Benoit Tremblay Entrepreneur général inc. c. Garage Martin Gaudreault inc. | 2024 QCCS 4550 | |||
COUR SUPÉRIEURE | ||||
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CANADA | ||||
PROVINCE DE QUÉBEC | ||||
DISTRICT DE | CHARLEVOIX | |||
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N° : | 240-17-000529-236 | |||
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DATE : | 13 décembre 2024 | |||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE LISE BERGERON, j.c.s. | ||||
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BENOIT TREMBLAY ENTREPRENEUR GÉNÉRAL INC. | ||||
Demanderesse | ||||
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c. | ||||
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GARAGE MARTIN GAUDREAULT INC. | ||||
Défenderesse/défenderesse en garantie | ||||
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et | ||||
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LES ÉBOULEMENTS (MUNICIPALITÉ DE) | ||||
Défenderesse/demanderesse en garantie | ||||
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JUGEMENT | ||||
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CONTEXTE
4.1 MATÉRIEL REQUIS
L’adjudicataire doit avoir à sa disposition tout le matériel requis et approprié pour l’exécution des travaux prescrits par les clauses du présent devis. Tous ces matériels doivent être maintenus en bon état de marche, toujours être disponibles et remisés, si possible, dans des garages chauffés commodément situés sur les circuits à entretenir.
La Municipalité de Saint-Irénée OBLIGE l’adjudicataire à avoir deux (2) chasse-neiges en service sur le territoire de la municipalité, et ce, en tout temps et durant toute la durée du contrat.[9]
[Reproduction textuelle]
[Nos soulignements]
3.3 Équipements requis pour l’exécution du contrat et disponibilité
Aux fins de l’exécution du contrat, le soumissionnaire doit avoir en sa possession (ou la propriété), au moment du dépôt de sa soumission, le matériel disponible (le matériel et les équipements qu’il utilisera pour la réalisation du contrat), tel que décrit à l’article 12 des présentes.
Le soumissionnaire doit fournir une liste complète du matériel et des équipements en sa possession, indiquant la marque et le modèle de chacun d’eux, avec les numéros de série et la preuve d’immatriculation et d’assurance. Le défaut de produire la liste requise entraîne le rejet de la soumission.
La Municipalité se réserve le droit de vérifier la possession par le soumissionnaire des équipements exigés avant d’octroyer le permis; l’absence de vérification ne constitue pas une renonciation de la Municipalité à l’exigence de possession des équipements. Une fausse déclaration entraînera le rejet automatique de la soumission.[11]
[Nos soulignements]
POSITION DES PARTIES
ANALYSE
12 LISTE DU MATÉRIEL ET DES ÉQUIPEMENTS MINIMUM REQUIS
Quantité | Type de matériel et équipement |
1 | Camion 10 roues avec sens unique et aile de côté et équipé d’une sableuse d’une capacité de neuf (9) verges (minimum) |
1 | Camion complémentaire avec sens unique et aile de côté et équipé d’une sableuse d’une capacité de six (6) verges (minimum) |
1 | Souffleur 1 500 à 2 000 tm/h |
Le matériel et les équipements doivent être disponibles en permanence, pendant la durée de la saison, du 15 octobre au 15 mai sur un site appartenant ou loué par l’entrepreneur. Un bâtiment où le premier camion sera entreposé du 1er novembre à la fin de l’hiver avec une réserve de sable sur place pour que le camion soit en service le plus rapidement possible. En cas de prévision de chute de neige, de verglas ou de pluie verglaçante dans les quinze (15) jours qui précèdent ou qui suivent ces dates, l’adjudicataire doit rendre ce matériel et ces équipements disponibles afin de réaliser les travaux prévus au contrat.
[Reproduction textuelle]
[Nos soulignements]
2.13 ÉVALUATION DES SOUMISSIONS
L’évaluation des soumissions, quant à la validité ou à leur conformité, est faite à partir des seuls documents ou renseignements fournis par le soumissionnaire, conformément aux exigences des documents d’appel d’offres.
Toutefois, en vertu des licences, des permis ou d’autres certifications ou autorisations sont requis en vertus de la loi pour l’exécution du contrat, la Municipalité se réserve le droit, à sa seule discrétion, de procéder à des vérifications avant l’adjudication du contrat. S’il appert que le soumissionnaire ne détient pas ces licences, permis, certificats ou autorisations, sa soumission sera rejetée.
(…)
3.3 ÉQUIPEMENTS REQUIS POUR L’EXÉCUTION DU CONTRAT ET DISPONIBILITÉ
Aux fins de l’exécution du contrat, le soumissionnaire doit avoir en sa possession (ou la propriété), au moment du dépôt de sa soumission, le matériel disponible (le matériel et les équipements qu’il utilisera pour la réalisation du contrat), tel que décrit à l’article 12 des présentes.
Le soumissionnaire doit fournir une liste complète du matériel et des équipements en sa possession, indiquant la marque et le modèle de chacun d’eux, avec les numéros de série et la preuve d’immatriculation et d’assurance. Le défaut de produire la liste requise entraîne le rejet de la soumission.
La Municipalité se réserve le droit de vérifier la possession par le soumissionnaire des équipements exigés avant d’octroyer le permis; l’absence de vérification ne constitue pas une renonciation de la Municipalité à l’exigence de possession des équipements. Une fausse déclaration entraînera le rejet automatique de la soumission.[15]
[Nos soulignements]
La Municipalité des Éboulements a-t-elle accepté une soumission non conforme?
[27] Certes, la Ville jouit d'une certaine latitude dans l'analyse de la conformité des soumissions. Ainsi, il faut éviter de l'astreindre à un formalisme qui battrait en brèche les avantages du recours aux soumissions publiques. En revanche, cette latitude ne l'autorise pas à accepter une soumission qui comporte une irrégularité majeure de nature à saper les règles énoncées précédemment et que le législateur a privilégiées. Autrement dit, la faculté reconnue à la ville d'accepter des soumissions qui comportent des irrégularités mineures, ne s'étend pas aux irrégularités majeures, à l'égard desquelles la Ville n'a aucune discrétion, et qui doivent, sous peine de nullité, entraîner le rejet de la soumission :
La municipalité doit avoir la latitude nécessaire afin que le contrat soit accordé en fonction du meilleur intérêt des contribuables. Comme les tribunaux l'ont déjà souligné : « Il existe une obligation non pas envers le plus bas soumissionnaire, mais envers le trésor public qui ne doit jamais être tenu de payer, sans une bonne raison, un prix plus élevé que nécessaire.» Si un doute se présente sur la conformité d'une soumission, il faut favoriser l'offre comportant le meilleur prix pour la municipalité. Mais dans la recherche de cet objectif, la municipalité ne doit pas affecter les principes de l'appel d'offres en faisant preuve de favoritisme et en rompant l'égalité entre les soumissionnaires. En d'autres termes, une municipalité peut faire preuve d'une certaine souplesse dans l'examen du cahier des charges et des soumissions, mais pas au point de causer un préjudice à certains soumissionnaires. C'est pourquoi la jurisprudence distingue entre les irrégularités mineures qui ne portent pas atteinte aux objectifs de l'appel d'offres et celles qui touchent les objectifs fondamentaux du processus d'adjudication par voie de soumissions. La discrétion municipale ne peut s'exercer que pour la première catégorie d'irrégularités.
Lorsqu'il s'agit d'une irrégularité majeure qui met en cause les principes qui sont à la base du processus d'adjudication des contrats municipaux par voie de demande de soumissions, la municipalité ne peut permettre aucune correction et doit refuser la soumission en la jugeant non conforme. Bref, une municipalité ne peut mettre de côté une exigence essentielle de l'appel d'offres.
[28] Pour qualifier une irrégularité de mineure ou de majeure, le facteur déterminant est celui de l'égalité des soumissionnaires. L'irrégularité ne doit pas avoir d'effet sur le prix de la soumission; elle ne doit pas avoir rompu l'équilibre entre les soumissionnaires, l'un des principes directeurs en matière d'adjudication de contrat par voie de soumissions publiques :
Le souci d'assurer l'égalité entre les soumissionnaires et de ne pas favoriser injustement l'un d'entre eux constitue souvent l'élément déterminant en ce qui concerne la qualification d'une irrégularité comme secondaire ou accessoire ou comme portant sur un élément essentiel : il ne faut pas que l'omission ou l'erreur commise ait un effet sur le prix de la soumission ou sur une exigence de fond contenue à l'appel d'offres.[23]
[Soulignements dans l’original]
[Références omises]
[42] Quelques principes de base méritent d’être rappelés.
[43] Les droits et obligations des parties doivent être analysés à la lumière des dispositions contenues dans les documents d’appel d’offres et des dispositions législatives et réglementaires pertinentes dans le cas d’appel d’offres public.
[44] En cas de litige sur le contenu des documents d’appel d’offres, le Tribunal doit en interpréter les dispositions selon les règles usuelles. Il doit rechercher la volonté des parties en examinant les éléments intrinsèques des documents, les circonstances propres à l’espèce, les usages et l’équité.
[45] Si des doutes subsistent sur le sens à donner à une disposition des documents d’appel d’offres et du contrat, c’est le donneur d’ouvrage qui en est l’auteur qui devra en souffrir les inconvénients et la disposition devra alors être interprétée en faveur du soumissionnaire puisqu’il sera considéré comme un adhérent.
[46] Le maintien de l’équilibre entre les soumissionnaires est un élément essentiel pour assurer la validité du processus d’appel d’offres. Le donneur d’ouvrage doit respecter les conditions d’adjudication du contrat prévues dans les documents d’appel d’offres et ne doit pas adjuger le contrat à un soumissionnaire dont l’offre n’est pas conforme aux documents d’appel d’offres.[24]
[88] En juin 1986, la Ville d’Edmonton lance un appel d’offres pour la fourniture de machines et de conducteurs. Les conditions de l’appel d’offres prévoient que les machines proposées doivent être obligatoirement des modèles de 1980 ou plus récents et que le défaut de se conformer à cette exigence peut entraîner le rejet des soumissions. L’entreprise qui produit la plus basse soumission, Sureway Construction of Alberta Ltd, propose des machines qui, aux yeux de la Ville [et de la Cour], remplissent cette exigence de sorte que le contrat «B» lui est adjugé. Toutefois, après que le contrat «B» lui ait été adjugé, Sureway informe la Ville que l’une des machines ne sera pas celle décrite à sa soumission. Qui plus est, cette machine ne remplit pas les conditions établies lors de l’appel d’offres en ce qu’elle est antérieure à 1980. Malgré cette lacune, la Ville ne dit mot ni n’agit. L’un des soumissionnaires rivaux, Double N Earthmovers, ne voit pas les choses du même œil. Étant d’avis que l’inaction de la Ville, à ce stade, venait compromettre le principe d’égalité entre les soumissionnaires qui doit prévaloir dans le cadre du contrat «A», i.e. au moment d’évaluer la conformité des soumissions, Double N Earthmovers la poursuit et lui réclame sa perte de profits.
[89] Le tribunal de première instance, la Cour d’appel et la Cour suprême ont tous écarté la position défendue par Double N Earthmovers.
[90] Pour leur part, les juges majoritaires de la Cour suprême ont estimé que le geste reproché à la Ville, soit son inaction devant le fait que l’une des machines, en plus d’être différente de celle visée à la soumission, ne respectait pas les conditions du devis, avait été posé dans le cadre de l’exécution du contrat «B», soit le contrat de service intervenu entre la Ville et l’adjudicataire Sureway, lequel contrat ne concernait pas les autres soumissionnaires ayant répondu à l’appel d’offres. Voici comment les juges Abella et Rothstein s’expriment à ce sujet :
Ce dont se plaint Double N (la levée par la Ville de l’exigence de fournir un modèle 1980) est survenu après la formation du contrat B. Le contrat A est exécuté dès lors que le propriétaire procède à une évaluation équitable et passe un contrat B fondé sur les conditions énoncées dans les documents d’appel d’offres. Ainsi, le propriétaire est entièrement libéré de ses obligations envers les soumissionnaires non retenus. Le contrat B est un contrat distinct qui ne s’applique pas aux soumissionnaires non retenus. Dans Ron Engineering, le juge Estey a déclaré qu’« il faut préserver l’intégrité du mécanisme d’appel d’offres chaque fois qu’il est possible de le faire en vertu du droit des contrats » (p. 121 (nous soulignons)). En droit des contrats, Double N ne peut exiger l’annulation d’un contrat auquel elle n’est pas partie, dans le but de préserver l’intégrité d’un mécanisme d’appel d’offres qui, par définition, a pris fin au moment de la formation du contrat B.
Si l’une des parties au contrat B ne respecte pas ses engagements, l’autre partie peut invoquer les droits et recours qui s’offrent à elle aux termes du contrat et en common law. Les soumissionnaires peuvent être tenus de respecter leurs engagements, sinon le propriétaire peut avoir le droit d’annuler le contrat. Ce sont ces recours qui servent de mesures dissuasives contre la présentation de soumissions trompeuses, puisque, en l’absence de collusion, les soumissionnaires ne peuvent savoir comment le propriétaire réagira. Si le propriétaire estime qu’il est dans son intérêt de lever une condition du contrat, il a le droit contractuel de le faire, sauf stipulation contraire dans le contrat. […]
[91] Bien que les faits de cet arrêt se distinguent de ceux de la présente affaire, principalement en ce que la substitution des équipements qui s’est ici opérée dans le contrat «B» respectait les termes du devis, il demeure que les enseignements de la Cour nous indiquent qu’un soumissionnaire ne peut, une fois que le donneur d’ouvrage a de bonne foi accepté une soumission valide, faire valoir de recours contre lui, si le soumissionnaire adjudicataire ne respecte pas ses obligations dans le cadre du contrat «B». En un tel cas, le manquement ne concerne que les parties au contrat «B», soit le donneur d’ouvrage et le soumissionnaire adjudicataire. À cet égard, la conclusion des juges Abella et Rothstein est fort explicite :
Nous jugeons que la soumission de Double N a été traitée équitablement tout au long de l’appel d’offres. La soumission de Sureway proposait des machines à première vue conformes et elle pouvait être acceptée par la Ville. Celle-ci ne s’est pas rendu compte de la tromperie de Sureway avant d’accepter sa soumission ni n’a agi de connivence avec elle durant l’appel d’offres de manière à traiter les autres soumissionnaires injustement. Une fois que la Ville a accepté l’offre de Sureway de lui fournir des machines conformes, la violation de cet engagement de la part de Sureway est une question qui ne regarde que ces deux parties. La Ville pouvait prendre les mesures qu’elle jugeait indiquées relativement aux obligations de Sureway.
[92] C’est sans doute ce qui explique le choix de CC d’instituer un recours fondé exclusivement sur les règles de la responsabilité extracontractuelle, contre Excavation LMR, à l’exclusion de la Ville de Saguenay.
* * *
[93] Ainsi, en prenant pour acquis qu’un tel recours s’avère possible, CC devait, pour avoir gain de cause, démontrer la faute de LMR et de son président, en l’occurrence la tromperie dont ils auraient fait preuve en présentant des soumissions qu’ils savaient fausses, de même que le lien de causalité entre cette faute et le dommage qu’elle prétend avoir subi.[26]
[Soulignements dans l’original]
[Caractères gras ajoutés]
[23] La prémisse de l’appelante selon laquelle certains soumissionnaires pourraient déclarer faussement s’être conformés aux exigences particulières et ainsi obtenir un contrat ne peut fonder l’apparence de droit qu’elle invoque.
[24] D’ailleurs, dans Double N Earthmovers ltd. c. Edmonton (Ville), tant les juges majoritaires que minoritaires se sont dits d’avis que le donneur d’ouvrage n’a pas l’obligation implicite d’enquêter sur la véracité des déclarations des soumissionnaires. Voici ce qu’en disent les juges Abella et Rothstein :
Comme il n’y avait pas d’obligation expresse de vérifier, avant l’acceptation de la soumission, les machines proposées, il faut se demander s’il existe une obligation implicite de le faire.
À notre avis, le propriétaire n’est pas implicitement tenu de vérifier si les soumissionnaires respecteront vraiment les engagements qu’ils ont pris dans leur soumission. Nous approuvons le commentaire suivant fait par le juge Russell au nom de la Cour d’appel :
[Traduction] Imposer aux propriétaires l’obligation de vérifier si les soumissionnaires respecteront les modalités de leurs soumissions aurait pour effet de gêner le bon fonctionnement du mécanisme d’appel d’offres et d’y faire obstacle finalement en créant des incertitudes fâcheuses.
L’idée que le propriétaire doit vérifier les soumissions est bien loin de comporter le degré d’« évidence » nécessaire pour faire partie des intentions présumées des « parties elles-mêmes ». Les parties n’ont aucune raison de s’attendre à ce que le propriétaire vérifie si un soumissionnaire se conformera aux exigences puisque chaque soumissionnaire y est tenu en droit en cas d’acceptation de sa soumission. Il importe peu que le soumissionnaire puisse ou non, au moment de la présentation de sa soumission, respecter ses engagements étant donné
qu’il a l’obligation en droit de le faire au moment de l’acceptation de sa soumission.[28]
[Références omises]
[Nos soulignements]
47 Pour démontrer l’existence de l’obligation de procéder à une vérification, Double N a signalé le droit de la Ville d’inspecter le matériel, lequel est prévu dans les documents d’appel d’offres. La clause 11 des Exigences relatives aux machines dispose :
[traduction] Inspection : Toute machine proposée peut faire l’objet d’une inspection [. . .] visant à vérifier si elle est conforme aux normes de sécurité, si elle est adaptée pour être utilisée à la décharge et si les conditions de l’accord de location de la machine sont respectées.
Cette clause prévoit toutefois le droit, mais non l’obligation, de procéder à une inspection. En outre, le type d’inspection qui y est envisagée ne révélerait pas nécessairement la date de fabrication du modèle. Ainsi, cette clause n’aide en rien Double N.
48 Double N a également mentionné la clause 9 des Conditions de l’appel d’offres, qui prévoit :
[traduction] Le matériel fourni aux termes du présent appel d’offres demeure la propriété du soumissionnaire retenu jusqu’à ce qu’il y ait inspection et utilisation du matériel et/ou du service et que la Ville les juge satisfaisants. Ils doivent être conformes aux conditions stipulées dans les présentes, respecter en tous points le cahier des charges et être de la plus haute qualité. Si elle juge inacceptables ou non conformes au cahier des charges le matériel et/ou le service qui lui sont fournis, la Ville se réserve le droit d’annuler la commande, en tout ou en partie, sur avis écrit au soumissionnaire retenu, et de lui retourner, aux frais de ce dernier, le produit ou une partie du produit.
Là encore, il ne faut pas confondre conférer le droit d’inspecter et imposer l’obligation de procéder à une vérification. En outre, la clause 9 est libellée de manière à permettre l’annulation d’un bon de commande, ce qui laisse entendre que c’est seulement après l’adjudication du contrat qu’on vérifie si le matériel proposé est conforme au cahier des charges.
49 Comme il n’y avait pas d’obligation expresse de vérifier, avant l’acceptation de la soumission, les machines proposées, il faut se demander s’il existe une obligation implicite de le faire.
(…)
52 L’obligation de traiter tous les soumissionnaires « équitablement et sur un pied d’égalité » a été reconnue dans Martel, en partie parce qu’elle a été jugée « compatible avec l’objectif de protéger et de promouvoir l’intégrité du mécanisme d’appel d’offres ». Double N insiste plutôt sur l’intégrité des soumissionnaires. Quant au mécanisme d’appel d’offres, il est entièrement protégé par l’obligation de traiter toutes les soumissions équitablement. Le meilleur moyen pour le propriétaire de s’assurer que toutes les soumissions sont traitées de façon équitable est de les évaluer d’après leur contenu réel et non en fonction des renseignements révélés ultérieurement.
53 Enfin, contrairement à ce qu’a laissé entendre Double N, les allégations des soumissionnaires rivaux ne contraignent pas les propriétaires à vérifier les autres soumissions. Une telle pratique encouragerait des attaques injustifiées et injustes de la part de soumissionnaires rivaux et amènerait les propriétaires à traiter les soumissionnaires de manière inéquitable. L’intégrité du mécanisme d’appel d’offres s’en trouverait compromise au lieu d’être affermie.[29]
[Références omises]
[Soulignements dans l’original]
[Caractères gras ajoutés]
La Cour suprême, dans un jugement majoritaire rendu à cinq juges contre quatre, a décidé qu’un donneur d’ouvrage qui donne un contrat fondé sur les conditions énoncées dans les documents d’appel d’offres était entièrement libéré de ses obligations envers les soumissionnaires et que ceux-ci ne peuvent demander l’annulation d’un contrat auquel ils ne sont pas parties. Elle a conclu que le donneur d’ouvrage pouvait modifier le contrat et accepter ainsi de lever une condition expressément prévue dans les documents d’appel d’offres lors de l’exécution du contrat, sans que l’on puisse prétendre que cela va à l’encontre de l’obligation de traiter équitablement les soumissionnaires.[30]
[Références omises]
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
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| __________________________________ LISE BERGERON, j.c.s. | |
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Me Antonin Roy | ||
REXLEX Avocats inc. | ||
Avocats de la demanderesse | ||
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Me Michel Perreault | ||
Perreault Avocat (2015) inc. | ||
Avocats de la défenderesse/défenderesse en garantie | ||
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Me Patrick Bérubé | ||
Tremblay Bois Mignault Lemay | ||
Avocats de la défenderesse/demanderesse en garantie | ||
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Date d’audience : | 10 au 12 septembre 2024 | |
[1] C’est ainsi que toutes les parties décrivent le contrat de déneigement pour le secteur comprenant le chemin Cap-aux-Oies, le rang Cap-aux-Oies, le chemin Saint-Thomas et le rang Saint-Antoine est et ouest.
[2] Voir les pièces P-4 et P-8.
[3] D’autres équipements sont à prévoir dans le cadre de cet appel d’offres, mais ne font pas l’objet du litige.
[4] Voir la pièce P-7.
[5] Bien que la résolution pour accorder le contrat de déneigement à Garage Martin Gaudreault soit du 1er août 2022 (pièce P-7), le contrat de déneigement est signé en date du 13 septembre 2022 (pièce DGM-1).
[6] Voir la pièce DGM-1.
[7] La Municipalité des Éboulements transmet, le 14 septembre 2022, à la suite de la demande de Benoit Tremblay du 29 août 2022, les documents recherchés par celui-ci, alors qu’il se bute à un refus de la part de la Municipalité de Saint-Irénée; voir les pièces P-11 à P-14.
[8] Voir la pièce P-3, art. 4.1, p. 34 des pièces, et art. 7, p. 38 des pièces.
[9] Id., art. 4.1, p. 34 des pièces.
[10] Voir la pièce P-8, article 12, pour la liste du matériel requis.
[11] Id., p. 137 des pièces.
[12] Voir les pièces P-19 et DGM-2.
[13] Voir la demande introductive d’instance du 10 janvier 2023 et la demande introductive d’instance remodifiée du 12 septembre 2024, dans laquelle la demande de la conclusion de condamnation solidaire est abandonnée.
[14] Montant modifié en plaidoirie : voir le calcul annexé au plan de plaidoirie et le procès-verbal du 12 septembre 2024, jour 3 de l’audience.
[15] Voir la pièce P-8, p. 135 et 137.
[16] Voir l’annexe 2 jointe à la soumission de Garage Martin Gaudreault, pièce P-11, p. 178-179, et la pièce P-6, p. 79-89.
[17] Voir la pièce P-6, p. 82 des pièces.
[18] Camions 10 roues International 90S 1997 avec équipement de déneigement, sens unique, aile de côté et sableuse 12 verges; voir le témoignage de Martin Gaudreault le 10 septembre 2024, jour 1 de l’audience, vers 14 h 50, et la pièce DMG-2 : contrat de location du 6 octobre 2022 et facture/contrat du 8 novembre 2022.
[19] Voir les pièces P-3 et P-15, p. 218.
[20] Voir la pièce DMG-2 et le témoignage de Martin Gaudreault le 10 septembre 2024, jour 1 de l’audience, vers 14 h 50.
[21] Voir les pièces P-15 et DMG-2.
[22] Voir la pièce DMG-2 et le témoignage de Martin Gaudreault le 10 septembre 2024.
[23] R.P.M. Tech inc. c. Gaspé (Ville de),
[24] Constructions Gagné & Fils inc. c. Hydro-Québec,
[25] Double N Earthmovers Ltd. c. Edmonton (Ville),
[26] 9056-8841 Québec inc. (Entreprises CC) c. 2852-6648 Québec inc. (Excavation LMR)*,
[27] Voir le témoignage de monsieur Patrice Girard le 11 septembre 2024, jour 2 de l’audience.
[28] Orthofab inc. c. Régie de l’assurance maladie du Québec,
[29] Réf. Note préc. 25.
[30] André LANGLOIS,
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.