Décision

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Quartier One West inc. c. Autorité régionale de transport métropolitain

2024 QCCS 227

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

 :

500-17-112904-209

 

DATE :

29 janvier 2024

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE DONALD BISSON, J.C.S.

(JB4644)

 

 

QUARTIER ONE WEST INC.

Demanderesse

c.

AUTORITÉ RÉGIONALE DE TRANSPORT MÉTROPOLITAIN

PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC

VILLE DE POINTE-CLAIRE

Défendeurs

 

 

JUGEMENT

(Sur demande de pourvoi en contrôle judiciaire et demande de jugement déclaratoire)

 

 

Table des matières

1. Introduction : contexte et questions en litige 2

2. Les faits non contestés pertinents 5

a) Les parties 5

b) Les immeubles 5

c) Faits entourant le Règlement, la redevance de transport et l’évolution des procédures dans le dossier 7

3. Principales dispositions législatives et règlementaires pertinentes 9

4. Analyse et discussion 18

a) Question 1 : La demande de modification de la Demande par la demanderesse doit-elle être permise?18

b) Question 2 : La Ville a-t-elle contrevenu au Règlement lorsqu’elle a déterminé la superficie de plancher et la valeur des travaux, en considérant la superficie de plancher en un bloc plutôt qu’individuellement pour chacune des 14 maisons de ville?              21

c) Question 3 : Le Règlement est-il nul car il est déraisonnable et crée une injustice flagrante à l'égard de la demanderesse?              31

A. Quelle est la norme de contrôle applicable? 33

B. Le Règlement est-il déraisonnable? 36

d) Question 4 : La redevance de transport est-elle une redevance de nature règlementaire relevant de la compétence de la province ou ne constitue-t-elle plutôt pas une taxe indirecte et est-elle de ce fait inconstitutionnelle?              38

A. Arguments de la demanderesse 38

B. Décision du Tribunal 45

e) Question 5 : La demanderesse a-t-elle droit aux condamnations monétaires qu’elle réclame? 55

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL : 56

 

1.                 Introduction : contexte et questions en litige

[1]               Le Tribunal est saisi d’une demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-remodifiée du 21 juillet 2022 (la « Demande »[1]), déposée par la demanderesse Quartier One West inc. à l’encontre des défendeurs Autorité régionale de transport métropolitain ARTM »), Procureur général du Québec (« PGQ ») et la Ville de Pointe-Claire (la « Ville »).

[2]               La demanderesse est la propriétaire de plusieurs terrains[2] proches de la future station Fairview−Pointe-Claire du Réseau express métropolitain (le « REM »). Puisque la demanderesse veut construire des maisons de ville et des tours à condos sur ses terrains qui sont situés à l’intérieur d’un périmètre de 1 km de la station Fairview-Pointe-Claire du REM, la Ville a, en vertu de la règlementation adoptée suite au développement du REM, exigé le paiement d’une redevance de transport comme condition à l’obtention des permis de construction. La demanderesse a payé les redevances exigées, dont certaines sous protêt[3]. Le but recherché par la demanderesse est d’obtenir le remboursement des redevances payées, qu’elle n’avait pas à payer selon elle.

[3]               À cette fin, la demanderesse demande au Tribunal les éléments suivants :

1)            Une déclaration formelle selon laquelle les articles 38, 40, 43, 83 et 84 de la Loi concernant le Réseau électrique métropolitain[4] (la « Loi REM ») et les articles 72 (10º), 79 (10º), 82, 84.1, 97.1 à 97.12, 108.1 et 108.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain[5] (la « Loi ARTM »), de même que le Règlement concernant la redevance de transport à l’égard du Réseau express métropolitain[6] (le « Règlement ») qui en découle, sont inconstitutionnels[7] en ce que ces dispositions imposent une redevance de transport qui est une taxe indirecte déguisée, qui ne peut être justifiée en invoquant la capacité des Provinces d’exiger des charges non fiscales, ni en invoquant le pouvoir de légiférer pour créer des licences dans le but de prélever un revenu pour objet local, ni en invoquant l’exception à l’incompétence provinciale en matière de taxation indirecte. Il y aurait aussi une délégation inconstitutionnelle du pouvoir de taxation opérée les dispositions de la Loi REM et la Loi ARTM. En conséquence, la demanderesse demande le remboursement de toutes les redevances payées en vertu de ces dispositions;

2)            Si le Tribunal rejette le premier argument, la demanderesse demande de déclarer le Règlement ultra vires et inapplicable, ou du moins inopposable à son endroit, parce que celui-ci est déraisonnable puisque le véritable trajet à pied ou en voiture entre les immeubles de la demanderesse et la station Fairview-Pointe-Claire du REM est supérieure à 1 km vu la présence de l’autoroute 40. Le Règlement crée également une injustice flagrante en excluant du rayon de 1 km les obstacles naturels comme les cours d’eau, mais pas les obstacles urbains comme l’autoroute 40;

3)            Subsidiairement, la demanderesse demande l’annulation de la décision prise par la Ville d’exiger le paiement de la redevance de transport comme condition à l’obtention des permis de construction pour les 14 maisons de ville de la demanderesse sur ses terrains, parce que la Ville a erré dans l’application des articles 6, 9 et 11 du Règlement et dans celle du Guide d’application du Règlement concernant la redevance de transport à l’égard du Réseau express métropolitain (le « Guide », Pièces P-7 et P-7A) concernant la méthode de calcul de la superficie de plancher des bâtiments, les maisons de ville devant être considérées individuellement et non comme un tout, selon elle. La demanderesse demande de déclarer que la méthode de calcul de la valeur des travaux par la Ville est erronée et doit s’établir selon le calcul de la valeur des travaux de chacun des 14 maisons individuellement;

4)            Dans tous les cas, la demanderesse demande au Tribunal de condamner l’ARTM et la Ville à lui rembourser les sommes versées pour acquitter la redevance de transport, soit : 1) un montant de 318 170,40 $ pour les 14 maisons de ville, avec intérêts et indemnité additionnelle en date du paiement, le 10 juin 2020; et 2) une somme de 3 091 833,60 $ qui vise deux autres paiements versés par la demanderesse pour la redevance de transport sur les deux tours de condos, avec intérêts et indemnité additionnelle en date de chacun des paiements[8].

[4]          Lors du procès[9], la demanderesse a demandé en outre, comme autre argument subsidiaire, le remboursement d’un montant de 55 922,40 $, inclus dans le montant payé de 318 170,40 $ pour les 14 maisons de ville, car ce montant de 55 922,40 $ viserait selon elle des superficies de terrain extérieur, qui ne peuvent être incluses selon elle dans le calcul de la redevance aux termes du Règlement. Suite à une réouverture d’enquête, la demanderesse a retiré cette demande subsidiaire, puisque la preuve ne la supportait pas.

[5]               Les trois défendeurs contestent toutes les demandes de la demanderesse.

[6]               La demande de pourvoi en contrôle judiciaire est présentée en vertu des articles 529 et 530 du Code de procédure civile Cpc ») et la demande en jugement déclaratoire est présentée en vertu de l’article 142 Cpc et de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982[10]. La demanderesse invoque également l’article 49 Cpc.

[7]               La preuve de la demanderesse au procès consiste en la déclaration assermentée du 22 décembre 2023 de M. Charles Valenti, représentant de la demanderesse, accompagnée des Pièces P-1 à P-13 et P-01[11]. La Pièce P-5 est le rapport de l’expert Jean Dubé sur la portée que peut avoir l’apparition d’une nouvelle station du REM sur un projet de développement résidentiel au coin de l’Avenue Alston et du boulevard Hymus. Ce rapport écrit vaut témoignage d’expert en vertu de l’article 293 Cpc.

[8]               Les défendeurs ont mis en preuve les Pièces A-1 à A-7 (ARTM), PGQ-1 à PGQ12[12] (PGQ) et PC-1 à PC-16 (la Ville), en plus de déposer la transcription de l’interrogatoire préalable du 26 février 2021 de M. Valenti, représentant de la demanderesse. La Ville a également fait témoigner son représentant, M. Stéphane Breault, qui a été contre-interrogé.

[9]               Tel que mentionné et discuté oralement lors du procès, la Pièce A-3 a été mise sous scellés vu son caractère confidentiel.

[10]           Les arguments détaillés des parties sont étudiés plus loin.

[11]           Le Tribunal doit donc décider des questions suivantes :

1)            La demande de modification de la Demande par la demanderesse doit-elle être permise?

2)            La Ville a-t-elle contrevenu au Règlement lorsqu’elle a déterminé la superficie de plancher et la valeur des travaux, en considérant la superficie de plancher en un bloc plutôt qu’individuellement pour chacune des 14 maisons de ville?

3)            Le Règlement est-il nul car il est déraisonnable et crée une injustice flagrante à l'égard de la demanderesse?

4)            La redevance de transport est-elle une redevance de nature règlementaire relevant de la compétence de la province ou ne constitue-t-elle plutôt pas une taxe indirecte et est-elle inconstitutionnelle de ce fait?

5)            La demanderesse a-t-elle droit aux condamnations monétaires qu’elle réclame?

[12]           Quant à la question 4, le Tribunal rappelle que, considérant la règle de la retenue judiciaire, la question de la constitutionnalité du Règlement, de la Loi ARTM et de la Loi concernant le REM ne doit être traitée que si elle doit être tranchée pour la solution du litige[13]. Ainsi, si le Tribunal conclut que les décisions de la Ville doivent être annulées sur la base d’une interprétation erronée du Règlement (Question 2) ou sur la base de l’invalidité en droit administratif du Règlement (Question 3) et que cela donnerait raison à la demanderesse pour tous ses projets de construction, son analyse doit alors s’arrêter et il ne doit pas se pencher sur la question de la validité constitutionnelle de la redevance de transport visée en l’espèce.

[13]           Le Tribunal débute par les faits non contestés pertinents, puis ensuite par les principales dispositions législatives et règlementaires pertinentes.

2.                 Les faits non contestés pertinents

a)            Les parties

[14]           La demanderesse est une personne morale œuvrant dans la construction résidentielle.

[15]           L’ARTM est régie par la Loi ARTM et, à ce titre, elle planifie, finance et organise les activités de transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal. En vertu de sa loi constitutive, l’ARTM a le pouvoir d’identifier des « zones de son territoire propices à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif qu’elle finance, même en partie, avec l’imposition d’une redevance de transport » (art. 97.1 de la Loi ARTM).

[16]           La Ville est responsable de percevoir cette redevance de transport sur son territoire pour le compte de l’ARTM (art. 97.6 de la Loi ARTM et art. 13 du Règlement).

[17]           Le PGQ est partie au dossier vu la demande de déclaration d’inconstitutionnalité formulée par la demanderesse.

b)            Les immeubles

[18]           Le 20 décembre 2018, la demanderesse a acquis le lot 2 526 223 du cadastre du Québec, circonscription foncière de Montréal (le « Terrain »)[14]. Le Terrain est situé sur le territoire de la Ville, au sud du boulevard Hymus, entre l’avenue Alston et la rue Paprican, à environ 450 mètres au sud de l’autoroute 40.

[19]           La demanderesse comptait construire sur le Terrain 14 maisons de ville ayant front sur la rue Alston[15], ce qu’elle a finalement fait. Les 14 maisons de ville sont réparties ainsi : il y a deux « blocs » de sept maisons collées l’une à côté de l’autre au niveau horizontal, avec une entrée pour les voitures entre les deux blocs. Il y a du stationnement extérieur en arrière des maisons et du terrain gazonné autour du stationnement et en avant des maisons.

[20]           Par la suite, la demanderesse a acquis deux autres immeubles sis au 248 et 250 rue Hymus, sur lesquels elle désire construire deux projets de tours de condos, ce qu’elle a également fait. Tous ces immeubles proviennent du démembrement d’un lot plus grand; le détail de ce démembrement n’a aucune pertinence. Ce qui est pertinent est que la demanderesse a trois projets sur ses terrains : une série de 14 maisons de ville et deux tours à condos. En demandant un permis de construction pour ces projets, la Ville lui a imposé la redevance en litige.

[21]           Aux moments pertinents, au nord de l’autoroute 40, CDPQ Infra, une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, était en train de construire la station Fairview−Pointe-Claire du REM. Le REM est un système de métro léger automatisé desservant la grande région de Montréal.

[22]           La preuve non contredite démontre que la station Fairview−Pointe-Claire est plus compliquée d’accès pour les propriétés situées au sud de l’autoroute 40, où sont situés les projets de la demanderesse. Pour les immeubles de la demanderesse visés par le présent jugement, l’accès au REM est situé de l’autre côté de l’autoroute 40. Il faut traverser l’autoroute 40 pour avoir accès au REM, à pied ou en auto.

[23]           L’autoroute 40 est une infrastructure comportant trois voies dans chaque direction, plus deux chemins de service contenant deux voies chacun. Ainsi, pour les projets de la demanderesse, un détour par le boulevard Saint-Jean est nécessaire pour atteindre la station Fairview−Pointe-Claire, ce qui représente un trajet d’environ 2,5 kilomètres à pied et une durée d’un peu plus de 30 minutes à partir du Terrain[16]. En automobile, le détour se fait sur une plus grande distance encore, étant donné la nécessité de contourner le centre commercial Fairview; vu ce détour, l’accès à la station Des Sources au sud de l’autoroute 40 prend la même durée que l’accès à la station Fairview−Pointe-Claire, malgré une distance supérieure[17] (Pièce P-4). Ces durées de chemin à pied et en auto ne sont pas contredites par les défendeurs.

[24]           Il appert de la preuve d’expert de la demanderesse qu’une infrastructure comme une station du REM génère une plus-value pour les immeubles situés à une distance de marche de celui-ci, mais seulement pour une distance d’environ 800 mètres ou de dix minutes de marche[18]. Toutefois, comme le souligne M. Dubé dans son rapport, « la présence de contraintes urbaines ou naturelles s’avère un facteur incontournable » pour déterminer la portée spatiale des impacts de l’amélioration du transport en commun sur les valeurs résidentielles (Pièce P-5).

[25]           L’expert note également qu’à partir du Terrain, le « temps pour rejoindre la station [Fairview−Pointe-Claire] s’avère largement supérieur à ce qui est identifié dans la littérature » comme étant un temps susceptible d’avoir un impact sur les valeurs immobilières (Pièce P-5). En fait, selon l’expert, le temps de marche de 30 minutes est plus du triple des dix minutes identifiées comme ayant un impact sur la variation des valeurs immobilières (Pièce P-5). L’expert conclut donc que la durée de marche réelle entre la station Fairview−Pointe-Claire et les immeubles de la demanderesse fait en sorte que ces immeubles ne prennent donc pas de valeur, même s’ils sont situés proche du REM.

c)             Faits entourant le Règlement, la redevance de transport et l’évolution des procédures dans le dossier

[26]           Le 22 mars 2018[19], le ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des Transports a adopté le Règlement.

[27]           Le Règlement « a pour objet de financer le Réseau express métropolitain, un système de transport collectif, en assujettissant certains travaux au paiement d’une redevance de transport » (art. 1 du Règlement). Dans les zones visées de 1 km entourant les stations du REM, certains travaux de construction de bâtiments sont assujettis à une redevance versée pour le financement du REM; c’est la fameuse redevance de transport, en litige ici.

[28]           Ainsi, est sujette à la redevance toute construction d’un bâtiment dont la valeur au moment de la demande de permis de construction excède 782 308 $[20], compte tenu de l’indexation en 2020, ET dont la superficie de plancher est de 186 m2 ou plus (art. 3 à 5 du Règlement et art. 97.2 de la Loi ARTM). La redevance est calculée selon la superficie de plancher et le taux de redevance. Ce taux a varié au cours des années en vertu de la législation, mais cela n’a aucune pertinence ici.

[29]           Dans des échanges de courriel des 20 et 21 janvier 2020[21], M. Valenti, représentant de la demanderesse, indique à la Ville qu’il considère que la redevance relative au REM n’a pas à être payée sur les 14 maisons de ville qu’il considère comme étant 14 bâtiments distincts. M. Breault de la Ville lui répond que le projet des 14 maisons de ville est considéré par la Ville comme un bâtiment multifamilial sous forme de maisons de ville puisque le règlement de zonage ne permet pas de lotissement unifamilial de type maisons de ville, et qu’il faut donc considérer le projet proposé « dans son ensemble », ce qui fait que le projet est donc assujetti à l’application de la redevance du REM.

[30]           Suite à cet échange et aux discussions verbales entre la Ville et la demanderesse, cette dernière n’a d’autre choix que, pour les 14 maisons de ville, de présenter une demande de permis en un seul bloc pour viser un seul bâtiment multifamilial[22].

[31]           En vertu du Règlement, à une date non précisée mais entre le 14 avril 2020 et le 10 juin 2020, la Ville a exigé le paiement de la redevance de transport comme condition à l’obtention des permis de construction pour les 14 projets de construction de maisons de la demanderesse, situées sur le Terrain. Le 10 juin 2020, la demanderesse a payé sous protêt le montant de 318 170,40 $ exigé par la Ville, en expliquant de nouveau sa position opposée selon laquelle il y a 14 maisons de ville qui ne devraient pas payer la redevance[23]. Le 16 juillet 2020, la demanderesse a déposé sa demande originale, qui était alors uniquement une demande de pourvoi en contrôle judiciaire en révision de la décision de la Ville d’assujettir les travaux de construction de 14 maisons de ville sur les lots 5 888 171 à 5 888 185 du cadastre du Québec à la redevance de transport prévue au Règlement.

[32]           En deux étapes, soit le 27 janvier 2021 et à une autre date non précisée en 2021, la Ville a exigé de la demanderesse le paiement d’un montant total de 3 091 833,60 $ à titre de la redevance de transport pour les deux projets de construction de tours de condos sur les deux autres terrains de la demanderesse situés au 248 et 250 rue Hymus. La demanderesse a payé ce montant, les 15 juin 2021 et 30 décembre 2020[24]. Le 4 février 2022, la demanderesse a modifié sa demande originale de pourvoi en contrôle judiciaire et a alors porté en révision les décisions de la Ville d’assujettir les travaux de construction de nouvelles tours condos situés aux 248 et 250, boulevard Hymus, à la redevance de transport.

[33]           Par la suite, le 21 juillet 2022, la demanderesse a encore modifié sa procédure en déposant la Demande, laquelle inclut maintenant une demande en jugement déclaratoire, afin d’ajouter l’argument constitutionnel.

[34]           Un avis de question constitutionnelle a été notifié au PGQ le 2 décembre 2020 en vertu des articles 76 et 77 Cpc, et un avis modifié l’a été le 5 janvier 2021. Ces avis visent uniquement les dispositions législatives qui apparaissent formellement à la Demande. Le mémoire de la demanderesse du 3 février 2021 contient un tel avis pour les autres dispositions législatives attaquées.

[35]           Le 20 décembre 2023, la demanderesse a déposé une demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-re-remodifiée, mais le Tribunal va rejeter cette modification, pour les motifs qui apparaissent à la question 1. Le Tribunal va accueillir l’Opposition du PGQ à cette modification. Le Tribunal ne considère donc aucun fait postérieur au 21 juillet 2022[25]. Ainsi, le Tribunal ne tient pas compte des allégations de la demande du 20 décembre 2023 selon lesquelles les14 maisons de ville auraient été vendues à un tiers.

[36]           La demanderesse estime que, puisqu’elle n’a pas encore complété l’ensemble des bâtisses qu’elle projette de construire, un montant additionnel d’au moins 2 300 000 $ sera réclamé par la Ville à titre de redevance de transport pour terminer l’ensemble des habitations projetées.

[37]           Par ailleurs, on doit noter que la perception de la redevance incombe à la municipalité locale sur le territoire de laquelle la construction est effectuée (art. 13 du Règlement et art. 97.6 de la Loi ARTM). La municipalité a cependant l’obligation de remettre périodiquement les sommes collectées à l’ARTM (art. 18 du Règlement).

[38]           Les zones assujetties au Règlement ont été identifiées par l’ARTM et figurent à l’annexe B du Règlement. À l’exception des zones situées au centre-ville de Montréal, toutes les zones sont formées d’un cercle concentrique d’un kilomètre de rayon autour de chaque station du REM (art. 11 du Règlement).

[39]           Le Tribunal présente maintenant le texte des principales dispositions législatives et règlementaires pertinentes pour trancher le présent litige.

3.                 Principales dispositions législatives et règlementaires pertinentes

[40]           La Loi REM contient les dispositions pertinentes suivantes :

CHAPITRE I

DISPOSITIONS INTRODUCTIVES

1. La présente loi a pour objet de faciliter la réalisation d’un projet d’infrastructure de transport collectif visé à la section IX.3 de la Loi sur les transports (chapitre T-12) en vue de la mise en place et de l’exploitation d’un système de transport collectif annoncé publiquement comme le « Réseau électrique métropolitain ».

CHAPITRE V

INTÉGRATION MÉTROPOLITAINE

38. La Caisse et l’Autorité peuvent conclure une entente prévoyant la contribution financière que l’Autorité apporte en vue de la réalisation du Réseau.

Les sommes suivantes constituent la contribution de l’Autorité :

1° 512 000 000 $ tenant lieu de la captation de la plus-value foncière;

2° les autres sommes versées selon la périodicité déterminée par la Caisse et l’Autorité, jusqu’à l’atteinte d’une cible de financement qu’elles fixent jusqu’à concurrence d’un montant maximal de 600 000 000 $ et pour une période n’excédant pas 50 ans.

Un versement visé au paragraphe 2° du deuxième alinéa, pour une période, ne peut excéder, pour cette période, le produit de la redevance, établie en vertu des dispositions du chapitre V.1 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain (chapitre A-33.3), prélevée à l’égard du Réseau.

L’entente prévue au premier alinéa prend fin si la Caisse cède en tout ou en partie ses droits, titres et intérêts dans les terrains constituant l’assiette de la voie de guidage du Réseau. Elle n’a force obligatoire que si elle est approuvée par le ministre, avec ou sans modification.

À défaut par l’Autorité et la Caisse de s’entendre dans le délai que leur indique le ministre, celui-ci peut déterminer les modalités et conditions d’une telle entente, laquelle est alors réputée conclue entre elles.

40. Chaque entente prévue aux articles 38 et 39 est réputée être une entente conclue en vertu du paragraphe 3° du troisième alinéa de l’article 8 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain.

Les modalités de la contractualisation entre les parties à ces ententes figurant à la politique de financement de l’Autorité, prévue à l’article 72 de cette loi, n’ont pas à être approuvées par la Communauté métropolitaine de Montréal. Une modification proposée à ces modalités, le cas échéant, n’a pas d’effet entre les parties, à moins qu’elles n’y consentent.             

43. Les zones identifiées par l’Autorité, conformément à l’article 97.1 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain, propices à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif fournis par le Réseau, doivent être comprises dans un rayon n’excédant pas 1 km de chacune de ses gares ou de ses stations.

83. La Caisse et l’Autorité doivent conclure la première entente prévue à l’article 38 au plus tard le 26 novembre 2017.

À défaut, le ministre détermine, sans délai, les modalités et conditions de l’entente visée à cet article, laquelle est alors réputée conclue entre la Caisse et l’Autorité.

84. L’Autorité doit, au plus tard le 26 novembre 2017, prendre le premier règlement prévu à l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain (chapitre A-33.3), édicté par l’article 54, concernant la redevance de transport destinée à financer les coûts des ententes conclues en vertu des articles 38 et 39. Les modalités de la redevance n’ont alors pas à être conformes à celles figurant à la politique de financement de l’Autorité.

À défaut, le ministre peut édicter ce règlement. Ce dernier se substitue alors à l’Autorité pour identifier les zones visées à l’article 97.1 de cette loi, édicté par l’article 54.

(Soulignements ajoutés)

[41]           La Loi REM modifie d’ailleurs la Loi ARTM en y ajoutant de nouveaux articles et éléments divers quant à la redevance de transport. Voici donc les dispositions pertinentes de la Loi ARTM, incluant les nouveaux articles et ajouts divers :

72. L’Autorité élabore et adopte une politique de financement qui comporte notamment:

1° des cibles de financement par les recettes tarifaires, incluant les modalités de financement des innovations et des initiatives tarifaires que détermine l’Autorité notamment parmi les différentes propositions qu’elle reçoit;

2° les modalités de la contractualisation des services de transport collectif fournis par les organismes publics de transport en commun et les autres exploitants d’un système de transport collectif;

3° les mécanismes de révision des sources de financement et ceux permettant de déterminer l’affectation des sommes que l’Autorité reçoit en vertu des paragraphes 1° à 7° de l’article 79;

4° les modalités de financement de ses dépenses en immobilisation;

5° les modalités de l’établissement des contributions financières exigées en vertu de l’article 81;

6° le cas échéant, les modalités de l’établissement des contributions financières exigées en vertu de l’un ou l’autre des articles 83 et 84;

7° le cas échéant, des modalités particulières permettant de répartir, entre les municipalités locales de la couronne nord ou entre les municipalités locales de la couronne sud, au sens de la Loi sur le Réseau de transport métropolitain (chapitre R-25.01), le montant total des contributions qui leur seraient exigées, en vertu de l’article 81 ou de l’article 83, en fonction des modalités générales déterminées en vertu des paragraphes 5° et 6°;

8° les modalités de l’établissement des contributions financières que peut exiger le Réseau de transport métropolitain en vertu de l’article 52 de la Loi sur le Réseau de transport métropolitain;

9° le cas échéant, les modalités encadrant la dotation du fonds spécial qu’elle constitue pour financer le développement et l’amélioration des services de transport collectif;

10° le cas échéant, les modalités des redevances de transport établies en vertu du chapitre V.1.

La politique doit tenir compte des particularités respectives des territoires des municipalités locales desservies et viser l’atteinte de l’équité entre ces territoires

79. L’Autorité reçoit pour le financement de ses activités:

1° les recettes perçues de la vente de titres de transport collectif;

2° les autres formes de rémunération pour les biens et les services qu’elle offre;

3° la part de la contribution des automobilistes au transport en commun déterminée par un règlement pris en vertu de l’article 88.6 de la Loi sur les transports (chapitre T-12);

4° le montant versé par le ministre du Revenu en vertu de l’article 55.2 de la Loi concernant la taxe sur les carburants (chapitre T-1);

5° le montant payable en vertu de l’article 80 par chaque municipalité locale dont le territoire est compris dans celui de l’Autorité;

6° le cas échéant, le montant de la taxe sur l’immatriculation perçue par la Société de l’assurance automobile du Québec conformément à l’article 96.1 de la Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal (chapitre C-37.01);

7° le cas échéant, les aides gouvernementales qui peuvent lui être octroyées;

8° la contribution exigée en vertu de l’article 81;

9° le cas échéant, la contribution exigée en vertu de l’un ou l’autre des articles 83 et 84;

10° les redevances de transport visées à l’article 84.1.

82. Les sommes visées aux paragraphes 3°, 4°, 6°, 7° et 10° du premier alinéa de l’article 79 que reçoit l’Autorité au cours d’un exercice financier ne peuvent servir à réduire le montant global des contributions financières exigibles en vertu de l’article 81.

Le montant global des contributions exigibles en vertu de l’article 81 ne peut être inférieur à celui qu’ont versé l’ensemble des municipalités locales dont le territoire est compris dans celui de l’Autorité pour l’exercice financier 2016. Le montant global versé au cours de cet exercice financier constitue le seuil de référence et il est indexé de plein droit, au 1er janvier de chaque année, selon le taux correspondant à la variation de l’indice moyen d’ensemble, pour le Québec, des prix à la consommation, sans les boissons alcoolisées, les produits du tabac et le cannabis récréatif, pour la période de 12 mois qui se termine le 30 septembre de l’année qui précède celle pour laquelle ce seuil doit être indexé. L’Autorité publie ce taux sans délai sur son site Internet.

84.1. L’Autorité peut financer le coût d’une nouvelle offre de services de transport collectif résultant des ententes conclues en vertu de l’article 8 par une redevance de transport, prévue au chapitre V.1, qui est particulière à chacune de ces ententes.

Les contributions exigées en vertu des articles 81, 83 et 84 ne peuvent servir à financer le coût d’une entente conclue en application de l’article 38 de la Loi concernant le Réseau électrique métropolitain (chapitre R-25.02).

CHAPITRE V.1

REDEVANCE DE TRANSPORT

97.1. L’Autorité identifie les zones de son territoire propices à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif qu’elle finance, même en partie, avec l’imposition d’une redevance de transport.

Elle tient compte du plan métropolitain d’aménagement et de développement de la Communauté métropolitaine de Montréal et du schéma d’aménagement et de développement de la Municipalité régionale de comté de la Rivière-du- Nord à l’égard du territoire de la Ville de Saint-Jérôme.

97.2. L’Autorité peut, par règlement, assujettir au versement d’une redevance de transport les travaux dont la valeur excède 792 165,00$ et visant:

  la construction de bâtiment;

  la modification d’un bâtiment incluant un réaménagement, une reconstruction ou l’augmentation de sa superficie de plancher;

  à changer l’usage d’un bâtiment.

La redevance correspond au produit obtenu en multipliant le taux prévu au règlement par la superficie de plancher visée par les travaux, délimitée selon la méthode prévue au règlement. Les modalités de cette redevance doivent être conformes à celles figurant à la politique de financement de l’Autorité.

97.3. Le règlement pris pour l’application du premier alinéa de l’article 97.2 prévoit:

 les zones où les travaux sont assujettis à la redevance, lesquelles doivent correspondre à celles identifiées conformément à l’article 97.1;

 le taux de la redevance, qui peut varier:

a) selon la distance séparant les travaux ou les bâtiments assujettis d’un service de transport collectif;

b) selon les catégories de travaux et de bâtiments prévues par le règlement;

c) par zones et à l’intérieur de celles-ci, afin notamment de favoriser la densification et la revitalisation;

la méthode permettant de délimiter la superficie de plancher visée par les travaux;

les éléments pris en compte dans la détermination de la valeur des travaux;

les modalités et conditions de la perception et du remboursement de la redevance;

les modalités et conditions de la gestion de la redevance par les municipalités perceptrices.

Des travaux peuvent être assujettis au versement d’une redevance de transport même s’ils sont réalisés sur un immeuble situé en partie seulement dans la zone prévue en application du paragraphe 1° du premier alinéa.

Le taux prévu au paragraphe 2° du premier alinéa et la méthode prévue au paragraphe 3° de cet alinéa peuvent varier selon des critères favorisant un aménagement durable du territoire. Ce taux peut également être indexé de plein droit selon la méthode que prévoit le règlement, le cas échéant.

Une zone prévue à un règlement pris par l’Autorité en vertu du premier alinéa ne peut faire l’objet de plus d’une redevance de transport; le premier règlement assujettissant les travaux à l’intérieur de celle-ci prévaut sur tout autre règlement ultérieur de l’Autorité.

97.4. L’Autorité doit, avant de prendre le règlement pour l’application du premier alinéa de l’article 97.2, consulter la Communauté métropolitaine de Montréal et la Municipalité régionale de comté de la Rivière-du-Nord.

Ce règlement doit être rendu public sur le site Internet de l’Autorité. Il doit également être publié dans un journal diffusé sur le territoire de l’Autorité. Il entre en vigueur le 15e jour qui suit la date de cette publication ou à toute date ultérieure qui y est mentionnée.

L’Autorité doit, sans délai, aviser les municipalités locales concernées du début de l’assujettissement des travaux assujettis au versement de la redevance de transport.

Elle transmet, en outre, à ces municipalités une copie du règlement.

97.5. Un règlement pris pour l’application du premier alinéa de l’article 97.2 ne peut être rendu public ou publié conformément à l’article 97.4 ou entrer en vigueur sans avoir été approuvé, avec ou sans modification, par le ministre.

Le ministre peut édicter un règlement visé au premier alinéa de l’article 97.2, à défaut par l’Autorité de le prendre dans le délai qu’il lui indique.

97.6. Une municipalité locale doit percevoir, pour le compte de l’Autorité, la redevance de transport à laquelle sont assujettis les travaux réalisés sur son territoire.

Lorsqu’un projet qui nécessite un permis, prévu par un règlement adopté en vertu de l’article 119 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (chapitre A19.1), vise la réalisation de travaux assujettis au versement de la redevance, la délivrance de ce permis est conditionnelle au versement de la redevance, telle qu’estimée par la municipalité qui le délivre sur la base des renseignements fournis avec la demande de permis.

La redevance perçue est remboursée si le permis auquel elle est assortie est annulé.

97.7.  L’Autorité prend un règlement afin d’exiger l’obtention d’un permis pour la réalisation de travaux assujettis à la redevance de transport, lorsque ces travaux peuvent, sur le territoire d’une municipalité locale, être réalisés sans l’obtention d’un tel permis. Cette municipalité est alors responsable de la délivrance du permis.

Les dispositions de ce règlement dont l’objet est de prévoir l’exigence d’un permis et le régime de délivrance, qui entrent en conflit avec celles d’un règlement municipal qui traite du même objet, n’ont pas d’effet à l’égard du territoire où un tel règlement municipal est en vigueur.

97.8. Une municipalité qui, en vertu de l’article 97.6, est perceptrice de la redevance prévue à l’article 97.2 peut établir un tarif d’honoraires pour la délivrance des permis relatifs aux travaux assujettis à cette redevance, que le permis soit exigé en vertu d’un règlement de la municipalité ou d’un règlement de l’Autorité.

Elle peut, en outre, prescrire les plans et documents qui doivent être soumis à l’appui d’une demande de permis afin d’évaluer l’éventuel assujettissement à la redevance des travaux concernés par cette demande, et ce, que le permis soit exigé en vertu d’un règlement de la municipalité ou d’un règlement de l’Autorité.

97.9. Les redevances de transport perçues par une municipalité locale sont réputées être détenues en fiducie pour l’Autorité jusqu’à ce qu’elles lui soient remises.

Ces redevances doivent être considérées comme formant un fonds séparé du patrimoine et des propres biens de la municipalité, qu’elles aient été ou non conservées, dans les faits, de façon distincte et séparée des propres fonds de la municipalité ou de la masse de ses biens.

97.10. Une municipalité locale remet à l’Autorité les redevances de transport qu’elle perçoit aux dates suivantes:

  le 1er juin, celles perçues du 1er janvier au 30 avril;

  le 1er novembre, celles perçues du 1er mai au 30 septembre;

  le 1er février, celles perçues du 1er octobre au 31 décembre.

Aux mêmes dates et pour les mêmes périodes, la municipalité transmet à l’Autorité un rapport faisant état des renseignements suivants:

  le nombre total de permis délivrés à l’égard de travaux assujettis à la redevance de transport, pour chaque zone concernée;

  à l’égard de chacun de ces permis:

a)  l’adresse de l’immeuble concerné;

b)  le type de travaux concernés;

c)  son assujettissement, le cas échéant, à la redevance;

  à l’égard de chacun des permis dont la délivrance est conditionnelle au versement de la redevance:

a)  la superficie de plancher considérée aux fins de l’établissement de la redevance;

b)  le montant de la redevance perçue. »

97.11.  L’Autorité tient une comptabilité distincte pour chacune des redevances particulières qu’elle établit.

97.12. Aucune redevance de transport n’est exigible:

  d’un organisme public au sens du premier alinéa de l’article 3 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (chapitre A-2.1);

  d’un centre de la petite enfance au sens de la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance (chapitre S-4.1.1);

  d’un organisme à but non lucratif ou d’une coopérative de solidarité qui réalise des travaux relatifs à un immeuble qui est ou sera acquis, construit ou rénové dans le cadre d’un programme mis en oeuvre en vertu de la Loi sur la Société d’habitation du Québec (chapitre S-8) et pour lequel un accord d’exploitation est ou sera en vigueur, pour les fins visées par cet accord;

  d’un mandataire de l’État qui n’est pas visé au paragraphe 1° ou 2°;

  d’un organisme d’action communautaire qui reçoit une aide financière d’un ministère ou d’un organisme du gouvernement et qui, selon le cas:

a)   est inscrit à ce titre sur la liste disponible sur le site Internet du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale;

b)   détient une attestation à ce titre, émise par le ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale dans les 12 mois précédant sa demande de permis pour les travaux;

  de toute autre personne désignée par le gouvernement.

Cependant, une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec n’est pas, à titre de mandataire

108.1. Quiconque refuse ou omet de payer la redevance de transport commet une infraction et est passible de l’amende prévue par règlement de l’Autorité.

108.2. Le règlement pris pour l’application du premier alinéa de l’article 97.2 doit prévoir le montant de l’amende visée à l’article 108.1 qui comprend, en tous les cas, la redevance de transport et une somme additionnelle qui peut varier selon cette redevance. La somme additionnelle, fixe ou maximum, ne peut excéder, pour une première infraction, 5 000 $ dans le cas d’une personne physique ou 10 000 $ dans les autres cas. En cas de récidive, ces sommes additionnelles sont portées au double. Une somme additionnelle minimale ne peut être inférieure à 250 $.

 (soulignements ajoutés)

[42]           Quant à lui, le Règlement prévoit ce qui suit :

3. Sont assujettis au versement d’une redevance de transport les travaux assujettis visés à la Section 2 du présent Chapitre II à l’égard d’un bâtiment situé en tout ou en partie dans une zone propice à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif que l’Autorité régionale de transport métropolitain finance, même en partie, tel que ces zones sont plus amplement décrites au chapitre III, au taux applicable fixé à l’Annexe C et ajusté conformément à l’article 85 de la Loi concernant le Réseau électrique métropolitain (chapitre R-25.02).

La redevance est calculée conformément à l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain (chapitre A-33.3) au moment de la délivrance du permis pertinent à l’égard des travaux assujettis.

Le taux de la redevance est indexé de plein droit de la même façon que le montant de 865 440 $ fixé au premier alinéa de l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain, selon les dispositions de dudit article applicables à l’indexation dudit montant.

4.  Sont assujettis aux versements de la redevance les travaux suivants dont la valeur et la superficie de plancher excèdent celles prévues à l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain (chapitre A-33.3) et ayant pour objet :

 la construction d’un bâtiment;

 la reconstruction d’un bâtiment sauf pour la superficie de celle-ci résultant d’un sinistre survenu dans les 24 mois précédents;

 l’augmentation de la superficie de plancher d’un bâtiment;

 le réaménagement d’un bâtiment en lien avec un changement d’usage, même partiel, consistant dans le passage de l’une à l’autre des 5 catégories suivantes, décrites à l’annexe D:

a)   habitation;

b) commerces et services/bureau/hébergement touristique ou lieu de réunion;

c) équipement collectif ou institutionnel;

d) industrie;

e) stationnement.

Aux fins de l’application du présent règlement, et sous réserve du troisième alinéa, tout usage d’un bâtiment ou d’une partie d’un bâtiment se qualifie dans l’une ou l’autre des catégories prévues au paragraphe 4 du premier alinéa.

Si un bâtiment ou une partie d’un bâtiment est vacant ou inutilisé, son usage est réputé correspondre à la catégorie, parmi celles prévues au paragraphe 4 du premier alinéa, du dernier usage effectué dans le bâtiment ou dans la partie du bâtiment en question. Lorsqu’un bâtiment n’a jamais été utilisé, son aménagement initial n’est pas visé par le paragraphe 4 du premier alinéa.

6. Pour les fins de l’établissement de la redevance, la superficie de plancher visée par les travaux assujettis est égale à la somme de la superficie de chacun des planchers faisant l’objet des travaux assujettis, incluant celui de toute mezzanine et de tout sous-sol. La superficie de plancher est mesurée à partir de la face externe des murs extérieurs.

8.  La redevance est exigible du propriétaire, est perçue par une municipalité locale pour le compte de l’Autorité régionale de transport métropolitain et doit être entièrement acquittée par traite bancaire lors de la délivrance du permis visé au second alinéa de l’article 3. Un paiement par un tiers est réputé être effectué au nom du propriétaire.

CHAPITRE III

RÈGLES D’ÉTABLISSEMENT DES ZONES PROPICES À L’ARTICULATION DE L’URBANISATION ET DES SERVICES TRANSPORT COLLECTIFS

11. Le présent règlement s’applique à l’égard des zones propices à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif identifiées dans l’arrêté no. 2018-03 en date du 22 mars 2018, lesquelles apparaissent avec les gares et stations et le tracé aux Annexes A et B.

Les zones sont définies par rapport à la localisation de chaque gare et station du Réseau express métropolitain, en fonction des coordonnées cartésiennes de chacune des gares et stations présentées à l’Annexe B, lesquelles sont basées sur le système nord-américain de référence terrestre NAD83 (North American Datum of 1983) et le système de projection Mercator Transverse Modifié zone 8 (MTM8), conformément au Système québécois de référence cartographique (SQRC).

Les zones des stations Édouard-Montpetit, Gare Centrale et McGill correspondent à un cercle d’un rayon de 500 m tracé à partir de chaque gare ou station.

Les zones des autres stations énumérées à l’Annexe C correspondent à un cercle de 1 km tracé à partir de chaque gare ou station.

Le tracé des zones est ajusté de manière à exclure tout immeuble faisant partie d’une zone agricole au sens de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (chapitre P-41.1).

Le tracé des zones est ajusté de manière à exclure tout lot dont l’accès à la station du Réseau express métropolitain est empêché en toute saison, à pied ou en voiture, par la présence d’un cours d’eau.

(soulignements ajoutés)

[43]           De plus, certaines autres dispositions de la Loi REM et de l’ARTM sont également pertinentes, tout comme certaines dispositions des règlements municipaux de la Ville; le Tribunal y revient plus loin aux questions 2, 3 et 4. Enfin, certains passages du Guide (Pièce P-7) sont pertinents, mais sont reproduits plus loin à la question 2.

[44]           Passons maintenant à l’analyse et discussion.

4.                 Analyse et discussion

[45]           Le Tribunal aborde en premier la question de la modification demandée, pour ensuite étudier l’interprétation du Règlement, puis en troisième lieu la question de droit administratif, pour étudier ensuite, enfin si requis, la question constitutionnelle.

a)                 Question 1 : La demande de modification de la Demande par la demanderesse doit-elle être permise?

[46]           Le 20 décembre 2023, la demanderesse a notifié et déposé une Demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-re-remodifiée (la « Demande du 20 décembre 2023 »). Le 4 janvier 2024, la demanderesse a notifié et déposé un Demande d’autorisation pour modifier la Demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-remodifiée du 21 juillet 2022. Le 28 décembre 2024, le PGQ conteste la demande de modification au moyen d’une Opposition du défendeur Procureur général du Québec à la Demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-re-remodifiée du 20 décembre 2023. Le PGQ conteste toutes les modifications demandées, sauf le dépôt en preuve des Pièces P-01 et P-13.  L’ARTM et la Ville ne conteste pas la demande de modification et s’en remettent au Tribunal. Lors du tout début du procès le 8 janvier 2024, le Tribunal avait pris sous réserve la décision sur la demande de modification. Le Tribunal décide maintenant.

[47]           Vu qu’il n’y a pas de contestation de l’ajout des Pièces P-13 et P-01, le Tribunal en permet la production.

[48]           Voici ce que la demanderesse souhaite aux termes de sa demande de modification :

  •             Ajouter la partie Q. One West Locatifs inc. comme codemanderesse (voir la désignation des parties et les par. 1, 1.2, 1.3, 10, 41.7 et 52.3 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Modifier les allégations ne touchant que la demanderesse Quartier One West inc. (voir les par. 33, 39, 40, 41.2, 41.3, 41.4 2, 41.10 et 60 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Ajouter les immeubles sis aux 244 et 242, boulevard Hymus (par. 1.2 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Ajouter les états de renseignement des demanderesses Quartier One West inc. et Q. One West Locatifs Inc. au registre des entreprises (voir les Pièces P-01 et P-02 et les par. 2 et 2.1 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Ajouter l’acte de vente du lot 6 377 973 daté du 24 mars 2023 (voir la Pièce P-1A et le par. 7 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Ajouter le paiement par la demanderesse Quartier One West inc. de la redevance pour la construction de l’immeuble sis au 244, boulevard Hymus, et modifier le montant qu’elle a dû débourser (voir la Pièce P-13 et les par. 23.1 et 23.2 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Ajouter le paiement par la demanderesse Q. One West Locatifs inc. de la redevance pour la construction de l’immeuble sis au 242, boulevard Hymus (voir la Pièce P-14 et le par. 23.3 de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Modifier la conclusion demandant de déclarer, à tout le moins, le Règlement inopposable à l’égard des deux demanderesses (voir la deuxième conclusion a de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Modifier les conclusions ne touchant que la demanderesse Quartier One West inc. (voir la troisième conclusion de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Modifier le montant réclamé par la demanderesse Quartier One West inc. (voir les conclusions quatrième et neuvième de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Ajouter des conclusions relatives à la codemanderesse Q. One West Locatifs inc., demandant au Tribunal de condamner solitairement l’ARTM et la Ville à rembourser le montant qu’elle a dû débourser pour la redevance (voir la cinquième conclusion de la Demande) et, subsidiairement, d’ordonner à la Ville de remplir et transmettre à l’ARTM l’Annexe F relatif au remboursement de la redevance qu’elle a déboursée (voir la dixième conclusion de la Demande du 20 décembre 2023);
  •             Modifier la conclusion subsidiaire demandant l’annulation de la décision prise par l’ARTM d’exiger le paiement de la redevance comme condition préalable à l’obtention des permis de construction, pour y ajouter les immeubles sis aux 244 et 242, boulevard Hymus (voir la sixième conclusion de la Demande du 20 décembre 2023).

[49]           La demanderesse argumente que, aux termes des article 206 et 207 Cpc, la jurisprudence prévoit que le droit à la modification doit recevoir une interprétation large et libérale, de telle sorte qu’elle constitue la règle et non l’exception, et que l’ajout d’un codemandeur est possible, dans la mesure où (1) cette modification ne retarde pas le déroulement de l’instance, (2) elle n’est pas contraire aux intérêts de la justice et (3) il n’en résulte pas une demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande initiale. La demanderesse indique que ces trois conditions cumulatives sont rencontrées, pour les motifs suivants :

1)            Premièrement, les modifications ne retardent pas le déroulement de l’instance, en ce que le procès fixé du 8 au 11 janvier 2024 a lieu tel que prévu, et n’ont pas pour effet d’ajouter une ou plusieurs journées d’audience;

2)            Deuxièmement, elles ne sont pas contraires aux intérêts de la justice, en ce qu’elles consistent essentiellement à l’ajout d’une demanderesse, considérant que la demanderesse initialement impliquée a vendu une partie du terrain visé par le litige à la codemanderesse, soumettant celle-ci à la même exigence de payer la redevance conditionnellement à l’obtention d’un permis de construction. Le débat demeure donc le même. Le représentant de cette codemanderesse est le même que celui de la demanderesse initiale, de telle sorte que la preuve factuelle ne s’en trouve pas affectée au point de porter atteinte au droit des défendeurs à une défense pleine et entière, ni au contrat judiciaire préalablement établi;

3)            Troisièmement, il n’en résulte pas une demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande initiale, considérant que ces montants auraient été réclamés de toute façon, ceux-ci se rapportant à la zone visée par la législation et la règlementation en cause.

[50]           Le Tribunal ne peut accepter les arguments de la demanderesse pour les raisons suivantes :

1)            Le PGQ a indiqué qu’il devait faire des vérifications factuelles quant à la nouvelle codemanderesse Q. One West Locatifs inc. et qu’il n’a pas eu l’opportunité réaliste de le faire, ni de poser des questions à la demanderesse. Le Tribunal est d’accord car, la procédure ayant été notifiée le 20 décembre 2023 pour un procès débutant le 8 janvier 2024, toute vérification réaliste s’avérait physiquement impossible. La modification arrivait à minuit moins une, et elle est donc tardive.  Les faits pertinents se sont d’ailleurs déroulés en avril 2023 et en septembre 2023; il est trop tard le 20 décembre 2023;

2)            Le Tribunal accepte que les vérifications factuelles entourant la nouvelle codemanderesse devaient être faites par le PGQ, incluant même le droit de poser des questions à la demanderesse. Ce n’est pas parce que la demanderesse argumente que les ajouts ne changent rien qu’ils ne changent réellement rien. Par exemple, on pense au secteur d’activité de la nouvelle codemanderesse et la question de l’inclusion ou non de la redevance dans le prix de location des immeubles, un élément central à tout argument en défense lorsqu’il y a une vente d’immeubles par une partie;

3)            En ce sens, le PGQ subira un préjudice de fait, réel et concret, si la modification est autorisée[26]. Son droit à une défense serait nié;

4)            Les modifications demandées sont par ailleurs inutiles pour trancher le débat principal, soit la validité constitutionnelle des dispositions législatives et règlementaires attaquées, l’interprétation du Règlement par la Ville et le caractère raisonnable du Règlement. Tous les ajouts demandés ne changent rien à ce débat. Les conclusions que le Tribunal rendra seront également applicables à tous, erga omnes. La question du montant de réclamation par la demanderesse et la codemanderesse est une question secondaire et il est acquis que la Ville et l’ARTM vont respecter la décision du Tribunal si la Demande était accueillie;

5)            Il ne s’agit pas d’un cas de responsabilité civile où l’ajout de tous les demandeurs possibles est requis pour pouvoir obtenir gain de cause.

[51]           Le Tribunal refuse donc les modifications demandées, incluant la mise en preuve des Pièces P-02, P-1A, P-14 et PGQ-13.

[52]           Passons à la question 2.

b)                 Question 2 : La Ville a-t-elle contrevenu au Règlement lorsqu’elle a déterminé la superficie de plancher et la valeur des travaux, en considérant la superficie de plancher en un bloc plutôt qu’individuellement pour chacune des 14 maisons de ville?

[53]           La demanderesse allègue que la Ville aurait mal appliqué les articles 6, 9 et 11 du Règlement et les sections 1 et 6.1 du Guide relativement à l’assujettissement des 14 maisons à la redevance de transport REM. Selon la demanderesse, la Ville aurait considéré les maisons comme étant visées par un seul permis de construction représentant des travaux d’une valeur de plus de 3 000 000 $, donc d’une valeur supérieure au seuil d’assujettissement de la redevance de transport quant à la superficie de plancher et la valeur des travaux. La Ville n’a pas suivi la position de la demanderesse qui est de prendre chacune des maisons de façon individuelle, faisant en sorte que chaque « maison de ville » n’atteint pas, individuellement, le seuil d’assujettissement à la redevance.

[54]           Selon la demanderesse, les calculs de superficie de plancher prévus au Règlement ne sont pas liés aux règlements municipaux de la Ville. Ils en sont indépendants selon elle, et le texte du Règlement vise chacune des 14 maisons individuellement, puisque la Loi ARTM et le Règlement visent des « bâtiments » et des « travaux ». Selon la demanderesse, le Guide (Pièce P-7 et toutes ses versions subséquentes) interdit le recours aux règlements de zonage.

[55]           Il n’est pas contesté ici que, si les 14 maisons sont prises en compte en un seul bloc comme l’a fait la Ville, la redevance est due[27], et que si on prend les 14 maisons individuellement, aucune redevance n’est due (vu le critère de la valeur des travaux qui est alors trop bas pour chaque maison pour que la redevance s’applique).

[56]           Le Tribunal note que la Demanderesse n’allègue toutefois aucune erreur dans l’application du Règlement à l’égard des deux projets de condos. La question 2 ne vise que les 14 maisons. Ainsi, même si la demanderesse a gain de cause sur la question 2, le Tribunal devra continuer son analyse de la question 3. Quant à la question 4, on verra plus loin.

[57]           La demanderesse ne conteste pas que la totalité de ses immeubles sont situés à l’intérieur d’un rayon d’un kilomètre de la future station Fairview – Pointe-Clair du REM.

[58]           Le Tribunal constate que tout tourne autour des articles 97.2, 97.3, 97.6 et 97.7 de la Loi ARTM et des articles 3, 4, 6 et 17 du Règlement, qu’il reproduit encore ici en ajoutant des soulignements :

Loi ARTM

97.2. L’Autorité peut, par règlement, assujettir au versement d’une redevance de transport les travaux dont la valeur excède 865 440 $ et visant:

  la construction de bâtiment;

  la modification d’un bâtiment incluant un réaménagement, une reconstruction ou l’augmentation de sa superficie de plancher;

  à changer l’usage d’un bâtiment.

La redevance correspond au produit obtenu en multipliant le taux prévu au règlement par la superficie de plancher visée par les travaux, délimitée selon la méthode prévue au règlement. Les modalités de cette redevance doivent être conformes à celles figurant à la politique de financement de l’Autorité.

97.3. Le règlement pris pour l’application du premier alinéa de l’article 97.2 prévoit:

  les zones où les travaux sont assujettis à la redevance, lesquelles doivent correspondre à celles identifiées conformément à l’article 97.1;

  le taux de la redevance, qui peut varier:

a)   selon la distance séparant les travaux ou les bâtiments assujettis d’un service de transport collectif;

b)    selon les catégories de travaux et de bâtiments prévues par le règlement;

c)   par zones et à l’intérieur de celles-ci, afin notamment de favoriser la densification et la revitalisation;

   la méthode permettant de délimiter la superficie de plancher visée par les travaux;

   les éléments pris en compte dans la détermination de la valeur des travaux;

  les modalités et conditions de la perception et du remboursement de la redevance;

  les modalités et conditions de la gestion de la redevance par les municipalités perceptrices.

Des travaux peuvent être assujettis au versement d’une redevance de transport même s’ils sont réalisés sur un immeuble situé en partie seulement dans la zone prévue en application du paragraphe 1° du premier alinéa.

Le taux prévu au paragraphe 2° du premier alinéa et la méthode prévue au paragraphe 3° de cet alinéa peuvent varier selon des critères favorisant un aménagement durable du territoire. Ce taux peut également être indexé de plein droit selon la méthode que prévoit le règlement, le cas échéant.

Une zone prévue à un règlement pris par l’Autorité en vertu du premier alinéa ne peut faire l’objet de plus d’une redevance de transport; le premier règlement assujettissant les travaux à l’intérieur de celle-ci prévaut sur tout autre règlement ultérieur de l’Autorité.

97.6.   Une municipalité locale doit percevoir, pour le compte de l’Autorité, la redevance de transport à laquelle sont assujettis les travaux réalisés sur son territoire.

Lorsqu’un projet qui nécessite un permis, prévu par un règlement adopté en vertu de l’article 119 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (chapitre A-19.1), vise la réalisation de travaux assujettis au versement de la redevance, la délivrance de ce permis est conditionnelle au versement de la redevance, telle qu’estimée par la municipalité qui le délivre sur la base des renseignements fournis avec la demande de permis.

La redevance perçue est remboursée si le permis auquel elle est assortie est annulé.

97.7.  L’Autorité prend un règlement afin d’exiger l’obtention d’un permis pour la réalisation de travaux assujettis à la redevance de transport, lorsque ces travaux peuvent, sur le territoire d’une municipalité locale, être réalisés sans l’obtention d’un tel permis. Cette municipalité est alors responsable de la délivrance du permis.

Les dispositions de ce règlement dont l’objet est de prévoir l’exigence d’un permis et le régime de délivrance, qui entrent en conflit avec celles d’un règlement municipal qui traite du même objet, n’ont pas d’effet à l’égard du territoire où un tel règlement municipal est en vigueur.

Règlement

3. Sont assujettis au versement d’une redevance de transport les travaux assujettis visés à la Section 2 du présent Chapitre II à l’égard d’un bâtiment situé en tout ou en partie dans une zone propice à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif que l’Autorité régionale de transport métropolitain finance, même en partie, tel que ces zones sont plus amplement décrites au chapitre III, au taux applicable fixé à l’Annexe C et ajusté conformément à l’article 85 de la Loi concernant le Réseau électrique métropolitain (chapitre R-25.02).

La redevance est calculée conformément à l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain (chapitre A-33.3) au moment de la délivrance du permis pertinent à l’égard des travaux assujettis.

Le taux de la redevance est indexé de plein droit de la même façon que le montant de 865 440 $ fixé au premier alinéa de l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain, selon les dispositions de dudit article applicables à l’indexation dudit montant.

4. Sont assujettis aux versements de la redevance les travaux suivants dont la valeur et la superficie de plancher excèdent celles prévues à l’article 97.2 de la Loi sur l’Autorité régionale de transport métropolitain (chapitre A-33.3) et ayant pour objet :

 

 la construction d’un bâtiment;

 la reconstruction d’un bâtiment sauf pour la superficie de celle-ci résultant d’un sinistre survenu dans les 24 mois précédents;

 l’augmentation de la superficie de plancher d’un bâtiment;

 le réaménagement d’un bâtiment en lien avec un changement d’usage, même partiel, consistant dans le passage de l’une à l’autre des 5 catégories suivantes, décrites à l’annexe D:

a) habitation;

b) commerces et services/bureau/hébergement touristique ou lieu de réunion;

c) équipement collectif ou institutionnel;

d) industrie;

e) stationnement.

Aux fins de l’application du présent règlement, et sous réserve du troisième alinéa, tout usage d’un bâtiment ou d’une partie d’un bâtiment se qualifie dans l’une ou l’autre des catégories prévues au paragraphe 4 du premier alinéa.

Si un bâtiment ou une partie d’un bâtiment est vacant ou inutilisé, son usage est réputé correspondre à la catégorie, parmi celles prévues au paragraphe 4 du premier alinéa, du dernier usage effectué dans le bâtiment ou dans la partie du bâtiment en question. Lorsqu’un bâtiment n’a jamais été utilisé, son aménagement initial n’est pas visé par le paragraphe 4 du premier alinéa.

6.  Pour les fins de l’établissement de la redevance, la superficie de plancher visée par les travaux assujettis est égale à la somme de la superficie de chacun des planchers faisant l’objet des travaux assujettis, incluant celui de toute mezzanine et de tout sous-sol. La superficie de plancher est mesurée à partir de la face externe des murs extérieurs.

17.  Les dispositions du présent règlement dont l’objet est de prévoir l’exigence d’un permis pour la réalisation de travaux assujettis à la redevance de transport et leur régime de délivrance, qui entrent en conflit avec celles d’un règlement municipal qui traite du même objet, n’ont pas d’effet à l’égard du territoire où un tel règlement municipal est en vigueur.

[59]           Le Guide se lit ainsi (Pièce P-7[28]) :

1 MISE EN CONTEXTE

[…]

Faits à noter

Le Règlement n’est pas :

 Un outil d’aménagement ou de gestion du territoire

 Un règlement issu de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme

 Un règlement relatif à la fiscalité municipale

Le Règlement est :

 Un outil de financement pour des infrastructures de transport collectif

 Un règlement qui s’applique indépendamment des règlements issus de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme

6.1 DÉTERMINATION DE LA SUPERFICIE DE PLANCHER

La superficie de plancher visée par les travaux assujettis est la somme de la superficie de chacun des planchers faisant l’objet des travaux assujettis, incluant les planchers de toute mezzanine et de tout sous-sol.

La superficie de plancher est mesurée à partir de la face externe des murs extérieurs.

C’est la superficie de plancher visée par les travaux assujettis qui doit être prise en compte dans le calcul des seuils et du montant de la redevance de transport. Cette superficie est mesurée à partir de la face externe des murs extérieurs.

Dans le cas d’un mur mitoyen (bâtiment jumelé ou contigu), la ligne de propriété fait office de mur extérieur, puisque la superficie de plancher assujettie à la redevance de transport ne peut excéder celle de l’immeuble du propriétaire débiteur de la redevance de transport.

[60]           Donc, que signifie les références à « bâtiment » et à « travaux »? Quelle importance a le Guide et quelle est son sens? La règlementation municipale est-elle pertinente dans l’interprétation de la redevance?

[61]           Le Tribunal note que le Guide a été préparé par l’ARTM, et non pas par la Ville ni par le PGQ.

[62]           Voici ce que le Tribunal décide :

1)            Le Tribunal note que les articles 97.2, 97.3, 97.6 de la Loi ARTM et les articles 3 et 4 du Règlement font référence à « construction de bâtiment », « travaux », « projet », « bâtiment » et « bâtiments », sans jamais prévoir de définition. Bien que l’article 97.3 permette que le Règlement définisse « les catégories de travaux et de bâtiments », le Règlement ne le fait pas et se contente de reprendre les généralités de la Loi ARTM. Ceci laisse donc l’article 6 du Règlement comme seule disposition qui porte directement sur le calcul de la redevance, et qui précise ce qu’est la superficie de plancher;

2)            Ni la Loi ARTM et ni le Règlement ne font référence aux règlements municipaux comme étant une source de définitions des termes « bâtiment », « travaux » et « projet »;

3)            On doit donc comprendre que la superficie de plancher visée est celle des « bâtiments », « projets » ou « travaux », qui ne sont pas définis par la Loi ARTM ni par le Règlement;

4)            Cependant, l’article 6 du Règlement donne un indice : la superficie de plancher est mesurée à partir de la face externe des murs extérieurs;

5)            Ni la Loi ARTM ni le Règlement ne mentionnent explicitement que les règlements de zonage des municipalités s’appliquent au calcul de la redevance;

6)            Dans ces circonstances, doit-on donner le sens commun aux mots « bâtiments », « projets » ou « travaux », ou la règlementation municipale est-elle supplétive vu le vide définitionnel contenu à la Loi ARTM et au Règlement?

7)            Le Tribunal note qu’il existe un guide pour l’interprétation du Règlement et il a été préparé par l’ARTM elle-même. Le Guide (Pièce P-7) ne définit pas non plus les mots « bâtiments », « projets » ou « travaux », mais il ajoute ceci à la section 6.1 : « Dans le cas d’un mur mitoyen (bâtiment jumelé ou contigu), la ligne de propriété fait office de mur extérieur, puisque la superficie de plancher assujettie à la redevance de transport ne peut excéder celle de l’immeuble du propriétaire débiteur de la redevance de transport ». Le Guide prévoit le cas des bâtiments jumelés ou contigus, qui doivent être traités de façon distincte, et non comme un bloc;

8)            De plus, le Guide mentionne spécifiquement à la section 1 que le Règlement n’est pas un règlement issu de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme[29] et doit s’appliquer indépendamment des règlements issus de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. Rappelons que le règlement municipal pertinent de la Ville en jeu ici[30] a été adopté en vertu de cette loi;

9)            L’ARTM et la Ville disent que le Guide ne lie pas le Tribunal ni eux-mêmes dans l’interprétation du Règlement;

10)        Le Tribunal conclut que, face d’une part, à une interprétation qui repose sur l’application supplétive des règlements municipaux alors que la Loi ARTM et le Règlement sont silencieux à cet égard, et d’autre part à une interprétation qui repose sur le sens commun des mots et sur le Guide de l’ARTM, il faut retenir la seconde interprétation. La Loi ARTM et le Règlement ne permettent aucunement de déduire ou d’inférer que le Règlement est subordonné aux règlements municipaux, ce qui laisse donc toute la place au sens commun des mots. Le Guide le confirme;

11)        Il est vrai que l’article 97.6 de la Loi ARTM et l’article 3 du Règlement imposent que, lorsqu’un projet, qui nécessite un permis de zonage, prévu par un règlement adopté en vertu de l’article 119 de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme[31], vise la réalisation de travaux assujettis au versement de la redevance, la délivrance de ce permis est conditionnelle au versement de la redevance, telle qu’estimée par la municipalité qui le délivre sur la base des renseignements fournis avec la demande de permis. La Loi ARTM et le Règlement imposent donc un aspect spatio-temporel de concomitance entre le permis de construction et la redevance, en plus de dire que la Ville, pour établir la redevance, doit se servir des renseignements contenus à la demande de permis de zonage. Ceci ne veut donc cependant pas dire que tout le zonage s’applique automatiquement au calcul de la redevance;

12)        De plus, si un projet n’est pas permis par une règlementation municipale, il n’y a pas de danger qu’une redevance soit calculée « par erreur » : il n’y a aura pas de redevance à imposer car le projet ne se sera tout simplement pas permis par la municipalité elle-même;

13)        L’article 97.7 de la Loi ARTM et l’article 17 du Règlement ne sont d’aucun secours à la position des défendeurs, au contraire. L’article 97.7 vise les cas où il n’y a aucun règlement municipal qui régit la construction d’un bâtiment.  Dans ce cas, l’ARTM peut adopter un règlement pour permettre l’imposition d’une redevance, ce qui a été fait au moyen de l’article 15 du Règlement. L’article 17 du Règlement indique seulement que les dispositions du Règlement portant sur l’absence de règlementation municipale ne s’appliquent pas aux demandes de permis municipaux lorsqu’il y a par des règlements municipaux; l’article 17 ne crée pas une règle d’application des règlements municipaux à la redevance;

14)        Si on retenait la position des défendeurs, cela signifierait en bout de piste que le montant de la redevance varierait d’une municipalité à l’autre pour un même projet, en fonction des diverses règlementations municipales. Cela ne peut être le but que le législateur et le Ministre ont prévu pour le financement du REM.

[63]           Le Tribunal conclut que le calcul de la redevance est donc indépendant de la règlementation municipale et doit suivre l’article 6 du Règlement et le sens commun des mots. Tous s’entendent pour dire que, si la règlementation municipale ne s’applique pas, le « projet » de la demanderesse (ou les « travaux ») est composé de 14 bâtiments distincts. La superficie de plancher de chacune des 14 maisons de ville doit donc être évaluée indépendamment.

[64]           Même si la preuve démontre que les 14 maisons font l’objet d’une déclaration de copropriété inscrite au registre foncier[32], le Tribunal conclut que cela ne change rien au fait qu’il y a 14 bâtiments au sens du Règlement.

[65]           Dans ce cas, tous sont d’accord que la superficie de chaque maison avec le coût des travaux individuels à chaque maison font en sorte que la redevance ne s’applique pas. En effet, on sait que la valeur totale du projet des 14 maisons de ville est de 3 000 000 $ selon la Pièce P-8. Cela veut donc dire que le coût des travaux de chaque maison est en moyenne de 214 285,71 $, ce qui est inférieur au seuil de 782 308 $ pour la valeur des travaux d’un bâtiment pour que la redevance s’applique (art. 3 à 5 du Règlement et art. 97.2 de la Loi ARTM). Le Tribunal conclut donc que la demanderesse a raison de prétendre qu’elle n’avait pas à assumer la redevance de 318 170,40 $ qu’elle a payée le 10 juin 2023.

[66]           Comme on l’a vu à la section 2 c, la preuve démontre que la demanderesse n’a jamais accepté la position de la Ville. La demanderesse a plutôt été forcée de remplir la demande Pièce P-8 comme si le projet de 14 maisons était un seul bloc, aux fins de respecter la règlementation municipale.

[67]           Le Tribunal rappelle que la règlementation municipale s’applique encore pour l’obtention des permis de construction et le calcul de leurs coûts. Mais elle ne s’applique pas pour le calcul de la redevance, même si c’est la municipalité qui calcule et perçoit la taxe. La municipalité est uniquement le mandataire de l’ARTM pour la perception de la redevance. Le fait que la Ville ait ici ce rôle de mandataire l’a peut-être confondue quant au Règlement. 

[68]           Le Tribunal aborde ici en obiter dictum la question de la règlementation municipale. Le Tribunal est d’accord avec la Ville que, selon les règlements municipaux de zonage, les 14 maisons de ville doivent être considérées comme un seul bloc de type résidence multifamiliale. En effet :

1)            Le territoire de la Ville est divisé en une série de zones, dans lesquelles divers usages sont autorisés en vertu du Règlement de zonage PC-2775[33]. La partie de la propriété de la demanderesse sur laquelle cette dernière a érigé ce qu’elle appelle des maisons de ville se trouve dans la zone Re33[34];

2)            La Ville a également adopté un tableau les dispositions particulières qui s’appliquent à chacune des zones de son territoire, ce qui permet de visualiser en une seule page l’ensemble de ces dispositions, tant en ce qui concerne par exemple les usages qui y sont permis que la superficie des lots qui peuvent y être lotis ou encore le profil des bâtiments qu’il est permis d’ériger à cet endroit[35]. La consultation de ce tableau permet de constater que les seuls usages résidentiels qui sont permis dans la zone Re33 sont les classes C-1 et C-2, lesquelles sont définies comme suit (soulignements ajoutés) :

Font partie de la classe « C » les habitations multifamiliales, soit les bâtiments résidentiels comprenant plus de quatre (4) logements superposés ou juxtaposés sur un même terrain. Lorsque les habitations multifamiliales sont autorisées dans une zone donnée, le nombre maximum de logements que peut comporter un même bâtiment d'habitation multifamiliale peut être indiqué dans les dispositions particulières.

La classe « C-1 » inclut les immeubles à logements locatifs, les coopératives d’habitation, les immeuble (sic.) ou ensemble de logements ou de résidences en copropriété, les immeubles d'habitation à loyer modique et les résidences pour personnes âgées autonomes.[36]

3)            De plus, la note 13 qui figure dans la colonne attitrée à cette zone précise que cet usage doit revêtir la forme suivante : « Habitations multifamiliales de type uni- ou bifamiliales contiguës implantées sur un même terrain. »[37];

4)            La référence à un même « terrain » ne permet pas à la demanderesse de faire valoir que ce qu’elle appelle ses « maisons de ville » ont justement été érigées sur 14 lots distincts. Non, car la définition d’un « terrain » est précisée par la Ville à l’annexe 1 de son règlement de zonage, laquelle indique ce qui suit :

Un lot ou un ensemble de lots contigus constituant une même entité spatiale destinée à recevoir un seul usage principal.[38]

5)            Ainsi, cela permet à la Ville de considérer que les 14 « maisons de ville » de la demanderesse constituent une « même entité spatiale » constituée « d’habitations multifamiliales de type unifamiliales contiguës » construites sur un ensemble de lots contigus.

6)            Pour le zonage uniquement, la Ville a donc raison de considérer les 14 maisons de ville sur les 14 lots comme étant un seul terrain;

7)            Ainsi, seulement pour le zonage et non pour la redevance, même si les 14 maisons s’étalent sur deux « blocs », sont toutes construites sur des lots distincts et sont séparées les unes des autres par des murs mitoyens, et même si chaque maison est accessible par une porte donnant directement sur la rue Alston, il y a un une seule entité.

8)            Ainsi, en conformité avec sa règlementation municipale, la Ville a traité la demande de permis de construction de la demanderesse comme une seule demande pour la construction de deux bâtiments multifamiliaux desservis par un espace de stationnement commun, en appliquant les règles relatives aux bâtiments multifamiliaux qui sont contenues dans le Règlement de zonage[39].

[69]           Mais tout cela ne vaut pas pour la redevance.

[70]           Le Tribunal conclut que la Ville a fait erreur dans l’application du Règlement lorsqu’elle a considéré un seul bloc la superficie totale combinée de chacun des planchers des 14 maisons projetées. La Ville aurait dû suivre uniquement le Règlement, ce qui mène au résultat qu’il y a 14 bâtiments distincts dont aucun ne se qualifie pour l’imposition de la redevance.

[71]           Dans ce cas, le Tribunal conclut que la demanderesse a droit au remboursement du montant payé de 318 170,40 $ pour les 14 maisons de ville, avec intérêts et indemnité additionnelle à partir de la date du paiement, le 10 juin 2020.

[72]           Rappelons que la demanderesse n’allègue aucune erreur dans l’application du Règlement à l’égard des deux projets de tours de condos, ce qui oblige donc le Tribunal à continuer son analyse en abordant la question 3.

[73]           Le Tribunal va donc accueillir la portion de la demande de contrôle judiciaire et de jugement déclaratoire qui porte sur l’interprétation du Règlement quant au calcul de la redevance pour les 14 maisons de ville. Le Tribunal va annuler l’imposition de la redevance pour les 14 maisons de ville et va condamner solidairement l’ARTM et la Ville au paiement à la demanderesse du montant de 318 170,40 $, avec intérêts et indemnité additionnelle à partir du 10 juin 2020. La Ville et l’ARTM s’organiseront entre elles pour se répartir le paiement et ensuite s’indemniser si requis. L’alinéa 3 de l’article 97.6 de la Loi ARTM ne précise pas qui doit rembourser la redevance si elle est annulée.

[74]           Passons à la troisième question.

c)                 Question 3 : Le Règlement est-il nul car il est déraisonnable et crée une injustice flagrante à l'égard de la demanderesse?

[75]           La demanderesse a raison quant à la question 2. Cependant, cela ne vise pas les deux tours à condos. Le Tribunal doit donc résoudre la question 3.

[76]           La demanderesse conteste la légalité du Règlement au motif qu’il serait déraisonnable. En effet, selon elle, le Règlement créerait une injustice flagrante à son encontre, car elle ne bénéficierait pas du REM dans les faits. Elle allègue aussi que le rayon de 1 km utilisé par le Ministre pour délimiter la zone de la station ainsi que l’absence d’exception pour les lots dont l’accès à la station serait plus loin que 1 km dans les faits à cause d’obstacles urbains comme une autoroute constituent un exercice déraisonnable de la discrétion du Ministre.

[77]           Selon la demanderesse, tous ses terrains se trouvent sur le territoire de la Ville, au sud de l’autoroute 40, ce qui rendrait selon elle difficile d’accès la station du REM située au nord de la même autoroute, même si les terrains sont techniquement à moins de 1 km de la station du REM. L’autoroute 40 constituerait un obstacle urbain qui forcerait un détour d’environ 2,5 km afin d’avoir accès à la station et cela ferait en sorte que la demanderesse n’en tirerait aucun bénéfice. La demanderesse estime que le Ministre aurait dû utiliser ses pouvoirs habilitants afin de réduire le rayon de la zone de la station et de créer une exception pour les obstacles urbains.

[78]           Le Tribunal rappelle que la demanderesse ne conteste pas que tous ses immeubles soient situés à l’intérieur d’un rayon d’un kilomètre de la future station Fairview – Pointe-Claire du REM. La demanderesse remet en question la décision d’adopter le rayon d’un kilomètre autour des stations du REM pour fixer l’assujettissement à la redevance du REM. Elle aurait préféré que la norme considérée soit le temps de déplacement à pied requis pour accéder à la station aérienne Pointe-Claire.

[79]           Voici les arguments de la demanderesse :

1)            Les zones assujetties au Règlement ont été identifiées par l’ARTM et figurent à l’annexe B du Règlement.  Le projet domiciliaire de la demanderesse est situé sur le territoire de la Ville, au sud du boulevard Hymus, entre l’avenue Alston et la rue Paprican, à environ 450 mètres au sud de l’autoroute 40;

2)            La future station Fairview-Pointe-Claire est cependant difficile d’accès pour les propriétés situées au sud de l’autoroute 40, cette infrastructure comporte trois voies dans chaque direction (plus deux chemins de service contenant deux voies chacun);

3)            Tel qu’indiqué par Mes Isabelle Landry et Pierre Délisle dans l’ouvrage Les projets immobiliers et les municipalités[40]:

[…] Cependant, un tel règlement ne doit pas entrainer une injustice flagrante pour un ou plusieurs contribuables. Si le règlement cause une telle injustice, la Cour supérieure n’hésitera pas à l’annuler dans l’éventualité où sa validité est contestée. Nous sommes d’avis que cet énoncé, maintes fois repris en jurisprudence, s’appliquera à toutes les formes de contributions obligatoires étudiées dans le présent ouvrage; qu’on les qualifie de participations, de redevances règlementaires ou de quote-parts, il s’agira toujours d’une ponction fiscale exigée d’un contribuable et elle sera interprétée comme tel par les tribunaux. (soulignements ajoutés)

4)            Les auteurs font par la suite l’analyse de la jurisprudence de The Town of Rosemère c. Lapostolle[41] et Immeubles Yales Ltée c. Kirkland (Ville de)[42] et concluent que la Cour supérieure annulera un règlement imposant une taxe spéciale à l’égard d’un terrain qui ne bénéficie pas des travaux pour lesquels ladite taxe spéciale est exigée. De plus, la revue de l’arrêt Sainte-Marthe-sur-le-Lac (Ville de) c. 161979 Canada inc.[43] nous apprend que le règlement imposant une taxe spéciale entraine une injustice flagrante lorsqu’il fait assumer au propriétaire une partie disproportionnée du coût des travaux par rapport au bénéfice réellement retiré par son terrain;

5)            Un détour par le boulevard Saint-Jean est nécessaire pour atteindre la station Fairview−Pointe-Claire, ce qui représente un trajet d’environ 2,5 kilomètres à pied et une durée d’un peu plus de 30 minutes à partir du projet de la demanderesse. En automobile, le détour se fait sur une plus grande distance encore, étant donné la nécessité de contourner le centre commercial Fairview; vu ce détour, l’accès à la station Des Sources au sud de l’autoroute 40 prendra la même durée que l’accès à la station Fairview−Pointe-Claire, malgré une distance supérieure;

6)            À toutes fins pratiques, la proximité à vol d’oiseau entre le projet de la demanderesse et la station du REM n’est pas pertinente pour analyser l’existence d’un bénéfice pour la propriété en cause;

7)            Il appert des connaissances scientifiques qu’une infrastructure comme une station du REM génère une plus-value pour les immeubles situés à une distance de marche de celui-ci (environ 800 mètres ou dix minutes de marche), tel qu’il appert du rapport d’expert du professeur Jean Dubé, Pièce P-5 ;

8)            Toutefois, comme le souligne M. Dubé dans son rapport, « la présence de contraintes urbaines ou naturelles s’avère un facteur incontournable » pour déterminer la portée spatiale des impacts de l’amélioration du transport en commun sur les valeurs résidentielles. Il note également qu’à partir du Terrain, le « temps pour rejoindre la station [Pointe-Claire] s’avère largement supérieur à ce qui est identifié dans la littérature » comme étant un temps susceptible d’avoir un impact sur les valeurs immobilières;

9)            En fait, le temps de marche de 30 minutes est plus du triple des dix minutes identifiées comme ayant un impact sur la variation des valeurs immobilières;

10)        Ceci étant, le projet de la demanderesse ne bénéficie aucunement des travaux pour lesquels la redevance est requise;

11)        Qui plus est, le Règlement ne tient pas compte des barrières physiques construites par l’être humain;

12)        Ainsi, même si les terrains de la demanderesse sont situés à plus de deux kilomètres en tenant compte des chemins devant être empruntés pour se rendre à la station Pointe-Claire, ils sont assujettis à la redevance;

13)        Afin de démontrer l’injustice flagrante du Règlement, la demanderesse soumet un graphique et un extrait de Google Maps démontrant la zone située autour de la station Grand-Moulin. Selon la demanderesse, cette zone n’inclut pas les espaces situés à moins d’un kilomètre de l’autre côté de la rivière des Mille-Îles et ce, en dépit de la présence d’un pont entre les deux rives, lequel permet, depuis Laval, d’accéder à la station par une marche d’à peine 900 mètres. Ainsi, on voit que le Règlement crée une différence de traitement entre les barrières physiques artificielles et les cours d’eau (art. 11), alors que les deux types de barrières ont le même effet, soit d’obliger à effectuer un détour pour contourner un obstacle, ce qui constitue une flagrante injustice.

[80]           Le Tribunal débute par déterminer la norme de contrôle applicable.

A.           Quelle est la norme de contrôle applicable?

[81]           Le Tribunal note que la demanderesse n’aborde pas cette question dans son mémoire. Or, cette question est centrale.

[82]      Comme l’a décidé la Cour suprême du Canada en 2013 dans l’arrêt Katz Group Canada inc. c. Ontario (Santé et Soins de longue durée)[44], pour contester avec succès la validité d’un règlement :

  •                       Il faut démontrer qu’il est incompatible avec l’objectif de sa loi habilitante ou encore qu’il déborde le cadre du mandat prévu par la loi[45];
  •                       Les règlements jouissent d’une présomption de validité. Il revient donc à celui qui conteste le règlement de démontrer que celuici est invalide, plutôt que d’obliger l’organisme règlementaire à en justifier la validité, et ce fardeau est onéreux[46];
  •                       Le Tribunal n’a pas à examiner le bien-fondé d’un règlement, ni à examiner les considérations sous-jacentes d’ordre politique, économique ou social. Pour qu’il puisse être déclaré ultra vires pour cause d’incompatibilité avec l’objet de la loi, un règlement doit reposer sur des considérations « sans importance », doit être « non pertinent » ou être « complètement étranger » à l’objet de la loi[47].

[83]           Ces critères s’appliquent encore en 2024 : en matière de contrôle judiciaire de législation déléguée, et tout particulièrement en matière de décrets gouvernementaux et d’arrêtés ministériels, la Cour d’appel du Québec applique la norme de la décision raisonnable provenant de l’arrêt de principe de la Cour suprême du Canada Vavilov[48] au test énoncé dans l’arrêt Katz Group Canada inc. c. Ontario (Santé et Soins de longue durée), réitérant ainsi que pour contester ces actes normatifs, il faut démontrer qu’ils sont incompatibles avec l’objectif de la loi habilitante ou non-conformes au mandat prévu par la loi habilitante, et réaffirmant la présomption de validité des règlements. La Cour d’appel a indiqué cela en 2021 et 2022 dans l’arrêt Bricka c. Procureur général du Québec[49] et dans l’arrêt Association des chirurgiens dentistes du Québec c. Ministre de la Santé et des Services sociaux[50].

[84]           Il existe une controverse jurisprudentielle entre le recours à la norme de la décision raisonnable ou non, mais cette controverse existe entre l’Alberta et la Cour d’appel fédérale[51], et ne concerne pas le Québec. Il se peut que la Cour suprême du Canada vienne clarifier la question, mais l’état du droit au Québec est celui que la Cour d’appel enseigne dans les arrêts Bricka c. Procureur général du Québec et Association des chirurgiens dentistes du Québec c. Ministre de la Santé et des Services sociaux : la norme de la décision raisonnable s’applique, mais elle signifie que, en matière de contestation de règlements, il faut démontrer qu’ils sont incompatibles avec l’objectif de la loi habilitante ou non-conformes au mandat prévu par la loi habilitante, tout en réaffirmant la présomption de validité des règlements.

[85]           Ici, la demanderesse ne demande pas la nullité du Règlement parce qu’il ne respecterait pas l’objet des lois habilitantes, soit la Loi REM et la Loi ARTM. Elle fait seulement valoir qu’il serait déraisonnable ou injuste, et ce, en invoquant un courant jurisprudentiel applicable aux règlements pris par une municipalité.

[86]           Or, dans l’arrêt UL Canada inc. c. Québec (Procureur Général), la Cour d’appel a fait une distinction claire et nette entre les règlements pris par une municipalité et ceux édictés par le gouvernement[52]. Selon cet arrêt de la Cour d’appel, confirmé par la Cour suprême du Canada en un paragraphe portant directement sur ce point[53], la Cour supérieure, contrairement à la situation qui prévaut en ce qui concerne les règlements municipaux, n'a pas le pouvoir d'examiner le caractère raisonnable d’un règlement ou d’un décret pris par le gouvernement et qui ferait partie de la catégorie « policy and politics »[54]. La Cour d’appel explique qu’il y a une distinction entre les décrets et règlements qui établissent des normes générales (« policy and politics ») et ceux de nature décisionnelle. Seuls ces derniers sont révisables sur la base de la raisonnabilité[55].

[87]           Le Tribunal constate que le Règlement a été édicté par le Ministre par l’arrêté ministériel 2018-04[56].  Le Règlement inclut l’Annexe B, qui prévoit les zones assujetties au Règlement; cela inclut la zone de 1 km autour de la station Fairview – Pointe-Claire du REM.  De l’avis du Tribunal, cela est un gouvernemental qui relève clairement de la catégorie « policy and politics » puisqu’il établit des normes générales et n’est pas de nature décisionnelle

[88]           La norme du rayon d’un kilomètre autour de la station du REM a d’ailleurs fait l’objet de discussions avec les intervenants lors de l’étude détaillée du projet de loi n° 137 (voir pièce PGQ-3[57]), ce qui confirme la nature « policy and politics ». Le rayon est prédéterminé pour toutes les stations.

[89]           La demanderesse demande donc au Tribunal d’effectuer un contrôle de la sagesse et de l’opportunité de la règlementation. Or, la validité d’un règlement provincial ne dépend pas des considérations d’ordre politique, économique ou social.  C’est précisément un contrôle d’opportunité et de choix politiques que la demanderesse propose de faire en affirmant que le Règlement serait déraisonnable et donc invalide puisque : le rayon de 1 km serait trop long considérant la présence de l’autoroute 40; le Ministre a décidé d’inclure une exception pour les obstacles naturels, mais pas pour les obstacles urbains.

[90]           Et même si le Règlement avait été adopté uniquement par l’ARTM, le Tribunal ne pourrait pas intervenir car la demanderesse ne démontre pas qu’il soit incompatible avec l’objectif de sa loi habilitante ou non-conforme au mandat prévu par la loi habilitante.

[91]           La demanderesse demande en fait au Tribunal de réécrire le règlement afin de réduire le rayon de redevance et de créer de toute pièce une exception que le Ministre n’a pas jugé opportun de créer. Au surplus, le rayon de 1 km est d’origine législative (art. 43 Loi REM) et, en soi, le Tribunal ne peut donc pas se prononcer sur l’opportunité de tout règlement qui repose sur ce rayon de 1 km.

[92]           La demanderesse ne peut donc obtenir la nullité du Règlement au seul motif qu’il serait déraisonnable.

[93]           Étant donné ce qui précède et puisque la demanderesse ne conteste pas que le Règlement a été validement édicté par le Ministre dans les limites imposées par la Loi REM et la Loi ARTM, notamment le rayon maximal de 1 km, le Tribunal doit conclure que le pourvoi en contrôle judiciaire doit être rejeté. La norme de contrôle applicable ne justifie tout simplement pas un tel contrôle judiciaire.

B.           Le Règlement est-il déraisonnable?

[94]           Le Tribunal n’a pas à étudier cette question, vu sa conclusion précédente.

[95]           Ainsi, la véritable durée du trajet à pied ou en auto entre les immeubles de la demanderesse et la station Fairview – Pointe-Claire du REM et l’absence ou non de bénéfice ne changent rien et ne permettent pas demander la nullité du règlement pour cause de caractère déraisonnable.

[96]           Le fait qu’il existe une exception relative aux cours d’eau (art. 11 du Règlement) ne permet pas non plus à la demanderesse d’obtenir la nullité. Le choix du Ministre d’exclure les lots dont l’accès est « empêché, en toute saison, à pied ou en voiture, par la présence d’un cours d’eau » et de ne pas créer d’exception pour des obstacles urbains relève de choix économiques et politiques et s’inscrit à l’extérieur du cadre d’analyse applicable. Le choix du Ministre de créer l’exception contenue à l’article 11 du Règlement s’explique facilement, car elle réfère à un cours d’eau infranchissable au moins une partie de l’année; au contraire, un obstacle urbain est franchissable moyennant un certain détour, que ce soit à pied, en vélo, ou en voiture, ce qui est admis par la demanderesse[58]. Et de toute façon, le Tribunal note que de telles distinctions entre eau et route ont finalement trait à l’opportunité et l’efficacité des dispositions attaquées, ce qui relève de la sphère politique[59]. Le Tribunal ne peut donc intervenir. Il n’y a pas eu démonstration que la question de l’exception de l’eau (et pas de l’autoroute) est incompatible avec l’objectif de la loi habilitante ou non-conforme au mandat prévu par la loi habilitante.

[97]           Le Tribunal n’a pas à aborder la question de savoir si le rayon aurait dû être de 500 m ou de 1 km, ni à réécrire le Règlement.

[98]           Quant aux bénéfices, le Tribunal n’a pas non plus à arbitrer une preuve sur l’accroissement de la valeur des immeubles de la demanderesse, qui ne changerait rien de toute façon à la norme de contrôle applicable, non franchie ici par la demanderesse. Cependant, pour mettre tout en perspective, le Tribunal rappelle que les montants des redevances en litige s’élèvent respectivement à 318 170,40 $ pour les 14 maisons de ville, pour un projet dont la valeur est estimée à 3 000 000 $, et de 3 091 833,60 $, pour les projets de tours à condos dont la valeur totale est estimée à 45 000 000 $. Cela représente environ 10 % de la valeur du premier projet et de moins de 7 % de la valeur des condos.

[99]           Même si la preuve non contredite (Pièce P-5) démontre que les immeubles de la demanderesse ne prendront pas de valeur à cause de la station du REM qui est trop loin à pied pour générer un tel accroissement de valeur, cela ne change rien de l’avis du Tribunal; la demanderesse na pas franchi la norme de contrôle.

[100]      Pour les mêmes raisons, le Tribunal ne peut non plus se pencher sur l’argument de la demanderesse basé sur l’extrait de Google Maps démontrant la zone située autour de la station Grand-Moulin et la présence ou non d’un pont. Au surplus, cet extrait n'a pas été mis en preuve formellement, ni non plus l’environnement de la station Grand-Moulin (incluant le pont, si même c’est un pont). Une référence dans un plan d’argumentation ne suffit pas.

[101]      Bref, le Tribunal conclut que, peu importe la norme applicable (Katz seul ou Vavilov avec Katz), la position de la demanderesse ne peut être retenue.

[102]      Le Tribunal conclut que la portion de la demande de pourvoi en contrôle judiciaire de la demanderesse portant sur le droit administratif (règlement déraisonnable et injuste) doit être rejetée.

[103]      La demanderesse ne peut donc demander de remboursement de la redevance de transport au terme de la troisième question.

[104]      Ainsi, puisque la question 2 vise seulement une portion des immeubles de la demanderesse et puisque le Tribunal n’a pas donné raison à la demanderesse à la question 3, il devient donc nécessaire d’aborder la question constitutionnelle

[105]      Passons donc à la question 4.

d)                 Question 4 : La redevance de transport est-elle une redevance de nature règlementaire relevant de la compétence de la province ou ne constitue-t-elle plutôt pas une taxe indirecte et est-elle de ce fait inconstitutionnelle?

[106]      Le Tribunal le répète : puisque la question 2 vise seulement une portion des immeubles de la demanderesse et puisque le Tribunal n’a pas donné raison à la demanderesse à la question 3, il devient donc nécessaire d’aborder la question constitutionnelle.

[107]      La demanderesse soutient que la redevance de transport serait une taxe indirecte, ce qui violerait les principes de partage des compétences découlant de la Loi constitutionnelle de 1867 ( « LC1867 »)[60].  Elle soutient que les articles 38, 40, 43, 83 et 84 de la Loi REM et les articles 72 (10º), 79 (10º), 82, 84.1, 97.1 à 97.12, 108.1 et 108.2 de la Loi ARTM, de même que le Règlement, sont inconstitutionnels en ce que ces dispositions imposent une redevance de transport qui est une taxe indirecte déguisée. La demanderesse propose également des arguments subsidiaires.

A.           Arguments de la demanderesse

[108]      Voici les arguments détaillés de la demanderesse, y compris les arguments subsidiaires :

1)            En vertu de l’article 92(2) de la LC1867, une province est limitée dans ses champs de taxation aux seules taxes directes. La jurisprudence a déterminé qu’une somme perçue par le gouvernement sera une taxe si elle est « (1) exigée par la loi, (2) imposée sous l’autorité de la législature, (3) perçue par un organisme public, (4) pour une fin d’intérêt public »[61];

2)            Pour qu’il s’agisse d’une taxe indirecte, il faut répondre par l’affirmative aux deux questions suivantes[62] :

  •             Selon sa tendance générale, la taxe en cause a-t-elle comme objet ou comme effet que son payeur ne soit pas la personne qui en assume le fardeau?
  •             Dans l’affirmative, le report du fardeau découle-t-il uniquement d’une transaction commerciale, par opposition à une intégration dans les coûts de production d’un bien ou d’un service ?

3)            Un prélèvement effectué au moment d’une demande de permis de construction de bâtiments destinés à la revente constitue un prélèvement de nature indirecte, puisqu’il sera intégré dans le prix de vente lorsque les bâtiments seront revendus à des particuliers;

4)            Or, les taxes indirectes sont de compétence exclusive du Parlement du Canada, conformément à l’article 91(3) de la LC1867;

5)            Dans certaines circonstances, un prélèvement de nature indirecte peut néanmoins relever de la compétence d’une province lorsqu’il porte sur les ressources naturelles non renouvelables, les ressources forestières ou l’électricité (art. 92A LC1867) ou lorsqu’il est accessoire à un régime règlementaire[63]. Mais pour que la Constitution autorise un tel prélèvement, il doit exister un lien suffisamment étroit entre le régime règlementaire et le bénéfice qu’en tire la personne visée;

6)            Pour déterminer s’il s’agit d’une telle redevance, la Cour suprême du Canada a développé un test en deux étapes qui se résume comme suit[64] :

1-            Est-ce qu’un tel régime de règlementation existe? Il faut alors vérifier l’observance de ces trois facteurs :

a-L’existence d’un code de règlementation complet et détaillé;

b-Un objectif spécifique destiné à influencer certains comportements individuels, c’est-à-dire qu’il circonscrit un mode de comportement précis qui est exigé ou interdit;

c-Des coûts réels ou dûment estimés de la règlementation;

2-            Est-ce que le régime règlementaire est applicable à la personne visée? Il faut alors vérifier l’observance d’un quatrième facteur :

d-Un lien entre la règlementation et la personne qui fait l’objet de la règlementation;

7)            Lorsque le lien n’est que très indirect ou qu’il y a une disproportion entre les sommes prélevées et les coûts du système, le prélèvement doit être considéré comme une taxe indirecte;

8)            En l’espèce, le Règlement impose la redevance à des propriétés comme les immeubles de la demanderesse, qui ne tirent pas ou peu de bénéfice de la proximité avec une station du REM;

9)            En effet, vu la longue distance à parcourir à partir des immeubles pour rejoindre la station Fairview−Pointe-Claire, aucune augmentation sensible de la valeur foncière ne peut être attribuable au REM. La preuve démontre spécifiquement ici (Pièce P-5, rapport d’expert de M. Dubé) que la véritable distance à pied entre les immeubles de la demanderesse et cette station ne cause aucune augmentation significative de valeur pour les immeubles de la demanderesse;

10)        En outre, la proximité avec la station Fairview−Pointe-Claire ne peut bénéficier aux futurs habitants de l’endroit, puisque ceux-ci ne pourront s’y rendre à pied;

11)        S’il existe un bénéficie relatif à la présence d’un meilleur réseau de transport collectif dans la Ville, celui-ci est négligeable par rapport à la valeur financière de cette contribution;

12)        À tout événement, cet éventuel bénéfice ne serait pas différent de celui dont jouiraient des propriétaires de Pointe-Claire situés à plus d’un kilomètre du REM, lesquels ne se voient imposer aucune redevance;

13)        Le Tribunal doit également prendre en considération les indices suivants afin de déterminer que la redevance n’est pas une taxe foncière directe :

  •             Le régime ne vise pas à imposer les terrains, mais à financer le coût des infrastructures de transport tant à proximité que d’autres situées à l’extérieur de la municipalité qui a la responsabilité de prélever la taxe;
  •             Les terrains en question ne seraient pas assujettis à la taxe si aucun travail d’exploitation n’était entrepris;
  •             Les modalités des perceptions sont liées aux terrains, mais ce n’est pas la propriété en soit du terrain qui fait l’objet de la taxe;
  •             La taxe vise en réalité le financement d’un projet d’infrastructure de transport régional;
  •             Le calcul de la taxe n’est pas basé sur la valeur du terrain, mais sur sa simple superficie de plancher;

 

  •             Les redevances ne sont pas en réalité imposées aux propriétaires des terrains en soi; la loi est plus formulée de façon à les imposer aux personnes qui cherchent à obtenir un permis de construction, et ce, à titre de condition de délivrance de ce permis;
  •             La redevance est imposée (la plupart du temps à un propriétaire) dans le cours de la fabrication d’un bien destiné à la vente (la construction d’un bâtiment dont la valeur excède 792 165 $);
  •             Les redevances imposées à des entreprises en construction résidentielle seront répercutées sur les futurs acheteurs des résidences construites dans les nouveaux développements faisant l’objet de l’exigence des redevances;

14)        En application d’un raisonnement similaire, la Cour suprême du Canada a reconnu dans l’arrêt Ontario Home Builders’ Association c. Conseil scolaire de la région de York[65] qu’une loi provinciale permettant à des conseils scolaires d’adopter une règlementation subordonnant à la délivrance de permis de construction au paiement d’une « redevance d’exploitation » relative à la construction d’infrastructures scolaires n’était pas une taxe foncière directe et qu’elle ne pouvait pas se justifier par l’art. 92 (2) LC1867;

15)        Le texte de toutes les lois pertinentes applicables sur le REM et l’ARTM démontrent que leur but est la construction du REM et la mise en place d’un système de transport collectif, et non pas une intention de modifier ou régir les comportements en matière de transport des résidents de la Ville qui résident dans un rayon de 1 km de la station Fairview−Pointe-Claire du REM. De plus, la redevance ne donne rien aux entrepreneurs comme la demanderesse, d’où absence de tout lien entre la redevance et la demanderesse, d’où inconstitutionnalité;

16)        L’article 81 de la Loi ARTM prévoit le financement du REM selon le principe du prorata de l’utilisation par les résidents du territoire de chaque municipalité. Le financement du REM ne dépend pas uniquement des travaux qui se font dans le rayon de 1 km autour des stations du REM mais plutôt de toutes les municipalités et de tous leurs territoires, ce qui démontre que la redevance est une taxe car limitée sans raison au rayon de 1 km;

17)        Les ententes de financement pour le REM auxquelles les lois font référence n’ont pas été formellement mises en preuve par les défendeurs, et cela empêche ainsi le Tribunal de conclure qu’il y a un lien entre la règlementation et la personne qui fait l’objet de la règlementation;

18)        Subsidiairement, la délégation du pouvoir de taxation opérée les dispositions de la Loi REM et la Loi ARTM violent l’article 53 LC1867. En effet, l’article 53 LC1867 prévoit que tout projet de loi de nature fiscale doit tirer son origine de l’Assemblée législative élue;

19)        Or, même si le Tribunal devait en arriver à la conclusion que la redevance correspond à une taxe directe que la législature provinciale peut validement adopter  ce qui n’est pas admis, mais plutôt vigoureusement nié par la demanderesse  les municipalités n’auraient pas validement obtenu la compétence d’exercer ce pouvoir de taxation;

20)        En effet, le chapitre V.1 de la Loi ARTM (article 97.1 à 97.12) tente d’opérer une délégation du pouvoir de taxation de la législature à l’ARTM et aux municipalités sans faire usage d’une expression claire, dépourvue d’ambigüité, de son intention de déléguer un tel pouvoir de taxation, et ce, en raison du libellé même des articles susmentionnés qui traite d’une « redevance » et qui tente de la déguiser en charge non fiscale;

21)        Les articles attaqués de la Loi REM et de la Loi ARTM ne peuvent en aucun cas constituer des délégations valides du pouvoir de taxer puisqu’ils font en sorte de transformer une délégation visant un prélèvement règlementaire en une taxe à caractère général sans pour autant confier expressément aux conseils municipaux le pouvoir de taxer;

22)        En l’absence d’une délégation expresse et dépourvue d’ambigüité du pouvoir de taxation, la Loi REM et la Loi ARTM, dans leurs articles attaqués, sont inconstitutionnelles et ultra vires en ce qu’elles établissent une taxe, le tout en contravention des articles 53 et 90 LC1867;

23)        Ce principe est confirmé par la décision Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ) région de l'Outaouais inc. c. Gatineau (Ville de)[66];

24)        Subsidiairement, si la redevance n’est pas une taxe directe valide, elle ne constitue pas non plus une charge non fiscale que la province peut validement adopter. La redevance exigée par l’ARTM ne vise pas à couvrir les seuls coûts de la prestation d’un quelconque service offert aux entrepreneurs en construction ainsi qu’aux promoteurs immobiliers propriétaires fonciers;

25)        La redevance n’est pas une « redevance règlementaire » valide au sens des charges règlementaires permises pour financer le fonctionnement de ses programmes en vertu des articles 92(13) et 92(16) LC1867:

26)        Un régime règlementaire exige notamment un code de règlementation complet et détaillé, un objectif de règlementation qui cherche à influencer un comportement, l’existence de coûts réels ou estimés liés à la règlementation et un rapport entre celui-ci et la personne qui en bénéficie ou qui l’a rendue nécessaire. Or, les dispositions de la Loi REM et la Loi ARTM ne rencontrent pas les critères de validation de ces prélèvements spécialisés dégagés par la jurisprudence;

27)              Pour être constitutionnelles, les charges règlementaires doivent être circonscrites au paiement de coûts d’infrastructures directement associés aux nouvelles constructions et elles ne peuvent donc pas inclure des frais associés à la construction d’autres infrastructures, tel le REM;

28)              Les dispositions législatives contestées prévoient une redevance qui ne s’inscrit pas dans un système de charges règlementaires, mais prend plutôt la forme d’une taxe indirecte que l’on aura tenté de déguiser en charge règlementaire;

29)              La redevance ne peut être décrite comme faisant partie d’un simple régime règlementaire visant à encadrer la construction et le développement de nouveaux secteurs immobiliers, mais elle permet plutôt de financer les travaux d’infrastructure du REM, lesquels ne bénéficieront pas exclusivement à ceux qui en défraieront les coûts;

30)              La redevance ne vise pas à défrayer exclusivement les coûts des infrastructures rendues nécessaires par les nouveaux développements, mais elle vise à compenser des coûts d’infrastructures que l’on planifie de manière indépendante du potentiel besoin que pourraient créer les développements immobiliers visés par la redevance;

31)              En effet, la construction du REM n’est pas rendue nécessaire par celles et ceux qui décideront d’habiter dans les quartiers qui avoisinent les gares. Il s’agit d’un service supplémentaire que l’on veut offrir à ceux déjà en place;

32)              Le projet du REM ne vise donc pas à répondre à un nouveau besoin engendré par le développement immobilier près des différentes gares prévues, le projet cherche, au mieux, à susciter l’intérêt pour de tels développements immobiliers, conformément au mandat de l’ARTM de « favoriser l’articulation des services de transport collectif et de l’urbanisation sur son territoire »;

33)              Un régime de redevances doit être circonscrit au paiement des coûts d’infrastructures directement associés aux nouvelles constructions et ne peut donc pas inclure des frais associés à l’entretien, la réfection ou la construction d’autres infrastructures, telle la construction du REM pour être valide;

34)              Le coût des licences en vertu des alinéas (13) et (16) de l’article 92 LC1867 ne doit couvrir que les frais raisonnablement nécessaires au fonctionnement du régime règlementaire et, dans le cas présent, la Loi REM permet de percevoir des sommes beaucoup plus importantes et surtout, qui sont sans lien particulier avec l’ouvrage en construction;

35)              La redevance, s’étendant aux coûts de construction du REM, est sans lien particulier avec les développements immobiliers à partir desquels les sommes sont prélevées, il s’agit donc d’un exercice en soi et non d’un exercice règlementaire puisque l’objectif du prélèvement n’est plus celui d’aménager le territoire, mais plutôt de prélever des sommes pour défrayer des coûts de services publics généraux;

36)              Même s’il était possible d’imputer les besoins d’infrastructures du REM uniquement aux nouveaux développements immobiliers situés à proximité d’une des futures gares, ce qui n’est pas admis mais nié catégoriquement, il n’existe aucun lien direct entre un hypothétique besoin créé par de tels développements immobiliers, d’une part, et les coûts afférents à la construction d’autres gares ou d’autres parties des infrastructures du REM ailleurs dans la grande région métropolitaine, d’autre part;

37)              Or, si en vertu de l’art. 97.11 de la Loi ARTM, il doit être tenu une comptabilité distincte pour chacune des redevances qu’elle établit, la Loi ARTM ne prévoit aucunement que les redevances doivent uniquement servir à défrayer les coûts raisonnables des besoins qu’auraient fait naître ces nouveaux développements immobiliers;

38)              L’article 97.2 al. 2 de la Loi ARTM prévoit que la méthode de calcul de la redevance repose sur un taux prévu au règlement multiplié par la superficie de plancher visée par les travaux;

39)              Or, « la superficie de plancher visée par les travaux » n’a pas de lien avec le régime de transport en lui-même. Il n’y a pas de lien direct entre la « superficie de plancher » d’un immeuble et l’usage d’un moyen de transport collectif disponible à l’intérieur d’une distance de 1 km de cet immeuble;

40)              Dans un tel cas, le régime doit être invalidé au motif qu’il y a un bris du lien entre les redevances et le régime règlementaire et que, par conséquent, les prélèvements exigés sont en fait des taxes indirectes ultra vires;

41)              De plus, la redevance répartit le fardeau financier associé au REM de manière arbitraire plutôt que selon quelque principe de proportionnalité des bénéfices du prétendu régime règlementaire;

42)              Tant les bénéfices associés à la jouissance du service de transport collectif qu’offrira le REM une fois en place, que le bénéfice de la plus-value foncière qui pourrait résulter de la création de ce nouveau réseau, seront répartis également entre ceux qui habitent une résidence construite avant l’implantation du REM, et ceux qui habiteront une résidence construite après le démarrage du projet. Or, seuls les seconds devront payer la « redevance de transport », qu’ils utilisent ou non le REM;

43)              Par ailleurs, il n’y a pas de lien direct entre le fait d’habiter à l’intérieur d’un certain périmètre des gares et le fait d’utiliser ce moyen de transport qu’est le REM, et il y a encore moins de lien entre le fait d’être un nouvel habitant du quartier par opposition à un habitant ayant déjà sa résidence à proximité des gares, quant à l’usage de ce service;

44)              D’ailleurs, le projet d’installer d’immenses stationnements incitatifs au profit des résidents de territoires plus éloignés démontre que ce service bénéficiera à un public beaucoup plus grand;

45)              Or, seules les nouvelles constructions à l’intérieur d’un périmètre de 1 km des gares sont visées par la redevance, ce qui démontre clairement qu’il s’agit d’une taxe déguisée que l’on tente d’imposer, à savoir un mode de financement que l’on espère cacher entres autres, à l’intérieur du prix de vente des nouvelles constructions dont la valeur excède 792 165 $;

46)              La redevance ne peut donc pas tirer sa validité des articles 92 (13) et 92 (16) LC1867 puisqu’elle autorise des prélèvements indirects qui sont supérieurs aux coûts de la règlementation;

47)              Subsidiairement, la redevance ne peut bénéficier de l’exception à l’incompétence provinciale en matière de taxation indirecte prévue à l’article 92 (9) LC1867;

48)              La Province peut, en vertu de l’article 92(9) LC867, légiférer sur les licences de boutiques, de cabarets, d’auberges, d’encanteurs et autres licences, dans le but de prélever un revenu pour des objets provinciaux, locaux, ou municipaux;

49)              La redevance imposée par la Loi REM et la Loi ARTM ne peut être justifiée en vertu de l’article 92(9) LC867 parce que les recettes qu’elle génèrerait sont de beaucoup supérieures aux coûts de la règlementation et, subsidiairement, ne sont pas accessoires ou rattachées à un régime de règlementation provinciale valide.

[109]      Que décider?

[110]      Pour les raisons qui suivent, le Tribunal ne peut retenir les arguments de la demanderesse. Voici pourquoi.

B.           Décision du Tribunal

[111]      Le Tribunal débute par énoncer les principes généraux, sur lesquels tous s’entendent.

[112]      Bien que le pouvoir de taxation des provinces soit limité à la taxation directe[67], ces dernières ont néanmoins compétence pour procéder à un prélèvement, que celui-ci présente des aspects de taxation directe ou indirecte, s’il s’agit d’une redevance de nature règlementaire ou d’une composante d’un régime règlementaire[68].

[113]      Afin d’évaluer la constitutionnalité du prélèvement contesté, il faut déterminer le caractère véritable des dispositions législatives qui le prévoient ou du régime en cause[69].

[114]      Quand un prélèvement comporte à la fois les caractéristiques d’une taxe et d’une redevance règlementaire, il faut s’attarder à l’objet principal du régime législatif et déterminer s’il s’agit (i) de taxer, c’est-à-dire de percevoir des revenus à des fins générales, ou (ii) de financer ou de créer un régime de règlementation, c’est-à-dire être une redevance de nature règlementaire ou être accessoire ou rattaché à un régime de règlementation[70].

[115]      Tous s’entendent que la redevance ne peut pas être ici qualifiée de frais d’utilisation à l’égard des promoteurs immobiliers pouvant être visés par la redevance, puisqu’aucun service ne leur est directement rendu par l’ARTM et qu’ils ne seront pas les utilisateurs du REM.

[116]      La Cour suprême du Canada a établi que les principales caractéristiques d’une taxe sont d’être (i) exigée par la loi, (ii) imposée sous l’autorité d’une législature, (iii) perçue par un organisme public, (iv) pour une fin d’intérêt public, (v) sans aucun lien avec une forme de régime de règlementation[71]. Il est vrai que les quatre premières caractéristiques d’une taxe s’appliquent à la plupart des prélèvements gouvernementaux, donc c’est véritablement la cinquième caractéristique qui permet de distinguer une taxe d’une redevance règlementaire[72]. Les mots « sans aucun lien » sont très importants.

[117]      Selon la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, pour déterminer si des droits constituent une redevance de nature règlementaire, il faut dans un premier temps rechercher la présence d’un régime de règlementation. Les facteurs à examiner pour identifier un régime de règlementation comportent :

1)            L’existence d’un code de règlementation complet, complexe et détaillé;

2)            Un objectif spécifique destiné à influencer certains comportements individuels;

3)            Des coûts réels ou dûment estimés de la règlementation;

4)            Un lien entre la règlementation et la personne qui fait l’objet de la règlementation, cette personne bénéficiant de la règlementation ou en ayant créé le besoin. On doit noter la présence du « ou », qui n’est pas un « et ».

[118]      Il ne s’agit que d’une liste de facteurs à examiner; il n’est pas nécessaire qu’ils soient tous présents pour conclure à l’existence d’un régime de règlementation. En outre, la liste n’est pas exhaustive[73].

[119]      Dans un deuxième temps, il faut déterminer s’il existe un lien entre la redevance et le régime lui-même[74], ce qui sera le cas lorsque les revenus sont liés aux coûts du régime de règlementation ou que les redevances elles-mêmes ont un objet de règlementation, comme la règlementation d’un comportement donné[75].  Autrement dit, il y a un lien entre le prélèvement et le régime de règlementation lorsque les revenus provenant du prélèvement sont liés aux coûts du régime de règlementation ou lorsque le prélèvement a lui-même un objet de règlementation, comme la règlementation d’un comportement donné.

[120]      Concernant le lien entre les revenus et les coûts du régime, la Cour suprême du Canada indique que ce critère est souple et que la qualification d’un prélèvement comme redevance règlementaire dépend moins de la présence ou de l’absence de surplus que de l’affectation des prélèvements ou d’une partie substantielle de ceux-ci à l’activité réglementée[76].

[121]      Donc, quelle est ici la nature de la redevance?

[122]      En application du test en deux étapes, le Tribunal conclut que la redevance de transport est une redevance de nature règlementaire.  Voici pourquoi.

[123]      Première étape : l’existence d’un régime de règlementation

[124]      Premier facteur : existence d’un code de règlementation complet, complexe et détaillé. Selon le Tribunal, la redevance de transport s’inscrit ici dans un vaste régime de règlementation en matière de transport, d’infrastructure majeure ainsi que d’aménagement urbain dans la région métropolitaine de Montréal.

[125]      L’ARTM doit établir une vision complète et intégrée de la mobilité sur son territoire pour identifier les besoins en matière de transport collectif, en collaboration avec le ministre des Transports et la Communauté métropolitaine de Montréal.

[126]      Par conséquent, la redevance contestée doit être placée dans le contexte d’un régime complet, complexe et détaillé qui inclut notamment la Loi sur les transports[77], la Loi ARTM, le Règlement, la Loi REM, la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme[78], ainsi que les résolutions et règlements municipaux concernant la délivrance des permis de construction, le prélèvement de la redevance et l’aménagement du territoire.

[127]      Entre autres, les dispositions de la Loi ARTM touchent à des sujets variés, incluant l’offre des services de transport aux usagers, la gestion des immobilisations et du réseau artériel métropolitain, la tarification des services et les normes en matière d’utilisation de titres de transports, d’accessibilité et de comportement des usagers.

[128]      Interprétés conjointement, ces lois et le Règlement prévoient en détail comment le REM sera établi et financé, comment il s’intégrera au réseau de transport collectif préexistant et quelles sont les modalités de son fonctionnement et de sa gestion.

[129]      Ensemble, les dispositions de ces lois et du Règlement constituent donc un régime complet, complexe et détaillé, régissant l’établissement et l’exploitation du réseau de transport collectif de la région de Montréal, auquel le REM sera intégré. La demanderesse a tort quand elle argumente qu’il n’y a pas de code complet.

[130]      Les débats parlementaires sur la Loi REM[79] sont également très clairs quant à l’intention du législateur de mettre sur pied une redevance et non une taxe.

[131]      L’argument de la demanderesse quant à l’absence de précision dans la Loi ARTM, la Loi REM et le Règlement et quant à la mention spécifique des « promoteurs » ou « constructeurs immobiliers » est exactement le type d’arguments que la Cour suprême du Canada n’a pas retenu au paragraphe 15 de l’arrêt 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général)[80].

[132]      Deuxième facteur : un objectif spécifique destiné à influencer certains comportements individuels. Contrairement à ce que prétend la demanderesse, les objectifs de cette règlementation sont clairement destinés à influencer des comportements individuels[81].

[133]      La mission de l’ARTM d’assurer, par des modes de transport collectif, la mobilité des personnes sur son territoire, incluant celles à mobilité réduite, s’inscrit dans une perspective de développement durable et de diminution de l’empreinte carbone, conformément à l’article 5 de la Loi ARTM.

[134]      L’ARTM doit promouvoir le transport collectif, le transport actif et le covoiturage, notamment en établissant ou en encourageant des mesures incitatives afin de favoriser l’utilisation de ces modes, tel qu’indiqué à l’article 6 de la Loi ARTM.

[135]      Par la mise en place de mesures telles que la réalisation et l’exploitation du REM, incluant les infrastructures, le régime règlementaire cherche à modifier le comportement des citoyens et les inciter à utiliser ses services conformément aux objectifs environnementaux que s’est donnés le gouvernement qui doivent guider l’ARTM. On ne peut conclure autrement : pourquoi le REM aurait-il même été construit si le but n’est pas d’inciter les citoyens de s’en servir?

[136]      Les débats parlementaires sur la Loi REM[82] confirment par ailleurs l’objectif d’influencer les comportements et d’encourager le transport collectif via le REM.

[137]      De plus, selon le Tribunal, il est clair que certaines dispositions de la Loi ARTM visent à encourager les promoteurs immobiliers à développer des quartiers « TOD » (Transit Oriented Development) autour des futures stations du REM, conformément aux objectifs du Plan métropolitain d’aménagement et de développement (le « PMAD ») de la Communauté Métropolitaine de Montréal (la « CMM »). On a vu que, dans le cadre de sa mission, l’ARTM doit assurer, par des modes de transport collectif, la mobilité des personnes sur son territoire et de plus favoriser l’articulation des services de transport collectif et de l’urbanisation (article 5 et paragraphe 8.1 de l’article 6 de la Loi ARTM).  On doit ajouter que l’ARTM doit identifier les zones de son territoire propices à l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif qu’elle finance avec l’imposition de la redevance de transport, en tenant compte du PMAD de la CMM (article 97.1 de la Loi ARTM).

[138]      Le régime règlementaire que la redevance de transport finance vise donc le développement du transport collectif et l’articulation de l’urbanisation et des services de transport collectif sur le territoire de l’ARTM, rendant ainsi possibles le développement de quartiers TOD et la construction de leurs bâtiments par les promoteurs immobiliers autour des futures stations du REM.

[139]      Dans cette optique, le fait pour la redevance de transport de financer l’infrastructure de transport collectif qu’est le REM et de participer ainsi à la réalisation de cette infrastructure influe sur l’urbanisation du territoire et donc sur le comportement des acteurs du développement urbain que sont les promoteurs immobiliers. En finançant le REM, la redevance de transport influence donc le comportement des promoteurs immobiliers qu’elle vise, en plus bien sûr d’influencer le comportement des citoyens qui sont portés à utiliser le transport collectif.

[140]      D’autres éléments de preuve vont dans le même sens. On verra notamment le Plan métropolitain d’aménagement et de développement PMAD »), dans la Pièce PGQ-8[83].

[141]      La redevance de transport a ainsi un objet de règlementation visant à encourager un comportement donné par les promoteurs immobiliers, soit le développement de quartiers TOD et la construction de leurs bâtiments autour des futures stations du REM. Ceci est caractéristique d’un régime de règlementation, de l’avis du Tribunal. Les articles précédemment décrits de la Loi ARTM le confirment; il s’agit d’articles généraux mais très révélateurs. Le Tribunal ne peut retenir les références législatives générales que la demanderesse a cité, un peu de façon pêle-mêle.

[142]      Troisième facteur : des coûts réels ou dûment estimés de la règlementation. Selon le Tribunal, la présence d’une évaluation des coûts du régime confirme l’existence d’un régime de règlementation légitime.

[143]      En l’espèce, les débats parlementaires de l’étude détaillée du projet de loi n° 137 portant sur les articles 37 et 97.1 de la Loi ARTM dénotent les préoccupations du législateur de limiter la redevance à une portion des coûts connus ou dûment évalués[84].

[144]      On sait également de l’article 38 de la Loi REM que la redevance ne peut pas dépasser le plafond de 600 000 000 $ et ne peut exister pour une période excédant 50 ans. Donc, sur un projet estimé à 6 milliards de dollars, on constatera que la redevance est liée au projet et ne peut être perçue comme un revenu à des fins générales.

[145]      De plus, le 11 avril 2017, l’Assemblée nationale donnait le mandat au Vérificateur général du Québec de faire une vérification du montage financier du projet de REM quant au respect des règles comptables. En juin 2018, le Vérificateur général du Québec déposait à l’Assemblée nationale l’analyse comptable du montage financier du REM, dont une section parle spécifiquement de la redevance de transport[85]. De l’avis du Tribunal, cette preuve démontre l’existence de coûts réels ou dûment estimés du régime règlementaire; la demanderesse n’a présenté aucune preuve contraire, mais s’est contentée de faire des suppositions.

[146]      Quatrième facteur : un lien entre la règlementation et la personne qui fait l’objet de la règlementation, cette personne bénéficiant de la règlementation ou en ayant créé le besoin. Le dernier facteur de cette étape consiste à établir un lien entre la règlementation et la personne visée, qui en a créé le besoin ou, comme en l’espèce, en bénéficie.

[147]      L’exigence d’un bénéfice ne requiert pas la preuve que chaque personne visée tirera un avantage spécifique et démontré. La Cour suprême du Canada a par exemple considéré que des promoteurs immobiliers qui devaient payer une redevance visant à financer la construction d’écoles bénéficieront, de manière générale, d’installations scolaires adéquates, sans qu’il ne soit nécessaire d’établir que chaque acquéreur de maison utilisera dans les faits ces installations[86]. C’est le même cas ici.

[148]      L’article 42 du projet de loi n° 137 indiquait que le rayon d’application de la redevance autour d’une station serait au maximum de 1,5 kilomètre. La limite du rayon finalement adoptée après des débats parlementaires, est de 1 kilomètre autour des stations du REM[87],

[149]      Cette limite restreinte permet d’une part de s’assurer que les personnes visées par le prélèvement jouissent des bénéfices rattachés à l’aménagement, la construction puis la mise en service d’un transport collectif qui donnera un accès fluide et rapide aux pôles économiques majeurs de l’île de Montréal. Ainsi, les investisseurs immobiliers bénéficieront de la forte attractivité du REM, découlant notamment de l’intégration intermodal des services de transport qui permettra de rendre plus facilement accessible les multiples pôles d’emploi[88]. Des dépassements significatifs des objectifs d’achalandage du REM sont d’ailleurs évoqués[89]. Encore ici, la preuve favorise la position du PGQ; la demanderesse n’a présenté aucune preuve contraire, mais s’est contentée de faire des suppositions. Le Tribunal note entre autres que la zone de la station du REM dans la Ville de Pointe-Claire a été spécifiquement étudiée[90].

[150]      D’autre part, la mise en œuvre des stratégies de gestion de l’urbanisation concernant les secteurs de densification autour du REM permettrait de tirer profit sur le retour des investissements consentis dans l’immobilier par des investisseurs tel que la demanderesse.

[151]      Les entrepreneurs en construction tireront ainsi avantage de la construction d’ensembles résidentiels dotés de services publics adéquats[91]. La demanderesse utilise d’ailleurs elle-même la proximité de la station du REM comme élément promotionnel d’un nouveau projet situé sur les lots en litige, comme elle le dit sur son site Web[92].

[152]      La preuve supporte cette conclusion. Non seulement les promoteurs immobiliers visés par la redevance de transport bénéficient du régime de règlementation formé notamment par les dispositions de la Loi REM, de la Loi ARTM et du Règlement, en raison de la plus-value foncière de leurs immeubles situés à 1 km d’une station du REM résultant de la réalisation du REM[93], mais il y a plus. Des études identifient notamment trois bénéfices à l’origine de cette plus-value foncière pour les promoteurs immobiliers, à savoir : 1) une augmentation de la densité de bâtiments autorisée autour des stations du REM; 2) une augmentation des valeurs de vente des bâtiments construits; et 3) une augmentation de la vitesse de vente des bâtiments construits[94]. Les promoteurs immobiliers tirent donc un bénéfice important de l’arrivée du REM puisque leurs immeubles et les bâtiments qu’ils érigent en proximité des nouvelles stations de l’infrastructure gagnent en valeur. Ceci est également caractéristique d’un régime de règlementation. Encore ici, la preuve favorise la position du PGQ[95]; la demanderesse n’a présenté aucune preuve contraire, mais s’est contentée de faire des suppositions.

[153]      Les défendeurs n’avaient pas en plus l’obligation de faire la preuve que, depuis la construction du REM et de la station Fairview−Pointe-Claire, il y a eu une plus-value et un rapport quant aux projets immobiliers construits.

[154]      Par ailleurs, il est vrai que la preuve d’expert de la demanderesse (Pièce P-5, rapport de M. Dubé) démontre que les immeubles de la demanderesse ne bénéficient pas d’une plus-value car ils sont situés à une distance de marche de plus de 800 mères ou plus de dix minutes de marche de la station Fairview−Pointe-Claire du REM. Cette preuve d’expert n’a pas été contredite par une expertise formelle en défense. Cependant, le Tribunal est d’avis que la Cour suprême du Canada exige la démonstration du lien entre la règlementation et les personnes visées, qui en ont créé le besoin ou, comme en l’espèce, en bénéficient. La Cour suprême du Canada rejette spécifiquement la preuve au cas par cas comme étant la norme d’analyse du test constitutionnel. L’analyse est beaucoup plus générale[96] et la preuve des défendeurs soutient la position du PGQ. Le Tribunal rappelle que l’exigence d’un bénéfice ne requiert pas la preuve que chaque personne visée tirera un avantage spécifique et démontré, incluant la partie demanderesse elle-même.

[155]      Ainsi, contrairement à ce que plaide la demanderesse, le régime de règlementation n’est pas très large et n’est pas sans liens suffisamment étroits avec les personnes visées. Ces liens ne sont pas d’une façon « très indirecte »[97].

[156]      Le Tribunal ne peut non plus retenir l’argument de la demanderesse basé sur l’article 81 de la Loi ARTM et la question du prorata de l’utilisation du REM par les résidents du territoire de chaque municipalité. L’argument de la demanderesse à cet égard ne peut être retenu car l’article 81 de la Loi ARTM ne s’applique même pas au REM. Il s’agit d’une disposition générale dans la Loi ARTM que le législateur n’a pas rendu applicable au REM au moyen de la Loi REM[98]. Rappelons que l’ARTM a la mission de gérer plusieurs autres types et projets de transports collectifs.

[157]      Dans le même ordre d’idées, le Tribunal ne peut non plus retenir l’argument de la demanderesse basé sur l’article 97.11 de la Loi ARTM et la comptabilité distincte. Cet article est une disposition générale qui encadre toutes les redevances de transport que l’ARTM gère; ceci n’est pas limité au projet du REM et surtout pas à une comptabilité par station du REM.

[158]      Le Tribunal ne retient pas non plus l’argument de la demanderesse selon lequel ce n’est pas le REM qui cause une plus-value, mais plutôt les municipalités par le changement de zonage autour des stations du REM. Le Tribunal déduit que les changements de zonage permettant désormais des constructions plus denses dans les zones proches des stations du REM sont causés par la présence du REM. Ainsi, peu importe qui permet l’implantation de projets immobiliers près du REM, c’est le REM qui en est la cause.

[159]      Finalement, le Tribunal ne peut pas non plus retenir l’argument de la demanderesse portant sur l’absence de mise en preuve formelle des ententes pour le financement du REM. Même si l’article 8 de la Loi ARTM prévoit la conclusion d’ententes, l’imposition de la redevance ne repose aucunement sur la conclusion de telles ententes; on a vu précédemment les dispositions législatives pertinentes et aucune ne porte sur une quelconque entente. Ainsi, l’absence formelle de mise en preuve de cette entente ne change rien, tout comme sa présence non plus ne change rien[99]. Au surplus, cet argument de la demanderesse repose sur l’inexistence d’une entente en vertu de l’article 8 de la Loi ARTM n’apparaît nulle part à toutes les versions d’avis qu’elle a envoyés au PGQ; dans ces circonstances, le Tribunal ne peut même pas se prononcer à cet égard.

[160]      Le Tribunal conclut que la redevance présente donc, dans un premier temps, tous les facteurs énoncés plus haut permettant d’identifier un régime de règlementation.

[161]      Passons à la deuxième étape.

[162]      Deuxième étape : le lien entre le régime et la redevance

[163]      Le Tribunal conclut que, dans un deuxième temps, il existe un lien entre ce prélèvement et le régime lui-même, en ce qu’il sert à couvrir les dépenses du régime de règlementation, soit la construction du nouveau réseau de transport collectif.

[164]      Lorsque qu’une redevance de nature règlementaire est affectée aux coûts du régime, comme en l’espèce, il faut que les recettes générées par les redevances soient liées aux coûts du régime de règlementation[100].

[165]      La Cour suprême du Canada rappelle qu’il faut laisser au gouvernement une marge de manœuvre pour autant que l’on tente raisonnablement de faire correspondre les recettes provenant de prélèvements et les coûts de la règlementation[101].

[166]      Ici, les sommes issues de la redevance de transport font partie de la contribution financière que l’ARTM apporte en vue de la réalisation du REM et ne peuvent donc être affectées à d’autres fins que son financement[102].

[167]      De plus, le produit de la redevance a été plafonné à un montant de 600 000 000 $ et pour une période n’excédant pas 50 ans. L’analyse comptable et les débats parlementaires examinés précédemment confirment que cette somme ne représente qu’une petite fraction des coûts de l’ensemble du régime. Encore ici, la preuve favorise la position du PGQ; la demanderesse n’a présenté aucune preuve contraire, mais s’est contentée de faire des suppositions.

[168]      Il appert donc au Tribunal que les recettes provenant de la redevance de transport sont étroitement rattachées aux coûts du régime et ne dépasseront pas les coûts totaux de la réalisation du REM, satisfaisant ainsi à la deuxième étape.

[169]      Donc, selon le Tribunal, la contribution de l’ARTM au financement de toute cette infrastructure de transport collectif conformément à sa mission est rendue possible par le paiement de la redevance par les propriétaires/promoteurs immobiliers, selon l’article 97.1 de la Loi ARTM et l’article 38 de la Loi REM. Le lien entre la redevance et le REM est donc établi[103].

[170]      Considérant l’analyse des deux étapes relativement à l’existence d’un régime de règlementation et au lien entre ce régime et la redevance, le Tribunal conclut que la redevance de transport constitue une redevance règlementaire valide relevant de la compétence de la province.

[171]      Cet examen confirme que, par son caractère véritable, l’objet principal de la redevance de transport n’est pas de taxer, c’est-à-dire percevoir des revenus à des fins générales, mais bien de financer des aspects spécifiques d’un régime de règlementation, autrement dit être une redevance de nature règlementaire ou être acces­soire ou rattaché à un régime de règlementation[104].

[172]      Le Tribunal n’a donc pas à aborder les deux arguments subsidiaires de la demanderesse portant sur la question de la charge non fiscale et sur la question de l’exception à l’incompétence provinciale en matière de taxation indirecte; ces arguments sont sans objet vu la conclusion du Tribunal.

[173]      Le Tribunal ne peut également pas retenir toute référence par la demanderesse à la décision Comité citoyens-commerçants de Percé c. Ville de Percé[105], puisque ce jugement ne se penche pas sur la validité constitutionnelle d’une redevance; cette décision vise uniquement l’angle du droit administratif et règlementaire.

[174]      Par ailleurs, le Tribunal doit aborder le troisième argument subsidiaire de la demanderesse selon lequel il y aurait une délégation du pouvoir de taxation opérée les dispositions de la Loi REM et la Loi ARTM qui violeraient l’article 53 LC1867. La réponse est très simple : puisque le Tribunal est d’avis que les dispositions contestées de la Loi REM et de la Loi ARTM ne visent pas l’imposition d’une taxe, alors donc il ne peut non plus y avoir violation de l’article 53 LC1867. En effet, il n’y a aucune délégation du pouvoir de taxation[106]. Le Tribunal rejette donc cet argument subsidiaire de la demanderesse.

[175]      Le Tribunal ajoute enfin que ce n’est pas parce que la Ville perçoit ici la redevance que la redevance est inconstitutionnelle pour autant : la Ville est le mandataire de l’ARTM pour la perception de la redevance, aux termes de l’article 97.6 de la Loi ARTM.

[176]      Le Tribunal conclut donc que la redevance de transport est une redevance de nature règlementaire relevant de la compétence de la province et ne constitue pas une taxe indirecte. Le Tribunal rejette donc la demande de déclaration d’inconstitutionnalité, de nullité et d’inopérabilité demandée par la demanderesse.

[177]      Dans ces circonstances, le Tribunal n’a pas à examiner les autres arguments subsidiaires des parties portant sur la suspension d’une déclaration d’inopérabilité et sur la portée à l’égard de la demanderesse d’une telle déclaration. Le Tribunal ne se penche pas non plus sur la suffisance des avis envoyés par la demanderesse au PGQ.

[178]      La demanderesse ne peut donc demander de remboursement de la redevance de transport au terme de la quatrième question.

[179]      Le Tribunal rejette donc la portion de la demande de jugement déclaratoire de la demanderesse qui porte sur l’aspect constitutionnel.

[180]      Passons à la dernière question.

e)            Question 5 : La demanderesse a-t-elle droit aux condamnations monétaires qu’elle réclame?

[181]      Compte tenu des conclusions du Tribunal, la demanderesse a seulement droit au remboursement par l’ARTM et la Ville, de façon solidaire, du montant de 318 170,40 $, avec intérêts et indemnité additionnelle à partir du 10 juin 2020. Toutes les autres redevances payées par la demanderesse ne peuvent être remboursées vu les conclusions du Tribunal sur les questions 3 et 4.

[182]      Par ailleurs, le Tribunal va déclarer que la Ville a erré dans son calcul de la redevance. C’est tout. La demanderesse ne peut obtenir une déclaration selon laquelle elle n’aura pas à payer une redevance pour ses projets futurs. Le Tribunal est cependant confiant que la Ville et l’ARTM vont calculer les redevances dans le futur en conformité avec le présent jugement.

[183]        Le Tribunal rejette toutes les conclusions portant sur le droit administratif (règlement déraisonnable et injuste) et sur le droit constitutionnel.

[184]      Le Tribunal indique en terminant que, pour les questions 3 et 4, il n’a pas abordé en détail les conditions de recevabilité de la demande en jugement déclaratoire (tribunal compétent, intérêt pour agir, épuisement des recours, utilité pratique du jugement déclaratoire, difficulté réelle et délai raisonnable) compte tenu que la demande de la demanderesse à ces égards n’est pas fondée au mérite.

[185]      Le Tribunal accueille donc en partie la demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-remodifiée du 21 juillet 2022, seulement quant à la question de l’interprétation du Règlement et du remboursement de la redevance pour les 14 maisons de ville. Tout le reste des demandes de la demanderesse est rejeté.

[186]      En conséquence, vu le résultat mitigé entre la demanderesse, la Ville et l’ARTM, le Tribunal décide que la demanderesse, la Ville et l’ARTM supporteront leurs frais de justice. Cependant, le Tribunal octroie au PGQ les frais de justice, car il a gain de cause sur la question constitutionnelle, la seule qui l’intéresse ici.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL : 

[187]      REJETTE la Demande d’autorisation pour modifier la Demande pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-remodifiée du 21 juillet 2022, à l’exception des Pièces P-13 et P-01 qui sont admises en preuve;

[188]      ACCUEILLE l’Opposition du défendeur Procureur général du Québec à la Demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-re-remodifiée du 20 décembre 2023 ;

[189]      REFUSE la mise en preuve des Pièces P-02, P-1A, P-14 et PGQ-13 ;

[190]      ORDONNE que la Pièce A-3 soit déposée sous scellés ;

[191]      ACCUEILLE en partie la Demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-remodifiée du 21 juillet 2022 ;

[192]      DÉCLARE que la méthode de calcul de redevance par la défenderesse Ville de Pointe-Claire pour les lots 5 888 171 à 5 888 185 est erronée et doit s’établir selon le calcul de la valeur des travaux de chacune des 14 maisons de ville individuellement, sans référence à la règlementation municipale;

[193]      ANNULE la décision prise par la défenderesse Ville de Pointe-Claire en tant que mandataire de la défenderesse Autorité régionale de transport métropolitain d’exiger le paiement d’une redevance au montant de 318 170,40 $ pour les 14 immeubles de la demanderesse sises sur lots 5 888 171 à 5 888 185 du Cadastre du Québec;

[194]      CONDAMNE solidairement les défenderesses Autorité régionale de transport métropolitain et Ville de Pointe-Claire à rembourser, dans les 30 jours du présent jugement, à la demanderesse la somme de 318 170,40 $, avec intérêts et l’indemnité additionnelle en date du paiement, soit le 10 juin 2020;

[195]      REJETTE toutes les autres conclusions de la demanderesse contenues à la Demande de pourvoi en contrôle judiciaire et en jugement déclaratoire re-remodifiée du 21 juillet 2022;

[196]      LE TOUT, avec frais de justice uniquement dus par la demanderesse au défendeur Procureur général du Québec, aucun autre frais de justice n’étant octroyé.

 

 

__________________________________

DONALD BISSON, J.C.S.

 

Me Joe Morrone et Me Claude G. Leduc

ML Avocats sencrl

Avocats de la demanderesses Quartier One West inc.

Me Éric Simard, Me François Barette, Me Lucie Lanctuit et Me Maria Braker

Fasken Martineau DuMoulin SENCRL, s.r.l.

Avocats de la défenderesse Autorité régionale de transport métropolitain

Me Jean-Philippe Fortin et Mme Stéphanie Bégin, stagiaire

Bélanger, Sauvé SENCRL

Avocats de la défenderesse Ville de Pointe-Claire

 

Me Thi Hong Lien Trinh et Me Éric Bellemare

Bernard, Roy (Justice-Québec)

Avocats du défendeur Procureur général du Québec

 

Dates d’audition : 8 au 11 janvier 2024

 

 


[1]  Comme on le verra plus loin, le Tribunal refuse la modification demandée par la demanderesse afin d’ajouter une codemanderesse, des allégations et des pièces.

[2]  Les immeubles sis au 248 et 250 rue Hymus ainsi que les lots 5 888 171 à 5 888 185 du Cadastre du Québec, tous situés dans la Ville.

[3]  Voir le paiement sous protêt du montant de 318 170,40 $, le 10 juin 2020 (Pièce P-9), pour le projet de construction de 14 maisons sur le Terrain, tel que défini à la note 14. Les deux autres paiements des 15 juin 2021 et 30 décembre 2020 ne sont pas sous protêt selon la preuve (Pièces P-11 et P-12) et visent les deux autres projets de condos situé sur deux autres terrains.

[4]  RLRQ, c. R-25.02.

[5]  RLRQ, c. A-33.3.

[6]  RLRQ, c. A-33.3, r. 1.

[7]  Le Tribunal note que la demanderesse demandait, en ouverture de procès, de façon formelle l’inconstitutionnalité de certaines dispositions dans la Demande, mais elle a ajouté des dispositions dans son mémoire. Le Tribunal n’a pas à décider si cet ajout par voie de mémoire est possible ou non, puisqu’il rejette l’argument constitutionnel de la demanderesse de toute façon. Le Tribunal note, sans le décider, que le paragraphe 92 du mémoire de la demanderesse comporte un Avis au PGQ d’intention de contester le caractère opérant, l’applicabilité constitutionnelle ou la validité des dispositions législatives non mentionnées à la Demande. De plus, lors du procès, le 9 janvier 2024, le Tribunal a permis la modification des conclusions de la Demande afin d’ajouter les dispositions manquantes. Mais le Tribunal ne décide rien quant à la suffisance ou non des avis envoyés au PGQ.

[8]  Vu que le Tribunal refuse la demande de modification demandée par la demanderesse, il ne considère que les montants décrits à la Demande, et ce, même si la Pièce P-13 a été mise en preuve.

[9]  Cette demande subsidiaire a été ajoutée par modification verbale faite lors du procès le 9 janvier 2024, puis retirée avec la permission du Tribunal le 10 janvier 2024.

[10]  Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, c. 11 (R.U.).

[11]   Comme on le verra plus loin, le Tribunal refuse la mise en preuve des Pièces P-02, P-1A et P-14.

[12]   Comme on le verra plus loin, le Tribunal refuse la mise en preuve de la Pièce PGQ-13.

[13]  Phillips c. Nouvelle-Écosse (Enquête Westray), [1995] 2 R.C.S. 97, par. 6, 8 et 9.

[14]  Voir acte de vente, Pièce P-1.

[15]  Voir le plan d’implantation du projet contenu à l’annexe H de l’Entente relative aux travaux municipaux signée par la Ville et la demanderesse, respectivement les 3 mars et 27 février 2020 (Pièce P-3). Voir le permis que la Ville a autorisé, Pièce P-6.

[16]  Voir le relevé du calculateur Google Maps (Pièce P-4, en liasse). Voir également l’expertise de Jean Dubé, Pièce P-5.

[17]  Voir Pièce P-4 en liasse. Voir également l’expertise de Jean Dubé, Pièce P-5.

[18]  Voir le rapport d’expert du professeur Jean Dubé (Pièce P-5).

[19]  Voir l’Arrêté numéro 2018-04 du ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports en date du 22 mars 2018, Gazette officielle du Québec, partie 2, 4 avril 2018, 150e année, no. 14, p. 2136.

[20]  Cette valeur a varié depuis cette date.

[21]  Pièce PC-13 en liasse.

[22]  Pièce P-8.

[23]  Voir lettre de la demanderesse à la Ville du 3 juin 2020, dans la Pièce P-9 en liasse.

[24]  Elle argumente au procès qu’elle a payé sous protêt ses deux redevances, mais la preuve ne le démontre pas.

[25]  Sauf la Pièce P-13 à laquelle personne ne s’est opposé à la mise en preuve. Mais le Tribunal a déjà indiqué qu’il ne considère que les montants décrits à la Demande.

[26]  Leduc c. Gauthier, 2020 QCCA 1444, par. 6.

[27]  Le Tribunal explique pourquoi plus loin dans la suite de la présente section.

[28]  Les autres versions postérieures sont identiques (Voir Pièces P-7A et A-7). Tous s’entendent que la version applicable ici est la Pièce P-7.

[29]  RLRQ, c. A-19.1.

[30]  Pièces PC-5 à PC-9 et Pièce PC-12.

[31]  RLRQ, c. A-19.1.

[32]  Déclaration de copropriété signée devant Me Alain Lamoureux, notaire, en date du 11 février 2021, publiée sous le numéro 26 065 812, Pièce PC-10.

[33]  Règlement de zonage PC-2775, Pièce PC-5.

[34]  Annexe 2 du Règlement de zonage, Pièce PC-6.

[35]  Tableau des dispositions particulières relatif à la zone Re33, Pièce PC-7.

[36]  Annexe 4 du Règlement de zonage, Pièce PC-8.

[37]  Tableau des dispositions particulières, pièce PC-7.

[38]  Annexe 1 du Règlement de zonage, Pièce PC-9.

[39]  Demande de permis logée par la demanderesse pour la construction des 14 unités (Pièce P-6) et plans soumis par la demanderesse au soutien de cette demande, Pièce PC-11.

[40]  2020, Wolters Kluwer Canada Ltée, p. 303.

[41]  [1975] C.A. 141.

[42]  2015 QCCS 24, appel rejeté le 13 avril 2016 : 2016 QCCA 661.

[43]  2002 CanLII 41177 (C.A.) (demande de permission rejetée par la Cour suprême du Canada, 2003-04, no. 29403).

[44]  2013 CSC 64.

[45]  Idem, par. 24.

[46]  Idem par. 25 et 28.

[47]  Idem, par. 27-28.

[48]  Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65.

[49]  2022 QCCA 85, par. 10, 18 et 19 (demande de permission d’appel rejetée par la Cour suprême du Canada, 28 juillet 2022, no. 40102).

[50]  2021 QCCA 170, par. 37 et 45.

[51]  Dans l’arrêt Auer c. Auer, 2022 ABCA 375, par. 7 et 78 à 83 (demande de permission d’appel accordée par la Cour suprême du Canada, 26 octobre 2023, no. 40582), la Cour d’appel de l’Alberta a jugé qu’en matière de contrôle judiciaire de la législation déléguée, le test de Katz devait s’appliquer sans recours à la norme raisonnable édictée par l’arrêt Vavilov.  La Cour d’appel fédérale a décidé le contraire dans les arrêts Portnov c. Canada (Procureur général), 2021 CAF 171, par. 18 à 28 et Médicaments Novateurs Canada c. Canada (Procureur général), 2022 CAF 210, par. 26 à 43.

[52]  2003 CanLII 7993 (C.A.), par. 20, confirmé par la Cour suprême du Canada en un paragraphe : UL Canada inc. c. Québec (Procureur général), 2005 CSC 10.

[53]  Arrêt cité à la note précédente.

[54]  UL Canada Inc. c. Québec (Procureur Général), précité, note 52, par. 36.

[55]  Id., par. 30 à 33.

[56]  Précité, note 19.  Le Ministre a par la suite approuvé la modification du Règlement que l‘ARTM a faite : Arrêté numéro 2020-12 du ministre des Transport, Gazette officielle du Québec, partie 2, 12 août 2020, 152e année, no. 33, p. 3433, qui approuve le règlement modificatif de l’ARTM.

[57]  Le rayon a alors été réduit de 1,5 à 1 km.

[58]  Demande, par. 13 et 14.

[59]  Restaurants Canada c. Ville de Montréal, 2021 QCCA 1639, par. 47.

[60]  30 & 31 Vict, c. 3 (R.-U.).

[61]   Eurig (Re), 1998 CanLII 801 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 565, par. 15, citant Lawson c. Interior Tree Fruit and Vegetable Committee of Direction, 1930 CanLII 91 (CSC), [1931] R.C.S. 357.

[62]  Axel Fournier, « Les nouveaux pouvoirs de taxation des municipalités » dans Développements récents en droit municipal (2019), Barreau du Québec – Service de la formation continue (CAIJ), p. 120, citant Ontario Home Builders’ Association c. Conseil scolaire de la région de York, [1996] 2 R.C.S. 929, par. 41- 43, 48-51 et 53.

[63]  Idem.

[64]  Première nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, [1999] 3 R.C.S. 134, par. 24-28; 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), 2008 CSC 7, par. 22-28.

[65]  Précité, note 62.

[66]  2016 QCCS 1124, par. 74 à 79.

[67]  LC 1867, art. 92(2).

[68]  Première Nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, précité, note 64, par. 2.

[69]  620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 16.

[70]  Idem, par. 17; Première Nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, précité, note 64, par. 22, 30. La Cour suprême du Canada prévoit une troisième possibilité, soit de recevoir des paiements pour des services rendus, c’est-à-dire des frais d’utilisation, lesquels sont assimilées aux redevances réglementaires.

[71]  Première Nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, précité, note 64, par. 43.

[72]  620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 24; Association des radiodiffuseurs c. Canada (Procureur général), 2008 FCA 157, par. 42 et 52.

[73]  Première nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, précité, note 64, par. 24, 43; 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 25-26.

[74]  Première nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, précité, note 64 par. 27-29 et 44; 620 Connaught Ltd, c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 27-28.

[75]  620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 27.

[76]  Confédération des syndicats nationaux c. Canada (Procureur général), [2008] 3 R.C.S., par. 72.

[77]  RLRQ, c. T-12.

[78]  RLRQ, c A-19.1.

[79]  Voir Pièce PGQ-3, débats de juin-août 2017, CTE-126 pp. 21 à 23, et CTE-133 p. 20.

[80]  Précité, note 64.

[81]  620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 31.

[82]  Voir Pièce PGQ-3, CTE-133 p. 7, CTE 126, pp. 2, 7, 11, 12, 13 et 21.

[83]  La Pièce PGQ-8 contient le PMAD 2012 et le PMAD 2021. Voir les pages 9 et 38 du plan 2012 et les pages 14 et 41 du plan 2021.

[84]  Pièce PGQ-3, CTE-33, pp. 16 à 34.

[85]  Réseau express métropolitain : analyse comptable du montage financier, Rapport du vérificateur général, Pièce PGQ-4.  Voir les pages 6, 40 et 41.

[86]  Ontario Home Builders Association c. Conseil scolaire de la région de York, précité, note 62, par. 66; et 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 34.

[87]  Projet de loi N°137, Loi concernant le réseau électrique métropolitain, Pièce PGQ-5.

[88]  Voir : Analyse de projets immobiliers types, juillet 2018, Pièce PGQ-6, p. 10; Modélisation financière des revenus de redevances de transport pour le réseau express métropolitain, juillet 2018, Pièce PGQ-7, pp. 31, 32 et 53; Plan métropolitain d’aménagement et de développement (« PMAD »), 2012, et Suivi du PMAD, 2021, Pièce PGQ-8, en liasse; Rapport de consultation de la redevance, Pièce PGQ-9; Rapport intitulé La captation de la plus-value foncière comme source de financement du transport collectif pour le grand Montréal, Pièce PGQ-10; Évaluation des impacts du réseau électrique métropolitain en matière d’aménagement et de développement du territoire du Grand Montréal, Pièce PGQ-11. Voir aussi les débats parlementaires, Pièce PGQ-3, CTE-126 p. 6, 11, 27 et 30.

[89]  Pièce PGQ-3, p. 6, 11, 27 et 30.

[90]  Modélisation financière des revenus de redevances de transport pour le réseau express métropolitain, juillet 2018, Pièce PGQ-7, p. 53.

[91]  À l’instar du régime dans l’arrêt Ontario Home Builders, précité, note 62 et mentionné dans l’arrêt 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 34. 

[92]  Site Internet de la demanderesse, Pièce A-5 ou Pièce PGQ-12.

[93]  Voir : CAPREA, Analyse de projets immobiliers types, juillet 2018, pp. 11, 12, 16, 116 (Pièce A-2). Cette étude vise les projets immobiliers situés dans la zone de 1 km autour des stations (voir p. 12).

[94]  Voir : CDPQ Infra, Définition des paramètres financiers des redevances de transport, novembre 2017, pp. 16 à 19 (Pièce A-3, sous scellés).

[95]  La preuve citée aux note précédentes est unanime en faveur de la position des défendeurs, outre uniquement une phrase ambigüe à la p. 10 de l’Analyse de projets immobiliers types, juillet 2018, Pièce PGQ-6, soulignée par la demanderesse. Cette phrase n’est pas suffisante pour que la demanderesse ait gain de cause.

[96]  Ontario Home Builders Association c. Conseil scolaire de la région de York, précité, note 62, par. 66; et 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 34.

[97]  La demanderesse cite le paragraphe 35 de l’arrêt 620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 34.

[98]  On sait que les articles 48 à 56 de la Loi sur le REM ont été intégrés à Loi sur ARTM.  Et en vertu des art. 48 à 56 de Loi REM, on sait que les articles suivants de la Loi ARTM s’appliquent au projet du REM : art. 6, 8, 72, 79, 82, 84.1, 97.1 à 97.12, 108.1, 108.2 et 130.1.  De plus, les articles 44, 40 et 45 de la Loi REM rendent applicables au REM les articles suivants de Loi ARTM : 5, 25, 103 à 105 et 106 à 111.  L’article 81 de la Loi ARTM ne s’applique donc pas au REM.

[99]  Lors du procès, l’ARTM a déposé en plaidoirie une copie de l’entente entre l’ARTM et le REM qui est en annexe à l’Arrêté numéro 2018-05 du ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports en date du 22 mars 2018, Gazette officielle du Québec, partie 2, 4 avril 2018, 150e année, no. 14, p. 2247, modifiée par l’Arrêté numéro 2020-13 du ministre des Transports en date du 28 juillet 2020, Gazette officielle du Québec, partie 2, 12 août 2020, 152e année, no 33, p. 3479. Le Tribunal ne décide pas si ce mode de dépôt constitue une mise en preuve valide de l’entente vu que cette entente ne change rien de toute façon.

[100]  620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 38.

[101]  620 Connaught Ltd. c. Canada (Procureur général), précité, note 64, par. 40 er 44.

[102]  Loi REM, art. 38.  Le Tribunal n’a pas besoin de la preuve d’une entente, car le texte de l’article 38 est suffisant.

[103]  Voir comme illustration de ce principe et de cette conclusion : Constructions Bricon Ltée (Proposition de), 2015 QCCA 249, par. 70.

[104]  Première Nation de Westbank c. British Columbia Hydro and Power Authority, précité, note 64, par. 30.

[105]  2023 QCCS 2178 (en appel 200-09-700080-234).

[106]  Comme c’était le cas dans la décision Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ) région de l'Outaouais inc. c. Gatineau (Ville de), précitée, note 66, par. 79.

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