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Uniroc Construction inc. c. Ville de Saint-Jérôme |
2019 QCCS 4342 |
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COUR SUPÉRIEURE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
TERREBONNE |
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N° : |
700-17-012253-158 |
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DATE : |
21 octobre 2019 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
bernard synnott, J.C.S. |
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UNIROC CONSTRUCTION INC. |
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Demanderesse |
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c. |
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VILLE DE SAINT-JÉRÔME |
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Défenderesse |
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JUGEMENT [1] |
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[1] Uniroc Construction Inc. (Uniroc) réclame de la Ville de St-Jérôme (la Ville) la somme de 397 963,70 $[2] suivant l’exécution de 400 mètres de travaux sur la rue Barette et de 100 mètres de travaux sur la rue Lebeau, toutes deux situées à St-Jérôme.
[2] Le contrat octroyé par la Ville consistait notamment à ce qui suit:
· remplacement d’une conduite d’aqueduc et d’un égout combiné, par un égout sanitaire,
· construction d’un nouvel égout pluvial,
· abandon d’un égout combiné existant,
· reconstruction des entrées de services,
· reconstruction des fondations granulaires et pavage,
· reconstruction des bordures et trottoirs de béton,
· remplacement des potences d’éclairage existantes,
· réfection des surfaces et travaux connexes.
[3] Uniroc soutient qu’elle a dû briser et excaver du roc de qualité supérieure à ce qui apparaissait aux documents de l’appel d’offres public de la Ville. Elle ajoute qu’elle a aussi dû excaver une quantité de roc non prévue à ces mêmes documents.
[4] Elle allègue qu’elle a dû briser et excaver le roc à des emplacements imprévus, c’est-à-dire à des endroits non identifiés aux plans et devis soumis.
[5] Elle se dit aussi en droit de réclamer le remboursement des pénalités de retard appliquées par la Ville puisque de tels retards ont été causés par des conditions de chantier différentes de celles qui étaient anticipées à l’analyse des documents d’appel d’offres.
[6] Sa réclamation se détaille comme suit :
1 |
Travaux supplémentaires liés au roc |
291 130, 64 $ |
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+Taxes applicables |
43 596, 81 $ |
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Sous-total |
334 727, 45 $ |
2 |
Remboursement des pénalités appliquées par la Ville (55 jours x 1 000 $/jr) |
55 000 $ |
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+Taxes applicables |
8 236,25 $ |
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Sous-total |
63 236, 25 $ |
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Total |
397 963, 70 $ |
[7] La Ville nie devoir les sommes réclamées.
[8] Elle soutient que l’action d’Uniroc est irrecevable puisque pour avoir le droit de réclamer le paiement de travaux supplémentaires, elle devait respecter les délais de rigueur stipulés au contrat. À cet égard, elle plaide que les termes du devis administratif général[3] applicables en l’espèce sont clairs et qu’Uniroc a fait défaut de les respecter.
[9] Elle allègue aussi qu’Uniroc est la seule responsable des retards d’exécution des travaux puisqu’elle a adopté une méthode de travail inappropriée qui a ralenti l’exécution de l’ensemble des travaux.
[10] De façon plus précise, la Ville soutient qu’Uniroc a décidé volontairement et en toute connaissance de cause d’utiliser une méthode de travail qui exclut l’utilisation d’explosifs.
[11] Elle dit avoir versé à Uniroc l’intégralité des sommes qu’elle était en droit de recevoir, d’autant plus que l’extraction du roc était rémunérée au mètre cube.
[12] Il s’agit d’une méthode de paiement appropriée puisqu’avant l’exécution des travaux, la Ville ne pouvait connaître avec certitude les quantités de roc à extraire, ni son emplacement.
[13] De fait, Uniroc n’a utilisé que le marteau hydraulique pour briser le roc à excaver, ce qui n’était pas, selon la Ville, la méthode de travail appropriée. Le choix de la méthode à employer revient à l’entrepreneur qui en est le seul maître mais il ne peut se plaindre par la suite des retards causés par l’adoption d’une telle méthode.
[14] Au surplus, Uniroc a fait défaut de visiter les lieux avant de soumissionner alors qu’une simple inspection visuelle lui aurait permis de constater la présence de roc dans cette région de la Ville, compte tenu notamment de la topographie des lieux.
[15] Pour la Ville, Uniroc a aussi fait défaut dès le début du chantier, de fournir des équipes compétentes, ce qui a contribué au ralentissement des travaux.
[16] La Ville soutient donc être justifiée d’avoir imposé les pénalités de retard prévues aux documents contractuels[4].
[17] Enfin, Uniroc a choisi de « débalancer » sciemment les prix de sa soumission. Elle ne peut s’en plaindre aujourd’hui.
[18] Les questions que soulève cette affaire sont les suivantes :
1) La réclamation d’Uniroc est-elle irrecevable puisque tardive, suivant le paragraphe 10.3 des Devis normalisés administratifs NQ 1809-900-II/2002?
2) Subsidiairement, Uniroc a-t-elle droit au paiement des sommes réclamées à titre de travaux additionnels?
3) La Ville était-elle en droit d’imposer des pénalités de retard et de retenir la somme de 55 000 $?
4) Les frais d’experts doivent-ils être accordés?
[19] Pour les raisons ci-après exprimées, le Tribunal répond par l’affirmative aux questions 1, 3 et 4 ainsi que par la négative à la question 2. Le recours d’Uniroc est conséquemment rejeté et celle-ci doit rembourser à la Ville les frais d’experts qu’elle a encourus.
1) L’appel d’offres et les travaux à exécuter
[20] Au printemps de l’année 2014, la Ville lance un appel d’offres pour des « travaux de réfection d’aqueduc, d’égouts, de chaussée, de trottoirs, de bordure et d’éclairage sur les rues Barette et Lebeau [5]» situées sur son territoire.
[21] Les travaux à entreprendre sur la rue Lebeau se situent entre les rues Gauthier à l’est et Barette à l’ouest. Il s’agit d’un tronçon d’une longueur d’environ 100 mètres.
[22] Les travaux à exécuter sur la rue Barette sont délimités par les rues Rochon au nord et Lebeau au sud. Ce tronçon est de 400 mètres.
[23] Sur la rue Barette, entre Lebeau et Rochon, c’est-à-dire sur les 400 mètres des travaux, le dénivelé est d’environ 10 mètres. Ils doivent débuter au sud (coin Lebeau) sur la partie la moins élevée de la rue, pour se terminer au nord (coin Rochon) sur une butte, la partie la plus élevée.
[24] Il s’agit d’un secteur résidentiel où les maisons ont été construites dans les années 1950 et 1960.
[25] L’on peut aisément remarquer que sur un côté de la rue Barette, les maisons construites sont surélevées ce qui, selon la preuve, laisse entrevoir la présence de roc[6].
[26] À proximité des rues Barette et Rochon, un hôtel est construit sur du roc apparent.
[27] Une inspection visuelle des fossés avoisinants permet aussi de déceler à l’œil nu la présence de roc.
[28] Les documents d’appel d’offres et les bordereaux de soumissions[7] comportent six postes d’importance pour lesquels des prix sont demandés:
1. Réseau d’eau potable
2. Réseau domestique
3. Réseau d’eau pluviale
4. Réfection de chaussée
5. Pavage 2015.
[29] Chacun de ces postes est lui-même divisé en une série de sous-divisions permettant de connaître de façon spécifique et détaillée le coût pour l’exécution de chacun des travaux ou de chacune des phases des travaux.
[30] En plus de décrire les travaux à exécuter, la Ville estime les quantités et demande des prix en fonction de ses évaluations.
[31] Pour certains travaux, elle demande des prix unitaires alors que pour d’autres, elle requiert des prix au mètre linéaire, au mètre carré, au mètre cube ou encore selon un coût global.
[32] L’extraction du roc est rémunérée au mètre cube[8]. Le prix comprend :
Entre autres, la machinerie, la main-d’œuvre, les matériaux, les fouilles, le piquetage, le décapage du roc, le dynamitage, l’excavation, le transport des matériaux excavés hors site, le remplacement du matériel de première classe excavé par du matériel d’emprunt si requis, le coût supplémentaire relié à l’excavation du roc ainsi que tous les autres travaux, équipements, matériaux nécessaires à la réalisation complète de ses travaux[9].
[Soulignement ajouté]
[33] Le Cahier des charges et devis généraux[10] définit le déblai de première classe et le mode de paiement :
11.4.3 DÉBLAIS DE PREMIÈRE CLASSE
11.4.3.1 Description des travaux
Les déblais de première classe comprennent le roc solide, les revêtements en béton recouverts ou non d’enrobé ainsi que, lorsqu’ils ont un volume supérieur à 1 m3, les blocs de roc et les ouvrages massifs en béton, en pierre ou en maçonnerie cimentés, tous ne pouvant être fragmentés aux dimensions exigées qu’au moyen d’explosifs ou de matériel à percussion. Les sols gelés et les sols pierreux densément agglomérés sont exclus de cette classe.
11.4.3.4 Mode de paiement
Les déblais de première classe sont mesurés dans leur position originale par la méthode indiquée aux plans et devis, jusqu’è la ligne de sous-fondation, et sont payés au mètre cube.
Le prix couvre le forage, y compris celui fait en contrebas de la ligne de sous-fondation, le sautage et la fragmentation des matériaux aux dimensions exigées pour leur utilisation, le chargement et le transport, la mise en œuvre dans les remblais, l’écaillage mécanique et manuel, la mise au rebut, si autorisée, ainsi que la mise en réserve, et il inclut toute dépense incidente.
Les frais engagés par l’entrepreneur pour le roc brisé laissé en place comme matériau de sous-fondation, le profilage et le compactage sont inclus dans le prix des déblais de première classe.
Les blocs de roc, fragmentés aux dimensions exigées pour leur utilisation et payés comme déblais de première, sont meurés avant fragmentation, comme suit : hauteur x largeur x longueur x 2/3.
Tout déblai exécuté en dehors des lignes théoriques, sauf pour les surlageurs ou les profondeurs additionnelles autorisées, est payé au prix du déblai de deuxième classe lorsque utilisé.
[Soulignement ajouté]
[34] Est joint aux documents d’appel d’offres un rapport du Groupe Qualitas inc. (Qualitas).
[35] Ses services ont été retenus par la Ville pour effectuer une étude géotechnique en vue de guider les concepteurs du projet dans la préparation de leurs plans et devis[11]. Elle permet de déterminer la nature et les propriétés des sols et du roc sur les deux rues visées par l’appel d’offre.
[36] Dans l’exécution de son mandat, Qualitas exécute cinq prélèvements par forage à des profondeurs variant entre 3,35 mètres et 5,64 mètres. L’un des prélèvements est effectué sur la rue Lebeau alors que quatre d’entre eux se situent, à intervalles de 100 mètres, sur la rue Barette, le segment le plus important des travaux à venir.
[37] L’emplacement des forages et l’analyse des échantillons prélevés apparaissent au rapport de Qualitas. Un extrait de celui-ci se lit comme suit[12] :
Par ailleurs, si le roc devait être excavé, il ne pourra probablement pas l’être au moyen du godet, d’une pelle hydraulique, ni même d’un marteau piqueur fixé au bras d’une pelle hydraulique. En effet, le roc est de qualité moyenne à bonne, ayant une résistance à la compression qualifiée de forte. Il en résulte donc qu’il s’agit d’un roc particulièrement dur et résistant, dont l’excavation nécessitera probablement l’utilisation d’explosifs.
[Soulignement ajouté]
[38] Justin Beauseigle (Beauseigle) travaille pour Uniroc (ou son ancêtre, puisque l’entreprise a changé de nom) depuis 2012.
[39] Il est estimateur et chargé de projet. C’est lui qui prépare la soumission, la soumet à ses patrons pour approbation et la présente à la Ville. Il est aussi en charge de la gérance du projet.
[40] Avant de préparer sa soumission, il prend connaissance de l’ensemble des documents d’appel d’offre, incluant le rapport de Qualitas.
[41] Le formulaire et bordereau de soumission se lisent comme suit[13] :
Les soussignés conviennent et certifient :
(…)
QUE nous avons visité et examiné attentivement le site des travaux et que nous avons considéré et évalué avec soin les facilités et difficultés inhérentes à l’exécution des travaux, tels que l’accès au site, les distances à parcourir pour l’entrée et la sortie des matériaux, les incertitudes de la température et la nature du sol et du roc.
(…)
QUE nous avons pris connaissance et acceptons entre autres, les conditions cités à l’article « Condition de température et de terrain » de la section 6 « Clauses administratives particulières » du présent devis.
[Soulignement ajouté]
[42] Le formulaire est signé sans réserve.
[43] Contrairement à ce qui y est attesté, Beauseigle ne fait aucune visite des lieux préalable au dépôt de la soumission. Le vice-président d’Uniroc, signataire de la soumission, ne visite pas plus les lieux.
[44] Il reconnait que s’il avait visité les lieux, il aurait pu constater de façon plus certaine, le dénivelé de la rue, la surélévation des maisons, la constitution de roc des fossés, la présence d’un hôtel à proximité construit sur du roc.
[45] La section huit des clauses techniques particulières ajoutées à l’addenda numéro un du 30 mai 2014 se lit comme suit [14]:
1. Excavation par sautage
Le devis normalisé BNQ 1809-350-Travaux de construction-Excavations par sautage Prévention des intoxications par monoxyde de carbone fait partie intégrante du devis.
Les soumissionnaires sont priés de noter qu’une inspection détaillée des bâtiments situés dans un rayon de 200 m du site de sautage sera exigée. Cette inspection devra être complétée et transmise à la ville avant le début des travaux de sautage.
[Soulignement ajouté]
[46] Le paragraphe 41.2.15 de la section 6 des clauses administratives particulières se lit comme suit :
41.2.15 Dynamitage et excavation 1re classe
Aux articles «Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe» du bordereau de soumission, l’entrepreneur doit fournir un prix au mètre cube pour le dynamitage et l’excavation des matériaux 1re classe.
Le prix doit comprendre entre autres, la machinerie, la main d’œuvre, les matériaux, les fouilles, le piquetage, le décapage du roc, le dynamitage, l’excavation, le transport des matériaux excavés hors site, le remplacement du matériel de première classe excavé par du matériel d’emprunt si requis, le coût supplémentaire relié à l’excavation du roc ainsi que tous les autres travaux, équipements matériaux nécessaires à la réalisation complète de ces travaux.
Les quantités de déblai seront payées selon les tranchées théoriques des conduites et coupes types de la chaussée montrées aux plans. Le mesurage du roc sera effectué conformément à l’article 11.4.3.4 du CCDG. En cas de mésentente sur les volumes calculés, les quantités du consultant prévaudront sur celles de l’entrepreneur.
[Soulignement ajouté]
2) Le prix du marché pour le dynamitage
[47] Suivant l’étude des documents de l’appel d’offres et dans le cadre de la préparation de sa soumission, Beauseigle demande à Dynamitage St-Pierre, un sous-traitant avec qui Uniroc fait régulièrement affaire, de soumissionner pour le «dynamitage pour services publics en tranchée avec utilisation de tapis pare-éclats[15] ».
[48] Uniroc obtient un prix unitaire au mètre linéaire ainsi qu’un prix au mètre cube. La soumission de Dynamitage St-Pierre, identifiée comme étant le « projet Barette Lebeau »[16] propose les prix suivants :
Prix unitaire au mètre linéaire |
120 $ |
Prix au mètre cube |
100 $ |
Inspection des bâtiments et détecteurs de monoxyde de carbone |
7 000 $ |
[Emphase ajoutée]
[49] Il n’est pas contesté que cette soumission représente le prix du marché pour le dynamitage qui peut atteindre 125 $ le mètre cube.
3) L’ouverture des soumissions, le contrat et le débalancement des prix soumis
[50] Le 4 juin 2014 est la date d’ouverture des soumissions. Huit entrepreneurs ont répondu à l’appel.
[51] À l’ouverture des soumissions, la Ville constate que les soumissions sont toutes conformes[17]. La plus basse est celle d’Uniroc.
[52] Les prix obtenus varient entre 1 476 770, 06 $ et 1 850 232, 92 $[18] :
Nom du soumissionnaire |
Montants soumissionnés |
Uniroc Construction Inc. |
1 476 770,06 $ |
Les Constructions CJRB inc. |
1 561 053,87 $ |
Construction T.R.B. inc. |
1 623 509,14 $ |
Construction G-NESIS inc. |
1 673 974,83 $ |
Bernard Sauvé Excavation inc. |
1 697 270,44 $ |
Duroking Construction (9200-2088 Québec inc.) |
1 726 027,57 $ |
Groupe Solex inc. |
1 765 906,43 $ |
Raymond Bouchard Excavation inc. |
1 850 232,92 $ |
[53] Le 17 juin 2017, la Ville adopte une résolution et octroie le contrat à Uniroc selon les termes de sa soumission, soit à la somme de 1 476 770, 06 $[19].
[54] Aux documents d’appel d’offre, le « Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe » est prévu à trois postes budgétaires distincts[20] :
· 1.17 réseau d’eau potable,
· 2.15 égouts domestiques et
· 3.10 réseau d’eaux pluviales.
[55] Les extraits de la soumission d’Uniroc pour chacun de ces postes se lisent comme suit (Uniroc n’ayant qu’à remplir les colonnes intitulées « Coût unitaire » et « Montant total », les autres cases étant déjà remplies par la Ville. Les quantités sont approximatives[21]) :
Article # |
Description |
Quantité |
Unité |
Coût unitaire |
Montant total |
1.17 Réseau d’eau potable |
Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe |
100.0 |
M3 |
21 $ |
2 100 $ |
2.15 Égouts domestiques |
Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe |
100.0 |
M3 |
11 $ |
1 100 $ |
3.10 Réseau d’eaux pluviales |
Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe |
130.0 |
M3 |
11 $ |
1 430 $ |
[56] Le prix d’Uniroc soumissionné à 21 $ le mètre cube au chapitre « réseau d’eau potable (1.17) » est près de 5 fois en deçà de celui du marché, uniquement pour le dynamitage, sans compter l’extraction.
[57] Les prix soumissionnés à 11 $ le mètre cube aux chapitres respectifs «égout domestique (2.15) » et « réseau d’eau pluviale (3.10) » sont, uniquement pour le dynamitage et sans compter l’extraction, plus de 9 fois sous le prix du marché.
[58] Il ne s’agit pas d’une erreur.
[59] Les prix sont présentés par Uniroc en toute connaissance de cause puisqu’elle choisit de « débalancer » volontairement sa soumission, technique qu’elle utilise régulièrement lors d’appels d’offres publics.
[60] D’ailleurs, à Piedmont, une soumission d’Uniroc a déjà été rejetée à cause d’un débalancement similaire. Uniroc a poursuivi la municipalité et obtenu gain de cause[22].
[61] Dans le cadre de son débalancement, elle soumissionne sciemment bien en deçà du prix du marché pour le dynamitage et l’excavation de roc, dont la quantité à extraire est incertaine au moment du dépôt de la soumission.
[62] À l’inverse, elle soumissionne bien au-delà du prix du marché pour des éléments importants dont les quantités sont certaines, tel la pose des conduites d’aqueduc et d’égouts rémunérée au prix linéaire.
[63] Ce faisant, elle accepte de perdre considérablement pour le dynamitage et l’extraction de roc. Elle prend aussi le pari d’en trouver moins que prévu. En échange, elle sait qu’elle touche un profit supérieur pour l’installation de chaque mètre de conduites d’égouts et d’aqueduc. À ce sujet, elle est certaine des quantités.
[64] Suivant l’exécution des travaux, les quantités effectivement excavées ne sont pas contestées et apparaissent au décompte progressif numéro 6 du 11 mars 2015[23].
[65] Conformément à ce décompte progressif, les quantités réelles sont révisées et les montants sont payés en conséquence :
Article # |
Description |
Qté |
Qté réalisée |
Unité |
Coût unitaire |
Montant total |
1.17 Réseau d’eau potable |
Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe |
100.0 |
102.7 |
M3 |
21 $ |
2 156, 70 $ |
2.15 Égouts domestiques |
Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe |
100.0 |
154.3 |
M3 |
11 $ |
1 697, 30 $ |
3.10 Réseau d’eaux pluviales |
Supplément pour dynamitage et excavation de matériaux de première classe |
130.0 |
147.4 |
M3 |
11 $ |
1 621, 40 $ |
[66] Ainsi, lors de l’appel d’offres, la Ville estime à 330 mètres cubes la quantité de roc à excaver.
[67] Au final, 404,4 mètres cubes sont excavés, soit 74 mètres cubes de plus qu’estimé, sur les 500 mètres de travaux.
[68] Il est admis que la Ville paie Uniroc conformément aux prix soumissionnés pour les quantités réellement excavées.
4) La réclamation d’Uniroc
[69] Les travaux débutent le 7 juillet 2014 et sont reçus provisoirement le 27 novembre 2014.
[70] Le 17 décembre 2014, trois semaines après la réception provisoire, Uniroc transmet à la Ville une réclamation pour « coûts supplémentaires imprévus[24] ».
[71] Il s’agit d’un argumentaire de plusieurs pages préparé par Beauseigle qui y joint 4 tableaux et 13 annexes.
[72] Il y argue que selon l’appel d’offre et l’expertise de Qualitas jointe aux documents d’appel d’offres, Uniroc s’attend à trouver du roc sur 80 mètres linéaires, alors qu’en réalité elle en rencontre sur 240 mètres[25].
[73] Il affirme que généralement, dans l’exécution des travaux, Uniroc rencontre les conditions de sol anticipées mais qu’elle rencontre aussi du roc « non prévu » à certains endroits.
[74] Cela dit, à titre de chargé de projet, avant même de déposer sa soumission, il choisit de ne pas utiliser d’explosifs pour briser et excaver le roc puisque, avance-t-il, l’utilisation du marteau hydraulique est la méthode appropriée pour ce type de chantier, compte tenu des documents d’appel d’offres.
[75] De toute façon, pour lui, l’âge des maisons environnantes, les risques de fissures des solages et les possibilités d’infiltration de monoxyde de carbone dans les résidences ne permettaient pas d’envisager l’utilisation d’explosifs.
[76] Il dit avoir obtenu le 22 août 2014 (soit 7 semaines après le début des travaux) une lettre de Dynamitage Saint-Pierre lui confirmant que l’utilisation d’explosifs sur cette rue n’était pas appropriée[26]. Dynamitage Saint-Pierre est ce même dynamiteur d’expérience qui avait remis une soumission à Uniroc, sans réserves.
[77] Le Tribunal note que la lettre du 22 août indique plutôt que Dynamitage Saint-Pierre est « apte à dynamiter dans n’importe quelles conditions, par contre certains projets comportent de plus importantes contraintes.[27] »
[78] Le 25 août 2014, une lettre similaire est obtenue d’un autre sous-traitant en dynamitage[28]. Il s’agit d’une lettre de trois paragraphes transmise à Uniroc sur simple demande téléphonique.
[79] Au procès, Beauseigle témoigne qu’il ne pouvait s’imaginer que le roc à excaver était aussi résistant et présent en termes linéaires.
[80] Il ne peut toutefois faire la preuve de la dureté du roc puisqu’aucune expertise en ce sens n’a été faite avant l’embauche par Uniroc d’un expert, en novembre 2014.
[81] À cette période, les travaux en sont à leur phase finale et sont réalisés dans la partie la plus élevée, soit sur la butte de roc située sur la partie Nord de la rue Barette.
[82] Il obtient le même mois une lettre d’Excavation Martel suivant laquelle le roc concassé sur le chantier est d’une dureté élevée. Cette affirmation de Martel est fondée sur son expérience[29].
[83] Au sujet de la main d’œuvre inexpérimentée sur le chantier, Beauseigle admet qu’à l’été 2014, l’entreprise est en manque de main-d’œuvre et que les manœuvres embauchés pour le projet sont des ouvriers de peu d’expérience qui manquent de connaissances pour mener à bien ce projet[30].
[84] Il reconnaît que cette situation occasionne des retards mais affirme qu’il remplace plus tard l’équipe en question par des manœuvres expérimentés.
5) La Ville
[85] Julie Laroche est ingénieure, chargée de projet à la Ville de St-Jérôme.
[86] Elle connait Uniroc, entrepreneur actif dans la région.
[87] Dès le début des travaux, elle est surprise du choix d’Uniroc d’utiliser le marteau hydraulique pour briser le roc, plutôt que les explosifs.
[88] Il est de commune renommée et surtout bien connu des entrepreneurs de la région tel Uniroc, que la Ville est construite sur du roc et que ce roc est souvent d’une grande dureté.
[89] Au surplus, une simple visite des lieux permet de déceler la présence de roc dans ce quartier de la Ville.
[90] La Ville procède tout de même à des échantillonnages de sol qui servent à la préparation des documents d’appel d’offres mais Laroche est catégorique: à St-Jérôme, sauf pour des travaux de moindre envergure, elle n’a jamais été témoin qu’un entrepreneur ait choisi la méthode du marteau pour casser et excaver le roc.
[91] Dans tous les cas, l’utilisation d’explosifs est la méthode à retenir et retenue par les entrepreneurs. Uniroc ne peut l’ignorer.
[92] Elle ne peut souscrire à l’argumentaire d’Uniroc suivant lequel l’utilisation d’explosifs n’est pas de mise, compte tenu de la proximité des résidences avoisinantes et de l’âge de leur construction.
[93] En effet, des travaux de même nature sont régulièrement complétés avec succès dans plusieurs rues de la Ville au moyen d’explosifs alors que des résidences du même âge y sont construites.
[94] Les maisons dans les autres secteurs sont même souvent plus proches de la rue que celles de la rue Barette et cela n’empêche en rien l’utilisation d’explosifs. Elle produit à titre d’exemple une photo de la rue Faustin ayant récemment fait l’objet de travaux de même nature et où l’utilisation d’explosifs a été préconisée sans questionnement sur l’ensemble du chantier[31].
[95] Elle indique que l’on peut facilement apercevoir du roc dans les fossés avoisinants, notamment sur la rue Lebeau.
[96] Un hôtel à proximité est même construit sur un cap de roc. Tout ceci est visible à l’œil nu. Une simple inspection visuelle permet aisément d’apercevoir la présence de roc.
[97] Compte tenu des circonstances et à titre d’ingénieure, elle juge que 5 forages d’échantillonnage sont suffisants, c’est-à-dire un forage au 100 mètres.
[98] Pour elle, l’entêtement d’Uniroc de n’utiliser que le marteau hydraulique pour exécuter les travaux est la cause de son retard. Sur le chantier, un tel entêtement devient une forme de dérision (« running gag »).
[99] À chaque occasion tant elle que De Paoli de CDGU (les surveillants du chantier mandatés par la Ville) remettent en cause la méthode préconisée par Uniroc. À chaque fois, Beauseigle se fait rassurant: tout sera achevé dans les délais.
[100] Elle juge non crédible ses représentations puisque clairement, les retards s’accumulent. Elle l’en informe et lui répète que les retards occasionneront des pénalités.
[101] À quelques reprises, Uniroc demande à la Ville la permission de continuer l’exécution des travaux la fin de semaine[32], incluant le bris et l’excavation du roc. Sauf à une occasion, ces demandes sont refusées conformément au devis afin d’assurer la quiétude des résidents.
[102] Quant aux pénalités de retard, la Ville est conciliante puisque pour le calcul des jours de retards, elle utilise la date du 7 juillet 2014 alors que les travaux devaient débuter le 26 juin 2014. L’on retranche même quelques jours de pénalités même si le devis est clair à ce sujet.
6) CDGU, les travaux et les échéanciers
[103] La Ville mandate Ugo de Paoli de la firme CDGU ingénierie urbaine (CDGU), pour la surveillance du chantier et pour s’assurer de sa bonne réalisation.
[104] Les documents d’appel d’offres prévoient que les travaux doivent débuter le 25 juin 2014[33], pour une durée de 90 jours[34].
[105] Une fois le contrat obtenu, Uniroc demande le report de la date du début des travaux puisqu’il a obtenu un autre contrat public de la Ville qu’il veut jumeler avec celui-ci.
[106] Le 25 juin 2014, Patrick Boutin de CDGU écrit à Uniroc[35] :
Monsieur,
La Ville de St-Jérôme demeure sur la position exprimée lors de la réunion de démarrage et maintien [sic] l’ordre de débuter les travaux pour le 25 juin 2014 relativement au projet cité en rubrique.
Vous avez quatre-vingt (90) jours de calendrier pour exécuter ces travaux soit jusqu’au 24 septembre 2014 inclusivement.
Nous vous rappelons que vous devez prévoir le nombre suffisant d’équipes de travail afin de respecter cet échéancier. Tout dépassement du délai contractuel est sujet à une pénalité minimale de 1000$/jour civil de retard, et ce tel que décrit aux documents contractuels.
[Soulignement ajouté]
[107] Malgré tout et après protestation de la part de la Ville, les travaux débutent le 7 juillet 2014[36].
[108] Ils doivent donc se terminer le 5 octobre 2014, soit 90 jours plus tard. Il n’est pas contesté que leur fin est le 27 novembre 2014, soit 53 jours de calendrier plus tard que prévu.
[109] Dès le début des travaux, des discussions ont cours sur des avis de changements ainsi que sur des travaux non prévus au contrat.
[110] Ces discussions apparaissent aux nombreux rapports journaliers produits en preuve ainsi qu’aux comptes rendus des réunions de chantier[37].
[111] Le rapport journalier du 21 juillet 2014 révèle la présence sur le chantier de « trois manœuvres qui ne connaissent rien[38] ». Le lendemain, le rapport journalier indique : « trois manœuvres inexpérimentés [39]».
[112] De Paoli témoigne que le manque d’expérience des équipes de travail d’Uniroc et leur désorganisation contribue aux retards d’exécution des travaux.
[113] Le 7 août 2014, lors d’une réunion de chantier, les questions de l’échéancier et de l’excavation de roc sont officiellement au menu.
[114] Des extraits du compte-rendu de cette réunion de chantier se lisent comme suit[40] :
[…]
2.1 ÉCHÉANCIER
Un échéancier à jour est remis par l’entrepreneur lors de la rencontre. Selon cet échéancier, les travaux seront terminés au plus tard le 3 octobre, respectant le délai contractuel de 90 jours calendrier (5 octobre). Le nouvel échéancier prévoit une production de pose de conduite de +/- 25 m.lin. par jour. L’entrepreneur nous assure que cette production est atteignable sur la rue Barrette.
[…]
2.4 EXCAVATION DE ROC
L’entrepreneur anticipe devoir excaver du roc entre les rues Castonguay et Rochon. La méthode de travail pour le bris de roc n’a pas encore été déterminée.
CDGU mentionne que les travaux de dynamitage nécessitent des travaux préparatifs et que des délais sont à prévoir par l’entrepreneur si cette option est retenue.
[Soulignement ajouté]
[115] Le 22 août en matinée, Uniroc écrit à CDGU et à la Ville, ce qui suit[41] :
Bonjour,
Au chaînage 1+318, nous avons rencontré du roc, au Forage F4, qui nous empeche (sic) de poser notre egout (sic) sanitaire. Le Forage F4 mentionnait la présence de roc bien plus bas que le niveau de nos tuyaux.
Des délais d’exécution supplémentaires sont à prévoir.
[Soulignement ajouté]
[116] La même journée, il réécrit aux mêmes personnes [42]:
Bonjour,
Suite à la découverte de roc au chaînage 1+318 et descendant, nous devrons travailler demain samedi le 23 août afin de ne pas retarder les travaux. Nous travaillerons environ de 9 h @ 15 h.
Merci.
[Soulignement ajouté]
[117] Le lendemain, Uniroc écrit à nouveau aux mêmes personnes[43]:
Bonjour,
Tel que déjà envoyé dans un courriel précédent, nous avons rencontré du roc au chaînage 1+316. Voir les photos ci-jointes. Le roc se trouve principalement du côté Est de la rue Barette, soit sous la conduite d’aqueduc.
Nous vous proposons de ramener l’aqueduc à 1,5 m de la conduite d’égout sanitaire à partir du chaînage 1+310, tout en respectant la norme NQ 1809-300 10.1, car la conduite d’aqueduc se trouver à remonter au-dessus de l’égout sanitaire d’au moins 300 mm à partir de ce chaînage.
Cette proposition permettrait de limiter les quantités de roc à briser, donc de limiter les pertes de production subies due (sic) à cette présence.
Merci de votre compréhension,
[118] Il est admis que CDGU et la Ville acceptent cette proposition. Cela permet à Uniroc de gagner en productivité.
[119] Le 26 août 2014, une réunion de chantier a lieu entre Uniroc, les représentants de la Ville et ceux de CDGU. Des extraits du compte-rendu de cette réunion se lisent comme suit [44]:
[…]
2.1 ÉCHÉANCIER
Un échéancier à jour est remis par l’entrepreneur lors de la rencontre. Selon cet échéancier, les travaux seront terminés au plus tard le 6 octobre. Cet échéancier est basé sur une production de pose de conduite de +/- 20 min.lin. (tu as dit 25 min.lin.) par jour et tient compte de la présence potentielle de roc.
Malgré les doutes de la Ville et CDGU, l’entrepreneur nous assure que cette production est atteignable. Afin d’améliorer la production, le roc sera brisé à l’avance afin de ne pas ralentir l’équipe de pose.
CDGU mentionne que la date de fin des travaux contractuelle est maintenue au 5 octobre et que les pénalités prévues au devis seront applicables.
[…]
[Soulignement ajouté]
2.4 EXCAVATION DE ROC
La méthode de bris de roc demeure le choix de l’entrepreneur. Toutefois, CDGU et la Ville mentionne (sic) qu’ils sont surpris qu’aucun dynamitage ne soit anticipé pour ce projet puisque, de façon générale, cette méthode apporte des gains de productivités significatifs. Pour ce projet, l’entrepreneur préconise la méthode forage/marteau ou marteau puisqu’il considère que le dynamitage apporterait peu de gain de productivité et que les risques sont élevés. Afin d’éviter les délais, l’entrepreneur mentionne que le roc sera brisée (sic) à l’avance en amont.
CDGU réitère que les travaux de dynamitage nécessitent des travaux préparatifs et que des délais sont à prévoir par l’entrepreneur si cette option est retenue.
[Soulignement ajouté]
[120] Malgré ses affirmations sur le chantier, Beauseigle témoigne qu’Uniroc n’a jamais eu l’intention de dynamiter.
[121] Selon ce qu’il affirme, Uniroc voulait éviter de causer des dommages au solage des vieilles maisons situées sur la rue. Il reconnait en contre-interrogatoire qu’il n’a procédé à aucune inspection de solages.
[122] Pour lui, la solution du marteau piqueur doit être retenue. Il soutient que le roc supplémentaire et rencontré à des endroits imprévus retarde les travaux de 45 jours.
[123] Le 10 septembre 2014, Beauseigle écrit à Ugo de Paoli (CDGU) et à la Ville[45]:
Bonjour,
Nous avons rencontré du roc au chaînage 1+200 environ, et devons briser au marteau dans la tranchée, alors qu’il n’y avait pas de roc prévu à cet endroit.
Prévoir des délais supplémentaires.
Salutations,
[Soulignement ajouté]
[124] Le 11 septembre 2014, une troisième réunion de chantier a lieu entre Uniroc, CDGU et la Ville de Saint-Jérôme.
[125] Les extraits de cette réunion se lisent comme suit[46] :
4.1 ÉCHÉANCIER
Un échéancier à jour est remis par l’entrepreneur lors de la rencontre. Selon cet échéancier, les travaux seront terminés vers le 13 octobre. L’entrepreneur nous assure que cet échéancier est réaliste malgré la présence de roc au nord de la rue Castonguay. Afin d’améliorer la production, le roc est brisé à l’avance afin de ne pas ralentir l’équipe de pose.
CDGU mentionne que la date de fin des travaux contractuelle est maintenue au 6 octobre et que les pénalités prévues au devis seront applicable. (sic)
Afin de permettre les travaux de finition sur la rue Lebeau et au sud de Castonguay, un « By-Pass » sera mis en place à l’intersection Castonguay.
4.4 EXCAVATION DE ROC
Uniroc confirme que le bris de roc sera terminé au marteau. Selon l’entrepreneur, il reste +/- 30 m.l. de roc à briser pour chaque conduite. Le bris de roc au marteau ne devrait pas ralentir les travaux.
CDGU et la Ville mentionne (sic) une nouvelle fois que cette méthode ne semble pas optimale et qu’elle risque d’avoir un impact sur les délais.
[Soulignement ajouté]
[126] Le 16 septembre 2014, Julie Laroche, ingénieure chargée de projet à la Ville écrit à Uniroc et CDGU[47] :
Bonjour,
La présente fait suite au constat au chantier de la lenteur des travaux sur la rue Barrette.
Il est clair que l’entrepreneur ne rencontre pas les rendements anticipés à son échéancier. Ça fait 1,5 jours (sic) que le roc est brisé au tramac et que l’équipe de pose n’avance pas.
Il serait pertinent d’écrire officiellement une lettre lui indiquant que les pénalités de retard seront appliquées s’il y a un dépassement de délai d’exécution puisque nous considérons que ce retard est attribuable à sa méthode de travail pour l’excavation du roc au tramac.
Merci de faire le suivi.
[127] Le 25 septembre 2014, CDGU écrit à Uniroc pour lui rappeler que les travaux n’évoluent pas de façon acceptable et que les rendements anticipés ne sont pas rencontrés[48].
[128] Elle ajoute qu’Uniroc n’ajuste pas les ressources affectées aux travaux afin de compenser la productivité inférieure aux attentes.
[129] Elle impute aussi les retards à la méthode de travail utilisée par Uniroc et ses sous-traitants, notamment pour l’excavation du roc. Elle lui rappelle également qu’une pénalité de 1 000 $ par jour de retard sera appliquée.
[130] Le 14 octobre 2014, la Ville se plaint à Uniroc du manque d’effectifs. De plus, le bris d’une pièce d’équipement est causé par le choix de la méthode de travail adoptée par cette dernière. La Ville réitère que les retards sont causés par le fait d’Uniroc[49].
[131] Uniroc réplique le même jour : on lui refuse de travailler les fins de semaine et elle rencontre du roc à des endroits imprévus[50].
[132] Le 27 octobre 2014, suivant une visite de chantier du 23 octobre 2014, CDGU écrit à Uniroc[51] :
(…)
· les conduites d’égouts devraient être terminées vers le 29 octobre. Il reste une portion de roc à briser à l’approche des regards RS-1/RP-6;
· (…)
· Du à la méthode de travail de Uniroc, les résidents des # civ.(...) n’ont pas accès à leurs entrées charretières depuis pratiquement deux mois. (…);
· La date contractuelle de fin des travaux et le 6 octobre. En date de la visite, les travaux accusent un retard de 17 jours. La pénalité pour retard est de 1000 $ / jour additionné des frais de surveillance (CDGU : 850 $/jour, Ville : À déterminer);
· Uniroc a présenté un échéancier à jour (ci-joint). La fin des travaux est maintenant prévue vers le 12 novembre, ce qui représente un retard de 37 jours par rapport à la date contractuelle.
[Soulignement ajouté]
[133] Le 29 octobre 2014, Uniroc répond[52] :
Voir quelques commentaires :
· Uniroc mentionne qu’il a rencontré des conditions de chantier manifestement différentes de ce qui avait été présenté dans les documents de soumission. Pour ces raisons, toutes pénalités de délai seront contestées.
· Uniroc mentionne avoir demandé à plusieurs reprises de faire des travaux de marteau hydraulique les samedis afin d’accélérer les travaux, mais ces demandes n’ont jamais été acceptées.
[Soulignement ajouté]
[134] Le 17 novembre 2014, CDGU écrit de nouveaux à Uniroc. Il l’informe des retards cumulés et de l’exécution des travaux dans des conditions hivernales.
[135] Le 18 novembre 2014, Uniroc répond[53] :
[…]
Soyez informés par la présente que nous sommes en désaccord avec les affirmations faites dans le courriel ci-dessous.
Tel que mentionné à plusieurs reprises en réunion, au chantier et lors de conversations téléphoniques et autres, les conditions rencontrées au chantier ont été différentes des conditions prévues en soumission et cette situation nous a occasionné des retards et des coûts supplémentaires.
Tel que discuté avec M. Martin Gratton, nous sommes à préparer une réclamation en ce sens afin de vous exposer les préjudices subis et il est compensation monétaire demandées.
[…]
[Soulignement ajouté]
[136] Bien que la convention collective relative aux « vacances de la construction » ne s’applique pas aux travaux en cause[54], Uniroc prend la décision de suspendre le chantier du 28 juillet 2014 au 1er août 2014[55].
[137] Beauseigle témoigne qu’à ce moment, Uniroc ne rencontre pas encore de roc et qu’elle n’envisage donc pas de retard.
[138] Les travaux sont plus tard substantiellement complétés avec 53 jours de retard, moment de leur acceptation provisoire qui intervient le 27 novembre 2014.
[139] Dans le calcul des jours de retard, De Paoli retranche les jours fériés et les congés. Il ne commence son calcul qu’à compter du 7 juillet 2014 alors que les travaux devaient débuter le 25 juin 2014. Il tient aussi compte des jours additionnels accordés pour des travaux supplémentaires négociés et acceptés sporadiquement en cours d’exécution. À ce sujet, il produit un Tableau du calcul des pénalités[56].
[140] De Paoli a participé à l’élaboration de la soumission. Il a évalué la quantité de roc à extraire aux points 1.17, 2.15 et 3.16 de la soumission. Il indique qu’il avait évalué un total de 330 mètres cubes alors que la réalité a voulu que 404.4 mètres cubes soient excavés.
[141] Selon son expérience, généralement les prix au mètre cube varient entre 75 $ et 125 $. Il n’est donc pas surpris de voir que Dynamitage St-Pierre ait soumissionné comme sous-traitant d’Uniroc à 100 $ le mètre cube.
[142] Il se dit surpris de la réclamation d’Uniroc puisque monsieur Beauseigle n’a jamais soulevé cette question lors des réunions de chantier. Au contraire, tout au long du chantier, il affirmait maintenir l’échéancier prévu. Au surplus, il représentait qu’il allait rattraper le retard, si retard il y avait. Sauf fin novembre, il n’a pas plus été question de réclamation pour travaux supplémentaires
LES EXPERTISES
· En demande
[143] Les services de l’expert Mohammad Hosseini (Hosseini), président de la firme Fondasol sont retenus par Uniroc en novembre 2014. Il doit analyser le roc.
[144] Il remet en cause le nombre de forages effectués par la Ville en vue de la préparation des documents d’appel d’offres. La Ville aurait dû en faire huit plutôt que cinq.
[145] Comme la grande majorité des travaux est complétée au moment où il est mandaté, il ne peut analyser que le roc situé à l’extrémité nord des travaux de la rue Barette, c’est-à-dire sur la butte de roc. La prise d’échantillonnages s’effectue le 22 novembre 2014.
[146] Le roc analysé révèle une résistance qu’il qualifie de très forte. Toutefois, les échantillonnages utilisés ne sont pas nécessairement représentatifs du roc excavé ailleurs dans le cadre de ce chantier.
[147] Il reconnaît que le dynamitage en milieu urbain est possible et qu’il suffit de calculer la vibration causée par les explosifs, telle vibration devant être inférieure à 8 m/s.
[148] Pour le dynamitage en milieu urbain, il utilise les normes européennes. En contre-interrogatoire, il reconnaît que les normes nord-américaines sont moins contraignantes, c’est-à-dire plus souples. À titre d’exemple, la Ville de Montréal adopte des règles significativement moins contraignantes que les règles européennes utilisées.
[149] En fait, la détermination principale est la vitesse des ondes de vibration qui doit être calculée selon les normes applicables.
[150] Il reconnaît que la productivité est plus faible par l’utilisation du marteau.
[151] Pour lui, le rapport de Qualitas sur la nature du sol est déficient mais il reconnaît qu’une visite des lieux laisse présager la présence importante de roc sur la rue Barette, notamment par la topographie des lieux et la nature des fossés.
· En défense
[152] Les services de l’expert Martin Fournier (Fournier) de la firme CEP Forensique inc, sont retenus par la Ville.
[153] Il a étudié l’ensemble de la documentation.
[154] Pour lui, ce projet nécessitait sans contredit l’utilisation d’explosifs, notamment à la lecture du rapport de Qualitas et aussi des documents d’appel d’offres.
[155] À ce sujet, il ne fait pas de doute, à la lecture de la documentation contractuelle, qu’une telle méthode était à prévoir[57].
[156] C’est d’ailleurs ce que semble avoir compris Uniroc puisqu’elle a demandé à un sous-traitant de lui soumettre un prix pour le dynamitage.
[157] Pour lui, les retards du chantier sont causés par la méthode employée par Uniroc pour excaver le roc.
[158] Il témoigne que l’utilisation d’explosifs en vue de l’excavation était la méthode à retenir en utilisant des patrons et des charges de sautage adaptés au chantier.
[159] Il était possible de limiter les vitesses de vibration de façon à ne pas endommager les résidences situées à proximité, comme cela se fait régulièrement dans de nombreux travaux urbains nécessitant l’utilisation d’explosifs. L’utilisation des normes BNQ 510 et BNQ 350 était appropriée dans les circonstances[58] et celles-ci permettaient la méthode de dynamitage.
[160] Pour lui, l’argument relatif à l’âge des bâtiments et les risques d’infiltration de monoxyde de carbone dans les résidences n’est pas valable puisque la norme BNQ 350 vise justement l’utilisation d’explosifs à proximité de vieux bâtiments situés à proximité des services publics souterrains.
[161] Quant à l’analyse de Fondasol suivant laquelle la résistance du roc de l’échantillon testé est très forte, cela demeure de peu d’importance. En effet selon son expertise, dès que la résistance du roc est de catégorie dite forte, la méthode à retenir est celle du dynamitage. C’est d’ailleurs l’opinion qu’avait exprimée Qualitas.
[162] Il en conclut que[59] :
[…] le gain de productivité sur l’ensemble du projet surpassait les coûts et les contraintes qu’imposait le site pour l’utilisation d’une méthode d’excavation par dynamitage par rapport à la méthode de cassage du roc par marteau.
[…]
De plus, l’entêtement de l’entrepreneur à ne pas changer sa méthode d’excavation du roc est la cause de son retard à ne pas rencontrer la productivité qu’il recherchait.
LES FRAIS D’EXPERTS
[163] Le montant des honoraires de l’expert Hosseini s’élève à la somme de 13 708,47 $. Ceux de l’expert Fournier sont de 34 254,54 $.
[164] Dans l’éventualité où le Tribunal donne raison à la Ville, Uniroc invite le Tribunal à ne pas la condamner au remboursement des frais de l’expert Fournier.
[165] Pour elle, tant son expertise que son témoignage manquent d’objectivité, qu’ils n’apportent aucun éclairage significatif et qu’ils comportent de nombreuses erreurs, en plus de révéler un volet juridique important ne faisant pas partie de son expertise.
[166] La Ville n’est pas du même avis. Elle avance que le rapport de l’expert Fournier visait deux objectifs nécessaires, le premier étant de répondre à la réclamation détaillée transmise à la Ville et comportant un argumentaire soutenu par de nombreuses pièces[60], le deuxième étant d’analyser l’expertise et le témoignage de M. Hosseini ainsi que d’y répondre, tant par écrit que par témoignage.
1. La réclamation d’Uniroc est-elle irrecevable puisque tardive, suivant le paragraphe 10.3 des Devis normalisés administratifs NQ 1809-900-II/2002?
[167] Les extraits pertinents des Devis normalisés administratifs NQ 1809-900-II/2002[61] se lisent comme suit :
10.3 RÉCLAMATION
Si l’entrepreneur se croit lésé d’une façon quelconque par rapport aux termes du marché, il doit transmettre au maître d’œuvre un avis écrit indiquant clairement les raisons de sa plainte ou de sa contestation. Cet avis doit être transmis dans un délai maximal de dix (10 jours) à compter du début des difficultés qui, selon lui, justifient sa plainte ou sa contestation.
Le maître de l’ouvrage étudie la plainte ou la contestation de l’entrepreneur et lui fait part de sa décision qui est définitive et exécutoire à moins que l’entrepreneur ne la conteste dans un délai de quinze (15) jours suivant sa transmission (réception, diffusion) au moyen d’un avis écrit adressé au maître de l’ouvrage.
Dans tous les cas, l’entrepreneur doit, sous peine de déchéance, présenter au maître de l’ouvrage sa réclamation détaillée, accompagnée de toutes pièces justificatives, au plus tard cent vingt (120) jours à compter de la date de la réception provisoire des travaux visés par la réclamation.
Le défaut de l’entrepreneur de se conformer à cette procédure et à l’un ou l’autre des délais stipulés est réputé constituer une renonciation de sa part à exercer tout autre recours.
Les avis de contestation et de réclamation transmis dans les délais prévus conservent à l’entrepreneur tous ses droits de contestation de la décision du maître de l’ouvrage devant le tribunal compétent. Dans le cas où le tribunal statue que cette décision a constitué un changement au contrat, les dispositions de l’article 4.7 s’appliquent.
[…]
[Soulignement ajouté]
[168] Il n’est pas contesté que les parties sont liées par cette disposition contractuelle dont la légalité ou validité n’est pas en cause en l’espèce.
[169] Il apparait qu’une telle stipulation a pour but d’éviter toute surprise suivant la fin du contrat ou tout recours non annoncé au préalable.
[170] D’une part, cela permet aux municipalités ou aux instances gouvernementales, grandes donneuses d’ouvrages, de se prémunir contre l’épée de Damoclès qui flotte au-dessus de leur tête durant le délai de prescription de trois ans. La clause en cause permet de dissiper cette incertitude et de faire face à une réclamation en temps opportun, la plainte devant être logée dans un court délai.
[171] D’autre part, cela permet à l’entrepreneur d’être indemnisé rapidement pour les travaux supplémentaires exécutés en cours de contrat.
[172] Saisie d’une question similaire la Cour d’appel a statué que des clauses semblables étaient valides. Elle a également traité de leurs objectifs. Dans l’affaire Construction Infrabec inc.[62] elle s’exprime ainsi :
[48] Je suis d’avis que l’argument de l’illégalité de la clause 9.10 doit être rejeté. Comme l’écrit notre Cour, le délai de 120 jours prévu à la clause 9.10 « ne crée ni délai de rigueur ni déchéance d’ordre public ». En somme, les 120 jours ne forment pas un délai de prescription.
[49]
Comme l'indique clairement la clause 4.5 citée plus haut, les procédures
de réclamations instituées au Cahier des charges s'inscrivent dans un contexte
où, sauf dérogation, l'entrepreneur assume généralement le risque que les
conditions d'exécution du contrat diffèrent de celles prévues au contrat
d'entreprise établi sur une base forfaitaire. Ainsi, dans les cas où
l'entrepreneur se voit contraint d'effectuer des travaux supplémentaires
imprévus, il doit en principe en supporter les coûts, à moins que le contrat ne
stipule le contraire. Ce principe est codifié à l'article
[50] Afin de tempérer la rigueur de cette règle, les contrats d’entreprise octroyés par le ministère des Transports auxquels le Cahier des charges s’applique contiennent une procédure de réclamation telle que celle prévue aux clauses 4.9 et 9.10, qui permet à un entrepreneur d'obtenir compensation du ministère lorsqu'il est contraint d'exécuter des travaux additionnels en raison d'obstacles non prévus aux documents d'appel d'offres. Les clauses dites « de révision de prix » servent à atténuer la rigueur du principe de l'allocation des risques d'imprévision à l'entrepreneur en permettant un ajustement ponctuel des obligations contractuelles par les parties en cours d'exécution du contrat d'entreprise[6].
[51] À la fois le ministère et l'entrepreneur tirent avantage de telles clauses : l'entrepreneur obtient la possibilité d'être indemnisé pour les coûts excédentaires, tandis que le ministère s'assure d'être avisé des changements aux conditions d'exécution et de la continuation des travaux. Les auteurs Ian Gosselin et Pierre Cimon expliquent comment de telles clauses s'inscrivent notamment dans les contrats d'entreprise de marché public, à l'avantage de tous, en s'appuyant sur l'arrêt Corpex (1977) inc.[7], de la Cour suprême :
Bien qu'en apparence ces clauses semblent être au seul bénéfice de l'entrepreneur, elles offrent en réalité des avantages indéniables au propriétaire. En effet, leur finalité est de favoriser avant tout le parachèvement des travaux en excluant systématiquement l'annulation pour cause d'erreur, en contrepartie de l'assurance accordée à l'entrepreneur d'ajuster le prix de son contrat dans une telle éventualité. Voici ce que la Cour suprême écrivait à ce sujet dans l'affaire Corpex (1977) Inc. :
Or une clause comme celle de l'article 12 des Conditions générales supprime ou du moins amoindrit les inconvénients mentionnés ci-haut et qui découlent d'une erreur importante sur la nature du sol. Mais en permettant à toutes fins pratiques aux parties de renégocier le contrat ou une partie du contrat aux conditions qu'elle prescrit, ou d'exiger sa renégociation, elle exclut nécessairement l'annulation pour cause d'erreur dont l'un des effets serait précisément d'empêcher une telle renégociation. L'un de ses buts est d'éviter l'interruption des travaux et de favoriser leur parachèvement. [8]
[52] La clause 9.10 crée précisément un tel mécanisme permettant à un entrepreneur de formuler une demande de compensation, et ce, avant la judiciarisation du litige entre les parties. Ce processus offre aux deux parties l’opportunité de régler un différend entre elles, par négociation entamée sur le chantier de construction, lors de ce que le procureur général qualifie de phase « administrative » avant d'éventuelles procédures judiciaires.
[...]
[63] Les clauses établissant un régime de réclamation en matière de contrats de construction font l'objet d'une longue jurisprudence, qui insiste sur l'importance pour l'entrepreneur de respecter à la lettre la procédure prévue au contrat. Déjà, en 1982, le juge Beetz écrivait dans Corpex, à propos d'une clause exigeant l'envoi d'un avis avant l'examen d'une réclamation, que « l'entrepreneur ne peut, une fois les travaux terminés, réclamer dans un procès des avantages semblables à ceux que lui garantit l'article 12 des Conditions générales s'il n'a pas lui-même observé cet article en donnant l'avis qu'il prévoit »[14]. La Cour suprême en vient à cette conclusion en constatant qu'une telle clause avantage considérablement l'entrepreneur, qui se voit pratiquement assuré d'être indemnisé pour les coûts excédentaires, alors qu'en temps normal il lui serait très difficile d'obtenir compensation. Dans un commentaire sur cet arrêt, l’auteure Thérèse Rousseau-Houle adhère à la position du juge Beetz et explique que « [l'] entrepreneur ne peut se prévaloir d'une clause lui permettant de réclamer des frais supplémentaires pour des travaux imprévus que s'il respecte strictement les formalités édictées pour l'exercice de ce droit »[15]..
[64] Dans la lignée de ce jugement, notre Cour a répété à maintes reprises que les formalités du régime de réclamation devaient être strictement respectées pour que l'entrepreneur puisse s'en prévaloir. Dans Morin inc. c. Le Procureur général de la province du Québec, notre Cour écrivait à la majorité que « le défaut de donner l'avis [exigé par la clause 9.10 du Cahier des charges] dans les délais est fatal »[16]. Plus récemment, notre Cour rappelait dans Société de cogénération de St-Félicien c. Industries Falmec inc. « le caractère impératif de la procédure qui oblige l'entrepreneur à respecter à la lettre les formalités prévues à l'entente pour pouvoir soumettre une réclamation pour les extras »[17].
[Soulignement ajouté]
[173] Uniroc soutient qu’elle s’est conformée à son obligation contractuelle et qu’en ce sens, la Ville ne peut plaider à une renonciation de sa part à l’exercice du présent recours.
[174] Elle affirme avoir respecté le délai de 120 jours puisque l’acceptation provisoire intervient le 27 novembre 2014, alors que sa réclamation détaillée est du 17 décembre 2014.
[175] Elle plaide avoir également respecté le délai de 10 jours puisque pour elle, ses courriels des 22 et 23 août 2014[63] constituent « l’avis écrit indiquant clairement les raisons de sa plainte ou de sa contestation ». Un courriel d’Uniroc se plaignant des retards causés par les conditions de sol est aussi transmis le 18 novembre 2011.
[176] Le Tribunal ne peut souscrire à l’argument d’Uniroc.
[177] Les courriels d’Uniroc des 22 et 23 août 2014 ne peuvent être considérés comme des avis écrits de la nature de ceux qui sont prévus au contrat. Ils n’expriment ni plainte, ni contestation au sens du devis.
[178] Le courriel du 22 août 2014 ne constitue qu’un constat de fait émis par l’entrepreneur et au mieux une indication d’un retard éventuel dans l’exécution de ses travaux. Nous sommes loin ici de la plainte ou de la contestation détaillée qui déclenche le processus prévu à la clause 10.3 du devis.
[179] De son côté, le courriel du 23 août 2014, n’est rien d’autre qu’une proposition de changement adressée à CDGU pour simplifier la tâche d’Uniroc, telle proposition ayant été acceptée par CDGU.
[180] Quant au courriel du 18 novembre 2014, supposant même qu’il s’agisse d’une plainte au sens du devis, elle est hors délai puisque transmis plus de 10 jours suivant le « début des difficultés ». À cet égard, Uniroc reconnait que le « début des difficultés» doit se situer au plus tard en août 2014.
[181] L’absence de plainte ou de contestation dans le délai est-elle fatale ? Le Tribunal y répond par l’affirmative. En effet, le contrat est clair : l’entrepreneur est réputé renoncer à exercer tout recours contre le maître de l’ouvrage s’il ne se conforme pas à la procédure de réclamation.
[182] L’utilisation du mot « réputé » prend ici tout son sens : le vice est fatal. Il s’agit de la Loi des parties dont on ne demande ni la nullité ni la réduction de l’obligation. Aussi léonine la clause soit-elle, le Tribunal ne peut en faire abstraction[64]. Le droit d’action n’a donc pas pris naissance. À ce sujet, la Cour d’appel écrit dans Construction Infrabec inc précitée[65] :
[54] On constate donc que la procédure de réclamation du Cahier des charges est exorbitante du droit commun, en ce qu'elle confère à un entrepreneur la possibilité d'obtenir une réparation à laquelle il n'aurait normalement pas droit. En fait, le droit de l'entrepreneur à une éventuelle compensation en application de la clause 9.10 dépend de l'envoi d'un avis d'intention à l'intérieur du délai de 15 jours. Comme l'écrivent les auteurs Gosselin et Cimon au sujet de ce genre de clause de révision de prix « [c]et avis fait partie de la formation même du droit d'action de l'entrepreneur » [9]. Pour reprendre les termes d'un autre auteur, « le droit de réclamer pour des travaux ou des conditions d'exécution imprévus émane du contrat » [10]. Il faut dès lors en conclure que le droit d'action de l'entrepreneur devant les tribunaux ne se cristallise qu'une fois les formalités prévues aux clauses 4.9 et 9.10 respectées. Avant cela, aucun fondement juridique ne permet à l'entrepreneur de réclamer en justice les coûts additionnels occasionnés par des travaux imprévus.
[55]
On ne peut par conséquent assimiler ces délais contractuels à des délais
de prescription extinctifs, définis à l'article
[56] Ce n’est donc qu’une fois la réclamation correctement présentée dans la forme exigée et dans le délai de 120 jours que le droit d’action de l’entrepreneur se cristallise. À partir de cette date, le délai de prescription de droit commun court : l’entrepreneur aura alors trois ans pour porter sa réclamation devant les tribunaux. La jurisprudence reconnaît que, par exception, le comportement du propriétaire peut emporter renonciation à la formalité prévue à la clause 9.10 [12]. Les formalités doivent être respectées pour faire naître le droit d'action de l'entrepreneur. Si ces formalités ne sont pas respectées, on ne pourra dire que le droit d'action s'est éteint puisqu'il n'a jamais pris naissance.
[Soulignement ajouté]
[183] Cela suffit pour disposer du litige.
2) Subsidiairement, Uniroc a-t-elle droit au paiement des sommes réclamées?
[184] Les documents contractuels sont non équivoques : l’utilisation d’explosifs était nécessaire et à prévoir. La preuve au procès le confirme.
[185] L’ensemble de la documentation précontractuelle ne ment pas et Uniroc ne l’ignore pas.
[186] À de multiples reprises ces documents mettent le dynamitage à l’avant-plan. On décourage même l’utilisation du marteau hydraulique. On avise que le roc est d’une grande dureté. On réfère aux normes de dynamitage et d’inspection préalable des bâtiments. On réclame des prix non pas seulement pour de l’extraction mais aussi pour du dynamitage.
[187] De deux choses l’une : soit Uniroc fait de l’aveuglement volontaire auquel cas elle ne peut se plaindre, soit elle est consciente de la situation mais son choix de débalancer les prix de sa soumission ne lui permet pas d’envisager le dynamitage qui à lui seul lui coûtera de 5 à 9 fois plus cher que toute l’opération d’extraction du roc.
[188] Outre le dynamitage, une telle opération comprend le forage, y compris celui fait en contrebas de la ligne de sous-fondation, la fragmentation des matériaux, le chargement, le transport, la mise en œuvre dans les remblais, l’écaillage mécanique et manuel, la mise au rebut, la mise en réserve, les dépenses incidentes.
[189] La preuve révèle que le choix de ne pas dynamiter est la seule résultante du débalancement de sa soumission. L’argument de la dureté du roc et se son emplacement relève du prétexte pour justifier une réclamation.
[190] Beauseigle témoigne qu’il ne pouvait s’imaginer que le roc à excaver était aussi présent et résistant ajoutant que de toute façon, l’âge des maisons environnantes, les risques de fissures causées par les vibrations ou l’infiltration possible de gaz naturel ne permettaient pas l’utilisation de la méthode de dynamitage.
[191] Cette affirmation ne peut être retenue. Beauseigle contredit la preuve non équivoque voulant qu’il soit de commune renommée que de tels travaux nécessitent l’utilisation d’explosifs. Il contredit également les documents clairs de l’appel d’offres.
[192] Il se plaint de l’absence de renseignements suffisants lui permettant de connaître les conditions de sol prévalant à l’endroit des travaux.
[193] Pourtant, il ne fait aucune visite des lieux, si minime puisse-t-elle être, il n’inspecte au préalable aucune des maisons et il ne prend pas en considération la documentation de l’appel d’offres liée à l’utilisation d’explosifs, ni les normes applicables en milieu urbain.
[194] La jurisprudence est unanime : l’entrepreneur doit se renseigner. Dans l’affaire Banque de Montréal[66], la Cour suprême s’exprime comme suit :
L'obligation de renseignement est un corollaire immédiat de l'allocation des risques. La partie qui assume les risques se doit de se renseigner, comme l'a énoncé cette Cour dans Corpex, précité, aux pp. 663 et 664. Toutefois, l'autre partie ne doit pas, par action ou par inaction, contribuer à fausser l'évaluation des risques de celle qui les assume.
[195] Rappelons que dans l’affaire Groupe Desjardins assurances générales[67], la Cour d’appel réitère l’existence du devoir d’inspection du soumissionnaire. Il est de son devoir de respecter les règles les plus élémentaires de vérification des lieux avant de s’engager dans un processus de soumission et comme spécialiste (ce qui est le cas d’Uniroc) il a l’obligation de mesurer au préalable les conditions de réalisation de son contrat, ce qu’il a fait défaut de faire en l’espèce.
[196] Son absence d’inspection des lieux et l’obtention tardive de lettres de sous-traitants pour légitimer son choix de ne pas faire usage d’explosifs durant les travaux, ne milite pas en faveur d’une conclusion de diligence de la part d’Uniroc. La preuve prépondérante est plutôt à l’effet contraire.
[197] Cette inaction est liée à sa décision de ne pas dynamiter, telle décision ayant été prise lors de la préparation de la soumission. Malgré tout, il persiste à prétendre que ce choix n’est pas fait lors de la mise en œuvre du chantier ainsi que dans les jours et semaines qui suivent.
[198] Uniroc ne prend pas plus en compte les recommandations de Qualitas suivant lesquelles il « s’agit d’un roc particulièrement dur et résistant, dont l’excavation nécessitera probablement l’utilisation d’explosifs[68] » pas plus que celle qui indique que « si le roc devait être excavé, il ne pourra probablement pas l’être au moyen du godet, d’une pelle hydraulique, ni même d’un marteau piqueur fixé au bras d’une pelle hydraulique[69] ».
[199] Bref, Uniroc écarte d’emblée la méthode du dynamitage.
[200] Y-a-t-il eu défaut de renseignement de la Ville? La preuve soumise supporte le contraire.
[201] Il est clair de l’analyse de Qualitas que les rapports de sondage ne portent que sur les conditions de sol à l’endroit de la prise d’échantillonnage et que « les formations de sol et de roc sont variables sur une plus ou moins grande étendue. Les conditions souterraines entre les sondages peuvent varier par rapport aux conditions rencontrées à l’endroit des sondages»[70].
[202] L’article 28 de la section 6 des Clauses administratives particulières prévoit que[71] :
Les rapports de sondage sont fournis à titre indicatif à l’entrepreneur. […]
Si l’entrepreneur estime que ces renseignements [les rapports de forage] sont insuffisants ou que des sondages et forages additionnels sont nécessaires, il doit le faire et déterminer lui-même la nature et la qualité du sol et ce, à ses frais et responsabilité.
[Soulignement ajouté]
[203] Uniroc plaide que les rapports de forage sont insuffisants et que des forages supplémentaires étaient nécessaires pour vérifier la présence de roc au sous-sol. Elle plaide sa propre turpitude puisque le contrat est clair : si elle estime que le nombre de sondages est insuffisant, il lui appartient de s’exécuter. De toute façon, la preuve convainc le Tribunal que le nombre de forages était suffisant dans les circonstances propres à cette affaire.
[204] Ceci dit, rien dans les documents d’appel d’offres ne laisse croire que le roc ne sera situé qu’à certains endroits bien précis, limités à quelques 80 mètres linéaires. Cette assertion de la part de Beauseigle est une pure vue de l’esprit, résultant d’une analyse erronée des documents et plans en sa possession.
[205] Un fait demeure : la Ville estime à 330 mètres cubes le volume de roc à extraire sur les 500 mètres de travaux. Au final, 74 mètres cubes supplémentaires sont excavés. Le Tribunal n’y voit pas là un écart marqué qui puisse permettre de conclure qu’Uniroc est induite en erreur.
[206] Aussi, une telle prise de position ex post facto apparait pour le moins étonnante surtout lorsque l’on sait qu’Uniroc n’a pas pris la moindre disposition pour inspecter les lieux et vérifier leur état avant de soumissionner.
[207] Dans l’affaire H. Cardinal construction inc.[72], traitant de clauses d’un contrat de construction sur les conditions de sol, la Cour d’appel s’exprime comme suit :
Que ces clauses soient léonines, cela est indéniable; c'est bien à regret que le juge y a donné effet. Avec égards, je me permets de calquer les propos du juge Betz (p. 664) dans l'affaire relativement récente Corpex (1977) Inc. c. R. (3) et de dire qu'elles sont "d'une rigueur impitoyable pour l'entrepreneur en ce qu'ils (les contrats) stipulent que ce dernier ne doit pas se fier aux renseignements fournis par le propriétaire ou qu'il doit se renseigner lui-même sur la condition des lieux ou encore qu'il soit effectivement renseigné sur les conditions du sol".
Face à des clauses semblables, la Cour suprême a refusé d'indemniser, sur la base d'un quantum meruit, un entrepreneur induit en erreur et s'en est tenue au texte draconien du contrat […]
[…]
En revanche, dans l'affaire Corpex, les parties au contrat avaient expressément prévu la possibilité de dépenses supplémentaires, notamment dans le cas où il y a un écart considérable entre les renseignements sur les conditions du sol à l'emplacement des travaux et les conditions réelles du sol constatées par l'entrepreneur à l'emplacement des travaux dans l'exécution des travaux; c'est la clause numéro 12 que je reproduis en annexe.
[…]
La théorie de l'imprévision — si tant est qu'elle soit invoquée par l'appelante — n'est guère reconnue dans notre droit. Il serait plutôt audacieux de prétendre que des arrêts (6) relativement récents de notre Cour consacrent cette théorie. De son côté, la doctrine (7) a plutôt tendance à la combattre.
[Soulignement ajouté]
[208] Dans le même arrêt, souscrivant aux motifs de ses collègues, le juge Lebel écrit[73] :
Ses observations sur les obligations très lourdes imposées à l'entrepreneur par les documents contractuels s'appliquent également à un autre motif d'appel de l'entrepreneur. En effet, celui-ci prétend avoir été induit en erreur quant à la nature du matériel qu'il devait excaver et entasser pour la construction de monticules, dans le parc du Centenaire (m.a. pp. 11 et 12). L'obligation de vérifier l'état des lieux s'appliquait également à cet aspect des travaux. Si les devis et documents d'appel d'offres ne contenaient pas suffisamment d'informations, ils lui créaient l'obligation de les rechercher et de les obtenir.
[Soulignement ajouté]
[209] Cet arrêt semble avoir plus tard été atténué par la jurisprudence, notamment dans les affaires Banque de Montréal c. Bail Ltée[74], Walsh et Brais c. Montréal (Communauté urbaine)[75] et Régie d’assainissement des eaux du bassin de Laprairie c. Janin Construction (1983) Ltée et al.[76] citées par la demanderesse, mais les faits sont dissociables de la présente affaire.
[210] Dans l’arrêt précité de la Cour suprême Banque de Montréal, Hydro-Québec avait assumé une certaine responsabilité quant à l’exactitude des données géotechniques. Hydro-Québec avait également changé la nature du contrat d’origine, par un nombre important de modifications au contrat d’origine. De plus, ses manquements s’étaient poursuivis avec la non-divulgation d’un rapport qu’elle possédait alors qu’elle savait que son concept était erroné. Bref, ces facteurs avaient conduit la Cour suprême à juger qu’Hydro-Québec avait failli à ses obligations de comportement d’une personne raisonnable.
[211] Dans la présente affaire, aucun de ces reproches ne peut être imputé à la Ville, dont la conduite, selon la preuve entendue, n’est pas fautive.
[212] Au contraire, elle demeure transparente en tout temps et ne cache rien à Uniroc qui ne peut ignorer les termes du contrat.
[213] Le fait qu’il s’agisse d’un contrat d’adhésion, tel que plaidé par Uniroc et confirmé par la jurisprudence[77], ne change en rien cette conclusion révélée par la preuve.
[214] Dans l’affaire Walsh et Brais[78], l’entrepreneur tunnelier ne peut prévoir la présence d’une écaille glacio-tectonique qui provoque un effondrement de gros morceaux de pierre. Le géologue de la C.U.M. admet qu’il lui manquait un « maillon » au moment de compléter son analyse géotechnique.
[215] Puis, dans l’affaire Régie d’assainissement des eaux du bassin de Laprairie[79], la Cour d’appel statue que le Tribunal doit tenir compte de divers facteurs, dont la nature déterminante de l’information mais aussi l’impossibilité pour l’entrepreneur de l’obtenir. L’expertise de l’entrepreneur doit aussi être considérée.
[216] La Cour d’appel relève aussi le fait que l’emplacement des travaux change en cours de route sans que de nouveaux sondages ne soient effectués. Elle juge donc que les problèmes rencontrés par l’entrepreneur ne résultent pas de son omission de s’informer convenablement.
[217] Il convient de souligner que dans cette affaire, il s’agissait d’un contrat à forfait alors qu’en l’espèce, l’extraction du roc est rémunérée au mètre cube.
[218] L’adoption de ce type de rémunération constitue un facteur que le Tribunal doit aussi prendre en compte. Le choix de ce mode de paiement est le reflet de l’incertitude quant à la quantité exacte à extraire, ce qui permet une fluctuation par rapport à l’estimé théorique. Un estimé demeurera toujours un estimé et Uniroc ne peut s’en plaindre dans un contexte où seuls 74 mètres cubes supplémentaires sont excavés.
[219] Les doléances d’Uniroc sont plutôt motivées par son désir de récupérer l’argent perdu par ses propres choix.
3) La Ville était-elle en droit d’imposer des pénalités de retard et de retenir la somme de 55 000 $?
[220] Uniroc est responsable de la méthode de travail qu’elle a adoptée. Les retards ne sont pas imputables à la Ville.
[221] La preuve prépondérante est que les retards sont causés par le choix d’Uniroc de ne pas utiliser la méthode appropriée, soit l’utilisation d’explosifs. La preuve révèle que si une telle méthode avait été utilisée, Uniroc aurait terminé les travaux dans les délais de 90 jours stipulés au contrat. Elle est l’artisane de ses propres malheurs.
[222] Les retards sont aussi causés par des équipes inexpérimentées et désorganisées. Une fois remplacées, les retards ne sont pas comblés puisqu’Uniroc fait défaut d’affecter des ressources supplémentaires pour les rattraper.
[223] Le Tribunal est satisfait que les montants retenus par la Ville, en application de son droit de réclamer des pénalités de retard, sont raisonnables et justifiés, d’autant plus que la Ville aurait pu computer les délais à compter du 25 juin 2014 et prendre en considération les jours fériés ou de vacances. Ce faisant, elle limite les pénalités de retard, ce qui bénéficie à Uniroc.
4) Les frais d’experts doivent-ils être accordés?
[224] Compte tenu de la réclamation de décembre 2014 d’Uniroc, des allégations énoncées aux procédures judicaires, du rapport d’expertise produit en demande, de la preuve administrée, du témoignage utile des experts et de l’utilité du rapport d’expertise en défense, le Tribunal ne voit aucun motif pour réduire le montant des honoraires de l’expert retenu par la Ville.
[225] À ce sujet, le Tribunal les considère raisonnables et fait droit à la demande de la Ville de condamner Uniroc au remboursement de tels honoraires.
[226] REJETTE la demande introductive d’instance;
[227] LE TOUT avec les frais de justice, y compris les frais d’experts au montant de 34 254,54 $. que la demanderesse est condamnée à payer à la défenderesse.
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__________________________________BERNARD SYNNOTT, j.c.s. |
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Me Michel Bissonnette |
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AVOCAT |
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Pour la demanderesse |
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Me Étienne-L. Morin |
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PRÉVOST FORTIN DAOUST |
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Pour la défenderesse |
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Dates d’audience : |
4-5-6 mars 2019. Représentations écrites additionnelles : 18 et 27 mars 2019. |
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[1] L’usage du nom de famille ne sert qu’à alléger le texte. Il ne doit pas être vu comme un manque de respect à l’égard de la personne concernée.
[2] Montant modifié lors de l’audition du 6 mars 2019.
[3] Devis administratif général NQ 1809-900.
[4] Pièce P-3, section 6, par. 5.0, alinéa 2 et pièce P-12.
[5] Pièce P-1.
[6] Voir à ce sujet les photos D-26 et les photos # 20-22-25-27-28 des annexes de l’expertise de M. Hosseini (expert de la demanderesse), pp. 35 à 39.
[7] Pièce P-1.
[8] Idem, section 3 « Formule et bordereau de soumission » et pièce P-2, section 7A, par. 4.2.
[9] Pièce P-3, section 6 « Clauses administratives particulières », p. 24.
[10] Pièce D-3.
[11] Pièce P-2, rapport de Qualitas, p. 1.
[12] Idem, Annexe B, par. 4.2.2 « Nature des sols et rocailles excavées », p. 11 du rapport.
[13] Pièce P-1, « Formule et bordereau de soumission », p. 2 de 11.
[14] Pièce P-1, Addenda no. 1, p. 2.
[15] Pièce D-20, soumission du 3 juin 2014.
[16] Idem.
[17] Idem.
[18] Pièce P-2, p.1.
[19] Idem.
[20] Pièce P-1, pp. 3, 4 et 5 du document « Formule et bordereau de soumission ».
[21] Idem.
[22]
Uniroc Construction inc. c. Municipalité de Piedmont,
[23] Pièce D-19.
[24] Pièce P-3, 17 décembre 2014 « Demande de paiement pour coûts supplémentaires non prévus ».
[25] Pièce P-5 : Il est admis que la présence de roc se situe sur 240 mètres linéaires : chaînages 1+000@1+203 et 1+287@1+321.
[26] Pièce P-3; lettre du 22 août 2014 annexée à la réclamation d’Uniroc.
[27] Idem.
[28] Idem, lettre du 25 août 2014 de R. Piché Dynamitage.
[29] Pièce P-3, lettre du 14 novembre 2014.
[30] Voir à ce sujet la pièce P-3, Annexe L, p. 1.
[31] Pièce D-25.
[32] Pièce P-3, voir notamment le courriel du 19 septembre 2014.
[33] Idem, p.1.
[34] Pièce P-3, section 6, « Clauses administratives particulières », par. 5.0, « Calendrier des travaux ».
[35] Pièce D-1.
[36] Pièce D-17.
[37] Voir notamment les pièces P-2, Annexe L, P-6, D-5, D-6, D-10, D-14 à D-16.
[38] Pièce P-3, Annexe L.
[39] Idem.
[40] Pièce D-5.
[41] Pièce P-2, Annexe J.
[42] Idem.
[43] Idem.
[44] Pièce D-5.
[45] Pièce P-2, Annexe J.
[46] Pièce D-5.
[47] Pièce D-7.
[48] Idem.
[49] Pièce P-3.
[50] Idem.
[51] Idem, annexe J.
[52] Idem.
[53] Idem.
[54] Pièce P-11.
[55] Pièce D-10 « Rapports journaliers ».
[56] Pièce P-17.
[57] Par. 2.3 du rapport d’expertise.
[58] Par. 2.4 du rapport d’expertise, annexes H et I.
[59] Par. 2.5 et 2.6 du rapport d’expertise.
[60] Pièce P-3.
[61] Pièce D-12.
[62]
Construction Infrabec inc. c. Paul Savard, Entrepreneur
électricien inc,
[63] Op. cit. note 30.
[64]
Voir notamment à ce sujet : H. Cardinal construction inc c.
Dollard-Des-Ormeaux (Ville de),
[65] Op. cit, note 61.
[66]
SOQUIJ AZ-92111080,
[67] 1991 CanlII 3165. (C.A.).
[68] Op.cit, note 11.
[69] Idem.
[70] Op. cit. 17, Annexe 1, clause 2, B et C, p. 1 de 1.
[71] Pièce D-2, p. 11.
[72]
H. Cardinal construction inc. c. Dollard-des-Ormeaux (Ville de),
[73] Idem, in fine.
[74]
[75]
[76]
[77] Voir les arrêts précités, op. cit, notes 65 et 66.
[78] Op.cit. 66.
[79] Op. cit, note 67.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.