Décision

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Crédit Transit inc. c. Lavoie

2025 QCCA 524

COUR D’APPEL

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

SIÈGE DE

 

QUÉBEC

 :

200-09-700103-242

(200-17-033843-228)

 

DATE :

29 avril 2025

 

 

FORMATION :

LES HONORABLES

MANON SAVARD, J.c.Q.

GUY COURNOYER, J.C.A.

ÉRIC HARDY, J.C.A.

 

 

 

CRÉDIT TRANSIT INC.

APPELANTE  intervenante volontaire agressive

c.

 

HUGUES LAVOIE, en sa qualité de fiduciaire de FIDUCIE HUGUES LAVOIE

FRANCIS LAVOIE, en sa qualité de fiduciaire de FIDUCIE HUGUES LAVOIE

LÉO McNICOLL

LE NORDIQUE SPA ET DÉTENTE INC.

INTIMÉS  demandeurs

et

GESTION HOME INC.

GTECK IMMOBILIER INC.

SACHA HINSE

MIS EN CAUSE  défendeurs

et

CINDY BOIVIN-CAYOUETTE, en sa qualité d’huissier pour la firme

PARÉ OUELLETTE BIGAOUETTE & ASSOCIÉS

LEMIEUX NOLET INC.

MISES EN CAUSE  mises en cause

et

GESTION MARIO LORTIE INC.

MISE EN CAUSE  intervenante forcée mise en cause

 

 

 

 

ARRÊT

 

 

  1.                 L’appelante se pourvoit contre un jugement[1] rendu le 9 février 2024 par la Cour supérieure (l’honorable Suzanne Hardy-Lemieux), lequel confirme le droit de propriété de l’intimée, Le Nordique Spa et Détente inc. (« Spa Détente »), dans un chalet mobile Chalet ») qu’elle aurait acquis de la mise en cause GTeck Immobilier inc. (« GTeck »), une société aujourd’hui en faillite.
  2.                 L’appelante est la créancière hypothécaire de GTeck. Elle remet en question le droit de propriété de Spa Détente dans ce bien mobilier et allègue, au surplus, en être devenue propriétaire avant la faillite de GTeck.

* * *

  1.                 À l’instruction, la preuve est administrée par le dépôt d’un interrogatoire écrit, de deux déclarations sous serment, d’une liste d’admissions et de nombreuses pièces. Aucun témoin n’est entendu. À l’exception des pièces, aucun élément de preuve n’est versé au dossier d’appel.
  2.                 GTeck est une entreprise œuvrant dans le domaine de la fabrication et la vente de chalets mobiles. Le mis en cause Sacha Hinse (« Hinse ») en est le président et l’actionnaire unique. Il est lié, en cette même qualité, à la mise en cause Gestion Home inc. (« Home »).
  3.                 Spa Détente fonde son droit de propriété sur une convention d’achat et vente du capital-actions (« Convention ») d’une société connue sous le nom de Le Nordique Spa Mont Ste-Anne inc. (« Nordique Spa »). Aux termes de cette Convention, Home fait l’acquisition, pour la somme de 1 000 000 $, de la totalité du capital-actions de Nordique Spa dont les intimés sont les propriétaires. En garantie de l’exécution de ses obligations, il est convenu que GTeck « transférera la propriété en Date de clôture en faveur de [Spa Détente] […] »[2] du Chalet étant cependant entendu qu’elle en demeurera la gardienne.
  4.                 Home et Hinse, lequel s’est porté caution, font défaut de respecter leurs obligations monétaires aux termes de la Convention. De façon contemporaine, les intimés constatent que le Chalet a été mis en vente.
  5.                 Le 23 août 2022, ils obtiennent ex parte une saisie avant jugement que la Cour supérieure autorise en vertu de l’article 518 C.p.c. Dans ses considérants, le juge indique que ce Chalet appartient à Spa Détente, reprenant à ce titre les allégations de la demande.
  6.                 Le 29 août 2022, les intimés déposent une demande introductive d’instance dans laquelle ils réclament le paiement du solde du prix de vente qui leur est dû aux termes de la Convention ainsi que la confirmation du droit de propriété de Spa Détente dans ce Chalet.
  7.                 Le 14 septembre 2022, l’appelante inscrit au Registre des droits personnels et réels mobiliers (« RDPRM ») un préavis d’exercice en vue d’une prise en paiement. Ce préavis prend appui sur une hypothèque mobilière que GTeck et Hinse lui ont notamment consentie sur une universalité de biens, de créances et de comptes à recevoir, publiée le 29 mai 2020.
  8.            Le 5 octobre 2022, Hinse, en sa qualité de représentant de GTeck et en sa qualité personnelle, signe un acte de délaissement volontaire ayant pour objet la totalité des biens hypothéqués.
  9.            Le 11 novembre 2022, les intimés obtiennent un jugement ex parte, lequel condamne Home et Hinse au paiement des sommes dues. La juge déclare également bonne et valable la saisie avant jugement autorisée le 23 août 2022, mais ne statue pas sur le droit de propriété du Chalet.
  10.            Le 23 novembre 2022, GTeck fait faillite.
  11.            Le 13 décembre 2022, Spa Détente transmet au syndic de faillite (« Syndic ») une preuve de réclamation de biens dans laquelle elle indique être propriétaire du Chalet.
  12.            Le lendemain, soit le 14 décembre 2022, le Syndic produit son rapport d’administration préliminaire dans lequel il fait état de la preuve de réclamation en question. Il indique ne pas avoir la saisine de ce Chalet et ajoute que l’appelante a exécuté une « prise en paiement de l’ensemble des actifs de la débitrice dans les mois précédant la faillite ».
  13.            Le Syndic refuse de confirmer aux intimés qu’il n’a aucun intérêt dans le Chalet tel qu’ils lui demandent de le faire. Les intimés se voient alors contraints de s’adresser à la Cour supérieure par la voie d’une procédure intitulée « Demande de directives sur l’exécution d’un jugement » afin de résoudre cette difficulté. Il s’agit de la procédure sur laquelle la juge a rendu jugement.
  14.            L’appelante intervient au débat de façon agressive afin de faire valoir son droit de propriété sur ce Chalet.

* * *

  1.            Les deux questions sur lesquelles la Cour doit se prononcer sont les suivantes :

* * *

La propriété du Chalet en vertu de la Convention

  1.            La réponse à cette question est tributaire de la portée à être donnée aux clauses 1.4, 1.5 et 5 de la Convention :

1.4 Date de clôture

Désigne le 14 septembre 2020 ou toute autre date fixée d’un commun accord entre les parties pour la signature de la documentation requise pour exécuter la transaction faisant l’objet des présentes.

1.5 Date effective

Désigne le 1er septembre 2020 ou toute autre date fixée d’un commun accord entre les parties à compter de laquelle L’ACQUÉREUR a le droit de recevoir tous les revenus générés par l’entreprise et a corrélativement l’obligation de prendre en charge le paiement de toutes les dépenses d’exploitation s’y rattachant.

[…]

5. GARANTIE

Afin de garantir le paiement du solde du prix de vente et la vente de biens et les services à rendre en vertu de l’article 4.4 des présentes, LA CAUTION SACHA HINSE cautionnera personnellement le paiement du solde du prix de vente et les obligations prévues à l’article 4.4 des présentes jusqu’à une somme maximale de TROIS CENT SOIXANTE-QUINZE MILLE DOLLARS (375 000 $), renonçant aux bénéfices de divisions et de discussions.

Par ailleurs, à titre de garantie complémentaire, Camps et Chalet, une division de GTeck Immobilier Inc. transférera la propriété en Date de clôture en faveur de LE NORDIQUE SPA ET DÉTENTE INC. d’un chalet villégiature, modèle Kodiak, NUMÉRO DE SÉRIE CM056KODIAK2019, d’une grandeur de 1152 pieds carrés tout meublé situé au 665, rue de Nickel, Québec, Québec, G2N 0J9 d’une valeur globale de DEUX CENT VINGT-CINQ MILLE DOLLARS (225 000 $) incluant les meubles. GTeck Immobilier Inc. demeurera gardien dudit chalet et des meubles et il devra conserver une assurance couvrant ces biens à titre de gardien.

[Soulignements ajoutés]

  1.            Aucune des parties ne plaide que ces clauses sont ambiguës. En revanche, chacune lui donne un sens différent.
  2.            Selon l’appelante, le transfert de propriété qui était envisagé par le deuxième alinéa de la clause 5 devait faire l’objet d’une transaction subséquente. Le temps de verbe au futur, utilisé au deuxième alinéa (« transférera »), le démontrerait. Or, aucune transaction n’a suivi la signature de la Convention. Au surplus, GTeck n’est pas partie ni signataire de cette dernière. Comment la Convention pourrait-elle donc avoir la portée que la juge lui impute?
  3.            Les intimés divergent d’opinion. Ils estiment que la clause 5 est translative de propriété. Selon eux, les mots utilisés ne laissent aucun doute quant à sa signification : « GTeck […] transférera la propriété en Date de Clôture en faveur de [Spa Détente] ». Or, selon la clause 1.4, cette date de clôture est le 14 septembre 2020. La Convention était donc complète en soi. Aucune autre formalité n’était requise pour parfaire cette cession du droit de propriété de GTeck.
  4.            La juge donne raison aux intimés, sans indiquer cependant si elle a dû, pour ce faire, interpréter ou non la clause 5 de la Convention[3].
  5.            L’appelante plaide que pour conclure de la sorte, la juge n’a pu faire autrement que de l’interpréter. Or, elle n’aurait pas dû se livrer à pareil exercice étant donné que la Convention est claire.
  6.            Qu’en est-il?
  7.            De l’avis de la Cour, il est raisonnable de tenir pour acquis que la clause 5 a été interprétée par la juge, si ce n’est qu’en raison des notions antinomiques de garantie et de vente qu’on y retrouve. Un exercice interprétatif s’imposait pour clarifier l’ambiguïté et donner un sens à la coexistence de ces deux notions juridiques hétérogènes.
  8.            Or, la remise en question de l’interprétation d’un contrat est assujettie à la norme de l’erreur manifeste et déterminante[4]. Outre que de reprendre l’argument plaidé en première instance, l’appelante ne démontre pas l’existence d’une telle erreur, d’autant qu’elle fait défaut de reproduire au dossier d’appel la preuve présentée à la juge de première instance[5].
  9.            Enfin, et bien que la juge ne se prononce pas expressément sur cette question, l’on doit déduire de ses motifs qu’elle a conclu que GTeck a donné son consentement à la Convention, même si sa signature n’y apparaît pas. À nouveau, il s’agit d’une conclusion mixte de fait et de droit dont la remise en question nécessite la démonstration d’une erreur manifeste et déterminante. À la seule lecture du jugement et en l’absence de la preuve dont la juge était saisie, la Cour ne peut intervenir.
  10.            Ainsi, la conclusion selon laquelle le Chalet est passé dans le patrimoine de Spa Détente le 14 septembre 2020 est exempte d’erreur révisable.

Le droit de suivre l’hypothèque sur le Chalet et la prise en paiement

  1.            La juge a conclu que GTeck a aliéné ce Chalet en faveur de Spa Détente dans le cours des activités de son entreprise au sens de l’article 2674 C.c.Q. :

2674. L’hypothèque qui grève une universalité de biens subsiste mais se reporte sur le bien de même nature qui remplace celui qui a été aliéné dans le cours des activités de l’entreprise.

2674. A hypothec that charges a universality of property subsists but attaches to property of the same nature which replaces property that has been alienated in the ordinary course of business of an enterprise.

Celle qui grève un bien individualisé ainsi aliéné se reporte sur le bien qui le remplace, par l’inscription d’un avis identifiant ce nouveau bien.

A hypothec that charges certain and determinate property so alienated attaches to the property that replaces it, by the registration of a notice identifying the new property.

Si aucun bien ne remplace le bien aliéné, l’hypothèque ne subsiste et n’est reportée que sur les sommes d’argent provenant de l’aliénation, pourvu que celles-ci puissent être identifiées.

If no property replaces the alienated property, the hypothec subsists but attaches only to the sums of money which are proceeds of the alienation, provided they can be identified.

  1.            C’est du moins ce qu’il faut retenir de la lecture de cet extrait du jugement entrepris :

[32] À l’examen de l’acte d’intervention, le Tribunal note que le chalet Kodiak n’est pas l’objet d’une hypothèque spécifique. Si l’on considère que le chalet fait partie de l’universalité des biens visés par l’hypothèque mobilière en faveur de Transit, celle-ci n’a pas pour effet d’empêcher pour autant sa vente ou son transfert de propriété. Cela est même permis à la clause 8 de l’acte d’hypothèque mobilière.

[33] L’article 2674 C.c.Q. énonce que :

[reproduit au paragraphe précédent]

[34] Le Tribunal retient que l’hypothèque mobilière ne suit pas le chalet Kodiak de telle sorte que Transit n’a plus aucun droit sur celui-ci dès son aliénation qui survient comme on le sait le 1er septembre 2020[6] mais avec effet à compter du 14 septembre 2020.

[Renvois omis]

  1.            Cela explique sa conclusion selon laquelle le Chalet serait devenu libre d’hypothèque à compter du 14 septembre 2020.
  2.            En première instance, les intimés avaient pourtant reconnu que l’article 2674 C.c.Q. ne s’appliquait pas en l’espèce, ne contestant pas la position de l’appelante sur cette question. Or, la juge n’en tient pas compte et n’explique pas pour quelle raison elle s’écarte du cadre du litige que les parties ont défini. En appel, la position des intimés demeure inchangée. Ils reconnaissent que l’article 2674 C.c.Q. ne s’applique pas puisque le Chalet n’a pas été aliéné dans le cours des activités de GTeck. Les parties ont encore aujourd’hui une position commune sur ce point et il n’y a pas lieu pour la Cour de s’en écarter.
  3.            Pour convaincre que le Chalet est libre d’hypothèque, les intimés se rabattent plutôt sur l’article 2700 C.c.Q. :

2700. L’hypothèque mobilière sur un bien qui n’est pas aliéné dans le cours des activités de l’entreprise et qui n’est pas inscrite sur une fiche sous la description de ce bien est conservée par la production au registre des droits personnels et réels mobiliers, d’un avis de conservation de l’hypothèque.

2700. A movable hypothec on property that is not alienated in the ordinary course of business of an enterprise and that is not registered in a file opened under the description of the property is preserved by filing a notice of preservation of hypothec in the register of personal and movable real rights.

Cet avis doit être inscrit dans les 15 jours qui suivent le moment où le créancier a été informé, par écrit, du transfert du bien et du nom de l’acquéreur ou le moment où il a consenti par écrit à ce transfert; dans le même délai, le créancier transmet une copie de l’avis à l’acquéreur.

The notice must be registered within 15 days after the creditor is informed in writing of the transfer of the property and the name of the acquirer, or after he consents in writing to the transfer. The creditor transmits a copy of the notice to the acquirer within the same time.

L’avis doit indiquer le nom du débiteur ou du constituant, de même que celui de l’acquéreur, et contenir une description du bien.

The notice must indicate the name of the debtor or grantor and of the acquirer and contain a description of the property.

  1.            Spa Détente plaide que la preuve de réclamation de biens en regard du Chalet, qu’elle a transmise au Syndic et dont ce dernier fait état dans son rapport préliminaire du 14 décembre 2022, tient lieu de l’écrit requis au deuxième alinéa de l’article 2700 C.c.Q. L’appelante n’ayant pas publié d’avis de conservation de l’hypothèque dans les 15 jours de ce rapport, le Chalet serait devenu libre d’hypothèque à compter du 29 décembre 2022. Les intimés affirment que l’appelante a reçu ce rapport préliminaire, mais n’en fournissent pas la preuve.
  2.            De son côté, l’appelante conteste avoir été informée de quelque façon que ce soit de l’aliénation du Chalet « hors du cours des activités de l’entreprise GTeck ». Elle souligne également que sa prise en paiement du Chalet est antérieure à la faillite de GTeck, de sorte que le rapport préliminaire en question ne pouvait, de toute façon, rien y changer puisque son droit de propriété était déjà cristallisé.
  3.            Cet argument de l’appelante suscite toutefois un questionnement. Son préavis d’exercice n’ayant été adressé qu’à GTeck et Hinse, et le délaissement volontaire qu’elle a obtenu ne lui ayant été consenti que par ces derniers, ces actes peuvent-ils alors être opposés à Spa Détente? S’ils ne lui sont pas opposables, il faut alors se demander si la garantie de l’appelante dans le Chalet subsiste à sa prise en paiement des biens de GTeck et de Hinse étant donné que celle-ci a eu pour effet d’éteindre la dette[7]?
  4.            En réponse à ces interrogations, l’appelante plaide que le délaissement forcé a bel et bien eu pour effet de lui transférer le droit de propriété du Chalet[8]. Pour que Spa Détente puisse lui opposer son droit de propriété, il aurait fallu qu’elle l’informe, ou s’assure qu’elle en soit informée, par écrit, conformément au second alinéa de l’article 2700 C.c.Q., que le Chalet lui avait été cédé. Or, l’appelante n’a reçu pareil écrit ni de GTeck ni de Spa Détente. Du reste, rien ne lui permettait de penser que GTeck n’était plus propriétaire du Chalet puisqu’elle en est demeurée la gardienne malgré le transfert de propriété, comme la Cour l’a déjà noté. N’ayant pas pris la précaution de dénoncer à l’appelante son titre de propriété, Spa Détente ne saurait se plaindre de ne pas avoir reçu le préavis d’exercice ni prétendre que l’appelante n’est pas devenue propriétaire du Chalet du fait de sa prise en paiement.
  5.            La Cour se rallie à cet argument de l’appelante. Autrement, il serait trop facile de faire obstacle au droit de suite[9] du titulaire d’une hypothèque mobilière en le gardant dans l’ignorance de l’aliénation d’un bien hypothéqué hors du cours des affaires de son débiteur.
  6.            Les droits hypothécaires de l’appelante sur le Chalet pouvaient être exercés entre les mains de GTeck tant et aussi longtemps que le droit de propriété de Spa Détente ne lui avait pas été dénoncé de la façon prévue à l’article 2700 C.c.Q.
  7.            Spa Détente ne prétend pas le contraire. Elle plaide plutôt que le délaissement volontaire aurait dû être inscrit au RDPRM. Ne l’ayant pas été, il ne lui serait pas opposable de sorte qu’il était encore temps, en date du rapport préliminaire du Syndic, soit le 14 décembre 2022, d’informer l’appelante qu’elle avait fait l’acquisition du Chalet le 14 septembre 2020. À défaut par l’appelante d’avoir inscrit au RDPRM un avis de conservation de son hypothèque dans les 15 jours qui ont suivi le rapport préliminaire du Syndic, son hypothèque aurait cessé de produire ses effets sur le Chalet.
  8.            La Cour ne peut souscrire à cet argument qui est fondé sur une prémisse inexacte.
  9.            Aucune disposition législative ne rendait nécessaire ni même possible l’inscription du délaissement forcé au RDPRM. Seule l’inscription du préavis d’exercice était requise[10], ce qui a eu lieu.
  10.            En raison de sa prise en paiement, l’appelante est donc devenue propriétaire du Chalet en date du 5 octobre 2022 et son droit de propriété était opposable à Spa Détente. Dès lors, aucune hypothèque ne subsistait sur ce bien. Partant, l’appelante n’avait aucun geste à poser pour protéger ses droits lorsqu’elle a eu connaissance du rapport préliminaire du Syndic du 14 décembre 2022, à supposer qu’elle l’ait réellement reçu.

* * *

  1.            La juge a donc erré en concluant que Spa Détente avait acquis ce Chalet dans le cours des activités de GTeck et que ce transfert de propriété en sa faveur avait eu pour effet de le purger de l’hypothèque qui le grevait.

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

  1.            ACCUEILLE l’appel, avec les frais de justice;
  2.            INFIRME le jugement de première instance prononcé dans le dossier de la Cour supérieure du Québec portant le numéro 200-17-033843-228 et, procédant à rendre le jugement qui aurait dû être rendu;
  3.            REMPLACE les paragraphes [40] à [43] du dispositif de ce jugement par les suivants :

[40] REJETTE la demande de directives sur l’exécution d’un jugement des demandeurs;

[41] ANNULE la saisie avant jugement des demandeurs à l’égard du chalet de villégiature modèle Kodiak portant le numéro de série CM054KODIAK2019;

[42] RECONNAÎT la validité et l’opposabilité du délaissement volontaire signé par les défendeurs Sacha Hinse et GTeck Immobilier inc. en faveur de Crédit Transit inc. en date du 5 octobre 2022 et DÉCLARE Crédit Transit inc. propriétaire du chalet de villégiature modèle Kodiak portant le numéro de série CM054KODIAK2019;

[43] LE TOUT, avec frais de justice en faveur de Crédit Transit inc.

 

 

 

 

 

MANON SAVARD, J.c.Q.

 

 

 

 

 

GUY COURNOYER, J.C.A.

 

 

 

 

 

ÉRIC HARDY, J.C.A.

 

Me William Noonan

Me Anne-Marie Simard

Hickson Noonan

Pour l’appelante

 

Me Mélissa Tozzi

Fortier, D’Amour, Goyette

Pour les intimés

 

Date d’audience :

26 mars 2025

 


[1]  Lavoie (Fiducie Lavoie) c. Gestion Home inc., 2024 QCCS 390 [jugement entrepris].

[2]  Clause 5 de la Convention.

[3]  Jugement entrepris, paragr. 5, 6, 7, 34, 36 et 38.

[4]  Uniprix inc. c. Gestion Gosselin et Bérubé inc., 2017 CSC 43, paragr. 41.

[5]  Boutom c. Sauriol, 2025 QCCA 61, paragr. 5-6; Droit de la famille — 112606, 2011 QCCA 1554, paragr. 18-25; Pateras c. M.B., [1986] R.D.J. 441, paragr. 4-6.

[6]  De l’avis de la Cour, la juge fait erreur lorsqu’elle indique que cette aliénation a pris effet le 1er septembre 2020. Elle est plutôt devenue effective à la date de clôture de la Convention, soit le 14 septembre 2020, comme la clause 5 le précise.

[7]  Art. 2661 et 2782 C.c.Q.

[8]  Art. 2781 al. 2, C.c.Q.

[9]  Art. 2660 et 2751 C.c.Q.

[10]  Art. 2757 C.c.Q.

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