Sablière Guillaume Thibault inc. c. Ville de Saint-Raymond | 2025 QCCS 603 | ||
COUR SUPÉRIEURE
| |||
CANADA | |||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||
DISTRICT DE QUÉBEC | |||
No : |
200-17-036052-249 | ||
| |||
DATE : | 4 mars 2025 | ||
______________________________________________________________________ | |||
| |||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L’HONORABLE bernard godbout, J.C.S. | |||
______________________________________________________________________ | |||
| |||
SABLIÈRE GUILLAUME THIBAULT INC. | |||
Demanderesse | |||
c. | |||
VILLE DE SAINT-RAYMOND | |||
et | |||
MUNICIPALITÉ RÉGIONALE DE COMTÉ DE PORTNEUF | |||
Défenderesses | |||
et | |||
PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC | |||
Mis en cause | |||
______________________________________________________________________ | |||
| |||
JUGEMENT SUR UNE DEMANDE DE POURVOI EN CONTRÔLE JUDICIAIRE et en jugement déclaratoire | |||
______________________________________________________________________ | |||
| |||
L’article 8.5.2 du Plan d’urbanisme de la Ville;
L’interdiction des activités d’extraction pour la Zone RU-12 prévue à l’Annexe I-A du Règlement de zonage de la Ville, zone dans laquelle sont situés les terrains concernés;
Les articles 3.4 du Document complémentaire et 7.3.6.3 du Chapitre 7 du Schéma d’aménagement et de développement de la défenderesse, Municipalité régionale de comté de Portneuf (ci-après « la MRC »), qui, par leur application, interdisent une telle activité;
au motif que ces dispositions ont le même objet que le Règlement sur les carrières et sablières[2] adopté en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement[3], lequel a préséance.
Prenez note que le présent accusé de réception ne vous dispense pas de vous conformer à toute autre obligation environnementale prévue par la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) ou par l’un de ses règlements, ni de vous conformer aux obligations légales prévues par toute autre loi ou par tout autre règlement fédéral, provincial ou municipal.[12]
Le projet, tel qu’actuellement envisagé, nécessiterait un agrandissement de la zone EX-5 au plan de zonage de la Ville, et cet agrandissement se trouverait à empiéter dans l’aire de protection de l’ouvrage de captage des eaux souterraines de la Ville de Saint-Basile.
Nous vous rappelons d’emblée que la Ville de Saint-Raymond a l’entière discrétion de modifier, ou pas, sa réglementation d’urbanisme, et que même si une demande est formulée en ce sens, il appartient au conseil de la Ville de décider de l’opportunité d’entreprendre un processus de modification réglementaire.
[…]
En effet, comme vous le savez, une modification réglementaire de l’ordre de celle qui serait ici requise devrait, en fin de processus, être jugée conforme par le conseil de la MRC, à défaut de quoi la modification réglementaire ne peut entrer en vigueur. Or, selon les vérifications qui ont été faites, l’obtention d’un certificat de conformité serait ici improbable.
En effet, le document complémentaire au schéma de la MRC prévoit spécifiquement, à sa section 3.4, que « lorsque l’aire d’alimentation ou les aires de protection (bactériologiques et virologiques) déterminées à l’endroit de tels ouvrages de captage sont situées en tout ou en partie sur le territoire d’une autre municipalité, cette dernière devra identifier ces aires d’alimentation et de protection à l’intérieur de son plan d’urbanisme et de son règlement de zonage et y interdire les usages énumérés ci-dessus [notamment l’exploitation de carrières et de sablières], à moins de circonstances particulières rendant problématique l’application de telles interdictions et de justifications appropriées au plan d’urbanisme de la municipalité ».
Cette disposition vise principalement à assurer la protection des ressources aquifères qui alimentent les réseaux d’aqueduc municipaux. Cette obligation est importante d’autant plus que les aires d’alimentation et de protection de la prise d’eau potable de la Ville de Saint-Basile sont identifiées au schéma comme présentant un indice de vulnérabilité élevé.
[…]
Nous sommes d’avis qu’il ne serait pas ici possible d’invoquer des circonstances particulières et des justifications appropriées et suffisamment étoffées pour être conformes au schéma, d’autant plus que votre cliente a la possibilité d’étendre ses activités sur d’autres immeubles qui lui appartiennent et qui sont déjà situés dans la zone EX-5.
[…] Ainsi, pour les motifs qui précèdent, la Ville n’entreprendra donc pas un tel processus de modification réglementaire ayant pour objet de modifier les limites de la zone EX-5.[14]
113. Le conseil d’une municipalité peut adopter un règlement de zonage pour l’ensemble ou partie de son territoire.
Ce règlement peut contenir des dispositions portant sur un ou plusieurs des objets suivants:
1o pour fins de réglementation, classifier les constructions et les usages et, selon un plan qui fait partie intégrante du règlement, diviser le territoire de la municipalité en zones;
[…]
3o spécifier, pour chaque zone, les constructions ou les usages qui sont autorisés et ceux qui sont prohibés, y compris les usages et édifices publics;
[…]
12o régir ou restreindre, par zone, l’excavation du sol, le déplacement d’humus, la plantation et l’abattage d’arbres et tous travaux de déblai ou de remblai; obliger tout propriétaire à garnir son terrain de gazon, d’arbustes ou d’arbres; […]
23o prescrire toute autre mesure complémentaire destinée à répartir les divers usages, activités, constructions et ouvrages sur son territoire et à les soumettre à des normes, une telle mesure ne pouvant toutefois avoir pour effet de restreindre les activités agricoles au sens de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles dans une zone agricole établie en vertu de cette loi. […]
[Soulignement ajouté]
118.3.3 Tout règlement pris en vertu de la présente loi prévaut sur tout règlement municipal portant sur le même objet, à moins que le règlement municipal ne soit approuvé par le ministre, auquel cas ce dernier prévaut dans la mesure que détermine le ministre. Avis de cette approbation est publié sans délai à la Gazette officielle du Québec. Le présent alinéa s’applique malgré l’article
Le ministre peut modifier ou révoquer une approbation délivrée en vertu du premier alinéa dans le cas où le gouvernement adopte un nouveau règlement relativement à une matière visée dans un règlement municipal déjà approuvé.
Avis de cette décision du ministre est publié sans délai à la Gazette officielle du Québec. […]
[Soulignement ajouté]
14. Une carrière ou une sablière ne doit pas être située:
1° dans les aires de protection immédiate d’un prélèvement d’eau souterraine de catégorie 1 au sens du Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (chapitre Q-2, r. 35.2);
2° dans les aires de protection intermédiaire ou éloignée d’un prélèvement d’eau souterraine de catégorie 1 au sens de ce règlement;
3° dans les aires de protection immédiate et intermédiaire d’un prélèvement d’eau de surface de catégorie 1 au sens de ce règlement.
Le paragraphe 2 du premier alinéa s’applique à compter du 1er avril 2021, sauf :
1° à une carrière ou une sablière qui, à cette date, est déjà située dans l’une des aires de protection visées à ce paragraphe;
2° à une carrière ou une sablière qui est située dans l’une des aires de protection visées à ce paragraphe suite à un agrandissement, après cette date, sur un terrain qui appartenait, avant cette même date, au propriétaire de cette carrière ou de cette sablière si celle-ci était déjà située dans cette aire.
Le paragraphe 3 du premier alinéa ne s’applique pas à une carrière ou une sablière qui est située dans l’une des aires visées à ce paragraphe le 18 avril 2019.
[Soulignements ajoutés]
54. Une aire de protection immédiate est délimitée pour tout prélèvement d’eau souterraine. Les limites d’une telle aire sont fixées aux distances suivantes:
1° 30 m du site de prélèvement d’eau de catégorie 1 ou 2, à moins qu’un professionnel ne les détermine après avoir attesté, dans une étude hydrogéologique, l’une ou l’autre des situations suivantes:
a) la présence d’une formation géologique superficielle peu perméable assure une protection naturelle des eaux souterraines;
b) une configuration de terrain ou une infrastructure à proximité assure la protection de la qualité des eaux souterraines au regard d’incidents ou d’activités pouvant se produire au sein de l’aire visée;
c) l’exercice des activités humaines dans un rayon de 30 m du site de prélèvement ne peut affecter de manière significative la qualité des eaux souterraines;
2° 3 m du site de prélèvement d’eau de catégorie 3.
[…]
57. Une aire de protection intermédiaire est délimitée pour tout prélèvement d’eau souterraine. Les limites d’une telle aire sont fixées de la manière suivante:
1° pour un prélèvement d’eau de catégorie 1, les limites sont déterminées par un professionnel qui vérifie, à l’aide de données recueillies dans un minimum de 3 puits aménagés au sein de l’aquifère exploité par le prélèvement d’eau et pouvant être utilisés à des fins d’observation des eaux souterraines, le temps de migration de l’eau souterraine:
a) s’il s’agit d’assurer sa protection bactériologique, sur une période de 200 jours;
b) s’il s’agit d’assurer sa protection virologique, sur une période de 550 jours;
2° pour un prélèvement d’eau de catégorie 2, les limites sont fixées aux distances suivantes, sauf si elles sont déterminées conformément au paragraphe 1:
a) s’il s’agit d’assurer sa protection bactériologique, 100 m du site de prélèvement;
b) s’il s’agit d’assurer sa protection virologique, 200 m du site de prélèvement;
3° pour un prélèvement d’eau de catégorie 3, les limites sont fixées aux distances suivantes, sauf si elles sont déterminées conformément au paragraphe 1:
a) s’il s’agit d’assurer sa protection bactériologique, 30 m du site de prélèvement;
b) s’il s’agit d’assurer sa protection virologique, 100 m du site de prélèvement.
Le responsable du prélèvement d’eau de catégories 1 ou 2 doit transmettre un avis écrit au domicile de chacune des propriétés incluses dans les aires de protection intermédiaire informant leurs propriétaires ou leurs occupants de la présence du site de prélèvement dans leur voisinage.
[Soulignements ajoutés]
Étant donné la nouvelle réglementation effective le 1 avril dernier sur les Carrières et Sablières, je désire obtenir l’autorisation d’exploiter la totalité des trois lots suivants # 3 119 874, 3 119 873, 3 119 875. En effet, la nouvelle réglementation stipule que nous pouvons maintenant exploiter au-dessus de l’aire de protection des eaux.[28]
14. Une carrière ou une sablière ne doit pas être située :
[…]
2° dans les aires de protection intermédiaire ou éloignée d’un prélèvement d’eau souterraine de catégorie 1 au sens de ce règlement;
[…]
Le paragraphe 2 du premier alinéa s’applique à compter du 1er avril 2021, sauf :
[…]
2° à une carrière ou une sablière qui est située dans l’une des aires de protection visées à ce paragraphe suite à un agrandissement, après cette date, sur un terrain qui appartenait, avant cette même date, au propriétaire de cette carrière ou de cette sablière si celle-ci était déjà située dans cette aire.
[Soulignements ajoutés]
Ce règlement peut contenir des dispositions portant sur un ou plusieurs des objets suivants :
[…]
3o spécifier, pour chaque zone, les constructions ou les usages qui sont autorisés et ceux qui sont prohibés […];
[Soulignement ajouté]
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
| ||
|
bernard godbout, j.c.s. | |
| ||
Me Guillaume Crête Me Sébastien Laprise | ||
LANGLOIS AVOCATS | ||
Avocats de la demanderesse | ||
| ||
Me Olivier Arseneau | ||
TREMBLAY BOIS MIGNAULT LEMAY | ||
Avocats de la défenderesse Ville de Saint-Raymond | ||
| ||
Me Martin Bouffard | ||
MORENCY SOCIÉTÉ D’AVOCATS | ||
Avocats de la défenderesse Municipalité régionale de comté de Portneuf | ||
| ||
Me Gabrielle Ferland-Gagnon | ||
MINISTÈRE DE LA JUSTICE DU QUÉBEC | ||
Avocats du mis en cause Procureur général du Québec | ||
| ||
Dates d’audience : | 19 et 20 novembre 2024 | |
[1] Pièce P-14 : Lettre de Me Marc André Beaudoin adressée à Me Guillaume Crête dont l’objet est : Demande de modification réglementaire concernant la Zone EX-5, du 18 mars 2024, p. 3.
[2] Règlement sur les carrières et sablières, RLRQ c Q-2, r 7.1.
[3] Loi sur la qualité de l'environnement, RLRQ c Q-2.
[4] Conclusions du Pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire du 7 novembre 2024, p. 11.
[5] Art.
Art.
Art. 529, al. 1(2)(3) C.p.c.: La Cour supérieure saisie d’un pourvoi en contrôle judiciaire peut, selon l’objet du pourvoi, prononcer l’une ou l’autre des conclusions suivantes:
2° évoquer, à la demande d’une partie, une affaire pendante devant une juridiction ou réviser ou annuler le jugement rendu par une telle juridiction ou une décision prise par un organisme ou une personne qui relève de la compétence du Parlement du Québec si la juridiction, l’organisme ou la personne a agi sans compétence ou l’a excédée ou si la procédure suivie est entachée de quelque irrégularité grave;
3° enjoindre à une personne qui occupe une fonction au sein d’un organisme public, d’une personne morale, d’une société ou d’une association ou d’un autre groupement sans personnalité juridique d’accomplir un acte auquel la loi l’oblige s’il n’est pas de nature purement privée;
[6] Pièce P-22 : Extrait de l’Annexe I-A du Règlement de zonage de la Ville de Saint-Raymond – Grille des spécifications.
[7] Id.
[8] Pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire, par. 19; pièces P-9 et DSR-3.
[9] Id., par. 20, pièce P-10.
[10] Pièce P-4 : Courriel de M. Guillaume Thibault à Mme Célia Solinas le 6 mai 2021.
[11] Pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire, par. 21, pièce P-11.
[12] Pièce P-12.
[13] Pièce P-13 : Courriel de Mme Sabrina Trudel, coordonnatrice à l’urbanisme, à M. Guillaume Thibault le 4 avril 2023.
[14] Pièce P-14.
[15] Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, RLRQ c A-19.1.
[16] Plan d’argumentation de la demanderesse du 19 novembre 2024, par. 9.
[17] Id., par. 40.
[18] Id., par. 40.3.
[19] Id., par. 41.
[20] Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection, RLRQ, c. Q-2, r. 35.2.
[21] Plan d’argumentation de la défenderesse, Ville de Saint-Raymond, du 18 novembre 2024, par. 12.
[22] Id., par. 74.
[23] Id., par. 78.
[24] Plan de plaidoirie de la défenderesse, Municipalité Régionale de Comté de Portneuf, du 19 novembre 2024, p. 2
[25] Id., p. 3.
[26] Plan d’argumentation du Procureur général du Québec du 19 novembre 2024.
[27] Pièce 23 : Interrogatoire au préalable de Mme Célia Solinas, le 29 octobre 2024, p. 7.
[28] Pièce P-4.
[29] Pièce P-22.
[30] Pièce P-4.
[31] Pièce P14.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.