Décision

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Chemlal c. R.

2025 QCCA 302

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

SIÈGE DE

 

MONTRÉAL

 :

500-10-007479-213

(500-01-192513-197)

 

DATE :

17 mars 2025

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

MARTIN VAUCLAIR, J.C.A.

STEPHEN W. HAMILTON, J.C.A.

FRÉDÉRIC BACHAND, J.C.A.

 

 

ABDEL KARIM CHEMLAL

APPELANT – accusé

c.

 

SA MAJESTÉ LE ROI

INTIMÉ – poursuivant

 

 

ARRÊT

 

 

  1.                 L’appelant se pourvoit contre un jugement rendu le 4 décembre 2020 par la Cour du Québec, district de Montréal (l’honorable Alexandre Dalmau) qui le déclare coupable de trois chefs d’accusation, soit possession et port dissimulé d’une arme à feu prohibée et possession de cocaïne.
  2.                 Pour les motifs des juges Vauclair et Hamilton, LA COUR :
  3.                 ACCUEILLE l’appel;
  4.                 ANNULE le jugement de culpabilité et la condamnation prononcés le 4 décembre 2020;

 

  1.                 ORDONNE l’inscription d’un jugement d’acquittement;
  2.                 Pour sa part, le juge Bachand aurait rejeté l’appel.

 

 

 

 

MARTIN VAUCLAIR, J.C.A.

 

 

 

 

 

STEPHEN W. HAMILTON, J.C.A.

 

 

 

 

 

FRÉDÉRIC BACHAND, J.C.A.

 

Me Mustapha Mahmoud

Pour l’appelant

 

Me Julien Fitzgerald

DIRECTEUR DES POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES

Pour l’intimé

 

Date d’audience :

25 octobre 2023

 

 


 

 

MOTIFS DES JUGES VAUCLAIR ET HAMILTON

 

 

  1.                 L’appelant est déclaré coupable de trois chefs d’accusation, soit possession et port dissimulé d’une arme à feu prohibée et possession de crack.
  2.                 L’arme est découverte par un policier en raison d’une fouille par palpation exécutée de manière impromptue alors que l’appelant attendait depuis plusieurs minutes la remise d’un constat d’infraction en vertu du Code de la sécurité routière[1] pour avoir marché dans la rue et traversé à un endroit autre qu’une intersection. Le crack est découvert lors de la procédure d’écrou au centre opérationnel après son arrestation pour possession d’une arme à feu.
  3.                 L’appelant fait valoir que la fouille par palpation était abusive et rend illégale son arrestation, de même que les fouilles qui ont suivi. Il se plaint aussi du délai de près de deux heures entre son arrestation et le moment où on lui a offert la possibilité de parler à un avocat. Il présente en première instance une requête en exclusion de la preuve fondée sur les articles 7, 8 et 9 et les alinéas 10a) et b) de la Charte canadienne des droits et libertés[2].
  4.            Le juge rejette la requête le 22 octobre 2020[3]. Il conclut que la fouille par palpation était abusive et que, par conséquent, l’arrestation et les fouilles qui ont suivi l’étaient aussi. Il rejette les autres violations alléguées. Toutefois, en application du paragraphe 24(2) de la Charte, il refuse d’exclure les éléments de preuve obtenus à la suite des fouilles. L’appelant est déclaré coupable des trois infractions le 4 décembre 2020.
  5.            Pour les motifs qui suivent, il y a lieu d’accueillir l’appel et d’acquitter l’appelant.

CONTEXTE

  1.            Le 19 juillet 2019, un peu avant 2 h du matin, les agents Laleyan et Croteau reçoivent un appel demandant leur collaboration dans la recherche d’un suspect armé, qui aurait tout juste menacé une victime avec un couteau. Ce suspect est d’origine asiatique, il est torse nu et mesure six pieds. Alors dans leur véhicule de patrouille, ils approchent deux citoyens qui circulent à pied sur le trottoir, côté nord de la rue Ontario. Ils leur demandent s’ils ont vu l’homme qu’ils recherchent. Peu coopératifs, les deux individus répondent par la négative. C’est alors que les policiers remarquent qu’ils semblent liés à trois autres individus circulant sur le côté sud de la rue Ontario. Aucun ne correspond à la description du suspect.
  2.            Les policiers observent ces individus. L’appelant est un des jeunes hommes qui se trouvent sur le côté sud de la rue. L’agent Laleyan remarque qu’il marche dans la rue, puis qu’il traverse en diagonale à un endroit autre qu’une intersection. Les policiers décident alors d’abandonner leur recherche du suspect armé pour effectuer une interception de routine de l’appelant en vue de lui donner un constat pour une infraction au Code de la sécurité routière.
  3.            Pour ce faire, les policiers demeurent dans leur véhicule et le conducteur de l’autopatrouille, l’agent Laleyan, interpelle l’appelant, lui indique le motif de son interpellation et lui ordonne de s’identifier. L’appelant le fait verbalement. Il semble nerveux. L’agent Croteau, assis du côté passager, vérifie l’identité de l’appelant à l’ordinateur dans le véhicule. Pendant ce temps, l’agent Laleyan discute avec l’appelant qui est debout à l’extérieur, du côté conducteur. L’agent Croteau confirme l’identité puis remet l’ordinateur à son partenaire pour la rédaction du constat d’infraction. L’appelant attend. Les policiers savent qu’il est alors libre de s’en aller, mais ils ne lui disent pas.
  4.            L’agent Croteau décide plutôt de sortir du véhicule pour la sécurité de son partenaire et pour discuter avec l’appelant. Il remarque que l’appelant devient très nerveux, semble surpris et lui demande de façon répétée « Pourquoi tu sors? ». L’agent Croteau contourne le véhicule pour s’approcher de l’appelant. Ce dernier a le regard fuyant. Il regarde autour de lui. Il regarde ses amis. Il approche sa main de la sacoche de type man purse qu’il porte en bandoulière. L’agent Croteau remarque que la sacoche semble avoir un poids irrégulier et contenir un objet lourd. Sans demander et sans avertissement, il tâte la sacoche.
  5.            Voici comment l’agent Croteau explique pourquoi ce qu’il observe l’amène à palper la sacoche :

Q. Pouvez-vous maintenant nous décrire le comportement de monsieur Chemlal une fois que vous l’interceptez au niveau du CSR?

R. Oui. Dans le fond, moi, quand… lorsque je sors du véhicule, que j’ai… j’interviens verbalement avec monsieur Chemlal, c’est au moment que j’ouvre la porte, que je sors du véhicule que monsieur Chemlal devient très nerveux. Il me questionne la raison pourquoi je sors du véhicule à plusieurs reprises. Puis c’est là que là, tout l’intervention se déroule. C’est que monsieur Chemlal me dit : « Pourquoi tu sors? Pourquoi tu sors? Pourquoi tu sors? » Puis moi, c’est pas une façon que les gens réagissent lorsque moi, je sors du véhicule. C’est là que… d’habitude, moi, quand je sors du véhicule, c’est justement, c’est pour la sécurité de mon partenaire. Puis là, c’est ensuite que là, je traverse le véhicule puis vers lui. Puis là, c’est là, à ce moment-là, que je constate que monsieur Chemlal devient nerveux, il regarde autour de lui. Il a un regard fuyant. Il va mettre sa sacoche en dessous de son bras. C’est là que son bras « figeait » puis il va venir vraiment… mettre sa main… son bras par-dessus la sacoche. C’est là que je vais constater aussi que dans sa sacoche, il y a un poids irrégulier au niveau de sa sacoche.

Puis moi, étant donné… avec ma… mon expérience et tout, c’est là que, pour ma sécurité, j’ai été faire une fouille par palpation de sa sacoche, puis j’ai exactement touché la crosse d’une arme à feu »[4].

[…]

Q. Et pour qu’on puisse bien comprendre, là, qu’est-ce que vous vous dites quand vous constatez qu’il y a un poids irrégulier?

R. Dans le fond, au moment… toutes les… toutte qu’est-ce qui est arrivé, toutes les constatations que j’ai faites du moment que je suis sorti du véhicule, a fait en sorte que, au moment que j’ai vu la sacoche, que j’ai vu le poids irrégulier, que j’ai vu qu’il y avait… pour ma sécurité, moi, j’ai vu… comment expliquer… Je suis sorti du véhicule. J’ai constaté ça. Je suis arrivé où la sacoche… La sacoche, j’ai vu le poids irrégulier. Puis c’est là que j’ai décidé de tâter avec ma main. J’ai fait juste… juste pour… j’ai tâté la sacoche, puis j’ai vu que c’était une crosse d’arme à feu.

Q. Vous dites, pour votre sécurité vous avez décidé de tâter… vous avez tâté la sacoche.

R. Oui.

Q. Qu’est-ce qui se passe dans votre esprit à ce moment-là pour décider de tâter la sacoche pour votre sécurité?

R. C’est que moi, c’est toutte qu’est-ce que… justement, toutes les constatations que j’ai faites, toutes les observations m’amenaient que il y avait une possibilité qu’il ait une arme à feu sur lui, ce qui fait en sorte que je suis allé tâter, pour ma sécurité, pour confirmer que il avait oui ou non une arme à feu.

Q. Et est-ce que vous l’avez informé avant de tâter la sacoche?

R. Non, ça s’est fait tellement vite que moi, j’ai juste… j’ai juste… j’ai touché directement le…

Q. Pourquoi?

R. Pourquoi? Parce qu’il fallait que je confirme le plus rapidement possible que si c’était une arme à feu ou non dans sa sacoche. Pour ma sécurité, c’était du… c’était live, c’était là, c’était le moment présent. Il était à côté de mon partenaire. Je suis sorti pour jaser, pour la sécurité en même temps. Toutes les constatations que j’ai faites juste avant. J’arrive à côté de lui. Je touche la sacoche. Puis là, j’ai touché directement la crosse d’une arme à feu, là[5].

[Soulignements ajoutés]

  1.            L’agent Croteau place immédiatement l’appelant en état d’arrestation pour possession d’une arme à feu. Il le menotte. De façon concomitante, il l’informe de ses droits, notamment son droit à l’assistance d’un avocat. L’appelant indique vouloir se prévaloir de ce droit. Toute la séquence se passe très rapidement : à peine quelques secondes s’écoulent entre la sortie de l’agent Croteau du véhicule et l’arrestation de l’appelant.
  2.            L’agent Laleyan, étant occupé à l’ordinateur, ne voit pas l’intervention de son partenaire. Il prend conscience de ce qui se passe quand ce dernier l’informe qu’il a senti la crosse d’une arme et qu’il place l’appelant en état d’arrestation. L’agent Laleyan sort alors du véhicule, détient les autres individus en les sommant de se coucher au sol et appelle du renfort. Ensuite, il fouille la sacoche et sécurise l’arme à feu qu’elle contient. L’arme est chargée.
  3.            L’arrestation de l’appelant a lieu vers 2 h du matin. Une fois les renforts policiers arrivés, tous les individus sont arrêtés. En raison des nombreuses arrestations et des démarches d’enquête sur les lieux, près de 40 minutes s’écoulent avant que l’appelant soit amené au Centre opérationnel Sud, où il arrive à 2 h 49.
  4.            Une fois au poste, près d’une heure s’écoule avant que les agents entrent dans le centre opérationnel avec l’appelant en raison d’une congestion au poste d’écrou causée par la violence d’un autre individu détenu qui nécessite une intervention policière. Pendant cette période d’attente, l’appelant maintient le silence et les policiers ne l’interrogent pas.
  5.            Vers 3 h 41, on procède finalement à l’écrou de l’appelant et le crack est découvert. À 3 h 58, les agents permettent à l’appelant d’exercer son droit à l’assistance d’un avocat.


JUGEMENT ENTREPRIS

  1.            Après avoir résumé les faits, le juge entame son analyse. Il conclut que l’appelant n’a pas fait l’objet d’une détention arbitraire en raison de son interpellation pour une infraction au Code de la sécurité routière.
  2.            À cet égard, le juge retient de la preuve que « [l]e comportement des policiers, surtout le fait qu’ils demeurent assis dans leur véhicule et qu’ils ne s’intéressent pas aux autres individus présents, rend plus probable que leur but est de réellement remettre un constat d’infraction au requérant, et moins probable qu’ils effectuent alors une expédition de pêche »[6]. Il note que la détention n'est pas très contraignante parce que les policiers demeurent assis dans leur véhicule.
  3.            En revanche, le juge conclut que l’agent Croteau contrevient aux droits de l’appelant garantis par les articles 8 et 9 de la Charte à compter du moment où il sort du véhicule de police et décide de tâter la sacoche de ce dernier. Il est acquis au débat que l’appelant avait une expectative de vie privée sur le contenu de sa sacoche. Le juge suit les enseignements développés dans l’arrêt R. c. MacDonald[7] et rappelle qu’une fouille de sécurité n’est possible que si le policier a des motifs raisonnables de croire que la personne est armée.
  4.            Le juge soulève néanmoins que si l’appelant avait été détenu aux fins d’enquête, ce qui n’était pas le cas, l’arrêt Mann[8] aurait autorisé une fouille sur la base de motifs raisonnables de soupçonner que la personne détenue est armée. Quoi qu’il en soit, il conclut que l’agent Croteau n’avait que des motifs raisonnables de soupçonner que l’appelant était armé et que la fouille est donc abusive et arbitraire.
  5.            Le juge explique qu’il « n’a pas de raison d’écarter [le] témoignage [de l’agent Croteau], [et que ce qu’il décrit] constitue des motifs raisonnables de soupçonner que le requérant est armé. Il ne s’agit pas d’une recherche à l’aveuglette, il n’agit pas sur une simple intuition. Ses motifs sont basés sur des faits objectivement vérifiables. »[9] Pour le juge :

Dans l’esprit du policier Croteau, donc subjectivement, basé sur ses observations, il existait une possibilité qu’il y ait une arme dans la sacoche. Le terme possibilité, d’ailleurs, le terme utilisé par le policier. Une personne raisonnable placée dans la même situation que le policier peut certainement arriver à la même conclusion que celui-ci en se basant sur les mêmes faits observables décrits par celui-ci.[10]

  1.            Quant aux droits de l’appelant garantis par l’article 10 de la Charte, le juge conclut à l’absence de violation. Les motifs d’arrestation ont été donnés immédiatement, et le délai pour consulter un avocat est expliqué et raisonnable dans les circonstances, c’est-à-dire des arrestations simultanées et des problèmes imprévisibles une fois arrivés au centre opérationnel. Il souligne que les policiers n’ont pas tenté de questionner l’appelant avant qu’il exerce son droit.
  2.            Sur la question de l’exclusion de la preuve, à savoir l’arme à feu et le crack, le juge rejette la demande après l’analyse commandée par l’arrêt Grant[11].
  3.            Il détermine que la gravité de la conduite attentatoire des policiers est faible puisque le policier aurait pu placer l’appelant en détention aux fins d’enquête avant de procéder à la fouille par palpation, qui est peu envahissante.
  4.            Selon le juge, l’incidence de la violation sur les droits de l'appelant ne milite pas non plus pour l’exclusion de la preuve, puisque son expectative de vie privée sur la voie publique n’est pas des plus élevées comme ce serait le cas dans une maison d’habitation ou un ordinateur. De plus, la palpation d’une sacoche n’est pas susceptible de révéler des détails intimes puisqu’il s’agit d’une fouille peu envahissante.
  5.            Enfin, pour le juge, l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit entendue au fond milite pour l’admission des éléments obtenus en preuve. La possession illégale d’une arme à feu dissimulée et chargée sur la voie publique est grave et le juge souligne la prolifération des armes à Montréal, qui met en danger la population et les policiers. Par ailleurs, les éléments de preuve saisis sont fiables. L’exclusion de la preuve mènerait à l’acquittement du requérant.
  6.            Pour ces motifs, le juge rejette la requête en exclusion des éléments de preuve.

MOYENS D’APPEL

  1.            L’appelant soulève trois moyens d’appel :
  1.      L’honorable juge de première instance a-t-il erré en droit dans l’appréciation des violations invoquées par l’appelant, contre les détentions et les fouilles abusives, prévues aux articles 8 et 9 de la Charte canadienne des droits et libertés?
    1.       Les agents de la paix avaient-ils des motifs raisonnables de soupçonner que l’appelant était impliqué dans un crime donné?
    2.       La fouille par palpation du sac aurait-elle été permise si les agents de la paix avaient d’abord placé l’appelant en détention pour fins d’enquête?
  2.      L’honorable juge de première instance a-t-il erré en droit en concluant que l’appelant a eu la possibilité d’avoir recours sans délai à l’avocat de son choix à la première occasion raisonnable, conformément à l’article 10 b) de la Charte canadienne des droits et libertés?
  3.     L’honorable juge de première instance a-t-il erré en droit dans son analyse de l’article 24 (2) de la Charte canadienne des droits et libertés?
    1.       La gravité de la conduite attentatoire de l’État
    2.       L’incidence de la violation sur les droits de l’accusé garantis par la Charte
    3.       L’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond

ANALYSE

  1. Arrestation et fouilles abusives
  1.            Le juge conclut que la fouille par palpation, ainsi que l’arrestation et les fouilles subséquentes, sont abusives. 
  2.            L’appelant ne conteste pas cette conclusion, qui est en sa faveur. Le moyen d’appel qu’il soulève porte sur une autre conclusion du juge, qui est pertinente dans le cadre de son analyse de la gravité de la violation fondée sur le paragraphe 24(2) de la Charte, à savoir que le policier avait, selon le juge, des motifs raisonnables de soupçonner que la sacoche contenait une arme à feu, qu’il aurait pu détenir l’appelant aux fins d’enquête et que la fouille par palpation aurait alors été justifiée. 
  3.            Quelques notes cependant puisque le ministère public soutient dans son argumentaire que le juge se trompe quant à la légalité de la fouille par palpation. Selon le ministère public, le juge interprète mal la portée de l’arrêt MacDonald. Le ministère public concède que le policier n’entretenait que des motifs raisonnables de soupçonner que l’appelant était en possession d’une arme à feu, et ajoute que cela pouvait constituer un risque pour la sécurité, de sorte que la fouille par palpation était justifiée.
  4.            Or, selon le juge d’instance, tel n’est pas le critère retenu par les juges majoritaires dans MacDonald et « [v]u les faits retenus, le tribunal est obligé de suivre la majorité des juges de la Cour suprême dans MacDonald et conclure que la fouille est abusive puisqu’elle n’est pas basée sur des motifs raisonnables de croire que le sac contient une arme, seulement des motifs raisonnables de soupçonner »[12].
  5.            Sur cet aspect, le juge a raison quant à la norme applicable pour l’intervention policière expliquée dans l’arrêt MacDonald[13]. En résumé, dans cette affaire, il s’agissait de déterminer si la fouille d’une personne, qui n’était ni détenue ni en état d’arrestation, pouvait être effectuée par un policier. Ce dernier répondait à une plainte de bruit provenant d’un condominium. Croyant raisonnablement avoir aperçu une arme à feu dans les mains de MacDonald au moment où celui-ci a ouvert la porte, le policier a pénétré dans le condominium avec force afin de le désarmer. Analysant les critères de l’arrêt Waterfield[14], la Cour suprême, à la majorité, conclut que la common law autorise un policier à agir ainsi face à un individu qui n’est ni détenu ni en état d’arrestation, s’il a des motifs raisonnables de croire à l’existence d’une menace imminente pour la sécurité du public ou des policiers.
  6.            Cela dit, le ministère public propose à la Cour d’adopter les motifs des juges minoritaires de l’arrêt MacDonald. Cette proposition doit être rejetée.
  7.            Comme il en sera question plus loin dans ces motifs, le cœur du problème semble bien être de déterminer si le policier avait des soupçons raisonnables de croire que l'appelant avait une arme à feu. Ce grief sera abordé dans l’analyse du dernier moyen.
  8.            Abordons le second moyen.
  1. Droit à l’avocat
  1.            Le délai entre l’arrestation de l’appelant et le moment où il exerce son droit à l’assistance d’un avocat est de presque deux heures :
  • 2 h 00 : Arrestation de l’appelant. Ce dernier indique alors vouloir parler avec un avocat.
  • 2 h 40 : Départ vers le centre opérationnel.
  • 2 h 49 : Arrivée au centre opérationnel.
  • 3 h 41 : Les agents font entrer l’appelant au centre opérationnel et procèdent à la procédure d’écrou. Lors de celle-ci, ils trouvent sur l’appelant du crack.
  • 3 h 58 : L’appelant exerce son droit à l’avocat.
  1.            À première vue, ce délai paraît long.
  2.            Pour l’appelant, même si aucune preuve ne résulte de ce délai, celui-ci aggrave sa détention et la violation de ses droits. L’appelant met l’emphase sur deux périodes. La première, d’une durée de 40 minutes, fait suite à son arrestation et correspond à l’attente dans le véhicule de police sur les lieux de l’arrestation. Au procès, les policiers expliquent être restés sur place afin de procéder à l’arrestation des individus qui accompagnaient l’appelant et avoir attendu des renforts pour les prendre en charge ainsi que pour procéder à la fouille d’un véhicule.
  3.            La seconde période est d’une durée de 52 minutes, une fois arrivés au centre opérationnel. L’explication repose sur l’achalandage, parce que plusieurs policiers arrivent en même temps avec cinq individus et qu’ils ont reçu l’ordre d’attendre avant d’entrer afin qu’on détermine ceux qui doivent être détenus et ceux qui doivent être remis en liberté. De plus, l’individu admis à l’écrou avant l’appelant était agressif, ce qui a nécessité une intervention policière.
  4.            Le juge conclut que le délai s’explique raisonnablement et que le droit de l’appelant à l’assistance d’un avocat n’a pas été brimé en l’instance. L’évaluation du caractère raisonnable du délai est une question factuelle[15]. À défaut d’une erreur manifeste et déterminante du juge de première instance, ce sont sur les faits acceptés par ce dernier qu’il faut déterminer s’il y a contravention au droit de l’appelant[16].
  5.            Le premier délai de 40 minutes s’étant écoulé sur la scène des événements s’explique par la découverte d’une arme à feu sur l’appelant, la crainte que les individus l’accompagnant soient eux aussi armés, leur arrestation, et l’attente de renforts pour les prendre en charge, arrêter deux autres individus et fouiller un véhicule. Il y avait des préoccupations de sécurité. L’enquête se poursuivait. Dans ces circonstances, il est raisonnable de conclure que les policiers ne pouvaient subitement abandonner les lieux. Des préoccupations de sécurité et la conclusion d’une intervention peuvent justifier de suspendre temporairement la mise en œuvre du droit à l’avocat[17].
  6.            La seconde période, d’une durée de 52 minutes, est celle où les policiers et l’appelant attendent de pouvoir entrer au centre opérationnel afin de suivre la procédure d’écrou. Ce délai résulte de circonstances particulières et imprévisibles. Si l’achalandage au centre opérationnel est un problème d’ordre administratif qui n’est pas « exceptionnel » et qui n’a rien à voir avec les motifs de sécurité[18] ou les restrictions prescrites par une règle de droit[19] justifiant de retarder le droit à l’avocat, le juge a accepté que les policiers ne pouvaient rien faire pour faciliter plus rapidement l’exercice du droit à l’avocat de l’appelant et la preuve ne suggère rien de tel.
  7.            L'appelant ne démontre aucune erreur manifeste et déterminante dans la conclusion du juge voulant que l’attente ait été expliquée et, bien que longue, raisonnable dans les circonstances[20].
  8.            Il est important de souligner que les policiers se sont abstenus, tel qu’ils étaient tenus de le faire, de questionner l’appelant et que l’appelant n’a fait aucune déclaration durant toute cette période.
  9.            Ce deuxième moyen d’appel doit être rejeté.

3. Réparation fondée sur le paragraphe 24(2) de la Charte

  1.            L’appelant prétend que le juge a erré en refusant l’exclusion de l’arme à feu et du crack comme réparation pour la violation de ses droits garantis par la Charte, en application du paragraphe 24(2).
  2.            Le juge suit le cadre d’analyse de l’arrêt Grant[21] et, tel que cela est déjà mentionné[22], il conclut à l’admission des éléments de preuve.
  3.            Le juge retient le témoignage des policiers et plus particulièrement de l’agent Croteau, le seul, dans les faits, qui justifie l’action policière. Néanmoins, il semble que certains faits demeurent en grande partie inexpliqués. En effet, la décision de l’agent Croteau de sortir du véhicule pour une question de sécurité n’est pas raisonnablement expliquée. Cette crainte pour la sécurité, concept vague en l’espèce, ne se serait cristallisée qu’une fois l’intervention bien avancée et uniquement après avoir confirmé l’identité de l’appelant. L’agent Croteau reconnaît d’ailleurs qu’au moment de sortir du véhicule, il n’a aucune raison de craindre pour sa sécurité.
  4.            De même, si on peut comprendre que le fait d’être à l’extérieur du véhicule permet une plus grande mobilité au cas où l’intervention s’envenime et que la sécurité des agents devienne menacée, la preuve est cependant muette sur les circonstances qui laissaient croire que cela aurait pu être le cas, compte tenu du délai écoulé avant que naisse cette crainte pour sa sécurité, ainsi que sur l’utilité de se diriger vers l’appelant une fois à l’extérieur du véhicule. D’ailleurs, l’agent Laleyan n’entretient pour sa part aucune crainte pour sa sécurité et aucun soupçon d’une activité criminelle quelconque, ce qui laisse entendre que l’intervention se déroule bien à tous égards. Quoi qu’il en soit, une cour d’appel doit respecter les conclusions de fait sousjacentes du juge du procès et ne peut intervenir sur les faits qu’en cas d’erreur manifeste et dominante[23].
  5.            Toutefois, le juge commet plusieurs erreurs de droit dans son analyse de la situation factuelle qu’il retient. Aussi, il appartient alors à la Cour de revoir l’analyse[24]. Le résultat des deux fouilles subira le même sort.
  6.            Dans un premier temps, le juge commet une erreur de droit dans son analyse des faits constatés par l’agent Croteau et qu’il accepte, en concluant qu’ils constituent objectivement des motifs raisonnables de soupçonner que l’appelant était en possession d’une arme[25].
  7.            Cette conclusion permet au juge d’atténuer la conduite attentatoire de l’État et c’est une erreur. Outre la simple affirmation qu’une personne raisonnable aurait pu conclure de la même façon que l’agent Croteau, le juge n’explique pas comment il est objectivement possible de conclure à partir des observations relatées par l’agent Croteau que l’appelant était en possession d’une arme à feu. Indépendamment du fait que l’agent Croteau ne fait qu’énumérer des observations sans liens évidents entre elles et peine à expliquer ce qui a suscité ses motifs raisonnables de soupçonner la présence d’une arme à feu, et même en acceptant qu’il ait eu de tels motifs, la seule croyance subjective du policier ne saurait être évaluée isolément et elle ne suffit pas pour justifier des soupçons raisonnables[26].
  8.            Pour les mêmes raisons, l’ensemble des circonstances ne soutiennent pas davantage l’exercice d’une détention à des fins de protection du public en vertu du pouvoir général de détention issu de la common law[27]. Le policier ne disposait d’aucun renseignement sur le suspect ou sur un crime et rien dans la nature de la situation n’indiquait la présence d’une arme à feu; la détention de l’appelant n’était donc pas raisonnablement nécessaire pour protéger le public, non plus que la fouille qui a suivi[28].
  9.            La nervosité, voire la transpiration, d’un individu qui attend passivement son constat d’infraction mais collabore néanmoins ne permet aucune conclusion. Le questionnement de l’appelant, qui fait face à un agent de police qui sort inopinément de son véhicule alors que tout se passe bien et qui s’approche de lui, sa nervosité, de même que sa réaction de serrer sa sacoche contre lui, des réactions du reste légitimes, ne peuvent donner naissance à des motifs raisonnables de soupçonner qu’il commet ou a commis une infraction criminelle[29] et encore moins qu’il est en possession d’une arme à feu, peu importe le poids que sa sacoche semble avoir.
  10.            Au mieux, ce tableau peut générer une intuition ou une supposition éclairée, ce qui ne justifie pas la fouille[30]. La norme des motifs raisonnables de soupçonner demeure une norme solide, robuste, qui « est assujettie à un examen rigoureux et indépendant par les tribunaux »[31].
  11.            Dans ce contexte, la détention et la fouille ne pouvaient être justifiées en vertu de la détention aux fins d’enquête expliquée dans l’arrêt Mann[32]. D’abord, rien ne permettait au policier de croire que l’appelant était possiblement impliqué dans la commission d’un crime et qu’il était alors nécessaire de le détenir aux fins d’enquête et secondement, même si c’était le cas, il n’y avait absolument aucun motif raisonnable de croire que sa sécurité ou celle d’autrui était menacée. Cette jurisprudence était bien établie à l’époque et elle ne permettait pas au policier d’agir comme il l’a fait et il devait le savoir.
  12.            À cet égard, le juge conclut à l’absence de motifs raisonnables du policier de croire que la sacoche contienne une arme à feu et par conséquent, il aurait dû donner effet à cette conclusion au moment de déterminer si, en vertu des pouvoirs de détention aux fins d’enquête, le policier avait des motifs raisonnables de fouiller par palpation cette même sacoche. La réponse est évidente et compromet de la même façon le raisonnement du juge sur la gravité de la conduite attentatoire.
  13.            Dans l’arrêt Grant[33], Grant avait attiré l’attention des policiers alors qu’il marchait sur le trottoir en raison de la façon dont il les avait scrutés, de sa nervosité et du fait qu’il regardait tout autour et tripotait son blouson. À ce stade, les faits ressemblent à ceux du présent dossier. La juge en chef McLachlin et la juge Charron, pour la majorité de la Cour suprême, concluent que ces motifs ne suffisent pas pour fouiller ou arrêter une personne[34]. Ce n’est qu’après avoir demandé à Grant ce qu’il avait sur lui que ce dernier répond être en possession de drogue et d’une arme à feu. C’est à ce moment que les policiers l’arrêtent et le fouillent. La majorité de la Cour suprême conclut que la détention est illégale, mais que la violation de la Charte n’est pas grave en raison de l’incertitude juridique qui existait à l’époque sur l’état du droit[35]. Ces faits sont bien différents du présent dossier, où l’agent Croteau procède à la fouille sans motifs suffisants dans un contexte où le droit est clair sur les limites de ses pouvoirs.
  14.            La fouille par palpation est toujours peu envahissante, par définition, mais les tribunaux n’ont pas autorisé, en droit, qu’elle soit exercée sans motif.
  15.            De plus, la manière dont elle a été réalisée ne contribue pas à en atténuer la gravité. La fouille sans motif est effectuée rapidement sans question préalable. Le jeune homme a été interpellé alors qu’il circulait pacifiquement sur la rue. Il est manifestement mal à l’aise alors qu’il attend un constat d’infraction, mais rien ne laisse croire à quelque problème. Les policiers ne lui ont pas dit qu’il pouvait partir une fois son identité confirmée, ce qui aurait d’ailleurs mis fin aux « craintes de sécurité », en grande partie inexistantes selon la preuve sauf en ce qui concerne la réaction de l’appelant une fois face à l’agent Croteau.
  16.            Cela constitue une conduite attentatoire grave et milite pour l’exclusion de la preuve.
  17.            De même, l’incidence de la violation sur les droits de l’appelant garantis par la Charte est grave. Le juge erre en droit lorsqu’il conclut que l’expectative de vie privée est moindre lorsqu’on se trouve sur la voie publique. Cette seconde erreur l’amène à atténuer le second facteur à considérer. Il n’y a aucune justification juridique, voire raisonnable, à l’affirmation voulant qu’une personne qui déambule paisiblement sur la voie publique ait des attentes moindres en matière de vie privée à l’égard de ce qu’elle transporte sur elle ou dans une man purse ou tout autre sac à l’égard duquel elle a des attentes raisonnables en matière de vie privée[36].
  18.            Notre Cour a statué que « les citoyens ont le droit de déambuler sur la rue sans être arrêtés par des policiers qui n'ont aucun motif raisonnable de ce faire »[37]. Cela vaut tout autant pour la détention aux fins d’enquête. Les policiers ne peuvent fouiller des citoyens sans motifs pour trouver des armes, même s’ils ont l’air nerveux. Les policiers n’ont jamais eu de motifs de penser que l’appelant possédait du crack.
  19.            Ce second facteur milite également pour l’exclusion de la preuve.
  20.            Sur le troisième facteur, soit l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond, il ne fait aucun doute que la possession d’une arme à feu chargée constitue une infraction grave, et que le crack est une drogue particulièrement nocive. La société a un intérêt certain à ce que la cause soit entendue au fond. L’arme et le crack sont des preuves fiables de la commission des infractions et leur exclusion est fatale à la cause. L’évaluation de ce facteur est délicate lorsque les deux premiers militent fortement pour l’exclusion de la preuve, comme en l’espèce, et que le troisième milite davantage pour l’admission, car le poids accordé à ce troisième facteur est réduit compte tenu de l’importance des deux autres[38]. La preuve n’aurait pas pu être découverte sans violation de la Charte[39]. Le fait de trouver une preuve incriminante ne peut justifier la fouille[40].
  21.            En pondérant les différents facteurs, il faut rappeler l’importance de l’objectif systémique et prospectif de l’exercice. En l’espèce, il faut mesurer les conséquences de permettre une détention et une fouille sans motif et de toujours en reléguer le contrôle après le fait, pour reprendre les propos du juge Binnie dans l’arrêt Kang-Brown[41]. L’exclusion de la preuve incriminante obtenue dans des circonstances comme en l’espèce marque l’importance de ces propos.
  22.            Pour reprendre encore les mots du juge Binnie, en 2008[42] : 

L’administration de la justice serait déconsidérée si les policiers — qui ont le pouvoir exceptionnel de procéder à une fouille ou à une perquisition à la condition d’avoir des soupçons raisonnables, mais qui ont agi en l’espèce sans respecter cette condition préalable — devaient en tout état de cause réussir à présenter la preuve en question. Le trafic de stupéfiants est une question sérieuse, mais la question des droits constitutionnels des voyageurs l’est tout autant.

  1.            Cette réflexion visant les voyageurs s’applique avec la même force aux piétons qui déambulent dans la rue, fussent-ils « coupables » d’une infraction réglementaire à un code de la sécurité routière. Le droit est bien fixé depuis plus d’une décennie.
  2.            Pour l’ensemble de ces motifs, il y a lieu de réaffirmer la violation des droits de l’appelant, d’exclure l’arme à feu et la drogue et de l’acquitter des infractions.

 

 

 

MARTIN VAUCLAIR, J.C.A.

 

 

 

STEPHEN W. HAMILTON, J.C.A.


 

 

MOTIFS DU JUGE BACHAND

 

 

  1.            Je suis d’accord avec mes collègues que l’appelant n’a pas démontré que le juge de première instance avait commis une erreur révisable en concluant à l’absence de violation au droit à l’avocat. Toutefois, et soit dit avec le plus grand respect, j’estime qu’il n’y a pas lieu d’intervenir quant à l’admissibilité de l’arme à feu et des autres éléments de preuve saisis par les policiers.

* * *

  1.            Je commence en abordant la légalité de la palpation de la sacoche de l’appelant effectuée par le policier Croteau. Mes collègues sont d’avis que, compte tenu de l’arrêt MacDonald[43], le juge a sans doute eu raison de conclure que la norme applicable en matière de fouille de sécurité d’une personne non détenue est celle des motifs raisonnables de croire que la sécurité des policiers ou du public est en jeu, et non celle — moins exigeante — des motifs raisonnables de soupçonner[44]. Le ministère public ayant reconnu que la norme des motifs raisonnables de croire n’était pas satisfaite en l’espèce, mes collègues concluent, à l’instar du juge de première instance, que la fouille était illégale.
  2.            Il est toutefois permis de se demander si l’arrêt MacDonald règle effectivement la question. La portée de cet arrêt a fait couler beaucoup d’encre au cours des dernières années et le ministère public a raison de souligner qu’elle demeure controversée. Si certains sont d’avis que cet arrêt a assujetti les fouilles de sécurité à la norme des motifs raisonnables de croire que la sécurité des policiers ou du public est en jeu[45], d’autres sont plutôt d’avis qu’elles sont assujetties à la norme des motifs raisonnables de soupçonner[46]. En outre, plusieurs auteurs ont souligné l’ambiguïté des enseignements de l’arrêt Macdonald et l’incertitude persistante quant à la norme applicable[47].
  3.            Je n’en dirai pas davantage, car, à supposer même que la palpation effectuée par le policier Croteau ait été illégale, j’estime que le juge n’a commis aucune erreur révisable en concluant que l’utilisation des éléments de preuve saisis n’était pas susceptible de déconsidérer l’administration de la justice au sens du paragraphe 24(2) de la Charte canadienne des droits et libertés[48].

* * *

  1.            Les cours d’appel doivent faire preuve de retenue à l’égard des décisions des juges de première instance appliquant le paragraphe 24(2) de la Charte canadienne. Plus exactement, la retenue est de mise à l’égard des conclusions de fait tirées en analysant la recevabilité des éléments de preuve en litige[49], ainsi qu’à l’égard de l’évaluation des trois facteurs sur lesquels la Cour suprême insiste dans l’arrêt Grant[50].
  2.            En l’espèce, le juge de première instance a conclu de la preuve relative au comportement de l’appelant qu’au moment où il s’est approché pour palper la sacoche de ce dernier, le policier Croteau soupçonnait sincèrement que l’appelant était armé. Le juge a également conclu que le policier Croteau avait agi à des fins de sécurité, tout en rejetant expressément l’hypothèse selon laquelle « la conduite du policier [était] délibérée ou insouciante quant au respect des droits garantis par la Charte »[51]. À partir de ces constats, le juge a conclu que la gravité de la conduite attentatoire de l’État était faible.
  3.            Le juge a ensuite conclu que l’atteinte à la vie privée de l’appelant était elle aussi faible. Il s’est expliqué en soulignant qu’il ne s’agissait pas d’une affaire où l’attente en matière de vie privée était particulièrement élevée comme c’est le cas, par exemple, lors d’une fouille effectuée dans une résidence ou d’une fouille d’un ordinateur personnel. Il a également souligné que la fouille effectuée par le policier Croteau était peu envahissante étant donné que « [l]a palpation de la sacoche n’[était] pas susceptible de relever [sic] des détails intimes sur [l’appelant] »[52].
  4.            Enfin, le juge a conclu qu’il était important pour la société que cette affaire de possession illégale d’une armée à feu chargée et dissimulée sur la voie publique soit entendue au fond.
  5.            À mon avis, les constats de fait tirés par le juge, tout comme son évaluation des trois facteurs de l’arrêt Grant, sont à l’abri de toute intervention en appel.
  6.            Mes collègues sont préoccupés par la décision du policier Croteau de sortir de l’auto-patrouille alors qu’il n’avait, à ce moment précis, aucune raison de soupçonner que l’appelant présentait un risque quelconque pour sa sécurité ou celle d’autrui. Je vois les choses différemment. Lors du procès, le policier Croteau a expliqué qu’après avoir terminé les tâches qui lui incombaient dans le cadre de l’interpellation initiale de l’appelant, il avait — conformément à sa pratique habituelle — décidé de sortir de l’autopatrouille à des fins essentiellement préventives, de manière à avoir une bonne vue d’ensemble de l’environnement où son collègue et lui se trouvaient. Ce comportement me semble irrépréhensible dans les circonstances de l’espèce, d’autant plus que l’opération s’est déroulée vers 2 h du matin en plein centre-ville de Montréal.
  7.            Le policier Croteau ne semble pas non plus avoir agi de manière répréhensible en s’approchant de l’appelant après être sorti de l’auto-patrouille. Dans l’arrêt Grant, l’accusé, un jeune homme de race noire, avait attiré l’attention des policiers alors qu’il marchait sur le trottoir. Leurs soupçons s’étaient accrus lorsque l’accusé s’était mis à tripoter son blouson et son pantalon. Le policier Gomes était alors sorti de son autopatrouille, puis il s’était avancé vers l’accusé dans le but de déterminer s’il y avait lieu de s’inquiéter. Plus exactement, le policier Gomes s’était placé directement en travers du chemin de l’accusé pour ensuite lui demander « ce qui se passait », ainsi que son nom et son adresse. Commentant précisément cet aspect de l’intervention, la Cour suprême a expliqué qu’« [u]ne interpellation préliminaire de ce genre s’inscri[vait] dans l’exercice légitime des pouvoirs policiers »[53]. À mon avis, ce raisonnement est transposable par analogie à la présente affaire, puisque le policier Croteau a expliqué avoir décidé d’aller vers l’appelant après avoir constaté que ce dernier avait réagi de manière inattendue et préoccupante à sa sortie de l’auto-patrouille.
  8.            Par ailleurs, on pourrait être tenté de se demander si le policier Croteau n’a pas délibérément provoqué chez l’appelant une réaction dans le but de faire naître des motifs justifiant une fouille par palpation. J’exclus cette hypothèse, car un tel constat serait inconciliable avec l’analyse du juge de première instance qui, comme je l’ai souligné, a expressément considéré, puis rejeté, la thèse selon laquelle le policier avait délibérément porté atteinte au droit à la vie privée de l’appelant, ou encore fait preuve d’insouciance à l’égard de ce droit. À la lumière des éléments au dossier, j’estime que le juge pouvait raisonnablement en venir à cette conclusion; son analyse n’est entachée d’aucune erreur manifeste.
  9.            Une fois établi que le juge n’a commis aucune erreur révisable en concluant que le policier Croteau a palpé la sacoche de l’appelant en raison d’une préoccupation sincère pour sa sécurité, il me semble aller de soi qu’il pouvait raisonnablement conclure que la gravité de la conduite attentatoire de l’État était faible. Cela est d’autant plus vrai (i) que cette préoccupation sincère quant à l’existence d’une menace était fondée sur des faits objectivement discernables relatifs au comportement de l’appelant[54] et non sur une simple intuition, (ii) que, comme dans l’affaire Grant, les policiers opéraient dans un contexte d’incertitude juridique considérable[55], plus exactement quant à la norme applicable en matière de fouille de sécurité de personnes non détenues[56], et (iii) que le policier Croteau s’est contenté d’une fouille dont l’objet était limité à déterminer si la sacoche de l’appelant contenait une arme.
  10.            En outre, j’estime que le juge pouvait raisonnablement conclure que l’atteinte à la vie privée de l’appelant était elle aussi faible. La fouille effectuée par le policier Croteau consistait uniquement à palper l’extérieur d’une sacoche que l’appelant portait en bandoulière. Une fouille de cette nature est peu intrusive[57] et, lorsqu’elle est effectuée de manière raisonnable, elle n’est pas susceptible de révéler beaucoup d’autres informations que le fait que la personne visée est ou non en possession d’une arme. De plus, bien que l’attente de l’appelant en matière de vie privée fût à la fois existante et légitime, je ne vois pas en quoi le juge aurait erré en concluant qu’elle n’était pas aussi élevée que dans le cas d’une fouille d’une résidence[58] ou d’un ordinateur[59].
  11.            Quant au dernier des trois facteurs de l’arrêt Grant, il ne fait aucun doute que l’arme à feu et les autres éléments saisis par les policiers constituent des preuves à la fois fiables et cruciales pour le ministère public[60]. Dans les circonstances, le juge de première instance pouvait certainement conclure que l’intérêt de la société commandait que cette affaire de possession illégale d’une arme à feu chargée et dissimulée sur la voie publique soit entendue au fond.
  12.            Ces constats me conduisent à conclure que le juge de première instance n’a commis aucune erreur révisable en déterminant que l’utilisation des éléments de preuve en litige n’était pas susceptible de déconsidérer l’administration de la justice au sens du paragraphe 24(2) de la Charte. J’ajoute que la conclusion contraire me paraît difficilement conciliable avec l’arrêt Grant, où, relativement à une intervention effectuée dans un contexte analogue à celui dans lequel le policier Croteau a effectué la sienne, la Cour suprême a conclu à l’admissibilité du revolver saisi par les policiers, et ce, malgré le fait que les indices de possession d’une arme étaient pratiquement inexistants avant que les policiers ne s’approchent de l’accusé et que ce dernier avait subi une atteinte à ses droits fondamentaux qui a été qualifiée de grave[61]. À mon avis, la même conclusion s’impose a fortiori dans la présente affaire.

* * *

  1.            Je termine en soulignant que j’ai trouvé préoccupante la décision des policiers d’abandonner la recherche d’un suspect armé afin d’interpeller un individu racialisé pour une infraction assez banale au Code de la sécurité routière[62]. Toutefois, il ressort clairement du jugement entrepris que le juge de première instance — à qui il revenait d’évaluer les faits de l’affaire, y compris sur une question aussi délicate — était bien au fait de la possibilité que l’appelant ait fait l’objet de profilage racial. Au terme d’une analyse soignée de la preuve administrée au procès, il a conclu que l’interpellation initiale n’avait pas été motivée par une telle considération[63]. En outre, l’analyse qu’il a subséquemment effectuée des interactions qu’ont eues les policiers et l’appelant montre qu’il était conscient des enseignements de l’arrêt Le[64] et de l’importance de tenir compte de la perspective de l’appelant en tant que membre d’un groupe racialisé. Bref, il ne s’agit pas d’un cas où le juge de première instance aurait occulté ou insuffisamment considéré, en analysant les faits de l’affaire, la possibilité que l’accusé ait fait l’objet de profilage racial. Le juge était bien conscient de cette possibilité et l’analyse qu’il a effectuée de cet aspect de l’affaire n’est entachée d’aucune erreur manifeste et déterminante.

* * *

  1.            Pour ces motifs, je propose à la Cour de rejeter l’appel.

 

 

 

FRÉDÉRIC BACHAND, J.C.A.

 


[1]  RLRQ, c. C-24.2.

[2]  Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.U.), 1982, c. 11 (« Charte »).

[3]  R. c. Chemlal, C.Q. Montréal, no 500-01-192513-197, 22 octobre 2020, Dalmau, j.c.q. [Jugement entrepris].

[4]  Interrogatoire de l’agent Raphaël Croteau, 2 octobre 2020, p. 69-70.

[5]  Id., p. 73-74.

[6]  Jugement entrepris, p. 11.

[7]  R. c. MacDonald, 2014 CSC 3.

[8]  R. c. Mann, 2004 CSC 52.

[9]  Jugement entrepris, p. 15.

[10]  Id., p. 17-18.

[11]  R. c. Grant, 2009 CSC 32.

[12]  Jugement entrepris, p. 19.

[13]  R. c. MacDonald, 2014 CSC 3, paragr. 40-41; R. c. Stairs, 2022 CSC 11, paragr. 72.

[14]  R. v. Waterfield, [1963] 3 All E.R. 659.

[15]  R. c. Freddi, 2021 QCCA 249, paragr. 42; R. c. Tremblay, 2021 QCCA 24, paragr. 47; voir aussi R. c. Catellier, 2020 QCCA 850.

[16]  R. c. Freddi, 2021 QCCA 249, paragr. 54

[17]  R. c. Suberu, 2009 CSC 33, paragr. 42.

[18]  R. c. Archambault, 2012 QCCA 20, paragr. 36.

[19]  R. c. Tremblay, 2021 QCCA 24, paragr. 58.

[20]  La Cour d’appel de l’Ontario est arrivée à une conclusion similaire dans R. v. Desilva, 2022 ONCA 879, paragr. 49, 78-79 et 85, où il était question d’une période d’attente de 42 minutes sur les lieux de l’arrestation et de 52 minutes avant de pouvoir entrer au garage du poste de police en raison d’une congestion.

[21]  R. c. Grant, 2009 CSC 32, paragr. 71. Voir aussi : R. c. Lafrance, 2022 CSC 32, paragr. 90; R. c. Tim, 2022 CSC 12, paragr. 74; R. c. Le, 2019 CSC 34, paragr. 141.

[22]  Supra, paragr. 22 à 25.

[23]  R. c. Sanscartier, 2019 QCCA 1079, paragr. 41.

[24]  R. c. Vu, 2013 CSC 60, paragr. 67.

[25]  R. c. Shepherd, 2009 CSC 35.

[26]  R. c. Chehil, 2013 CSC 49, paragr. 26, 29, 45-47; R. c. MacKenzie, 2013 CSC 50, paragr. 41.

[27]  R. c. Aucoin, 2012 CSC 66, paragr. 36.

[28]  Id., paragr. 39; R. c. Clayton, 2007 CSC 32, paragr. 31.

[29]  R. c. Kang-Brown, 2008 CSC 18, paragr. 26.

[30]  R. c. Chehil, 2013 CSC 49, paragr. 13; Wolfson c. R., 2020 QCCA 856, paragr. 55.

[31]  R. c. Chehil, 2013 CSC 49, paragr. 3.

[32]  R. c. Mann, 2004 CSC 52, paragr. 45; voir aussi R. c. Tim, 2022 CSC 12, paragr. 53.

[33]  R. c. Grant, 2009 CSC 32.

[34]  Id., paragr. 137.

[35]  Id., paragr. 133.

[36]  R. c. Kang-Brown, 2008 CSC 18.

[37]  Leventis c. R., 2022 QCCA 291, paragr. 26, citant R. c. Lévesque Mandanici, 2014 QCCA 1517, paragr. 67-71

[38]  R. c. Le, 2019 CSC 34, paragr. 142; R. c. Paterson, 2017 CSC 15, paragr. 55.

[39]  Lacasse c. R., 2017 QCCA 808, paragr. 65-66; Leventis c. R., 2022 QCCA 291, paragr. 53.

[40]  R. c. Lévesque Mandanici, 2014 QCCA 1517, paragr. 67; Leventis c. R., 2022 QCCA 291, paragr. 19.

[41]  R. c. Kang-Brown, 2008 CSC 18, paragr. 104.

[42]  Ibid.

[43] R. c. MacDonald, 2014 CSC 3.

[44] La différence entre les deux normes tient essentiellement au fait que celle des motifs raisonnables de croire exige une probabilité raisonnable que la sécurité des policiers ou du public soit en jeu, alors que celle des motifs raisonnables de soupçonner exige plutôt une possibilité raisonnable que la sécurité des policiers ou du public soit en jeu. Voir notamment, sur ces deux normes : Steve Coughlan, Criminal Procedure, 4e éd., Toronto, Irwin Law, 2020, p. 185-186; Hugues Parent, Traité de droit criminel, t. IV (« Les garanties juridiques »), Montréal, Thémis, 2018, p. 447-452.

[45] Voir p. ex. : R. v. McKenzie, 2022 MBCA 3 (autorisation d’appel à la Cour suprême refusée, n° 40082, 7 juillet 2022), paragr. 39, citant R. v. Peterkin, 2015 ONCA 8, paragr. 59, R. v. Smith, 2019 SKCA 126, paragr. 13-15, et R. v. Stairs, 2020 ONCA 678 (appel rejeté : 2022 CSC 11), paragr. 54-55; R. v. Buakasa, 2023 ONCA 383, paragr. 39; Robert Diab et Chris D.L. Hunt, Search and Seizure, Toronto, Irwin Law, 2023, p. 244; Hugues Parent, Traité de droit criminel, t. IV (« Les garanties juridiques »), Montréal, Thémis, 2018, p. 325-326. La Cour d’appel de l’Alberta, interprétant l’arrêt MacDonald plus largement, a conclu que la norme des motifs raisonnables de croire est applicable à toutes les fouilles de sécurité, y compris celles effectuées dans un contexte de détention aux fins d’enquête : R. v. Del Corro, 2019 ABCA 156, paragr 47 et s.

[46] Voir p. ex. : R. v. Webber, 2019 BCCA 208, paragr. 41-65; R. v. Buakasa, 2023 ONCA 383, paragr. 39.

[47] Voir p. ex. : Steve Coughlan, Criminal Procedure, 4e éd., Toronto, Irwin Law, 2020, p. 185-138; Nader Hasan, Mabel Lai, David Schermbrucker et Randy Schwartz, Search and Seizure, Toronto, Emond, 2021, p. 430-431; Steve Penney, Vincenzo Rondinelli et James Stribopoulos, Criminal Procedure in Canada, 3e éd., Toronto, LexisNexis, 2022, p. 433 et s. (n° 3.387 et s.); Robert Diab et Chris D.L. Hunt, Search and Seizure, Toronto, Irwin Law, 2023, p. 241-245; James A. Fontana et David Keeshan, The Law of Search and Seizure in Canada,13e éd., Toronto, LexisNexis, 2023, p. 1335 et s.; Steve Coughlan, “Forty Years of the Charter: What We Still Don’t Know”, (2023) 27 Rev. can. D.P. 149, p. 157 et s.; Peter W. Hogg et Wade K. Wright, Constitutional Law of Canada, 5e éd., Supp., vol. 1, Toronto, Thompson Reuters, 2022 (feuilles mobiles, mise à jour : août 2024), §48.24-48.25.

[48] Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.U.), 1982, c. 11 (« Charte canadienne »).

[49] R. c. Lafrance, 2022 CSC 32, paragr. 91; R. c. Beaver, 2022 CSC 54, paragr. 118.

[50] R. c. Grant, 2009 CSC 32, paragr. 86; R. c. Beaulieu, 2010 CSC 7, paragr. 5; R. c. Côté, 2011 CSC 46, paragr. 44; R. c. Mack, 2014 CSC 58, paragr. 39; R. c. Beaver, 2022 CSC 54, paragr. 118.

[51] Jugement entrepris, p. 15.

[52] Id., p. 23.

[53] R. c. Grant, 2009 CSC 32, paragr. 47.

[54] Soit le fait que l’appelant est soudainement devenu beaucoup plus nerveux lorsque le policier Croteau est sorti de l’auto-patrouille, le fait que son regard est devenu fuyant, le fait qu’il a alors placé sa sacoche sous son bras et le fait que cette sacoche semblait avoir un poids irrégulier, en ce sens qu’elle semblait contenir un objet lourd. Sur la pertinence de tels faits, voir p. ex. : R. v. Peterkin, 2015 ONCA 8, paragr. 17-17, 28 et 62; R. v. Dhillon, 2023 BCCA 38 (autorisation d’appel à la Cour suprême refusée, 12 octobre 2023, n° 40638), paragr. 34 et 102.

[55] R. c. Grant, 2009 CSC 32, paragr. 140.

[56] Supra, paragr. 78.

[57] Il s’agit d’une fouille encore moins intrusive que la fouille par palpation complète, laquelle a été qualifiée par la Cour suprême de « mécanisme relativement peu intrusif » (Cloutier c. Langlois, [1990] 1 R.C.S. 158, p. 185; R. c. Mann, 2004 CSC 52, paragr. 43; R. c. Tim, 2022 CSC 12, paragr. 93).

[58] « Il n’existe aucun endroit au monde où une personne possède une attente plus grande en matière de vie privée que dans sa “maison d’habitation” » (R. c. Stairs, 2022 CSC 11, paragr. 49, citant R. c. Silveira, [1995] 2 R.C.S. 297, paragr. 140).

[59] « Il est difficile d’imaginer une atteinte plus grave à la vie privée d’une personne que la fouille de son ordinateur personnel » (R. c. Vu, 2013 CSC 60, paragr. 40).

[60] R. c. Tim, 2022 CSC 12, paragr. 96 : « [s]’il s’agit d’éléments de preuve fiables et cruciaux pour la preuve de la Couronne, ce fait militera généralement en faveur de leur inclusion ». Voir aussi : R. c. Grant, 2009 CSC 32, paragr. 80-81; R. c. Harrison, 2009 CSC 34, paragr. 33-34; R. c. Harrison, 2009 CSC 34, paragr. 142.

[61] R. c. Grant, 2009 CSC 32, paragr. 138 et 140.

[62] RLRQ, c. C-24.2.

[63] Conclusion qui, d’ailleurs, n’est pas contestée en appel.

[64] R. c. Le, 2019 CSC 34.

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