006.
[93] Le travailleur est par la suite suivi de façon régulière par la Dre Pinard et aussi par la Dre Morand et le 15 octobre 2007 par le Dr Charles Guité, neurologue. Dans une attestation de cette date, le Dr Guité rapporte un électromyogramme normal sans évidence de radiculopathie.
[94] Dans un rapport d’évolution du 12 décembre 2007, la psychologue Lecœur rapporte une réinstallation des symptômes dépressifs et recommande la poursuite des rencontres au rythme d’une fois aux quinze jours.
[95] Le travailleur est par la suite vu une fois par mois par la Dre Pinard. Elle maintient la référence en psychologie.
[96] Dans un rapport d’évolution du 10 juillet 2008, la psychologue Lecœur rapporte une amélioration de la condition psychologique du travailleur. Elle écrit :
« […]
Le travail d’acceptation de sa condition physique que monsieur a entrepris, lui permet de mieux gérer la douleur et surtout de la maintenir à un niveau plus stable.
Au niveau psychologique, monsieur rapporte se sentir davantage en équilibre entre ce que lui commande sa tête et ce que lui refuse son corps. Il rapporte également se sentir davantage en paix et semble avoir à nouveau accès à ses ressources internes. […]
Dans cette mesure, le traitement psychothérapeutique doit se poursuivre afin de soutenir monsieur dans le processus qu’il a entrepris, prévenir une éventuelle rechute dépressive, consolider sa confiance dans ses ressources internes et s’assurer de la solidité des acquis. »
[97] À la demande de la CSST, le Dr Sirois revoit le travailleur le 30 juillet 2008 afin de procéder à une nouvelle expertise. Après une revue du dossier et examen mental du travailleur, le Dr Sirois retient que le travailleur souffre de douleurs chroniques consécutives à son accident du travail et dont le sommeil est demeuré affecté par la douleur. Le travailleur se plaint de la sédation due à la médication antidépressive dont il a besoin pour maintenir son niveau d’irritabilité à un niveau tolérable. Il s’agit d’un individu qui est porteur d’une condition personnelle de carence affective, dont le fonctionnement global semble s’être détérioré avec l’intensification des traits caractériels de dépendance et d’opposition sous l'effet de la maladie.
[98] Considérant l’évolution clinique de la condition physique du travailleur au cours des dernières années, de la poursuite de la psychothérapie et de la médication antidépressive depuis son évaluation précédente « avec des résultats très peu apparents sur le plan fonctionnel et subjectif », considérant les effets constatés lors du retrait de l'antidépresseur dont découlent toutefois des effets secondaires contributifs et considérant son examen mental, le Dr Sirois conclut :
« 1. Diagnostic :
On a accepté chez ce travailleur un diagnostic en relation de dépression majeure secondaire, qui correspond dans notre esprit aux critères diagnostiques d’un trouble d’adaptation sévère et chronique ayant très peu évolué ces dernières années en dépit des traitements, compte tenu de la persistance d’un stresseur permanent important et de la vulnérabilité caractérielle préexistante du sujet :
Axe II. Il y a présence de carence affective et de traits de personnalité dépendante et passive-agressive, dont l’action contribue à colorer le tableau clinique et à favoriser la chronicisation des symptômes.
Axe III. Cervicalgie et dorsalgie chronique.
Axe IV. Facteurs stresseurs environnementaux et psychosociaux : perte d'emploi, contrariétés financières, contexte litigieux et douleurs ainsi que limitations chroniques découlant de la lésion professionnelle.
Axe V. Évaluation globale du fonctionnement : 60 à 65.
2. Date de consolidation :
Nous consolidons la lésion psychique à la date de notre examen, le 30 juillet 2008.
3. Existence d'atteinte permanente à l’intégrité physique.
Oui.
4. Pourcentage d'atteinte permanente à l’intégrité physique selon le barème des dommages corporels
Nous accordons une atteinte permanente de 15 %, correspondant à une névrose modérée du groupe II, tel que défini dans le règlement annoté sur le barème des dommages corporels.
5. Nature, nécessité, suffisance, durée des soins ou traitements administrés ou prescrits.
Il nous semble évident que les troubles de l’humeur chronique, l’irritabilité, l’anxiété et l’humeur dépressive, quoique de nature réactionnelle, sont atténués par la prise à dose optimale d’un antidépresseur ISRS et le seraient probablement également avec d’autres médicaments antidépresseurs. Il y a tout avantage que monsieur reprenne son médicament à dose plus efficace, mais on pourrait également envisager la possibilité d’y associer un second antidépresseur au profil d’effets secondaires différents, tel que Remeron ou Wellbutrin afin de ne pas avoir à augmenter de nouveau l’Effexor, voir ensuite s’il est possible de cesser complètement l’Effexor en le remplaçant par un autre antidépresseur mieux toléré de manière à tenter de réduire l’impact à long terme des effets secondaires, notamment sur la fonction sexuelle. Nous considérons par ailleurs qu’il n’y a pas d’objectif d'amélioration durable pourrant [sic] être visé par la thérapie psychologique, dont l’utilité répond à des besoins à long terme de support et d'expression qui n’auront probablement pas de fin.
6. Existence de limitations fonctionnelles résultant de la lésion professionnelle.
Oui.
7. Évaluation des limitations fonctionnelles résultant de la lésion professionnelle.
Il nous semble peu vraisemblable que le travailleur soit en mesure de fournir une prestation normale et régulière dans n’importe lequel travail, étant donné sa grande irritabilité, ses troubles de l'attention et de la concentration, ses plaintes de fatigue chronique et son besoin de dormir pendant de longues périodes au cours de la journée. »
[99] Dans un Rapport complémentaire du 11 septembre 2008 rédigé à la suite de l’expertise du Dr Sirois, la Dre Pinard écrit :
« Concernant rapport d'expertise médicale psychiatrique du Dr Alain Sirois et daté du 2008-07-30 :
Je suis en accord avec la conclusion concernant
1. Le diagnostic
2. Date de consolidation
3. Recommandation de traitement » [sic]
[100] Dans une Information médicale complémentaire écrite reçue par la CSST le 30 septembre 2008, en réponse à la demande suivante de la CSST de préciser son opinion en regard de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles, la Dre Pinard écrit :
« Je suis d’accord avec le fait que M. B... a une atteinte permanente de son intégrité psychique entrainant une limitation fonctionnelle permanente. Cependant, ne maitrisant pas les [mot illisible] du « barème des dommages corporels » je ne suis pas en mesure d’en estimé le % de l’atteinte permanente. Merci. »[sic]
[101] À la suite de l’avis demandé au Dr Sirois, la CSST demande le 1er octobre 2008 un nouvel avis au BEM, afin qu’il donne un avis en regard de l’existence et le cas échéant du pourcentage d’atteinte permanente et de l'existence de limitations fonctionnelles.
[102] Dans un rapport d’évolution du 2 juillet 2009, la psychologue Lecœur rapporte une nette amélioration de la condition du travailleur, elle mentionne qu’il se sent capable pour l’instant de gérer la douleur et d’adapter son fonctionnement à sa condition physique. « À cet égard, monsieur se dit d’ailleurs prêt à mettre un terme aux rencontres en psychologie, rencontres qu’il avait souhaité espacé depuis la fin de l’année 2008 dans la perspective de mettre progressivement un terme à la thérapie qui a débuté au mois de mai 2005 ». Elle conclut en considérant qu’il est justifié de mettre un terme aux rencontres pour l’instant et ajoute « Toutefois, il nous apparaît important de maintenir une ouverture à une éventuelle reprise des rencontres au cas où le besoin s’en ferait sentir dans le futur. »
[103] Le 1er septembre 2009, le Dr Richard Laliberté, psychiatre et membre du BEM, examine le travailleur. Dans un avis motivé du 23 septembre 2009, le Dr Laliberté rapporte à l’état actuel que le travailleur se dit très bien. « il mentionne ne se sentir d’aucune façon déprimée [sic] ». Il rapporte que le travailleur a un appétit qui s’est normalisé, qu’il a repris un poids stable et que son sommeil s’est amélioré. « Il considère que la vie peut être plus belle. » Le Dr Laliberté rapporte une description d’une journée type du travailleur, laquelle tout en tenant compte des douleurs alléguées par le travailleur s’avère normale. Il fait également une description des relations familiales et sociales vécues par le travailleur. Par ailleurs, il écrit :
« Questionné par rapport à son avenir, monsieur se contente de me dire qu’il veut qu’on lui fiche la paix, faisant référence bien sûr à ses relations houleuses avec la CSST. Monsieur mentionne, qu’il n’a jamais aimé les injustices et il dira finalement qu’il a même des preuves à l’effet que la CSST a poussé des gens vers le suicide. »
[104] À l’examen mental, le Dr Laliberté mentionne que le travailleur fait son âge et il a bonne apparence. Le travailleur lui mentionne qu’il n’a pas de position confortable à cause de la douleur. Il écrit :
« […] Il s’est levé à quelques reprises au cours d’entretien. Monsieur B... a dans l’ensemble bien collaboré à l’entretien. Il m’est apparu direct, volubile, circonstanciel par moment. Au niveau des affects, on ne met pas en évidence la présence de tristesse mais parfois davantage de colère et d’irritabilité. Il est resté respectueux et adéquat avec son interlocuteur. On ne note pas la présence de méfiance. Subjectivement, il se dit bien nullement dépressif. Je n’ai mis en évidence aucun trouble au niveau de l’humeur. Les perceptions me sont apparues normales. Au niveau de la pensée, on note parfois une tendance à la pression de discours avec tendance également à la circonstancialité. Il argumente assez longuement sur ses démêlés avec la CSST, critiquant dans des propos pour le moins colorés l’attitude de cet organisme à son endroit et envers les travailleurs en général. Il s’agit, selon lui, dans son dossier, d’un stresseur loin d’être négligeable. Monsieur m’est apparu rigide, ne se remettant rarement en question. On sent un fond paranoïde, interprétant que si on ne peut le qualifier de délirant, m’est apparu à tout le moins surinvesti. Monsieur n’a actuellement aucune idée suicidaire. Il m’est apparu bien orienté dans toutes les sphères et sa mémoire est bonne. »
[105] Le Dr Laliberté souligne les divers rapports consultés et mentionne notamment que dans le Rapport complémentaire de la Dre Pinard du 11 septembre 2008, celle-ci se montre en accord avec le Dr Sirois sur le diagnostic, la date de consolidation et les recommandations de traitements. Il écrit par ailleurs en regard de l’Information médicale complémentaire écrite reçue par la CSST le 30 septembre 2008 que la Dre Pinard ne peut émettre d’opinion sur le pourcentage d’atteinte permanente et sur les limitations fonctionnelles « compte tenu qu’elle ne maîtrise pas très bien le barème des dommages corporels de la CSST ».
[106] Il rapporte aussi notamment le dernier rapport complété par la psychologue Lecœur le 2 juillet 2009 qui mentionne que le travailleur rapporte avoir l’impression que la thérapie lui a fourni les outils nécessaires pour garder le contrôle de sa vie malgré les limitations importantes et un syndrome douloureux chronique.
[107] Il retient en discussion que le diagnostic de dépression majeure n’est pas remis en question. Il souligne que le travailleur a suivi une longue période de psychothérapie et des antidépresseurs et que depuis le début de l’année 2009, l’ensemble de la symptomatologie semble s’être amenuisé. Il écrit :
« […] J’ai en effet pu objectiver une amélioration de la condition de monsieur B... par rapport à l’état clinique qui était décrit par le docteur Sirois lors de son évaluation du mois de juillet 2008.
Lorsque j’ai rencontré monsieur B..., je n’ai pas mis en évidence la présence de symptômes importants au niveau dépressif ou anxieux. Le contact avec la réalité est tout à fait normal. Monsieur se dit surtout limité par ses problèmes de santé physique. On note des plaintes subjectives de problèmes de concentration qui n’ont pas cependant été objectivés en cours d’entrevue. Monsieur présente un bon contact avec la réalité et il n’est certainement pas psychotique. Certains traits de personnalité passifs agressifs ont été mis en évidence mais il nous est difficile actuellement de parler avec certitude d’un trouble de personnalité.
Actuellement, monsieur B... est en mesure de vaquer à la plupart de ses activités quotidiennes. Les seules limitations quotidiennes notées m’apparaissent davantage en lien avec sa condition physique plutôt que son état psychiatrique.
Au moment de ma rencontre avec monsieur B..., celui-ci ne recevait plus d’antidépresseur depuis plusieurs mois. On note par ailleurs une décision commune entre monsieur et sa thérapeute de mettre fin au suivi psychothérapeutique. »
[108] Le Dr Laliberté conclut à la suffisance des soins et traitements et est d’avis qu’il n’y a aucune indication de reprendre des antidépresseurs, ni de suivi psychothérapeutique.
[109] Il estime que l’état clinique du travailleur correspond au groupe I des névroses (Code 222547, du Barème des dommages corporels[4]) avec un déficit anatomophysiologique de 5 %.
[110] Le Dr Laliberté est enfin d’avis qu’au niveau strictement psychiatrique en lien avec le diagnostic retenu par la CSST, il ne peut mettre en évidence la présence de limitations fonctionnelles au niveau psychique.
[111] À la suite de cet avis, la CSST rend une décision le 7 octobre 2009, laquelle est confirmée en révision administrative le 3 novembre 2009 et qui fait l’objet de la première requête du travailleur.
[112] Le 7 octobre 2009, la CSST avise le travailleur qu’elle veut amorcer avec lui un processus d’exploration des possibilités professionnelles pour permettre de déterminer un emploi convenable. Une rencontre avec le travailleur est prévue le 15 octobre suivant.
[113] Le 9 octobre 2009, la CSST rend une décision confirmant que la lésion a entraîné une atteinte additionnelle de 5 %, à laquelle s’ajoute 0,75 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie, pour un total de 5,75 %, donnant droit à une indemnité de 3 231,62 $. Cette décision est confirmée en révision administrative le 16 novembre 2009 et fait l’objet de la seconde requête du travailleur.
[114] Le 15 octobre 2009, le travailleur se présente au bureau de la CSST pour rencontrer la conseillère en réadaptation, Mme Anny-Lise Désilets. Il appert des notes évolutives de Mme Désilets qu’elle fait d’abord un survol du but de la rencontre et des éléments à considérer pour déterminer un emploi convenable. Mme Désilets rapporte que le travailleur lui a fait la lecture de textes qu’il a préparés. Il est question du manque de respect de la CSST à son égard, notamment en écartant les avis des Drs Morand, Pinard et Sirois. Il est également question de l'application de la Chartre des droits et libertés de la personne et de l’application de la convention collective dans le domaine de la construction.
[115] Lors de cette rencontre, le travailleur se questionne sur le rôle de Mme Désilets et sur ses compétences professionnelles. Il est rapporté à de nombreuses reprises que le travailleur veut qu’on le laisse tranquille « T indique que lorsque nous l’aurons respecté, il pourra revoir son opinion de nous »
[116] La conseillère note également que le travailleur est intéressé à être un avocat, mais que la CSST ne peut supporter ce projet.
[117] Elle note également que ce que le travailleur veut que la CSST lui verse de l’indemnité de remplacement du revenu jusqu’à 65 ans. Elle écrit :
« - Lui propose donc de regarder les titres d’emploi, plus sédentaires, que j’ai identifiée; il indique qu’il ne le fera pas.
- Lui propose de les apporter avec lui pour les regarder; il indique qu’il ne fera pas ce travail avec moi.
- Lui indique la séquence qui suit la décision de l’EC, soit l’année de recherche d’emploi, et après l’IRR réduite.
- L’informe que j’ai imprimé la simulation de l’indemnité réduite que ça apporte lorsque nous déterminerons l’emploi, au salaire minimum. T ne veut pas que nous regardions le document et ne veut pas l'apporter avec lui. Il me répète de faire ce que j’ai à faire.
[…]
-ANALYSE ET RÉSULTATS :
Considérant que le T ne veut amorcer une exploration des possibilités professionnelles avec la Commission;
Considérant qu’il ne souhaite pas non plus amorcer la démarche avec une ressource en orientation;
Considérant que le T n’apporte pas de solution ou d’idée, mais que ce qu’il souhaite c’est de pouvoir recevoir ses IRR jusqu’à 65 ans;
Considérant que le projet d’EC de 2005, soit répartiteur de dépanneuses était convenable et que le T ne souhaite pas identifié une solution autre qui serait davantage près de ses intérêts;
Considérant que cet emploi convenable respecte toujours les 5 critères;
Considérant que depuis cette détermination, la condition physique ne s’est pas aggravée et la condition psychologique ne présente pas de l.f.;
Formulaire de détermination de l’EC complété. » [sic]
[118] Au formulaire de détermination de l’emploi convenable, la conseillère procède à l’analyse des cinq critères de l’emploi de répartiteur de dépanneuses, lequel est retenu comme emploi convenable potentiel.
[119] Selon la conseillère son analyse révèle que cet emploi permet au travailleur d’utiliser sa capacité résiduelle. Elle souligne, selon Repères, cet emploi consiste à recevoir les demandes de service des clients et de transmettre l’information aux chauffeurs de dépanneuses pour qu’ils assurent un service de dépannage rapide et efficace. Elle note :
« Les capacités physiques, selon Repères sont :
Être capable de voir de près;
Être capable de communiquer verbalement;
Être capable de travailler principalement en position assise;
Être capable de coordonner les mouvements de ses membres supérieurs;
Être capable de soulever un poids jusqu’à environ 5kg.
L.F. retenues par le md pour la lésion physique lombaire :
Le patient devra éviter de :
- Soulever, porter, pousser, tirer des charges répétitives ou fréquentes de plus de 10 lbs;
- Travailler en position accroupie;
- Ramper, grimper;
- Effectuer des mouvements avec des amplitudes extrêmes de flexion, extension ou torsion de la colonne lombaire;
- Subir des vibrations de basses fréquences ou des contrecoups la colonne vertébrale
Nous faisons le constat, à la lecture des balises ci haut, que les l.f. sont respectées en sein des fonctions de cet emploi. » [sic]
[120] La conseillère est également d’avis que l’emploi de répartiteur de dépanneuses permet au travailleur d’utiliser ses qualifications fonctionnelles. Elle rapporte que le travailleur a un diplôme d’étude professionnelle en tuyauterie et 25 ans d’expérience en ce domaine. Il a toujours été présent sur le marché du travail et est allé se chercher des ajouts de formation. Elle note que l’emploi de répartiteur, selon Repères, ne découle pas d’une formation scolaire spécifique et que quelques années d’étude secondaire suffisent, la formation se donnant en cours d’emploi.
[121] Par ailleurs, la conseillère rapporte que selon Emploi-Québec (2008-2012) les perspectives d’emploi sont favorables pour le Québec et acceptables en Mauricie et favorables dans la région de la Capitale-nationale et selon Service Canada les perspectives sont acceptables pour l’ensemble du Québec. Les employeurs potentiels sont les concessionnaires, les garages et les services de remorquage de véhicules. Ces catégories d’employeur sont très présentes dans la région de la Mauricie.
[122] La conseillère estime par ailleurs que l’emploi de répartiteur de dépanneuses ne présenta pas de danger pour la santé et la sécurité du travailleur et qu’il s’agit d’un emploi approprié. Elle note que cet emploi s’exerce dans un milieu traditionnellement occupé par des hommes, comme l’emploi prélésionnel ce qui devrait faciliter son intégration. Il s’agit d’un emploi de bureau, qui en raison des limitations fonctionnelles, permet au travailleur d’exercer ses tâches assis/debout. La conseillère note par ailleurs que le travailleur s’exprime bien et se présente bien et a un vocabulaire approprié.
[123] Quant au salaire retenu, la conseillère note que selon Repères indique comme départ 14 $ l’heure, toutefois considérant l’âge du travailleur et le fait qu’il a exercé surtout des travaux manuels, elle retient un salaire de 10 $ l’heure, soit 20 800 $ par année. Elle considère enfin que le travailleur est capable d’exercer l’emploi de répartiteur de dépanneuses à compter du 15 octobre 2009 et que son année de recherche d’emploi se terminera le 14 octobre 2010.
[124] Elle ajoute à son analyse :
« T manifeste son intention de contester cette présente décision. Il nous indiquait souhaiter obtenir ses IRR jusqu’à 65 ans, se considérant incapable de travailler. La décision d’emploi convenable en est une unilatérale, sans la collaboration de Monsieur B.... [sic]
[125] Le 19 octobre 2009, la CSST rend donc la décision confirmant qu’elle a retenu comme emploi convenable, celui de répartiteur de dépanneuses qui pourrait procurer un revenu annuel de 20 800 $ et que le travailleur est capable d’exercer à compter du 15 octobre 2009. Cette décision est confirmée en révision administrative le 16 novembre 2009 et est visée par la seconde requête du travailleur.
[126] Dans une note du 26 octobre 2009, la conseillère écrit qu’elle a fait un retour d’appel au travailleur à la suite de la décision. Elle écrit notamment : « il indique que la décision d’emploi mentionne qu’il a participé à un processus; il n’a pas pris part à quoi que ce soit, et il souhaite que ce soit écrit au dossier. Il indique qu’il nous poursuivra au civil si nous persistons à indiquer qu’il a collaboré. Il souhaite que ce soit clair qu’il n’a pas participer à rien; l’EC est selon lui une fabulation de la conseillère précédente. »
[127] Dans la même note évolutive, la conseillère note que le travailleur lui demande si la CSST a reconsidéré la base salariale :
« […] selon ce qui est prévu à sa convention collective. Il indique qu’elle prévoit un montant pour ses bottes de sécurité, qu’elle prévoit une augmentation du taux horaire, qu’elle prévoit 11,5 % de vacances.
- Lui indique que je ne peux modifier sa base salariale.
- Il indique qu’il avait contesté en le disant à l’agente en 2004; lui demande si l’avait fait par écrit, il indique qu’elle l’avait pris en note.
- Lui demande si avait contesté un avis de paiement? Il indique que si avait eu une lettre, il l’aurait fait.
- Lui confirme que je ne peux modifier sa base salariale;
- Lui indique que si pas d'accord, il peut prendre son avis de paiement qui accompagne son chèque, le contester, et devra justifier le délai. » [sic]
[128] Le 29 octobre 2009, à la suite de l’émission du chèque d’indemnité de remplacement du revenu du 22 octobre 2009 le travailleur a logé une lettre de contestation qui se lit comme suit :
« Lettre de contestation 29-10-2009
125016436
Pour le pourcentage de mon revenu annuelle de 90 % du sallaire net. Lord de mon accident selon ma Convention collective mon travaille était de nuit qui comporte 15 % de plus avec avantage sociaux. J’ai déjà fait la demande de révision à l’agent qui était dans mon dossier Anny Grenier, 2004 mai.
Je n’ai pas eu de résultat je vous fait encore le demande de revoir ce montant.
D... B... » [sic]
[129] Le travailleur a témoigné à l’audience. Il estime d’abord avoir droit à une base de salaire de 55 200 $ au lieu de 53 500 $, tel que retenu par la CSST. Il est d’avis que la CSST aurait dû lui accorder la base salariale accordée en 2004, puisque son accident du travail est survenu le 15 octobre 2003, « soit 10 mois et quinze jours » après le début de l’année 2003.
[130] Le travailleur affirme avoir demandé dès 2003 à la CSST de retenir la base salariale de 55 200 $. Demande qu’il affirme avoir réitéré en 2004 et en 2009. Ainsi, le travailleur estime que sa demande n’est pas logée hors délai et il demande au tribunal de corriger la base salariale rétroactivement au 15 octobre 2003.
[131] Par ailleurs, le travailleur estime avoir droit à une atteinte permanente à l’intégrité psychique de 15 %, tel que reconnu par le Dr Sirois. Il estime que le Rapport complémentaire du 11 septembre 2008 et l’Information médicale complémentaire écrite reçue par la CSST le 30 septembre 2008 de la Dre Pinard sont « clairs et nets » et qu’ils sont à l’effet que cette dernière était en accord avec le déficit anatomophysiologique et les limitations fonctionnelles émis par le Dr Sirois. Puisqu’il n’y avait pas de litige, la CSST ne pouvait soumettre son dossier au BEM.
[132] Enfin, en ce qui concerne l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuse, le travailleur soumet qu’il est incapable d’effectuer pareil emploi.
[133] D’abord, il témoigne qu’il a « spécifié » en 2003 à Mme Boulay, son agente d’indemnisation, sa phobie des téléphones. Il précise qu’il a horreur de répondre au téléphone. Il réfère à cet effet à l’extrait suivant des notes évolutives du 30 avril 2004 : « J’informe le T qu’il peut m’appeler qu’il n’est pas obligé de passer au bureau. T précise avoir phobie du téléphone, qu’il en a par-dessus la tête des téléphones. » [sic]
[134] De plus, il réfère à l’expertise du Dr Montminy, dans laquelle le médecin indique que le travailleur ne peut occuper un emploi dans lequel il doit demeurer en position assise ou debout plus de 30 minutes, ce qui est incompatible avec l’emploi retenu.
[135] Il ajoute de plus que le Dr Sirois concluait en 2008 à sa non-employabilité.
L’AVIS DES MEMBRES
Dossier 393602-04-0911
[136] Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs partagent le même avis à savoir que la requête du travailleur doit être rejetée et que la décision rendue le 3 novembre 2009 à la suite d’une révision administrative doit être confirmée.
[137] Ils sont d'abord d'opinion que l’avis du BEM du 23 septembre 2009 est régulier puisqu’il y avait litige entre la Dre Pinard et le Dr Sirois quant à l’atteinte permanente et que la Dre Pinard ne s’est pas prononcée quant aux limitations fonctionnelles. Ainsi, la CSST était liée par les conclusions du BEM et était donc justifiée de poursuivre le versement de l'indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité du travailleur d’exercer son emploi, étant donné qu’il demeurait avec des limitations fonctionnelles en regard de sa lésion physique et déclare que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente en regard de la lésion psychologique.
Dossier 395886-04-0912
[138] Les membres issus des associations syndicales et des associations d’employeurs partagent le même avis à savoir que la requête du travailleur doit être rejetée et que la décision rendue le 16 novembre 2009 à la suite d’une révision administrative doit être confirmée dans son intégralité.
[139] Ils sont d'abord d’opinion que la demande de révision du 29 octobre 2009 concernant la base salariale a été logée hors délai et conclut qu’aucun motif raisonnable n’a été démontré permettant de relever le travailleur de son défaut et sont en conséquence d’avis de déclarer irrecevable la demande de révision.
[140] Compte tenu de la preuve prépondérante, notamment du rapport d’évolution de la psychologue Lecœur du 2 juillet 2009 et des conclusions du Dr Laliberté, les membres sont d’avis que la lésion professionnelle du 23 mai 2005 a entraîné une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique du travailleur de 5,75 %.
[141] Les membres issus sont enfin d’avis de déclarer que depuis le 15 octobre 2009, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuses pouvant lui procurer un salaire annuel estimé à 20 800 $. Ils estiment que la preuve faite par la CSST démontre que cet emploi est convenable et que le travailleur n’a fait aucune preuve à l’effet contraire. Ils estiment par ailleurs que la phobie des téléphones alléguée par le travailleur n’est appuyée par aucune preuve probante et ne peut être retenue.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION
[142] La Commission des lésions professionnelles doit disposer de deux litiges.
Dossier 393602-04-0911
[143] La Commission des lésions professionnelles doit d'abord décider, comme allégué par le travailleur si le processus d’évaluation médicale menant à l’avis du BEM du 23 septembre 2009 est conforme à la loi et le cas échéant, le tribunal doit décider s’il doit retenir les conclusions du Dr Laliberté du BEM ou retenir, comme le demande le travailleur, celles du Dr Sirois.
[144] Rappelons que c’est en vertu de l’article 212 de la loi que le processus d’évaluation menant à un avis du BEM est institué. Cet article stipule :
212. L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la Commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l'attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s'il obtient un rapport d'un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l'un ou plusieurs des sujets suivants :
1° le diagnostic;
2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;
3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;
4° l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur;
5° l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.
L'employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l'attestation ou du rapport qu'il désire contester.
__________
1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.
[145] Le travailleur estime qu’il n’y a pas litige entre son médecin, la Dre Pinard et le médecin désigné par la CSST, le Dr Sirois. Il estime que la Dre Pinard était en accord avec toutes les conclusions du Dr Sirois, notamment en ce qui a trait à l’atteinte permanente de 15 % retenue par ce dernier et sur le fait qu’il ne soit en mesure de fournir une prestation normale et régulière dans n’importe quel travail.
[146] Il souligne qu’il est « clair et net » que la Dre Pinard était d’accord avec l’avis de ce dernier.
[147] La représentante de la CSST dans son argumentation n’est pas du même avis. Elle estime pour sa part que la Dre Pinard en refusant de se prononcer sur l’atteinte permanente était en désaccord avec le Dr Sirois.
[148] À partir de ce constat, elle allègue que la CSST pouvait soumettre le dossier au BEM afin qu’il se prononce sur l’un ou l’autre des sujets mentionnés à l’article 212 de la loi.
[149] Qu’en est-il de l’existence d’un litige entre la Dre Pinard et le Dr Sirois? Selon une jurisprudence constante du tribunal, il doit exister un litige entre l'avis du médecin du travailleur et celui du médecin de l'employeur ou le médecin désigné par la CSST pour que le dossier soit transmis à un membre du BEM, car ce dernier ne peut se servir du pouvoir discrétionnaire que lui accorde le deuxième alinéa de l'article 221 de la loi pour se prononcer sur des questions qui faisaient l'objet d'un accord entre le médecin du travailleur et celui de l'employeur[5].
[150] En l’espèce, le Dr Sirois dans le cadre de l’application de l’article 204 de la loi revoit le travailleur le 30 juillet 2008 et conclut à un diagnostic de dépression majeure secondaire, lésion qu’il consolide le 30 juillet 2008. Il retient par ailleurs à une atteinte permanente de 15 % pour une névrose modérée du groupe II et est par ailleurs d’avis, quant aux soins, que le travailleur doit continuer à prendre une médication à dose plus efficace et aussi d’opinion qu’il n’y a pas d’amélioration durable liée à la psychothérapie. Le Dr Sirois est enfin d’opinion qu’il est peu vraisemblable que le travailleur soit en mesure de fournir une prestation normale et régulière dans n’importe quel travail.
[151] Dans un Rapport complémentaire du 11 septembre 2008 rédigé à la suite de l’expertise du Dr Sirois, la Dre Pinard écrit qu’elle est d’accord avec le diagnostic, la date de consolidation et les recommandations de traitement.
[152] Dans une Information médicale complémentaire écrite reçue par la CSST le 30 septembre 2008, en réponse à la demande suivante de la CSST de préciser son opinion en regard de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles, la Dre Pinard écrit qu’elle est d’accord avec le fait que le travailleur ait une atteinte permanente de son intégrité psychique entraînant une limitation fonctionnelle permanente, toutefois, ne maîtrisant pas les dispositions du Barème des dommages corporels elle se dit non en mesure d’estimer le pourcentage de l’atteinte permanente. Elle ne se prononce par ailleurs pas sur la description des limitations fonctionnelles.
[153] Comme la Dre Pinard, ne se prononce pas sur le pourcentage d’atteinte permanente et sur les limitations fonctionnelles à retenir et ne pouvant retenir les conclusions du Dr Sirois, la CSST n’avait d'autre choix que de soumettre « le litige » au BEM pour qu’il donne son avis.
[154] Ainsi, le tribunal et contrairement à ce qu’allègue le travailleur estime qu’il y avait, à l’évidence, un litige sur lequel le membre du BEM devait donner un avis, puisque les Drs Pinard et Sirois ne s’entendent pas sur l’atteinte permanente à retenir et sur les limitations fonctionnelles. D’ailleurs, le Dr Laliberté du BEM mentionne spécifiquement dans son avis que dans le Rapport complémentaire de la Dre Pinard du 11 septembre 2008, celle-ci se montre en accord avec le Dr Sirois sur le diagnostic, la date de consolidation et les recommandations de traitements. Il écrit par ailleurs en regard de l’Information médicale complémentaire écrite reçue par la CSST le 30 septembre 2008 que la Dre Pinard ne peut émettre d’opinion sur le pourcentage d’atteinte permanente et sur les limitations fonctionnelles « compte tenu qu’elle ne maîtrise pas très bien le barème des dommages corporels de la CSST ».
[155] Donc, conformément à l’article 221, le membre du BEM pouvait, se prononcer sur l’un ou l’autre des sujets visés à l’article 212 de la loi. L’article 221 de la loi stipule à cet effet :
221. Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.
Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.
__________
1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.
[156] Ainsi, le tribunal estime que l’avis du BEM du 23 septembre 2009 est « régulier » et liait la CSST.
[157] Quant aux conclusions du Dr Laliberté du BEM, le tribunal, vu la preuve médicale prépondérante est d’avis de les retenir dans leur ensemble. Le tribunal retient que lors de l’examen mental du travailleur du 1er septembre 2009, le Dr Laliberté rapporte à l’état actuel que le travailleur se dit très bien. « il mentionne ne se sentir d’aucune façon déprimée [sic] ». Il rapporte que le travailleur a un appétit qui s’est normalisé, qu’il a repris un poids stable et que son sommeil s’est amélioré. « Il considère que la vie peut être plus belle. »
[158] Le Dr Laliberté rapporte une description d’une journée type du travailleur, laquelle s’avère normale. Il fait également une description des relations familiales et sociales vécues par le travailleur.
[159] Le tribunal retient aussi qu’à l’examen mental, le Dr Laliberté mentionne que le travailleur fait son âge et a bonne apparence. Il mentionne que lors de l’examen le travailleur a bien collaboré et lui est apparu direct, volubile, circonstanciel par moment. Au niveau des affects, le Dr Laliberté ne met pas en évidence la présence de tristesse, mais parfois davantage de colère et d’irritabilité. Il note que subjectivement, le travailleur se dit bien, nullement dépressif. Il ne met en évidence aucun trouble au niveau de l’humeur et les perceptions du travailleur sont apparues normales au Dr Laliberté. Il note par ailleurs que le travailleur n’a actuellement aucune idée suicidaire et est apparu bien orienté dans toutes les sphères et sa mémoire est bonne
[160] Le Dr Laliberté rapporte aussi le dernier rapport complété par la psychologue Lecœur du 2 juillet 2009 qui mentionne que le travailleur rapporte avoir l’impression que la thérapie lui a fourni les outils nécessaires pour garder le contrôle de sa vie malgré les limitations importantes et un syndrome douloureux chronique.
[161] Le Dr Laliberté retient en discussion que le diagnostic de dépression majeure n’est pas remis en question. Il souligne qu’il a pu objectiver une amélioration de la condition du travailleur par rapport à l’état clinique qui était décrit par le Dr Sirois lors de son évaluation du mois de juillet 2008.
[162] Le Dr Laliberté précise qu’il n’a pas mis en évidence la présence de symptômes importants au niveau dépressif ou anxieux. Le contact avec la réalité est tout à fait normal. Il souligne que les plaintes subjectives du travailleur relatives à des problèmes de concentration n’ont pas été objectivées en cours d’entrevue. Le travailleur présente un bon contact avec la réalité et il n’est certainement pas psychotique. Certains traits de personnalité passifs agressifs ont été mis en évidence par le Dr Laliberté, mais il précise qu’il lui est difficile actuellement de parler avec certitude d’un trouble de personnalité.
[163] Il conclut que le travailleur est en mesure de vaquer à la plupart de ses activités quotidiennes. Les seules limitations quotidiennes notées apparaissent pour le Dr Laliberté davantage en lien avec sa condition physique plutôt que son état psychiatrique.
[164] Comme au moment de l’examen, le travailleur ne recevait plus d’antidépresseur depuis plusieurs mois et qu’à la suite d’une décision commune entre le travailleur et sa psychologue de mettre fin au suivi psychothérapeutique et que depuis le début de l’année 2009, l’ensemble de la symptomatologie semble s’être amenuisé. Le Dr Laliberté conclut à la suffisance des soins et traitements et est d’avis qu’il n’y a aucune indication de reprendre des antidépresseurs, ni de suivi psychothérapeutique.
[165] Il estime que l’état clinique du travailleur correspond au groupe I des névroses (Code 222547, du Barème des dommages corporels) avec un déficit anatomophysiologique de 5 %.
[166] Le Dr Laliberté est enfin d’avis qu’au niveau « strictement psychiatrique en lien avec le diagnostic retenu par la CSST » il ne peut mettre en évidence la présence de limitations fonctionnelles au niveau psychique.
[167] Étant donné ces conclusions, la CSST était justifiée le 7 octobre 2009 de poursuivre le versement de l'indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité du travailleur d’exercer son emploi, étant donné qu’il demeure avec des limitations fonctionnelles en regard de sa « lésion physique » et déclare que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente en regard de la lésion psychologique.
[168] De ce qui précède le tribunal est donc d’avis de rejeter la requête du travailleur.
Dossier 395886-04-0912
La base salariale
[169] La Commission des lésions professionnelles doit d’abord statuer sur la demande de révision logée par le travailleur le 29 octobre 2009 concernant la base salariale.
[170] La CSST estime que cette demande a été logée hors délai et conclut qu’aucun motif raisonnable n’a été démontré permettant de relever le travailleur de son défaut et déclare en conséquence irrecevable cette demande de révision.
[171] Qu’en est-il en l’espèce?
[172] Rappelons les dispositions de la loi relatives à la décision et au délai pour contester celle-ci en révision administrative :
354. Une décision de la Commission doit être écrite, motivée et notifiée aux intéressés dans les plus brefs délais.
__________
1985, c. 6, a. 354.
358. Une personne qui se croit lésée par une décision rendue par la Commission en vertu de la présente loi peut, dans les 30 jours de sa notification, en demander la révision.
Cependant, une personne ne peut demander la révision d'une question d'ordre médical sur laquelle la Commission est liée en vertu de l'article 224 ou d'une décision que la Commission a rendue en vertu de la section III du chapitre VII, ni demander la révision du refus de la Commission de reconsidérer sa décision en vertu du premier alinéa de l'article 365 .
Une personne ne peut demander la révision de l'acceptation ou du refus de la Commission de conclure une entente prévue à l'article 284.2 ni du refus de la Commission de renoncer à un intérêt, une pénalité ou des frais ou d'annuler un intérêt, une pénalité ou des frais en vertu de l'article 323.1 .
__________
1985, c. 6, a. 358; 1992, c. 11, a. 31; 1996, c. 70, a. 40; 1997, c. 27, a. 14; 2006, c. 53, a. 26.
358.1. La demande de révision doit être faite par écrit. Celle-ci expose brièvement les principaux motifs sur lesquels elle s'appuie ainsi que l'objet de la décision sur laquelle elle porte.
__________
1997, c. 27, a. 15.
[174] La jurisprudence[6] du tribunal a établi qu’une demande de révision ne requiert pas de formulation sacramentelle ou obligatoire. La seule obligation contenue à la loi est qu'une telle contestation soit toutefois faite par écrit. Pour le reste, il s'agit qu'on puisse déceler l'intention d'une partie de contester une décision précise ou un désaccord avec une telle décision.
[175] La demande de révision du travailleur du 29 octobre 2009, fait suite à un avis de paiement émis le 22 octobre 2009. Toutefois, cet avis de paiement est basé sur les renseignements financiers, en particulier sur la base salariale retenue, contenus dans les avis de paiement émis depuis octobre 2003.
[176] Le tribunal retient d’un courant jurisprudentiel majoritaire que l’avis de paiement portant sur le salaire retenu pour calculer l'indemnité de remplacement du revenu peut constituer une décision implicite de la CSST et peut faire l'objet d'une contestation[7]. En l’espèce, il n’est d’ailleurs pas contesté que l’avis de paiement constitue une décision de la CSST.
[177] Cette jurisprudence a établi que le travailleur doit contester dans les 30 jours de la connaissance de l'existence de la décision implicite[8].
[178] Le tribunal retient de la preuve que depuis l’événement initial du 15 octobre 2003, la CSST a retenu la base salariale maximale à laquelle avait droit le travailleur en 2003, soit 53 500 $. Il appert d’ailleurs des notes évolutives que la base salariale retenue par la CSST est le maximum annuel assurable de 53 500 $ et que l’agent d’indemnisation de la CSST, M. Alain Garceau, a rencontré le travailleur et qu’il a discuté notamment avec ce dernier de la base salariale retenue. M. Garceau écrit que le travailleur lui a dit qu’il gagnait plus de 53 500 $ par année et qu’il lui a expliqué que ce montant était le maximum assurable.
[179] Rappelons que la loi prévoit aux fins d’établir l’indemnité de remplacement du revenu, que le calcul du revenu brut annuel du travailleur est fait conformément aux articles 60 à 62 de la loi qui stipulent :
60. L'employeur au service duquel se trouve le travailleur lorsqu'il est victime d'une lésion professionnelle lui verse, si celui-ci devient incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, 90 % de son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où ce travailleur aurait normalement travaillé, n'eût été de son incapacité, pendant les 14 jours complets suivant le début de cette incapacité.
L'employeur verse ce salaire au travailleur à l'époque où il le lui aurait normalement versé si celui-ci lui a fourni l'attestation médicale visée dans l'article 199 .
Ce salaire constitue l'indemnité de remplacement du revenu à laquelle le travailleur a droit pour les 14 jours complets suivant le début de son incapacité et la Commission en rembourse le montant à l'employeur dans les 14 jours de la réception de la réclamation de celui-ci, à défaut de quoi elle lui paie des intérêts, dont le taux est déterminé suivant les règles établies par règlement. Ces intérêts courent à compter du premier jour de retard et sont capitalisés quotidiennement.
Si, par la suite, la Commission décide que le travailleur n'a pas droit à cette indemnité, en tout ou en partie, elle doit lui en réclamer le trop-perçu conformément à la section I du chapitre XIII.
__________
1985, c. 6, a. 60; 1993, c. 5, a. 1.
61. Lorsqu'un travailleur victime d'une lésion professionnelle est de retour au travail, son employeur lui verse son salaire net pour chaque jour ou partie de jour où ce travailleur doit s'absenter de son travail pour recevoir des soins ou subir des examens médicaux relativement à sa lésion ou pour accomplir une activité dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation.
La Commission rembourse à l'employeur, sur demande, le salaire qu'il a payé en vertu du premier alinéa, sauf lorsque le travailleur s'est absenté de son travail pour subir un examen médical requis par son employeur.
__________
1985, c. 6, a. 61.
62. Aux fins des articles 59 à 61, le salaire net du travailleur est égal à son salaire brut moins les retenues à la source qui sont faites habituellement par son employeur en vertu de :
1° la Loi sur les impôts (chapitre I-3) et la Loi de l'impôt sur le revenu (Lois révisées du Canada (1985), chapitre 1, 5 e supplément);
2° la Loi sur l'assurance-emploi (Lois du Canada, 1996, chapitre 23); et
3° la Loi sur le régime de rentes du Québec (chapitre R-9);
4° la Loi sur l'assurance parentale (chapitre A-29.011).
Pour l'application du présent article, le salaire brut pour une journée ou une partie de journée comprend, lorsque le travailleur est visé à l'un des articles 42.11 et 1019.4 de la Loi sur les impôts, l'ensemble des pourboires qui, pour cette journée ou partie de journée, auraient été déclarés par le travailleur à son employeur en vertu de cet article 1019.4 ou que son employeur lui aurait attribués en vertu de cet article 42.11 .
Aux fins de l'article 60, le salaire brut du travailleur est pris en considération jusqu'à concurrence du maximum annuel assurable établi en vertu de l'article 66 .
__________
1985, c. 6, a. 62; 1997, c. 85, a. 2; 2001, c. 9, a. 123.
[180] L’article 65 de la loi prévoit par ailleurs :
65. Aux fins du calcul de l'indemnité de remplacement du revenu, le revenu brut annuel d'emploi ne peut être inférieur au revenu brut annuel déterminé sur la base du salaire minimum en vigueur lorsque se manifeste la lésion professionnelle ni supérieur au maximum annuel assurable en vigueur à ce moment.
__________
1985, c. 6, a. 65.
[le soulignement est du tribunal]
[181] Ainsi, selon le troisième alinéa de l’article 62, le salaire brut est pris en considération jusqu’à concurrence du maximum annuel assurable. Celui-ci est établi pour l’année 2003 de 53 500 $, selon le calcul mentionné à l’article 66 de la loi.
[182] Donc, la CSST ne peut accorder une indemnité de remplacement du revenu au travailleur basée sur un salaire brut plus élevé que le maximum annuel assurable.
[183] Dès octobre 2003, le travailleur a reçu des indemnités de remplacement du revenu basées sur le maximum annuel assurable de 53 500 $ prévu pour 2003. Aucune demande de révision écrite conforme à l’article 358.1 de la loi n’a par ailleurs été alors déposée par le travailleur. Certes, il y a eu discussions à quelques reprises entre le travailleur et les agents de la CSST à ce propos, mais aucune demande de révision écrite n’a été déposée avant le 29 octobre 2009, soit plus de 6 ans après le début du versement des indemnités de remplacement du revenu; soit bien en dehors du délai de 30 jours prévu par le premier alinéa de l’article 358 de la loi.
[184] Le fait d’avoir demandé dès octobre 2003 une correction de la base salariale et d’avoir réitéré en 2004 et 2009, et ce, uniquement verbalement aux agents de la CSST, ne peut être considéré comme une demande de révision logée conformément à l’article 358.1 de la loi et ne peut être retenu par le tribunal comme ayant été logée dans le délai prévu par la loi.
[185] En vertu de l’article 352 de la loi, le tribunal peut prolonger un délai ou relever le travailleur des conséquences de son défaut de le respecter, s'il est démontré que celui-ci n'a pu respecter le délai prescrit pour un motif raisonnable pour expliquer son retard.
[186] La notion de motif raisonnable n’est pas définie à la loi. Le tribunal s’en remet donc à la définition retenue par la jurisprudence[9] voulant qu’un motif raisonnable soit une notion large permettant de considérer un ensemble de facteurs susceptibles d’indiquer, à partir des faits, des démarches, des comportements, de la conjoncture, des circonstances, si une personne a un motif non farfelu, crédible et qui fait preuve de bon sens, de mesure et de réflexion.
[187] Il appartient au travailleur de démontrer un tel motif. Le tribunal est d’avis qu’en l’espèce, il ne s’est pas acquitté de ce fardeau de preuve.
[188] Le travailleur n’a donné au tribunal aucun motif pour expliquer le délai à produire une demande de révision écrite à la suite du premier avis de paiement d’octobre 2003.
[189] En l’espèce, le travailleur n’a démontré aucun motif raisonnable pour être relevé de son défaut, aussi le tribunal doit-il rejeter sa requête sur la question de la base de salaire.
L’atteinte permanente
[190] La Commission des lésions professionnelles doit par ailleurs décider si la récidive, rechute ou aggravation du 23 mai 2005 a entraîné une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique du travailleur de 5,75 % et que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel de 3 231,62 $ plus intérêts.
[191] En l’espèce comme le tribunal a déjà déterminé que l’atteinte permanente de 5 % de déficit anatomophysiologique par le Dr Laliberté dans son avis du 24 septembre 2009 doit être maintenue, reste à voir quel pourcentage pour douleurs et perte de jouissance de la vie (DPJV) doit être accordé au travailleur. Selon le Barème des dommages corporels, lorsque le déficit anatomophysiologique se situe entre 5 % et 5,99 %, un DPJV de 0,75 % doit être ajouté, conformément au Code 225 054.
[192] Ainsi, en l’espèce c’est ce pourcentage qui a été accordé au travailleur par la CSST. Quant à la somme de 3 231,62 $ auquel le travailleur aurait droit, vu l’absence de toute preuve de sa part quant à une erreur dans le calcul de ce montant, le tribunal estime justifié de le confirmer.
L’emploi convenable
[193] La Commission des lésions professionnelles doit enfin déterminer si l’emploi de répartiteur de dépanneuses constitue un emploi convenable pour le travailleur au sens de la loi et le cas échéant si cet emploi peut procurer un salaire annuel estimé à 20 800 $ et enfin si le travailleur est capable de l’exercer à compter du 15 octobre 2009.
[194] La notion d’emploi convenable est définie ainsi par la loi :
2. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par :
« emploi convenable » : un emploi approprié qui permet au travailleur victime d'une lésion professionnelle d'utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et dont les conditions d'exercice ne comportent pas de danger pour la santé, la sécurité ou l'intégrité physique du travailleur compte tenu de sa lésion;
__________
1985, c. 6, a. 2; 1997, c. 27, a. 1; 1999, c. 14, a. 2; 1999, c. 40, a. 4; 1999, c. 89, a. 53; 2002, c. 6, a. 76; 2002, c. 76, a. 27; 2006, c. 53, a. 1.
[195] De cette définition, il ressort que l’emploi convenable peut être ainsi qualifié lorsqu’il répond aux quatre critères suivants :
1. il permet l’utilisation des capacités résiduelles du travailleur;
2. il permet l’utilisation des qualifications professionnelles du travailleur;
3. il présente une possibilité raisonnable d’embauche;
4. il présente des conditions d’exercice ne comportant pas de danger pour la santé, la sécurité ou l’intégrité physique du travailleur, compte tenu de sa lésion.
[196] Le tribunal retient également que l’emploi convenable doit constituer un emploi « approprié » qui doit tenir compte, dans la mesure du possible, de la réalité du travailleur, c’est-à-dire de ses caractéristiques personnelles, de ses acquis par le travail et de ses capacités de gain.
[197] La détermination de l’emploi convenable tire sa source dans l’application des articles 145, 146 et 166 de la loi :
145. Le travailleur qui, en raison de la lésion professionnelle dont il a été victime, subit une atteinte permanente à son intégrité physique ou psychique a droit, dans la mesure prévue par le présent chapitre, à la réadaptation que requiert son état en vue de sa réinsertion sociale et professionnelle.
__________
1985, c. 6, a. 145.
146. Pour assurer au travailleur l'exercice de son droit à la réadaptation, la Commission prépare et met en œuvre, avec la collaboration du travailleur, un plan individualisé de réadaptation qui peut comprendre, selon les besoins du travailleur, un programme de réadaptation physique, sociale et professionnelle.
Ce plan peut être modifié, avec la collaboration du travailleur, pour tenir compte de circonstances nouvelles.
__________
1985, c. 6, a. 146.
166. La réadaptation professionnelle a pour but de faciliter la réintégration du travailleur dans son emploi ou dans un emploi équivalent ou, si ce but ne peut être atteint, l'accès à un emploi convenable.
__________
1985, c. 6, a. 166.
[198] Conformément à l’article 166 de la loi, après avoir conclu que l’emploi prélésionnel ne respecte pas les limitations fonctionnelles du travailleur, la CSST enclenche le processus de réadaptation prévu à l’article 171 de la loi qui se lit comme suit :
171. Lorsqu'aucune mesure de réadaptation ne peut rendre le travailleur capable d'exercer son emploi ou un emploi équivalent et que son employeur n'a aucun emploi convenable disponible, ce travailleur peut bénéficier de services d'évaluation de ses possibilités professionnelles en vue de l'aider à déterminer un emploi convenable qu'il pourrait exercer.
Cette évaluation se fait notamment en fonction de la scolarité du travailleur, de son expérience de travail, de ses capacités fonctionnelles et du marché du travail.
__________
1985, c. 6, a. 171.
[199] Dès le 23 décembre 2004, la CSST reconnaît au travailleur le droit à la réadaptation. Le 23 décembre 2005, le travailleur est admis en réadaptation.
[200] Dans le cadre du processus de réadaptation, la CSST reconnaît que le travailleur n’est pas en mesure d’occuper son emploi habituel. Vu l’absence totale d’intérêt du travailleur à participer au processus de détermination et plusieurs rencontres avec ce dernier, la CSST procède ensuite, de façon unilatérale, à la détermination d’un emploi convenable, en considérant les critères de la loi. Compte tenu des limitations fonctionnelles reconnues par la Dre Fortier, elle retient, dans une décision rendue le 24 octobre 2006, l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuses et considère que le travailleur est capable d’occuper cet emploi à compter du 23 octobre 2006.
[201] Cette décision du 24 octobre 2006 est déclarée prématurée et sans effet par la Commission des lésions professionnelles le 2 mai 2007[10].
[202] À compter du 7 octobre 2009, le processus de détermination de l’emploi convenable recommence, lequel se termine par la décision du 19 octobre 2009, laquelle est confirmée en révision administrative le 16 novembre 2009.
[203] Le tribunal constate d’abord que la détermination de l’emploi convenable s’est faite de manière unilatérale, à la suite d’une seule rencontre avec le travailleur, laquelle s’est déroulée dans les bureaux de la CSST le 15 octobre 2009.
[204] Rappelons que l’article 146 de la loi, pour assurer au travailleur l’exercice de son droit à la réadaptation, stipule que la CSST doit préparer et mettre en œuvre un plan individualisé de réadaptation avec sa collaboration.
[205] Qu’en est-il en l’espèce? Le tribunal retient des notes évolutives d’octobre 2009 et du témoignage du travailleur que son attitude n’en est pas une de collaboration. Le tribunal constate que le travailleur veut qu’on le laisse tranquille. Comme en 2006 et tel que rapporté à la note évolutive du 11 octobre 2006, le travailleur ne veut pas non plus participer, en 2009, au processus de détermination de l'emploi convenable. Le travailleur démontre de l’avis du tribunal un manque évident de coopération, il refuse toute initiative de la CSST quant à son plan de réadaptation. Qui plus est, l’attitude du travailleur à l’audience confirme cette impression.
[206] Comme le souligne la Commission des lésions professionnelles[11], le travailleur a l'obligation de collaborer avec la CSST aux fins de l'élaboration d'un plan individualisé de réadaptation selon l'article 146. Cette obligation implique, à tout le moins, la participation la plus empressée et efficace possible du travailleur dans la fourniture des informations pertinentes aux fins de l'élaboration d'un plan réaliste, soit celles relatives aux limitations fonctionnelles permanentes conservées à la suite de sa lésion professionnelle, celles relatives à ses goûts et aptitudes, de même que celles se rapportant à sa scolarité et à ses expériences de travail.
[207] En l'espèce, le travailleur ne cesse de questionner la conseillère en réadaptation, sur ses compétences professionnelles. Lorsqu’elle lui propose de regarder les titres d’emploi qu’elle a identifiés, le travailleur indique à la conseillère qu’il ne le fera pas. Lorsqu’elle lui propose de les apporter avec lui pour les regarder, le travailleur indique qu’il ne fera pas ce travail avec la conseillère. Lorsque la conseillère informe le travailleur qu’elle a imprimé la simulation de versement de l’indemnité réduite de remplacement du revenu, le travailleur ne veut pas regarder le document et ne veut pas l'apporter avec lui. Il lui répète « de faire ce que j’ai à faire ». Essentiellement ce que le travailleur souhaite c’est de pouvoir recevoir ses indemnités de remplacement du revenu jusqu’à 65 ans. L’ensemble de ces éléments permet de croire à une attitude négative de la part du travailleur et à une grande réticence à participer à la détermination d'un emploi convenable. Une telle attitude rend difficile l'élaboration d'un plan et révèle un refus évident de collaborer avec la CSST.
[208] Dans un tel contexte, le tribunal estime que la CSST pouvait, unilatéralement, déterminer un emploi convenable, puisque le travailleur fait défaut de collaborer à son plan de réadaptation. Elle doit, comme c’est le cas en l’espèce, chercher à susciter l’intérêt du travailleur et évaluer l'emploi qu'elle entend retenir en fonction des exigences permettant de qualifier l'emploi de convenable au sens de la loi[12].
[209] Qui plus est, dans une note du 26 octobre 2009, la conseillère écrit qu’elle a fait un retour d’appel au travailleur à la suite de la décision. Elle écrit que la décision mentionne que le travailleur a participé à un processus. Or, le travailleur n’a pas pris part « à quoi que ce soit » et il souhaite que ce soit écrit au dossier. Il indique « qu’il nous poursuivra au civil si nous persistons à indiquer qu’il a collaboré. Il souhaite que ce soit clair qu’il n’a pas participé à rien » et estime que l’emploi convenable est selon lui une fabulation de la conseillère précédente.
[210] Ceci étant établi, le poste de répartiteur de dépanneuses constitue-t-il un emploi convenable pour le travailleur?
[211] Le tribunal après avoir considéré l’ensemble de la preuve croit que oui et est d’avis que le travailleur n’a pas, par une preuve prépondérante, fait la démonstration que l’emploi de répartiteur de dépanneuses n’est pas convenable.
[212] La preuve révèle que la conseillère en réadaptation a procédé à l’analyse de l’emploi de répartiteur de dépanneuses en regard des cinq critères de l’emploi convenable.
[213] Son analyse révèle que cet emploi permet au travailleur d’utiliser sa capacité résiduelle. Selon la monographie Repères, cet emploi consiste à recevoir les demandes de service des clients et de transmettre l’information aux chauffeurs de dépanneuse pour qu’ils assurent un service de dépannage rapide et efficace. La conseillère note que les capacités physiques de cet emploi retenues par Repères respectent les limitations fonctionnelles émises par le médecin du travailleur.
[214] La preuve révèle aussi que l’emploi de répartiteur de dépanneuses permet au travailleur d’utiliser ses qualifications fonctionnelles. Le travailleur a un diplôme d’étude professionnelle en tuyauterie et 25 ans d’expérience en ce domaine. Il a toujours été présent sur le marché du travail et est allé se chercher des ajouts de formation. Selon Repères, cet emploi ne découle pas d’une formation scolaire spécifique et que quelques années d’étude secondaire suffisent, la formation se donnant en cours d’emploi.
[215] Par ailleurs, selon Emploi-Québec (2008-2012) les perspectives d’emploi sont favorables pour le Québec et acceptables en Mauricie et favorables dans la région de la Capitale-nationale et selon Service Canada les perspectives sont acceptables pour l’ensemble du Québec.
[216] La preuve révèle par ailleurs que l’emploi de répartiteur de dépanneuses ne présente pas de danger pour la santé et la sécurité du travailleur et qu’il s’agit d’un emploi approprié. Cet emploi s’exerce dans un milieu traditionnellement occupé par des hommes, ce qui devrait faciliter l’intégration du travailleur. Il s’agit d’un emploi de bureau, qui en raison des limitations fonctionnelles permet au travailleur d’exercer ses tâches assis/debout. La conseillère note par ailleurs que le travailleur s’exprime bien et se présente bien et a un vocabulaire approprié.
[217] Enfin, l’emploi convenable est-il un emploi approprié? Dans le contexte de la non-participation du travailleur au processus de détermination de l’emploi convenable, le tribunal estime que oui.
[218] Ainsi, le tribunal est d’avis qu’en l’espèce, l’emploi de répartiteur de dépanneuses permet au travailleur d'utiliser sa capacité résiduelle, de même que ses qualifications professionnelles. Il s’agit d’un emploi qui présente une possibilité raisonnable d'embauche et qui ne présente pas de danger pour sa santé ou sa sécurité, compte tenu de la lésion professionnelle dont il a été victime[13].
[219] Qu’en est-il par ailleurs du salaire que le travailleur pourrait tirer de l’emploi convenable? Le travailleur n’a fait aucune preuve quant au salaire qu’il pourrait tirer de l’emploi convenable. Le tribunal constate par ailleurs que, selon Repères le salaire de départ est établi à 14 $ l’heure, toutefois considérant l’âge du travailleur et le fait qu’il a exercé surtout des travaux manuels, la conseillère retient un salaire de 10 $ l’heure, soit sur une base annuelle 20 800 $. En l’absence de toute autre preuve, le tribunal estime que le revenu brut annuel retenu par la CSST apparaît tout à fait convenable.
[220] Enfin, quant à la capacité du travailleur d’exercer l’emploi convenable à compter du 15 octobre 2009, le tribunal rappelle qu’il s’agit de la date de l’analyse de la capacité de travail du travailleur qui faut-il le rappeler a refusé de participer à la détermination de l’emploi convenable. Puisque le travailleur n’a pas fait de nouvelle preuve quant à la date de capacité pour occuper l’emploi convenable, le tribunal confirme cet aspect de la décision de la CSST en révision administrative.
[221] À l’audience, le travailleur affirme avoir la phobie des téléphones. Il précise qu’il a horreur de répondre au téléphone et réfère à cet effet à un extrait suivant des notes évolutives du 30 avril 2004. Le tribunal ne peut retenir l’affirmation du travailleur qui n’est aucunement appuyé par une quelconque preuve médicale.
[222] Quant aux limitations fonctionnelles retenues dans l’expertise du Dr Montminy, le tribunal rappelle que ce sont celles de la Dre Fortier qui liaient la CSST et qui ont servi à la détermination de l’emploi convenable. Cette dernière ne retenait pas les mêmes limitations que le Dr Montminy.
[223] Le travailleur ajoute de plus que le Dr Sirois concluait en 2008 à sa non-employabilité. Le tribunal doit rappeler qu’il n’a pas retenu en l’espèce les conclusions du Dr Sirois, mais celles du Dr Laliberté du BEM.
[224] Pour toutes ces raisons, le tribunal conclut que la CSST a déterminé l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuses conformément à la loi.
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
DOSSIER 393602-04-0911
REJETTE la requête du travailleur, M. D... B...;
DÉCLARE que le processus d’évaluation médicale menant à l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 23 septembre 2009 est régulier;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 3 novembre 2009, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la lésion psychologique a entraîné une atteinte permanente de 5 % pour une névrose du groupe I, Code 222 547, du Règlement sur le barème des dommages corporels;
DÉCLARE que la lésion psychologique du travailleur n’a pas entraîné de limitations fonctionnelles;
DÉCLARE que la CSST était en conséquence justifiée de poursuivre le versement de l'indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité du travailleur d’exercer son emploi, étant donné qu’il demeure avec des limitations fonctionnelles en regard de sa lésion physique et déclare que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente en regard de la lésion psychologique.
DOSSIER 395886-04-0912
REJETTE la requête du travailleur, M. D... B...;
CONFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 16 novembre 2009 à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la demande de révision du 29 octobre 2009 concernant la base salariale est irrecevable;
DÉCLARE qu’à l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique du travailleur de 5 %, il faut ajouter 0,75 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie et déclare que le travailleur a droit en conséquence à une indemnité pour préjudice corporel de 3 231,62 $ plus intérêts.
DÉCLARE que depuis le 15 octobre 2009, le travailleur est capable d’exercer l’emploi convenable de répartiteur de dépanneuses pouvant lui procurer un salaire annuel estimé à 20 800 $.
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J. André Tremblay |
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Me Annie Veillette |
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PANNETON LESSARD |
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Représentante de la partie requérante |
[1] D.B. et Compagnie A, C.L.P., 267171-04-0507, 11 août 2006, M. Carignan.
[2] D.B. et Compagnie A, C.L.P. 287682-04-0604, 295459-04-0607, 307220-04-0612, D. Lajoie.
[3] Voir note 2.
[4] Règlement sur le barème des dommages corporels, A-3.001, r.0.01.
[5] Les Aliments Vermont inc. et Guillemette, C.L.P. 121225-04B-9908, 27 novembre 2001, F. Mercure, (01LP-131); Bourassa et Thomas Bellemare ltée, C.L.P. 327208-04-0709, 4 septembre 2008, J. A. Tremblay, (08LP-125).
[6] Cyr et Entreprises forestières DJM inc., C.L.P. 262445-01C-0505, 19 janvier 2006, J.-F. Clément.
[7] Blanchette et Canadair ltée, [1988] C.A.L.P. 698 , Alain et Paysagiste Claude Cloutier ltée, 02629-07-8703, C.A.L.P., 2 décembre 1988, R. Brassard; Théroux et Entreprises Botoco inc., 26714-62-9102, C.A.L.P., 6 janvier 1993, B. Lemay; Anctil et CSST, 55894-03-9312, C.A.L.P., 15 août 1995, M. Carignan; Labrecque et Salon de quilles Maxima enr., 130040-08-9912, C.L.P., 15 décembre 2000, M. Lamarre; Belleville et Drakar, Ressources humaines, 140281-71-0006, C.L.P., 30 mars 2001, D. Gruffy; Papin et Ferme Francel enr. (SNC), C.L.P., 163185-63-0106, 11 novembre 2002, J.-M. Charette, révision rejetée, 28 mars 2003, L. Nadeau.
[8] Anctil et CSST, C.A.L.P., 55894-03-9312, 15 août 1995, M. Carignan.
[9] Purolator ltée et Langlais, C.L.P. 87109-62-9703, 11 décembre 1997, R. Jolicoeur; Rodrigue et Vêtements Clodan inc., C.L.P. 127352-03B-9911, 5 septembre 2000, R. Jolicoeur, révision rejetée, 19 juillet 2001, P. Simard; Viger et C.H.U.Q. (Pavillon Hôtel-Dieu), [2003] C.L.P. 1669 ; Bolduc et Manufacturiers Ste-Clotilde inc., [2005] C.L.P. 1066 .
[10] Voir note 2.
[11] Lessard et CSST, [1995] C.A.L.P. 1718 .
[12] Haraka et Garderie Les gardelunes, [1999] C.L.P. 350 ; Ahmed et Canadelle inc., C.L.P., 124178-73-9910, 15 mai 2000, F. Juteau; Mailloux et Dudley inc., C.L.P., 259967-62A-0504, 15 janvier 2007, J. Landry.
[13] Lajoie et Système Intérieur Laval inc., [1994] C.A.L.P. 538 ; Martin et Ameublement El Ran ltée, C.A.L.P., 45962-62-9210, 14 juillet 1994, L. Thibault
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