Ville de Québec c. 9358-6584 Québec inc. |
2020 QCCM 15 |
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COUR MUNICIPALE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
QUÉBEC |
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No : |
99982164 |
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DATE : |
22 janvier 2020 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
PAULIN CLOUTIER |
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Ville de Québec |
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Représentée par |
Me Evelyne Julien |
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Poursuivante |
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c. |
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9358-6584 Québec inc. |
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Représentée par |
Me François Marchand |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] On reproche à la compagnie défenderesse d'avoir, le 28 mars 2018, au 2575 du boulevard Wilfrid-Hamel, à la suite 202, exercé, permis ou toléré un usage C5, soit un commerce à caractère érotique, dans la zone 22503Cb alors qu'un tel usage n'était pas autorisé dans cette zone, en contravention des articles 11 et 30 du Règlement de l'arrondissement des Rivières sur l'urbanisme[1].
[2] La preuve se limite à celle présentée par la poursuite. La défense n'a pas fait entendre de témoin ni présenté quelque preuve lors du procès.
[3] Le 2575, boulevard Wilfrid-Hamel est un édifice commercial situé dans la zone 22503Cb[2]. La défenderesse occupe le local 202 de cet immeuble.
[4] Selon la grille de spécifications applicable à cette zone[3], sont autorisés dans cette zone les usages commerciaux suivants : C1 (services administratifs), C2 (vente au détail et services), C-3 (lieu de rassemblement), les commerces de restauration et de débits d'alcool C20 (restaurant), les commerces associés aux véhicules automobiles C32 (vente ou location de petits véhicules), C33 (vente ou location de véhicules légers), C36 (atelier de réparation) et les commerces à incidence élevée C40 (générateurs d'entreposage).
[5] Selon les informations consignées au Registraire des entreprises,[4] la défenderesse donne comme adresse le 2575, boulevard Wilfrid-Hamel, suite 201. Son secteur d'activité décrit comme « autres services de soins personnels ». On y précise « soins de santé ou de détente corporelle ». Les informations mentionnent que la défenderesse utilise la dénomination sociale « Le Privé ».
[6] À la suite de plaintes reçues relatives aux activités exercées dans le local 202 du 2575, boulevard Wilfrid-Hamel, le technicien en bâtiment Lortie transmet à la défenderesse, le 18 août 2017, un avis de correction[5]. Il reproche à la défenderesse d'exercer à cet endroit un usage dérogatoire de salon de massage à caractère érotique. Il requiert que la défenderesse cesse d'occuper les lieux. Il l'informe de plus qu'un certificat d'autorisation doit être émis avant l'occupation d'un bâtiment ou d'une partie de bâtiment. Un délai de 60 jours est accordé pour que les correctifs soient apportés.
[7] Le 1er septembre 2017, une demande de certificat d'occupation est déposée[6]. La demande précise que la dénomination sociale « Le Privé » occupe le local 202 du 2575 boulevard Wilfrid-Hamel. À titre de « description détaillée des travaux projetés », on indique « bronzage, massothérapie et soins esthétiques personnels ».
[8] Le 22 septembre 2017, le service de la gestion du territoire avise la défenderesse que l'autorisation demandée est refusée[7]. Le document intitulé « recommandations et analyse technique » fournit les raisons du refus : l'usage exercé à cet endroit est, de l'avis de la technicienne en bâtiment Robitaille, un commerce à caractère érotique C5 alors que cet usage n'est pas autorisé dans la zone 22503Cb où se trouve l'immeuble. Ce document et le guide d'analyse apparaissant à la pièce P-6 mentionnent que la décision se fonde sur une consultation du site Internet du commerce Le Privé et sur une visite d'un technicien en bâtiment.
[9] Le 28 mars 2018, le technicien en bâtiment Lortie, accompagné de policiers, effectue une visite du commerce de la défenderesse. Il prend à cette occasion plusieurs photographies[8]. On peut y voir (le Tribunal utilisera les nombres apparaissant aux photographies de la pièce P-8) :
- Photos 3, 24, 27 et 30 : Il s'agit d'un corridor donnant sur cinq salles de massages.
- Photos 5 à 7 : Il s'agit de l'intérieur d'une des salles. On y constate une table de massage, une douche et un miroir vis-à-vis le dessus de la table de massage.
- Photos 9, 11 et 12 : Il s'agit d'une autre salle aménagée de façon similaire.
- Photos 13, 14 et 16 : Il s'agit d'une troisième salle équipée de façon semblable.
- Photos 15 et 20 : Il s'agit d'une quatrième salle équipée de façon semblable.
- Photos 23, 25, 26 et 28 : Il s'agit d'une cinquième salle aménagée de la sorte.
- Photos 17 et 19 : Il s'agit de photographies recto verso d'une carte d'affaires de l'établissement. La photo 19 montre le verso de la carte où l'on voit la poitrine d'une femme qui porte un soutien-gorge.
- Photos 29,31 et 33 : Il s'agit de la réception de l'établissement.
- Photos 34 à 36 : Il s'agit des endroits où attendent les clients. On y voit deux endroits pour attendre où il n'y a qu'un seul fauteuil par endroit. L'un des fauteuils est situé à côté du bureau de la réceptionniste. L'autre fauteuil est masqué par un paravent pour empêcher de voir le client.
- Photos 38, 40, 41 à 49, 50 et 52 : Celles-ci montrent la salle des employés dans diverses perspectives.
- Photo 37 : On y voit l'horaire de travail des employés dans la salle des employés.
- Photo 39 : Il s'agit d'une feuille affichée à côté de l'horaire de travail. On y voit une femme-chat dans une posture suggestive, portant des vêtements érotiques. On y mentionne « Projet Catwoman » avec la mention « Sois Catwoman ». Sous cette image, on annonce la visite d'une infirmière et les services offerts à cette occasion : vaccination contre l'hépatite, dépistage du VIH et des hépatites B et C, dépistage de la syphilis, de la gonorrhée et de la chlamydia, test de grossesse et contraception d'urgence (pilule du lendemain). Le tout est accompagné de la mention : « Parce que la santé... c'est important. »
- Photos 51, 55 et 61 : Il s'agit de la porte d'entrée du commerce.
[10] Les autres photos montrent l'aspect général de l'édifice et des lieux non aménagés.
[11] Lors de la visite du technicien en bâtiment, trois employées et une réceptionniste se trouvent sur place. Aucun client n'est présent. Le technicien n'a pas recours à un agent d'infiltration jouant le rôle d’un client. À cette occasion, le technicien Lortie n'obtient aucune déclaration des employées présentes. Il ne s'informe pas de la nature des services offerts à la clientèle.
[12] Le même jour, le technicien Lortie imprime une page du site Internet de la défenderesse intitulée « Contact »[9]. On y voit la même image qu'au verso de la carte d'affaires (photo 19 lors de la visite), mais plus complète. Il s'agit du corps d'une femme portant des sous-vêtements. On y apprend les prénoms des cinq employées qui travaillent de jour et ceux des employées qui travaillent de soir. Il s'agit tous de prénoms féminins.
[13] Le technicien Lortie accède aussi à des informations apparaissant sur Internet relatives au « Projet Catwoman »[10]. On y voit la même image que sur la photo 39 lors de la visite. L'intitulé « Projet Catwoman » et le slogan « Sois Catwoman » sont écrits avec les mêmes caractères et dans le même ton de rose. Le document nous apprend qu'il s'agit de services offerts aux femmes travailleuses du sexe. Les services sont en lien avec l'exercice des métiers du sexe pour les femmes.
[14] Ce document comporte un lien intitulé « Bien comprendre le projet de loi C-36 ». En fait, cette loi fédérale est intitulée : Loi modifiant le Code criminel pour donner suite à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Procureur général du Canada c. Bedford et apportant des modifications à d'autres lois en conséquence. Le projet de loi C-36 portait entre autres sur les infractions relatives à l'offre, la prestation et l'obtention de services sexuels contre rémunération, autrement dit la prostitution.
[15] Le technicien Lortie imprime de plus toutes les pages du site Internet de la défenderesse[11]. On peut y voir (le Tribunal a numéroté chacune des pages auxquelles il réfère) :
- Toutes les pages mentionnent qu'il s'agit d'un salon de massage.
- Page 1 : Il s'agit d'une page d'accueil intitulée « Le Privé, salon de massage ». On y apprend les prénoms des employées en service, ce lundi, de jour et de soir. L'image de fond est celle d'une femme assise dans une pose lascive, portant de la lingerie féminine.
- Page 2 : On y voit la réception de l'établissement.
- Page 3 : Ce sont les tarifs selon la durée des services.
- Page 4 : Ce sont les heures d'ouverture selon les jours de la semaine. On y mentionne : « Luxueux, confortable et convivial, et d'une propreté irréprochable, en nous choisissant vous choisissez le bon salon, le meilleur en ce qui concerne la qualité des services offerts. Toute l'équipe s'engage à vous offrir le moment auquel vous avez droit, le moment que chacun souhaite secrètement obtenir! ».
Sur les pages 3 et 4, on voit, en fond, une femme enlever son soutien-gorge.
- Page 6 : Il s'agit d'une page où le client peut fournir ses coordonnées et les transmettre à l'établissement, sur le même fond de page que la page d'accueil 1.
- Page 7 : Il s'agit de l'adresse du commerce avec, en fond, la même photo que sur la pièce P-9.
- Pages 9 et 11 : On offre des services de massage suédois et thaïlandais, en décrivant les massages. Le massage thaïlandais est qualifié de « massage empreint de sensualité ».
- Pages 10 à 12 : On y voit les cinq salles de massage.
L'image de fond des pages 9 à 12 est celle d'une femme qui cache ses seins nus avec ses coudes et ses bras.
- Pages 13 à 33 : Ces pages montrent le personnel de l'établissement. La première page mentionne : « Tombez en amour avec notre personnel ». Toutes les femmes qu'on y voit sont photographiées dans des positions suggestives. Certaines sont photographiées dans une salle de massage. Il est impossible de voir le visage de l'une d'elles, seuls leurs corps, généralement dénudés, sont photographiés. L'accent est mis sur les fesses, les cuisses et les seins. Il y aurait ainsi 19 employées dont les corps sont étalés dans ces pages. La page 15 mentionne : « Venez rencontrer nos demoiselles, elles n'attendent que vous ».
- Pages 36 et 37 : Ces pages s'adressent aux femmes désireuses de postuler pour un emploi dans cet établissement. On lit : « Vous êtes intéressée et avoir un travail bien rémunéré, un honoraire flexible et une ambiance de travail agréable : Le Privé est continuellement à la recherche de demoiselles âgées de dix-huit ans ou plus! Contactez-nous ... »
(Soulignements ajoutés)
[16] En contre-interrogatoire, le technicien en bâtiment reconnaît que, si l'usage de la défenderesse se limite à une entreprise de massothérapie, cet usage se qualifie d'usage commercial C2, vente au détail et services. Il ne serait alors pas dérogatoire.
[17] La visite du 28 mars 2018 est la seule visite faite par le témoin Lortie à cet établissement. À cette occasion, la réceptionniste et les trois employées sont vêtues de façon normale. Rien dans les lieux ne correspond ou n'évoque les photographies ou les images de femmes apparaissant au site Internet de la défenderesse.
[18]
La défense prétend d'abord que la preuve circonstancielle n'établit pas
hors de tout doute raisonnable que le commerce de la défenderesse est un
commerce C5 à caractère érotique. Elle prétend que la Ville n’aurait pas le
pouvoir d’adopter les dispositions réglementaires invoquées contre la
défenderesse et que les termes des dispositions sont vagues et imprécis. Elle
prétend de plus que la réglementation porte atteinte à la liberté d'expression
de la défenderesse et que celle-ci doit être
considérée inopérante à son égard, alors que les dispositions contestées ne
peuvent être sauvegardées selon le texte de l’article
[19]
Pour sa part, la poursuite prétend avoir établi hors de tout doute
raisonnable que le commerce de la défenderesse en est
un à caractère « érotique ». Elle conteste la prétention de la
défense que la réglementation porte atteinte à la liberté d'expression de la
défenderesse. Selon elle, si l’on doit appliquer le texte de l’article
[20] Les définitions qui suivent sont utiles pour comprendre les paragraphes qui suivront relatifs à la réglementation municipale. Ces définitions se retrouvent à l'article 1 du Règlement R.C.A.2V.Q.4 de l'arrondissement des Rivières sur l'urbanisme :
« usage principal » : la fin principale à laquelle un lot, un bâtiment ou une construction, en tout ou en partie, est destiné;
« usage dérogatoire » : un usage exercé qui n’est pas conforme;
[21] L'article 5 du Règlement prévoit que le territoire d'un arrondissement est divisé en zone, selon le plan de zonage. Conformément à l'article 6, chaque zone est identifiée par un code alphanumérique composé de cinq chiffres suivis de deux lettres. L'article 9 prévoit qu'une grille de spécifications, propre à chaque zone, contient les normes particulières applicables à cette zone.
[22] L'article 4 du Règlement prévoit que n'est autorisé aux fins du Règlement que ce qui est spécifiquement prescrit. Plus particulièrement, l'article 11 établit qu'un groupe d'usages n'est autorisé dans une zone que s'il apparaît à titre d'usage autorisé à la grille de spécifications.
[23] L'article 26 du règlement définit les usages commerciaux du groupe C1, services administratifs :
26. Le groupe C1 services administratifs comprend les établissements dont l’activité principale est de fournir des services.
Ce groupe comprend, notamment, les usages suivants :
1° l’administration publique gouvernementale ou paragouvernementale;
2° un agent ou un courtier grossiste, sans entreposage de biens sur place;
3° les assurances;
4° un bureau de vétérinaire sans accueil d’animaux;
5° un établissement de vente, sans entreposage de biens sur place, qui utilise des méthodes différentes de la vente en magasin;
6° un établissement qui, sans entreposage de biens sur place, produit et distribue, ou offre les moyens de transmettre ou de distribuer, des produits d’information et des produits culturels, tels que l’édition, la production ou la distribution de film et d’enregistrement sonore, la radiotélévision, les télécommunications, les fournisseurs de services Internet, le traitement des données et les services d’information;
7° la gestion de sociétés ou d’entreprises;
8° un regroupement de personnes, un ordre professionnel ou une organisation similaire ou un organisme qui soutient diverses causes ou défend les intérêts de personnes;
9° un service de consultation en publicité;
10° un service de répartition de transport ou un service de location d’automobiles sans que ceux-ci ne soient entreposés sur place;
11° un service de sécurité et de surveillance;
12° les services administratifs de soutien aux entreprises;
13° les services financiers autres que les services de dépôt, de retrait et d’encaissement de chèques au comptoir ou par guichet automatique;
14° les services immobiliers qui comprennent la location, la gestion, la vente ou l’évaluation d’immeubles;
15° les services professionnels, scientifiques ou techniques;
16° les établissements industriels de haute technologie qui exercent des activités de fabrication, de services, de recherche ou de développement dans le domaine des technologies de l’information, des communications, de la géomatique, de l’instrumentation de mesure et de contrôle, de l’optique, de la photonique et du laser, de l’automatisation, de la robotique, de la télécommunication, d’Internet, des logiciels et d’équipements informatiques ou du multimédia d’une superficie de plancher maximale de 200 mètres carrés.
[24] On peut constater que les salons de massages, de quelque genre que ce soit, n'entrent pas dans cette catégorie d'usage.
[25] L'article 27 du Règlement décrit pour sa part le groupe commerce C2, vente au détail et services :
27. Le groupe C2 vente au détail et services comprend les établissements dont l’activité principale est de vendre au détail ou d’offrir des services personnels ou des services après vente de réparation ou d’installation et des services de réparation d’électroménagers et d’équipements électroniques.
Ce groupe comprend, notamment, les usages suivants :
1° une agence de voyage;
2° un centre de conditionnement physique d’une superficie de plancher de 200 mètres carrés ou moins;
3° un comptoir postal;
4° un comptoir de préparation d’aliments ou un traiteur sans service de consommation sur place, d’une superficie de plancher maximale de 200 mètres carrés;
5° un comptoir de service de dépôt, de retrait et d’encaissement de chèques;
6° un commerce de vente au détail de pièces et d’accessoires pour véhicules automobiles sans installation;
7° un crématorium;
8° un détaillant en magasin;
9° une galerie d’art;
10° une salle d’exposition;
11° un service de cordonnerie et de blanchisserie;
12° un service de développement et de tirage de photographies;
13° un service de photocopies;
14° les services funéraires;
15° un service de location de biens;
16° un service de massothérapie;
17° un service de soins esthétiques personnels;
18° un service de soins pour animaux domestiques.
(Soulignement ajouté)
[26] Les services de massothérapie sont donc spécifiquement inclus dans ce groupe d'usages.
[27] L'article 30 prévoit le groupe commerce C5, commerces à caractère érotique :
30. Le groupe C5 commerce à caractère érotique comprend les établissements à caractère érotique de même que les usages qui, même s’ils pouvaient être compris dans un autre groupe, correspondent à l’une des descriptions suivantes :
1° un établissement qui cherche à tirer profit de la présentation d’un spectacle dans lequel une personne présente ou met en évidence ses seins, ses parties génitales ou ses fesses en reproduisant l’expression du plaisir sexuel ou en provoquant l’excitation sexuelle ou qui, à l’aide de gestes, de paroles ou de sons, reproduit l’expression du plaisir sexuel ou provoque l’excitation sexuelle;
2° une salle de cinéma dans laquelle sont projetés des films montrant les parties génitales humaines dans un état d’excitation sexuelle ou présentant une scène de masturbation, de sodomie, de fellation, de cunnilingus ou de coït, dans une proportion, calculée en fonction de la durée des films, de 50 % ou plus par rapport à l’ensemble de la durée des films projetés pour une année;
3° un établissement qui, bien qu’exerçant un usage principal différent, présente accessoirement un film ou une image enregistrée montrant les parties génitales humaines dans un état d’excitation sexuelle ou présentant une scène de masturbation, de sodomie, de fellation, de cunnilingus ou de coït;
4° un établissement qui correspond à l’une des descriptions suivantes :
a) les biens ou les services offerts sont fournis habituellement par une personne dont les seins, les parties génitales ou les fesses sont dénudés;
b) les biens ou les services offerts sont fournis par une personne qui porte uniquement un ou les vêtements suivants : un soutien-gorge, une culotte sous-vêtement, un porte-jarretelles, des bas, un cache-sexe, un caleçon, que ceux-ci soient recouverts ou non d’un vêtement transparent;
5° un établissement dont plus de 50 % de la marchandise destinée à la vente ou à la location est constituée d’imprimés, de films, de cassettes vidéo ou d’objets érotiques remplissant une des conditions suivantes :
a) il s’agit d’une image qui tend à provoquer l’excitation sexuelle par la mise en évidence de seins, de parties génitales ou de fesses humaines ou d’une image qui présente une personne dans une attitude exprimant le plaisir sexuel ou suggérant l’accomplissement d’un acte sexuel;
b) il s’agit d’une image montrant des parties génitales humaines dans un état d’excitation sexuelle ou présentant une scène de masturbation, de sodomie, de fellation, de cunnilingus ou de coït;
c) il s’agit d’un film ou d’un enregistrement qui contient une image qui présente des parties génitales humaines dans un état d’excitation ou qui présente une scène de masturbation, de sodomie, de fellation, de cunnilingus ou de coït;
d) il s’agit d’un objet qui constitue ou qui représente des parties génitales humaines;
e) il s’agit d’un objet destiné à provoquer l’excitation sexuelle ou devant servir à des fins sexuelles.
(Soulignements ajoutés)
[28] Il faut d'abord constater que le premier alinéa prévoit l'inclusion dans ce groupe de deux types d'usage :
- d'une part les établissements à caractère érotique en tant que tel
- et, d'autre part, les usages qui pourraient éventuellement être compris dans d'autres groupes, mais qui satisfont aux conditions prescrites par l'un ou l'autre des paragraphes 1 à 5.
[29] Le premier de ces paragraphes porte sur les spectacles à caractère érotique. Le second et le troisième visent des salles de cinéma ou des commerces où on projette ce genre de matériel. Le cinquième vise les marchands de matériels érotiques.
[30] Le quatrième paragraphe mérite qu'on s'y attarde. On y a référé dans la présente affaire. Il vise les commerces où les biens ou les services sont fournis par des personnes dénudées ou qui portent le type de vêtements décrits à l'alinéa b).
[31] De l'avis du Tribunal, il revient à la poursuivante qui prétend que les services de massage sont rendus par des personnes dénudées ou portant des sous-vêtements dans un salon de massage d'en faire la preuve hors de tout doute raisonnable. Cependant, la preuve peut mener à la conclusion qu’il s’agit d’un commerce à caractère érotique comme tel, même si elle ne permet pas de tirer une conclusion quant aux vêtements que portent généralement les employés.
[32] Revenons au premier élément de l'article 30. Aucun des mots de l'expression "établissement à caractère érotique" n'est défini au Règlement. Il faut attribuer à chacun de ces mots le sens approprié lorsque sont réunis les termes « établissement », « caractère » et « érotique ».
[33] Le terme « établissement » signifie :
- Lieu où une chose ou une personne est établie, unité géographique d'exploitation (établissement commercial, scolaire, public ou industriel, entreprises[13].
- Entreprise commerciale ou industrielle[14].
- Immeuble ou local où une personne morale, un groupement ou une entreprise exerce. Lorsque l'établissement est qualifié de « commercial », lieu où une entreprise commerciale est située[15].
[34] Le terme « caractère » a pour sens :
- Signe ou ensemble de signes distinctifs, trait propre à une personne ou à une chose qui permet de la distinguer d'une autre, caractéristique. Élément propre ou particulier qui permet de reconnaître quelque chose, nature[16].
- Ce qui donne à quelque chose son originalité. Qualité propre à quelqu'un ou à quelque chose[17].
[35] Finalement, le terme « érotique » est le terme-clé de cette expression. Il a les acceptions suivantes :
- Qui a rapport à l'amour physique, au plaisir et aux désirs sexuels, sensuels, sexuels, voluptueux, licencieux. Qui provoque le désir sexuel. Par exemple, écrit érotique, pose érotique, geste érotique, vêtement ou tenue érotique[18].
- Relatif à l'amour physique, à la sexualité[19].
- Qui provoque ou évoque les désirs sexuels[20].
[36] Ces trois définitions ne sont pas sans rappeler certains aspects des conditions prévues aux paragraphes 1 à 5 de l'article 30.
[37] Le Tribunal en conclut, par conséquent, que l'expression « établissement à caractère érotique » signifie lieu ou local où un commerce exerce des opérations qui se caractérisent ou dont la nature est axée sur le plaisir ou le désir sexuel, où l'on provoque ou satisfait de quelque façon le plaisir ou le désir sexuel. C'est d'ailleurs le sens qui a été attribué à l'expression « matériel érotique » dans l'affaire Distributions Percour inc. c. Montréal (Ville de)[21].
[38] Pour les fins de la présente décision, il n’est pas nécessaire d’analyser les autres usages autorisés dans la zone 22503Cb.
[39] Les municipalités n'ont de pouvoirs que ceux qui leur sont délégués par la législature provinciale, de façon expresse ou qui découlent directement du pouvoir délégué[22].
[40] Le pouvoir d'une municipalité d'adopter une réglementation de zonage tire sa source de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme[23]. À cette fin, l'article 113 prévoit :
113. Le conseil d’une municipalité peut adopter un règlement de zonage pour l’ensemble ou partie de son territoire.
Ce règlement peut contenir des dispositions portant sur un ou plusieurs des objets suivants :
1° pour fins de réglementation, classifier les constructions et les usages et, selon un plan qui fait partie intégrante du règlement, diviser le territoire de la municipalité en zones;
[…]
3° spécifier, pour chaque zone, les constructions ou les usages qui sont autorisés et ceux qui sont prohibés, y compris les usages et édifices publics, ainsi que les densités d’occupation du sol;
[41] Par ailleurs, l'article 10 alinéa 2 de la Loi sur les compétences municipales[24] accorde aux municipalités le pouvoir de régir les activités économiques sur leur territoire :
10. Toute municipalité locale peut, par règlement, régir:
[…]
2° les activités économiques;
[…]
[42] Si une municipalité n'a de pouvoirs que ceux qui lui sont délégués, le pouvoir qui lui a été délégué, lorsqu'il est exercé, n'a pas à faire l'objet d'une interprétation restrictive. La jurisprudence reconnaît que les compétences municipales doivent faire l'objet d'une interprétation large, fondée sur l'objet visé en tenant compte du contexte, de l'objet de la législation dans son ensemble et de l'intention du législateur[25].
[43] La démarche menant à l'analyse constitutionnelle d'une disposition législative en matière pénale doit débuter par l'appréciation de la preuve quant au bien-fondé de l'accusation. Suit ensuite l'analyse de la validité des dispositions en fonction de la loi habilitante. Lorsque ces étapes sont franchies, la question constitutionnelle peut être abordée[26]. C'est à cette étape que la conformité des règlements municipaux aux droits reconnus par la Charte est étudiée[27].
[44]
L’article
Chacun a les libertés fondamentales suivantes :
[…]
b) liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication.
[45] La Cour Suprême du Canada accorde une grande importance à la liberté d'expression. Elle reconnaît le caractère privilégié de ce droit dans notre constitution et dans notre démocratie. Elle lui accorde donc une interprétation libérale[28]. Les arrêts de cette Cour sont riches d'enseignements sur la nature et la portée de la liberté d'expression ainsi que sur la procédure en matière de contestation constitutionnelle fondée sur cette liberté fondamentale.
[46] La liberté d'expression garantit que toute personne puisse manifester ses idées, pensées, opinions, croyances, c'est-à-dire toutes les expressions du corps et de l'esprit. Cela vaut tant à l'égard des opinions des idées acceptées et reconnues, mais aussi à l'égard de celles qui sont impopulaires, déplaisantes, contestataires, désobligeantes, offensantes, odieuses, voire même choquantes[29]. Cette liberté garantie que chacun puisse ainsi s'exprimer sans crainte de censure[30].
[47] L'expression comporte à la fois un contenu et une forme. Ces éléments peuvent être inextricablement liés ou non. Une activité constitue une forme d'expression si elle transmet une signification. Cette signification est le message, le contenu de l'expression[31].
[48] Les modes d'expression sont infiniment variés. Les premiers modes qui nous viennent à l'esprit sont le discours, l'écrit et les arts[32]. Mais là ne s'arrête pas l'expression. D'autres formes de comportement peuvent aussi être expressives, tels les actes et les gestes. Par son objet, la liberté d'expression a un très large spectre qui englobe des formes d'expression d'importance et de qualité variables[33].
[49] La garantie constitutionnelle qu’est la liberté d'expression vaut, pour le contenu du message sans égard à la signification ou au but de la signification[34]. On ne peut exclure une activité expressive du champ de cette garantie sur la seule base du contenu ou du sens du message. « Si l'activité transmet une signification, elle a un contenu expressif et elle relève à première vue de la garantie »[35].
[50] Cependant, il faut nécessairement que l'activité soit expressive, qu'elle transmette un message. Ce message doit être transmis à une autre personne ou à plusieurs autres personnes. Si l'activité n'a pas de contenu expressif, la garantie ne s'applique pas. Si le contenu expressif d'une activité n'est pas évident, la preuve présentée lors du procès doit établir ce contenu expressif ou encore l'intention de celui qui invoque la liberté de transmettre un message particulier[36].
[51] La liberté d'expression existe tant en faveur de celui qui s'exprime qu'en faveur de celui qui reçoit le message[37].
[52] Cette garantie repose sur le théorème que la libre circulation des idées et des images est la meilleure voie vers la vérité, l'épanouissement personnel et collectif des personnes et la coexistence pacifique dans une société hétérogène où les croyances des membres peuvent diverger et s'opposer[38]. Un des buts de la liberté d'expression est de protéger l'expression des défavorisés et des minorités[39]. On a jugé que toutes les formes d'expression étaient essentielles au maintien d'une société libre et démocratique[40].
[53] Par conséquent, les principes et les valeurs qui sous-tendent la liberté d'expression sont :
- La recherche de la vérité, laquelle est une activité bonne en soi.
- La participation à la prise de décision d'intérêt social et politique. Cette participation doit être encouragée et favorisée.
- La diversité des formes d'enrichissement et d'épanouissement personnels qui doit aussi être encouragée dans une société tolérante, voire même accueillante, non seulement à l'égard de ceux qui s'expriment, mais aussi à l'égard de ceux à qui le message est destiné[41].
[54] Il a ainsi été reconnu qu'imposer une norme de moralité seulement parce qu'elle reflète les conventions d'une société donnée ou d'une majorité, va à l'encontre de l'exercice de la jouissance des libertés individuelles à la base de notre contrat social[42]. Une personne a le droit de se développer et de développer son potentiel selon son propre plan de vie, en accord avec ses valeurs et ses croyances, de faire des choix, pour le meilleur et pour le pire, et d'être non-conformiste, original ou même excentrique. Ce droit ne peut être restreint qu'en conformité des principes de justice fondamentale[43].
[55] Quoique la liberté d'expression protège tout contenu expressif, la violence comme forme d'expression n'est pas protégée[44]. La liberté d'expression se bute aussi à la sécurité des biens[45].
[56] La liberté d'expression assure donc à tous les membres de la société le respect de leurs comportements expressifs et l'égalité dans leurs relations interpersonnelles[46]. Par conséquent, si le mode d'expression n'est pas en soi violent, l'expression est visée par la protection constitutionnelle[47].
[57] Même si cette liberté n'est pas absolue, compte tenu des valeurs en jeu et du fait que tout contenu d'expression est protégé, les cas où la garantie doit être restreinte sont d'exception. Ces cas sont d'application restreinte. Ils doivent se limiter aux cas les plus clairs. Ces cas d'exception sont en principe liés à des atteintes à l'intégrité ou à la liberté d'une autre personne par des moyens violents[48]. Toute tentative de restreindre la liberté d'expression doit faire l'objet d'un examen attentif[49].
[58] Ainsi, toute loi qui érige en infraction la transmission d'un message (ce message soit-il impopulaire et déplaisant) par une forme d'expression reconnue, soit la parole, l'écrit ou les arts, doit être considérée au départ comme restreignant cette garantie. En ce qui concerne les autres formes d'expression, la personne qui invoque l'atteinte à cette liberté a l'obligation d'établir d'abord que son comportement était expressif[50].
[59] Dans le cadre d'une contestation de cette nature, la première question en litige consiste à déterminer si l'activité en cause transmet ou tente de transmettre une signification, un message[51]. Si l'activité ne relève pas de l'expression, il ne peut être question d'application de la garantie constitutionnelle[52].
[60] Si l'activité est expressive, le Tribunal doit ensuite déterminer si la législation en cause a pour but ou pour effet de restreindre la liberté d'expression[53].
[61] L'objet de la loi a trait à la matière, au but visé par le législateur alors que l'effet a trait aux conséquences, aux répercussions ou aux résultats de l'application de la législation à l'activité couverte par la garantie[54].
[62] L'objet de la législation s'évalue du point de vue de la garantie elle-même[55]. Si l'objet de la loi est de restreindre ou de prohiber :
- le contenu de l'expression en prohibant certains messages,
- certaines formes de message ou une forme d'expression liée au contenu du message,
- ou encore la transmission ou l'accès à un message par un individu ou par un groupe,
il y a restriction à la liberté d'expression[56].
[63] Par contre, lorsque le gouvernement ne cherche qu'à contrôler les conséquences de certaines activités humaines, l'objet de la législation n'est pas de contrôler l'expression[57]. Toutefois, l'effet de cette législation et ses répercussions peuvent, en certains cas, porter atteinte à la garantie.
[64] Lorsqu'une personne invoque que l'effet de la législation restreint sa liberté d'expression, elle doit d'abord établir par prépondérance que son activité favorise une des valeurs sous-jacentes à la liberté d'expression (valeurs décrites au paragraphe 33) et que l'effet de la législation porte atteinte à la liberté d'expression[58].
[65]
Si l'objet ou l'effet de la législation est de restreindre la
transmission d'une signification, cette législation porte atteinte à la
garantie prévue à l'article
[66]
Ces concepts font appel à la protection prévue à l'article
7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale.
[67] La portée excessive et la théorie de l’imprécision sont apparentées. Elles sont cependant distinctes. Ces concepts visent des situations différentes[60]. L'imprécision concerne le caractère obscur et l'impossibilité de cerner la portée de la loi. Il se peut, par contre, que la loi puisse s'appliquer à une multitude de situations sans que cela corresponde au but du législateur: l'imprécision a alors un effet de portée excessive. D'autre part, il existe des situations où le texte de loi est clair, mais que sa portée est beaucoup trop large et qu'elle englobe de nombreuses situations aucunement visées par l'objectif du législateur. Il y a alors « portée excessive » de la loi[61].
[68] L'imprécision et la portée excessive mettent en cause deux principes bien établis dans notre droit[62].
[69] Premièrement, il est essentiel, dans une société libre et démocratique, que les citoyens soient en mesure de savoir avec un fort degré de certitude quel comportement est permis et lequel est défendu. Les citoyens sont alors informés des conséquences possibles de certaines conduites et prévenus de celles à éviter[63]. Ils pouvaient adapter leur conduite aux exigences de la loi.
[70] Deuxièmement, le pouvoir discrétionnaire des personnes chargées d'appliquer la loi doit être limité par des normes législatives claires et explicites[64]. Les principes de justice fondamentale exigent que le pouvoir discrétionnaire en matière d'application la loi soit limité. L'application des principes de la légalité et de la primauté du droit ne peut permettre que soit accordé aux personnes chargées de l'application de la loi, le pouvoir discrétionnaire de faire ce qui semble le mieux dans une grande variété de cas. Il n'y a alors plus de règle de droit[65].
[71] Ces principes sont aussi à la base des décisions qui reconnaissent que le pouvoir délégué aux municipalités de réglementer certaines matières doit être exercé en édictant des prescriptions certaines et définies de sorte que ceux qui doivent y obéir puissent connaître leurs devoirs[66]. Ces décisions reconnaissent aussi que les personnes chargées de l'application de la loi doivent connaître les normes qui les guideront dans leurs responsabilités.
[72] Le pouvoir réglementaire ne peut non plus s'entendre d'une pure discrétion de prendre des décisions ad hoc face à une situation donnée[67]. Une loi qui ne donne pas d'indices quant à la manière dont les décisions relatives à son application doivent être prises, c'est-à-dire sur les facteurs et les éléments déterminants de sa mise en application, et qui attribue un pouvoir discrétionnaire qui laisse toute latitude et qui prive le pouvoir judiciaire du moyen de contrôler l'exercice de sa discrétion, ne rencontre ni les principes de justice fondamentale ni les exigences de la proportionnalité de l'atteinte à un droit garanti.
[73] L'analyse de la portée de la législation débute par la recherche du sens réel des dispositions en cause. Le Tribunal doit alors épuiser ses fonctions d'interprétation des dispositions pour en déterminer le sens et les applications possibles. Ce n’est que si le Tribunal en vient à la conclusion qu’il lui est impossible de cerner le sens des dispositions en cause qu’il peut conclure que les dispositions sont imprécises et invalides. Après avoir cerné le sens des dispositions, le Tribunal peut évaluer la portée de celles-ci si des situations potentielles, afin de s’assurer qu’elles n’ont pas une portée excessive.
[74] Pour que l'imprécision de la loi entraîne son invalidité, elle doit être telle qu'un effort raisonnable d'interprétation ne permet pas de déterminer le sens des dispositions. Ainsi, une personne raisonnablement intelligente et suffisamment informée serait alors dans l'impossibilité d'en déterminer le sens et de régir sa conduite en conséquence[68]. Une simple incertitude ou un simple questionnement sont toutefois insuffisants à cet égard[69].
[75] Il importe donc dans un premier temps que le Tribunal cherche à déterminer le sens des dispositions et qu'il vérifie ce que peut en percevoir un citoyen raisonnablement intelligent et suffisamment informé.
[76] Tel que déjà mentionné précédemment, le Tribunal doit garder en mémoire, qu'il existe des cas où la souplesse est de mise pour permettre au législateur d'englober une multitude de situations visées par son objectif légitime[70].
[77] L’article 1 prévoit :
La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.
[78] Conformément à cet article, l'état doit, pour justifier une atteinte à un droit garanti, établir que la disposition satisfait aux conditions suivantes :
- L'objectif poursuivi par la disposition attaquée doit être urgent et réel, c'est-à-dire être suffisamment important pour justifier la suppression d'un droit dans une société libre et démocratique. Cet objectif peut viser à empêcher des préjudices sérieux et même une appréhension raisonnée de préjudices sérieux[71]. Seul un tel objectif peut permettre la suppression ou la restriction d'un droit garanti[72].
Cet objectif est celui du législateur au moment de l'adoption de la loi[73].
Cette condition exige plus qu'un but général de prévenir un préjudice. Elle exige un objectif urgent et réel[74].
- Lorsque l'importance de l'objectif est établie, la partie qui recherche le maintien de la disposition doit aussi démontrer que les moyens choisis sont raisonnables et que la justification de ces moyens peut se démontrer dans le cadre d'une société juste et démocratique. La disposition doit alors être proportionnelle à l'objectif en ce que la disposition doit rencontrer trois conditions[75] :
- La disposition doit favoriser la réalisation de l'objectif. La disposition doit procurer un avantage qui a un lien causal et rationnel avec l'objectif[76].
Une interdiction totale peut, en certains cas, avoir un lien rationnel avec l'objectif[77].
- La disposition doit être soigneusement conçue pour éviter toute atteinte excessive au droit garanti. Les tribunaux ont le devoir d'empêcher les atteintes indues aux libertés constitutionnelles[78]. La disposition doit constituer une réaction mesurée et appropriée aux préjudices visés par la loi[79]. La disposition doit être raisonnablement bien adaptée à l'objectif. Les difficultés et les intérêts contradictoires doivent être pris en considération de façon à ce que l'atteinte au droit se limite à ce qui est raisonnablement nécessaire pour les fins de la réalisation de l'objectif[80].
Le législateur n'est pas tenu à la perfection dans cette démarche. Il n'est tenu que d'exercer un jugement raisonnable dans le choix des moyens[81]. Ainsi, un choix raisonnablement fondé du législateur est acceptable. Ce dernier doit avoir le pouvoir de faire des choix de principes et de moyens à l'égard d'un objectif réel, sérieux et urgent. Le gouvernement jouit donc d'une marge de manœuvre pour formuler des objectifs légitimes et pour choisir des moyens d'y parvenir[82]. Rien n'oblige l'État à n'adopter qu'une seule solution face à l'objectif : des mesures complémentaires sont possibles[83]. Face à cette latitude, les tribunaux doivent faire preuve de retenue à l'égard des moyens adoptés par le législateur, et plus particulièrement à l'égard des moyens qui ont pour but une politique sociale légitime[84].
La Cour Suprême du Canada a reconnu qu'il est plus difficile de justifier l'interdiction totale d'une forme d'expression que des restrictions touchant à une forme d'expression ou des modalités de celle-ci[85]. L'interdiction totale n'est acceptable que lorsque le gouvernement peut établir que seule une telle interdiction permet d'atteindre l'objectif réel et urgent. Si le gouvernement n'est pas en mesure d'expliquer pourquoi il n'a pas choisi une mesure moins attentatoire, mais tout aussi efficace, la disposition doit être déclarée invalide[86].
- La disposition doit produire des avantages qui égalent à tout le moins les effets négatifs de l'atteinte. En mettant en balance les avantages et les effets négatifs, les avantages doivent être proportionnels aux inconvénients[87]. À cette étape sont soupesés les intérêts individuels et collectifs en cause. Plus les effets préjudiciables de la disposition sont grands, plus les bénéfices retirés de la disposition doivent être importants pour rencontrer cette condition et justifier une telle atteinte dans une société libre et démocratique[88]. Si les effets négatifs sont hors de proportion avec l'objectif, la limite n'est pas raisonnable et sa justification ne peut se démontrer[89].
[79] La preuve présentée à cette fin peut être complétée par le bon sens et le raisonnement par déduction[90].
[80]
La justification selon l'article
[81] L'article 1 oblige à comparer l'atteinte au droit garanti et l'intérêt de l'état dans le maintien de la loi[93].
[82] L'analyse en vertu de l'article 1 doit tenir compte de l'activité expressive en cause. Toutes les formes d'expression ne revêtent pas la même importance eu égard aux principes sous-jacents à la liberté d'expression[94].
[83] La liberté d'expression doit donc être analysée dans le contexte de l'affaire. Le Tribunal peut ainsi cerner les aspects de l'expression en cause, les valeurs et les principes en jeu. La réalité du litige permet d'en venir à une décision juste et équitable dans les circonstances[95].
[84] En matière de contexte, il faut aussi tenir compte du type de droit que l'affaire met en cause: le droit civil, le droit administratif, le droit réglementaire ou le droit criminel. La Cour Suprême a reconnu que seul un objectif réel et urgent évident peut justifier que l'expression d'un individu entraîne une sanction criminelle, compte tenu des conséquences de toutes sortes qui se rattachent à une telle poursuite[96]. Cependant, ces vicissitudes et ces stigmates se limitent aux affaires criminelles. Elles n'existent pas en matière réglementaire[97]. Il y a donc lieu de traiter différemment les affaires réglementaires lors d'une analyse fondée sur la Charte. Ces infractions sont assujetties à une norme moins sévère[98].
[85]
Dans une analyse fondée sur l'article
[86] Tous ces critères servent de normes en fonction desquelles il doit être décidé du caractère raisonnable et de la justification d'une limite à une liberté constitutionnelle. Cette restriction ne sera maintenue que si elle concorde avec ceux-ci, lesquelles constituent le cadre dans une société libre et démocratique[102].
[87] Il importe enfin au Tribunal de garder en mémoire que la rigidité et le formalisme ne sont pas de mises dans l'application de l'article 1 de la Charte[103].
[88] Les éléments constitutifs de l'infraction reprochée que devait prouver la poursuite hors de tout doute raisonnable sont les suivants :
- la défenderesse exerçait, le 28 mars 2018, un commerce à caractère érotique et
- elle le faisait dans une zone où cette catégorie d'usage était interdite.
[89] Les décisions produites par la défense, qui portent sur la tenue d’une maison de débauche ou les salons de massage n’ont pas de pertinence quant aux éléments constitutifs de l’infraction reprochée.
[90] La preuve hors de tout doute raisonnable correspond à un degré de certitude qui, sans qu'il s'agisse de certitude absolue, est élevé et qui est nettement plus concluant que la prépondérance des probabilités[104].
[91] Il n'est pas contesté que le 2575 du boulevard Wilfrid-Hamel est situé dans la zone 22503Cb et que le commerce de la défenderesse, Le Privé, occupe le local 202 de cet immeuble.
[92] Les commerces C5 à caractère érotique ne sont pas autorisés dans la zone 22503Cb selon la grille de spécifications applicable à cette zone. Ils y sont donc interdits selon les articles 4 et 11 du Règlement. Par contre, si le commerce de la défenderesse n'est pas un établissement à caractère érotique et qu'il s’agit effectivement d’un établissement de massothérapie, il est clairement autorisé dans cette zone à titre de commerce C2 de vente au détail et services.
[93] Le débat, quant aux éléments de l'infraction, porte donc uniquement sur la nature du commerce Le Privé.
[94] La preuve ne comporte pas de preuve directe portant sur l'offre ou l'exécution de services de nature sexuelle ni sur les services rendus par des personnes dénudées ou portant les sous-vêtements mentionnés à l'article 30 du Règlement dans le local de la défenderesse. La poursuite n'a pas eu recours à un agent d'infiltration. Elle n'a pas obtenu de déclaration des employées présentes lors de l'inspection. Le technicien Lortie ne s'est pas informé de la nature des services offerts. Aucune personne qui aurait été cliente de l'établissement n'a témoigné dans cette affaire.
[95] Lors de l'inspection, toutes les employées présentes étaient vêtues normalement. Rien dans les lieux ne rappelait les images du site Internet du salon Le Privé.
[96] En somme, la preuve n'est que circonstancielle.
[97] Lorsque la preuve est uniquement circonstancielle, le Tribunal doit, pour conclure à la culpabilité, être convaincu que la preuve exclut toute autre conclusion raisonnable que la culpabilité[105].
[98] À la lumière de la preuve présentée, le Tribunal ne peut clairement pas conclure hors de tout doute raisonnable que les services rendus dans les salles de massage de l'établissement le sont habituellement par une ou des personnes dont les fesses, les seins ou les parties génitales sont dénudés ou par une ou des personnes qui portent uniquement des sous-vêtements ou la lingerie fine mentionnés à l'article 30 du Règlement.
[99] Incidemment, le Tribunal est d'avis que le sous-alinéa b) de l'alinéa 4 de l'article 30 sous-entend aussi l'adverbe « habituellement » mentionné au sous-alinéa a).
[100] Le Tribunal conclut donc que la preuve présentée ne permet pas de conclure à la culpabilité en recourant à la deuxième partie de l'article 30 du Règlement R.C.A.2V.Q. 4.
[101] La preuve permet-elle de conclure qu'il s'agit néanmoins d'un établissement à caractère érotique?
[102] D'une part, Le Privé s'annonce sur son site comme un salon de massage. Il offre deux types de massage.
[103] Cet établissement se présente au Registraire des entreprises comme offrant des « soins de santé ou de détente personnelle ». La demande de certificat d'autorisation du 1er septembre 2017 indique que ses activités sont « bronzage, massothérapie et soins esthétiques personnels ». Toutefois, les photographies prises par le technicien Lortie ne montrent aucun équipement de bronzage à cet endroit.
[104] Par ailleurs, la carte d'affaires de l'établissement[106] ne fait pas mention de services de massage.
[105] Cependant, le site Internet de l'entreprise[107] est exclusivement axé sur la sensualité, les parties du corps à caractère érotique, l'érotisme et la suggestion sexuelle :
- Le personnel photographié est composé de 19 personnes, exclusivement des femmes.
- Les employées au travail sont identifiées uniquement par leur prénom.
- Les membres du personnel sont appelées « demoiselles », et non « massothérapeute » ou « masseuses ».
- On laisse entendre que le client « tombera en amour » avec ces « demoiselles ».
- Les photographies du personnel apparaissant sur le site montrent ces 19 personnes particulièrement dénudées. L'accent est uniquement mis sur leurs corps. On y voit leurs seins, leurs cuisses, leurs ventres et leurs fesses. Leurs poses sont suggestives. Les photographies tiennent plus du magazine érotique que du magazine de soins personnels ou de santé.
- On ne voit jamais les visages des membres du personnel, ce qui amène à conclure que le client doit choisir l'employée qui le servira en fonction du corps de celle-ci et de sa pose sur la photographie.
- Pourquoi un client songerait-il secrètement à un massage « traditionnel »? S'il y rêve secrètement, il ne peut s'agir que de services additionnels que le client préfère tenir secrets.
- Seules deux pages du site traitent des services de massage. Rien ne traite des bienfaits apportés ou des malaises soulagés par les massages mentionnés. Leurs descriptions sont centrées sur les sensations qu'ils procurent.
[106] Par ailleurs, les photographies prises lors de l'inspection[108] suscitent plusieurs conclusions :
- La présence d'une douche dans une salle de massages paraît inhabituelle. Pour qui et pourquoi?
- Le miroir à la hauteur du corps du client est aussi un élément particulier du décor. Ce n'est certes pas pour l'employée puisqu'elle peut déjà très bien voir le corps du client. Ce ne peut être que pour le client. De plus, pour profiter du miroir, celui-ci ne doit pas être couché sur le ventre, mais plutôt sur le dos.
- Un fauteuil d'attente où le client est caché pour les autres clients ou les visiteurs et où ce client ne peut pas voir les autres clients amène à conclure que cet aménagement a pour but d'assurer la confidentialité de la clientèle, ce qui n'est pas nécessaire dans un salon de massage « traditionnel ». Cet aspect n'est pas sans rappeler les désirs secrets des clients qu'on veut ainsi conserver tels.
[107] Dans la salle des employés se trouvent deux éléments qui, de l'avis du Tribunal, concordent avec toutes les remarques précédentes et confirment la vocation des lieux. Ces éléments sont hautement pertinents :
- L'affiche Catwoman annonce la visite d'une infirmière. Cette visite n'est certainement pas pour les clients puisque l'affiche se trouve dans la salle des employées. L'objet de la visite de l'infirmière est la détection des maladies transmises sexuellement, la vaccination contre l'hépatite, les tests de grossesse ou encore la contraception d'urgence. Ici, tous ces services font référence à des activités sexuelles des employées.
- L'image Catwoman doit être appréciée à la lumière de la pièce P-10 qui décrit le projet Catwoman. Il s'agit de services offerts, non pas à une clientèle générale, mais aux femmes travailleuses du sexe. Les services de l'infirmière en font partie. Dans cette entreprise, le personnel est féminin. On le montre partiellement dévêtu. On le voit dans des positions suggestives. Tous les éléments mentionnés précédemment concordent avec cette affiche.
- Le lien « bien comprendre le projet de loi C-36 » invite les travailleuses du sexe à être bien informées sur les nouvelles dispositions du Code criminel en matière de prostitution.
[108] L'ensemble des faits ressortant du site de la défenderesse, de ses locaux et de son affichage dans la salle des employées permet de conclure que le salon Le Privé est un établissement à caractère érotique offrant des services sexuels. Le commerce est axé sur la sensualité, la sexualité et l'appétit sexuel. Les éléments précédents ne mènent qu'à une seule conclusion, et à nulle autre inférence rationnelle selon la preuve : il s’agit d’un commerce à caractère érotique.
[109] La poursuite a donc établi les éléments constitutifs de l'infraction.
[110] La lecture du Règlement R.C.A.2V.Q. 4 permet de constater qu'il s'agit clairement d'un règlement de zonage. Il prévoit, entre autres, la division du territoire de la Ville de Québec en zones. Il classifie les usages possibles sur le territoire. Il prévoit enfin pour chaque zone les usages qui sont autorisés. C'est l'essence d'un règlement de zonage[109].
[111] L'article 30 relatif aux « commerces à caractère érotique » regroupe sous cette appellation les commerces que le législateur municipal considère comme tels. Le règlement prévoit, par le biais des grilles de spécifications, où ces commerces sont autorisés. Là où ils ne sont pas autorisés, ils sont défendus comme le prévoit le Règlement. C'est la vocation propre d'un règlement de zonage.
[112] L'article 30 ne vise pas à réglementer la tenue vestimentaire du personnel. Il n'impose pas de tenue vestimentaire. Il prévoit que, lorsque les personnes travaillent « déshabillées » ou habillées de sous-vêtements et qu'elles fournissent ainsi des services à une clientèle, le commerce fait partie d'une catégorie d'usage commercial, ceux « à caractère érotique ». On n'exige pas que ces personnes s'habillent, qu'elles s'habillent d'une certaine façon ou au minimum d'une certaine façon.
[113] L'article 30 n'interdit pas les commerces à caractère érotique. Il les définit. Les grilles de spécifications précisent où ces commerces sont autorisés et où ils peuvent s'établir[110]. Cet exercice qui relève de la compétence de la municipalité en matière d'urbanisme est valide[111].
[114] Si la définition de ce qui constitue un « commerce à caractère érotique » peut faire entrer certaines considérations de « moralité », consciemment ou inconsciemment, le fait d'autoriser ce type de commerce en certaines zones seulement tient compte de l'environnement de chacune des zones dans la ville. Le pouvoir de zonage est alors exercé légalement[112].
[115] De l'avis du Tribunal, l'article 30 du Règlement ne présente pas de difficulté d'interprétation.
[116] La deuxième partie de l'article est limpide. Le texte précise clairement les marchandises et les spectacles offerts dans des lieux, ainsi que l'habillement du personnel, qui font d'un commerce un « établissement à caractère érotique ».
[117] Quant à la première partie de l'article 30, même si sa formulation peut sembler circulaire, elle n'offre aucune difficulté d'interprétation. Le Tribunal devait l'interpréter en recourant au sens ordinaire et grammatical des mots, dans le contexte de la disposition, en prenant en compte l'objet de celle-ci et l'intention du législateur. L'exercice auquel le Tribunal s'est livré aux paragraphes 32 à 37 du présent jugement ne posait aucune difficulté. Il menait aisément à la conclusion du paragraphe 37. Cette conclusion est semblable à celle tirée par la Cour d'appel du Québec dans une autre affaire où se posait une question similaire (voir la note 21).
[118] Ainsi, l'article 30 ne souffre pas d'imprécision. Un citoyen, confronté au texte de l'article, est en mesure d'en connaître le sens et la portée. Il est en mesure de savoir si un commerce est ou non un « établissement à caractère érotique ». Les critères sont clairement précisés et ils ne font appel à aucune discrétion des personnes chargées d'appliquer la réglementation.
[119] Cet article n'a de plus aucune portée excessive. Le Tribunal n'a pu concevoir un type de commerce qui pourrait « accidentellement » être classé dans ce type d'usage en raison de la portée trop large des termes employés. De plus, lors des plaidoiries, aucun exemple n'a été donné à cet égard.
[120] Il n'y a
donc aucune atteinte à l'article
[121] Ce qui se passe dans ce type de commerce à caractère érotique comporte-t-il une dimension expressive? Transmet-on un message? Ce message correspond-il à l'un des objectifs de la liberté d'expression?
[122] Le Tribunal est d'avis que les activités qui se déroulent entre les quatre murs d'une salle de massage dans ce commerce se limitent aux seules personnes qui participent à ces activités. Il s'agit de massage corporel et de geste de prostitution. Les participants sont les seuls intéressés.
[123] Généralement, ses activités se déroulent dans le secret. Les participants gardent pour eux leurs gestes intimes. En l'espèce, aucune preuve n'a été présentée pour soutenir que les activités qui se déroulent dans les salles de massage visent à transmettre un quelconque message à une tierce personne. Aucun client ni aucune employée n'ont été entendus pour préciser leurs intentions respectives dans les salles de massage, s'ils y voient la transmission d'un message, qu’elle en est la signification et pour identifier le destinataire.
[124] D'ailleurs, le site Internet de la défenderesse souligne qu'il peut s'agir de désirs secrets. Aussi, la configuration de la salle d'attente démontre la confidentialité de l'identité des clients, tout comme les photos du personnel ne permettent pas d'identifier les femmes qui en font partie.
[125] Le caractère intime des gestes posés dans les salles de massage amène le Tribunal à conclure que les activités qui s'y déroulent ne transmettent aucun message. Il ne s'agit que de gestes physiques sans signification pour autrui.
[126] La Cour d'appel de l'Ontario a déjà décidé dans l'affaire R. c. Ludacka[113] que les contacts physiques entre des danseuses et des clients à l'occasion d'un spectacle à caractère érotique dans un bar n'étaient pas des activités expressives, mais de simples gestes physiques qui ne transmettaient aucun message ni tentaient de faire. Selon la Cour d'appel, ces gestes ne bénéficiaient pas de la protection de la liberté d'expression. Ce raisonnement s'applique à la présente affaire.
[127] De plus, les activités qui se déroulent dans les salles de massage n'ont aucun lien avec la recherche de la vérité, la prise de décision d'intérêt social ou politique ou l'expression de l'enrichissement et de l'épanouissement personnel. Le caractère intime et secret de ces gestes physiques les confine entre les murs des salles de massage. Ceux-ci n'ont rien à voir avec qui que ce soit à l'extérieur de ces murs.
[128] Il vaut aussi de souligner que certaines décisions d'appel ont de plus conclu, dans le cas de spectacles à caractère érotique, que ceux qui avaient intérêt à invoquer la liberté d'expression étaient les participants aux activités de danse. L'occupant des lieux, le tenancier ou le locataire ne pourrait pas invoquer la garantie constitutionnelle au lieu et place des danseurs[114]. Ainsi, dans le présent cas, la défenderesse invoquerait la liberté d'expression d'autrui.
[129] Par conséquent, la protection de la liberté d'expression ne trouve pas application en l'espèce.
[130] Dans l'éventualité où un tribunal d'appel conclurait que les activités qui se déroulent dans le commerce de la défenderesse transmettent un message qui rejoint les objets de la liberté d'expression, le Tribunal se prononce sur les questions relatives à l'allégation d'atteinte à la liberté d'expression.
[131] La réglementation n'interdit d'aucune façon les gestes qui peuvent être posés dans les salles de massage. Si ces gestes comportent un message, la réglementation n'en prohibe ni le contenu ni la transmission. Le règlement de zonage ne vise d'aucune façon la forme du message, son mode d'expression ou l'accès à ce message par un quelconque destinataire. Le règlement ne prohibe pas non plus ni ne normalise l'habillement de ceux qui participent à ces gestes.
[132] La réglementation n'a pour objet que de préciser où les établissements à caractère érotique doivent s'établir et exercer leurs activités. Ceux-ci peuvent donc avoir pignon sur rue dans certaines zones de la ville.
[133] Les activités du commerce de la défenderesse ne sont donc pas restreintes ni par l'objet de la réglementation ni par son effet. La réglementation ne porte donc pas atteinte à la liberté d'expression.
[134] Même s'il
devait y avoir atteinte à la garantie de l'article
[135] L'objectif poursuivi par le législateur municipal est d'établir des zones où les divers usages possibles en matière d'activité humaine peuvent être exercés sur le territoire de la ville. L'urbanisme, qui inclut le zonage, est un objectif important dans les municipalités. Ceci est reconnu depuis plusieurs décennies. Les citoyens des municipalités ont le droit à une qualité de vie et un milieu de vie harmonieux. Ils ont le droit d'entretenir des attentes raisonnables à cet égard. Les élus municipaux ont pour mission de répondre à ses attentes.
[136] L'urbanisme et le zonage constituent en objectif réel et urgent. Les plus hauts tribunaux du pays ont reconnu que les objectifs en matière d'urbanisme étaient réels et urgents dans notre société[115]. Cette affirmation de principe ne vaut pas que pour l'affichage, elle vaut aussi pour le zonage. Il est ainsi reconnu que l'intérêt public inclut l'organisation rationnelle de la vie urbaine et du territoire[116].
[137] Les moyens auxquels la Ville de Québec a recouru pour atteindre ces objectifs sont raisonnables et justifiés dans le cadre d'une société libre et démocratique et dans le contexte de la modernité et de l'organisation des entités municipales.
[138] Il est plus qu'évident que le fait de prescrire des zones où les commerces à caractère érotique peuvent exercer leurs activités correspond exactement à l'objectif poursuivi par la réglementation de zonage. La classification des usages, la division du territoire en zones et la prescription des zones où les usages peuvent être exercés représentent à l'objectif en matière de zonage. C'est son essence même.
[139] S'il y a atteinte à la liberté de l'expression, elle est minime. Les activités du commerce de la défenderesse ne sont d'aucune façon restreintes. Tout au plus, le règlement prévoit où elles doivent s'exercer dans la ville.
[140] La réglementation relative aux établissements à caractère érotique est bien adaptée à l'objectif. Si la liberté d'expression est atteinte, elle ne l'est que de façon minimale, aux fins de la réalisation de l'objectif[117].
[141] Le moyen retenu par les autorités municipales pour la réalisation de l'objectif est raisonnable et acceptable.
[142] Il vaut de souligner qu'il revient d'abord au législateur municipal de faire les choix qu'il juge appropriés pour la réalisation de l'objectif de sa réglementation. Ce dernier jouit d'une marge de manœuvre pour choisir les moyens qu'il considère adaptés pour rencontrer ses objectifs. Les élus municipaux connaissent leur territoire, leur population et ses attentes. Ils ont été désignés par leur collectivité pour prendre de telles décisions[118]. Ils ont à soupeser les intérêts complexes et parfois opposés afin de prendre des décisions conformes à l'intérêt public. Ils bénéficient d'analyses et d'une expertise que le Tribunal ne possède pas. Les élus sont d'ailleurs responsables de leurs décisions devant leur électorat. Les autorités municipales sont plus en mesure d'encadrer, et d'optimiser l'aménagement de leur territoire[119].
[143] Les règlements d'urbanisme constituent des politiques sociales légitimes. Ils sont censés être adoptés dans l'intérêt général de la collectivité[120]. Les autorités municipales ont le pouvoir et même le devoir de prendre des décisions dans l'intérêt de la collectivité.
[144] Par conséquent, sauf la démonstration d'un excès de pouvoir, de la mauvaise foi, de l'intention de nuire ou d'adopter un règlement à des fins impropres, discriminatoires ou non pertinentes, les tribunaux doivent faire preuve de retenue à l'égard des moyens raisonnables choisis par les autorités municipales[121].
[145] Le Tribunal est d’avis que la décision des autorités municipales fait partie des choix raisonnables qui étaient à leur disposition. La preuve ne révèle ni excès de pouvoir ni mauvaise fois ou intention illégale ou impropre des autorités. Il n’y a donc pas lieu pour le Tribunal d’intervenir.
[146] Enfin, les avantages de la réglementation relative aux établissements à caractère érotique surpassent largement les effets négatifs qui pourraient être causés à la liberté d'expression, vu le caractère minimal de l'atteinte. Les avantages procurés à la collectivité sont largement supérieurs aux inconvénients qui peuvent résulter du fait de limiter à certains endroits des activités de la défenderesse, lesquelles, faut-il souligner, ne sont pas usuelles, mais plutôt marginales.
[147] Nous sommes ici en matière de zonage, de droit municipal, et non face à une interdiction emportant une sanction criminelle. S'il y a une sanction pénale à la situation actuelle de la défenderesse, celle-ci peut néanmoins y remédier, sans remettre en cause ses activités.
[148] Puisque la poursuivante a établi les éléments constitutifs de l'infraction, hors de tout doute raisonnable, et que la défenderesse n'a pas démontré que la réglementation devait être considérée inopérante à son endroit, la défenderesse doit être déclarée coupable de l'infraction reprochée.
[149] Déclare la défenderesse coupable de l'infraction reprochée;
[150] Condamne celle-ci à 2 000 $ d'amende et aux frais;
[151] Accorde à la défenderesse un délai 30 jours payer l'amende et les frais.
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__________________________________ Paulin Cloutier Juge municipal |
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Date d’audience : |
16 octobre 2019 |
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[1] R.C.A.2V.Q. 4. Ci-après désigné le « Règlement ».
[2] Pièce P-3.
[3] Pièce P-4.
[4] Pièce P-2.
[5] Pièce P-5.
[6] Pièce P-6.
[7] Pièce P-7.
[8] Pièce P-8.
[9] Pièce P-9.
[10] Pièce P-10.
[11] Pièce P-11.
[12] Loi constitutionnelle de 1982. Ci-après désignée la « Charte ».
[13] Le Nouveau Petit Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 1993, Nouvelle édition du Petit Robert par Paul Robert remaniée et amplifiée sous la direction de Josette Rey-Debove et Alain Rey, Paris, Dictionnaires Le Robert.
[14] Le Petit Larousse illustré, éd. 2002, Paris, Larousse.
[15] Office de la langue française, Le grand dictionnaire terminologique, 2012, en ligne : <http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca>.
[16] Id., note 12.
[17] Id., note 13.
[18] Id., note 12.
[19] Id., note 13.
[20] Id., note 14.
[21] Distributions Percour inc. c. Montréal (Ville de), 1998 CanLII 13246 (C.A.), opinion de l'honorable juge Biron, p. 36 et opinion de l'honorable juge Delisle, p. 5.
[22]
R. c. Greenbaum,
[24] L.R.Q., c. C47.1.
[25]
R. c. Greenbaum, préc., note 22; Nanaïmo
(Ville de) c. Rascal Trucking Ltd,
[26]
Ville de Montréal c. 177380 Canada inc., C.A.Q.
[27]
Guignard c. Ville de St-Hyacinthe,
[28]
Edmonton Journal c. Procureur général de l'Alberta,
[29]
Procureur général du Québec c. Irwin Toy Ltd,
[30] Irwin Toy, préc., note 29, p. 968; Butler, préc., note 28, p. 489.
[31]
Irwin Toy, préc., note 29, p. 968; Renvoi relatif au Code criminel,
[32] Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1181.
[33] Guignard, préc., note 27, par. 20; Drapeau c. R., 1999 CanLII 13182 (CA), p. 13.
[34] Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1181; Keegstra, préc., note 28, p. 729 et 732.
[35]
Irwin Toy, préc., note 29, p. 969 et 971; Renvoi relatif au Code
criminel, opinion de madame la juge Wilson, préc., note 31, p. 1204; Keegstra,
préc., note 28, p. 729, 730 et 761; Taylor, préc., note 28, p. 915; Comité
pour la République du Canada, opinion de madame la juge L'Heureux-Dubé, préc.,
note 28, p. 185; Commission de la fonction publique c. Osborne,
[36] Irwin Toys, préc., note 29, p. 931, 969 et 978.
[37]
Ford c. Procureur général du Québec,
[38] Ford, p. 764; Keegstra, préc., note 28, p. 729; Sharpe, préc., note 29, par. 21.
[39] Zundel, préc., note 29, p. 765.
[40] Ford, p. 764; Sharpe, préc., note 29, par. 23.
[41] Ford, p. 765; Irwin Toy, préc., note 29, p. 976; Keegstra, préc., note 28, p. 727-728 et 762-763; Taylor, préc., note 28, p. 921; Comité pour la République du Canada, opinion de mesdames les juges L'Heureux-Dubé et McLachlin, préc., note 28, p. 171, 177 et 239-240; Butler, préc., note 28, p. 499; Zundel, préc., note 29, p. 752; Sharpe, préc., note 29, par. 23; Drapeau c. R., préc., note 33, p. 18 et 31.
[42] Butler, préc., note 28, p. 492.
[43]
R. c. Jones,
[44] Irwin Toy, préc., note 29, p. 970 et 978; Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1182 et 1186; Keegstra, préc., note 28, p. 729; Comité pour la République du Canada, opinion de madame la juge L'Heureux-Dubé, préc., note 28, p. 186; Zundel, préc., note 29, p. 753.
[45] Concordia University c. Concordia Studient Union, C.A. REJB 2002-35574.
[46] Taylor, préc., note 28, p. 920; Butler, préc., note 28, p. 509.
[47] Taylor, préc., note 28, p. 915; Butler, préc., note 28, p. 489.
[48] Edmonton Journal, préc., note 28, p. 1336; Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1187; Zundel, préc., note 29, p. 752.
[49] Sharpe, préc., note 29, par. 22.
[50] Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1184-1185.
[51]
Irwin Toy, préc., note 29, p. 968, 969 et 978; Renvoi relatif
au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p.
1186; Keegstra, préc., note 28, p. 729; Zundel, préc., note
29, p. 751 et 752; Ramsden c. Peterborough (Ville de),
[52] Irwin Toy, préc., note 29, p. 978; Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1186.
[53] Irwin Toy, préc., note 29, p. 978; Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1196; Keegstra, préc., note 28, p. 729-730; Taylor, préc., note 28, p. 914; Comité pour la République du Canada, opinion de mesdames les juges L'Heureux-Dubé et McLachlin, préc., note 28, p. 186-187 et 240; Zundel, préc., note 29, p. 752; Ramsden, préc., note 51, p. 1104.
[54] R. c. Big
M Drug Mart Ltd,
[55] Irwin Toy, préc., note 29, p. 973, 975-976.
[56] Irwin Toy, préc., note 29, p. 974, 976 et 978; Renvoi relatif au Code criminel, opinion des juges Lamer et Wilson, préc., note 31, p. 1187 et 1205.
[57] Irwin Toy, préc., note 29, p. 978.
[58] Irwin Toy, préc., note 29, p. 976 et 978; Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1187; Keegstra, préc., note 28, p. 730-731; Taylor, préc., note 28, p. 914.
[59] Irwin Toy, préc., note 29, p. 973.
[60]
Commission de la fonction publique c. Osborne
[61]
Renvoi relatif au Code criminel,
[62] Comité pour la République du Canada, opinion de Madame la juge L'Heureux-Dubé, préc., note 28, p. 210.
[63]
Renvoi relatif au Code criminel, opinion de Messieurs les juges
Dickson et Lamer, préc., note 31, p. 1141 et 1152; Ontario c. Canadien
Pacifique Ltée,
[64] Renvoi relatif au Code criminel, opinion de Monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1152; Canadien Pacifique, opinion de Monsieur le juge Gonthier, préc., note 63, p. 1070.
[65] Nova Scotia Pharmaceutical Society, préc., note 61, p. 623; R. c. Morales, (1992) 2 R.C.S, 711, p. 728.
[66]
Compagnie Miron ltée c. R.,
[67]
Côté c. Ville de Sherbrooke, C.S.,
[68]
Val d'or (Ville de) c. 2550-9613 Québec inc.,
[69] Distributions Percour c. Montréal, opinion du juge Biron, préc., note 21, p. 30.
[70] Canadien Pacifique, opinion de Monsieur le juge Gonthier, préc., note 63, p. 1092.
[71] Butler, préc., note 28, p. 505; Sharpe, préc., note 29, par. 85.
[72]
RJR MacDonald inc. c. Procureur général du Canada,
[73] Big M Drug Mart Ltd, préc., note 54, p. 335-336; Butler, préc., note 28, p. 494; Zundel, préc., note 29, p. 761.
[74] Zundel, préc., note 29, p. 762.
[75] R. c. Edward Books and Arts,
[76] RJR MacDonald, opinion du madame la juge McLachlin, préc., note 72, par. 153; Sharpe, préc., note 29, par. 84.
[77] Keegstra, préc., note 28, p. 767; Ramsden, préc., note 51, p. 1105.
[78] Taylor, préc., note 28, p. 930.
[79] Keegstra, préc., note 28, p. 771; Zundel, préc., note 29, p. 768; RJR MacDonald, opinion de madame la juge McLachlin, préc., note 72, par. 160; Sharpe, préc., note 29, par. 95.
[80] Heywood, p. 793; Sharpe, préc., note 29, par. 96.
[81] Edward Books and Arts, préc., note 75, p. 781-782; Irwin Toy, préc., note 29, p. 989-990; Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc., note 31, p. 1195 à 1199; Keegstra, préc., note 28, p. 784-785; Butler, préc., note 28, p. 505; RJR MacDonald, opinion de madame la juge McLachlin, préc., note 72, par. 160; Sharpe, préc., note 29, par. 95-96.
[82] Butler, préc., note 28, p. 502-503; Heywood, p. 793.
[83] Butler, préc., note 28, p. 509.
[84] Comité pour la République du Canada, opinion de madame la juge McLachlin, p. 247-248; Heywood, p. 793; Canadien Pacifique Ltée, opinions de messieurs les juges Lamer et Gonthier, préc., note 63, p. 1049 et 1071.
[85] Ramsden, préc., note 51, p. 1106; RJR MacDonald, opinion de madame la juge McLachlin, préc., note 72, par. 163.
[86] RJR MacDonald, opinion de madame la juge McLachlin, préc., note 72, par. 160 et 163.
[87] Sharpe, préc., note 29, par. 97.
[88]
R. c. Oakes,
[89]
Renvoi relatif au Code criminel, opinion de monsieur le juge Lamer, préc.,
note 31, p. 1200. Sur l'ensemble de cette démarche de justification en vertu de
l'article
[90] Guignard, préc., note 27, par. 25.
[91] Guignard, préc., note 27, par. 29.
[92] Guignard, préc., note 27, par. 32.
[93] Zundel, préc., note 29, p. 760.
[94]
Rocket c. Collège royal des chirurgiens dentistes d’Ontario,
[95] Edmonton Journal, préc., note 28, p. 1355-1356; Keegstra, préc., note 28, p. 737; Taylor, préc., note 28, p. 916; Butler, préc., note 28, p. 499). Il appert ainsi que la jurisprudence accorde moins d’importance à l’enseigne commerciale qu’à l’affichage d’une opinion (177380 Canada, préc., note 26, par. 26; Ontario (Minister of transportation) v. Miracle, [2005] O.J. no 299 (C.A.), par. 38.
[96] Zundel, préc., note 29, p. 774.
[97] Taylor, préc., note 28, p. 932.
[98]
R. c. Wholesale Travel Group inc.,
[99] Oakes, préc., note 88, p. 136; Slaight Communications, p. 1052; Keegstra, préc., note 28, p. 737; Taylor, préc., note 28, p. 916.
[100]
Singh c. Ministre de l'emploi et l'immigration,
[101] Keegstra, préc., note 28, p. 757; Taylor, préc., note 28, p. 916-917.
[102] Zundel, préc., note 29, p. 760.
[103] Keegstra, préc., note 28, p. 737.
[104]
R. c. Lifchus,
[105]
R. c. Villaroman,
[106] Photos 17 et 19 de la pièce P-8.
[107] Pièce P-11.
[108] Pièce P-8.
[109]
Voir Buckingham (Ville de) c. 3011445
Canada inc.,
[110]
Buckingham, préc., note 109, par. 40; Val-d'Or (Ville de) c. 2550-9613
Québec inc.,
[111] Val-d'Or, opinion du juge Chamberland, préc., note 110, p. 10.
[112] Buckingham, préc., note 109, par. 25 et 26; Val-d'Or, opinion du juge Chamberland, préc., note 110, p. 9 et 10.
[113] R. c. Ludacka, 1996 28 O.R. (3d) 19, par. 25 à 32.
[114] Buckingham, préc., note 109, par. 77 et 78; Ontario Adult Entertainement Bar Association v. Metropolitan Toronto (Municipality), (1995) 29 M.P.L.R. (2d) 141, 163 (Ont. Div. Court), confirmée par la Cour d'appel de l'Ontario, [1997] O.J. No. 3772; The Saskatchewan Liquor and Gaming Authority v. 604598 Saskatchewan Ltd (The Great Canadian Superbar), 1998 CanLII 12308 (Sask. C.A.), par. 62 et 63.
[115] Peterborough, préc., note 51, page 1105; Guignard,
préc., note 27, par. 29; 177380 Canada inc., préc., note 26, par. 45, 52
et 53; Nichol (Township) v. McCarthy Signs Co. Ltd., [1997] O.J.
No 2053 (C.A), par. 10; Vann Niagara Ltd. v. Oakville (Town Of), [2002]
O.J. No 232 (C.A), par. 50, dissidence confirmée par la Cour supreme,
[116] Distributions Percour inc. c. Montréal, préc., note 21, opinion du juge Biron, p. 23.
[117] Voir au même effet : Buckingham c. 3011445 Canada inc., préc., note 109, par. 90.
[118] Nanaïmo c. Rascal Trucking Ltd, préc., note 25, p. 357; 114957 Canada inc. c. Hudson, préc., note 25, par. 23, 49 et 53; Saint-Aubert c. Poitras, préc., note 22, par. 26.
[119]
Poitras c. D'Onofrio,
[120] Val d'Or c. 2550-9613 Québec inc., préc., note 68, opinion du juge Chamberland, p. 8; Distributions Percour inc. c. Montréal, préc., note 21, opinion du juge Biron, p. 24.
[121]
Shell Canada Ltée c. Vancouver (Ville),
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.