Equisoft inc. c. Éditions Protégez-Vous |
2021 QCCS 526 |
COUR SUPÉRIEURE (Chambre civile) |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
montréal |
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N° : |
500-17-098007-175
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DATE : |
12 février 2021 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
Chantal corriveau, J.C.S. |
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EQUISOFT INC. |
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Demanderesse |
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c. |
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ÉDITIONS PROTEGEZ-VOUS |
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Défenderesse |
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JUGEMENT RECTIFIÉ [1] ET CAVIARDÉ
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[1] La demanderesse Equisoft Inc., une société qui développe des logiciels, réclame des dommage-intérêts au motif que sa cliente, la défenderesse, Éditions Protégez-vous (ci-après EPV), aurait dévoilé à ses concurrents ses secrets commerciaux dans le cadre d’un appel de soumission.
[2] Equisoft a développé, sur une période de plus de 10 ans, un logiciel nommé PublisherElements (ci-après « le logiciel ») destiné à la gestion des abonnements pour des éditeurs de magazines.
[3] EPV édite et distribue des magazines dont le plus important s’adresse aux consommateurs, soit la revue « Protégez-vous ». Au fil d’ententes de confidentialité et de contrats de licence permettant l’utilisation du logiciel entre les parties, EPV a utilisé le logiciel entre 2007 et 2017.
[4] Durant cette période, les parties ont collaboré à l’amélioration du logiciel. Pour y arriver, Equisoft a investi des sommes importantes, notamment en y consacrant le travail de dizaines d’employés spécialisés.
[5] En 2016, EPV décide d’aller en appel d’offres pour son prochain contrat de licence d’utilisation d’un logiciel pour assurer son service à la clientèle et la gestion des abonnements.
[6] EPV fait parvenir un « Request for Information », désigné RFI 1.5, à une trentaine de sociétés qui élaborent de tels logiciels ou qui ont des partenariats afin d’offrir le service.
[7] Equisoft allègue qu’en agissant ainsi, EPV a dévoilé à ses concurrents ses secrets commerciaux, protégés par leur entente de confidentialité.
[8] Malgré l’assurance donnée par EPV quelques jours plus tard que le RFI 1.5 avait été retiré et détruit par les sociétés qui l’avaient reçu, Equisoft soutient qu’elle a perdu son avantage concurrentiel dans ce marché.
[9] Deux ans plus tard, malgré les efforts et millions investis, Equisoft a dû abandonner ce marché. Elle réclame ses dommages en s’appuyant sur l’article 1612 du Code civil du Québec[2], répartis comme suit :
1) une réclamation de 2 506 282 $ en dommages pour avoir, sans autorisation, dévoilé aux concurrents des informations confidentielles qui constituent des secrets de commerce;
2) une réclamation de 187 500$ pour le manque à gagner résultant du non renouvellement du contrat de licence en 2016.
[10] EPV conteste avoir diffusé des secrets commerciaux. Elle soutient qu’Equisoft n’était pas propriétaire de la propriété intellectuelle au moment de la communication du RFI 1.5. Elle ajoute que l’information contenue dans le FRI 1.5 n’était ni confidentielle ni originale. EPV ajoute qu’aucun des concurrents ayant reçu l’appel d’offres n’y a repéré de l’information confidentielle, ni utilisé quelques informations y étant contenues.
[11] Enfin la défenderesse soutient que les dommage-intérêts n’ont pas été prouvés, qu’ils ont, tout au plus, été estimés et que les conditions de l’article 1612 C.c.Q ne sont donc pas satisfaites.
[12] Au terme du présent jugement, le Tribunal conclue que le RFI 1.5 contient de l’information confidentielle qui se qualifie de secret de commerce. Les dommages en découlant sont le prix d’acquisition, et une portion du coût de développement du logiciel. Le Tribunal n’accorde pas d’indemnité à la suite du non-renouvellement du contrat de licence.
LES QUESTIONS
[13] Afin de déterminer si EPV a commis une faute à l’égard d’Equisoft, le Tribunal abordera les questions suivantes :
1) Equisoft est-elle habilitée à intenter seule la demande ?
2) Equisoft bénéficie-t-elle d’une protection de confidentialité en fonction des contrats intervenus?
3) Le RFI 1.5 dévoile-t-il de l’information confidentielle ?
4) Equisoft peut-elle réclamer des dommage-intérêts?
a) Sous le régime particulier de 1612 C.c.Q ou sous le régime de 1607 C.c.Q et s ?
b) Quels sont, le cas échéant, les dommages prouvés?
[14] Afin de répondre à la première question, il faut reprendre l’historique du développement du logiciel et réviser les obligations contractuelles découlant des différents contrats intervenus en lien avec la propriété du logiciel.
1) Equisoft est- elle habilitée à intenter seule la demande?
[15] Le Tribunal aborde cette question à la lumière de l’argument d’EPV que l’action d’Equisoft doit être rejetée au motif qu’au moment des faits reprochés, soit en janvier 2016, Equisoft n’est pas détentrice de droits de propriété intellectuelle sur le logiciel . À cette époque le logiciel appartenait à une tierce partie, la Société de développement des périodiques québécois « ci-après la SODEP ». En conséquence, EPV soutient qu’en 2017, Equisoft ne pouvait intenter les présentes procédures sans l’intervention de la SODEP.
[16] EPV a tort sur cette question pour les motifs ci-après énoncés.
[17] Au cours des années 2000, la SODEP représentait plusieurs éditeurs de magazines au Québec et le regroupement permettait à ces derniers de bénéficier de certains services dont celui d’avoir accès à un logiciel de gestion de leurs abonnements.
[18] En vertu d’un contrat de conception du 10 février 2006[3], Equisoft a conçu et livré à la SODEP le logiciel de gestion des abonnements et comptabilité alors désigné par le nom Victor. La SODEP est devenue propriétaire des droits de propriété intellectuelle sur le logiciel.
[19] En date du 1 février 2007[4], SODEP convient d’un contrat de licence avec Equisoft lui permettant d’avoir accès illimité à son logiciel afin de poursuivre les améliorations. Equisoft peut ainsi convenir de contrats de sous licence avec d’autres éditeurs. L’objectif est de rendre le logiciel suffisamment attrayant pour que d’autres éditeurs souhaitent acquérir le droit d’utilisation afin de répartir le coût de développement.
[20] Selon le contrat de licence avec la SODEP, Equisoft devait lui payer la somme de xxxxxxx x à même les droits de licence et redevances qu’elle allait percevoir en fonction de sous-licences qu’elle allait consentir. Incidemment, le montant convenu est pratiquement le même que la somme déboursée par la SODEP[5] à l’origine pour acquérir le logiciel d’Equisoft. Ainsi, une fois qu’Equisoft aurait repayé la sommede xxxxxxxx, elle se ferait dès lors consentir les droits de propriété intellectuelle sur le logiciel[6].
[21] Entre 2007 et 2016[7], Equisoft a payé des droits à la SODEP. C’est en date du 1ierdécembre 2016 qu’Equisoft est redevenue propriétaire de la propriété intellectuelle de Victor alors renommé PublisherElements.
[22] Les fautes reprochées à EPV dans la présente instance, soit la diffusion d’informations confidentielles par le RFI 1.5 sont principalement survenues en janvier 2016. A cette époque Equisoft est encore détentrice d’une licence et il lui reste environ xxx xxxx à payer[8] à la SODEP, pour acquérir en entier les droits de propriété intellectuelle. En effet, cette dernière somme sera versée au cours de l’année 2016, afin qu’au 1ier décembre 2016, l’ensemble du montant dû de xxxxxxxx en vertu du contrat de licence soit entièrement déboursé.
[23] L’argument soulevée par EPV consiste à déterminer si en conséquence de ce qui précède[9], la SODEP détient en réalité les droits pour pouvoir alléguer une faute génératrice de dommages et si Equisoft a l’intérêt juridique pour poursuivre puisqu’elle n’est pas encore détentrice du droit d’auteur sur le logiciel au moment des faits reprochés, soit en janvier 2016.
[24] À cette époque, Equisoft est titulaire d’un contrat de licence sans être propriétaire du logiciel.
[25] Par ailleurs, à compter de décembre 2016, soit avant d’intenter la présente action, Equisoft devient détentrice irrévocable de la propriété intellectuelle. En effet le contrat de licence intervenu avec la SODEP prévoit qu’une fois la somme de xxxxxxxx payée par Equisoft à titre de redevance, cette dernière bénéficie d’une cession de droit sans restriction[10].
[26] S’appuyant sur des dispositions de la Loi sur le droit d’auteur et à la lumière des procédures et des arguments soulevés sur cette question, le Tribunal conclut qu’Equisoft pouvait seule instituer son action en justice, sans le concours de la SODEP. Le texte de l‘article 41.23 (1) et (2) de la Loi sur le droit d’auteur se lit comme suit :
41.23 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, le titulaire d’un droit d’auteur ou quiconque possède un droit, un titre ou un intérêt acquis par cession ou concession consentie par écrit par le titulaire peut, individuellement pour son propre compte, en son propre nom comme partie à une procédure, soutenir et faire valoir les droits qu’il détient, et il peut exercer les recours prévus par la présente loi dans toute l’étendue de son droit, de son titre et de son intérêt.
(2) Lorsqu’une procédure est engagée au titre du paragraphe (1) par une personne autre que le titulaire du droit d’auteur, ce dernier doit être constitué partie à cette procédure sauf :
o a) dans le cas d’une procédure engagée en vertu des articles 44.12, 44.2 ou 44.4;
o b) dans le cas d’une procédure interlocutoire, à moins que le tribunal estime qu’il est dans l’intérêt de la justice de constituer le titulaire du droit d’auteur partie à la procédure;
o c) dans tous les autres cas où le tribunal estime que l’intérêt de la justice ne l’exige pas.
[27] A la lumière de cette disposition, au moment d’initier la poursuite en mars 2017, les droits de propriété intellectuelle appartenaient en propre à Equisoft, et ce par cession, conformément au contrat de licence.
[28] De plus, c’est Equisoft qui a subit les dommages allégués. Selon la preuve, c’est elle seule qui a encouru les sommes faramineuses pour développer et améliorer le logiciel Victor, renommé PublisherElements.
[29] Tout ce que la SODEP a déboursé est une somme initiale de xxxxxxxx versée à Equisoft au tout début du développement de Victor. Cette somme a entièrement été repayée à la SODEP entre 2007 et le 1ier décembre 2016.En effet, tous les frais de développements du logiciel postérieurs à l’acquisition par la SODEP ont été entièrement supportés par Equisoft, tel que précisé au contrat de licence.
[30] Pour le Tribunal, il faut examiner les droits d’Equisoft en date du 21 mars 2017, soit au moment où elle intente son action. Quant aux dommages réclamés, nous aurons l’occasion d’examiner plus à fond leur fondement mais il n’y a aucune preuve qui relie la SODEP à quelque dommage que ce soit.
[31] Par ailleurs, le Tribunal est d’avis que la présence de la SODEP à titre de codemanderesse n’aurait été d’aucune utilité et que de toutes les façons les intérêts de la justice ne commandent pas sa participation à la démarche judiciaire.
[32] Enfin, il convient de préciser que la défenderesse ne soulève pas que la cession ultérieure par Equisoft de ses droits de propriété intellectuelle quant à son logiciel PublisherElements à sa filiale Inovva, est un élément pouvant être opposé à la réclamation en dommage d’Equisoft. Inovva est une filière à part entière d’Equisoft qui détient 100% du capital-actions. En conséquence des informations qui précèdent, cette cession n’affecte pas le droit d’Equisoft de réclamer seule les dommage-intérêts qu’elle recherche.
2) Equisoft bénéficie-t-elle de protection de confidentialité en fonction des contrats intervenus?
[33] En ce qui concerne les droits entre les parties, une première convention de non-divulgation est conclue entre Equisoft et EPV, le 19 décembre 2006.[11]
[34] A cette époque, EPV confie la gestion de ses informations comptables, la gestion des abonnements et le service à la clientèle à la firme Groupe Marketing International (GMI). Dans les faits, GMI ne fournit que le service à la clientèle. Les services de gestion des abonnements et de la comptabilité sont fournis avec le logiciel d’Equisoft.
[35] C’est ainsi qu’Equisoft consent un contrat de licence à GMI afin de permettre à EPV de bénéficier du logiciel pour les abonnements et la comptabilité.[12]
[36] Revenant à la convention de non-divulgation[13] intervenue entre Equisoft et EPV, les parties adoptent la définition qui suit : « Informations confidentielles » s’entend des connaissances techniques, connaissances commerciales, inventions (brevetés ou non), secrets de fabrique, idées, procédés, méthodes, expériences et structures de données, peu importe leur forme ou le support sur lequel ils peuvent être placés , incluant tout dessin, rapport, modèle, prototype, disque, disquette, ruban et autres documents ou objets semblables ou encore des paroles identifiées comme étant confidentielles au moment de leur divulgation et dont le caractère confidentiel est confirmé par écrit, après leur divulgation »(caractères gras ajoutés).
[37] Conformément à la convention, les parties s’engagent mutuellement à ne pas partager avec des tiers, en tout ou en partie, et uniquement avec leurs employés qui doivent y avoir accès, leurs informations confidentielles telles que définies plus haut.
[38] La convention prévoit des exceptions à la règle de non divulgation, si l’information est connue du tiers ou en sa possession de façon légitime, si elle est dans le domaine public ou finalement sur ordre d’un Tribunal.
[39] Cette convention n’est pas limitée dans le temps. Enfin, une clause confirme qu’il ne s’agit pas d’un contrat de licence. Il s’agit de la seule convention de non divulgation qui a été conclue entre les parties et elle n’a pas été remplacée par d’autres conventions ultérieures.
[40] En parallèle, la convention de licence consentie à GMI en 2006 est d’une durée de 5 ans.
[41] En 2011, EPV se disant insatisfaite de la façon dont son service à la clientèle était desservi par GMI, décide de confier le tout directement et uniquement à Equisoft.
[42] C’est ainsi qu’intervient en date du 24 mai 2011, un contrat de licence[14] d’une durée de 5 ans pour l’utilisation du logiciel, directement entre les parties. Equisoft met donc sur pied une équipe pour s’occuper du service à la clientèle pour EPV.
[43] Equisoft consent un contrat de licence à EPV et lui verse un montant mensuel pour cette utilisation. Le contrat contient une clause de limitations et restrictions[15]visant l’interdiction pour EPV de céder à un tiers une licence ou reproduire le code source ainsi que;« sa séquence, sa structure ou son organisation et généralement, à utiliser le logiciel et sa documentation à toutes autres fins que celles faisant partie de la présente convention».
[44] Equisoft a mis en place des mesures visant la protection de la confidentialité dans ses relations avec EPV. Les employés de cette dernière devaient détenir un mot de passe décerné par Equisoft pour avoir accès aux volets nécessaires du logiciel pour l’exercice de leurs fonctions. De plus, les utilisateurs du logiciel, étaient liés par contrat de licence et contrats de non divulgation, ces derniers prévoyant l’usage restreint du logiciel uniquement en lien avec les exigences de leurs responsabilités.
[45] L’obligation de confidentialité qui échoit à EPV à l’endroit d’Equisoft ressort clairement des contrats précités[16].
3) Le RFI 1.5 dévoile-t-il de l’information confidentielle?
[46] Afin de répondre à cette question, il convient en premier lieu de procéder à un examen de la trame factuelle ayant conduit à la diffusion, puis au retrait du RFI 1.5.
[47] Suivra une discussion sur les conclusions des experts .L’expert en demande conclut au caractère confidentiel donnant un avantage certain à un concurrent. L’expert en défense conclut que les informations dévoilées relèvent des connaissances générales, par ailleurs accessibles au public. Dans ce contexte l’on analysera l’effet d’une vidéo promotionnelle d’Equisoft accessible à tous sur YouTube dévoilant certains volets du logiciel en lien avec la réclamation de la demanderesse.
Les faits ayant conduit à la diffusion du RFI 1.5, puis à son retrait.
[48] Durant les 5 années de mise en œuvre du contrat de licence pour initialisation de logiciel entre Equisoft et EPV, le parcours a été ponctué de succès et d’embuches. La relation entre les parties est cordiale, les équipes collaborent à régler les difficultés de parcours lors de l’utilisation du logiciel afin de l’améliorer pour mieux répondre aux besoins d’EPV. Le directeur-général de l’époque semblait satisfait allant même jusqu’à participer à une vidéo promotionnelle du logiciel destinée aux éditeurs intéressés à se le procurer.[17]
[49] Le directeur-général d’EPV est remplacé en cours de route par Mme Francine Hochereau. C’est elle qui informe Equisoft que le conseil d’administration d’EPV demande un appel d’offres afin de consentir un nouveau contrat de licence à l’échéance de celui en place avec Equisoft pour gérer le logiciel de gestion de la comptabilité et du service à la clientèle. Selon les représentants de la demanderesse, Mme Hochereau se fait rassurante auprès d’Equisoft à la lumière de l’utilisation de Victor puis de PublisherElements depuis 2007.
[50] Toutefois, certains utilisateurs de logiciel au niveau de la comptabilité ont beaucoup critiqué le logiciel. Mme Zouggari a témoigné des nombreuses difficultés éprouvées surtout au début de son utilisation notamment lors du passage des rapports papiers avec des données fixes selon l’ancien logiciel vers les données à temps réel que procure le logiciel d’Equisoft. Elle déplore ne jamais recevoir les mêmes données. Equisoft répond que cela résulte de l’instantanéité des résultats que procurent les données comptables. D’autres problèmes ont privé EPV des revenus de certains abonnés durant 6 mois. Certains abonnés se sont vus chargés des milliers de dollars au lieu de dizaines, à cause d’une erreur de décimale. Equisoft a compensé monétairement EPV pour ses pertes.
[51] Malgré quelques rares critiques, Equisoft estime être en position avantageuse pour pouvoir satisfaire aux besoins d’EPV et personne au sein de celle-ci n’exprime de mise en garde ni de réserve.
[52] En date du 28 janvier 2016, le RFI 1.5 est envoyé simultanément à une trentaine de sociétés afin de les inviter à répondre par une offre de service. Précisons qu’il est transmis avec un courriel[18] qui déclare : « Cette Demande d’Information (RFI) est publique et peut donc être partagée. »
[53] C’est avec surprise et choc que les représentants d’Equisoft prennent connaissance du contenu du RFI 1.5 et du courriel énonçant le caractère public de leurs informations. A leurs yeux, il s’agit d’un bris de confidentialité extrêmement préjudiciable en ce que le RFI 1.5 révèle à la concurrence le fruit d’années de travail acharné de développement quant à la structure, l’architecture et les données du logiciel. Soulignons qu’Equisoft ne prétend pas qu’il y a eu dévoilement du code source.
[54] M.Romero, le président d’Equisoft communique son désarroi à la directrice générale d’EPV, Madame Hochereau. Leur conversation du 1ier février 2016 est retranscrite.[19]
[55] En réponse aux énoncés du président d’Equisoft qui déplore le dévoilement d’informations aux concurrents, Mme Hochereau est très réceptive et promet une réaction rapide en communiquant avec les destinataires pour retirer le RFI 1.5 ainsi transmis.
[56] Le même jour,[20] Mme Hochereau confirme et transmet au président d’Equisoft la demande de retrait et destruction du RFI 1.5 transmise à tous les destinataires. Elle présente ses excuses pour cette erreur non intentionnelle et ajoute que les captures d’écrans n’auraient pas dû être reproduites sans le consentement préalable d’Equisoft. Elle nuance la bévue en ajoutant qu’à son avis les écrans sont généraux et sont présents dans tous les systèmes d’abonnements et de clients. Elle poursuit en informant Equisoft qu’elle verra dans le prochain appel d’offres à retirer les captures d’écran et toutes les mentions au logiciel PublisherElements.
[57] Ainsi, Mme Hochereau demande aux récipiendaires de détruire immédiatement la version du RFI 1.5 envoyée le 28 janvier 2016. Elle annonce la suspension de l’appel d’offres et précise qu’une nouvelle invitation à soumissionner sera envoyée. Elle ajoute, « Pour des raisons de confidentialité, merci de nous confirmer par retour de courriel que vous avez détruit la version 1.5 du RFI de Protégez-vous ».
[58] Peu après, Mme Hochereau communique à nouveau avec M. Romero, le président d’Equisoft pour lui dire avoir reçu de tous les récipiendaires du RFI1.5 du 28 janvier 2016, une confirmation de destruction.
[59] Cette information n’est pas exacte à la lumière des réponses reçues et produites au dossier[21], seuls 14 destinataires sur 30[22] ont répondu dont certains par un énoncé laconique ne confirmant pas clairement destruction du RFI 1.5. Nous y reviendrons.
[60] EPV procède au congédiement de son directeur marketing et expérience clients, M. Jean-François Léveillé responsable du contenu du RFI 1.5, le 26 février 2016.
[61] Peu après ces évènements un nouvel RFI 2.0[23] daté de février 2016 est transmis à des fournisseurs de logiciel. Equisoft décide de répondre au RFI 2.0. et de présenter une soumission.
[62] C’est au tour de Mme Hochereau de quitter EPV après y avoir été incitée par son employeur au printemps 2016. M. Sylvain Masse, un employé de longue date d’EPV, lui succède et, en date de l’audience, il est toujours en poste à titre de directeur-général d’EPV.
[63] M. Masse explique sa vision quant au choix du logiciel qui fera l’objet de sa recommandation au conseil d’administration. À son arrivée en poste, il a en mains les réponses au RFI 2.0. Il fait sa propre recherche et y consacre 6 mois. Il confirme que le choix du logiciel est un élément crucial pour un éditeur. Il déclare rechercher particulièrement les éléments qui suivent : 1) un logiciel robuste et 2) un centre d’appel qui adhère aux normes PCI quant à la sécurité de l’utilisation des cartes de crédit et 3) des rapports financiers solides.
[64] Fort de son analyse, il recommande au conseil d’administration qui l’accepte, de retenir un concurrent d’Equisoft, soit la firme CDS. Cette dernière présente à EPV son logiciel qui avait été jusque-là réservé au marché américain. M. Masse précise que si CDS avait plutôt proposé son logiciel jusqu’alors destiné au Canada, il ne l’aurait pas choisi.
[65] C’est le 22 décembre 2016 qu’Equisoft apprend que son offre de contrat de licence est refusée. [24] Elle constate que son plus grand et sérieux concurrent obtient la mise.
[66] En comparant la proposition de CDS et celle d’Equisoft, cette dernière soutient que l’on y retrouve beaucoup d’informations copiées (bien que traduites en anglais) du RFI 1.5 qui étaient pourtant inconnues du public.
[67] Le contrat de licence d’Equisoft est néanmoins renouvelé à court terme soit jusqu’au 30 juin 2017[25] et elle collabore à la transition jusqu’à la mise en place du nouveau logiciel de CDS au sein d’EPV.
Les expertises
a) Expertises en demande
[68] L’expert retenu par la demanderesse, M. François Beaulieu se prononce sur quatre questions. En premier, il expose le type d’information que l’on retrouve habituellement dans un RFI, il déclare ensuite quelles sont les informations confidentielles provenant d’Equisoft qui sont divulguées dans le RFI 1.5. Il poursuit en commentant les éléments d’une vidéo promotionnelle du logiciel rendue publique par Equisoft et énonce quelles informations devenues publiques se retrouvent également dans le RFI 1.5, ce qui leur fait perdre leur caractère confidentiel. Il termine en exposant quels sont les avantages que retire un concurrent qui prend connaissance du RFI 1.5.
[69] Selon M. Beaulieu, un RFI contient suffisamment d’informations pour faire comprendre les besoins du client tout en s’assurant de ne pas révéler d’informations confidentielles ou des secrets commerciaux, sans y être autorisé. Il est habituel de demander aux fournisseurs de signer des ententes de confidentialité.
[70] Le RFI 1.5 décrit les objectifs et les besoins d’EPV en exposant les fonctionnalités requises et les besoins à supporter. Les descriptions des besoins sont appuyées de schémas qui révèlent l’architecture de la solution logicielle, telle qu’accessible à EPV via le Logiciel PublisherElements, en le nommant spécifiquement.
[71] Le diagramme de la page 9 du RFI identifie le logiciel PublisherElements comme la solution en place en y explicitant ses propres composants ainsi que l’intégration avec les modules externes. Une telle description détaillée est inhabituelle et surprenante pour un RFI. Vient ensuite la description de l’infrastructure, soit la nature, le rôle et le mode de connectivité des composantes du logiciel PublisherElements. La page 10 du RFI 1.5 explique les principaux modules de l’application (également dévoilés dans la vidéo promotionnelle). Le schéma ajoute une liste des composantes de tiers et l’information que le logiciel peut échanger avec ces autres logiciels.
[72] Les éléments les plus confidentiels et soulignés par l’expert et Equisoft sont ceux qui se retrouvent aux pages suivantes: les pages 11 à 20 contiennent des captures d’écrans qui dévoilent l’architecture du logiciel. Le RFI reproduit des écrans, menus, rapports et des fonctionnalités détaillées. Ces informations contenant autant de détails ne sont pas disponibles au public ni sur le web.
[73] Le détail des informations révélées dans le RFI permet donc de comprendre en un coup d’œil le menu, les rapports, la fonctionnalité et l’architecture de la solution logicielle PublisherElements de gestion des abonnements qui appartient à Equisoft. Cette solution logicielle appartient à Equisoft et EPV n’a d’aucune façon été autorisée à la dévoiler.
[74] M. Beaulieu est d’avis que l’industrie considère ces éléments comme confidentiels. Il vise ici les modules, leurs fonctions et interactions, les interfaces usagers et l’intégration des fonctions avec les éléments extérieurs auxquels le logiciel doit être intégré pour être efficace.
[75] Ensuite l’expert se penche sur les pages 21 et 22 du RFI 1.5 qui dévoilent la liste des rapports déjà disponibles à EPV par le logiciel PublisherElements, en précisant la liste des activités et processus de production nécessaires pour la gestion de clientèle, les fonctions requises pour l’administration du système, la liste de tableaux disponibles (éléments extérieurs) et les suivis de performance opérationnelle. Encore une fois cela constitue une divulgation d’information confidentielle.
[76] Ensuite, aux pages 23 et 24 le RFI 1.5 dévoile de façon explicite les éléments non offerts par le logiciel PublisherElements sous forme de souhaits de fonctions à obtenir.
[77] L’expert conclut cette portion en précisant qu’il a eu accès à l’ensemble du logiciel PublisherElement et affirme que le RFI 1.5 dévoile une grande partie des composantes de l’architecture et ce, en détails. Il fixe la portion d’information confidentielle dévoilée du logiciel entre 90% et 95% de son contenu.
Effet de la vidéo promotionnelle YouTube
[78] M .Beaulieu a commenté la vidéo promotionnelle YouTube[26] d’Equisoft concernant le logiciel PublisherElements.
[79] Cette vidéo est soulevée par EPV afin de démontrer selon elle, le caractère public des informations qui y sont dévoilées et disponible au public et qui sont similaires à celles contenues dans le RFI1.5.
[80] En effet, rappelons que l’accès au logiciel PublisherElements est impossible à moins d’autorisation de la part d’Equisoft. Il s’agit d’un logiciel d’arrière guichet (back office) et non disponible au public. En cela il se distingue de certains logiciels grands publics qui eux sont facilement accessibles.
[81] Le contrat de licence consenti à EPV en est un exemple. En dehors d’une entente, une personne intéressée ne peut avoir accès au logiciel. D’où l’intérêt de se pencher sur la vidéo promotionnelle.
[82] Pour M. Beaulieu, les informations qui sont dévoilées dans la vidéo promotionnelle sont sommaires et ne concernent qu’une portion circonscrite de fonctionnalités du logiciel. On y dévoile des captures d’écran en mode dynamique et non pas statique comme dans le RFI quant à certaines fonctions liées aux mises à jour des contacts des abonnés. On y illustre, par exemple, la possibilité d’ajouter plus d’une coordonnée pour un seul abonné (par ex. coordonnées du domicile et du chalet).
[83] M. Beaulieu reconnait qu’il y a lieu de renoncer à la confidentialité pour certaines de ces données dont quelques une se retrouvent également dans le RFI1.5 .Il ajoute que cela repose sur la volonté et le choix d’Equisoft qui préfère renoncer à ces éléments autrement confidentiels pour pouvoir faire la promotion de son produit. Il déclare néanmoins que ces éléments dévoilés sont de moindre importance que l’ensemble des informations du RFI 1.5. Il les fixe à hauteur de 15% des données concernant le logiciel.
Le RFI 1.5 confère-t-il un avantage à un concurrent?
[84] Selon les deux experts, le processus d’élaboration d’un logiciel comprend quatre phases :
1) L’analyse des besoins à combler,
2) La conception et l’architecture,
3) La réalisation du logiciel par la programmation, soit la création du code source et de l’algorithme
4) Le déploiement, soit les tests et la mise en service.
[85] L’expert Beaulieu précise que le RFI 1.5 a eu pour effet d’exposer le travail consacré aux deux premières phases, lesquelles permettent à un développeur de logiciel d’implanter sa signature et de se démarquer.
[86] Ainsi il est d’avis que le RFI 1.5 donne une très bonne longueur d’avance à un concurrent qui peut dès lors se servir du travail de plusieurs années d’un développeur de logiciel sachant exactement ce qu’il doit offrir et proposer pour gagner la mise. Cela procure à un concurrent un avantage commercial indéniable.
Second Rapport de M. Beaulieu
[87] Avec son second rapport l’expert en demande M. Beaulieu[27] fait une comparaison de la proposition des autres soumissionnaires, et le RFI 1.5. Il remarque que 2 des 3 d’entre elles ont été transmises sous pli confidentiel lors de l’appel d’offre. Elles ne contiennent pas de capture d’écran sauf pour l’une, et même cette dernière ne révèle pas l’ensemble des fonctionnalités ou rapports. Il conclut au terme de son exercice de comparaison au caractère hautement confidentiel du contenu du RFI 1.5.
b) Expertises en défense
[88] L’expert en défense, M. Philippe Léger[28], aborde principalement deux questions[29] dans son premier rapport qui seront ici discutées. La première question vise à établir si un concurrent peut reconstruire le logiciel similaire ou identique en regardant le RFI 1.5. La seconde concerne la comparaison du contenu de la vidéo promotionnelle et la perte de confidentialité des informations se retrouvant également dans le RFI 1.5.
[89] Pour M. Léger, les diagrammes des pages 9 et 10 du RFI 1.5 illustrent différents niveaux d’architectures qui mettent l’emphase sur la nécessité d’intégration aux autres systèmes externes. Il ne commente pas la référence explicite au logiciel Publisher Elements sauf pour dire que cela est utile pour que la réponse à l’appel d’offre tienne en compte l’intégration à venir. Du côté des fonctions détaillées en page 10, il explique que cela ne pose pas de problème car les mêmes fonctions sont listées dans le RFI 2.0 qui a suivi et pour lequel Equisoft n’a formulé aucune plainte.
[90] Il poursuit en commentant les écrans que l’on retrouve aux pages 11 et suivantes. Il rappelle que ce sont des captures statiques plutôt que dynamiques et que cela révèle un minimum d’informations. Il ne voit aucune conséquence quant à l’énumération des fonctions liées aux captures d’écrans. Pour lui, et il insiste tout au long de son évaluation que ce n’est qu’une énumération des besoins du client, rien d’autres. Cela ne dévoile pas la façon de combler les besoins. Il ajoute que les écrans, en particulier celui de la page 12, ne dévoilent rien du flux logique dans les diverses actions illustrées. Ici encore on ignore comment réaliser ces fonctions illustrées.
[91] En bref, M .Léger est d’avis que l’ensemble du RFI 1.5 aborde les besoins du client sans détails.
[92] En ce qui a trait à la vidéo promotionnelle YouTube, M. Léger affirme qu’elle dévoile d’avantage d’informations sensibles du fait qu’elle illustre le passage d’un écran à l’autre pour accéder à la recherche donc à la fonction qu’elle vise. Par ailleurs, aucun des écrans utilisés dans la vidéo n’apparaît dans le RFI.1.5.
[93] M. Léger compare les informations que l’on retrouve au RFI 1.5, RFI 2.2[30], sur la vidéo et finalement sur le site web d’Inovva pour conclure au caractère public ou non confidentiel du contenu de RFI 1.5.
Second rapport de M. Léger
[94] M. Léger produit un rapport[31] additionnel, en réponse au second rapport de M. Beaulieu, afin de déterminer si les trois soumissions des concurrents contiennent plus d’informations sur les logiciels de ces derniers que n’en contient le RFI 1.5 sur le logiciel d’Equisoft.
[95] Pour faire son analyse, M. Léger compare les éléments commerciaux, fonctionnels, architecturaux, opérationnels et techniques détaillés.
[96] Le RFI 1.5 ne contient pas d’élément commercial tel le prix.
[97] Le RFI 1.5 élabore les fonctions, mais M. Léger n’y voit que l’expression des besoins d’EPV. Les éléments architecturaux y sont peu détaillés. Les éléments opérationnels concernent EPV (ex. en précisant le nombre d’employés) et aucunement Equisoft (ex. quant à ses cédules et plans de travail.)
[98] Quant aux éléments techniques détaillés, le RFI1.5 contient 10 captures d’écran de PublisherElements : «Cet élément d’information n’est pas normalement disponible publiquement, à moins qu’il ne soit révélé dans du matériel publicitaire (par exemple : web, vidéo, etc.)[32].
[99] La soumission Advantage CS est discutée. Elle est soumise à titre confidentielle. Les informations communiquées sont générales sans aucun élément technique.
[100] La soumission KCK Global LTD est transmise sans mention de confidentialité. Elle contient une dizaine de captures d’écran accompagnées d’une courte liste de fonctions non détaillées. L’annexe B contient une quinzaine d’exemples de rapports disponibles. L’annexe C contient de façon détaillée une interface permettant d’illustrer comment le système extérieur peut avoir accès à une connexion d’abonnés grâce au logiciel KCK Global. La dernière annexe concerne la sécurité des paiements par carte de crédit.
[101] La soumission CDS Global est transmise sous pli confidentiel. Quant aux éléments commerciaux, il y a des informations sur les prix et leur structure.
[102] Quant aux éléments fonctionnels M. Léger répète qu’ils énoncent uniquement les besoins d’EPV. Les éléments architecturaux sont vagues et généraux. La soumission confère de l’information sur les plans de travail. Aucun détail technique n’est inclus.
[103] Il conclut comme suit : « Comme on peut le constater, les soumissions se distinguent peu du RFI par leurs éléments fonctionnels, architecturaux et techniques, à l’exception de celle de KCK Global qui contient plus d’informations que tous les autres documents. En revanche, en tenant compte des éléments commerciaux et opérationnels, on constate que toutes les soumissions contiennent plus d’informations sensibles que le RFI produit par EPV. »
DISCUSSION
[104] Il revient au Tribunal ultimement de déterminer si le RFI 1.5 contient et donc révèle des informations confidentielles protégées par l’entente de confidentialité prévalant entre Equisoft et EPV.
[105] De l’avis du Tribunal l’expertise de Beaulieu répond d’avantage aux questions les plus pertinentes. Malheureusement, le Tribunal est forcé de conclure que l’expert Léger a épousé la thèse de la défenderesse ne démontrant que très peu d’objectivité. Quelque éléments importants sur lesquels M. Léger appuie son analyse, soit de déclarer que la liste des fonctionnalités détaillées dans le RFI 1.5 n’est qu’une expression des besoins d’EPV sans plus, est une conclusion à laquelle le Tribunal ne peut adhérer. Pour preuve, la conjonction de la reproduction de captures d’écrans, de menus et la liste exhaustive des fonctionnalités et des rapports qui en découlent et qui sont offerts par le logiciel, révèlent très certainement l’architecture à la base du logiciel. L’expert en demande conclut que le contenu du RFI 1.5 révèle 90 à 95% de ce qu’offre le logiciel PublisherElements qu’il a examiné au complet, alors que l’expert en défense n’a même pas demandé d’y avoir accès. Force est donc de constater que cette conclusion de l’expert Beaulieu n’a pas été contredite.
[106] M. Beaulieu parle de l’avantage instantané que procure la consultation du RFI 1.5 par un concurrent. Par une simple consultation rapide, un concurrent comprend vite et bien le contenu détaillé du logiciel en place. Son offre de service peut donc être ajustée en conséquence.
[107] Tout comme l’expert Beaulieu, le Tribunal constate l’étendue des informations dévoilées sur divers sujets; soit le profilage de l’abonné/gestion des clients, gestion des dossiers, gestion des commandes des achats, gestion des abonnements, gestion des lots, gestion des produits, gestion des offres, gestion des groupes d’offres, gestion des avis et stratégie de facturation.
[108] La vidéo YouTube révèle également les écrans suivants : recherche du profil marketing, recherche des publicités, édition de publicités, recherche de clients, et fiches clients.
[109] La comparaison du RFI 1.5 et la vidéo promotionnelle démontre l’étendue très large de l’ensemble des composantes et fonctionnalités du logiciel PublisherElements divulguées dans le RFI 1.5. Autrement dit le RFI 1.5 donne un tour complet de tout l’horizon desservi par le logiciel. La vidéo creuse plus en détails certains volets du logiciel allant d’un écran à l’autre et illustrant l’enchainement de la divulgation dans un sujet donné. On dévoile donc plus mais sur des sujets beaucoup plus circonscrits qui donnent plus en détails un ou deux volets des fonctionnalités limitées.
[110] La vidéo YouTube a été diffusée par Equisoft de son propre gré, et ne concerne qu’une portion de l’architecture et des fonctionnalités du logiciel PublisherElements. M. Beaulieu a quantifié l’information ainsi rendue publique volontairement par Equisoft à environ 15% de son contenu. Ici encore, cette conclusion n’est pas contredite par l’expert Léger. La divulgation publique de 15% des fonctions du logiciel ne peut servir de fondement à EPV pour dévoiler, sans autorisation d’Equisoft, de l’information protégée par une convention de non divulgation.
[111] Autrement dit, ce dévoilement volontaire de 15% du logiciel, ne peut contrecarrer la proposition qu’une importante proportion des informations dévoilées dans le RFI 1.5 étaient confidentielles. En s’appuyant sur la conclusion que 90 à 95 % de la phase conception et l’architecture du logiciel est révélé par le RFI 1.5 et que 15% a par ailleurs été révélé au public par le vidéo YouTube, on peut alors conclure que 75% à 80% des informations dévoilées dans le RFI 1.5 sont demeurées confidentielles et leur divulgation n’a pas été autorisée et a donc été faite en violation de la convention de non divulgation.
[112] Nous y reviendrons plus à fond dans l’analyse des dommages mais clairement, la révélation aux concurrents de l’ensemble de l’architecture et des fonctionnalités du logiciel est certainement dommageable pour Equisoft qui perd en un coup d’œil l’exclusivité de ses années de développement et de travail pour améliorer le logiciel et répondre aux besoins des éditeurs.
[113] Si on compare maintenant la soumission CDS au RFI 1.5 il est choquant de constater la similarité des fonctions décrites qui apparaissent comme une traduction du RFI 1.5. Il est évident que l’on y retrouve le même texte des fonctionnalités de PublishersElements telles que dévoilées dans le RFI 1.5. Cela illustre l’avantage que procure le RFI 1.5 aux concurrents. En effet, la comparaison de la proposition de CDS et le RFI 1.5 révèle un nombre important d’informations identiques, copiées collées et traduites du français à l’anglais, donc selon toute vraisemblance copiées du RFI 1.5, ces éléments constituant de l’architecture du logiciel PublisherElements d’Equisoft[33].
[114] Selon le Tribunal, il est faux de prétendre que les listes de fonctionnalités du RFI 1.5 provenant d’Equisoft ne sont que l’expression des besoins du client et rien de plus. Les écrans doublés de la liste des fonctions que chaque item vise permet de comprendre facilement l’offre d’Equisoft élaborée sur 9,10 ans d’efforts et des millions investis P-18.
[115] S’il est vrai que le caractère statique des écrans apparaissant dans le RFI 1.5 empêche de dévoiler plus d’information confidentielle, il suffit de regarder les éléments couverts par les nombreux sujets identifiés, tous accompagnés des fonctionnalités propres pour en savoir d’avantage.
[116] Et d’ailleurs, le fait que selon toute vraisemblance CDS a recopié les listes des fonctionnalités couvertes, se contentant de traduire les listes des fonctionnalités dans le même ordre, illustre clairement le dévoilement d’information procurant à un concurrent un avantage indû.
[117] Comme autre élément soutenu par M. Léger avec lequel le Tribunal est en désaccord, il faut revenir sur sa qualification des éléments dévoilés dans la dernière section du RFI 1.5. Dans cette partie de l’appel d’offres on y énumère une liste des besoins à combler pour satisfaire EPV à l’avenir. M .Léger a déclaré qu’il ne pouvait en conclure qu’il s’agit d’éléments non présents dans le logiciel de PublisherElements mais plutôt de fonctions non actuellement utilisées par EPV.
[118] Le Tribunal ne peut suivre l’expert sur cette conclusion. Il est évident à la lecture du RFI1.5, que la dernière section contient la liste des fonctions à combler donc non disponibles à même le logiciel PublisherElements. Ici encore, cette déclaration a pour effet de fortement miner sa crédibilité.
[119] Pour terminer, il n’est pas inutile de rappeler qu’au terme d’une ordonnance de divulgation[34], la défenderesse a été sommée de transmettre les soumissions des concurrents reçus à la suite du RFI 1.5. Les soumissions ont été transmises sans information financière. Malgré cela, seules les avocates d’Equisoft et leur expert ont eu accès aux soumissions caviardées. Les représentants d’Equisoft n’ont pas pu consulter les soumissions caviardées au motif que les soumissions sont confidentielles. Cette situation ne peut que renforcer le concept que le RFI 1.5 contient certainement des informations confidentielles si, dans le cadre du présent litige, les réponses au RFI ont été tenues hors de la portée des dirigeants d’Equisoft.
[120] Enfin, la preuve révèle les mesures mises en place par Equisoft aux fins de protéger le caractère confidentiel des informations découlant de l’élaboration et de l’utilisation du logiciel PublisherElements. Ce logiciel d’arrière-boutique (back office) n’est pas accessible au public. Au contraire, ses utilisateurs doivent désigner les employés pouvant avoir accès à certaines fonctionnalités dans l’exercice de leurs fonctions. Autrement dit, l’accès au logiciel est règlementé et non généralisé. Equisoft décerne et contrôle les utilisateurs par l’attribution de code d’usagers et mots de passe. Les ententes de non-divulgation sont en place entre le client et Equisoft et des contrats de licence viennent cadrer la relation et confirmer le caractère confidentiel des données du logiciel. Enfin, même les employés d’Equisoft signent des ententes de non divulgation comme cela est courant dans ce type d’industrie.
[121] En conclusion, le Tribunal est d’avis que le RFI1.5 révèle de l’information confidentielle provenant d’Equisoft, divulgation non autorisée et faite en contravention de la convention de non divulgation et de la convention de licence.
4) Equisoft peut-elle réclamer des dommage-intérêts?
[122] Le Tribunal aborde maintenant la question des dommages. La demanderesse réclame des dommages qui reposent sur deux fondements, la faute liée à un secret commercial et au non renouvellement du contrat.
a) Sous le régime de 1612 C.c.Q ou sous le régime général de 1607 C.c.Q. et s.
[123] Equisoft réclame une somme de 2 506 282 $ en dommages en s’appuyant sur le régime prévu à l’article 1612 C.c.Q. Dès lors la demanderesse doit établir que l’information dévoilée se qualifie de secret commercial, ce que conteste la défenderesse.
[124] Un secret commercial contient de l’information confidentielle mais l’inverse n’est pas automatique. L’information confidentielle révélée par le RFI 1.5 peut-elle être qualifiée de secret commercial au sens de l’article 1612 C.c.Q ? Si oui la liste des dommages pouvant être réclamés y est énoncée.
[125] Le cadre juridique gouvernant l’attribution de dommage-intérêts auxquels le créancier a droit découle des articles 1458, 1607, 1611 et 1612 C.c.Q :
1458. Toute personne a le devoir d’honorer les engagements qu’elle a contractés.
Elle est, lorsqu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice, corporel, moral ou matériel, qu’elle cause à son cocontractant et tenue de réparer ce préjudice; ni elle ni le cocontractant ne peuvent alors se soustraire à l’application des règles du régime contractuel de responsabilité pour opter en faveur de règles qui leur seraient plus profitables.
1607. Le créancier a droit à des dommages-intérêts en réparation du préjudice, qu’il soit corporel, moral ou matériel, que lui cause le défaut du débiteur et qui en est une suite immédiate et directe.
1611. Les dommages-intérêts dus au créancier compensent la perte qu’il subit et le gain dont il est privé.
On tient compte, pour les déterminer, du préjudice futur lorsqu’il est certain et qu’il est susceptible d’être évalué.
1612. En matière de secret commercial, la perte que subit le propriétaire du secret comprend le coût des investissements faits pour son acquisition, sa mise au point et son exploitation; le gain dont il est privé peut être indemnisé sous forme de redevances ».
[126] Le régime de l’article 1612 C.c.Q est donc spécifique à un dommage réclamé par le propriétaire d’un secret commercial.
[127] La défenderesse oppose à nouveau qu’au moment des faits reprochés, Equisoft n’était pas encore propriétaire du logiciel, sa propriété intellectuelle étant alors détenue par la SODEP. Selon EPV, Equisoft ne peut donc pas se prévaloir de ce régime particulier pour établir ses dommages.
[128] Le Tribunal est en désaccord avec cet argument, même soulevé dans le contexte précis de l’application de l’article 1612 C.c.Q. Tout ce que la disposition exige est que ce soit le propriétaire du secret commercial qui se prévale du régime particulier des dommages. Nulle part n’est-il fait mention que le réclamant doit être propriétaire au moment des faits reprochés.
[129] En l’espèce, Equisoft est détentrice des droits en vertu d’une cession, et propriétaire du logiciel. Le texte du Code civil, pas plus que la doctrine ou la jurisprudence l’ayant interprété ne soutiennent l’argument d’EPV[35]. Ce qui importe est que ce soit le cessionnaire des droits sur le secret de commerce qui exerce une réclamation et tel est le cas en l’espèce. Equisoft n’agit pas à titre de simple détenteur de droit comme par exemple un détenteur de licence qui aurait encouru des coûts de mise à jour.
[130] Lors de l’institution du recours en mars 2017, Equisoft était non seulement seule détentrice de toute la propriété intellectuelle mais de plus avait investi des sommes très importantes pour développer le logiciel en termes de « coût d’acquisition, mise au point et exploitation » tel que le stipule l’article 1612 C.c.Q.
[131] Le premier obstacle étant éliminé, voyons si l’information confidentielle peut être qualifiée de secret de commerce.
[132] L’article 1612 C.c.Q est de droit relativement nouveau, les commentaires du ministre offrent peu d’éclaircissement quant aux intentions du législateur[36], sauf pour déclarer que dans la mouvance internationale, un groupe de travail pancanadien[37] a proposé d’adopter des règles pour protéger les secrets commerciaux.
[133] Selon l’auteure Alexandra Steele[38] un secret de commerce doit avoir quatre composantes :1) une information 2) non généralement accessible 3) qui a une valeur commerciale et 4) pour laquelle son propriétaire prend des mesures pour la garder secrète.
[134] Selon Mme Steele, un secret de commerce peut être une formule, un procédé ou une compilation d’informations utilisées dans le cadre d’une entreprise d’affaire. Elle poursuit en ajoutant qu’un secret de commerce réfère généralement à de l’information plus technique qui est utilisée par une entreprise. Le secret n’est pas généralement connu dans le commerce. Il a une valeur du fait qu’il ne soit pas connu et a fait l’objet d’efforts raisonnables pour le protéger.
[135] Selon qu’il y a relation contractuelle ou non[39], cela va déterminer le régime à retenir entre les parties. En l’espèce les parties sont liées par contrat.
[136] Quant à la jurisprudence, quelques décisions ont appliqué l’article 1612 C.c.Q. et peuvent fournir des pistes à l’analyse des dommages.
[137] Dans Contrôle PC Inc. c. DP Sys Inc.[40] le juge Banford interprète et applique l’article 1612 C.c.Q dans un contexte d’attribution de dommages découlant d’une faute commise en matière de secret commercial. La demanderesse reproche l’élaboration d’un système qui répertorie les données en lien avec un parc automobile alors que le représentant de la défenderesse est un ancien collaborateur lié par entente de confidentialité et un contrat de cession de propriété intellectuelle, de confidentialité et loyauté. La demanderesse reproche à la défenderesse d’avoir mis au point et commercialisé un produit similaire. Le juge Banford conclut qu’il y a bris d’engagement de confidentialité. Au moment d’évaluer les mesures compensatoires il applique l’article 1612 C.c.Q et énonce ce qui suit :
[72] Comme le soulignent certains auteurs [7], cette disposition de droit nouveau vient faciliter la tâche de la victime, en ce que la preuve du préjudice peut porter sur des faits facilement identifiables: le coût des investissements faits pour l'acquisition du secret commercial, sa mise au point et son exploitation et le gain dont il a été privé.
[73] Selon les mêmes sources doctrinales, un secret commercial peut être défini comme étant un ensemble d'informations confidentielles développées et élaborées par une entreprise dans le cadre de ses activités économiques, consistant dans la production ou la réalisation de biens ou dans la prestation de services.[8] (références omises).
[138] Il poursuit en évaluant la preuve des dommages et accorde à la demanderesse le remboursement de ses coûts à la lumières de factures faisant état de paiements encourus en exécution du contrat qui lie les parties. Par ailleurs, fort d’une preuve que la défenderesse avait vendu à des tiers le produit protégé, le Tribunal ordonne aux défendeurs de rembourser à la demanderesse des montants perçus.
[139] Dans l’affaire Tuliq Energie SARF c. Stolt Lngaz inc[41], le juge Prévost devait décider si il y avait eu utilisation d’informations confidentielles, et ce, même sans que les parties n’aient convenu par contrat à une telle obligation. Il cite un passage d’un texte de doctrine de la juge Marie-France Bich et un extrait d’une décision du juge Bishop qui avait soulevé un précédent de common law afin de définir si on se situe dans le cadre des secrets de commerce :
[151] La Professeure Bich (comme elle était alors) définit comme suit l’expression « renseignements confidentiels » dans le cadre de l’analyse du devoir de loyauté post-emploi [88] :
Il ne suffit pas que l’employeur décrète que tel ou tel renseignement est confidentiel pour qu’il le soit. Sont habituellement considérés comme confidentiels les secrets de commerce ou de fabrication, les plans et maquettes liés au développement d’une technique ou d’un produit, les listes de clients secrètes ou contenant des renseignements privilégiés (une liste de clients n’étant pas nécessairement confidentielle, comme on vient de le voir) ou toute autre information qui n’est pas généralement connue et ne peut pas être obtenue ou reconstituée facilement.
[le Tribunal souligne]
[152] D’une part, la doctrine et la jurisprudence considèrent généralement comme confidentiel tout renseignement issu de données publiques auxquelles on a ajouté un travail privé, d’enquête, de compilation, d’analyse ou de synthèse [89].
[153] D’autre part, dans Montour Ltée c. Jolicoeur [90], le juge Guthrie s’inspire de la common law pour circonscrire la notion de secret de commerce comme suit :
A process, formula or recipe can certainly be the subject matter of a trade secret. However, there must be some element of secrecy or confidentiality. Professor Vaver recently reviewed the jurisprudence and found that the courts look to the following factors when determining whether or not information is a trade secret:
(1) the extent to which the information is known outside the business; (2) the extent to which it is known by employees and others involved in the business; (3) the extent of measures taken to guard the secrecy of the information; (4) the value of the information to the holder of the secret, and to his competitors; (5) the amount of effort or money expended in developing the information; (6) the ease or difficulty with which the information can be properly acquired or duplicated by others; and (7) whether the holder of the secret and the taker treat the information as secret.
[références omises]
[140] Ainsi l’évaluation des éléments suivants permettra de vérifier si les informations constituent un secret commercial:
1) l’étendue des connaissances des employés qui ont développé le produit;
2) les mesures prises pour assurer le caractère secret;
3) les ressources investies pour développer l’information;
4) la connaissance ou non des informations hors de la personne ou société qui réclame le secret commercial;
5) la valeur de l’information pour celui qui détient le secret et pour les concurrents;
6) la facilité ou difficulté par laquelle l’information puisse être reproduite par quelqu’un d’autre;
[141] L’analyse de cette question est intimement liée à la discussion précédente concernant le caractère confidentiel de l’information contenue dans le RFI 1.5.
[142] Résumons ci-après la preuve afin d’évaluer les critères ci- dessus énoncés :
1) L’étendue des connaissances des employés: Equisoft fait signer des engagements de confidentialité à ses propres employés[42] peu importe qu’ils se consacrent au développement ou à la vente du logiciel. On peut en conclure que les employés d’Equisoft affectés au développement du logiciel ont des connaissances spécialisées.
2) Les mesures prises pour assurer le secret : la preuve révèle l’existence de contrats de licence ou de sous-contrats de licence pour protéger l’information confidentielle liée au développement du logiciel[43] en plus d’une convention de non-divulgation. Elle limite chez les clients l’accès au logiciel selon les fonctions occupées par les employés. Ceux qui y ont accès ont un nom d’utilisateur et un mot de passe décerné et contrôlé par Equisoft.
3) Les ressources investies pour développer l’information: tel que répertorié dans la pièce P-18, des dizaines d’employés ont été affectés au développement du logiciel au cours des années 2007 à 2017.Les feuilles de temps répertorient des milliers d’heures de travail de différents employés et cela n’inclut pas l’administration de support ni les efforts de ventes qui en découlent. La preuve révèle des millions de dollars investis.
4) La connaissance ou non de l’information hors de la société qui réclame le secret : les informations dévoilées sont le résultat d’années de recherche et de développements pour parfaire un produit destiné aux éditeurs et son résultat est unique dans son ensemble.
5) La valeur de l’information pour celui qui développe et pour les concurrents : tel que discuté abondamment dans la section sur la confidentialité des informations dévoilées par le RFI 1.5, Equisoft a démontré que l’information globale dévoilée divulgue les phases analyse, conception et développement de l’architecture du logiciel PublisherElements, ce qui procure un avantage commercial certain à un concurrent.
6) La facilité ou difficulté pour que l’information puisse être reproduite par une autre personne; le RFI 1.5 révèle en un coup d’œil à une personne qui s’intéresse aux logiciels destinés aux éditeurs l’architecture complète de PublisherElements par la démonstration de l’organisation qui énonce en détails les menus, rapports et fonctionnalités disponibles.
[143] Outre une publicité parcellaire et ciblée pour promouvoir certaines fonctions de son logiciel, Equisoft prend des mesures importantes pour conserver le caractère confidentiel de l’élaboration et des composantes de son logiciel. La démonstration a été faite dans la section précédente de l’importance pour Equisoft de garder confidentielles ses données afin de conserver son caractère compétitif vis-à-vis la concurrence. Cette dernière avait beaucoup de succès et faisait bonne figure sur le plan de l’accroissement annuel de sa clientèle. Equisoft a investi des sommes d’argent très élevées pour développer et parfaire son logiciel du domaine de l’Edition.
[144] Le témoignage des représentants d’Equisoft et les experts ont démontré que pris isolément chaque information provenant du RFI 1.5 pourrait être imaginée par quelqu’un qui s’intéresse aux besoins d’un éditeur. Là où l’information peut être qualifiée de secret de commerce provient de la somme des informations et leurs interactions et placements dans un tout.
[145] C’est l’ensemble des informations révélées par le RFI 1.5 qui dévoile un secret élaboré au fil de dix années d’efforts de dizaines d’employés spécialisés. La communication du RFI 1.5 à des concurrents d’une industrie hautement spécialisée permet, en quelques minutes, de comprendre tout l’environnement de l’offre du logiciel et ses déclinaisons. Il n’est pas question ici de prétendre au dévoilement du code source ou à la possibilité de recréer par ingénierie inversée le logiciel en entier.
[146] Pour le Tribunal, au terme de l’analyse précédente du caractère confidentiel des informations divulguées, la démonstration est faite que l’information est non seulement confidentielle mais qui constitue un secret de commerce. La valeur de ces dommages est abordée dans la prochaine section.
[147] Comme deuxième chef de réclamation, Equisoft demande des dommages de 187 500$ au motif qu’elle a subi une perte de profit suite au non renouvellement du contrat de licence. C’est sa concurrente CDS Global qui a été retenue.
[148] Equisoft déclare qu’elle avait reçu des assurances de Mme Hochereau qu’à la lumière de la collaboration des 10 dernières années et de la satisfaction générale quant au logiciel, la demanderesse était bien placée pour se voir réattribuer le contrat de licence à compter de 2017.
[149] Cette question doit être évaluée en lien avec les relations contractuelles entre les parties et les représentations écrites ou orales mises en preuve.
[150] Selon la preuve, le contrat de licence liant les parties venait à expiration le 30 juin 2016, et les avis de reconduction ont été faits en énonçant clairement qu’ils étaient de durée limitée[44], puisque EPV avait besoin de temps pour décider quel logiciel elle allait retenir au terme du deuxième RFI 2.0.
[151] M. Masse a témoigné avoir fait ses propres analyses basées sur des critères de performance qu’il estimait importants.
[152] Rien dans la preuve ne permet de croire ou suppose que cet examen a été fait de façon inadéquate ou fautive à l’égard d’Equisoft. Elle avait elle-même en 2007 été au fait que son implantation chez EPV avait pour effet de remplacer CDS dont le logiciel était alors en place. Les contrats ne donnent aucune assise à Equisoft pour invoquer une garantie de renouvellement. Les représentations orales qu’elle a eues également n’ont pas donné de garantie mais un bon espoir. La directrice de l’époque Mme Hochereau n’a pas témoigné mais même les témoins d’Equisoft ont parlé en termes de confiance mais sans prétendre qu’ils avaient reçu la certitude d’obtenir un autre contrat de licence.
[153] Le Tribunal ne peut donc pas conclure qu’il y a une base légale[45] pour réclamer une perte de profits issue du non-renouvellement du contrat.
b) Quels sont, le cas échéant, les dommages prouvés ?
[154] Equisoft réclame la somme de 2 506 282 $ en dommages à titre de compensation des coûts de développement du logiciel. Ce chiffre correspond à xxx[46] du montant total du temps consacré au logiciel par les employés d’Equisoft, soit xxxxxxxxxxxxx moins le montant de xxxxxxxx reçu par la SODEP à titre de subvention en début d’élaboration du logiciel Victor.
[155] Equisoft produit un document contenant les entrées du temps consacré au développement du logiciel Victor rebaptisé PublisherElements [47] entre 2007 et 2016. Au total y sont répertoriées toutes les entrées de temps pour élaborer le logiciel offert aux différents éditeurs et ce, pour les quatre phases de développements et mises en œuvre de logiciel. Néanmoins, selon la demanderesse, puisque toutes les améliorations faites au logiciel rapportées et inscrites pour l’un ou l’autre des éditeurs bénéficiaient à l’ensemble de ces derniers, il n’y a pas lieu de faire de déduction pour y retrancher uniquement les entrées pour EPV. En effet le logiciel était constamment modifié et amélioré pour répondre aux besoins particuliers des éditeurs, EPV étant important parmi les clients d’Equisoft.
[156] Il importe de souligner que le montant total inscrit du temps cumulé pour le développement du logiciel destiné aux éditeurs ne comprend pas les coûts de marketing, de vente et , les coûts administratifs de l’entreprise liés au logiciel d’environ x xxxxxxxx x de plus ,ce qui donne un total de coûts investis sur la période de près de 10 ans de plus de xx xxxxxxxx x.
[157] Pour établir la réclamation, Equisoft applique la donnée de xxx attribuée à la portion des coûts de développements d’un logiciel qui sont consacrés à l’étape de l’analyse des besoins du client du développement de l’architecture. Ce qui signifie que xxx des efforts sont consacrés à la conception du code source, des algorithmes suivis de la mise en place par les tests et le déploiement du logiciel.
[158] Cette preuve découle des feuilles de temps, des témoignages de Messieurs Michaud VP opération et de M. Romero président d’Equisoft. L’expert Beaulieu a confirmé qu’il est d’accord avec le xx x mis de l’avant.
[159] EPV s’est limitée à une contestation générale des réclamations par une objection que le relevé P-18 n’est pas assez fiable pour étayer la réclamation et n’a pas présenté de preuve.
[160] Par ailleurs, les témoins d’Equisoft font état d’une perte graduelle de clients après 2016. Alors que jusqu’alors, Equisoft avait le vent dans les voiles, par la suite non seulement elle ne déniche aucun nouveau client mais de plus, elle en perd.
[161] Equisoft se voit contrainte de se départir de sa division destinée au logiciel PublisherElements, en date du 31 décembre 2018 à une société formée d’anciens employés, sans contrepartie ni redevance pour l’avenir. En effet, le conseil d’administration décide de renoncer à continuer de développer ou agir pour maintenir un logiciel pour les éditeurs afin de se consacrer uniquement pour les produits destinés au monde de la finance et de l’assurance. Equisoft estime que le dévoilement aux concurrents de l’architecture du logiciel a été à la source de ses pertes de clients graduelles mais continues. Elle n’a pu apporter une preuve directe de sa vision des choses, elle plaide qu’il est impossible d’illustrer de telles preuves directes et tangibles. Seules les présomptions demeurent. Impossible non plus de faire reconnaitre à un concurrent qu’il a lu et retenu ou utilisé l’information contenue dans le RFI 1.5.
[162] De son côté, EPV a déposé une série de déclarations sous serment provenant de personnes de différentes entreprises ayant reçu le RFI 1.5. Les déclarations ont été préparées par les avocats de la défenderesse. Plusieurs d’entre elles affirment que le RFI ne contenait pas d’information confidentielle, ni d’information procurant un avantage au concurrent. Une demande en radiation de ces allégations précises a été présentée par la demanderesse, au motif que ces témoins ne peuvent énoncer une conclusion qui relève du Tribunal. Ces témoins sont présentés à titre de témoins ordinaires, ils ne peuvent donc soutenir une déclaration qui relève de l’opinion.
[163] Le Tribunal maintient l’objection de la demanderesse, ces témoins sont des témoins idoines qui ne peuvent faire part de leur opinion. L’énoncé visé par la demande en radiation qui se répète dans plusieurs déclarations sous serment contient une expression d’opinion. De plus ces déclarations visent le cœur du débat. Le Tribunal ajoute que même si les témoins avaient plutôt déclaré que selon eux le RFI 1.5 ne contenait pas d’information confidentielle ou procurant un avantage, il aurait accordé peu d’importance à de telles déclarations. La demande en radiation des allégués des déclarations sous serment visées est accueillie[48] seulement en ce qui a trait aux éléments mentionnées plus haut.
[164] Par ailleurs, toutes les déclarations sous serment produites par la défenderesse provenant de 14 des 30 destinataires initiaux du RFI 1.5 contiennent pour la majorité une déclaration à l’effet qu’ils ont détruits le RFI 1.5 et ne l’ont pas utilisé. Les autres, soit environ 16 personnes, ne donnent pas suite à une demande de confirmation de destruction.
[165] La demanderesse rétorque qu’entre la réception le 27 janvier 2016 du RFI 1.5 et le courriel demandant poliment sa destruction vers le 1ier février 2016, les concurrents ont eu le temps de le consulter et d’en comprendre les éléments à la base de l’analyse et l’architecture. Il est vrai que la demanderesse ne peut prouver par témoin ou par un écrit que le RFI 1.5 n’a pas été détruit et qu’il a été mémorisé au moins dans ses grandes lignes, mais selon elle, le mal était fait. Pour reprendre les paroles du président de Equisoft: la diffusion du RFI 1.5 a dévoilé aux concurrents le « roadmap » soit suffisamment de spécifications leur permettant d’ajuster l’offre et le prix.
[166] Messieurs Romero et Michaud ont témoigné des visées d’Equisoft en 2016 alors que la demanderesse avait le vent dans les voiles. Ses dirigeants voulaient développer le marché américain et international. Ils rapportent qu’ils étaient sur une lancée jusqu’en 2016. En 2014 Equisoft avait 7 clients sous contrat pour le logiciel PublisherElements; 9 clients en 2015, 11 clients en 2016 suivi d’une baisse à 7 clients en 2017 suivant la perte de deux clients dont EPV et aucun nouveau client en 2017, ni en 2018. En 2018 ils constatent le retard de PublisherElements par une baisse notable de clients en plus de la perte d’EPV. Les revenus stagnent alors que l’industrie de l’édition continue de progresser.
[167] C’est dans ce contexte que se prend la douloureuse décision de cesser l’exploitation et le développement de PublisherElements en 2018.
[168] En vertu de l’article 1612 C.c.Q. le Tribunal est d’avis que les coûts d’acquisition du logiciel peuvent être récupérés. Ces coûts sont documentés ils sont de xxxxxxxx. Ce sont les frais payés à la SODEP pour acquérir de cette dernière la propriété intellectuelle en application du contrat de licence[49].
[169] En plus, le Tribunal peut accorder des dommages pour compenser les coûts de développement du logiciel. C’est ici que la demanderesse présente les feuilles de temps (pièce P-18) faisant état du travail d’analyse, conception et tests en mise en œuvre de 2007 à 2017 en lien avec le logiciel PublisherElements pour l’ensemble de sa clientèle utilisant le logiciel.
[170] L’expert Beaulieu confirme, et l’expert Léger ne conteste pas, que la proportion d’efforts pour les phases 1 et 2 soit l’analyse des besoins et le développement de la conception et l’architecture est de xx x des coûts totaux de développements d’un logiciel. On ignore s’il s’agit d’une moyenne continue ou si elle varie dans le temps selon les différentes phases rencontrées durant la vie d’un logiciel, mais l’on peut penser qu’il doit y avoir des variations dans le temps.
[171] La preuve que les travaux effectués sur le logiciel à la demande de chaque client bénéficient à chacun d’entre eux est toutefois peu étayée. Le résumé du Tableau pièce P-18[50] attribue à chaque client des montants découlant des feuilles de temps des employés de Equisoft affectées au logiciel PublisherElements, soit pour le logiciel ou pour les clients particuliers. Ainsi au lieu d’utiliser le chiffre total il semble plus logique de prendre en compte les montants apparaissant vis-à-vis GMI (puisque cette société étaient l’intermédiaire entre Equisoft et EPV de 2007 à 2011), plus les chiffres associés à EPV, ainsi que les chiffres associés au logiciel tel quel. Le montant total de ces données est de plus de x xxxxxxxx xx xxxxxxx. Cependant ce chiffre suppose qu’on accepte de prendre en compte tout le montant global de coût indiqué pour le logiciel PublisherElements sous la rubrique Victor/PE et ce, avec peu d’explications. Rappelons que la demanderesse demande au Tribunal d’appliquer et retenir uniquement xxx du chiffre sur lequel le Tribunal s’appuiera pour déterminer les dommages.
[172] Pour attribuer une indemnité, le Tribunal doit tout de même pouvoir s’appuyer sur des bases convaincantes. Ici les explications des coûts découlant des travaux ayant bénéficiés EPV par rapport aux autres sont limitées. Il en est de même pour la preuve que la décision de donner à la division qui exploite le logiciel sans rémunération est entièrement liée à la fuite du secret commercial par la faute d’EPV est également plutôt circonstancielle qu’une preuve direct. Il s’en trouve que le lien de causalité entre la faute d’EPV et tous les dommages réclamés n’est pas certain en totalité.
[173] Le Tribunal se voit contraint d’exercer sa discrétion pour évaluer les dommages appropriés en termes de violation de secret commercial et réclamation découlant des investissements. Le Tribunal doit faire un exercice de pondération en compensant la demanderesse pour une violation d’ententes contractuelles qui ont eu pour conséquences de dévoiler un secret de commerce.
[174] La demanderesse a pris une décision d’affaires de cesser l’exploitation de son logiciel. Cette décision découle de la perte d’intérêt commercial pour le logiciel à la suite du dévoilement du RFI 1.5, sans toutefois qu’il ne soit possible d’en déterminer l’effet précis. Il demeure que la demanderesse a subi un dommage découlant de la faute d’EPV.
[175] Afin de déterminer l’indemnité juste et équitable, le Tribunal s’appuie sur les données qui suivent .La demanderesse a déboursé xxxxxxxx pour acquérir les droits sur le logiciel. Si on retient cette donnée pour la compenser d’un montant de xx x de cette valeur pour appuyer une compensation pour le développement du logiciel, on établit une indemnisation additionnelle de xx xxxx.
[176] Le Tribunal accorde donc à Equisoft une indemnité de xx xxxx x à laquelle on ajoute le coût d’acquisition des droits de xxxxxxxx pour un total de 320 000$.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL
[177] ACCEUILLE en partie la demande d’Equisoft Inc.
[178] CONDAMNE Éditions Protégez- vous à payer à Equisoft la somme de 320 000$, avec intérêts et l’indemnité additionnelle depuis l’assignation,
[179] LE TOUT avec frais de justice, y compris les frais d’expertise.
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__________________________________CHANTAL CORRIVEAU ; J.C.S. |
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Me Julie Desrosiers |
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Me Patricia Hénault |
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FASKEN MARTINEAU LLP |
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Avocates de la demanderesse |
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Me Michael N. Bergman Mme Sarah Miles |
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BERGMAN & ASSOCIÉS |
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Avocats de la défenderesse |
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Dates d’audience : |
Les 3,4, 5, 6, 9, 10, 11 et 12 Novembre 2020 |
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[1] Le Tribunal caviarde et rectifie certaines informations confidentielles à la demande des parties et corrige une mention au paragraphe 49 et complète un mot au paragraphe 86 à la suite du jugement rendu le 27 janvier 2021.
[2]Le texte de l’article 1612 C.c.Q prévoit : « En matière de secret commercial, la perte que subit le propriétaire du secret comprend le coût des investissements faits pour son acquisition, sa mise au point et son exploitation; le gain dont il est privé peut être indemnisé sous forme de redevances. »
[3] Voir le préambule du contrat de licence du 1ier février 2007, Pièce D-7, onglet 3.
[4] Voir la pièce D-7, onglet 3.
[5] Le montant précis est de xxxxxxx x payés à Equisoft à même le produit d’une subvention reçue par la SODEP.
[6] En application de la clause 4.2 du contrat de licence D-7, onglet 3.
[7] Selon le témoignage de M.Steeve Michaud d’Equisoft et la réponse aux engagements no 6 de la lettre du 21 novembre 2017 produite sous la cote P-17.
[8] Voir la pièce P-41.
[9] Notamment à la lumière de l’amendement autorisé en cours d’audience par l’ajout du paragraphe 83 à la défense.
[10] La clause de cession de droit de propriété intellectuelle est à la clause 4.2 du contrat de licence, pièce D-7, engagement 3.
[11] Pièce P-3.
[12] Pièce D-7, onglet 9.
[13] Pièce P-4
[14] Voir la pièce P-4.
[15] Id, Par. 8.
[16] Soit les pièces P-3, P-4 et D-7, onglet 9.
[17] Pièce P-42.
[18] Pièce P-6.
[19]La pièce P-25 est l’enregistrement de la conversation et la pièce P-26 est la transcription.
[20] Pièce P-8.
[21] Pièce D-13.
[22] Ce chiffre provient d’une réponse aux engagements de M. Sylvain Masse, pièce P-19, réponse à la demande d’engagement E-6.
[23] Pièce P-9.
[24] Pièce P-12.
[25] Ibid.
[26] D-4, version française.
[27] Pièce P-40, expertise du 18 octobre 2018.
[28] L’expertise de M. Léger est produite sous la cote D-5 et est datée du 20 avril 2018.
[29] L’expert aborde aussi la question de savoir si un concurrent peut trouver l’algorithme ou le code source ou procéder à de l’ingénierie inverse à partir du RFI1.5. Telle ne fait pas partie des propositions de la demanderesse alors le Tribunal n’abordera pas cette question. En effet la demanderesse reconnait qu’il n’est pas possible avec le RFI 1.5 de recréer le logiciel PublisherElments.
[30] L’expert réfère au second RFI comme étant le 2.2, la Pièce P-9 y réfère comme le RFI 2.0
[31]Le rapport est daté du 8 mai 2019, pièce D-6.
[32] Pièce D-6 page 8.
[33] Les informations de CDS Pièce P-35 qui sont identiques aux passages correspondant du RFI 1.5 se trouvent aux pages 9 en bas,(voir la page 13 du RFI) page 10 au complet, (Voir les pages 14,15 et 16 du RFI,)page 11 au milieu(page 17 du RFI) et en bas (page 18 du RFI), page 12 au complet (pages 19,20 et 21 du RFI), page 13 au milieu et au bas (pages 21 et 22 du RFI)et
[34] Selon le procès-verbal de l’audition du 8 juin 2019 devant l’honorable Donald Bisson quant à la réponse à la demande d’engagement no15 de M. Sylvain Masse.
[35] Voir la discussion dans l’affaire Luxmes International Ltd. c. Lussier 2019 QCCS 1180 de l’honorable Frédéric Bachand, alors à la Cour supérieure, aux paragraphes 107 à 110.
[36] EYB1993CM1613.
[37] Il s’agit d’un rapport intitulé « les secrets de commerce »publié par L’Institut de recherche et de réforme du droit de l’Alberta en collaboration avec une équipe fédérale et provinciale, tel que rapporté par Judith Robinson et Sébastien Jetté, « La protection des secrets commerciaux en dehors des relations employeur-employé » Développements récents en droit de la propriété intellectuelle 2003,p. 10 et 11
[38] Développements récents en droit de la non-concurrence 2009; « Les dessous des informations confidentielles et des secrets de commerce »
[39] Judith Robinson et Sébastien Jetté : »La protection des secrets commerciaux en dehors de la relation employeur-employé Développements récents en droit de la propriété intellectuelle 2003, p.16.
[40] 2008 QCCS 3712, confirmé par la Cour d’appel à l’issus d’une demande en rejet d’appel, DP Sys Inc. c. Contrôle PC Inc. 2008 QCCA 2170.
[41] 2015 QCCS 4290, de l’honorable André Prévost.
[42] Voir la pièce P-43 entre Equisoft et M.Diodati
[43] Voir les contrats de licence P-4, D-7 onglet 3, le contrat de licence du 29 juin 2007 entre EQUISOFT et GMI (produit à l’audition en complément de la pièce P-4) et la convention de non divulgation P-3.
[44] Les pièces P-11 et P-12.
[45] Ce principe ressort de l’arrêt Pelouse Agrostis Turf Inc. c. Club de Golf Balmoral 2003 CanLii 2728 (CA) selon lequel le non renouvellement d’un contrat de service ne peut donner ouverture à des dommages.
[46] Ce xx x correspond, rappelons-le aux portions du développement du logiciel consacrées aux phases 1 et 2 soit l’analyse et la conception, lesquelles ont été révélées par la diffusion du RFI 1.5.
[47] La pièce P-18.
[48] Il s’agit du paragraphe 9 des déclarations sous serment des personnes suivantes; Christine Phan de Jovaco Solution datée du 27 juin 2019 pièce D-18 et Valérie Coutu également de Jovaco Solution datée du 20 juin 2019,pièce D-19 ; de Vincent Allard de Vélo Québec datée du 5 novembre 2020 , pièce D-20 ; de M. Jacques Lavigne de KCK Global , datée du 25 juin 2019 ,pièce D-21 ; M.Stéphane Gruenwald de Kaliop Canada , pièce D-22; M. Daniel D. Hofferman de Advantagecs C5 datée du 28 juin 2019 ; de M.Zarbafi de KCK Global datée du 23 juin 2019 et de M.Camille Diodatti datée du 4 juillet 2019 et dont c’est le par.8 qui est visé .
[49] Pièce D-7 (onglet 3).
[50] Page 3 de la Pièce P-18.Le Tribunal rejette l’objection concernant la production de la Pièce P-18. Ces relevés sont suffisamment détaillés pour être déposés en preuve et considérés.
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