Ruest c. R. |
2016 QCCS 4104 |
JP1124 |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
RIMOUSKI |
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Nº : |
C.S. 100-36-000328-155 |
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C.Q. 100-01-015428-119 |
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DATE : |
16 août 2016 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
RAYMOND W. PRONOVOST, J.C.S. |
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SIMON RUEST |
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Appelante |
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c. |
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SA MAJESTÉ LA REINE |
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Intimée |
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JUGEMENT |
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[1] L'appelant a subi son procès sous l'accusation suivante :
« 2. Le ou vers le 23 juin 2012, à Rimouski, district de Rimouski, a conduit un véhicule à moteur, alors que son alcoolémie dépassait 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang, commettant ainsi l’infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité prévue aux articles 253 (1)b) et 255 (1) du Code criminel.»
[2] Le 28 août 2015, il a été déclaré coupable de ladite infraction.
[3] Ce dossier est un dossier type concernant la divulgation de la preuve en matière d'ivressomètre à la suite du jugement de la Cour suprême de La Reine c. St-Onge Lamoureux[1]. Plus d'une centaine de dossiers sont en attente d'une décision sur le sujet.
[4] L’appelant s’est soumis à une prise d’échantillons d’haleine dans un alcootest approuvé et les résultats sont de 111 et 103 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang.
[5] Le procès s'est déroulé en deux temps. Une requête en divulgation de la preuve a été plaidée dans le dossier de référence R. c. Anctil[2]. Cette preuve a été versée dans le dossier de l'appelant et des témoins ont été entendus au fond.
[6] Il y a deux jugements en appel dans le présent dossier, soit celui rendu dans Anctil au niveau de la divulgation de la preuve et celui rendu dans le dossier de l'appelant au niveau du fond.
[7] L'appelant a présenté une requête en divulgation de la preuve afin que la poursuite lui communique différents renseignements et documents (décrits à l'annexe 1) allant de la facture d'achat de l'alcootest à la carte attestant la qualification du technicien qui a fait passer le test.
[8] Le juge de première instance a entendu deux témoins experts, soit Jean-Pierre Robitaille pour la défense et André Dion pour la poursuite. Ces deux experts sont des chimistes spécialisés en toxicologie judiciaire et sont tous deux membres de la Société canadienne des sciences judiciaires[3].
[9] Ces experts travaillent ou ont travaillé au Laboratoire des sciences judiciaires de médecine légale. Monsieur Robitaille est retraité depuis 2005 et monsieur Dion est toujours à leur emploi.
[10] Le juge de première instance les a considérés comme deux experts de compétence équivalente.
[11] Dans son analyse, le juge de première instance se demande si les différents documents demandés font partie des fruits de l'enquête. Il souligne que les parties lors de cette preuve ont déposé une abondante jurisprudence, celle de la défense adoptait une interprétation plus large sur la question de la pertinence et celle de la poursuite donnait une portée plus restreinte à la notion de « fruits de l'enquête ».
[12] S'appuyant sur l'arrêt St-Onge, le juge de première instance mentionne que :
« [48] L'accusé doit donc pouvoir obtenir la communication des éléments d'information qui peuvent lui être raisonnablement utiles dans le contexte des nouvelles dispositions et qui sont raisonnablement disponibles. »
[13] La poursuite avait déjà remis les documents suivants :
Pour l'alcootest :
· Un rapport de défectuosité du 26 octobre 2001 (R-1A);
· Un rapport d'étalonnage de l'alcootest du 2 décembre 2002 (R-2B);
· Un rapport de demande d'étalonnage ou de défectuosité du 20 février 2009 (R-2E);
· Un rapport d'étalonnage du 26 février 2009 (R-2C);
· Un rapport d'étalonnage du 5 mars 2009 (R-2D);
· Un rapport de défectuosité du 20 août 2009 (R-2F) indiquant que l'alcootest 047315 est remplacé par l'alcootest 047313 en raison d'une défectuosité.
Pour le simulateur :
· Un document du fabricant Guth indiquant la mise en service du simulateur (R-2G);
· Un rapport de défectuosité du 21 octobre 2004 (R-2H);
· Deux rapports de défectuosité d'avril et de mai 2011 (R-2I et R-2J) indiquant que le simulateur a dû être remplacé quatre mois après les tests concernant l'accusé.
[14] De plus, le juge de première instance s'interroge à savoir si les documents demandés font partie des fruits de l'enquête, soit sous le contrôle ou en possession de la poursuite, ou s'il s'agit d'un cas de l'application de l'arrêt O'Connor[4].
[15] Il conclut que dans une cause avec plus de 80 milligrammes, les fruits de l'enquête ne sont pas restreints aux seuls éléments entourant l'arrestation et la prise d'échantillons d'haleine de l'accusé. Les manuels d'entretien du fabricant, les différents registres d'entretien et de révision des appareils sont en possession des techniciens de la Sûreté du Québec qui se rapportent à la cause de l'accusé, à cela il adopte la position du juge Chapdelaine[5]. Il en vient à la même conclusion pour la solution de l'alcool type en possession du laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, car la solution a servi aux tests sur l'appelant.
[16] Par la suite, il souligne un nouveau contexte juridique et plus particulièrement le paragraphe 48 de St-Onge[6]. Il souligne que depuis l'arrêt St-Onge, comme le moyen de défense doit porter principalement sur le fonctionnement de l'alcootest et son utilisation, la pertinence des renseignements demandés doit tenir compte de ce nouvel amendement législatif.
[17] Le juge de première instance souligne qu'il ne partage pas la thèse de la poursuite et que dans tous les cas « l'observance des procédures entourant la prise d'échantillons d'haleine et leur analyse est le seul moyen de garantir la fiabilité des résultats ».
[18] Il souligne qu'à cette étape, il doit décider si le défaut d'entretien de l'appareil ou une anomalie détectée dans son fonctionnement antérieur seront suffisants à l'issue du procès pour soulever un doute raisonnable et repousser les présomptions de l'article 258 (1)c). La décision porte uniquement à savoir si les documents ont une certaine utilité pour la défense et la préparation du procès.
[19] Il a limité la divulgation à la défense uniquement des éléments suivants :
· Le manuel d'entretien du fabricant de l'alcootest Alco-Sensor IV-RBT-IV;
· Le manuel d'entretien du fabricant du simulateur GUTH;
· Les registres d'entretien, de réparation, d'étalonnage en atelier et de révision autant pour l'alcootest que pour le simulateur couvrant les trois années précédant la date de l'infraction alléguée;
· Les résultats des analyses du lot 71CE de l'alcool type utilisé dans le dossier de l'accusé.
[20] Le juge a limité aux trois années précédentes de la date de l'infraction, la divulgation des registres d'entretien, de réparation, d'étalonnage en atelier et de révision de l'alcootest.
[21] En ce qui concerne la mémoire vive, il souligne le témoignage de l'expert Robitaille qui affirme que cette mémoire peut enregistrer 1 022 résultats. Cette mémoire permettrait de vérifier si l'appareil a produit dans le passé des résultats hors-normes qui pourraient indiquer un mauvais fonctionnement et que le transfert de la mémoire vive ne peut être effectué qu'à l'atelier de réparations de la Sûreté du Québec.
[22] En se basant sur l'expert Dion qui affirme que « les données contenues dans la mémoire n'ont aucune utilité pour déterminer l'exactitude des résultats d'analyse concernant un accusé et que ces données ne permettent pas de tirer des inférences sur le fonctionnement de l'appareil en l'absence d'informations précises des circonstances entourant les prises d'échantillons d'haleine. »
[23] Le juge de première instance conclut que la preuve ne lui permet pas dans la présente affaire de conclure que les données internes de l'appareil sont raisonnablement disponibles.
[24] Les autres demandes de l'appelant ont été rejetées.
[25] La preuve recueillie lors de l’audition de la requête en divulgation dans le dossier Anctil a été déposée dans le dossier de l'appelant. L'intimée déposa les documents P-1 à P-4 (annexe 1) et a fait entendre les différents témoins (annexe 2).
[26] Quant à l'appelant, celui-ci déposa les documents D-1 à D-19 (annexe 3) et a fait entendre plusieurs témoins (annexe 3).
[27] L'appelant a été intercepté vers 1 h, le 27 mars 2011 à Rimouski. Des symptômes furent constatés, soupçonnant la présence d'alcool dans son organisme. Il a passé un poste de dépistage à 1 h 07, qu'il a échoué. Par la suite, il a été amené au poste de police et le technicien qualifié a procédé aux tests avec les vérifications d'usage. Le taux était de 111 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang à 1 h 39 et de 103 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang à 2 h 01.
[28] En contre-interrogatoire, la policière Gagné admet dans son rapport écrit qu'elle n'a pas fait mention de la période d'observation de quinze minutes précédant les alcotests. Comme il n'y a rien eu d'anormal, elle n'a rien indiqué pour cette période. Dans le cas contraire, elle l'aurait écrit. Elle admet également que le technicien qualifié ne lui a pas demandé si la période de quinze minutes avait été respectée.
[29] Les policiers n'ont noté aucun incident particulier alors qu'ils étaient en présence de l'accusé. Lorsque l'accusé parle avec son avocat eu égard à la confidentialité, ils n'étaient pas présents.
[30] Les policiers ont témoigné qu'ils avaient été en présence de l'accusé en tout temps, mais ils n'ont aucun souvenir de l'avoir laissé seul.
[31] En défense, l'appelant témoigne qu'il a consommé trois petites bières de format de 341 ml à 5 % l'alcool entre 21 h et 0 h 30 et qu'il aurait été laissé seul dans une pièce pendant un certain temps entre les deux alcootests.
[32] La défense a déposé en liasse (D-2) des rapports de défectuosités et de vérifications préparés par les préposés de l'atelier de réparations de la Sûreté du Québec concernant tant le simulateur que l'alcootest. Un tableau préparé par l'expert Jean-Pierre Robitaille à partir de ses rapports.
[33] La défense a aussi déposé un rapport d'expertise du toxicologue judiciaire Jean-Pierre Robitaille. Selon le calcul théorique de l'alcoolémie de l'accusé, il conclut que son taux d'alcoolémie devrait se situer entre 18 mg d'alcool par 100 ml de sang au moment de son interception.
[34] La preuve de la poursuite s'appuie principalement sur le certificat d'analyse des échantillons d'haleine et sur les présomptions d'exactitude et d'identifié prévues à l'alinéa 258 (1)c) C.cr.
[35] Quant à la défense, elle prétend avoir réussi à réfuter ces présomptions en présentant une preuve tendant à démontrer le mauvais fonctionnement ou une utilisation incorrecte de l'appareil et, pour ce, elle s'appuie sur deux éléments :
1) soit que l'alcooltest utilisé et ses accessoires n'ont pas été inspectés depuis plusieurs années, ce qui équivaut à une utilisation incorrecte;
2) que les policiers n'ont pas respecté les normes et procédures en omettant d'observer, de manière efficace, l'accusé durant la période requise de quinze minutes précédant chacun des tests, ce qui équivaut à une utilisation incorrecte de l'alcootest.
[36] La défense a également demandé au tribunal d'admettre en preuve une défense de type Carter et d'en tenir compte dans l'évaluation de l'insuffisance de la preuve contraire.
[37] L'appelant a déposé le document Normes et procédures recommandées par la Société canadienne des sciences judiciaires - Comité des analyses d’alcool (D-18) publié en 2009 et aussi l'énoncé de position du comité des analyses d'alcool - Documents nécessaires pour évaluer l’exactitude et la fiabilité des résultats des alcootests approuvés » (D-14).
[38] L'expert Robitaille témoigne que l'appareil Alco-Sensor IV-RBT IV n'a fait l'objet d'aucune inspection depuis cinq ans et le simulateur depuis plus de quatre ans. La pile combustible de l'alcootest est une composante essentielle qui aurait dû être changée. Sa durée de vie est d'environ de trois à cinq ans.
[39] Dans le présent dossier, la pile du combustible n'a jamais été changée entre le moment de sa mise en service en novembre 2005 et la date de l'infraction, soit plus de cinq ans.
[40] La défense a également fait entendre un nouvel expert soit Monsieur Gérald Kupferschmidt, diplômé en chimie et qui a travaillé au Laboratoire de sciences judiciaires de la Gendarmerie royale du Canada de 1971 à 1985. Par la suite, il a agi comme consultant privé. Il a fait des recherches sur des instruments d'analyse d'alcool, dont le Breathalyzer 900 et l’Intoxilyzer 5000C. Il a déjà utilisé plusieurs simulateurs de la marque GUTH à l'exception du modèle 10-4D qui est en cause.
[41] Selon cet expert, « toute analyse scientifique repose sur quatre composantes essentielles en chimie analytique : l’exactitude, la précision, la spécificité et la fiabilité. »
[42] L'expert Kupferschmidt souligne qu'il n'est pas d'accord avec l'énoncé de position de 2012, en contradiction avec les normes et procédures publiées en 2009. Comme le simulateur GUTH n'a pas été entretenu depuis 46 mois, pour l'expert Kupferschmidt, il s'agit d'une violation sérieuse des critères d'assurance qualité, car même si les résultats obtenus sont bons, l'appareil lui-même est suspect.
[43] En contre-interrogatoire, il admet que tous les appareils approuvés pour l'utilisation en application du Code criminel sont précis, exacts et fiables à la condition qu'ils soient accompagnés d'un solide programme d'assurance qualité.
[44] Par la suite, le juge de première instance relate le témoignage de l'expert de l'intimée, André Dion. Celui-ci souligne que l'appareil Alco-Sensor IV-RBT IV est un appareil fiable et comporte des mécanismes de vérification interne permettant de détecter des anomalies.
[45] Cet expert fait une distinction entre la fiabilité à long terme d'un appareil et sa fiabilité à court terme. L'entretien et l'inspection des appareils sont assimilables à un programme d’assurance qualité et concernent la fiabilité à long terme d’un appareil. Mais l'absence de ce programme ne permet pas de tirer des inférences sur la fiabilité ou l'exactitude des résultats produits par un alcootest.
[46] L'expert Dion précise que les inspections ont pour objectif de garantir que les appareils ne tomberont pas en panne et de permettre la traçabilité documentaire des réparations. Le programme d'entretien n'a pas d'impact sur la stabilité des résultats.
[47] Concernant ce point, le juge de première instance écrit :
[85] L’élément le plus important du programme d’assurance qualité demeure cependant celui touchant les procédures opérationnelles que doivent respecter les techniciens qualifiés lors des prélèvements et analyses d’échantillons d’haleine. Les tests de contrôle effectués par le technicien qualifié conformément aux normes et procédures énoncées par la SCSJ constituent l’élément déterminant permettant d’évaluer la fiabilité des résultats d’analyse dans chaque cas.
[48] Pour l'expert Dion, les procédures et les tests de contrôle sont conformes aux normes, les résultats sont fiables d'un point de vie scientifique.
[49] En ce qui concerne la pile combustible, l'expert souligne que s’il y a anomalie, elle sera détectée par les tests de contrôle.
[50] Par la suite, c'est madame Louise Gagné, technicienne en électronique employée de la Sûreté du Québec à l'atelier d'entretien, qui a témoigné qu'elle procède à la vérification des simulateurs neufs, avant de les envoyer dans les postes de police, et qu'il n'y a pas de programme d'inspection annuelle.
[51] En ce qui concerne l'appareil Alco-Sensor IV-RBT IV, elle utilise le manuel du fabricant pour effectuer les réparations. À sa connaissance, il n'y a pas de programme prévoyant la révision ou une inspection annuelle de ces appareils. Elle souligne que chaque fois que Alco-Sensor IV-RBT IV atteint 1 022 tests, sa mémoire interne est vidée, ce travail est effectué en atelier.
[52] Lors de l'opération de vidage de la mémoire, elle procède à une vérification de l'appareil pour s'assurer de son bon fonctionnement avant de le retourner. Les données contenues dans la mémoire de l'appareil n'ont aucune utilité, selon madame Gagné.
[53] Le juge de première instance commence son analyse en donnant son interprétation de l'article 258 (1)c) C.cr. Il souligne que pour réfuter la présomption d'exactitude la preuve contraire doit démontrer le mauvais fonctionnement ou une utilisation incorrecte de l'alcootest. L'accusé n'a pas à établir un lien de causalité entre le problème de fonctionnement ou d'utilisation incorrecte de l'alcootest et les taux d'alcoolémie mesurés par l'alcootest, mais qu'à tout le moins, la preuve contraire doit être sérieuse.
[54] Il souligne les paragraphes 52 et 53 de St-Onge, que l'appelant doit soulever non pas une possibilité d'inférence, mais un doute réel sur le fonctionnement et l'utilisation correcte de l'appareil.
[55] Quant à la défense de type Carter, il la rejette tenant compte que cette défense était présentée uniquement dans le but de réfuter les présomptions de l'article 258 (1)c), ce qui n'est plus permis.
[56] Par la suite, il parle d'un entretien et de l'inspection des alcootests et des accessoires et il cite la cause R. c. Piché[7] où l'alcootest n'a pas été inspecté depuis deux ans. Le juge décida qu'il s'agissait d'une preuve suffisante pour réfuter les présomptions de l'alinéa 258 (1)c) C.cr.
[57] Il se réfère également à l'affaire Lam[8], l'alcootest n'avait pas été inspecté depuis quatorze mois, soit au-delà de la période de douze mois recommandés par les normes et procédures de la SCSJ. L'expert de la défense était d'opinion que l'alcootest n'a pas été utilisé correctement parce qu'il n'avait pas été inspecté. De plus, les réparations de l'appareil effectuées par la suite constituaient une autre source de préoccupation quant à la fiabilité des résultats. L'expert de la poursuite était d'opinion que les tests de contrôle étaient suffisants pour déterminer si l'appareil fonctionnait correctement.
[58] Le juge de première instance conclut qu'il était suffisant pour soulever un doute raisonnable et acquitta l'accusé. En appel, la Cour supérieure de l'Ontario a infirmé cette décision bien qu'elle partage l'opinion du juge de première instance concernant le lien entre l'entretien et l'utilisation de l'alcootest. Elle a rejeté l'argument voulant que la preuve de non-respect de la recommandation de la SCSJ, relative à l'entretien annuel est suffisante, pour soulever un doute raisonnable.
[59] Il cite par la suite la cause de Rickett[9] alors que la Cour avait décidé que pour constituer une preuve contraire suffisante, il doit y avoir un lien entre le manque d'entretien et une possible défaillance.
[60] Le juge de première instance soumet également plusieurs décisions d'autres provinces[10].
[61] Pour le juge de première instance, il faut faire une différence entre l'inspection et l'entretien. Ce n'est pas parce qu'un instrument n'a pas été inspecté qu'il est mal entretenu. Pour lui, c'est l'omission d'entretenir et de réparer l'instrument qui risque d'avoir un impact sur son fonctionnement.
[62] Concernant plus particulièrement les faits du présent dossier, il souligne la Cour d'appel de l'Alberta[11]. Dans ce dossier, le technicien n'avait pas suivi les recommandations du manuel du service de police, d'attendre vingt minutes après l'éructation, et la Cour d'appel a conclu que cette omission n'était pas suffisante pour soulever un doute raisonnable ou réfuter la présomption.
[63] Le juge de première instance souligne que les seuls éléments disponibles dans le présent dossier sont deux fiches d'entretien dont la dernière remonte au 27 juin 2006 pour l'alcootest et une autre au 1er mai 2007 en ce qui concerne le simulateur. Il constate des lacunes importantes dans le programme d'assurance qualité à la Sûreté du Québec et cela met en cause l'intégrité du programme d'analyse d'alcool à long terme.
[64] Il précise cependant que rien dans la preuve ne permet de conclure que les alcootests ne sont pas réparés ou entretenus lorsqu'ils présentent des problèmes de fonctionnement.
[65] La question que le tribunal doit décider est de savoir si l'omission de procéder à des inspections annuelles sur une période prolongée met en cause le fonctionnement du simulateur et de l'alcootest et soulève un doute raisonnable sur la fiabilité des résultats.
[66] Pour lui, la preuve démontre que les opérations du technicien respectent les conditions prévues à l'article 258 (1)c) C.cr., il n'y a pas eu d'anomalie de révéler sur le simulateur, la solution d'alcool type ou l'alcootest. Les tests de contrôle ont produit les résultats attendus.
[67] Il cite l'expert Robitaille en mentionnant « qu'il n'est pas en mesure d'affirmer que le non-respect de ces normes a pu affecter la fiabilité des résultats d'analyse dans le cas de l'accusé même à un moindre degré. »
[68] Il souligne que le témoignage de monsieur Kupferschmidt a porté sur la nécessité d'avoir un programme d'assurance qualité pour assurer la crédibilité du programme d'analyse d'alcool et la fiabilité des alcootests à long terme.
[69] Bien que son témoignage soit crédible et convaincant concernant l'importance d'un programme d'alcool des mesures d'assurance qualité, il conclut que celui-ci ne soulève qu'une simple possibilité que l'alcootest n'a pas fonctionné dans le cas de l'appelant.
[70] De plus, la preuve présentée en défense ne permet pas de conclure à une possibilité sérieuse de mauvais fonctionnement de l'alcootest ou du simulateur qui aurait été détecté par le technicien qualifié, au moment des séquences d'analyse.
[71] Finalement, il écrit :
[174] Le Tribunal ne peut ignorer que la SCSJ qui est l’autorité à l’origine des normes et procédures sur lesquelles s’appuie principalement la défense, a elle-même insisté dans ses écrits pour préciser que même si l’inobservance de ses recommandations en matière d’assurance qualité pouvait donner lieu à un problème de fonctionnement d’un alcootest, les tests de contrôle effectués au moment des analyses permettent de déceler de telles failles.
[72] Il s'agit à l'origine des normes et procédures s'appuie la défense insiste dans ses écrits pour préciser que l'inobservance de ces recommandations d'assurance qualité pouvait donner lieu à un problème de fonctionnement, mais que les tests de contrôle effectués au moment des analyses permettent de déceler de telles failles.
[73] C'était d'ailleurs dans le sens du témoignage de monsieur Dion. Celui-ci, dans son témoignage, est revenu à plusieurs reprises entre la différence entre la fiabilité des résultats d'analyse dans un dossier donné et la fiabilité d'un alcootest à long terme.
[74] Finalement, il parle de la période d'observation et écrit que bien que cette période peut constituer une des mesures de contrôle de la qualité des analyses, elle ne fait pas partie des éléments que doit prouver la poursuite, aux termes de l'article 258 (1)c) C.cr. Il rejette la position de la défense à savoir que le non-respect des recommandations relatives à la période d'observation peut être suffisant pour soulever un doute en soi, une preuve contraire.
[75] Bien qu'il ne se sente pas lié par la décision de la Cour d'appel de l'Alberta, il précise qu'une cour d'appel d'une autre province conserve quand même une autorité morale considérable en précisant que cette décision avait été suivie par plusieurs décisions au Québec[12]
[76] L'accusé n'ayant pas réussi à réfuter les présomptions légales, il est reconnu coupable.
[77] L’appel vise à casser le verdict de culpabilité pour les motifs suivants :
Le juge a commis une erreur de droit lorsque, dans sa décision du 14 février 2014, il refuse d’ordonner à l’intimée la divulgation de la mémoire de l’appareil privant ainsi l’appelant d’une défense pleine et entière. Ce faisant, le juge a privé l’appelant d’un moyen de défense afin de soulever un doute raisonnable quant à la mauvaise utilisation des instruments approuvés utilisés.
50.1 Le juge a commis une erreur de droit lorsque, dans son jugement du 28 août 2015, il conclut que l’appelant n’a pas réussi à neutraliser les présomptions telles que précisées par la majorité dans l’arrêt R. c. St-Onge Lamoureux, [2012] 3 R.C.S. 187 (ci-après « St-Onge ») :
50.2.1 Le juge a commis une erreur de droit lorsqu’il exige un lien entre le défaut d’entretien des instruments approuvés utilisés et les résultats de l’alcootest reprochés à l’appelant et ce, à l'encontre des principes de la majorité dans St-Onge.
50.2.2 Le juge a commis une erreur de droit quant au fardeau de preuve de l’appelant. En effet, le juge se fonde sur des passages de St-Onge (par. 52 et suivants), passages qui ont été rejetés par la majorité dans cet arrêt (par. 59), (par.63).
50.2.2.1 Plus spécifiquement, le juge a commis une erreur de droit en exigeant à l’appelant non pas de soulever un doute raisonnable, mais un doute réel, fardeau de preuve qui a été rejeté par la majorité dans St-Onge.
50.2.3 Le juge a commis une erreur de droit lorsqu’il déclare non admissible la défense de type Carter malgré une preuve de mauvais entretien des appareils approuvés.
50.2.4 Le juge a commis une erreur de droit en créant un renversement de fardeau de preuve. Constitue une erreur de droit d’imposer à l’appelant de démontrer que l’étape de l’observation n’a pas été respectée alors que ce fardeau de preuve est dévolu au ministère public (par. 25 St-Onge).
50.2.5 Le juge a commis une erreur de droit en concluant à la culpabilité de l’appelant malgré une preuve non contredite de l’absence d’entretien du simulateur Guth selon les prescriptions du fabricant. »
[78] L'appelant reproche au juge de ne pas avoir appliqué le bon critère, soit non pas celui du raisonnablement disponible, mais celui du raisonnablement susceptible d'être pertinent en se basant sur l'arrêt Carosella[13].
[79] L'appelant souligne que le juge de première instance n'a pu bénéficier de l'éclairage des principes émis dans l'arrêt Rodrigues c. Desaulniers[14]. Il s'appuie sur ce jugement pour souligner que le raisonnablement disponible n'est pas un fardeau supplémentaire pour la défense.
[80] L'appelant n'a pas le fardeau d'établir que la divulgation de la preuve est raisonnablement disponible. L'intimée n'a pas réussi à prouver que cet élément était non raisonnablement disponible.
[81] Cette affirmation du juge de première instance ne se fonde aucunement sur la preuve.
50.2.6 Le juge a commis une erreur de droit lorsqu’il exige un lien entre le défaut d’entretien des instruments approuvés utilisés et les résultats de l’alcootest reprochés à l’appelant, et ce, à l'encontre des principes de la majorité dans St-Onge.
50.2.1 Le juge a commis une erreur de droit quant au fardeau de preuve de l’appelant. En effet, le juge se fonde sur des passages de St-Onge (par. 52 et suivants), passages qui ont été rejetés par la majorité dans cet arrêt (par. 59), (par.63).
50.2.2.1 Plus spécifiquement, le juge a commis une erreur de droit en exigeant à l’appelant non pas de soulever un doute raisonnable, mais un doute réel, fardeau de preuve qui a été rejeté par la majorité dans St-Onge.
[82] Dans son mémoire, l'appelant traite ces différents moyens d'appel ensemble.
[83] Dans son exposé, l'appelant traite les points 50.2, 50.2.1, 50.2.2, 50.2.2.1 ensemble. Dans son exposé, l'appelant fait l'historique des différents dossiers qui se sont finalisés avec l'arrêt St-Onge. Il souligne que le juge de première instance s'est appuyé sur les paragraphes 50 à 59 du jugement St-Onge, ceux-ci n'ont pas force de loi au pays.
[84] La notion du lien de causalité par la démonstration d'un doute réel est un concept qui a été totalement rejeté par la majorité dans St-Onge.
[85] Dans son jugement, le juge de première instance soulignant que la preuve du mauvais fonctionnement ou d'utilisation incorrecte doit soulever un doute raisonnable sur la fiabilité des résultats de l'analyse dans le cas particulier de l'accusé.
[86] Il s'agit pour le juge de première instance, d'une application erronée du fardeau de preuve (doute réel et lien de causalité) déclarée inconstitutionnelle par la Cour suprême dans St-Onge. Lorsque le juge de première instance, à son paragraphe 123 du jugement, se réfère au paragraphe 63 de l'arrêt St-Onge, il commet une erreur puisque la Cour suprême l'a déclaré institutionnel.
[87] L'appelant a démontré que les normes et procédures canadiennes de la SCSJ recommandaient une inspection annuelle des instruments approuvés, ce qui n'a pas été fait. Il a démontré que l'alcootest n'a pas été entretenu ou inspecté depuis près de quatre ans, que le simulateur n'a pas été inspecté depuis près de cinq ans et que la norme prévoit une calibration annuelle.
[88] L'appelant a également démontré que la pile combustible n'avait pas été changée à la fréquence prévue par le fabricant. Les experts Robitaille et Kupferschmidt ont témoigné dans ce sens et le juge de première instance n'a pas retenu leurs prétentions. L'appelant a été privé d'obtenir la mémoire de l'alcootest, c'est une violation de son droit constitutionnel à une défense pleine et entière.
[89] L'appelant a démontré qu'il y a « une possibilité raisonnable que la non-divulgation ait influé sur l’issue ou l’équité globale du procès ».
[90] En se basant sur le paragraphe 80 de St-Onge, l'appelant soumet qu'après avoir fait la preuve de tous les problèmes liés au non-entretien, la non-calibration et à la non-conformité aux normes des procédures canadiennes ainsi que celles du fabricant, il n'a pas invoqué comme seul moyen de défense, la défense de type Carter mis à l'appui des autres moyens de défense liés à l'utilisation incorrecte de l'alcootest.
[91] C'est une erreur du juge de première instance de refuser à l'appelant de prouver son véritable taux d'alcoolémie en défense, en présence d'autant de problèmes liés aux instruments approuvés.
[92] La conclusion du juge de première instance voulant que les policiers aient été en tout temps en présence avec l'appelant était irréconciliable avec la preuve qu'entre 1 h 28 et 1 h 33, les policiers ne sont pas en présence de l'appelant. L'appelant a été seul avec son avocat sans observation de la part des policiers. Les observations sont importantes pour la stabilité des tests.
[93] Les experts Robitaille et Kupferschmidt sont d'accord avec l'article de l'auteur Dubowski qui prévoit une période d'observation de quinze minutes au moins avant le premier test.
[94] Quant à ce dernier moyen d'appel, traité dans les moyens d'appel avec les deuxième et troisième moyens.
[95] Toutes ces erreurs de droit sont suffisantes pour nécessiter l'intervention de la Cour et annuler la condamnation de l'appelant.
[96] L'intimée soumet ainsi les questions à être décidées :
Question 1 : Le juge de première instance a-t-il erré en accueillant partiellement la requête en divulgation de la preuve de l’APPELANT?
Question 2 : Le juge de première instance devait-il considérer que la preuve présentée en défense était suffisante afin de mettre en doute l’exactitude des résultats obtenus de l’alcootest approuvé?
Question 3 : Le juge a-t-il commis une erreur de droit lorsqu'il déclare non admissible la défense de type Carter malgré une preuve de mauvais entretien des appareils approuvés?
Question 4 : Le juge a-t-il commis une erreur de droit en créant un renversement de fardeau de preuve? Constitue une erreur de droit d'imposer à l'APPELANT de démontrer que l'étape de l'observation n'a pas été respectée alors que ce fardeau de preuve est dévolu au ministère public.
[97] L'intimée prétend que les éléments de preuve soumis, dès la comparution à l'appelant sont les fruits de l'enquête, tels que définis dans l'arrêt Jackson[15]. D'ailleurs, l'intimée s'appuie sur le jugement du juge Dionne[16]. Il n'y a pas nécessité d'adopter une définition large du concept des fruits de l'enquête puisque les tribunaux ont mis en place des méthodes pour permettre à une personne accusée d'avoir accès à ses informations, notamment dans McNeil[17] et O'Connor.
[98] Dans l'arrêt St-Onge, la Cour suprême a assimilé les demandes en divulgation de preuves supplémentaires en matière de conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur au régime de l'arrêt O'Connor. L'appelant a échoué à toutes les étapes de procédure à démontrer la pertinence probable de la mémoire de l'alcootest. C'est son obligation première pour obtenir copie de ses tests conformément à l'arrêt O'Connor.
[99] La preuve présentée par l'appelant n'est que d'une utilité spéculative, elle n'a jamais atteint le fardeau de la pertinence vraisemblable. En vertu de l'arrêt O'Connor, le fardeau de la preuve de l'appelant était celui d'une pertinence probable, c'est d'ailleurs ce que la Cour d'appel de l'Ontario mentionne dans Jackson.
[100] L'appelant demande donc à la poursuite de mobiliser une importante ressource pour obtenir un élément qui n'est pas raisonnablement disponible et surtout, qu'il n'existe même pas un commencement de preuve de pertinence probable.
[101] En vertu de l'arrêt St-Onge, si l'appelant veut faire perdre au ministère public le bénéfice de présomption légale, il doit présenter une preuve qui cible directement le fonctionnement ou l'utilisation de l'appareil. La preuve doit être sérieuse. Une preuve contraire approximative, peu fiable et incertaine, n’a jamais suffi à faire perdre au ministère public le bénéfice des présomptions.
[102] L'appelant devait invoquer non pas une simple possibilité, mais soulever un doute réel sur le bon fonctionnement et l'utilisation correcte de l'appareil.
[103] Le juge de première instance a conclu que la preuve présentée par l'appelant, en ce qui a trait à l'entretien supposément déficient, n'est pas suffisante puisqu'elle ne se rapportait pas à l'utilisation de l'appareil comme telle.
[104] L'appelant a essayé de faire croire que la Cour suprême a changé le doute. Le doute réel utilisé par la Cour suprême fait référence au doute raisonnable nécessaire au renversement des présomptions.
[105] En effet, les deux termes sont des synonymes utilisés par le juge Deschamps aux paragraphes 53 et 58 de St-Onge.
[106] L'intimée ne partage pas l'opinion de l'appelant. En effet, lorsque les présomptions d'exactitude et d'identité de l'alinéa 258 (1)c) C.cr. s'appliquent, la défense de type Carter n'est pas disponible.
[107] Pour renverser ces présomptions, la défense doit faire une preuve démontrant le mauvais fonctionnement ou une utilisation incorrecte de l'alcootest. Dans une telle situation, la défense de type Carter est écartée, tel que l'a écrit la juge Deschamps au paragraphe 74 de St-Onge.
[108] La défense de type Carter peut s'appliquer en outre lorsque la deuxième présomption d'identité est en jeu ou encore lorsque la poursuite ne bénéficie pas des présomptions d'exactitude et d'identité prévues à l'article 258 (1)c). Deux situations qui n'ont pas d'application dans le présent dossier.
[109] Dans un premier temps, cette période d'observation de quinze minutes n'est pas une exigence législative. Même si cette exigence n'avait pas été observée, elle n'est pas fatale et ne peut plus faire perdre le bénéfice des présomptions à la poursuite. De plus, la question sur la période d'observation est une question de nature purement factuelle et le juge y a répondu en reprenant les témoignages des deux agents.
[110] De plus, il serait dangereux de respecter obligatoirement cette période d'observation de quinze minutes alors que le législateur prévoit que l'échantillon doit être pris dès qu'il est « matériellement possible de le faire ». Appliquer la position de l'appelant serait de donner un moyen de contestation aux accusés pour avoir une détention arbitraire.
[111] Pour perdre le bénéfice des présomptions, l'accusé doit démontrer qu'il a régurgité, que le fabricant recommande une période d'attente supplémentaire à la suite de cette régurgitation ou encore, qu'une preuve d'expert démontre qu'un temps d'attente additionnel doit être respecté à la suite de cette régurgitation ou encore qu'une preuve démontre que le technicien qualifié a appris dans sa formation qu'il devait respecter un certain délai à la suite dune régurgitation. Et finalement, que cette période d'attente supplémentaire n'a pas été respectée par le technicien qualifié.
[112] L'appelant devait faire le lien entre le défaut de respecter un délai adéquat à la suite d'une régurgitation et le mauvais fonctionnement ou l'utilisation incorrecte de l'appareil. Il ne suffit pas d'une simple possibilité, mais plutôt d'un doute réel sur le bon fonctionnement et l'utilisation de l'appareil.
[113] Ce dossier est une cause type. En effet, près d'une centaine de dossiers en appel à la Cour supérieure, division d'appel de Québec, sont en attente de ce jugement. Les procureurs ont accepté de se lier à ce dossier, sujet aux particularités que certains dossiers peuvent avoir.
[114] Devant la Cour du Québec, de nombreux dossiers sont en attente aussi de cette décision. À la suite de la décision St-Onge, des courants jurisprudentiels différents sont apparus au niveau de la divulgation de la preuve. Les décisions allaient dans le sens d'obliger la poursuite à prouver la non-pertinence de la divulgation de la preuve, d'autres limitaient la divulgation plus strictement aux fruits de l'enquête.
[115] Certains jugements prétendaient que des rapports en possession de la Sûreté du Québec et en possession des laboratoires scientifiques, qui avaient touché de près ou de loin à l'accusé étaient des fruits de l'enquête, et d'autres contestaient ce fait.
[116] Plusieurs jugements n'avaient pas la même définition de ce qu'on appelle les fruits de l'enquête, mais ils se basaient tous sur les mêmes jugements de la Cour suprême, soit, Stinchcombe[18], O'Connor[19] et McNeil[20], chacun y donnait une interprétation différente.
[117] Regardons en premier lieu les moyens d'appel dans le présent dossier.
[118] Selon le premier moyen d'appel[21], le juge de première instance aurait appliqué un mauvais critère. En effet, ce n'est pas le critère de raisonnablement disponible qui doit s'appliquer, mais le critère de raisonnablement susceptible d'être pertinent, tel que prévoit l'arrêt Carosella[22]. L'appelant s'appuie également sur le jugement Rodrigues[23] pour étayer ce point de vue.
[119] Pourtant, la juge Deschamps dans St-Onge indique bien à son paragraphe 78 :
[78] Bien que le législateur exige maintenant une preuve tendant à établir une défaillance dans le fonctionnement ou l’utilisation de l’appareil, cela ne limite pas pour autant les éléments qui peuvent être raisonnablement utilisés par la personne accusée pour soulever un doute sur ces aspects. En effet, les personnes accusées peuvent demander communication des éléments pertinents qui sont raisonnablement disponibles pour leur permettre de faire valoir une défense réelle. En cas de refus, la personne accusée peut invoquer les règles régissant la communication de la preuve ainsi que les réparations qui peuvent être accordées à cet égard (voir R. c. O’Connor, [1995] 4 R.C.S. 411). Bref, la personne accusée pourrait par exemple soit se fonder sur des relevés d’entretien de l’appareil révélant que celui-ci n’a pas été entretenu correctement ou sur des admissions du technicien concernant l’obtention de résultats erratiques, soit faire valoir des problèmes de santé ayant un effet sur le fonctionnement de l’appareil (voir R. c. Kasim, 2011 ABCA 336, 515 A.R. 254).
(Soulignement du soussigné).
[120] Les citations que fait le procureur de l'appelant du jugement Rodrigues ne vont pas du tout à l'encontre de la décision du juge de première instance. Au paragraphe 78 du jugement du juge Cournoyer, celui-ci indique que « l'expression raisonnablement disponible n'introduit pas un fardeau supplémentaire qui incombe à l'accusé ». C'est exact, ce n'est pas à l'accusé de démontrer que des documents sont raisonnablement disponibles, mais à la poursuite de démontrer que ces documents ne sont pas raisonnablement disponibles.
[121] D'ailleurs, le juge de première instance ne prétend que l'accusé n'a pas établi le fardeau que le document était raisonnablement disponible. À son paragraphe 79[24], il précise de quelle manière on peut obtenir copie de la mémoire de l'appareil. C'est pour cette raison qu'il a conclu qu'elle n'est pas raisonnablement disponible.
[122] Ce paragraphe à lui seul indique bien que cette preuve n'est pas raisonnablement disponible. Considérant le nombre de dossiers d'ivressomètre dans une année au Québec, accomplir cette opération à chaque dossier, il y aurait pénurie d'appareils. C'est pour cette raison que le juge de première instance a conclu que la mémoire n'était pas raisonnablement disponible.
[123] De plus, quant à l'utilité de la mémoire pour démontrer le mauvais fonctionnement ou la mauvaise utilisation de l'appareil, il écrit :
[80] Quant à l'expert André Dion, il affirme que les données contenues dans la mémoire n'ont aucune utilité pour déterminer l'exactitude des résultats d'analyse concernant un accusé, et ce, pour les mêmes motifs que ceux évoqués pour les autres informations réclamées par l'accusé. Il ajoute que les données contenues dans la mémoire ne permettent pas de tirer des inférences sur le fonctionnement de l'appareil en l'absence d'informations précises sur les circonstances entourant les prises d'échantillons d'haleine à l'origine des résultats inscrits.
[124] À titre d'exemple, on peut lire les réponses de monsieur Robitaille dans les notes sténographiques[25] :
Euh, à présent si je regardais la mémoire de l'appareil, on verrait peut-être des, des écarts à, en raison de, de peut-être de la condition de la pile combustible ou de, des mauvais ajustements au niveau électronique, je l'sais pas, ou au niveau de, de la prise d'échantillons d'haleine, euh, ça, c'est, pour me prononcer d'une façon plus définitive, euh, la mémoire de l'appareil pourrait m'aider.
(Soulignement du soussigné)
[125] Plus loin, il dit[26] :
Robitaille
[…] Moi, je dis, si on regarde ... c'est pour ça qu'on veut voir la mémoire de l'appareil, si on veut voir ... on veut avoir la fiabilité de l'appareil, c'est-à-dire la capacité de reproduire les résultats au fil du temps, il faut pas regarder seulement deux (2) résultats à vingt (20) minutes d'intervalle, il faut regarder les résultats sur une période plus longue logiquement.
Je pense que c'est pas exagéré de dire ça. Pis, ça, ça relève de l'entretien de l'appareil.
Je comprends qu'un appareil où on n'a pas ... on n'a pas à changer de détecteur d'alcool à une fréquence quelconque, peut-être que le problème se présente pas.
[126] L'expert Robitaille parle de possibilités de peut-être. Il parle de la fiabilité de l'appareil, c'est-à-dire comme il l'indique la capacité de reproduire les résultats fiables au fil du temps, alors que l'expert Dion parle des échantillons qui ont été pris dans le présent dossier. Celui-ci est catégorique que la mémoire ne permet pas de prouver un mauvais fonctionnement, une mauvaise utilisation de l'appareil, elle ne peut servir qu'à la fiabilité à long terme de l'appareil, ce qui n'est pas le but recherché dans le présent dossier.
[127] De plus, l'expert Robitaille précise que le technicien peut effacer la mémoire de l'appareil et éliminer les résultats de celle-ci en tout temps. Donc, la mémoire ne contiendrait pas nécessairement tous les tests qui ont été passés.
[128] Quant à l'expert Kupferschmidt, celui-ci parle de fiabilité de l'appareil à long terme, un plan d'assurance qualité. Il ne prétend nullement que la mémoire pourrait indiquer les défaillances de l'appareil.
[129] En conclusion sur ce point, le juge de première instance, avec raison, écrit que les témoignages des experts de l'appelant portaient sur la fiabilité, à long terme, de l'appareil et non pas sur la fiabilité des tests. Ce que la divulgation de la preuve doit permettre, c'est de vérifier la fiabilité des tests.
[130] L'appelant a démontré par sa preuve d'expert que si la Sûreté du Québec n'inspecte pas régulièrement ses appareils, comme le fabricant le recommande, c'est la fiabilité à long terme qui pourrait être diminuée. Ce manquement d'inspection ne démontre pas que les tests pris sur l'appelant ne sont pas fiables.
[131] La Cour suprême dans St-Onge ne parle pas d'une inspection régulière, mais parle bien d'entretien et de réparations. Dans le présent dossier, madame Gagné a témoigné qu'elle faisait régulièrement la réparation des appareils qui faisaient défaut et, avant de les retourner, elle en faisait l'inspection.
[132] À titre d'exemple, les fabricants d'automobiles recommandent une vidange d'huile régulièrement. Si la vidange n'est pas faite, l'automobile ne cessera pas pour autant de fonctionner, mais sa fiabilité à long terme et sa longévité en seront diminuées.
[133] C'est la même chose pour les appareils, ils ne cesseront pas de fonctionner parce que l'inspection recommandée n'a pas été faite. La longévité pourrait être grandement diminuée à long terme.
[134] Selon le deuxième motif[27] et le troisième motif[28], le juge a commis une erreur en droit. Pour appuyer ses prétentions, le procureur de l'appelant a fait un long historique du cheminement préalable à la cause de St-Onge.
[135] Le procureur de l'appelant précise que le juge de première instance lorsqu'il parle du doute réel, il se base sur les paragraphes 50 à 59 de l'arrêt St-Onge. Ces paragraphes se retrouvent sous le titre « Lien entre la défaillance et un taux supérieur à 0,08 ». Cette partie du nouvel article 258 a été considérée comme inconstitutionnelle par la Cour suprême et a été annulée. Dans l'exposé de l'appelant, le procureur écrit :
[122] Par conséquent, les paragraphes 50 à 59 (ce qui inclut les paragraphes 52 et 53 auxquels le juge fait référence dans le jugement du 28 août 2015) menant à cette conclusion d’inconstitutionnalité n’ont pas force de loi au pays.
[136] Cette prétention de l'appelant est quelque peu difficile à comprendre. Selon l'appelant, tout ce que la Cour suprême a écrit dans ces paragraphes pour déclarer inconstitutionnelle une partie de l'article 258 ne peut être utilisé comme référence, car les termes utilisés n'ont pas force de loi.
[137] Le tribunal ne partage pas cette opinion. Ce que dit St-Onge dans lesdits paragraphes, c'est l'accusé qui doit prouver le mauvais fonctionnement ou une utilisation incorrecte des appareils. En plus, iI devait prouver que son alcoolémie était en bas de la limite permise. C'est cette partie de l'article 258 C.cr. qui a été déclarée inconstitutionnelle.
[138] C'est ainsi que s'exprime la Cour suprême sur le doute réel :
[53] Il faut donc tenir pour acquis que la personne accusée doit non pas évoquer une simple possibilité de défaillance, mais plutôt soulever un doute réel sur le bon fonctionnement ou l’utilisation correcte de l’appareil. […]
[139] Je ne vois pas pour quelle raison l'appelant reproche au juge de première instance d'utiliser cette affirmation de la Cour suprême. Le juge de première instance interprète bien l'arrêt St-Onge.
[140] Ce qui a été déclaré inconstitutionnelle c'est l'obligation pour un accusé de prouver que son taux d'alcoolémie était inférieur à la limite légale après avoir prouvé la défaillance de l'appareil ou une mauvaise utilisation. Il n'est pas interdit de se référer à la Cour suprême lorsqu'elle interprète un texte et d'utiliser le terme que celle-ci utilise. C'est ce qu'a fait le juge de première instance en utilisant le terme de doute réel.
[141] Le procureur de l'appelant prétend que le juge de première instance a utilisé un autre fardeau que celui du doute raisonnable, encore là il se trompe. Tant la Cour suprême que le juge de première instance, lorsqu'il parle de doute réel, c'est un doute par opposition à une possibilité. Le doute réel est un doute raisonnable. D'ailleurs, la juge Deschamps elle-même utilise les deux termes aux paragraphes 53 et 58 de l'arrêt St-Onge :
[53] Il faut donc tenir pour acquis que la personne accusée doit non pas évoquer une simple possibilité de défaillance, mais plutôt soulever un doute réel sur le bon fonctionnement ou l’utilisation correcte de l’appareil. En somme, si l’objectif poursuivi par le législateur est d’éliminer les cas futiles, il est atteint par l’appréciation de la preuve à laquelle se livre le juge des faits. Permettre à la poursuite de bénéficier des présomptions même si un doute réel a été soulevé relativement aux résultats des alcootests constitue en pratique un renversement du fardeau de preuve. Les commentaires qu’a faits le juge Iacobucci à l’égard de la présomption d’identité dans R. c. St. Pierre, [1995] 1 R.C.S. 791, par. 56, sont très pertinents en l’espèce :
Si cette position était acceptée, et que le caractère substantiel de la preuve de l’accusé est établi en fonction de la limite fixée dans la loi, il existerait une zone d’incertitude entre les résultats de l’alcootest et la limite légale, et il incomberait à l’accusé de dissiper l’incertitude alors qu’en fait, c’est au ministère public que revient l’obligation de prouver l’accusation.
[58] Par ailleurs, il importe de souligner que le fait que la personne accusée parvienne à soulever un doute raisonnable quant au bon fonctionnement ou à l’utilisation correcte de l’alcootest signifie simplement que la poursuite perd le bénéfice des présomptions prévues à l’al. 258(1)c). Cette dernière peut tout de même faire la preuve que, en dépit de la défaillance prouvée, mais à la lumière d’une preuve additionnelle qu’elle pourra apporter, la personne accusée avait une alcoolémie supérieure à 0,08 suivant les résultats des analyses.
(Soulignement du soussigné)
[142] Cela démontre que le doute réel est un doute raisonnable. Le doute réel est utilisé en opposition au terme possibilité. Ce que doit soulever l'accusé, c'est un doute raisonnable ou un doute réel en opposition à des possibilités.
[143] Le juge de première instance tout comme la Cour suprême a utilisé les deux termes pour indiquer la même chose. Il n'y a donc pas d'erreur sur ce point de la part du juge de première instance.
[144] Le procureur de l'appelant soumet également :
[132] Étant inconstitutionnelle (sic), les paragraphes 60 à 63 (ce qui inclut le paragraphe 63 auquel le juge fait référence dans le jugement du 28 août 2015) menant à cette conclusion n’ont pas force de loi au pays.
[145] C'est la même application que pour le paragraphe 53. Ce n'est pas parce que dans un paragraphe où on déclare une partie d'une loi inconstitutionnelle que les mots utilisés n'ont plus force de loi. C'est d'ailleurs très bien expliqué par le juge de première instance à son paragraphe 123 :
[123] Au paragraphe 53, la Cour mentionne que « la personne accusée doit non pas évoquer une simple possibilité de défaillance, mais plutôt soulever un doute réel sur le bon fonctionnement ou l'utilisation correcte de l'appareil ». Au paragraphe 59, la Cour fait référence à « un problème de fonctionnement suffisamment sérieux pour soulever un doute raisonnable » et au paragraphe 63 à « un vice de nature à mettre en doute la fiabilité des résultats ».
[146] Cet argument de l'appelant ne peut être retenu.
[147] Dans son exposé, le procureur de l'appelant souligne que la preuve était suffisante pour réfuter la présomption d'exactitude de 258 (1)c) C.cr.
[148] Il s'appuie sur le fait que les Normes et procédures recommandées[29] par la SCSJ - Comité des analyses d'alcool (D-14) recommandent une inspection annuelle des instruments approuvés tels que l'alcootest et le simulateur.
[149] Que la preuve a démontré que depuis quatre ans, l'alcootest n'avait subi aucune inspection, que depuis cinq ans le simulateur n'a pas été inspecté ni calibré en tenant compte des normes du fabricant et que la pile combustible n'a pas été changée durant la fréquence prévue par le fabricant.
[150] Ses deux experts de l'appelant, Robitaille et Kupferschmidt, ont insisté sur l'importance du respect des Normes, des normes du fabricant et des normes incluses dans les bonnes pratiques de laboratoire.
[151] Il s'appuie également sur le jugement Rodrigues[30].Dans un premier temps, contrairement aux prétentions de l'appelant, le juge Cournoyer ne parle pas de calibration, ne parle pas d'inspection. Il parle d'une bonne manutention de l'appareil, d'un bon entretien et que l'appareil soit manipulé par du personnel qualifié.
[152] La preuve révèle que chaque fois que les appareils sont envoyés à l'atelier de réparations, le technicien s'assure que l'appareil est en bon état de fonctionnement. Lorsqu'il vide la mémoire d'un alcootest, il procède également à une vérification de l'appareil afin de s'assurer de son bon fonctionnement avant de le retourner. Suivant cette procédure, il est inexact de prétendre que l'arrêt Rodrigues vient appuyer les prétentions de l'appelant.
[153] Pour rendre sa décision, le juge de première instance s'est basé, entre autres, sur les décisions de Lam[31], Rickett[32], Desjarlis[33] et Bartha[34]. Dans ces décisions ainsi que dans la présente, les juges ont conclu qu'il doit y avoir un lien entre le manque d'entretien et une possible défaillance de l'alcootest, ce que les experts de l'appelant n'ont pu établir.
[154] Le tribunal est d'accord avec le juge de première instance lorsqu'il écrit :
[146] Le tribunal souligne également avec justesse qu’il ne faut pas confondre l’inspection et l’entretien des alcootests. Le fait qu’un instrument n’est pas inspecté annuellement n’implique pas nécessairement qu’il est mal entretenu. C’est l’omission d’entretenir ou de réparer l’instrument lorsque cela est nécessaire qui risque d’avoir un impact sur son fonctionnement au moment des analyses sur le terrain.
[155] La Cour suprême dans St-Onge n'a jamais mentionné que les recommandations du Comité devaient être suivies pour que le résultat soit fiable. Il mentionne simplement :
Elles reconnaissent plutôt que les résultats ne seront faibles que dans la mesure où les appareils sont bien utilisés et bien entretenus, et que des défaillances peuvent survenir dans l'entretien ou le processus d'analyse. Ce que les nouvelles dispositions exigent, c'est que la preuve tendant à remettre en question la fiabilité des résultats porte directement sur de telles défaillances[35]
[156] L'arrêt St-Onge parle d'une preuve qui soulève un doute raisonnable quant aux défaillances liées à l'entretien des instruments ou l'utilisation incorrecte des appareils, et non pas d'inspection régulière.
[157] Dans l'arrêt St-Onge, La Cour suprême discute des normes recommandées par la SCSJ, la loi n'y fait pas référence, la Cour suprême ne l'a pas établi comme une obligation ou des recommandations à respecter. Les experts de l'appelant n'ont pas réussi à prouver au juge de première instance que si les recommandations ne sont pas suivies cela pourrait causer des résultats insatisfaisants.
[158] La même chose pour la pile combustible, le fabricant peut recommander que la pile soit changée toutes les années ou tous les deux ans. Lorsque les tests de contrôle sont faits et qu'ils sont exacts, comment peut-on prétendre qu'il y a défaillance?
[159] À titre d'exemple, lorsque le fabricant d'une balance recommande le changement de pile tous les deux ans. Si elle n'a pas été changée depuis cinq ans et que l'on procède à des pesées avec différents étalons de mesure et que la balance donne toujours la bonne lecture, comment peut-on prétendre que la pile n'est plus bonne et que la balance n'est plus exacte?
[160] Le juge de première instance a conclu avec raison que l'appelant n'a pas présenté une preuve qui soulevait un doute raisonnable quant aux défaillances liées à l'entretien des instruments dans l'utilisation incorrecte des instruments.
[161] Le juge de première instance a bien résumé la preuve. Il souligne qu'à l'époque il n'existait aucun programme structuré d'inspection des alcootests à la Sûreté du Québec. Ceux-ci étaient envoyés en réparation uniquement lorsqu'ils en avaient besoin. La mémoire de l'appareil qui peut contenir 1 022 tests était vidée lorsqu'elle était pleine. Il n'existait aucun registre d'entretien, digne de ce nom, permettant d'obtenir l'information complète sur les antécédents de l'appareil.
[162] Il souligne que la preuve a permis de constater des lacunes importantes dans le programme d'assurance qualité en place à la Sûreté du Québec. Les experts ont insisté sur la nécessité de ces inspections régulières.
[163] Dans son exposé, l'appelant revient encore sur la mémoire de l'alcootest. Il faut noter, comme mentionné précédemment, que ses experts n'ont pas réussi à démontrer qu'il aurait été d'une quelconque utilité d'avoir ces rapports pour vérifier la fiabilité de l'appareil.
[164] Il ne faut pas oublier, la mémoire ne comporte que les résultats des tests et le moment où les tests ont été faits :
· Il n'y a pas d'indication sur ce qui a pu se passer au moment où les tests ont été pris;
· Il n'y a pas d'indication sur la personne qui a subi le test;
· Il n'y a pas d'indication les raisons des tests erronés;
· -Il ne s'agit que d'un registre qui indique le moment où les tests sont passés et les résultats desdits tests.
[165] Par exemple, si le test est faussé parce qu'une personne a éructé dans les dix ou quinze minutes précédant le test, la mémoire n'en fait pas mention. Il est impossible à l'aide de ce registre de savoir pourquoi les tests ne sont pas valides. La seule indication est qu'on a un test qui est valide ou non, mais on n'a aucune indication permettant de savoir pour quelle raison le test était invalide.
[166] Comme autre moyen d'appel prévu au paragraphe 50.2.3[36] de son exposé, l'appelant soumet que le juge de première instance a commis une erreur en droit en déclarant non admissible la défense de type Carter.
[167] Le juge n'a pas admis la défense de type Carter puisque la première étape n'a pas été passée, c'est-à-dire qu'on n'a pas démontré une défaillance dans la manière d'opérer ou dans l'utilisation incorrecte ou le mauvais fonctionnement de l'alcootest.
[168] D'ailleurs dans l'arrêt St-Onge comme dans le jugement de première instance, la défense de type Carter ne subsiste que pour contrer la deuxième présomption d'identité prévue au paragraphe 258(1)d.01) C.cr. et écarte clairement toute possibilité d'avoir recours à la défense de type Carter. L'appelant n'a pas réussi à démontrer le mauvais fonctionnement et l'utilisation incorrecte de l'alcootest.
[169] Dans cette section, le procureur de l'appelant admet que la défense de type Carter n'est pas pour contrer les présomptions, mais bien d'ajouter aux défaillances démontrées par les experts.
[170] Comme le juge de première instance en est venu à la conclusion, avec raison encore une fois, que les experts de l'appelant n'ont pas réussi à prouver que le manque d'inspection et le non-suivi des normes du Comité SCSJ ont un lien avec la défaillance de l'appareil, la défense de type Carter n'est pas admissible.
[171] Finalement, comme dernier moyen d'appel[37], l'appelant soulève que le juge de première instance a commis une erreur en droit en renversant le fardeau de preuve obligeant l'appelant à démontrer qu'il avait éructé durant la période d'observation.
[172] Sur ce point, l'appelant prétend que le juge de première instance a mal rapporté la preuve à son paragraphe 182. Dans un premier temps, il est bon de souligner qu'un juge n'est pas obligé de rapporter en détail le témoignage de chacun. Ce qui est écrit au paragraphe 182 est exact, il n'a pas précisé que lorsque l'appelant a parlé avec son avocat, les policiers n'étaient pas présents, car cela coule de source.
[173] Ils ne pouvaient être présents puisque ces conversations sont confidentielles. La lecture de l'ensemble du jugement est claire sur ce point. Ici, le procureur de l'appelant a sorti un paragraphe de son contexte en ne tenant pas compte de l'ensemble du jugement.
[174] Le paragraphe 184[38] du jugement de première instance est clair. La preuve n'a révélé aucun fait pouvant laisser un doute que l'appelant aurait éructé avant le premier test. Il a témoigné et n'a jamais fait mention qu'il avait éructé, il n'a jamais fait mention qu'il avait consommé de l'alcool dans les quinze ou vingt dernières minutes avant le test.
[175] Le procureur de l'appelant affirme qu'il s'agit d'un fardeau additionnel. Sur ce point, le juge de première instance s'appuie sur un jugement de la Cour d'appel de l'Alberta[39], d'ailleurs il écrit :
[177] Bien que la période d’observation constitue une des mesures de contrôle de la qualité des analyses et qu’elle est destinée à prévenir les situations qui pourraient affecter la fiabilité du processus, elle ne fait pas partie des éléments que doit prouver la poursuite au terme de l’alinéa 258 (1)c). Les seules procédures opérationnelles que la poursuite doit prouver dans tous les cas sont celles énoncées aux sous-alinéas 258 (1)c)(ii), (iii) et (iv).
[176] C'est d'ailleurs les prétentions de la Cour d'appel dans la cause R. v. So :
[42] With respect to the appellant’s reliance on Bernshaw and Crosthwait for the proposition that manuals of the sort excerpted into evidence here are authoritative, we accept that in both of those cases such information was received into evidence. In each case the manual was accorded the weight considered due in the circumstances. In neither case, however, did the Court hold that such manuals are authoritative in the sense urged upon us by the appellant, that whatever such a manual says ought to be done or must be done or should not be done becomes mandatory before the Crown can rely on the presumptions. If that were so, the drafters of such manuals would be exercising the power our constitution bestowed exclusively on Parliament.
[177] En ce qui concerne le fardeau supplémentaire de preuve, la Cour d'appel de l'Alberta écrit également :
[43] The appellant also argued that requiring him to adduce evidence of something more (i.e., more than burping and no additional delay to allow any mouth alcohol which might have been generated by that burping to dissipate), effectively re- imposes the second struck requirement from section 258(1)(c). That constitutionally inapplicable requirement was “evidence tending to show
... that the improper operation resulted in the determination that the concentration of alcohol in the accused’s blood exceeded 80 mg of alcohol in 100 ml of blood”.
[44] We disagree. The appellant was required to adduce evidence to raise a reasonable doubt as to the proper operation of the instrument. This does not mean he was required to raise a reasonable doubt as to the effect of any such improper operation. To rebut the presumption the accused must raise a reasonable doubt about proper operation, not as to its effects. The requirement that there be evidence relating directly to some deficiency in operation that raises a reasonable doubt on the reliability of the results, in order for there to be “evidence tending to show” improper operation, does not require an accused to show the improper operation “resulted in” (using the words form the second struck requirement) the reported concentration exceeding .08.
[178] Encore une fois, les recommandations du fabricant ne font pas autorité de loi, ce n'est pas aux fabricants à créer la loi comme le dit la Cour d'appel de l'Alberta.
[179] Ces principes établis par la Cour d'appel de l'Alberta ont également été suivis dans différents dossiers à la Cour du Québec[40]. Mais le tribunal souligne qu'il y a des juges ont pris une position contraire. L'appelant n'est pas obligé de témoigner, mais s'il le fait et qu'il ne fait mention d'aucune réaction physiologique possible qui tende à démontrer une défaillance du test, il y a un problème. La certitude absolue est impossible.
[180] Lorsque la poursuite fait la preuve hors de tout doute raisonnable que l'accusé a un taux d'alcoolémie dépassant la limite permise, c'est à la défense de prouver la défaillance dans le résultat des tests en soulevant un doute raisonnable. Il ne s'agit donc pas d'un fardeau supplémentaire, mais d'un moyen de défense à la disposition de l'appelant. La période de quinze minutes n'est pas une obligation légale. D'ailleurs, comme l'a souligné l'intimée, le Code criminel prévoit que les tests doivent être effectués dès qu'il est matériellement possible de le faire.
[181] L'appelant n'a pas réussi à prouver une erreur en droit de la part du juge de première instance. Le tribunal le répète, il ne s'agit pas d'un fardeau supplémentaire, mais bien d'un moyen de défense que l'appelant pouvait utiliser.
[182] Depuis la décision rendue par le juge de première instance le 14 février 2014, la Cour d'appel de l'Ontario[41] s'est prononcée sur la divulgation de la preuve. C'est le juge David Watt qui a prononcé le jugement. Celui-ci reprend les principes qui doivent guider la divulgation de la preuve.
[183] Selon le juge Watt, les fruits de l'enquête sont limités à tout ce qui se rattache à l'accusé conformément à l'arrêt Stinchcombe[42]. Beaucoup de jugements ont élargi la portée des fruits de l'enquête en se basant sur l'arrêt Stinchcombe.
[184] Dans cet arrêt, on fait référence à la Royal Commission on Donald Marshall jr prosecution, qui a recommandé l'adoption d'un régime détaillé de communication de preuve que l'on retrouve à la page 337[43] de Stinchcombe. Cette liste se rapporte toujours à des documents ou des individus qui sont reliés à l'accusé pour l'infraction pour laquelle il est accusé. Cela vient renforcer la position de la Cour d'appel de l'Ontario voulant que les fruits de l'enquête soient limités à ce que produit l'enquête de l'infraction qu'on reproche à l'accusé.
[185] Le juge Watt souligne avec raison que la poursuite et la police sont deux entités distinctes et indépendantes. Il affirme que la nature et la portée des éléments de preuve qui peuvent être considérés comme pertinents n'ont pas été débattus dans l'arrêt St-Onge. À ce sujet, il écrit :
[93] In its normal, natural everyday sense the phrase "fruits of the investigation" posits a relationship between the subject-matter sought and the investigation that leads to the charges against an accused. It refers to information acquired by means and in consequence of that investigation. The information includes, but is not co-extensive with, evidence, much less admissible evidence.
[94] The disclosure/production sought in this case falls beyond the boundaries of "fruits of the investigation".
[95] In this case, a substantial component of the information sought consists of historical records of the operation of the same approved instrument during the investigation of others for similar offences. These records have no association with the offence with which the respondent was charged and for which he faced trial. The information was not created, produced or even located during the investigation of the respondent and his alleged offences. The records played no role in the acquisition of any evidence available for proffer in the prosecution of the respondent. Indeed, much of it originates in the investigation of others for offences they are alleged to have committed at times and in places unrelated to the investigation of the respondent.
[186] Il souligne avec raison que les documents demandés ne sont pas en possession du poursuivant. En effet, dans notre dossier, ces documents sont en possession soit de la Sûreté du Québec, soit du Laboratoire de la police scientifique. L'information qui est demandée par la défense, dans ce genre de dossiers au Québec, n'a pas été créée, produite ou même générée pendant l'enquête de l'accusé. Il ne s'agit donc pas des fruits de l'enquête.
[187] Ces documents sont l'historique de l'appareil qui inclut des données qui n'ont aucun rapport avec l'appelant.
[188] Le juge Watt souligne que l'arrêt St-Onge ne fait aucune référence à l'arrêt McNeil quant à la distinction entre les informations en la possession ou sous le contrôle du poursuivant[44]. Il prétend que le paragraphe 48 de l'arrêt St-Onge ne tient pas compte de la distinction qui est amenée au paragraphe 13[45] dans l'arrêt McNeil.
[189] Pour asseoir sa position, le juge Watt réfère également au paragraphe 78 de St-Onge[46] où la juge Deschamps fait référence à l'arrêt O'Connor concernant la non-divulgation.
[190] Le tribunal partage l'opinion de la Cour d'appel de l'Ontario sur ce sujet. Si les accusés ont besoin de documents pour appuyer leur défense, ces documents comme ceux demandés dans le présent dossier ne sont pas des fruits de l'enquête, ils doivent le faire conformément à l'arrêt O'Connor, tel que la juge Deschamps le mentionne dans son paragraphe 78.
[191] Dans le dossier de la Cour d'appel de l'Ontario, le juge Watt est arrivé à la conclusion que les documents demandés n'auraient pas dû être divulgués. Dans ce dossier, le tribunal n'avait pas à décider ce point.
[192] Dans son jugement, le juge Watt nous donne le post-scriptum suivant :
It is critical for the efficient operation of trial courts, especially those in which alcohol-driving offences occupy a prominent place on the docket, that they be able to control their process. This includes the authority to discourage unmeritorious third party records applications that devour limited resources. A principled approach to the issue, akin to that enacted in the current s. 278.3(4) of the Criminal Code, may be of some assistance to trial judges confronted with applications such as the present:
Any one or more of the following assertions by the accused are not sufficient on their own to establish that the record is likely relevant to the issue of whether the approved instrument was malfunctioning or was operated improperly, within the meaning of s. 258(1)(c)(iv) of the Code:
a) that the record exists;
b) that the record relates to the instrument used in the incident that is the subject-matter of the proceedings;
c) that the record relates to the qualified breath technician involved in the incident that is the subject-matter of the proceedings;
d) that the record may disclose a prior malfunctioning of the instrument; or
e) that the record may relate to the credibility of the operator of the instrument.
[193] Ces principes émis par le juge de la Cour d'appel de l'Ontario devraient être pris en considération par les juges de première instance qui ont à gérer ce genre de dossiers. L'appelant a droit à une défense pleine et entière, mais il y a des limites, les excursions de pêche ne sont pas permises.
[194] C'est d'ailleurs avec raison que le juge de première instance écrit dans son jugement sur la requête en divulgation :
[66] Le Tribunal doit cependant ajouter qu'il considère que dans la plupart des cas, l'obligation de la poursuite de divulguer les renseignements ou documents dont il est question dans la présente affaire ne sera déclenchée que sur demande spécifique de la défense.
[195] Il faut éviter de dépenser temps et argent à produire des copies de documents qui sont inutiles. C'est avec raison que le juge Watt limite les preuves à divulguer aux fruits de l'enquête.
[196] La Cour suprême[47] vient dernièrement de nous rappeler que nous avons des délais à respecter. Il faut arrêter ces requêtes qui vont dans tous les sens. Les accusés doivent démontrer la pertinence de ces documents pour leur défense pleine et entière tenant compte des principes émis dans le post-scriptum du juge Watt.
[197] Le passé nous a démontré que dans la majorité des dossiers, les documents demandés par les procureurs des accusés, à quelques exceptions près, n'ont été d'aucune utilité pour démontrer la défaillance de l'appareil ou sa mauvaise utilisation.
[198] Si les procureurs en défense veulent obtenir des renseignements, il faudra qu'ils puissent établir un doute réel que ces renseignements sont utiles pour démontrer une défaillance de l'appareil ou sa mauvaise utilisation et non pas une simple possibilité.
[199] En conclusion, les documents demandés et obtenus par l'appelant ne font pas partie des fruits de l'enquête. Ces documents ont été obtenus conformément au principe émis par l'arrêt O'Connor.
[200] La preuve de l'appelant concernant la mémoire n'a soulevé aucun doute réel que ce document pouvait démontrer la défaillance de l'appareil ou une mauvaise utilisation.
[201] Les experts de l'appelant n'ont soumis que des possibilités d'utilité de cette preuve.
[202] Comme l'a souligné le juge de première instance, les recommandations du Comité de la SCSJ n'ont pas force de loi, non plus que les normes du fabricant puisque le législateur ne les a pas intégrés au Code criminel. C'est pour cette raison que la preuve faite par les deux experts n'a pas réussie à créer un doute raisonnable, un doute réel contrairement à des possibilités, un doute raisonnable quant au fonctionnement de l'appareil et son utilisation.
[203] Avec raison, le juge de première instance a refusé l'admissibilité de la défense de type Carter puisqu'elle n'était pas admissible pour démontrer la défaillance de l'appareil ou la mauvaise utilisation.
[204] De plus, contrairement aux prétentions de l'accusé, le juge de première instance ne lui a pas imputé un fardeau supplémentaire en l'obligeant à prouver des réactions physiologiques qui auraient pu provoquer de mauvais résultats. Il s'agit plutôt d'un moyen de défense qui était à la disposition de l'accusé.
[205] Comme l'a dit la Cour d'appel de l'Alberta[48], si l'accusé voulait démontrer la défaillance de l'appareil, eu égard à des réactions physiologiques qu'il a eues, il se devait de témoigner pour en faire la preuve, ce qui n'a pas été fait. Il n'y a aucune preuve qui a été faite entre les réactions physiologiques d'un individu et ses conséquences sur le test qu'il a passé.
[206] Avec respect pour l'opinion contraire, l'appelant n'a pas réussi à démontrer une ou des erreurs commises par le juge de première instance. Son jugement est bien argumenté, il relate bien la preuve. Il est bien appuyé par la jurisprudence.
[207] PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[208] REJETTE l'appel.
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________________________________ RAYMOND W. PRONOVOST, J.C.S. |
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Me Yves Desaulniers Desaulniers, avocats Me Jean-Marc Fradette Fradette Le Bel, avocats |
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Procureurs de l'appelant |
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Me Gabriel Bervin et Me Justin Tremblay, avocats |
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Procureurs de l'intimée |
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Date d’audience : |
18 mai 2016 |
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ANNEXE 1
Pièces de l'intimée
P-1 Le rapport policier est déposé pour valoir témoignage des agents de la SQ, Joanie Gagné et Martin D’Amours[49], quitte à parfaire;
P-2 En liasse, le certificat du technicien qualifié, les deux rapports de transaction de l’alcootest et le certificat de l’analyste;[50]
P-3 Un plan de la ville de Rimouski;[51]
P-4 Registre d’utilisation de la solution d’alcool type.[52]
Témoins de l'intimée
1) L’agente de la SQ Joanie Gagné[53] (ci-après « Gagné »);
2) L’agent de la SQ Martin D’Amours[54] (ci-après « D’Amours »);
3) L’agent de la SQ, Sébastien Caron, technicien qualifié[55] (ci-après « Caron »);
4) En contre preuve, le toxicologue Dion.[56]
ANNEXE 2
Pièces de l'appelant
D-1 Les rapports Avis de défectuosités du simulateur et de l’alcootest;[57]
D-2 Du manuel du fabricant, le check list à utiliser lors d’une re certification de l’appareil RBT-IV ;[58]
D-3 Du manuel du fabricant, un extrait soit un appendice du document Alco-Sensor-IV recertification ticket ;[59]
D-4 Du manuel du fabricant, le technical manuel ;[60]
D-5 Du manuel du fabricant «Fuel Cell Technology Standard ;[61]
D-6 Un extrait du précis de cours de l’école de police qui s’intitule technicien qualifié en alcotest Alco-Sensor IV RBT-IV ;[62]
D-7 Le document de l’expert Kurt Dubowski intitulé Quality Assurance in Breath Alcohol Analysis[63] qui traite des précautions scientifiques nécessaires (necessary scientific safeguards) :
a) a pretest deprivation-observation period of at least 15 minutes
b) a blank test immediately preceding each breath specimen collection test;
c) analysis of at least two separate consecutive breath specimens
d) an appropriate control test accompanying every subject test;
D-9 Un document intitulé Bonjour la Sûreté du Québec [64] qui émane du distributeur Davtech. Ce document de référence est utilisé pour la formation des utilisateurs du simulateur Guth et pour l’entretien de ce simulateur;
D-10 Un document de l’École nationale de police intitulé Alco-Sensor IV RBT-IV le technicien qualifié en alcotest, le protocole d’utilisation;[65]
D-11 Un rapport d’expert de type Carter qui établit le taux de l’appelant à 18 mg d’alcool par 100 ml de sang lors de son interception[66];
D-12 Un document intitulé disclosure requirements when scientific results are used in support of litigation,[67] du toxicologue judiciaire Gerald Kupferschmidt (ci-après « Kupferschmidt »);
D-13 Un article de Kupferschmidt du 18 mars 2013;[68]
D-14 Une lettre à l’éditeur de Kupferschmidt;[69]
D-15 Le ATC’s position paper;[70] (l’énoncé du Comité des analyses d’alcool);
D-16 La réponse lettre à l’éditeur de Kupferschmidt;[71]
D-17 Methods for breath analysis, chap.7; [72]
D-18 Quality assurance in breath alcohol analysis;[73]
D-19 Recommended standards procedures;[74] (Normes et procédures de la Société canadienne des sciences judiciaires)
Témoins de l'appelant
1- Le toxicologue Robitaille
2- L'appelant
3- Le toxicologue Kupferschmidt
- la facture d'achat de l'alcootest du 29-01-11;
- les résultats des tests d'alcoolémie en mémoire dans l'appareil pour la séquence des 1022 tests entrepris;
- le registre d'entretien de l'alcootest du 29-01-11, notamment les pièces remplacées et autres réparations;
- les chapitres ou documents qui émanent du guide du fabricant de l'alcootest du 29-01-11 concernant les règles à suivre en matière d'entretien ou réparation de cet alcootest;
- les résultats des inspections périodiques, le cas échéant, concernant l'alcootest du 29-01-11;
- les rapports de défectuosité, le cas échéant, de l'alcootest du 29-01-11;
- la dernière vérification du volume d'air minimum prélevé par l'alcootest du 29-01-11;
- le registre d'étalonnage de l'alcootest du 29-01-11 pour la calibration en 3 points;
- les fiches imprimées des résultats de la dernière calibration en 3 points de l'alcootest du 29-01-11;
- la date d'achat du simulateur du 29-01-11;
- la facture d'achat du simulateur du 29-01-11;
- le registre d'entretien et d'étalonnage du simulateur du 29-01-11;
- la liste des aspects techniques à vérifier lors des inspections;
- le dernier étalonnage du simulateur du 29-01-11 à l'aide d'un thermomètre de calibration (NIST reference thermometer);
- les chapitres ou documents qui émanent du guide du fabricant du simulateur du 29-01-11 concernant les règles à suivre en matière d'entretien ou réparation de ce simulateur;
- les chapitres ou documents qui émanent du guide du fabricant de l'alcootest du 29-01-11 concernant le changement de la pile à combustible;
- les résultats des analyses du lot 71CE de l'alcool type du Laboratoire Atlas;
- la date où le technicien qualifié a obtenu son titre;
- la formation suivie, c'est-à-dire, les éléments qui constituent le cours lui permettant d'être technicien qualifié;
- une copie de la carte attestant que le technicien qualifié dans le présent dossier possède ce titre et que sa qualification est toujours valide.
ANNEXE 4
[traduction] 2(1) Avant d'être appelé à choisir le mode de procès ou de répondre à une accusation d'acte criminel, selon la première ces éventualités, et par la suite, l'accusé, sans avoir à en faire la demande, a le droit:
a) de recevoir copie de son casier judiciaire;
b) de recevoir copie de toute déclaration qu'il a pu faire à une personne en autorité et qui a été consignée par écrit, ou d'examiner cette déclaration si elle a été enregistrée sur support électronique; d'être informé de la nature et du contenu de toute déclaration orale qu'il aurait faite à une personne en autorité et de recevoir la communication de toute note de service y relative;
c) d'examiner tout ce que la poursuite se propose de produire comme pièce et, autant que faire se peut, d'en recevoir des copies;
d) de recevoir copie de toute déclaration, consignée par écrit, faite par une personne que la poursuite se propose de citer comme témoin ou qui pourra être citée comme témoin, ou de recevoir, en l'absence d'une déclaration, un résumé écrit de la déposition prévue du témoin envisagé ou du témoin éventuel;
e) de recevoir tout autre document ou renseignement dont le ministère public connaît l'existence et qui tend à atténuer ou à écarter la culpabilité du défendeur relativement à l'infraction reprochée, ou qui tendrait à faire diminuer sa peine, même si le ministère public n'a pas l'intention de produire en preuve ces documents ou renseignements;
f) d'examiner l'enregistrement sur support électronique de toute déclaration faite par une personne que la poursuite se propose de citer comme témoin;
g) de recevoir copie du casier judiciaire de toute personne qu'on se propose de citer comme témoin; et
h) de recevoir, pourvu que la loi n'interdise pas la divulgation de ces renseignements, la communication des nom et adresse de toute autre personne pouvant détenir des renseignements utiles à l'accusé, ou d'autres détails permettant d'identifier cette personne.
[1] [2012] 3 R.C.S. 187, ci-après appelé « St-Onge »
[2] [2014] QCCQ1000, ci-après appelé « Anctil »
[3] Ci-après appelée « SCSJ »
[4] R. c. O'Connor [1995] 4 R.C.S. 411.
[5] Chapdelaine c. R. [2011] QCCQ1300.
[6] [48] L’exigence comporte un avantage évident — quoique limité — pour la poursuite. En effet, la preuve contraire est limitée à la question qui est réellement en litige, soit la fiabilité des résultats des analyses. Les moyens de preuve portent directement sur un appareil qui relève de la poursuite. Celle-ci devra certes donner accès à certaines informations concernant l’entretien et la manipulation de l’appareil, mais elle est libre d’instaurer des procédures qui permettent de retracer la façon dont les appareils sont entretenus et utilisés. De plus, les personnes qui entretiennent et utilisent les appareils relèvent également de la poursuite.
[7] [2013] O.J. no. 6406.
[8] R. v. Lam [2015] OSC 2194.
[9] R. v. Rickett 2015 ONCS 1890.
[10] R. v. Desjarlis 2015 ONCJ 137 et R. v. Bartha 2015 ONCJ 207.
[11] R. c. So, [2014] ABCA 451.
[12] R. c. Couture, CQ no 200-01-128833-088 (27 avril 2015) R. c. Paquet, 2015 QCCQ 3404 et R. c. Martial Dallaire 2015 QCCQ 5227.
[13] [1997] I R.C.S. 80.
[14] 2015 QCCS 1395
[15] [2015] ONCA 832.
[16] R. c. Paradis et Awashish 2016 QCCS 115.
[17] 2009 1R.C.S. 66.
[18] R. c. Stinchcombe 1991 3R.C.S. 326.
[19] Précité, voir note no. 4.
[20] Précité, voir note no. 17.
[21] « 50.1 Le juge a commis une erreur de droit lorsque, dans sa décision du 14 février 2014, il refuse d’ordonner à l’intimée la divulgation de la mémoire de l’appareil privant ainsi l’appelant d’une défense pleine et entière. Ce faisant, le juge a privé l’appelant d’un moyen de défense afin de soulever un doute raisonnable quant à la mauvaise utilisation des instruments approuvés utilisés. »
[22] Précité, voir note no. 13.
[23] Précité, voir no no.14.
[24] « [79] Monsieur Robitaille explique que les informations contenues dans la mémoire permettraient de vérifier si l'appareil a produit dans le passé des résultats hors normes qui pourraient indiquer son mauvais fonctionnement. Il ajoute toutefois que l'opération de transfert du contenu de la mémoire interne de l'appareil vers un ordinateur ne peut être effectuée qu'à l'atelier de réparations de la Sûreté du Québec par un technicien formé à cette fin. » (Soulignement du soussigné)
[25] Audition du 6 novembre 2013, partie 1 Robitaille. p. 129-130.
[26] Audition du 6 nov. 2013 partie 2, Robitaille, p.439.
[27] 50.2 Le juge a commis une erreur de droit lorsque, dans son jugement du 28 août 2015, il conclut que l’appelant n’a pas réussi à neutraliser les présomptions telles que précisées par la majorité dans l’arrêt R. c. St-Onge Lamoureux, [2012] 3 R.C.S. 187 (ci-après « St-Onge ») :
[28] 50.2.1 Le juge a commis une erreur de droit lorsqu’il exige un lien entre le défaut d’entretien des instruments approuvés utilisés et les résultats de l’alcootest reprochés à l’appelant et ce, à l'encontre des principes de la majorité dans St-Onge.
50.2.2 Le juge a commis une erreur de droit quant au fardeau de preuve de l’appelant. En effet, le juge se fonde sur des passages de St-Onge (par. 52 et suivants), passages qui ont été rejetés par la majorité dans cet arrêt (par. 59), (par.63).
50.2.2.1 Plus spécifiquement, le juge a commis une erreur de droit en exigeant à l’appelant non pas de soulever un doute raisonnable, mais un doute réel fardeau de preuve qui a été rejeté par la majorité dans St-Onge.
[29] Ci-après appelées « Normes ».
[30] Précité, voir no no.14
[31] Précité, voir note no 8.
[32] Précité, voir no no 9.
[33] Précité, voir note no 10.
[34] Id.
[35] St-Onge, par. 41.
[36] « 50.2.3 Le juge a commis une erreur de droit lorsqu’il déclare non admissible la défense de type Carter malgré une preuve de mauvais entretien des appareils approuvés »
[37] « 50.2.4 Le juge a commis une erreur de droit en créant un renversement de fardeau de preuve. Constitue une erreur de droit d’imposer à l’appelant de démontrer que l’étape de l’observation n’a pas été respectée alors que ce fardeau de preuve est dévolu au ministère public (par. 25 St-Onge).
[38] « [184] Rien dans la preuve de la poursuite ou dans le témoignage de l’accusé ne permet de soupçonner que ce dernier a consommé de l’alcool après son arrestation ou qu’il a eu des réactions physiologiques telles que des éructations ou des régurgitations avant les alcootests.
[39] Précité, voir note no. 11.
[40] R. c. Paquet [2015] QCCQ 3404, R. c. Couture 200-01-128833-088 (27 avril 2015) R. c. Dallaire [2015] QCCQ 5227, R. c. Boulay [2016] QCCQ 171.
[41] R. c. Jackson [2015] OJ No. 6274.
[42] Précité, voir note no. 18.
[43] [traduction] 2(1) Avant d'être appelé à choisir le mode de procès ou de répondre à une accusation d'acte criminel, selon la première ces éventualités, et par la suite, l'accusé, sans avoir à en faire la demande, a le droit:
a) de recevoir copie de son casier judiciaire;
b) de recevoir copie de toute déclaration qu'il a pu faire à une personne en autorité et qui a été consignée par écrit, ou d'examiner cette déclaration si elle a été enregistrée sur support électronique; d'être informé de la nature et du contenu de toute déclaration orale qu'il aurait faite à une personne en autorité et de recevoir la communication de toute note de service y relative;
c) d'examiner tout ce que la poursuite se propose de produire comme pièce et, autant que faire se peut, d'en recevoir des copies;
d) de recevoir copie de toute déclaration, consignée par écrit, faite par une personne que la poursuite se propose de citer comme témoin ou qui pourra être citée comme témoin, ou de recevoir, en l'absence d'une déclaration, un résumé écrit de la déposition prévue du témoin envisagé ou du témoin éventuel;
e) de recevoir tout autre document ou renseignement dont le ministère public connaît l'existence et qui tend à atténuer ou à écarter la culpabilité du défendeur relativement à l'infraction reprochée, ou qui tendrait à faire diminuer sa peine, même si le ministère public n'a pas l'intention de produire en preuve ces documents ou renseignements;
f) d'examiner l'enregistrement sur support électronique de toute déclaration faite par une personne que la poursuite se propose de citer comme témoin;
g) de recevoir copie du casier judiciaire de toute personne qu'on se propose de citer comme témoin; et
h) de recevoir, pourvu que la loi n'interdise pas la divulgation de ces renseignements, la communication des nom et adresse de toute autre personne pouvant détenir des renseignements utiles à l'accusé, ou d'autres détails permettant d'identifier cette personne
[44] Précité voir note no 33, par. 101.
[45] « [13] Troisièmement, dans la mesure où les conditions clés de l’ordonnance de production rendue par le tribunal de juridiction inférieure peuvent laisser croire que les dossiers détenus par une entité étatique sont réputés être en la possession d’une autre entité de ce type, cette interprétation doit être écartée. L’idée que toutes les autorités de l’État constituent une entité unique et indivisible pour les besoins de la communication n’est aucunement appuyée en droit et est, en outre, inapplicable en pratique. Par conséquent, les entités étatiques autres que le poursuivant — c’est-à-dire celui qui, parmi les entités du ministère public, est en train de poursuivre l’accusé — sont des tiers selon le régime de production établi dans O’Connor. Cependant, comme je l’exposerai plus loin, cette réalité ne libère pas le poursuivant de son obligation de se renseigner suffisamment auprès des autres entités étatiques et d’autres tiers, dans les cas appropriés, à propos des dossiers et des renseignements qu’ils détiennent et qui peuvent être utiles pour l’affaire en cours d’instance. Dans une instance criminelle, le ministère public et la défense n’ont pas d’intérêts divergents quant à la découverte de renseignements pertinents pouvant être avantageux pour l’accusé. »
[46] « [78] Bien que le législateur exige maintenant une preuve tendant à établir une défaillance dans le fonctionnement ou l’utilisation de l’appareil, cela ne limite pas pour autant les éléments qui peuvent être raisonnablement utilisés par la personne accusée pour soulever un doute sur ces aspects. En effet, les personnes accusées peuvent demander communication des éléments pertinents qui sont raisonnablement disponibles pour leur permettre de faire valoir une défense réelle. En cas de refus, la personne accusée peut invoquer les règles régissant la communication de la preuve ainsi que les réparations qui peuvent être accordées à cet égard (voir R. c. O’Connor, [1995] 4 R.C.S. 411). Bref, la personne accusée pourrait par exemple soit se fonder sur des relevés d’entretien de l’appareil révélant que celui-ci n’a pas été entretenu correctement ou sur des admissions du technicien concernant l’obtention de résultats erratiques, soit faire valoir des problèmes de santé ayant un effet sur le fonctionnement de l’appareil (voir R. c. Kasim, 2011 ABCA 336, 515 A.R. 254).»
[47] R. c. Williamson 2016 CSC 28 et R. c. Jordan CSC 27
[48] R. c. SO précité
[49] P-1, admission de l’appelant, n.s. du 8 juillet 2014, pp. 6 et 7 et n.s. du 8 juillet 2014, pp. 172 à 176.
[50] P-2, n.s. du 8 juillet 2014, pp. 7 et 8.
[51] P-3, n.s. du 8 juillet 2014, pp.18 et 19.
[52] P-4, n.s. du 9 juillet 2014, pp.19 et 20.
[53] N.s. du 8 juillet 2014, pp. 9 à 65.
[54] N.s. du 8 juillet 2014, pp. 67 à 105.
[55] N.s. du 9 juillet 2014, pp. 3 à 98.
[56] N.s. des 23, pp.2 à 361 et 26 janvier 2015, pp.2 à 109.
[57] D-1.
[58] D-2, n.s. du 7 juillet 2014, pp.19 et 20.
[59] D-3, n.s. du 7 juillet 2014, p.25.
[60] D-4, n.s. du 7 juillet 2014, p.26.
[61] D-5, n.s. du 7 juillet 2014, p.49.
[62] D-6, n.s. du 7 juillet 2014, pp.51 à 53.
[63] D-7, n.s. du 7 juillet 2014, p.57.
[64] D-8, n.s. du 7 juillet 2014, pp.65 et 66.
[65] D-9, n.s. du 9 juillet 2014, pp.67 et 74.
[66] D-10, n.s. du 9 juillet 2014, pp.157 à 159.
[67] D-11, n.s. du 13 novembre 2014, p.23.
[68] D-12, n.s. du 13 novembre 2014, pp.28 et 29.
[69] D-13, n.s. du 13 novembre 2014, pp.30 et 31.
[70] D-14, n.s. du 13 novembre 2014, pp.33 et 34.
[71] D-15, n.s. du 13 novembre 2014, pp.33 et 34.
[72] D-16, n.s. du 13 novembre 2014, pp.112 à 115.
[73] D-17, n.s. du 13 novembre 2014, p.121.
[74] D-18, n.s. du 13 novembre 2014, pp.172 et 173.
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