Décision

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Syndicat du transport de Montréal (CSN) et Société de transport de Montréal

2025 QCTAT 2204

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL

(Division des services essentiels)

 

 

Région :

Montréal

 

Dossier :

1421304 71 2505

Dossiers accréditation :

AM-1001-4867 

 

 

Montréal,

le 2 juin 2025

______________________________________________________________________

 

DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF :

François Beaubien

______________________________________________________________________

 

 

 

Syndicat du transport de Montréal (CSN)

 Partie demanderesse

 

 

 

et

 

 

 

Société de transport de Montréal

 

Employeur

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

L’APERÇU

  1.                 La Société de transport de Montréal, la STM, exploite un réseau de transport en commun intégré et complexe en raison de sa taille, de sa diversité et des nombreux services offerts. Elle assure les services d’autobus, de minibus, de taxis collectifs et de métro en ayant pour mission de favoriser et d’organiser les déplacements par transport collectif des personnes voyageant sur le territoire de l’île de Montréal.
  2.                 Le Syndicat du transport de Montréal (CSN) est accrédité depuis le 27 février 1973 pour représenter :

Tous les employés de l’entretien des véhicules, du génie et de l’entretien des propriétés, des achats et magasins, sauf ceux appartenant à d’autres associations et ceux automatiquement exclus par la loi.

  1.                 Les parties sont assujetties à l’obligation de maintenir des services essentiels en cas de grève, puisque celle-ci peut avoir pour effet de mettre en danger la santé ou la sécurité publique[1].
  2.                 La convention collective unissant les parties est expirée depuis le 4 janvier 2025.
  3.                 Le 28 mai 2025, le Tribunal reçoit un avis selon l’article 111.0.23 du Code du travail[2], en vertu duquel le syndicat annonce son intention de recourir à une grève d’une durée de 9 jours, à compter du 9 juin 2025 à 0 h jusqu’au 17 juin 2025 à 23 h 59. Une liste des services essentiels que le syndicat propose de maintenir pendant la grève est jointe à cet avis.
  4.                 Conformément à l’article 111.0.18 du Code, les parties doivent négocier les services essentiels à maintenir en cas de grève. Lors d’une séance de conciliation tenue par le Tribunal le 30 mai, celles-ci ont convenu d’une entente.
  5.                 Le Tribunal doit maintenant évaluer la suffisance des services essentiels qui y sont prévus[3].

Le profil de la STM

  1.                 Depuis la création de l’Autorité régionale de transport métropolitain, l’ARTM, le 1er juin 2017, et la mise en place de la réforme de la gouvernance du transport collectif dans la région métropolitaine, la STM évolue dans un environnement organisationnel et financier complexe. Elle est liée par une entente de service avec l’ARTM pour l’exploitation des services sur son territoire et la réalisation de ses projets. Elle reçoit donc ses revenus directement de cette dernière qui, elle, négocie avec les bailleurs de fonds. La planification stratégique du développement du transport collectif, le financement des services et le cadre tarifaire relèvent de l’ARTM.
  2.                 La STM, à titre de gestionnaire déléguée, est responsable de l’exploitation des infrastructures métropolitaines de transport sur son territoire. Elle collabore également avec l’ARTM pour la planification des projets de développement métropolitain et réalise les projets pour les infrastructures et les équipements dont elle sera l’exploitante. À ce titre, elle réalise le projet de service rapide par bus (SRB) Pie-IX et est maître d’œuvre du prolongement de la ligne bleue. En plus d’être gestionnaire déléguée du système central OPUS, la STM assure aussi pour l’ARTM la réalisation du projet des équipements billettiques du Réseau express métropolitain (REM).
  3.            Son parc de véhicules est de 1 849 autobus et minibus, dont 220 articulés, ainsi que 999 voitures de métro[4].
  4.            Son réseau est composé de 223 lignes d’autobus et de quatre lignes de métro desservant 68 stations sur 71 kilomètres.
  5.            En 2024, il s’est effectué 314,6 millions de déplacements en autobus, métro et transport adapté.
  6.            La répartition des postes autorisés à la structure de la STM est la suivante :

Unités administratives

Personnel non syndiqué

Personnel syndiqué

Total

Conseil d’administration

 1

 

 1

Direction générale

 1

 

 1

Finances, approvisionnement, affaires juridiques et normes

 49

 315

 364

Planification, livraison du service et expérience client

 502

 5 656

 6 158

Planification et entretien

 269

 2 517

 2 786

Gestion et modernisation des actifs

 55

 229

 284

Secrétariat – Direction générale

 3

 

 3

Stratégies relations avec les partenaires et communications

 17

 84

 101

Talents, diversité et expérience employés

 158

 183

 341

Transition énergétique, innovation et technologie

 66

 420

 486

Vérification générale

 14

 

 14

PLB et activités commerciales

 51

 87

 138

Total

 1 186

 9 491

 10 677

 Le Syndicat du transport de Montréal (CSN)

  1.            L’unité de négociation du syndicat désirant recourir à la grève regroupe 2 400 salariés répartis dans deux directions exécutives, soit 413 à la Planification, livraison du service et expérience client et 1 987 à la Planification et entretien.
  2.            Les 413 salariés de la direction Planification, livraison du service et expérience client sont répartis dans la Direction principale Planification, soutien à la livraison du service et parcours client. On les retrouve dans les stations, à la vente et la perception, à l’entretien des infrastructures et à l’entretien sanitaire des stations et de certains bâtiments administratifs.
  3.            Les 1 987 salariés de la direction Planification et entretien sont répartis dans cinq grands secteurs :

- La direction Entretien des centres de transport se trouve dans les neuf centres de transport, incluant le Transport adapté, où les salariés procèdent aux réparations mineures des autobus et à leur nettoyage.

- La direction Manufacturier (travaux majeurs de mécanique) s’occupe de la fabrication, de la remise à neuf de composantes ainsi que de la grande révision des autobus et du métro. De plus, l’usine Crémazie est responsable de l’atelier des pneus situé au centre de transport Legendre, qui reçoit, monte, démonte, répare tous les pneus ou, le cas échéant, les met hors service. Elle est également responsable de la fabrication et de l’usinage ou du réusinage de pièces. Le centre Legendre fait l’entretien des autobus articulés et la réparation des carrosseries. L’atelier des camions, aussi situé à cet endroit, effectue l’entretien de toute la flotte de véhicules autres que des autobus.

- La direction Entretien métro et services partagés contribue à la réalisation du service, par l’entretien préventif, l’entretien curatif, le dépannage des trains et tout projet d’amélioration pour les trains et assiste le service de secours (urgence métro). Elle voit aussi à l’entretien préventif et curatif des véhicules, remorques et équipements de travaux.

- La direction Entretien des équipements fixes et infrastructures assure le maintien en état des installations de voies, de structures de tunnel et des autres équipements du métro (ventilation, télécommunication, traction, signalisation, systèmes de pompage, etc.). Les salariés font aussi l’entretien des infrastructures, des bâtiments et des installations fixes.

- La direction Intégration, électrification, planification et logistique fournit les pièces nécessaires à la réalisation des travaux et les distribue dans les différents milieux de travail.

Le Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 610 SEPB (CTC-FTQ)

  1.             L’unité de négociation regroupe 799 salariés, regroupés dans huit directions exécutives :

Finances, approvisionnement, affaire juridique et normes : 80

Planification, livraison du service et expérience client :  127

Planification et entretien :  255

Gestion et modernisation des actifs :  119

Stratégies relation partenaires et communications :  54

Talents, diversité et expérience employée :  25

Transition énergétique, innovation et technologie :  81

PLB et activités commerciales :  58

Le Syndicat des chauffeurs d’autobus, opérateurs de métro et employés des services connexes au transport de la STM, section locale 1983, SCFP

  1.            L’unité de négociation regroupe 4 553 salariés répartis comme suit :

Chauffeurs : 3 720

Opérateurs :  405

Agents de station :  421

Gareurs :  76

  1.            Le chauffeur d’autobus assure le transport de la clientèle de façon sécuritaire et en conformité avec les règles en vigueur. Le gareur conduit des autobus sans passager afin de les stationner dans les garages.
  2.            Les chauffeurs et gareurs sont affectés dans huit centres différents. Les chauffeurs du transport adapté relèvent de l’unité Livraison du service :

 Centres de transport                               Total

 Saint-Denis 303

 Mont-Royal 226

 Frontenac 357

 LaSalle 595

 St-Laurent 467

 Anjou 535

 Legendre 577

 Stinson 485

 Transport adapté 127

  1.            L’opérateur conduit les trains du métro. L’agent de station accueille la clientèle, vend et perçoit les titres de transport et communique des informations. Il ouvre et ferme les stations et s’assure du bon fonctionnement des équipements sous sa responsabilité.
  2.            Ceux-ci relèvent de la direction Planification, livraison du service et expérience client et sont répartis ainsi :

Opération des trains :  404

Exploitation :  420

Le Syndicat du personnel administratif, technique et professionnel du transport en commun SCFP-2850-FTQ

  1.            L’unité de négociation regroupe 1 322 salariés appartenant aux groupes suivants :

1. Les employés de bureau ;

2. Les techniciens ;

3. Les professionnels œuvrant dans le domaine de l’informatique ;

4. Les professionnels œuvrant dans le domaine de la comptabilité, des budgets, des systèmes administratifs, de la paie ou de la formation technique et n’ayant pas de responsabilité d’encadrement corporatif ;

5. La secrétaire du directeur du Service à la clientèle et des communications.

  1.            Parmi ces salariés se trouvent les inspecteurs formateurs en sécurité incendie de même que les coordonnateurs en prévention des incendies, lesquels relèvent de la section Sécurité incendie.
  2.            Pour des raisons de sécurité et opérationnelles, la présence de la section Sécurité incendie est nécessaire avant que les services de sécurité incendie municipaux (Montréal, Laval, Longueuil) puissent intervenir dans les installations de la STM.
  3.            Les salariés répondent aussi aux appels d’urgence 24 heures sur 24.
  4.            Les techniciens principaux – gestion salariale planifient et exécutent les activités techniques requises pour la préparation et la production de la paie de tout le personnel de la STM.
  5.            Les coordonnateurs – planification et ordonnancement ont pour rôle la planification, la coordination, la priorisation, l’ordonnancement, le contrôle et le suivi d’activités relatives au secteur d’appartenance de leur poste. Ils définissent les priorités et déterminent les intervenants ou ressources requises (humaines et matérielles), lancent les ordres de travail sans lesquels la fabrication et les réparations ne se feront plus, affectant la disponibilité et la fiabilité des actifs.
  6.            Les techniciens principaux – soutien technique sont principalement attitrés, selon leur expertise, à l’exécution de tâches techniques de nature paraprofessionnelle aux fins de réalisation de projets complexes à court ou long terme relatifs à la construction, aux modifications, aux changements et à la vérification des installations et des équipements.
  7.            Ils ont notamment pour tâche d’identifier et de résoudre des problèmes techniques, notamment concernant l’équipement requis pour faire fonctionner la radio du métro ou la sonorisation du métro.

LA FRATERNITÉ DES CONSTABLES ET AGENTS DE LA PAIX DE LA STM - CSN

  1.            Ce syndicat comprend 221 salariés regroupés dans la direction exécutive Planification, livraison, service et expérience client. Ceux-ci patrouillent le réseau jour et nuit pour assurer la sécurité des usagers et la fluidité des déplacements ainsi que pour faire respecter les règlements.

L’ANALYSE

  1.            Le Code favorise la détermination des services essentiels par les parties ellesmêmes, qui sont les mieux placées pour les définir. Cependant, même en cas d’entente, le Tribunal doit s’assurer que celle-ci ne compromet pas la santé ou la sécurité publique et peut intervenir dans le cas contraire[5].
  2.            Le Tribunal rappelle que lorsqu’il évalue la suffisance d’une liste ou d’une entente dans un service public, il le fait en fonction des seuls critères que lui impose le Code, soit la santé ou la sécurité publique.
  3.            Après avoir analysé l’entente, le Tribunal juge que les services essentiels proposés sont suffisants pour que celles-ci ne soient pas mises en danger. Sans reprendre de façon exhaustive les termes de l’entente, en voici les grandes lignes.

L’entente

  1.            La grève débute le lundi 9 juin et se terminera le mardi 17 juin, à 23 h 59. Elle aura donc une durée de 9 jours.

Les services du métro et des autobus maintenus seulement durant les heures de pointe et en fin de soirée

  1.            Durant les jours de la semaine, les services du métro et des autobus ne seront offerts que durant les heures de pointe et en fin de soirée :

 Métro :

-         De 6 h 30 à 9 h 38 ;

-         De 14 h 45 à 17 h 48 ;

-          De 23 h à 1 h.

Autobus :

-         De 6 h 15 à 9 h 15 ;

-         De 15 h à 18 h ;

-          De 23 h 15 à 1 h 15.

Une exception : Le Grand prix du Canada

  1.            Toutefois, l’entente prévoit des dispositions particulières afin de tenir compte de l’achalandage accru causé par le Grand prix du Canada, qui aura lieu du 13 au 15 juin.
  2.            Ainsi, la veille du début de l’événement, le jeudi 12 juin, le service du métro sera offert :

-         De 6 h 30 à 10 h 38 ;

-         De 14 h 45 à 18 h 48 ;

-          De 23 h à 1 h.

  1.            Quant au service des autobus ce jour-là, il sera :

-         De 6 h 15 à 10 h 15 ;

-         De 15 h à 19 h ;

-          De 23 h 15 à 1 h 15.

  1.            Ensuite, pour les 13, 14 et 15 juin, l’entente mentionne que les services d’exploitation du métro et des autobus seront maintenus au niveau habituellement prévu pour cet événement. Le Tribunal comprend que lors de ces trois journées, il n’y aura aucune interruption des services du métro et des autobus.

Les tâches et la durée du temps de travail

  1.            L’entente mentionne qu’afin d’offrir les services du métro et des autobus durant les périodes mentionnées précédemment, la totalité des salariés maintiendra 75 % de leur prestation régulière de travail.
  2.            Toutefois, les dépanneurs à la section Pompe et ventilation, traction, télécommunication, radiocommunication et pour l’équipe urgence métro maintiendront à 100 % leur prestation de travail pour toute la durée de la grève.
  3.            Cependant, aucune heure supplémentaire ne sera effectuée, à moins que cela ne soit nécessaire pour remplacer une absence sur l’horaire régulier ou assurer le service minimal aux heures de pointe ou encore, terminer un travail urgent.

Le transport adapté maintenu à 100 %

  1.            L’entente précise que le service d’autobus du transport adapté ne sera pas interrompu par la grève et que par conséquent, les salariés affectés à ce service maintiendront à 100 % leur prestation régulière de travail.

La contribution des cadres

  1.            L’entente prévoit que la STM utilisera ses cadres pour assurer sa contribution au maintien des services essentiels.

Le Mécanisme de résolution des problèmes

  1.            L’entente prévoit qu’en cas de situation exceptionnelle ou urgente non prévue à la présente entente et mettant en cause la santé ou la sécurité des salariés ou du public, le syndicat doit fournir sans délai, à la demande de l’employeur, le personnel nécessaire pour faire face à une telle situation.
  2.            Afin de voir à l’application des services essentiels et pour répondre aux situations d’urgence, chacune des parties désignera une ou des personnes responsables des communications ainsi que des moyens mis en place pour assurer ces communications.
  3.            L’entente mentionne aussi qu’advenant que les parties éprouvent des difficultés dans l’application des services essentiels à maintenir, elles s’engagent à discuter afin de trouver une solution. À défaut d’entente, l’une ou l’autre des parties avisera le Tribunal afin que celui-ci puisse fournir l’aide nécessaire permettant de résoudre l’impasse.

La conclusion

  1.            Il y a de cela près de vingt ans, les parties étaient engagées comme aujourd’hui dans un processus de renouvellement de la convention collective. Le 8 mai 2007, le syndicat transmettait un avis indiquant son intention de recourir à la grève deux semaines plus tard, et ce, pour une durée indéterminée.
  2.            Afin de s’acquitter de son obligation de maintenir les services essentiels, la liste du syndicat proposait alors que les services du métro et des autobus soient offerts du lundi au vendredi, de 6 h à 9 h, de 15 h 30 à 18 h 30 et de 23 h à 1 h. De plus, il était prévu qu’il n’y aurait pas de métro durant la fin de semaine, mais que les autobus « rouleraient » selon une plage horaire semblable à celle de la semaine.
  3.            Le Conseil des services essentiels, le CSE, avait jugé insuffisants les services prévus à cette liste[6]. Il recommandait de la modifier afin que les services offerts la fin de semaine permettent aux usagers de la STM d’avoir accès, en plus du service d’autobus proposé, au service du métro durant les heures de pointe du matin et de la fin de l’aprèsmidi, ainsi qu’en fin de soirée.
  4.            Le CSE avait déclaré que si le syndicat acceptait cette recommandation, sa liste serait alors suffisante pour assurer que la santé ou la sécurité publique ne soit pas mise en danger lors de la grève débutant le 22 mai 2007.
  5.            Dernièrement, le Tribunal a jugé que la fermeture complète du métro lors d’une grève d’une journée prévue le dimanche 25 mai 2025 constituait une menace réelle et imminente à la santé ou la sécurité publique[7]. En conséquence, le droit de grève du syndicat a été suspendu jusqu’à ce qu’il soit démontré, à la satisfaction du Tribunal, qu’en cas d’exercice de ce droit, les services essentiels seront maintenus de façon suffisante.
  6.            Quant à la question de savoir si les parties auraient pu maintenir le service des autobus[8] malgré la fermeture du métro, il a déjà été établi que l’un ne pouvait pas fonctionner sans l’autre[9] :

[48] Près de 90 % des lignes d’autobus, permettent un lien avec au moins une station du réseau du métro. Plusieurs assurent une correspondance avec plus d’une station.

[49] Selon le directeur de la planification et du développement des réseaux de la STM, le directeur planification, le réseau est conçu de façon à connecter les services d’autobus et de métro pour permettre une mobilité entre les deux services, qui sont complémentaires et interdépendants. Il affirme que les deux services fonctionnent comme un tout et que le métro en est le cœur.

[…]

[51] Ces constats sont reconnus et pris en considérations dans la jurisprudence du Conseil des services essentiels, le CSE, depuis longtemps.

[52] Dans l’affaire Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal (CTCUM) et Fraternité des chauffeurs d’autobus, opérateurs de métro, services connexes de la CTCUM, section locale 1983 (SCFP), il écrit :

Une deuxième idée est celle de l’intégration complète du service de surface avec celui du métro. Il n’y a pas deux services de transport en commun à Montréal, mais plutôt un réseau. L’autobus et le métro sont des véhicules de transport utilisés sur des lignes où se déplacent des passagers. La conception logique d’une ligne d’autobus est basée sur les mêmes données de circulation de clientèle. L’autobus alimente le métro ou l’inverse, selon la direction de la charge principale de la clientèle.

La liste syndicale reconnaît cette interaction des deux systèmes et le Conseil en a tenu compte dans son appréciation des services offerts.

[53] Dans l’affaire Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal (STCUM) et Syndicat du transport de Montréal (employés des services d’entretien) (CSN), on lit ce qui suit :

Le réseau de surface (autobus) est conçu en fonction de la circulation du métro, qui est en quelque sorte l’épine dorsale de tout le réseau de transport en commun à Montréal.

Si le métro ne fonctionne plus, les circuits d’autobus deviennent sans aucune fiabilité puisque les passagers du réseau de surface seront déversés dans des stations de métro fermées.

[Nos soulignements et notes omises]

  1.            L’expérience passée a démontré que permettre aux autobus de circuler alors que le métro ne fonctionne pas pourrait mettre en danger la sécurité des usagers et des chauffeurs[10] :

[53] En effet, il ressort notamment de la preuve patronale présentée que les fréquences des autobus étaient la plupart du temps insuffisantes pour répondre sécuritairement au niveau d’achalandage. Des interventions policières ont été nécessaires pour faire sortir des usagers agressifs. Plusieurs clients se sont défoulés sur les chauffeurs et enfin, on a constaté une surcharge importante de la clientèle sur toutes les lignes d’autobus longeant le métro. […]

  1.            Manifestement, les parties ont tenu compte de ces enseignements. L’entente soumise à l’approbation du Tribunal mentionne que les services du métro et des autobus sont maintenus lors des heures de pointe du matin et de la fin de l’après-midi ainsi qu’en fin de soirée. De plus, compte tenu de l’affluence causée par le Grand prix du Canada, les services du métro et des autobus sont maintenus en totalité les vendredi 13, samedi 14 et dimanche 15 juin.
  2.            Le Tribunal est conscient que la grève annoncée par le syndicat causera des inconvénients importants aux usagers du transport en commun. Toutefois, « [c]’est le propre de la grève d’infléchir l’opinion publique et de déranger »[11]. Le Tribunal doit « distinguer le désagrément occasionné par la grève du danger pour la santé ou la sécurité publique. Ce danger doit être réel. Les simples craintes ou appréhensions ne peuvent suffire à neutraliser ou amoindrir le droit de grève »[12].
  3.            Le Tribunal juge donc l’entente du 30 mai 2025 suffisante pour que la santé ou la sécurité publique ne soit pas mise en danger durant la grève.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :

DÉCLARE que les services essentiels prévus à l’entente du 30 mai 2025, avec les précisions apportées dans la présente décision, sont suffisants pour que la santé ou la sécurité publique ne soit pas mise en danger lors de la grève débutant le 9 juin 2025, à 0 h, et se terminant le 17 juin 2025, à 23 h 59 ;

DÉCLARE que les services essentiels à fournir pendant la grève débutant le 9 juin 2025, à 0 h, et se terminant le 17 juin 2025, à 23 h 59, sont ceux décrits à l’entente du 30 mai 2025, jointe à la présente décision, comme si tout au long récitée, en plus des précisions contenues à la présente décision ;

RAPPELLE aux parties qu’advenant des difficultés dans la mise en application des services essentiels, elles doivent en discuter ensemble afin de trouver une solution. À défaut, elles doivent en saisir le Tribunal dans les plus brefs délais.

 

__________________________________

 

François Beaubien 

 

 

M. Julien Arcand

Pour la partie demanderesse

 

Me Andréa Gattuso

Pour l’employeur

 

Date de la mise en délibéré : 30 mai 2025

 

FB/mcl


[1]  Société de transport de Montréal et Syndicat du transport de Montréal (CSN), 2024 QCTAT 3456.

[2]  Le Code, RLRQ, c. C-27.

[3]  Art. 111.0.19 du Code.

[4]  360 MR-73 et 639 AZUR.

[5]  Fédération des employés du préhospitalier du Québec (FPHQ) et Centre de communication santé de l'Outaouais CCSO, 2023 QCTAT 265, par.18.

[6]  Société de transport de Montréal c. Syndicat du transport de Montréal (CSN), 2007 CanLII 78619 (QC CSE).

[7]  Syndicat du transport de Montréal (CSN) et Société de transport de Montréal, 2025 QCTAT 2070, par. 156.

[8]  Les chauffeurs ne sont pas en grève.

[9]  Précitée note 7.

[10]  Précitée, note 6.

[11]  Réseau de transport de la Capitale et Syndicat des employés du transport public du Québec Métropolitain inc., 2023 QCTAT 2525, par. 84.

[12]  Fraternité des travailleurs et travailleuses du préhospitalier du Québec - SCFP 7300 c. Ambulance Acton Vale, une division de Dessercom inc., 2022 QCTAT 430, par. 11.

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