R. c. St-Jean | 2025 QCCA 178 | ||||
COUR D’APPEL | |||||
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CANADA | |||||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||||
SIÈGE DE
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N° : | 500-10-007363-201, 500-10-007367-202, 500-10-007368-200 | ||||
(500-01-170772-187 SÉQ. 001 et 002) | |||||
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DATE : | 14 février 2025 | ||||
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N° : 500-10-007363-201 | |||||
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SA MAJESTÉ LE ROI | |||||
APPELANT – poursuivant | |||||
c. | |||||
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WILLY JUNIOR ST-JEAN | |||||
INTIMÉ – accusé | |||||
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N° : 500-10-007367-202 | |||||
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SA MAJESTÉ LE ROI | |||||
APPELANT – poursuivant | |||||
c. | |||||
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DUCAKIS FRANÇOIS | |||||
INTIMÉ – accuse | |||||
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N° : 500-10-007368-200 | |||||
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WILLY JUNIOR ST-JEAN | |||||
APPELANT – accuse | |||||
c. | |||||
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SA MAJESTÉ LE ROI | |||||
INTIMÉ – poursuivant | |||||
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| ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A. |
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| PATRICK HEALY, J.C.A. |
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| GUY COURNOYER, J.C.A. |
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Me Gabriel Bérubé-Bouchard | |
GABRIEL BÉRUBÉ-BOUCHARD, AVOCAT | |
Pour Willy Junior St-Jean | |
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Ducakis François | |
Non représenté | |
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Me Pierre-Olivier Bolduc | |
Me Marianna Ferraro | |
DIRECTEUR DES POURSUITES CRIMINELLES ET PÉNALES | |
Pour Sa Majesté le Roi | |
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Dates d’audience : | 9 avril 2024 et 6 septembre 2024 |
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MOTIFS DU JUGE COURNOYER |
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Les appels du poursuivant
L’appel de M. St-Jean
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[2] Le ministère public a clos sa preuve et les requérants demandent au Tribunal de dessaisir le jury de l’affaire en entier et de prononcer des verdicts d’acquittement. Résumée à sa plus simple expression, la prétention des requérants est qu’il ne s’agit pas d’une affaire de coauteurs, qu’il est impossible de déterminer qui est le tireur et qu’il y a absence de preuve que celui qui accompagnait le tireur ait fait quoi que ce soit pour l’aider. La preuve ne permettrait pas non plus de déterminer une fin illégale à l’encontre de M. Belange [la victime] suffisamment précise pour permettre d’inférer raisonnablement que les requérants connaissaient ou auraient dû connaître le risque probable de lésions corporelles ou de mort lié à la confrontation avec M. Belange.
[3] Le ministère public maintient qu’il y a de la preuve de laquelle un jury pourrait raisonnablement inférer que l’homicide de M. Belange est un meurtre prémédité et commis de propos délibéré auquel les deux requérants ont participé, soit à titre d’auteur réel, soit à titre de complice sachant que l’auteur réel commettrait un meurtre prémédité et de propos délibéré.
[4] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut qu’il y a absence de preuve permettant à un jury d’inférer raisonnablement hors de tout doute raisonnable que l’homicide de M. Belange est un meurtre prémédité et commis de propos délibéré de sorte que le jury doit être dessaisi de cette question.
[5] Par ailleurs, le jury pourrait raisonnablement inférer de la preuve que l’un ou l’autre des requérants est le tireur et qu’il avait au moins l’intention de causer à Valery Belange des lésions corporelles, sachant qu’elles allaient probablement causer sa mort, et en ne se souciant pas que la mort s’ensuive ou non. Le jury pourrait ainsi raisonnablement rendre un verdict de meurtre au 2e degré à l’encontre de l’un ou l’autre des requérants, mais pas à l’encontre des deux. En effet, tout comme pour la préméditation et le propos délibéré, le jury ne pourrait pas raisonnablement inférer de cette même preuve que l’aide fournie par le complice l’a été sachant que l’auteur principal avait l’intention de commettre un meurtre.
[6] Aussi, pour ce qui est du complice ou si le jury n’est pas en mesure de déterminer hors de tout doute raisonnable le rôle de chacun des requérants lors de l’homicide, il pourrait tout de même raisonnablement inférer de la preuve qu’ils ont formé et réalisé ensemble le projet de poursuivre une fin illégale, bien qu’inconnue, à l’encontre de M. Belange et de s’y entraider. L’imprécision sur la nature de la fin illégale est telle que le jury ne pourrait pas raisonnablement inférer que les requérants savaient qu’un meurtre résulterait probablement de la poursuite de la fin illégale. La preuve ne permet donc pas raisonnablement d’inférer une culpabilité de meurtre à ce titre.
[7] Par contre, la preuve est suffisante pour inférer raisonnablement que chacun aurait dû savoir que le risque de lésions corporelles était une conséquence probable de la réalisation de l’intention commune. La possibilité d’un verdict d’homicide involontaire pour chaque participant à ce titre est laissée à l’appréciation du jury.
Le déroulement de l’homicide et la scène de crime
[8] Le témoin Mario Guerrera a vu un homme de race noire qui se cachait derrière un véhicule avant de se diriger vers l’immeuble où Valery Belange a été tiré d’un coup de feu peu de temps après. Le jury pourrait facilement inférer qu’il s’agit de Ducakis François compte tenu de ses empreintes laissées sur le véhicule. Pendant ce temps, M. Guerrera a observé un véhicule suspect stationné, moteur en marche. Après avoir entendu un coup de feu, M. Guerrera a vu le même individu, dissimulant dans sa poche ce qui lui semblait être une arme à feu, se dirigeant rapidement vers le véhicule en compagnie d’un autre individu de race noire. Le jury pourrait raisonnablement inférer que cet autre individu est Willy Junior St-Jean, compte tenu de la casquette retrouvée près de la victime contenant son ADN. Les deux individus sont montés à bord du véhicule qui a quitté les lieux.
[9] Entre les deux constatations de M. Guerrera, Judith Lamour a entendu un vacarme provenant du portique du bloc appartements, est sortie de son logement et a vu une altercation où M. Belange repoussait deux individus de race noire dans le portique, l’un d’eux tenant une arme à feu dans sa main gauche. Elle est retournée immédiatement dans son appartement avant d’entendre un coup de feu.
[10] L’examen des traces de sang à différents endroits démontre que M. Belange a circulé en haut et en bas du portique après le coup de feu avant de décéder. Le pathologiste Dr. Bourgault a confirmé qu’une personne subissant une blessure par projectile au poumon peut demeurer sur pied un certain temps avant que l’hémorragie en découlant ne lui fasse perdre connaissance.
[11] La preuve démontre que deux minutes se sont écoulées entre la dernière communication entre M. François et M. St-Jean et l’appel 911 de Mme Lamour suite au coup de feu.
La concertation de M. François et de M. St-Jean dans leur présence sur les lieux
[12] Le jury pourrait raisonnablement inférer de la preuve des registres de téléphones cellulaires que M. François et M. St-Jean se sont concertés pour se présenter chez M. Belange en même temps en embuscade.
Les éléments de comportement après le fait
[13] Le jury pourrait inférer raisonnablement de la preuve que M. St-Jean a effectué des recherches sur Internet le lendemain de l’homicide de M. Belange pour s’enquérir sur le sujet. Il serait aussi raisonnable d’inférer que M. St-Jean a supprimé, après les événements, des communications avec M. François qui précédaient les événements.
[14] Le jury pourrait raisonnablement inférer que M. St-Jean a publié sur Facebook le 15 janvier 2018 les propos « its all love some brother from another mother i redrum for them #Rns cause i keep it real on everything #freal »
L’absence de preuve de mobile
[15] Le ministère public n’a pas présenté de preuve de mobile pouvant soutenir une inférence que l’homicide de M. Belange est un meurtre prémédité et de propos délibéré. La preuve démontre que M. Belange avait plusieurs centaines de dollars dans ses poches lorsqu’il a été retrouvé sans vie.
La position des parties
[16] Les requérants concèdent d’emblée qu’il y a une preuve suffisante pour que le jury infère raisonnablement qu’ils sont les individus qui étaient sur les lieux de l’homicide de M. Belange. Par contre, leur responsabilité ne pourrait être engagée à titre de coauteurs de l’infraction puisqu’il s’agit d’une infraction commise par une seule personne.
[17] Par ailleurs, le jury ne pourrait raisonnablement inférer que M. St-Jean est le tireur ni que M. François l’est. La preuve impliquant M. St-Jean à titre de tireur repose sur les propos publiés sur Facebook. Il s’agirait d’une preuve spéculative dont l’écart menant à une inférence raisonnable qu’il est le tireur n’est pas comblé par de la preuve. Pareillement, la preuve impliquant M. François à titre de tireur repose sur le témoignage de M. Guerrera qui l’aurait vu dissimuler ce qui lui semblait être une arme à feu. Or, la fiabilité de cette preuve serait à ce point faible qu’il serait déraisonnable pour le jury d’en inférer que M. François est le tireur.
[18] Les requérants soutiennent que si le ministère public n’est pas en mesure de prouver l’identité du tireur, ils doivent être acquittés tous les deux à moins qu’il soit démontré que chacun a fourni une aide à commettre le meurtre, preuve qui n’aurait pas été faite en l’espèce. La preuve des communications entre Chloé Langlois et M. François et entre celui-ci et M. St-Jean ne constituerait pas une preuve de préméditation d’un crime et encore moins d’un crime d’intention spécifique comme le meurtre. Il est insuffisant de créer un narratif hypothétique spéculatif qui lierait la preuve à l’inférence recherchée. Le fait qu’une possibilité ne puisse être exclue ne transforme pas une spéculation en inférence raisonnable.
[19] Quant à la participation des requérants en vertu du paragraphe 21(2) du Code criminel, il y aurait absence de preuve d’intention commune de poursuivre une fin illégale, celle-ci ne pouvant être l’infraction reprochée. Pour que les requérants soient coupables de meurtre en vertu de cet article, il faudrait qu’ils aient su qu’il était probable qu’un meurtre soit commis en commettant le crime faisant l’objet de la fin illégale. Puisqu’on ne connaît pas l’objet de la rencontre avec M. Belange, le jury ne pourrait raisonnablement inférer de cette absence de preuve qu’un meurtre en résulterait probablement. La preuve ne révélerait pas non plus que le complice savait que le tireur était armé.
[20] Les témoins Mario Guerrera et Judith Lamour n’auraient pas constaté d’acte illégal. Les requérants se sont présentés à visage découvert. Le jury ne pourrait donc inférer qu’il y avait même une fin illégale dans cette rencontre forcée avec M. Belange. L’allégation d’embuscade et d’utilisation d’un appât avec Chloé Langlois constituerait du narratif hypothétique spéculatif. Il faudrait que le jury spécule pour en inférer un risque objectif de lésions corporelles.
[21] Les requérants soulignent que le fait que la preuve démontre que M. Belange s’est promené dans les parties communes du bloc appartements avant de décéder exclut la possibilité d’un meurtre prémédité et de propos délibéré et le caractère raisonnable d’une conclusion du jury que les requérants savaient que la mort de M. Belange était probable. Si le plan était d’assassiner M. Belange, il n’y a aucune raison que le tireur ne se soit pas présenté seul.
[22] En somme, les requérants plaident qu’il y a absence de preuve pour soutenir un verdict de meurtre au 1er degré, de meurtre au 2e degré, et d’homicide involontaire à l’encontre de chacun d’eux, de sorte que le Tribunal devrait dessaisir le jury de l’entièreté de l’affaire et prononcer des verdicts d’acquittement.
[23] Pour sa part, le ministère public concède que l’homicide de M. Belange résulte des actes d’un seul des requérants, de sorte qu’il ne s’agit pas d’un cas de coauteurs de l’infraction. Cependant, même si la preuve ne révèle pas qui est le tireur, les deux requérants devraient être en péril de meurtre au 1er degré devant le jury puisque la preuve révèle des actes de préméditation et de propos délibéré de chacun d’eux et qu’ils ont tous deux procuré une aide à commettre le meurtre. Le jury pourrait ainsi condamner chacun d’eux de meurtre au 1er degré à titre d’auteur réel de l’infraction ou de complice.
[24] Selon le ministère public, la préméditation et le propos délibéré de meurtre peut raisonnablement s’inférer de la synchronisation des communications entre M. François et M. St-Jean, de la synchronisation et de la coordination de leurs mouvements, de l’embuscade à l’encontre de M. Belange, du fait que M. François s’est caché avant d’intervenir, de la rapidité d’exécution de leur plan, de l’utilisation d’un véhicule de fuite qui attendait moteur en marche, du choix de l’arme à feu qui était chargée et des éléments de preuve post-délictuels.
[25] Le déroulement de l’homicide et les constatations sur la scène de crime révéleraient qu’il ne s’agit pas d’un meurtre parfait, mais il y a tout de même suffisamment de preuve pour que le jury conclue raisonnablement que l’homicide de M. Belange est un meurtre prémédité et commis de propos délibéré par l’un ou l’autre des requérants, le complice ayant fourni son aide sachant que le tireur commettrait un meurtre prémédité et de propos délibéré. La poursuite invite le Tribunal à éviter d’usurper le rôle du jury.
[26] La preuve des registres des téléphones cellulaires et l’extraction des informations contenues dans les téléphones cellulaires et tablettes numériques démontreraient des éléments de préméditation et de propos délibéré. Même si le jury peut en inférer une préméditation et un propos délibéré d’un autre crime que le meurtre, minimalement une agression armée, le Tribunal ne doit retenir que les inférences favorables au ministère public pour les fins de la requête. Il en est de même de la suppression des communications avec M. François de M. St-Jean et de ses propos publiés sur Facebook.
[27] Le ministère public souligne que la preuve permet d’inférer raisonnablement que le complice savait que l’arme à feu était chargée avant la confrontation avec M. Belange, puisque les requérants se seraient rendus sur les lieux ensemble. Une attention particulière devrait être portée sur le fait que l’homicide s’est déroulé en moins de deux minutes, puisqu’il s’agit du laps de temps séparant la dernière communication entre M. François et M. St-Jean et l’appel au 911 de Mme Lamour.
Le meurtre au premier degré
[32] Le ministère public a raison de plaider que la preuve révèle des éléments de préméditation et de propos délibéré. Or, ces éléments sont autant compatibles avec la préméditation et le propos délibéré d’un meurtre que de n’importe quel autre crime. La poursuite rappelle que si plusieurs inférences sont possibles à partir de la preuve, le Tribunal ne doit retenir pour les fins de la requête que celle favorable à sa thèse. Bien que cela soit vrai, le Tribunal doit tenir compte de toute la preuve.
[33] En l’absence de preuve de mobile, il ne serait tout simplement pas raisonnable pour le jury d’inférer à partir des éléments de preuve produits que l’homicide de M. Belange constitue un meurtre prémédité et commis de propos délibéré. Le déroulement de l’homicide et les constatations sur la scène de crime n’ouvrent pas la porte à cette inférence. Une inférence tirée de la preuve qui n’est pas logique ou raisonnable constitue de la spéculation.
[34] Le ministère public s’appuie beaucoup sur l’arrêt Mendez où la Cour d’appel de l’Ontario avait conclu que les éléments de preuve étaient suffisants, dans un scénario présentant beaucoup d’éléments de preuve similaires à ce qu’on retrouve ici. Or, la Cour souligne comme élément pertinent l’« immediacy of the killing », élément absent en l’espèce. Évidemment, si les requérants s’étaient présentés et avaient abattu[s] M. Belange immédiatement, tous les éléments de preuve sur lesquels s’appuient la poursuite constitueraient une preuve amplement suffisante de préméditation et de propos délibéré. Ce n’est pas le cas.
[35] La preuve démontre qu’il y a eu une altercation entre les requérants et M. Belange avant qu’un seul coup de feu ne soit tiré, bien que le tireur avait la possibilité, selon le témoignage du balisticien Gilbert Desjardins, de décharger l’arme semi-automatique au complet. Le jury peut raisonnablement inférer que les requérants ont quitté les lieux avant de s’assurer que M. Belange ne soit mort. Bien que l’homicide se soit produit en moins de deux minutes, ces éléments de preuve excluent une inférence raisonnable appuyant une conclusion hors de tout doute raisonnable de meurtre prémédité et commis de propos délibéré.
[36] Il n’est pas impossible que l’homicide de M. Belange soit un meurtre prémédité et commis de propos délibéré, mais il faudrait que le jury spécule pour en arriver à une telle conclusion compte tenu de la preuve. Les requérants ne doivent pas être mis en péril d’un tel scénario.
Le meurtre au deuxième degré
[37] Par contre, le jury pourrait raisonnablement inférer que Willy Junior St-Jean est le tireur, même si M. Guerrera croit avoir vu M. François dissimuler une arme à feu. Le Tribunal a déjà conclu dans un précédent jugement qu’il est ouvert au jury en l’espèce d’inférer des propos publiés sur Facebook qu’ils proviennent de Willy Junior St-Jean, qu’ils signifient qu’il tue pour ses amis et qu’ils réfèrent à l’homicide de M. Belange. Il est loisible au jury de considérer que cette preuve a une grande valeur probante et que la preuve provenant du témoignage de M. Guerrera sur cette question n’est pas fiable.
[38] Inversement, il est loisible au jury de considérer fiable la preuve provenant du témoignage de M. Guerrera sur cette question et d’accorder peu de valeur probante aux propos publiés sur Facebook. Le jury peut raisonnablement inférer, dépendamment de son évaluation des éléments de preuve sur cette question, que M. François est le tireur; il peut raisonnablement inférer, selon une autre interprétation de la preuve, que M. St-Jean est le tireur.
[39] La déduction conforme au bon sens qu’une personne veut les conséquences probables de ses gestes est suffisante en soi pour appuyer une inférence de l’intention requise du tireur pour une condamnation de meurtre, compte tenu de la distance de tir de moins d’un mètre estimée par le balisticien Gilbert Desjardins et les résidus de tir constatés sur le chandail de la victime près de la perforation causée par le projectile. Les verdicts de meurtre au 2e degré à l’encontre de l’un ou l’autre des requérants est raisonnable, mais pas à l’encontre des deux.
[40] En vertu de l’alinéa 21(1)b) du Code criminel, le complice doit avoir l’intention d’aider et savoir que l’auteur principal a l’intention de commettre un meurtre pour être coupable de meurtre. Puisque les éléments de preuve soumis pour appuyer la thèse du meurtre prémédité et de propos délibéré ne permettent pas de tirer raisonnablement cette inférence, ils ne peuvent davantage appuyer l’élément mental nécessaire à la condamnation pour meurtre du complice du tireur. Il n’y a pas non plus de preuve d’aide à commettre un meurtre au moment de l’homicide.
[41] Il s’agit en l’espèce d’un scénario pouvant s’apparenter à l’affaire Hunt, où la participation de l’accusé pouvait se limiter à de la simple présence sur les lieux, outre les communications avec le coaccusé avant et après l’homicide. Le juge de paix avait conclu qu’il n’y avait pas de preuve d’aide à commettre un meurtre, ni d’intention d’aider le coaccusé à tuer la victime, ni de preuve de connaissance des intentions meurtrières du coaccusé. La même conclusion doit prévaloir en l’espèce.
[42] En somme, seul le tireur peut raisonnablement être condamné de meurtre et le jury en sera instruit en conséquence.
L’homicide involontaire coupable
[43] En l’espèce, la responsabilité du complice est également engagée en vertu de l’application du paragraphe 21(2) du Code criminel. La disposition s’applique aussi si le jury n’est pas en mesure de déterminer hors de tout doute raisonnable le rôle de chacun des requérants lors de l’homicide. Le jury pourrait raisonnablement inférer de la preuve qu’ils ont formé ensemble le projet de poursuivre une fin illégale, bien qu’inconnue, à l’encontre de M. Belange et de s’y entraider. La preuve d’embuscade, la possession d’un pistolet de calibre .45 par l’un des requérants et la présence d’un véhicule de fuite en marche à bord duquel les requérants ont quitté permettraient au jury d’inférer raisonnablement que la rencontre provoquée avec M. Belange était la réalisation d’un projet de s’entraider des requérants qui n’était pas pour une fin légale.
[44] L’imprécision sur la nature de la fin illégale est telle que le jury ne pourrait pas raisonnablement inférer que les requérants savaient qu’un meurtre résulterait probablement de la poursuite de l’intention commune. Tout comme dans l’affaire Hunt, un verdict de meurtre sur cette base serait nécessairement déraisonnable. Le Tribunal ne peut pas tenir compte de la prétention du ministère public que le complice savait que le pistolet était chargé; il y a absence de preuve sur cet élément de fait et le Tribunal n’est pas autorisé à tirer des inférences de fait dans son analyse. Une inférence n’est pas possible à partir d’un fait qui n’est pas établi par la preuve.
[45] Par contre, la preuve est suffisante pour inférer raisonnablement que chacun aurait dû savoir que le risque de lésions corporelles était une conséquence probable de la réalisation de l’intention commune. La preuve d’embuscade, la possession d’un pistolet de calibre .45 par l’un des requérants et la présence d’un véhicule de fuite en marche à bord duquel les requérants ont quitté constituent une preuve suffisante à cet égard. Le jury sera instruit sur la possibilité de rendre un verdict d’homicide involontaire pour chaque participant à ce titre.
Analyse
Le droit applicable
[48] Le juge ne peut imposer un verdict s’il existe un quelconque élément de preuve directe ou circonstancielle admissible qui, s’il était accepté par un jury correctement instruit agissant de manière raisonnable, justifierait une déclaration de culpabilité : R. c. Charemski, [1998] 1 R.C.S. 679, par. 1‑4; R. c. Bigras, 2004 CanLII 21267 (C.A. Ont.), par. 10‑17. La question de savoir si le critère juridique est satisfait eu égard aux faits est une question de droit qui ne commande pas, en appel, de déférence envers le juge du procès. Selon l’article 676 du Code criminel, le ministère public peut introduire un recours devant la cour d’appel si une erreur de droit a été commise.
21 La question que doit se poser le juge présidant l’enquête préliminaire aux termes du par. 548(1) du Code criminel est identique à celle que doit se poser le juge du procès saisi d’une requête de la défense en vue d’obtenir un verdict imposé, savoir « [s]’il existe ou non des éléments de preuve au vu desquels un jury équitable, ayant reçu des directives appropriées, pourrait conclure à la culpabilité » : Shephard, précité, p. 1080; voir également R. c. Monteleone, [1987] 2 R.C.S. 154, p. 160. Selon ce critère, le juge présidant l’enquête préliminaire doit renvoyer la personne inculpée pour qu’elle subisse son procès « chaque fois qu’il existe des éléments de preuve admissibles qui pourraient, s’ils étaient crus, entraîner une déclaration de culpabilité » : Shephard, p. 1080.[6]
22 Le critère demeure inchangé qu’il s’agisse d’une preuve directe ou circonstancielle : voir Mezzo c. La Reine, [1986] 1 R.C.S. 802, p. 842‑843; Monteleone, précité, p. 161. La nature de la tâche qui incombe au juge varie cependant selon le type de preuve présenté par le ministère public. Lorsque les arguments du ministère public sont fondés entièrement sur une preuve directe, la tâche du juge est claire. Par définition, la seule conclusion à laquelle il faut arriver dans une affaire comme l’espèce, concerne la véracité de la preuve : voir Watt’s Manual of Criminal Evidence (1998), §8.0 ([TRADUCTION] « [l]a preuve directe est celle qui, si elle était crue, tranche la question en litige »); McCormick on Evidence (5e éd. 1999), p. 641; J. Sopinka, S. N. Lederman et A. W. Bryant, The Law of Evidence in Canada (2e éd. 1999), §2.74 (la preuve directe s’entend de la déposition d’un témoin quant au [TRADUCTION] « fait précis qui est au cœur du litige »). Il incombe au jury de dire s’il convient d’accorder foi à la preuve et jusqu’à quel point il faut le faire : voir Shephard, précité, p. 1086‑1087. Donc, si le juge est d’avis que le ministère public a présenté une preuve directe à l’égard de tous les éléments de l’infraction reprochée, son travail s’arrête là. Si une preuve directe est produite à l’égard de tous les éléments de l’infraction, l’accusé doit être renvoyé à procès.
23 La tâche qui incombe au juge devient un peu plus compliquée lorsque le ministère public ne produit pas une preuve directe à l’égard de tous les éléments de l’infraction. Il s’agit alors de savoir si les autres éléments de l’infraction — soit les éléments à l’égard desquels le ministère public n’a pas présenté de preuve directe — peuvent raisonnablement être inférés de la preuve circonstancielle. Pour répondre à cette question, le juge doit nécessairement procéder à une évaluation limitée de la preuve, car la preuve circonstancielle est, par définition, caractérisée par un écart inférentiel entre la preuve et les faits à être démontrés — c’est-à-dire un écart inférentiel qui va au‑delà de la question de savoir si la preuve est digne de foi : voir Watt’s Manual of Criminal Evidence, op. cit., §9.01 (la preuve circonstancielle s’entend de [TRADUCTION] « tout élément de preuve, qu’il soit de nature testimoniale ou matérielle, autre que le témoignage d’un témoin oculaire d’un fait important. Il s’agit de tout fait dont l’existence peut permettre au juge des faits d’inférer l’existence d’un fait en cause »); McCormick on Evidence, op. cit., p. 641‑642 ([TRADUCTION] « la preuve circonstancielle [. . .] peut être de nature testimoniale, mais même si les circonstances décrites sont tenues pour vraies, il faut que le raisonnement soit plus poussé afin qu’il puisse mener à la conclusion souhaitée »). Par conséquent, le juge doit évaluer la preuve, en ce sens qu’il doit déterminer si celle-ci est raisonnablement susceptible d’étayer les inférences que le ministère public veut que le jury fasse. Cette évaluation est cependant limitée. Le juge ne se demande pas si, personnellement, il aurait conclu à la culpabilité de l’accusé. De même, le juge ne tire aucune inférence de fait, pas plus qu’il apprécie la crédibilité. Le juge se demande uniquement si la preuve, si elle était crue, peut raisonnablement étayer une inférence de culpabilité.
Circumstantial evidence is any item of evidence, testimonial or real, other than the testimony of an eyewitness to the material fact. It is any fact from the existence of which the trier of fact may infer the existence of a fact in issue. It is for the trial judge to determine whether circumstantial evidence is relevant.
Where evidence is circumstantial, it is critical to distinguish between inference and speculation. An inference is a deduction of fact that may logically and reasonably be drawn from another fact or group of facts found or otherwise established in the proceedings. There can be no inference without objective facts from which to infer the facts that a party seeks to establish. If there are no positive proven facts from which an inference may be drawn, there can be no inference, only impermissible speculation and conjecture.
In circumstantial evidence cases, three types of argument are made in support of relevance:
i. prospectant;
ii. concomitant; and
iii. retrospectant.
Prospectant use of circumstantial evidence involves an argument that the past or previous occurrence of an act, state of mind, or state of affairs justifies an inference that a subsequent act was done, or a state of mind or affairs existed at the time that is material in the proceedings. Evidence of motive is an example.
Concomitant use of circumstantial evidence involves an argument that circumstances existing contemporaneously with the material transaction render the facts alleged by either of the parties more or less probable. Evidence of possession of the means or skill by which an offence was committed invokes this reasoning.
Retrospectant use of circumstantial evidence invokes reasoning that the subsequent occurrence of an act, state of mind, or state of affairs justifies an inference that the act was done, or state of affairs or mind existed in the past at the material time. Evidence of after-the-fact conduct is representative.[7]
Application des principes de droit
Une évaluation trop poussée de la preuve
Les inférences raisonnables selon l’expérience humaine et le bon sens
La jurisprudence reconnaît que l’identification, l’intention de tuer, ainsi que la préméditation et le propos délibéré peuvent être étayés par une preuve exclusivement circonstancielle. Par ailleurs, il va de soi que l’absence de mobile explicite n’est pas synonyme d’insuffisance de preuve de préméditation, de propos délibéré ou d’intention de tuer. En l’espèce, après l’analyse de toutes les circonstances, il est clair que la preuve circonstancielle est de nature à démontrer l’implication de messieurs François et St-Jean dans le meurtre de monsieur Belange. Par ailleurs, aux yeux du Tribunal, un jury pourrait assurément conclure qu’ils étaient tous les deux sur les lieux; qu’ils s’y sont rendus de manière concertée et planifiée; qu’ils avaient prévu de se munir d’une arme de poing avant de se rendre à cet endroit; et qu’ils avaient planifié de s’enfuir à bord du véhicule de fuite qui les attendait. Bien que le coup de feu fatal ait été tiré après que monsieur Belange eut tenté de repousser ses deux assaillants, la chronologie de tous les événements, la nature concertée des actions des personnes impliquées, ainsi que la rapidité d’exécution, sont des éléments importants, significatifs et probables qui sont de nature à étayer l’infraction de meurtre au premier degré. Ayant procédé à une évaluation limitée de la preuve au sens de l’arrêt Arcuri […] et tenant compte de toutes les circonstances étayées par la preuve présentée à l’enquête préliminaire, le Tribunal est d’avis qu’un jury pourrait conclure que les accusés ont commis le meurtre de monsieur Valery Belange avec préméditation et de propos délibéré.
We draw inferences based on human experience and “common sense.” Yet, not everyone has had the same experiences or sees the world the same way. This can create controversy about whether evidence logically supports the desired inference. In R v White, the Supreme Court of Canada split starkly because of this. Some judges found that the failure of the accused to hesitate before running away after his illegal handgun discharged was logically more consistent with an intentional shooting than with the accidental shooting that the accused claimed. Other judges found this inference to be entirely speculative. “It seems to me every bit as plausible to conclude,” said Binnie J, “that a person in possession of an illegal handgun that just shot a stranger – accidentally or otherwise – would run away as fast and as far as he could without any hesitation.”
In general, given the room for debate that exists on questions of logical relevance, there are numerous sage passages suggesting that triers of fact should be given access to information they may find helpful in resolving the factual issues, even if others would disagree. After all, triers of fact are to render decisions according to their oaths and their consciences, and they should have available to them all the information they may consider to be of importance. If an inference is not “speculative or unreasonable,” the relevance standard will be met even if a judge would not personally rely on the evidence were they the trier of fact. As La Forest J said in R v Corbett:
[A]t the stage of the threshold inquiry into relevancy, basic principles of the law of evidence embody an inclusionary policy. . . .
In the absence of cogent evidence establishing that evidence . . . is irrelevant . . . the fact that reasonable people may disagree about its relevance merely attests to the fact that unanimity in matters of common sense and human experience is unattainable.[14]
[Les soulignements sont ajoutés et les références omises]
L’évaluation du comportement après le fait
[13] Le jury pourrait inférer raisonnablement de la preuve que M. St-Jean a effectué des recherches sur Internet le lendemain de l’homicide de M. Belange pour s’enquérir sur le sujet. Il serait aussi raisonnable d’inférer que M. St-Jean a supprimé, après les événements, des communications avec M. François qui précédaient les événements.
[14] Le jury pourrait raisonnablement inférer que M. St-Jean a publié sur Facebook le 15 janvier 2018 les propos « its all love some brother from another mother i redrum for them #Rns cause i keep it real on everything #freal ».
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[102] To be receivable, evidence of post-offence conduct must be relevant, material and not offend any other exclusionary rule of evidence, including the requirement that its probative value exceed its prejudicial effect: Calnen, at para. 107. Since receivability falls to be decided on this principled basis, no per se rule confines the answer to the receivability issue in any case. No prefabricated rule imposes a label of “always relevant” or “never relevant” when evidence of post-offence conduct is proposed for use in establishing a particular fact or issue: Calnen, at para. 119. So, for example, no legal impediment bars use of evidence of an accused’s post-offence conduct in determining his or her state of mind, and thus in distinguishing between or among different levels of culpability: Calnen, at para. 119; R. v. White (1998), 36 O.R. (3d) 223, [1998] 2 S.C.R. 72, [1998] S.C.J. No. 57, at para. 32; R. v. White, [2011] 1 S.C.R. 433, [2011] S.C.J. No. 13, 2011 SCC 13, at para. 42; R. v. Rodgerson, [2015] 2 S.C.R. 760, [2015] S.C.J. No. 38, 2015 SCC 38, at para. 20.
[92] Finally, in R. v. Aravena, [2015] O.J. No. 1910, 2015 ONCA 250, 333 O.A.C. 264, at paras. 125-130, leave to appeal to S.C.C. refused [2015] S.C.C.A. No. 497, 2016 CarswellOnt 5400, Doherty and Pardu JJ.A. held that the trial judge properly instructed the jury that it could consider that the accused was elated and excited after the killings in deciding whether he committed a planned and deliberate murder. The accused argued his post-offence conduct had no probative value concerning the degree of culpability for the homicides, because it was equally consistent with guilt of manslaughter, second degree murder and first degree murder. Doherty and Pardu JJ.A. disagreed. They explained that the accused’s happiness suggested a number of logical possibilities – namely, that he had obtained his goal, the events were not shocking but had unfolded according to plan, he knew about the plan and/or he aided the killers with knowledge of the plan: “[a]s a matter of logic and human experience, [the accused’s] conduct after the killing was relevant to whether he was a party to a planned and deliberate murder”: at para. 130. See, also, R. v. Khan, [2007] O.J. No. 4383, 2007 ONCA 779, 230 O.A.C. 174, at paras. 3-5.
[…]
[113] The trial judge’s use of the post-offence conduct in this case was similar to the use made of such evidence to infer planned and deliberate murder in the cases I have discussed. Like MacKinnon’s excitement and laughter, White’s flight without hesitation, Vorobiov’s failure to flee, and Aravena’s elation, the conduct was inconsistent with the theory advanced by the accused and more consistent with the inference urged by the Crown.
[Le soulignement est ajouté]
[55] The admissibility of after-the-fact conduct evidence, and the use to be made of it by the trier of fact, depends on the nature of the evidence, the issues in the case, and the positions of the parties. Sometimes, this type of evidence may be probative of a person’s participation in a crime, but of no value in determining […] that person’s level of culpability. In other cases, “as a matter of common sense and human experience, the evidence will be capable of supporting an inference that an accused had a particular state of mind”: R. v. MacKinnon (1999), 43 O.R. (3d) 378 (C.A.), at pp. 383-84; R. v. White, 2011 SCC 13, [2011] 1 S.C.R. 433, at para. 42; and R. v. S.B.1, 2018 ONCA 807, 143 O.R. (3d) 81, at paras. 68-71. This court recently confirmed that evidence of after-the-fact conduct may assist a jury in distinguishing between different levels of culpability, including second degree and first degree murder: McGregor, at para. 102; R. v. Adan, 2019 ONCA 709, at para. 69, citing R. v. Calnen, 2019 SCC 6, 374 C.C.C. (3d) 259, at para. 119, per Martin J. (dissenting, but not on this point); R. v. Rodgerson, 2015 SCC 38, [2015] 2 S.C.R. 760, at para. 20; and R. v. Jackson, 2016 ONCA 736, 33 C.R. (7th) 130, at para. 20.
[56] In MacKinnon, at para. 15, Doherty J.A. wrote that the after-the-fact conduct evidence adduced in that case, in the context of the evidence viewed in its entirety, supported the inference that the appellants “had done exactly what they had planned to do … commit a robbery and shoot Mr. Chow.” The same line of reasoning was utilized in R. v. Aravena, 2015 ONCA 250, 323 C.C.C. (3d) 54, at paras. 129-30, leave to appeal refused, [2015] S.C.C.A. No. 497. In both cases, evidence of after-the-fact conduct was left to the jury to consider on the issue of whether the murders were planned and deliberate. In this case, the Crown relied on some aspects of the appellant’s after-the-fact conduct for the same purpose.
[…]
[59] Relying on Aravena and MacKinnon, the appellant argues that his after-the-fact conduct was not sufficiently proximate in time to Mr. Burnett’s murder to have any probative value. I disagree. Although both cases involved conduct that occurred in the immediate aftermath of the offences, Aravena and MacKinnon do not limit admissibility to these circumstances. This court recently acknowledged in McGregor, at para. 107, that after-the-fact conduct is “often removed temporally from the event to which it is said to relate.” The probative value of the conduct derives from the logical inferences that may be drawn when situated in the context of a pre-existing motive and post-conduct pleasure in having accomplished the premeditated killing.
[Le soulignement est ajouté]
[92] Immediate flight by two accused persons from the scene of a crime together, and continued association on good terms after an offence may be probative of planning and deliberation. In R. v. MacKinnon (1999), 132 C.C.C. (3d) 545 (Ont. C.A.), Doherty J.A., writing for this court, held that flight together from the scene of a shooting, laughing together after the fact, and disposing of evidence could support the inference that the two accused had “done exactly what they planned to do, that is, enter the club, commit a robbery and shoot [the victim]”: at paras. 14-15. This court has recognized other circumstances in which the conduct of an accused after an offence may be relevant to planning and deliberation: see R. v. Aravena, 2015 ONCA 250, 323 C.C.C. (3d) 54, at paras. 128-130; R. v. Café, 2019 ONCA 775, 381 C.C.C. (3d) 98, at paras. 55-56, 59. As noted above, the assessment of relevance for any particular inference from post-offence conduct is always a fact-specific exercise.
[93] In this case, in the context of the association between the appellant and Ms. Phan by phone and text before the shooting, their joint presence at the scene of the shooting, and their joint flight from the scene, their continued association on good terms after the shooting was, as the trial judge instructed the jury, some evidence which: “could support an inference that they remained friendly because they had done what they planned to do at the scene and neither of them was caught off guard by an unexpected shooting.”
[94] It is important to bear in mind the other evidence which the jury was entitled to consider in relation to planning and deliberation. This included evidence of motive or animus against Mr. Williams on the part of both the appellant and Ms. Phan; the phone and text communications between the appellant and Ms. Phan in the afternoon and evening leading up to the shooting; that firearms were brought to the scene; that the shooting happened very shortly after the arrival of the appellant on the scene; and whether the forensic evidence was consistent with Mr. Williams being shot by two shooters acting in tandem. In this context, the association between the appellant and Ms. Phan before (by phone calls and texts), during (both present at the scene of the shooting), and after the shooting was a piece of circumstantial evidence that could be weighed along with the rest of the evidence as relevant to planning and deliberation. The evidence of two people arguably acting in concert, as shown by their communication and association before, during, and after the shooting, on good terms throughout, is some evidence which, taken together with all of the evidence, could provide support for an inference of planning between the appellant and Ms. Phan.
[95] The existence of explanations other than guilt for the post-offence association between the appellant and Ms. Phan did not render that evidence as having no probative value. It was for the jury to assess the evidence of the post-offence association in the context of all of the evidence, and consider what inference, if any, to draw from it in the context of any explanations: Calnen, at para. 112.
[Le soulignement est ajouté]
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[36] Même si la Couronne est en mesure de signaler une erreur de droit, un acquittement n’est pas annulé à la légère (voir R. c. Cowan, 2021 CSC 45, par. 46). La Couronne doit également convaincre la cour d’appel, avec un degré raisonnable de certitude, que le verdict d’acquittement n’aurait pas été nécessairement le même s’il n’y avait pas eu d’erreur (Graveline, par. 15; R. c. Sutton, 2000 CSC 50, [2000] 2 R.C.S. 595, par. 2). Bien que la Couronne ne soit pas tenue de persuader la cour d’appel que le verdict aurait nécessairement été différent n’eût été l’erreur, la charge de preuve qui lui incombe à cet égard est très lourde (voir Graveline, par. 14‑15 et 19, citant R. c. Morin, [1988] 2 R.C.S. 345, p. 374; voir aussi Sutton, par. 2).
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GUY COURNOYER, J.C.A. |
[1] R. c. François, 2020 QCCS 774.
[2] R. c. St-Jean, 2020 QCCS 6.
[3] La Cour a autorisé l’avocate de M. François à se retirer, car elle était sans communication avec ce dernier : voir les arrêts R. c. St-Jean, 2024 QCCA 425; R. c. Ducakis, 2024 QCCA 580. La Cour a ajourné l’audition du pourvoi au 6 septembre 2024 et a ordonné au poursuivant de signifier à M. François un avis de cette date et pour qu’il se constitue un nouveau procureur. Le poursuivant a produit un document du United States Marshals Service établissant que l’avis a été laissé au frère de M. François à Camden au New Jersey, lequel a confirmé que son frère habitait à cette adresse et qu’il allait lui remettre l’avis.
[4] R. c. François, 2020 QCCS 774 (jugement sur requête pour verdict imposé d’acquittement); R. c. St-Jean, 2020 QCCS 6 (jugement sur requête pour exclusion de preuve).
[5] R. c. Barros, 2011 CSC 51, [2011] 3 R.C.S. 368, par. 48; R. c. Kirkpatrick, 2022 CSC 33, par. 16; Drouin c. R., 2020 QCCA 1378, par. 92.
[6] R. c. Arcuri, 2001 CSC 54, [2001] 2 R.C.S. 828.
[7] D. Watt, Watt’s Manual of Criminal Evidence, Thomson Reuters, 2024, p. 59-60.
[8] Lewis c. La Reine, [1979] 2 R.C.S. 821, p. 835-836. Il s’agit du troisième principe formulé par le juge Dickson dans l’arrêt Lewis au sujet du mobile : voir M. Gourlay et al., Modern Criminal Evidence, Emond, 2022, p. 170-172; S. C. Hill, D. M. Tanovich et L. P. Strezos, McWilliams’ Canadian Criminal Evidence, 5e éd., Thomson Reuters, 2022 (feuilles mobiles, mise à jour 2024-5, Décembre 2024) § 31:40.
[9] R. v. Mendez, 2018 ONCA 354, par. 24.
[10] Drouin c. R., 2020 QCCA 1378, par. 91; Bebawi c. R., 2023 QCCA 212, par. 105.
[11] R. c. Sazant, 2004 CSC 77, [2004] 3 R.C.S. 635, par. 18; Morin c. R., 2019 QCCA 489, par. 15.
[12] R. c. Villaroman, 2016 CSC 33, [2016] 1 R.C.S. 1000, par. 36.
[13] R. c. Arcuri, 2001 CSC 54, [2001] 2 R.C.S. 828, par. 21.
[14] D. M. Paciocco, P. Paciocco and L. Stuesser, The Law of Evidence, 8e éd., Irwin Law, 2020, p. 38-39. Voir aussi D. M. Paciocco, « Simply Complex: Applying the Law of “Post‑Offence Conduct” Evidence » (2016), 63 C.L.Q. 275, p. 294-295.
[15] R. c. St-Jean, 2020 QCCS 6, par. 17-20.
[16] Id., par. 21-23.
[17] Dans la requête du poursuivant recherchant l’admissibilité de la preuve du comportement après le fait, il est écrit : « Selon l’effet combiné de la preuve de triangulation cellulaire et du contenu de l’appareil cellulaire associé à l’intimé St-Jean, il est possible de démontrer que les deux intimés sont en présence de l’un et de l’autre lors de la recherche mentionnée aux paragraphes précédents ».
[18] R. c. Rodgerson, 2015 CSC 38, [2015] 2 R.C.S. 760, par. 20; R. c. Calnen, 2019 CSC 6, [2019] 1 R.C.S. 301, par. 119 et 127-139.
[19] L’expression « Redrum » n’a rien de mystérieux, elle représente le mot murder à l’envers et fait partie de la culture cinématographique populaire.
[20] Tshilumba c. R., 2022 QCCA 1591, par. 127; R. c. Calnen, 2019 CSC 6, [2019] 1 R.C.S. 301, par. 119-120 (la juge Martin dissidente, mais pas sur cette question).
[21] R. v. McGregor, 2019 ONCA 307.
[22] Voir aussi R. v. Jackson, 2016 ONCA 736, par. 20; R. v. S.B.1, 2018 ONCA 807, par. 71; R. v. Adan, 2019 ONCA 709, par. 69; R. v. Morin, 2021 ONCA 307, par. 49; R. v. Wood, 2022 ONCA 87, par. 123; R. v. Reddick, 2021 ONCA 418, par. 20.
[23] R. v. S.B.1, 2018 ONCA 807.
[24] Id., par. 63-92.
[25] R. v. Café, 2019 ONCA 775.
[26] R. v. Atienza, 2023 ONCA 537.
[27] R. c. Strathdee, 2021 CSC 40, [2021] 3 R.C.S. 52, par. 4.
[28] R. v. Johnson, 2022 ONCA 534, par. 69-70, appel rejeté R. c. Johnson, 2023 CSC 24, confirmant les motifs des juges majoritaires.
[29] R. c. Hodgson, 2024 CSC 25.
[30] R. v. Collins (1993), 79 C.C.C. (3d) 204 (C.A. Ont.), p. 214-216; R. v. O’Kane, 2012 MBCA 82, par. 71; E. G. Ewaschuk, Criminal Pleadings & Practice in Canada, 3e éd., Thomson Reuters, 2022 (feuilles mobiles, envoi no. 9, décembre 2024), § 23.195.
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