Décision

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Ville de Brossard c. Belmamoun

2025 QCCA 1011

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

SIÈGE DE

 

MONTRÉAL

 :

500-09-030772-230

(505-06-000019-138)

 

DATE :

13 août 2025

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

BENOÎT MOORE, J.C.A.

CHRISTINE BAUDOUIN, J.C.A.

FRÉDÉRIC BACHAND, J.C.A.

 

 

VILLE DE BROSSARD

APPELANTE – défenderesse

c.

 

MOHAMED BELMAMOUN

GAËTAN L’HEUREUX

INTIMÉS – demandeurs

 

et

 

UNION DES MUNICIPALITÉS DU QUÉBEC

 INTERVENANTE

 

 

 

ARRÊT

 

 

 

  1.                 L’appelante porte en appel un jugement de la Cour supérieure (l’honorable Dominique Poulin), rendu le 10 octobre 2023, qui accueille en partie une action collective fondée sur l’article 976 C.c.Q. introduite par un groupe de citoyens.
  2.                 Pour les motifs de la juge Baudouin, auxquels souscrivent les juges Moore et Bachand, LA COUR :
  3.                 ACCUEILLE l ’appel;
  4.                 INFIRME le jugement de première instance;
  5.                 REJETTE la demande d’action collective;
  6.                 LE TOUT, avec les frais de justice.

 

 

 

 

BENOÎT MOORE, J.C.A.

 

 

 

 

 

CHRISTINE BAUDOUIN, J.C.A.

 

 

 

 

 

FRÉDÉRIC BACHAND, J.C.A.

 

 

 

 

Me Adina-Cristina Georgescu

Me Camille Clémentine Ingarao

miller thomson

Pour l’appelante

 

Me Marie-Elaine Guilbault

gonthier avocats

Pour les intimés

 

Me Mathieu Quenneville

Me Axel Fournier

prévost fortin d’aoust

Pour l’intervenante

 

Date d’audience :

20 mars 2025

 


 

 

MOTIFS DE LA JUGE BAUDOUIN

 

 

I. Aperçu

  1.                 L’appelante, la Ville de Brossard, se pourvoit contre un jugement de la Cour supérieure (l’honorable Dominique Poulin), rendu le 10 octobre 2023[1], qui accueille en partie une action collective à son encontre et la condamne au paiement de dommages-intérêts en faveur d’un groupe de citoyens résidant sur son territoire en bordure d’un tronçon du chemin des Prairies, représenté par les intimés, Mohamed Belmamoun et Gaëtan L’Heureux.
  2.                 Dans un jugement très étoffé, et après avoir analysé une importante preuve contradictoire, la juge retient la responsabilité sans faute de la Ville en raison de la circulation excessive et du bruit incessant et récurrent générés sur le tronçon du chemin des Prairies, lesquels constituent selon elle des inconvénients anormaux de voisinage dont la Ville doit être tenue responsable en vertu de l’article 976 C.c.Q.
  3.                 Pour les motifs qui suivent, j’estime que la juge a commis une erreur de droit en concluant que l’article 976 C.c.Q. s’appliquait aux faits de l’espèce. L’augmentation de l’achalandage sur le tronçon et ses effets sur la vie et la quiétude des intimés résultent d’une succession de décisions de nature politique et réglementaire prises par la Ville depuis la fin des années 80. Ces décisions portant sur le développement, l’aménagement et l’urbanisation du territoire de la Ville ne relèvent pas de l’exercice du droit de propriété. Puisque l’application de l’article 976 C.c.Q. est restreinte aux situations découlant véritablement de l’exercice d’un tel droit ou de son usage, il s’ensuit que la responsabilité sans faute pour troubles de voisinage est étrangère aux faits de l’espèce. De plus, même dans l’éventualité où l’on considérerait que ces décisions sont liées à l’exercice du droit de propriété, la juge a également erré en concluant que l’immunité relative de la Ville ne pouvait être invoquée en l’instance, alors que la ligne de conduite qui lui est reprochée relève clairement de la sphère politique, et non de la sphère opérationnelle.

II. Contexte

  1.            Les faits à l’origine du présent litige ont déjà été maintes fois décrits et expliqués dans les décisions antérieures, tant de la Cour supérieure que de la Cour d’appel, ayant jalonné le parcours de ce dossier depuis le dépôt du premier acte de procédure en 2013[2]. Il est tout de même important d’en retracer les grandes lignes.
  2.            L’appelante est fondée en 1958, année qui marque l’amorce de son important développement qui s’étalera sur plusieurs décennies[3]. À la suite des fusions municipales imposées par le gouvernement du Québec en 2002, elle est fusionnée à la Ville de Longueuil et devient alors l’un de ses arrondissements[4]. Après une courte période de quatre ans, l’appelante est reconstituée en tant que municipalité locale en 2006[5].
  3.            Dès les années 1980, l’appelante connaît un fort essor et voit de manière assidue au développement et à l’aménagement de son territoire dans une perspective prospective visant à assurer la consolidation de son milieu urbain. Je reviendrai sur les principales étapes de ce développement, mais je précise dès à présent qu’étant située dans la ceinture proche de la Ville de Montréal, l’appelante est soucieuse de renforcer ses pôles commerciaux et d’assurer la consolidation de son développement urbain, puisqu’elle compte alors plusieurs terrains non développés et agricoles.
  4.            Les intimés et les membres du groupe, au nombre d’environ 300, résident en bordure du tronçon du chemin des Prairies situé sur le territoire de l’appelante entre le boulevard Taschereau et le boulevard du Quartier (nommé boulevard Lepage jusqu’en 2006). Autrefois une voie somme toute paisible et au caractère patrimonial et champêtre, ce tronçon s’est graduellement transformé pour, dans les faits, devenir aujourd’hui un chemin de transit reliant les boulevards Taschereau et du Quartier, ce dernier attenant au secteur du complexe commercial Quartier DIX30. 
  5.            En fait, ce sont le développement et l’essor importants des secteurs avoisinant le tronçon depuis la fin des années 80, ainsi que l’urbanisation générale de l’appelante, issus d’une planification de longue haleine, qui ont entraîné une augmentation significative de la population et, partant, de la circulation automobile, générant ainsi l’accroissement du bruit, de la poussière et des vibrations dont se plaignent les intimés.
  6.           
    Plus particulièrement, le tronçon sur lequel résident les intimés, en rouge sur la carte ci-après reproduite, traverse les secteurs de zonage O et L, lesquels sont séparés par deux voies ferrées :

 

  1.            Je souligne pour nos fins, qu’autrefois situé en zone agricole[6], le secteur L a connu un développement urbain particulièrement marqué, notamment depuis l’ouverture du centre commercial Quartier DIX30 en 2006[7]. Quant au secteur O, il a vu l’essor de plusieurs commerces dès la fin des années 1990, en particulier le long du boulevard Taschereau[8]. Tel que l’affirme d’ailleurs la juge :

[25] Il découle de tout ce développement que le tronçon, autrefois plus paisible, dessert aujourd’hui une population accrue et est utilisé comme chemin de transit, dans une direction vers le boulevard Taschereau et dans l’autre vers le Quartier DIX30.

  1.            En avril 2017, après avoir obtenu l’autorisation requise, les intimés déposent une demande introductive d’instance visant l’octroi de dommages-intérêts compensatoires afin de réparer le préjudice et les inconvénients anormaux qu’ils allèguent subir en raison de la circulation excessive sur le tronçon sur lequel ils résident. Sur cette base, ils invoquent non seulement la responsabilité sans faute de l’appelante fondée sur l’article 976 C.c.Q., mais également une atteinte à leurs droits protégés par la Charte des droits et libertés de la personne (art. 6 et 46.1), une violation à la Loi sur la qualité de l’environnement, ainsi que la responsabilité extracontractuelle de l’appelante pour faute sur la base de l’article 1457 C.c.Q.
  2.            La demande des intimés sera modifiée à plusieurs reprises au cours du déroulement de l’instance, dont juste avant le procès en avril 2023, alors qu’ils allèguent pour la première fois la mauvaise foi et un comportement déraisonnable et abusif de la part de l’appelante. Dans cette mouture, les intimés visent notamment l’obtention d’une ordonnance enjoignant à l’appelante de créer une impasse sur le chemin des Prairies comme mesure d’atténuation, ainsi que le versement à chacun des membres de 2 000 $ par an pour troubles et inconvénients anormaux de voisinage et de 1 000 $ par an pour la faute imputable à la négligence et à la mauvaise foi de l’appelante.
  3.            Le 31 mai 2023, l’honorable Dominique Poulin, j.c.s., rend un jugement interlocutoire autorisant les modifications souhaitées à la demande introductive d’instance, sauf celles relatives à la mauvaise foi, au comportement abusif et déraisonnable de l’appelante, ainsi qu’aux dommages-intérêts compensatoires de 1 000 $ qui y sont liés[9].
  4.            Le 10 octobre 2023, la juge d’instance rend le jugement entrepris, accueillant en partie l’action collective contre l’appelante[10]. Elle conclut que les représentants et les membres du groupe subissent des inconvénients anormaux de voisinage dont la gravité et la récurrence imposent une indemnisation en vertu de l’article 976 C.c.Q.
  5.            Après une brève analyse portant sur l’application aux faits de l’espèce de l’immunité de droit public issue de la common law, laquelle était invoquée en défense par l’appelante afin de tenter d’échapper à sa responsabilité, la juge estime que celle-ci est inapplicable. Selon elle, l’appelante ne s’est pas déchargée de son fardeau de démontrer que cette immunité pouvait être invoquée en l’espèce, puisque la preuve ne démontre pas que le volume excessif de circulation sur le tronçon en litige découle d’une décision de politique générale fondamentale, d’une réelle planification de sa part ou « d’une décision portant de façon délibérée sur cette question », mais apparaît simplement comme le résultat du développement par l’appelante des secteurs avoisinant le tronçon.
  6.            Elle octroie ainsi des dommages-intérêts aux intimés et aux membres du groupe sur la seule base de la responsabilité sans faute pour troubles anormaux de voisinage. Elle écarte cependant la responsabilité de l’appelante sous le volet tant d’une éventuelle faute extracontractuelle (article 1457 C.c.Q.) que de la Loi sur la qualité de l’environnement ou de la Charte. La juge rejette aussi la demande d’injonction permanente visant à ordonner à l’appelante de créer une impasse sur le chemin des Prairies à titre de mesure d’atténuation afin de mitiger les inconvénients vécus par les membres du groupe.
  7.            Les intimés ne remettent pas en cause ces conclusions et n’ont pas formé d’appel incident à l’encontre du rejet de leurs autres demandes.
  8.            L’appelante, elle, se pourvoit. Appuyée par l’intervenante, l’Union des municipalités du Québec, elle soutient principalement que la juge a commis une erreur révisable en concluant qu’elle ne pouvait se prévaloir de l’immunité relative de droit public, laquelle s’applique aux décisions de politique générale fondamentale prises par des autorités publiques dont elle fait partie, et qui sont à la source du préjudice invoqué par les intimés. Elle aurait ainsi dû bénéficier de cette immunité afin d’être exonérée en l’instance. L’appelante soutient également que la juge a commis une erreur manifeste et déterminante dans son appréciation de la preuve l’ayant conduite à conclure à l’existence même de troubles anormaux de voisinage ainsi que, de manière subsidiaire, dans sa détermination des dommages-intérêts octroyés aux membres du groupe. À l’audience, il a aussi été plaidé que les troubles de voisinage, si tant est qu’ils existent, ne découlent pas de l’exercice du droit de propriété, ce qui distinguerait la présente affaire de l’arrêt Maltais, dont l’application a été au centre de l’argumentation des parties.
  9.            Les intimés estiment quant à eux que le jugement est exempt d’erreur susceptible de révision par la Cour. Ils plaident, d’une part, que l’immunité relative ne devrait pas s’appliquer à l’appelante compte tenu des circonstances du dossier, et d’autre part, que la juge a raisonnablement apprécié la preuve relative à l’existence de troubles anormaux de voisinage et au montant des dommages-intérêts accordés.

III. Analyse

  1.            Les parties ont axé l’essentiel de leurs arguments en appel sur la question de l’application, ou non, de l’immunité relative de droit public aux faits de l’espèce. Si cette question revêt certes une importance pour les parties, compte tenu de la manière dont le débat a été circonscrit en première instance, j’estime avec égards qu’il ne s’agit pas de la bonne prémisse afin de trancher le présent litige. En effet, la question préalable et fondamentale qui se pose ici, me semble-t-il, se situe plutôt en amont et est celle de déterminer si les faits du présent dossier permettent l’application de l’article 976 C.c.Q.
  2.            Avant d’aborder de front cette question, je précise qu’au-delà de la notion de l’immunité, le présent dossier illustre, à mon avis, la difficulté conceptuelle que pose l’application sans autre nuance de l’article 976 C.c.Q. à une autorité publique agissant dans l’exercice de ses compétences et de son rôle institutionnel à titre de corps politique, par opposition à d’autres décisions qui relèvent véritablement de l’exercice ou de l’usage premier de son droit de propriété.
  3.            Un bref retour sur la portée de l’article 976 C.c.Q. et de l’immunité relative invoquée par l’appelante s’impose.

A. L’état du droit

i. L’article 976 C.c.Q.

  1.            L’article 976 C.c.Q. énonce une obligation positive de tolérer les inconvénients normaux entre voisins et, a contrario, d’indemniser les inconvénients anormaux :

976.  Les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu’ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leurs fonds, ou suivant les usages locaux.

976. Neighbours shall suffer the normal neighbourhood annoyances that are not beyond the limit of tolerance they owe each other, according to the nature or location of their land or local usage.

  1.            Comme l’indique son libellé, cet article ne s’applique qu’aux voisins, une notion qui suppose non seulement une certaine proximité physique entre les fonds[11], mais également un lien juridique avec ceux-ci. En effet, tant la personne qui subit le trouble anormal que celle qui en est responsable doivent être propriétaires ou locataires d’un fonds, ou encore titulaires d’une manière ou d’une autre, d’un droit de jouissance ou d’usage sur celui-ci[12].
  2.            Il en découle la création d’un régime de responsabilité sans faute, tel que reconnu par la Cour suprême dans l’arrêt Ciment du Saint-Laurent inc.[13] :

[86] Malgré son caractère apparemment absolu, le droit de propriété comporte néanmoins des limites. Par exemple, l’art. 976 C.c.Q. établit une autre limite au droit de propriété lorsqu’il dispose que le propriétaire d’un fonds ne peut imposer à ses voisins de supporter des inconvénients anormaux ou excessifs. Cette limite encadre le résultat de l’acte accompli par le propriétaire plutôt que son comportement. Le droit civil québécois permet donc de reconnaître, en matière de troubles de voisinage, un régime de responsabilité sans faute fondé sur l’art. 976 C.c.Q., et ce, sans qu’il soit nécessaire de recourir à la notion d’abus de droit ou au régime général de la responsabilité civile. La reconnaissance de cette forme de responsabilité établit un juste équilibre entre les droits des propriétaires ou occupants de fonds voisins.

  1.            Ainsi, ce n’est pas le comportement d’un propriétaire qui est déterminant, mais bien l’étendue de l’inconvénient qui en résulte[14]. Afin de pouvoir invoquer ce régime, la partie demanderesse doit donc démontrer, d’une part, qu’elle est victime d’un inconvénient anormal, grave et récurent[15] et, d’autre part, qu’un voisin ou un lot voisin est la cause de cet inconvénient[16]. Il doit exister « un lien logique, direct et immédiat entre la manière dont le droit de propriété a été exercé et le préjudice subi »[17].
  2.            Puisque la démonstration d’une faute n’est pas requise, il est essentiel de circonscrire l’application de l’article 976 C.c.Q. et la restreindre aux situations découlant véritablement de l’exercice d’un droit de propriété. Autrement, ce régime s’étendrait indûment à l’ensemble des litiges opposant des voisins, au seul motif qu’ils vivent à proximité et sans égard au type d’usage exercé[18].
  3.            La jurisprudence abonde de décisions mettant de l’avant le régime de responsabilité sans faute de l’article 976 C.c.Q., appliqué majoritairement entre deux ou plusieurs voisins privés. En 2020, la Cour confirme dans l’arrêt Maltais[19] que l’État peut lui aussi être tenu responsable en vertu de l’article 976 C.c.Q. des inconvénients anormaux causés par l’exercice de son droit de propriété sur un fonds à usage public[20]. Cet arrêt mérite que l’on s’y attarde. J’aborderai toutefois d’abord les fondements et l’application de l’immunité relative en droit public.

ii. L’immunité de droit public

  1.            L’article 1376 C.c.Q. prévoit que les personnes morales de droit public sont régies par les règles générales de la responsabilité civile, sous réserve des autres règles particulières. L’immunité de droit public issue de la common law constitue l’une de ces règles particulières, cristallisée dans notre droit par une longue série de décisions[21]. Son importation en droit civil québécois par le biais de l’article 1376 C.c.Q. est aujourd’hui chose acquise[22].
  2.            La portée de cette immunité n’est toutefois pas absolue. En effet, elle ne s’applique qu’à l’égard des décisions de politique générale fondamentale, et seulement dans la mesure où celles-ci ne sont ni irrationnelles ni empreintes de mauvaise foi[23]. Ainsi, l’immunité ne s’étend pas aux décisions dites « opérationnelles », lesquelles visent plutôt « la mise en œuvre ou l’application d’une politique générale établie »[24]. Cette dernière catégorie de décisions demeure assujettie au régime de responsabilité du droit commun et peut engager la responsabilité du corps public par la preuve d’une simple faute au sens de l’article 1457 C.c.Q.[25]. Il revient d’ailleurs toujours à l’autorité publique de faire la preuve qu’une décision est une politique générale fondamentale[26].
  3.            Le juge Dalphond résume bien l’état des choses dans Ste-Anne-de-Bellevue (Ville de) c. Papachronis[27] :

[23] […] dans leur sphère législative ou réglementaire, les municipalités bénéficient d’une immunité relative en vertu des règles de droit public énoncée en common law, alors que dans leur sphère opérationnelle, la simple faute au sens du Code civil peut engager leur responsabilité (Jean-Pierre St-Amour, Le droit municipal de l’urbanisme discrétionnaire au Québec, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2006, p. 141).  Dans la sphère législative, les municipalités ne peuvent voir leur responsabilité extracontractuelle engagée que si la partie demanderesse réussit à prouver leur mauvaise foi, par opposition à la faute simple dans la sphère opérationnelle.

  1.            Les décisions de nature politique peuvent se présenter sous plusieurs formes, allant d’un règlement municipal, d’une résolution ou d’une directive interne, à une décision administrative, voire à l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire dans l’exécution d’activités relevant du domaine opérationnel[28]. Comme nous le verrons, j’estime aussi, a fortiori et à la lumière de l’arrêt Nelson[29] de la Cour suprême, que l’immunité relative peut s’appliquer à une ligne de conduite ou autrement dit, à la convergence de plusieurs décisions politiques ou réglementaires plutôt qu’à une seule décision politique pouvant être pointée du doigt.
  2.            Cette abondance de possibilités rend parfois difficile la tâche de distinguer entre une véritable décision politique et une décision opérationnelle, la frontière entre les deux n’étant pas toujours « étanche », pour reprendre l’expression employée par la juge Deschamps, alors à la Cour, dans l’arrêt Montambault[30]. La Cour suprême en reconnaît autant dans l’arrêt Just c. Colombie-Britannique :

[…] En raison de la complexité croissante de la vie, les organismes gouvernementaux interviennent dans presque tous les aspects du quotidien.  Cette présence gouvernementale accrue a donné naissance à des incidents qui auraient entraîné une responsabilité civile délictuelle s’ils étaient survenus entre particuliers.  L’immunité gouvernementale initiale en matière de responsabilité délictuelle était devenue intolérable.  C’est pourquoi des lois ont été adoptées pour imposer de façon générale à la Couronne la responsabilité de ses actes comme si elle était une personne.  Cependant, la Couronne n’est pas une personne et elle doit pouvoir être libre de gouverner et de prendre de véritables décisions de politique sans encourir pour autant une responsabilité civile délictuelle.  On ne saurait, par contre, restaurer l’immunité complète de la Couronne en qualifiant de "politique" chacune de ses décisions.  D’où le dilemme qui a donné lieu à l’incessante bataille judiciaire autour de la différence entre « décision de politique » et « décision opérationnelle ».  La distinction sera particulièrement difficile à faire dans les cas où on peut s’attendre à des inspections gouvernementales.[31]

[Soulignements ajoutés]

  1.            La jurisprudence subséquente à l’arrêt Just a su apporter son lot de clarifications quant à la démarcation entre les décisions dites politiques et opérationnelles[32], mais ce n’est que plus récemment, en 2021, que la Cour suprême, dans l’affaire Nelson[33], a formulé l’expression la plus claire de la marche à suivre pour distinguer ou tenter de différencier ces deux concepts. Je souligne que l’arrêt Nelson a précisé la pensée jurisprudentielle des 20 dernières années, sans toutefois la réorienter, et encore moins la renverser.
  2.            Dans cet arrêt, les juges Karakatsanis et Martin retracent l’évolution jurisprudentielle sur la question et exposent l’état actuel du droit qu’elles résument ainsi :

[67] En résumé, les décisions de politique générale fondamentale sont des « décisions [qui] se rapportent à une ligne de conduite et reposent sur des considérations d’intérêt public, tels des facteurs économiques, sociaux ou politiques, pourvu qu’elles ne soient ni irrationnelles ni prises de mauvaise foi » (Imperial Tobacco, par. 90). Elles forment « un sousensemble restreint de décisions discrétionnaires » — c’estàdire que le fait qu’un choix a été effectué n’est pas indicatif d’une décision de politique fondamentale (ibid., par. 84 et 88). Les décisions de politique générale fondamentale n’entraînent pas de responsabilité pour négligence, parce que les branches législative et exécutive ont des compétences et des rôles institutionnels fondamentaux qui doivent être protégés de l’ingérence susceptible de découler de l’exercice par les tribunaux de leur pouvoir de surveillance en application du droit privé. Le tribunal doit prendre en compte la mesure dans laquelle la décision du gouvernement était fondée sur des considérations d’intérêt public, de même que le degré d’incidence de ces considérations sur la raison d’être de l’immunité liée aux décisions de politique générale fondamentale.

[68] En outre, quatre facteurs se révèlent utiles dans l’examen de la nature d’une décision gouvernementale : (1) le niveau hiérarchique et les responsabilités de la personne qui décide; (2) le processus suivi pour arriver à la décision; (3) la nature et l’importance des considérations budgétaires; et (4) la mesure dans laquelle la décision était fondée sur des critères objectifs. La raison d’être qui soustend l’immunité — la protection des compétences et des rôles institutionnels fondamentaux des branches législative et exécutive nécessaires à la séparation des pouvoirs — sert de principe directeur général quant à la manière de mettre en balance les facteurs dans l’analyse. Ainsi, la nature de la décision, de même que les caractéristiques et les facteurs qui renseignent le tribunal sur cette nature, doivent être appréciés à la lumière de l’objet qui constitue le fondement de l’immunité accordée à l’égard des décisions de politique fondamentale.

  1.            Il faut ainsi distinguer les décisions prises par les autorités publiques compétentes, fondées sur des motifs, des considérations et des objectifs politiques et d’intérêt public généraux – même si ceux-ci s’avèrent contestés ou ultimement préjudiciables à certaines personnes, voire à une catégorie de citoyens – de celles qui concernent la manière dont ces décisions sont par ailleurs exécutées ou mises en œuvre. L’autorité publique, comme l’appelante en l’espèce, doit en effet pouvoir jouir de toute la latitude nécessaire pour prendre et mettre en œuvre des décisions politiques qui affectent l’ensemble de ses citoyens, notamment celles qui relèvent de la planification, du développement et de l’aménagement de l’ensemble de son territoire. Ceci inclut, entre autres, les décisions portant sur les infrastructures routières. En tant qu’entité politique, la Ville doit donc avoir les coudées franches pour exercer ses pouvoirs à cet égard, sans craindre d’être poursuivie en responsabilité civile par un groupe de citoyens ou un groupe de pression mécontents. Il en résulterait autrement un risque important de nuire à la gouvernance d’instances dûment élues, ou même de la paralyser.
  2.            Pour paraphraser la Cour suprême dans l’arrêt Nelson[34], bien qu’il soit incontestable que les branches législatives et exécutives prennent parfois des décisions de politique générale fondamentale qui sont susceptibles de causer préjudice à certaines personnes, la réponse à de telles décisions appartient aux électeurs plutôt qu’aux tribunaux.
  3.            Il s’agit en effet ultimement d’une question de séparation des pouvoirs, comme le mentionne d’ailleurs la professeure Lara Khoury, dans un extrait repris dans l’arrêt Maltais :

Les tribunaux considèrent que la mise en balance des intérêts conflictuels sous-tendant la prise de décision en matière politique doit être laissée à ceux qui sont redevables à l’électorat. Ils justifient ainsi l’immunité par le principe de la séparation des pouvoirs : le pouvoir judiciaire ne doit pas s’immiscer dans le travail de l’exécutif.[35]

  1.            Les décisions de politique générale fondamentale seront, par conséquent, soustraites à l’appréciation des tribunaux, qui ne pourront exercer sur elles qu’un contrôle de légalité, et non un contrôle d’opportunité[36]. En revanche, les autorités publiques peuvent encourir une responsabilité lorsqu’elles causent préjudice à des particuliers en étant négligentes ou autrement fautives dans l’exécution de leurs décisions qui relèvent plutôt de la sphère opérationnelle.
  2.            Ainsi, compte tenu du principe de la séparation des pouvoirs, la contestation des actes ou omissions d’une autorité publique relevant de l’exercice de ses pouvoirs politiques et exécutifs doit se faire dans l’urne, et non devant les tribunaux.  Ceci m’amène à dire quelques mots sur l’arrêt Maltais.

iii. L’arrêt Maltais c. Procureur général du Québec, 2020 QCCA 715

  1.            L’arrêt Maltais[37] présente un parallèle certain avec le présent dossier, et la juge en traite d’ailleurs expressément. Cette décision permet de cerner non seulement la portée du régime de responsabilité de l’article 976 C.c.Q. à l’égard de l’État – ou, autrement dit dans son sens large, aux personnes morales de droit public, qu’elles soient fédérales, provinciales ou municipales –, mais aussi d’inférer dans quels contextes ces corps publics peuvent, le cas échéant, revendiquer l’immunité lorsqu’ils font l’objet de poursuites.
  2.            Dans cet arrêt rendu sous la plume de la juge Gagné, des citoyens résidant en bordure d’une autoroute ont intenté une action collective contre la procureure générale du Québec, agissant au nom du ministère des Transports du Québec (« MTQ »), propriétaire de l’infrastructure en cause, afin d’être indemnisés pour les nuisances sonores causées par la circulation routière[38]. Invoquant notamment le régime de responsabilité sans faute prévu à l’article 976 C.c.Q., ils reprochaient au MTQ son inaction face au bruit, alors que celui-ci s’était engagé à construire un mur antibruit en bordure de l’autoroute[39].
  3.            La Cour pose le problème juridique entourant l’application de l’article 976 C.c.Q. aux autorités publiques comme suit :

[35] La notion de « voisin » de l’article 976 C.c.Q. ne présente pas de difficulté ici, cette dernière comportant « une dimension géographique, faisant appel à la notion de proximité ». Toutefois, comme l’écrit la Cour dans l’arrêt Vidéotron c. Titus, il « est essentiel à l’application de la doctrine de troubles de voisinage qu’il y ait un acte ou une omission à la source des inconvénients et que celui-ci ou celle-ci soit lié(e) à l’exercice du droit de propriété ».

[36] Cet élément essentiel de la responsabilité du voisin soulève la question de l’application de l’article 976 C.c.Q. lorsque les inconvénients découlent directement non pas d’un acte ou d’une omission de l’État, mais de l’usage par le public d’un fonds, en l’occurrence une autoroute, que l’État met à sa disposition. J’emploie le mot « directement », car l’omission du MTQ de mettre en place des mesures d’atténuation de bruit peut aussi être considérée comme une source des inconvénients. J’y reviendrai.

[Soulignements ajoutés; renvois omis]

  1.            Pour trancher cette question, la juge Gagné retrace l’évolution jurisprudentielle et doctrinale de la théorie des troubles de voisinage avant et après l’entrée en vigueur de l’article 976 C.c.Q.[40]. Constatant l’existence d’un courant jurisprudentiel qui admettait déjà l’application de cette théorie à l’État, elle conclut qu’elle ne voit « pas de raison de principe de ne pas appliquer l’article 976 C.c.Q. aux inconvénients découlant d’un acte ou d’une omission de l’État à titre de propriétaire d’un fonds à l’usage du public »[41]. L’autoroute étant la propriété du MTQ, elle considère que l’omission de mettre en place des mesures d’atténuation, comme la construction d’un mur antibruit, relevait de l’exercice de son droit de propriété, engageant donc sa responsabilité pour troubles de voisinage[42].
  2.            Cela étant, elle conclut également que l’immunité relative de l’État, laquelle sert traditionnellement à l’exonérer de sa responsabilité civile fondée sur l’article 1457 C.c.Q. pour le préjudice causé dans l’exercice de son pouvoir politique, peut aussi être invoquée dans le cadre de la responsabilité sans faute découlant de l’article 976 C.c.Q.[43]. Appliquant les principes réitérés depuis par la Cour suprême dans l’arrêt Nelson[44], la juge Gagné évalue si l’inaction du MTQ face aux multiples doléances de résidents du secteur relevait d’une décision de nature politique plutôt qu’opérationnelle, ce qui permettrait de revendiquer l’immunité relative, pour autant que le MTQ n’ait pas agi de mauvaise foi ou irrationnellement[45]. Son analyse se fonde sur une politique intitulée Politique sur le bruit routier du MTQ, qui relève manifestement, selon elle, de la sphère politique en raison des considérations sociales, politiques et budgétaires qui la sous-tendent[46]. Elle affirme que c’est en raison de la mise en œuvre de cette politique que le MTQ a omis de mettre en place des mesures d’atténuation du bruit, et que cette mise en œuvre relève également de sa sphère politique plutôt qu’opérationnelle[47]. Par conséquent, et puisqu’il n’est pas démontré que les décisions du MTQ ont été prises de mauvaise foi ou étaient empreintes d’irrationalité, elle conclut que l’immunité relative s’applique. L’État est donc exonéré de sa responsabilité pour troubles de voisinage et l’action collective est rejetée[48].
  3.            Je reviens maintenant aux faits du présent dossier.

 

B. L’application aux faits en cause

  1.            L’appelante, à titre de municipalité, est investie de compétences générales couvrant une pluralité de domaines, dont la culture, le développement économique local, l’environnement, la sécurité, l’habitation et le transport[49]. L’aménagement de son territoire, en particulier, constitue un axe central de son pouvoir réglementaire[50]. Par ailleurs, en tant que personne morale de droit public investie de compétences déléguées par le gouvernement provincial, elle possède la pleine jouissance de ses droits civils, y compris le droit de propriété. Elle peut donc agir tant à titre d’autorité publique lorsqu’elle exerce un pouvoir réglementaire ou législatif, qu’en tant que sujet de droit privé, assujettie à certaines règles, lorsqu’elle acquiert ou administre des biens, par exemple. Cette dualité de rôles rend d’autant plus nécessaire la distinction entre l’exercice d’un pouvoir de gestion publique et celui d’un droit privé, puisqu’il y aura nécessairement un chevauchement entre les deux aspects dans le cas de l’exercice d’un droit de propriété sur un fonds à usage public.
  2.            Conséquemment, il importe en l’espèce de bien cerner la source des inconvénients – acte ou omission – allégués par les intimés et qui émaneraient de l’appelante. Je rappelle que ces inconvénients sont circonscrits à la circulation automobile excessive et au bruit généré sur le tronçon du chemin des Prairies sur lequel les intimés résident.
  3.            À mon avis, la demande des intimés telle qu’instituée cible deux sources distinctes génératrices des inconvénients allégués. La première concerne l’historique du développement urbain et la ligne de conduite adoptée par la Ville en cette matière. Ce développement résulte de plusieurs décisions politiques prises tant par la Ville elle-même que par d’autres instances politiques au fil du temps (notamment la municipalité régionale de comté (MRC) à compter de 1987 ou la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM)), et portent à la fois sur l’aménagement global de l’ensemble du territoire et sur l’encadrement de la circulation. Il s’agit du principal volet que l’on peut qualifier d’actes posés à la source des inconvénients invoqués.
  4.            La seconde source des inconvénients est plus ciblée et vise l’omission de l’appelante de créer une impasse sur le tronçon en cause, impasse qui, selon les intimés, aurait eu pour effet d’atténuer grandement les inconvénients vécus. Toutefois, ce volet de la demande a été rejeté par la juge et les intimés n’ayant pas fait appel de cette décision, je me limiterai à de courts commentaires.
  5.            Voyons ce qu’il en est.

Premier volet : la ligne de conduite de l’appelante en matière de développement urbain

  1.            Le dossier fait état de plusieurs décisions qui ont jalonné le développement urbain de l’appelante, particulièrement dans les secteurs L et O avoisinant le tronçon, tant avant qu’après l’ouverture du quartier DIX30, et ce, jusqu’au dépôt de la demande d’autorisation d’intenter une action collective en 2013. Il suffit d’en énumérer quelques-unes. En voici un aperçu :
  • Le 29 juillet 1987, entre en vigueur le schéma d’aménagement de la MRC de Champlain, dont fait partie l’appelante (pièce D-11), et dont l’un des objectifs principaux est d’assurer la consolidation du milieu urbain. Ce schéma prévoit notamment le renforcement des pôles commerciaux le long du boulevard Taschereau, dans le secteur O de la Ville, où près de la moitié des terrains sont alors vacants et susceptibles d’accueillir environ 600 logements. Il propose aussi une affectation d’habitation et de bureau dans le secteur L;
  • Le 8 janvier 1990, le plan d’urbanisme de l’appelante est adopté en conformité avec le schéma d’aménagement de la MRC de Champlain ci-haut mentionné (pièce D-8). Ce plan prévoit lui aussi la consolidation des pôles commerciaux le long du boulevard Taschereau, ainsi que la création d’un centre-ville dans le secteur L, structuré autour de bureaux, de commerces et d’habitations de forte densité. Il précise également que le développement du secteur L s’appuiera principalement sur le développement du réseau autoroutier;
  • Le règlement de zonage no 1195 de l’appelante est adopté en juillet 1990 (pièces D-1 et D-2). Il autorise notamment différentes affectations commerciales, industrielles et de bureaux dans les zones sous-jacentes au secteur L, ainsi que des affectations mixtes de commerces et de bureaux dans les zones sous-jacentes au secteur O, tout en mettant l’accent sur le développement résidentiel;
  • Le 25 février 1999, le schéma d’aménagement révisé de la MRC de Champlain (pièce D-12) entre en vigueur. Il prévoit une affectation résidentielle dans les secteurs O et L, une consolidation de la structure commerciale le long du boulevard Taschereau et une affectation « bureau et industrie de haute performance » dans le secteur L. Ce schéma propose également une hiérarchisation des routes visant la mise en valeur du boulevard Taschereau;
  • En septembre 1999, l’appelante mandate le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) afin de tenir une enquête sur son plan de construction et d’élargissement des boulevards dans le secteur L. Le rapport du BAPE met en exergue le caractère patrimonial et champêtre du chemin des Prairies (pièce P-10);
  • En octobre de la même année, dans le cadre de la mise à jour de son plan d’urbanisme (pièce P-13), l’appelante s’engage à adopter des mesures de protection du chemin des Prairies afin d’y contrôler le volume et la vitesse de la circulation automobile. Elle prévoit également l’élargissement ou la construction des boulevards Rome, Matte et Lepage, tous situés à proximité du tronçon;
  • Le 16 juillet 2001, le plan d’urbanisme révisé de la Ville est adopté (pièce D-9). Il vise à favoriser le développement d’habitations à forte densité et de commerces dans le secteur L, considéré comme « à développer » et pouvant accueillir, avec le secteur C, entre 9 800 et 16 750 nouvelles unités de logement. Le plan renforce l’importance de la fonction commerciale du boulevard Taschereau et prévoit le développement du futur quartier DIX30;
  • Le 30 octobre 2001, l’appelante adopte le règlement de zonage no 1642 (pièces D-3, D-4 et D-5) qui attribue une vocation résidentielle aux secteurs O et L en sus des usages existants. Dans le secteur O, les usages d’habitation unifamiliale et bi-familiale sont autorisés, tandis que le secteur L est principalement destiné aux habitations multifamiliales à haute densité, en plus de permettre l’usage commercial;
  • En 2002, l’appelante fusionne avec la Ville de Longueuil et devient l’un de ses arrondissements. Dès 2003, la Ville de Longueuil entreprend la construction du boulevard Lepage dans le tronçon délimité par le boulevard Matte et la voie du CN, et dans le tronçon de la rue Grande-Allée et le boulevard Lapinière. Ces deux tronçons ne communiquent toutefois pas entre eux. Idem, en 2004, la Ville de Longueuil entreprend la construction du boulevard Lepage dans sa portion située entre la voie ferrée du CN et le boulevard Leduc. Les travaux, réalisés conformément aux règlements de la Ville de Longueuil, ont laissé le boulevard Lepage inachevé entre le chemin des Prairies et la rue Java (pièce D-46);
  • Le 1er janvier 2006, l’appelante est reconstituée en tant que municipalité locale[51] et retrouve à la fois la compétence et la propriété du chemin des Prairies. Cette même année, l’appelante annonce l’ouverture du quartier DIX30;
  • Le 17 mai 2010, l’appelante adopte le règlement 164 qui vise à autoriser la construction de la portion manquante du boulevard Lepage, alors renommé le boulevard du Quartier, entre le chemin des Prairies et la voie ferrée du CN. Au cours des mois suivants, l’appelante adopte les règlements REG-171 et REG-172 (pièce D-42) qui prévoient l’élargissement de l’aire résidentielle dans le secteur L afin d’assurer une concordance avec le schéma d’aménagement et de développement de la MRC et avec le plan d’urbanisme;
  • Finalement, en mars 2012, le plan métropolitain d’aménagement de la CMM (pièce P-25) impose à l’appelante des exigences de développement relativement à la densification de son territoire, notamment dans le secteur L, aux abords du Quartier DIX30.
  1.            Dès 2009, plusieurs résidents du tronçon, inquiets de l’augmentation de la circulation automobile, font valoir leurs doléances auprès de l’appelante. Plusieurs mesures d’apaisement visant à préserver le caractère champêtre du chemin des Prairies sont alors proposées. L’appelante s’engage dans un processus de consultation publique, à l’occasion duquel cinq scénarios visant à restreindre la circulation sont présentés en réponse aux demandes des résidents. Elle n’en retient qu’un seul, préférant ne pas enclaver les secteurs L et O et affirmant vouloir prioriser l’accès au tronçon pour les services d’urgence. Le scénario retenu prévoit l’interdiction de continuer tout droit sur le tronçon à partir du boulevard du Quartier, mais exclut la création d’une impasse sur le tronçon, ce que recherchaient les intimés. D’ailleurs, lors d’une rencontre visant à obtenir l’adhésion des résidents à l’égard du scénario retenu, d’autres mesures d’apaisement sont présentées, principalement axées sur la réduction de la vitesse. La rencontre de consultation subséquente est toutefois annulée à la suite du dépôt, par les intimés, de leur demande d’autorisation d’exercer une action collective, le dossier étant alors judiciarisé.
  2.            À présent que l’historique des décisions ayant mené à l’aménagement et au développement urbain marqué de la Ville a été retracé, il convient d’analyser si celles-ci peuvent entraîner l’application de l’article 976 C.c.Q. selon les principes applicables vus précédemment. Sur ce point, si les arguments principaux des parties s’orientaient vers la question de l’application ou non de l’immunité relative de l’appelante, la relation même entre ces décisions et l’exercice du droit de propriété a aussi fait l’objet de certaines représentations à l’audience. Dans la mesure où j’estime que ce dernier élément constitue le véritable fondement de la résolution de ce litige, je commencerai mon analyse par celui-ci, pour traiter par la suite, à titre subsidiaire, de la question de l’immunité.
  3.            Les auteurs Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, dans leur ouvrage La responsabilité civile[52], écrivent que l’application de l’article 976 C.c.Q. doit être restreinte à des situations qui découlent véritablement de l’exercice du droit de propriété ou de son usage :

Enfin, il importe de limiter l’application de l’article 976 C.c.Q. à des situations qui découlent véritablement de l’exercice du droit de propriété ou de son usage, sans quoi il risque d’y avoir une absorption par 976 C.c.Q. de l’ensemble des préjudices subis dans un contexte de proximité. Une certaine jurisprudence, pourtant, inclut dans l’article 976 C.c.Q. des situations qui s’écartent parfois de l’exercice du droit de propriété, sans conséquence véritable puisqu’il y a, de toute manière, présence d’une faute […]. Mais lorsqu’aucune faute n’a été commise, la qualification donnée devient importante. […]

La Cour d’appel a récemment conclu, dans l’arrêt Maltais, que l’administration publique était soumise à l’article 976 C.c.Q. dans la mesure où, comme il se doit, les inconvénients découlent d’un acte ou d’une omission de l’État à titre de propriétaire d’un fonds à l’usage du public.

  1.            Toute faute extracontractuelle ayant été écartée par la juge de première instance, il importe que la décision de l’appelante découle véritablement d’un acte posé ou d’une omission à titre de propriétaire pour que sa responsabilité sans faute puisse être engagée. Or, j’estime que la situation qui prévalait dans l’arrêt Maltais diffère du cas sous étude. En effet, bien que l’appelante, à titre de municipalité locale[53], soit propriétaire des rues et des chemins situés sur son territoire[54], cet état de fait ne suffit pas, en soi, à engager sa responsabilité sans faute de sa part. Encore faut-il que les inconvénients allégués puisent directement leur source dans un acte ou une omission de la Ville et relèvent de l’exercice de ce droit de propriété.
  2.            En l’espèce, se fondant sur l’arrêt Maltais[55], la juge de première instance retient la responsabilité de la Ville pour les inconvénients découlant de la circulation jugée excessive sur le tronçon du chemin des Prairies de la manière qui suit :

[240] Il apparaît incontestable que la situation vécue par les membres du groupe découle de la gestion par la Ville de son développement urbain et de l’aménagement du tronçon pour accueillir la circulation de nouveaux propriétaires et permettre le transit des véhicules dans les deux directions. Par son développement urbain, la Ville a créé une source d’inconvénients anormaux dans l’environnement paisible du chemin des Prairies, alors que le rapport du BAPE en 1999 prévoyait plutôt qu’une circulation relativement faible contribuerait à maintenir la qualité de vie des riverains.

[Italiques dans l’original]

  1.            En cernant ainsi la cause des inconvénients, la juge attribue la responsabilité de l’appelante à ses choix d’aménagement de l’ensemble de son territoire, lesquels ont entraîné une augmentation de la circulation sur le chemin des Prairies. La juge précise d’ailleurs que : « L’achalandage apparaît simplement comme le résultat du développement par la Ville des secteurs avoisinant le tronçon »[56]. C’est également ce qui est invoqué par les représentants et les membres du groupe. Ils attribuent l’achalandage automobile sur le tronçon non pas à l’omission d’y créer une impasse, mais au développement urbain et à l’aménagement du territoire, notamment l’ouverture du Quartier DIX30[57]. Ainsi, contrairement à la situation qui prévalait dans l’arrêt Maltais, la décision ou l’omission de ne prendre aucune mesure visant à atténuer la circulation sur le tronçon du chemin des Prairies ne peut être dissociée des décisions initiales (ou de cette ligne de conduite) concernant son aménagement global. Je souligne d’ailleurs que ces décisions, prises en toute légalité, ne créent pas pour l’appelante une obligation de mettre en place des mesures atténuantes.  
  2.            Comme elle l’a soulevé à l’audience, l’appelante a amorcé, au fil des décennies, le développement de son territoire selon des objectifs d’urbanisation et de densification, en procédant notamment à l’ouverture de nouveaux quartiers résidentiels, à l’élargissement de son réseau routier, ainsi qu’à la création de pôles commerciaux d’envergure comme le Quartier DIX30. Ces choix relèvent de l’exercice de ses compétences politiques en matière d’aménagement territorial, dont les conséquences excèdent le champ d’application restreint de l’article 976 C.c.Q.
  3.            Dans les circonstances, puisque les inconvénients allégués ne découlent pas de l’exercice d’un droit de propriété sur le chemin des Prairies, mais plutôt de l’exercice d’un pouvoir politique de gestion de l’ensemble de son territoire, la responsabilité sans faute de l’appelante ne peut être engagée. L’appel doit être accueilli, et l’action collective rejetée sur cette base.

***

  1.            Dans l’éventualité où l’on aurait conclu que les décisions de la Ville se rapportaient à l’exercice de son droit de propriété, se pose la question de l’application de l’immunité. À mon avis, il ne fait aucun doute que la ligne de conduite[58] de l’appelante ayant mené au développement des secteurs O et L avoisinant le tronçon[59] relève de la sphère politique et réglementaire de la Ville. Bien qu’aucune décision ni politique officielle ne vise expressément la circulation sur le tronçon, la situation vécue par les intimés est néanmoins l’aboutissement de l’ensemble des décisions politiques – de la ligne de conduite – liées au développement des secteurs l’avoisinant. En effet, comme mentionné, l’aménagement et le développement du territoire sont au cœur même du pouvoir réglementaire des municipalités[60], et tant qu’une municipalité se conforme au schéma d’aménagement du territoire dans lequel elle est située, elle dispose d’un large pouvoir discrétionnaire pour aménager son territoire[61]. En l’espèce, le développement des secteurs avoisinant le tronçon découle des plans d’urbanisme et des règlements adoptés sur des décennies, conformément aux schémas d’aménagement alors en vigueur[62], visant précisément le développement commercial le long du boulevard Taschereau dans le secteur O, ainsi que l’ouverture du Quartier DIX30 dans le secteur L[63]. Or, il est acquis que « lorsqu’une municipalité adopte un règlement, elle agit alors dans sa sphère législative »[64], car l’adoption d’outils réglementaires suppose nécessairement des considérations budgétaires, sociales et économiques d’envergure[65]. Il serait inconcevable de prétendre que le développement majeur d’un arrondissement ou d’un secteur précis soit le fruit de simples directives administratives liées à la mise en œuvre de règlements par des fonctionnaires, comme l’impliquerait la sphère opérationnelle liée à la théorie de l’immunité relative[66], et ce n’est d’ailleurs pas un argument avancé par les intimés.
  2.            La responsabilité de l’appelante ne saurait donc être engagée pour l’exercice légitime de ses prérogatives en tant qu’autorité publique, car ce n’est pas le rôle des tribunaux de s’immiscer dans une décision qui relève davantage de la sagesse gouvernementale[67]. Rappelons que l’immunité relative vise précisément à soustraire la personne morale de droit public à toute responsabilité découlant de ses décisions de politique générale prises dans l’intérêt commun, pour autant qu’elles ne soient pas empreintes d’irrationalité ni de mauvaise foi, même lorsque celles-ci entraînent des répercussions sur certains intérêts privés[68]. Dans les circonstances, je suis d’avis que la juge commet une erreur de droit en limitant l’application de l’immunité aux seuls cas où une décision porte délibérément sur les inconvénients allégués, ainsi qu’en omettant de qualifier la nature de la conduite de l’appelante qu’elle reconnaît comme étant à la source du préjudice. Une telle interprétation, avec égards, méconnaît le fondement même de cette immunité et en restreint indûment la portée, compromettant ainsi la capacité des municipalités à planifier et à gérer leur territoire de manière efficace.
  3.            L’immunité relative doit donc s’appliquer à l’exercice du pouvoir réglementaire de l’appelante, dans la mesure où elle a agi de bonne foi et que l’exercice de ce pouvoir ne peut être qualifié d’irrationnel. En l’espèce, bien que les intimés aient tenté d’invoquer la mauvaise foi de l’appelante dans leur demande introductive d’instance modifiée du 17 avril 2023[69], la juge a refusé l’ajout de ces allégations au motif qu’elles étaient tardives et préjudiciables à la défense de l’appelante[70]. Considérant que cette décision rendue en cours d’instance n’a pas été portée en appel par les intimés, que l’administration publique bénéficie d’une présomption de bonne foi[71], et qu’aucune preuve de mauvaise foi ou d’irrationalité n’a été soumise, j’estime qu’il y a lieu de conclure que ces exceptions ne pourraient être invoquées en l’instance.

Deuxième volet : omission de créer une impasse

  1.            Un mot quant au second volet invoqué par les intimés dans le cadre de leur demande, soit l’omission de mettre en place une impasse à titre de mesure d’atténuation de la circulation excessive. Il s’agit là d’un cas qui s’apparente à la situation rapportée dans l’arrêt Maltais, dans lequel, je le rappelle, il était question de l’omission de construire un mur anti-bruit aux abords d’une autoroute. Cependant, comme je l’ai déjà mentionné, étant donné que ce volet n’a pas été retenu par la juge et que les intimés n’ont pas formé d’appel incident sur cette question, il n’est pas nécessaire, voire sans objet, de déterminer si l’immunité de la Ville aurait pu être invoquée avec succès dans ce cas de figure.
  2.            Il n’est pas non plus nécessaire de se pencher sur les autres questions soulevées par l’appelante, soit celles relatives à l’existence même des inconvénients anormaux de voisinage et à la justesse du quantum des réclamations, étant donné les conclusions auxquelles j’arrive.

CONCLUSION

  1.            Certes, ce n’est certainement pas, après toutes ces années, le résultat attendu par les intimés, dont les inconvénients vécus n’en sont pas moins réels. Toutefois, en l’absence d’une faute civile de la part de l’appelante, celle-ci ne peut, dans les circonstances bien précises de l’espèce, être tenue responsable des inconvénients anormaux de voisinage causés – si tant est que ceux-ci existent, ce sur quoi il n’est pas nécessaire de me prononcer, étant donné que ceux-ci ne relèvent pas de l’exercice de son droit de propriété.
  2.            En conclusion, je propose d’accueillir l’appel, d’infirmer le jugement de première instance et de rejeter la demande d’action collective, le tout avec les frais de justice.

 

 

 

 

CHRISTINE BAUDOUIN, J.C.A.

 


[1]  Belmamoun c. Ville de Brossard, 2023 QCCS 3826 [jugement entrepris].

[2]  Voir notamment Belmamoun c. Brossard (Ville de), 2014 QCCS 1658; Belmamoun c. Brossard (Ville de), 2015 QCCS 2913; Belmamoun c. Ville de Brossard, 2017 QCCA 102; Belmamoun c. Ville de Brossard, 2019 QCCS 2979; Ville de Brossard c. Belmamoun, 2020 QCCA 1718; Belmamoun c. Ville de Brossard, 2023 QCCS 3826.

[3]  Comme l’écrit d’ailleurs l’appelante dans son mémoire à la page 6 : « Or, si Rome ne s’est pas faite en un jour, Brossard non plus ».

[4]  Loi portant réforme de l’organisation territoriale municipale des régions métropolitaines de Montréal, de Québec et de l’Outaouais, L.Q. 2000, c. 56, art. 3 et annexe III art. 5.

[5]  Décret 967-2005, 19 octobre 2005, Reconstitution de la Ville de Brossard, (2005) 137 G.O.Q. II, 6286.

[6]  Pièce P-10, Rapport d’enquête et d’audiences publiques (BAPE) #135 concernant l’élargissement

et la construction de boulevards à Brossard, M.A., vol. 3, p. 760.

[7]  Jugement entrepris, supra, note 1, paragr. 19-25.

[8]  Id., paragr. 23.

[9]  Belmamoun c. Ville de Brossard, 2023 QCCS 1899.

[10]  Jugement entrepris, supra note 1.

[11]  Ciment du Saint-Laurent inc. c. Barrette, 2008 CSC 64, paragr. 96 (Ciment du Saint-Laurent inc.).

[12]  Sylvio Normand, Introduction au droit des biens, 3e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2020, p. 130; Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 9e éd., vol. 1, Montréal, Yvon Blais, 2020, paragr. 1-252; Ciment du Saint-Laurent inc., supra note 11, paragr. 83.

[13]  Ciment du Saint-Laurent inc., supra note 11.

[14]  Vincent Karim, Les obligations, vol. 1, 6e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2024, paragr. 3682; Denys-Claude Lamontagne, Biens et propriété, 8e éd., Montréal, Yvon Blais, 2018, paragr. 236.

[15]  Plantons A et P inc. c. Delage, 2015 QCCA 7, paragr. 81.

[16]  Sylvio Normand, Introduction au droit des biens, 3e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2020, p. 127.

[17]  Cormier c. Ville de Montréal, 2023 QCCA 462, paragr. 101.

[18]  Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 9e éd., Montréal, Yvon Blais, 2020, paragr. 1-252 et 1-262.

[19]  Maltais c. Procureure générale du Québec, 2020 QCCA 715, demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetée, 28 janvier 2021, no 39315 (Maltais).

[20]  Id., paragr. 55.

[21]   Voir notamment Entreprises Sibeca Inc. c. Frelighsburg (Municipalité), 2004 CSC 61 (Entreprises Sibeca Inc.), paragr. 27; Agence canadienne d’inspection des aliments c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2010 CSC 66, paragr. 25-27; Kosoian c. Société de transport de Montréal, 2019 CSC 59, paragr. 106-110; Hinse c. Canada (Procureur général), 2015 CSC 35, paragr. 21-23; Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville), 2015 CSC 16, paragr. 158; SteAnnede-Bellevue (Ville de) c. Papachronis, 2007 QCCA 770 (Ste-Anne-de-Bellevue (Ville de)), paragr. 2223.

[23]  R. c. Imperial Tobacco Canada Ltée, 2011 CSC 42, (Imperial Tobacco), paragr. 74; Prud’homme, supra, note 22; Brown c. Colombie-Britannique (Ministre des Transports et de la Voirie), [1994] 1 R.C.S. 420, 1994 CanLII 121 (CSC), p. 435-436; Laurentide Motels Ltd. c. Beauport (Ville), [1989] 1 R.C.S. 705, 1989 CanLII 81 (CSC) (Laurentide Motels Ltd.), p. 706-707; Ste-Anne-de-Bellevue (Ville de), supra, note 21, paragr. 23; Forcier & Frères ltée c. Ville de Malartic, 2023 QCCA 746, paragr. 21.

[26]  Nelson (Ville) c. Marchi, 2021 CSC 41, paragr. 79 (Nelson); Forcier & Frères ltée c. Ville de Malartic, 2023 QCCA 746, paragr. 21.

[27]  Ste-Anne-de-Bellevue (Ville de), supra, note 21.

[28]  Laurentide Motels Ltd., supra, note 23, p. 722; Forcier & Frères ltée c. Ville de Malartic, 2023 QCCA 746, paragr. 22.

[29]  Nelson, supra, note 26.

[31]  Just c. Colombie-Britannique, [1989] 2 RCS 1228, 1989 CanLII 16 (CSC), p. 1239.

[32]  Notamment les arrêts : Brown c. Colombie-Britannique (Ministre des Transports et de la Voirie), [1994] 1 R.C.S. 420, 1994 CanLII 121 (CSC); Swinamer c. Nouvelle-Écosse (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 445, 1994 CanLII 122 (CSC); Lewis (Tutrice à l’instance de) c. Colombie-Britannique, [1997] 3 R.C.S. 1145, 1997 CanLII 304 (CSC).

[33]  Nelson, supra, note 26.

[34]  Nelson, supra, note 26, paragr. 46 et 47.

[35]  Lara Khoury, « Crises sanitaires et responsabilité étatique envers la collectivité », (2016) 46 R.D.U.S. 261, p. 272.

[36]  Québec (Procureur général) c. Deniso Lebel inc., [1996] R.J.Q. 1821, 1996 CanLII 5765 (QCCA), demandes d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetées, 30 janvier 1997, nos 25588, 25589 et 25590; Cilinger c. Québec (Procureur général), [2004] R.J.Q. 2943, 2004 CanLII 39136 (QCCA), demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetée, 14 juillet 2005, no 30703; Maltais, supra, note 19.

[37]  Maltais, supra, note 19.

[38]  Id., paragr. 4-7.

[39]  Id., paragr. 13.

[40]  Id., paragr. 38-54.

[41]  Id., paragr. 55.

[42]  Id., paragr. 58-59.

[43]  Id., paragr. 90.

[44]  Nelson, supra, note 26.

[45]  Maltais, supra, note 19, paragr. 99.

[46]  Id., paragr. 108-114.

[47]  Id., paragr. 116 et 118.

[48]  Id., paragr. 120-122.

[49]  Loi sur les compétences municipales, RLRQ, c. C-47.1, art. 4.

[50]  Tel qu’il appert du préambule de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, RLRQ, c. A-19.1 : « CONSIDÉRANT qu’il revient aux instances municipales de prendre des décisions en matière d’aménagement et d’urbanisme dans le respect de ces orientations, en priorisant l’intérêt collectif et en tenant compte des particularités territoriales ».

[51]  Décret 967-2005, 19 octobre 2005, Reconstitution de la Ville de Brossard, (2005) 137 G.O.Q. II, 6286.

 

[52]  Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers et Benoît Moore, La responsabilité civile, 9e éd., vol. 1, Montréal, Yvon Blais, 2020, paragr. 1-252 et 1-262.

[53]  Décret 967-2005, 19 octobre 2005, Reconstitution de la Ville de Brossard, (2005) 137 G.O.Q. II, 6286.

[54]  Et ce, malgré le fait qu’elle fait partie de l’agglomération de Longueuil. Voir les articles 6, 24.1 et 118.8 de la Loi sur l’exercice de certaines compétences municipales dans certaines agglomérations, RLRQ, c. E-20.001.

[55]  Jugement entrepris, paragr. 72-73.

[56]  Jugement entrepris, paragr. 309.

[57]  Demande introductive de l’instance en action collective, 24 avril 2017, 24 avril 2017, M.A., vol. 1, p. 114-115; Demande introductive d’instance en action collective modifiée, 17 avril 2023, M.A., vol. 2, p. 389-390; Demande introductive d’instance en action collective remodifiée, 20 juin 2023, vol. 2, p. 432-433.

[58]  Nelson, supra, note 26.

[59]  Voir la carte au paragr. [15].

[60]  Tel qu’il appert du préambule de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, RLRQ, c. A-19.1 : « CONSIDÉRANT qu’il revient aux instances municipales de prendre des décisions en matière d’aménagement et d’urbanisme dans le respect de ces orientations, en priorisant l’intérêt collectif et en tenant compte des particularités territoriales ».

[61]  Entreprises Sibeca Inc., supra, note 21.

[62]  Pièce D-12, Schéma d’aménagement révisé de la MRC de Champlain adopté le 20 octobre 1998 et certains de ses amendements, M.A., vol. 9, p. 3038; Pièce D-13, Schéma d’aménagement et de développement de Longueuil, modifié et actualisé le 6 décembre 2005, et certains de ses amendements, en liasse, M.A., vol. 10, p. 3216; Pièce D-14, Schéma d’aménagement et de développement de Longueuil, adopté le 20 octobre 2016, M.A., vol. 11, p. 3608.

[63]  Pièce D-8, Copie du Plan d’urbanisme de la Ville de Brossard du 8 janvier 1990, M.A., vol. 7, p. 2321; Pièce D-9, Plan d’urbanisme de la Ville de Brossard du 16 juillet 2001, M.A., vol. 7, p. 2392; Pièce D-10, Plan d’urbanisme de la Ville de Brossard 2016-2035, M.A., vol. 8, p. 2568-2569.

[64]  Lombard du Canada ltée c. Mont-Tremblant (Ville de), 2010 QCCA 1910, paragr. 59.

[65]  Nelson, supra, note 26, paragr. 39; Brown c. Colombie-Britannique (Ministre des Transports et de la Voirie), [1994] 1 R.C.S. 420, 1994 CanLII 121; Maltais, supra, note 19, paragr. 104.

[66]  Nelson, supra, note 26, paragr. 52.

[67]  Maltais, supra, note 19, paragr. 114.

[68]  Nelson, supra, note 26, paragr. 42 et 49; Maltais, supra, note 19, paragr. 83; Cilinger c. Québec (Procureur général), [2004] R.J.Q. 2943, 2004 CanLII 39136 (QCCA), paragr. 14 ; Forcier & Frères ltée c. Ville de Malartic, 2023 QCCA 746, paragr. 20.

[69]  Demande introductive d’instance en action collective modifiée, 17 avril 2023, M.A., vol. 2, p. 385.

[70]  Belmamoun c. Ville de Brossard, 2023 QCCS 1899, paragr. 6-8.

[71]  Nelson, supra, note 26, paragr. 35; Imperial Tobacco, supra, note 23, paragr. 90; Entreprises Sibeca Inc., supra, note 21, paragr. 23; Maltais, supra, note 19, paragr. 120; Lombard du Canada ltée c. Mont-Tremblant (Ville de), 2010 QCCA 1910, paragr. 59; Ste-Anne-de-Bellevue (Ville de), supra note 21, paragr. 23.

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