Comptables
professionnels agréés (Ordre des) c. Badette |
2025 QCCDCPA 3 |
INTRODUCTION
[1]
Le
Conseil de discipline s’est réuni pour procéder à l’audition de la plainte
disciplinaire portée par le plaignant, M. Michel
Beauséjour, FCPA, en sa qualité de syndic adjoint de l’Ordre des comptables
professionnels agréés du Québec (l’Ordre), contre l’intimé, M. Jean Daniel
Badette, CPA.
[2]
Le plaignant reproche à l’intimé d’avoir
exercé dans le domaine de la comptabilité publique en réalisant une mission
d’audit pour une candidate à une campagne électorale alors qu’il ne détenait pas de permis de comptabilité
publique. Au second chef, il lui reproche d’avoir omis de déclarer cette
situation dans sa déclaration annuelle obligatoire et finalement, au troisième
chef, il lui reproche d’avoir proposé ses services pour
réaliser une mission d’audit au bénéfice d’une seconde candidate à une campagne
électorale.
[3]
La
plainte disciplinaire portée contre l’intimé est ainsi libellée :
Se rendant ainsi passible
des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions (RLRQ, c. C-26).
[Transcription textuelle, sauf anonymisation]
[4]
L’audition sur culpabilité du
présent dossier commence le 13 juillet 2023. Le Conseil est alors présidé
par Me Nathalie Lelièvre.
[5]
Le 8 mai 2024[1],
le Conseil rend une décision accueillant la demande de l’intimé en retrait de son
plaidoyer à l’égard du premier chef. L’audition sur culpabilité se poursuit le
22 septembre 2023.
[6]
Le 24 octobre 2024, l’intimé
dépose un avis en vertu de l’article 76 du Code de procédure civile[2]
par lequel il avise le Procureur général du Québec et le plaignant que
lors de l’audition sur culpabilité, il entend mettre en question
l’applicabilité constitutionnelle de l’article 5 de la Loi sur les
comptables professionnels agréés, des articles 24 et 61 du Code de
déontologie des comptables professionnels agréés, alors en vigueur au
moment où la plainte est portée contre lui, et de l’article 60.2 du Code
des professions. Essentiellement, l’intimé argue qu’il est un résident de
l’Ontario, que les gestes reprochés ont été posés entièrement en Ontario, et ce,
envers deux résidents ontariens. À son avis, le seul lien avec le Québec est
son statut de membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec.
[7]
Le 29 octobre 2024, Me Daniel
Y. Lord, président en chef du Bureau des présidents des conseils de discipline,
dessaisit Me Lelièvre à titre de présidente au présent dossier
et désigne le même jour, Me Julie Charbonneau à titre de
nouvelle présidente, conformément à l’article 115.7 du Code des professions.
[8]
Le 4 novembre 2024, une
conférence de gestion est tenue et les parties indiquent qu’après discussions,
elles consentent à ce que l’audience sur culpabilité se poursuive avec la
preuve déjà produite au dossier[3].
L’audition sur culpabilité se termine le 8 novembre 2024.
QUESTIONS EN LITIGE
A) Les moyens de
défense constitutionnels présentés par l’intimé et qui visent l’ensemble des
chefs doivent-ils être retenus?
B) Le plaignant s’est-il
déchargé de son fardeau de preuve concernant les éléments essentiels de chacun
des chefs d’infraction de la plainte portée contre l’intimé?
CONTEXTE
[9]
L’attestation d’inscription[4]
produite au sujet de l’intimé révèle qu’il est inscrit pour la première fois au tableau de l’Ordre des
comptables en management accrédités du Québec le 20 octobre 2011, et
qu’étant inscrit au tableau de l’Ordre des comptables en management accrédités
du Québec le 16 mai 2012, il a été automatiquement inscrit à cette date au
tableau de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec, conformément
à l’article 56 de la Loi sur les comptables professionnels agréés[5].
[10] Le 25 septembre 2024, les parties conviennent
des admissions suivantes[6] :
1.
L’intimé a été inscrit au tableau de l’Ordre des
comptables en management accrédités du Québec en 2011 (Pièces P-1 et
P1-A);
2.
Il a été automatiquement inscrit au tableau de l’Ordre
des comptables professionnels agréés du Québec (ci-après « OCPAQ ») le 16 mai
2012 (Pièces P1 et P-1A);
3.
L’intimé n’a jamais détenu de permis de
comptabilité publique (Pièces P-1 et P-1A, P-5A);
4.
Les parties admettent pour fins de production les
pièces P-1 à P-7;
5.
Le 22 novembre 2022, le bureau du syndic de l’Ordre
des CPA reçoit une demande d’enquête et une enquête disciplinaire s’ouvre à l’égard
de l’intimé (Pièce P-2);
6.
L’intimé n’était pas inscrit au Tableau de l’Ordre
des comptables professionnels agréés de l’Ontario au moment des faits reprochés
(Pièce P-5A);
7.
Le ou vers le 19 janvier 2021, à Ottawa, l’intimé
a émis et signé un rapport portant sur les états financiers de la campagne
électorale de [Mme A] pour l’exercice financier de la période de
campagne commençant le 16 juillet 2020 et se terminant le 19 novembre
2020 (Pièces P-2B, 5A et 5B);
8.
Le ou vers le 3 février 2021, à Orléans
(Ontario), l’intimé a fait une déclaration dans sa déclaration annuelle
obligatoire 2021-2022 en indiquant qu’il n’avait pas exercé la
comptabilité publique entre le 1er avril 2020 et 31 mars 2021 (Pièces P-3
et P-5A);
9.
Le ou vers le 24 octobre 2022, à Ottawa,
l’intimé a sollicité un mandat auprès de la campagne électorale de [Mme
B] (Pièces 2C et 2D);
10.
Entre le 6 et le 13 novembre 2022, l’intimé a
échangé des courriels avec son client concernant les documents requis pour l’exécution
de la mission (Pièce P-2D).
[Transcription textuelle, sauf anonymisation]
[11] Le Conseil reproduit la trame factuelle mentionnée
dans le plan d’argumentation de l’intimé :
1.
L’intimé, Jean Daniel Badette, est comptable
professionnel agréé (« CPA ») membre de l’Ordre professionnel des
comptables professionnels agréés du Québec (« l’Ordre »);
2.
Au moment des faits, il réside en Ontario et y
exerce ses activités professionnelles;
3.
En date du 19 janvier 2021, l’intimé travaille
entre autres pour Mme [A];
4.
Dans le cadre de son mandat, il émet un rapport
portant sur les états financiers de la campagne électorale de celle-ci pour son
dernier exercice financier;
5.
Le 3 février 2021, l’intimé remplit et envoie
sa déclaration annuelle obligatoire (« déclaration ») pour la période 2021-2022
à l’Ordre;
6.
Il y déclare que, durant la période comprise entre
le 1er avril 2020 et le 31 mars 2021, il aurait exercé
dans le domaine de la comptabilité publique en faisant des missions de
compilations;
7.
Il y déclare également que, durant la période
comprise entre le 1er avril 2021 et le 31 mars 2022, il
exercera dans le même domaine;
8.
Le 24 octobre 2022, l’intimé contacte le
gestionnaire de la campagne électorale de Mme [B] afin de proposer ses services de comptable
pour la préparation d’un rapport financier;
9.
Le 29 octobre 2022, l’intimé contacte à
nouveau le gestionnaire et retire son offre de services afin de s’adonner à de
nouvelles responsabilités;
10.
Le 28 mars 2023, en vertu du Code de
déontologie des comptables professionnels agréés (« Code de
déontologie ») et de la Loi sur les comptables professionnels
agréés (« Loi sur les comptables »), une plainte
disciplinaire comptant trois chefs est déposée contre l’intimé par le plaignant.
[Transcription textuelle, sauf anonymisation]
[12]
Lors de son témoignage, le plaignant produit la preuve
documentaire qu’il invoque au soutien de sa plainte[7].
Il souligne que l’intimé n’a jamais détenu de permis de comptabilité publique.
[13]
Lors de sa plaidoirie, il reconnaît que la pièce P-5A
pourrait comporter des aveux extrajudiciaires de la part de l’intimé. Or, il
concède que l’avis requis en vertu du jugement du Tribunal des professions dans
l’affaire Fernandez De Sierra[8]
n’a pas été transmis à l’intimé. En conséquence, le Conseil ignore la pièce P-5A
dans le cadre de son analyse du présent dossier. Par ailleurs, le Conseil
souligne que l’intimé a signé des admissions[9]
et a présenté une trame factuelle dans son plan d’argumentation. Ces éléments
sont reproduits dans la présente décision et sont distincts de ce que pourrait
révéler la pièce P-5A.
[14] L’intimé témoigne. Il déclare qu’au cours du mois de janvier 2021, un
collègue et ami CPA lui demande s’il peut aider une de ses clientes, soit une
candidate à une élection municipale, à préparer son rapport financier, ce qu’il
accepte. Cet ami lui transmet alors un formulaire intitulé Financial
Statement Auditing Form 4 qu’il remplit. Il déclare que dans les
faits, il a joué le rôle de Chief Financial Officer pour cette
candidate.
[15] Plus tard, il constate que cette candidate a reçu des dons de plus de 10 000 $,
il remplit alors un autre formulaire. À son avis, il n’a jamais été question de
signer un rapport d’audit et à aucun moment, il n’en a signé un.
[16] Au sujet de la candidate Mme B, il a agi à titre de
bénévole pour sa campagne, notamment en faisant du porte-à-porte. Il déclare au Conseil qu’à un moment donné, il a offert ses services,
mais en aucun temps, il n’a utilisé le titre de CPA auditeur ou n’a offert un
service d’audit, et ce, tant dans ses échanges verbaux qu’écrits.
[17] En ce qui a trait au document signé au bénéfice de la candidate Mme A,
il déclare ne pas avoir signé un rapport d’audit, que le nom du formulaire
porte à confusion, que le contenu ne représente pas un rapport d’audit et qu’il
n’est pas exigé qu’un CPA auditeur signe ce document. Il martèle qu’il n’a pas
rempli un rapport d’audit.
[18] L’intimé demande au Conseil de constater qu’à aucun moment, il n’a agi à
titre de CPA auditeur, que le document complété est en réalité un rapport
financier et qu’à aucun moment, il n’a offert un service d’audit ni s’est présenté comme
offrant des services d’audit.
[19] Il mentionne avoir commis des erreurs dans sa déclaration écrite transmise
au plaignant[10].
[20] L’intimé déclare qu’il n’a pas transmis une fausse déclaration à l’Ordre,
puisqu’il n’a pas complété un rapport d’audit. La preuve du plaignant ne
démontre pas qu’il s’est présenté à titre de CPA auditeur tout comme il n’a jamais
offert de services d’audit. Il estime que la publication qu’il aurait fait une
fausse déclaration risque de détruire sa carrière.
ANALYSE
[21]
Les moyens de défense de l’intimé se déclinent à
l’aide des questions suivantes.
i)
L’arrêt Sharp de la Cour suprême du Canada
rendu en 2023 est-il applicable en la présente instance, et dans l’affirmative,
existe-t-il un lien réel et substantiel entre le Québec et l’intimé?
ii)
La réglementation professionnelle québécoise qui
serait applicable à l’intimé contrevient-elle aux principes constitutionnels
d’ordre et d’équité?
iii)
Le fardeau de preuve du plaignant comprend-il une
preuve que les actes reprochés à l’intimé constituent des infractions au sens
de la législation ontarienne?
[22]
Pour les motifs qui suivent, le Conseil rejette
l’ensemble des moyens de défense de l’intimé basés sur les principes
constitutionnels.
[23]
L’intimé a également invoqué d’autres moyens de
défense individualisés à certains chefs d’infraction et qui seront examinés tout
au cours de l’analyse de chacun des chefs d’infraction.
i)
L’arrêt Sharp de la Cour suprême du Canada
rendu en 2023 est-il applicable en la présente instance, et dans l’affirmative,
existe-t-il un lien réel et substantiel entre le Québec et l’intimé?
Position de l’intimé sous
la question i)
[24] À l’aide de son plan
d’argumentation, de ses représentations et des autorités remises[11], l’intimé demande un acquittement des trois chefs
infraction portés contre lui en invoquant un moyen fondé sur la territorialité.
[25] L’intimé en
soulignant les principes établis par l’affaire Ballachey[12] mentionne ne pas remettre en cause le principe
voulant que la compétence des ordres professionnels s’étende aux actes d’un
professionnel « sans égard au lieu où ils ont été posés ». Or, à son
avis, la jurisprudence enseigne que ce principe ne permet pas d’appliquer une
loi édictée par une province sur le territoire d’une autre province en toutes
circonstances. Ainsi, il est donc nécessaire de prendre en compte les
circonstances particulières de chaque cas pour déterminer si une loi
provinciale devrait s’appliquer dans une autre province[13]. L’analyse des critères énoncés dans l’arrêt Unifund[14] de la Cour suprême doit être réalisée.
[26] Sur ce point,
l’intimé avance que les arrêts Sharp[15] et Unifund[16] rendus par la Cour suprême du Canada édictent que
bien que la compétence des ordres professionnels à l’endroit de leurs membres
soit personnelle et non territoriale, pour qu’un régime provincial de
réglementation s’applique, deux critères doivent être satisfaits[17] :
a. Premièrement,
un « lien réel et substantiel » entre la province et l’intimé doit subsister.
Le caractère « suffisant » du lien dépend par ailleurs du « rapport qui existe
entre le ressort ayant légiféré, l’objet du texte de loi et l’individu ou
l’entité qu’on cherche à assujettir à celui-ci. »
b. Deuxièmement,
même si le « lien réel et substantiel » est démontré, l’applicabilité de la loi
provinciale est tout de même fonction des exigences d’ordre et d’équité qui
sous-tendent nos structures fédérales. Ces exigences doivent être appliquées
d’une manière souple en fonction de l’objet de la loi.
[Références omises]
[27] De plus, l’intimé
invite le Conseil à conclure que les principes qui se dégagent du jugement Coastal
Contacts inc.[18] rendu par la Cour supérieure[19] sont applicables en l’instance et qu’en l’absence
d’indication législative claire de donner à la loi une portée
extraterritoriale, la seule interprétation possible de la loi « est une
qui présume qu’elle a été édictée en conformité avec les limites territoriales
aux pouvoirs législatifs de l’Assemblée nationale ». Il ajoute que rien
dans la Loi sur les comptables professionnels agréés ou dans le Code
de déontologie des comptables professionnels agréés ne permet de déceler
une intention du législateur de donner une portée extraterritoriale à la loi,
il semble plutôt que son objectif soit de protéger le public québécois.
L’intimé plaide qu’il s’en suit que cet objectif législatif affaiblit la
proposition qui avance qu’un lien réel et substantiel existerait entre lui,
exerçant en Ontario à l’égard de citoyens ontariens, et le Québec[20].
[28] En l’espèce, au
moment des faits reprochés, l’intimé souligne qu’il n’exerce pas la profession
de comptable au Québec et ne fait pas la promotion de ses services à des
résidents du Québec. De plus, il ne se trouve pas au Québec au moment des faits
reprochés; il exerce alors ses activités professionnelles de manière exclusive
en Ontario. Ainsi, il soutient que les gestes qui lui sont reprochés ne
présentent pas de lien réel et substantiel avec le Québec et que le fait
d’appartenir à un ordre professionnel ne saurait suffire, à lui seul, de permettre
l’application d’une loi québécoise à des actes commis à l’extérieur de la
province[21].
Position du plaignant sous la question i)
[29] À l’aide de la position du Procureur général du Québec, de son plan
d’argumentation, de ses représentations et des autorités[22] remises, le plaignant plaide que le moyen de défense de l’intimé fondé sur la territorialité doit être rejeté.
[30] Le plaignant
considère que sa compétence et celle du Conseil sont liées au statut de
l’intimé qui est membre d’une profession réglementée et dont l’acte
professionnel est un acte personnel qui ne peut être détaché de son auteur. Au
surplus, l’obligation d’un membre de respecter ses obligations déontologiques
est une obligation personnelle qui le suit partout où il exerce la profession[23].
[31] Il s’ensuit que la
faute disciplinaire est in personam, c’est-à-dire qu’elle est liée à la
personne du professionnel et non à la territorialité des gestes commis[24].
[32] Le plaignant est d’avis que l’arrêt Sharp[25] ne trouve pas application
en la présente instance, puisqu’il est issu du droit pénal qui concerne un
régime provincial qui prévoit l’imposition de pénalités à des contrevenants.
[33] Il conclut que les autorités invoquées au soutien de la position de
l’intimé ne trouvent pas application en droit disciplinaire, puisqu’elles
concernent une trame factuelle liée à des accidents de la route[26] ou à la sphère du droit
pénal[27].
Position du Procureur
général du Québec sous les questions i) ii) et iii)
[34] Par une correspondance datée du 24 octobre 2024[28], le Procureur général du
Québec mentionne appuyer la position du plaignant et invoque des autorités[29]. Il avance qu’il est bien établi que la compétence d’un ordre
professionnel à l’égard de ses membres est de nature personnelle et non
territoriale, et qu’elle s’applique donc à leur conduite sans égard au lieu où les
actes reprochés sont posés.
[35] À son avis, ces
principes établis de longue date n’ont aucunement été remis en question par l’arrêt
de la Cour d’appel dans Coastal Contacts inc.[30], lequel concerne la responsabilité d’une entité qui
n’était « pas assujettie au régime québécois de droit professionnel ».
Décision du Conseil sous la question i)
[36] Le Conseil retient la position avancée par
l’intimé et juge que l’arrêt Sharp[31] rendu
en 2023 par la Cour suprême du Canada est applicable en la présente instance.
[37] En conséquence, le Conseil doit déterminer
si les principes constitutionnels établis par les enseignements de la Cour
suprême dans les affaires Sharp et Unifund[32]
et qui exigent que l’autorité d’une province
ne puisse se saisir d’un litige que dans la mesure où il existe un
« lien réel et substantiel » entre ce litige et la province
sont prouvés dans le dossier de l’intimé.
[38] La compétence des conseils de discipline des
ordres professionnels est prévue par les articles 116 et 152 du Code
des professions[33]
qui édictent :
116. Un conseil de discipline est constitué au
sein de chacun des ordres.
Le
conseil est saisi de toute plainte formulée contre un professionnel pour une
infraction aux dispositions du présent code, de la loi constituant l’ordre dont
il est membre ou des règlements adoptés conformément au présent code ou à
ladite loi ainsi que de toute requête faite en vertu de l’article 122.0.1.
Le conseil est saisi
également de toute plainte formulée contre une personne qui a été membre d’un
ordre pour une infraction visée au deuxième alinéa, commise alors qu’elle était
membre de l’ordre. Dans ce cas, une référence au professionnel ou au membre de
l’ordre, dans les dispositions du présent code, de la loi constituant l’ordre
dont elle était membre ou d’un règlement adopté conformément au présent code ou
à ladite loi, est une référence à cette personne.
Est irrecevable une plainte
formulée contre une personne qui exerce une fonction prévue au présent code ou
à une loi constituant un ordre, dont un syndic, le président en chef, le
président en chef adjoint ou un membre d’un conseil de discipline, en raison
d’actes accomplis dans l’exercice de cette fonction.
Est également irrecevable
une plainte contre un professionnel pour des faits à l’égard desquels le syndic
lui a accordé une immunité en vertu de l’article 123.9.
152. Le conseil décide privativement à tout tribunal, en première
instance, si l’intimé a commis une infraction visée à l’article 116.
En l’absence d’une disposition du présent code, de la loi constituant
l’ordre dont l’intimé est membre ou d’un règlement adopté conformément au
présent code ou à cette loi et applicable au cas particulier, le conseil décide
de la même manière :
1° si l’acte reproché à l’intimé est dérogatoire à l’honneur ou à
la dignité de la profession ou à la discipline des membres de l’ordre;
2° si la profession, le métier, l’industrie, le commerce, la charge
ou la fonction que l’intimé exerce est incompatible avec l’honneur, la dignité
ou l’exercice de la profession.
[39]
Certains constats tirés de ces dispositions doivent
être soulignés. En vertu du deuxième alinéa de l’article 116 du Code
des professions, la compétence territoriale n’est pas un critère de
compétence pour les conseils de discipline. En somme, ni les dispositions de
l’article 116 ni celles de l’article 152 du Code ne posent aux
conseils une exigence en matière de territorialité.
[40]
De plus, afin d’assurer une large compétence aux
conseils de discipline, le statut de membre d’un ordre professionnel est exigé
au moment de l’infraction et non au moment où la plainte est portée.
[41]
Dans l’affaire bien connue Tremblay c. Dionne[34], la Cour d’appel du Québec statue sans équivoque que
les lois d’organisation des ordres professionnels sont des lois d’ordre public,
politique et moral ou de direction qui doivent s’interpréter en faisant primer
les intérêts du public sur les intérêts privés. Cet extrait de l’arrêt le
démontre :
[42] D’abord, le droit disciplinaire est un droit sui
generis (Code des professions,
art. 59.2 et 152; Béchard c.
Roy, [1975] C.A. 509; Béliveau c. Avocats (Corporation
professionnelle des), 1990 CanLII 7886 (QC TP), [1990]
D.D.C.P. 247 (T.P.), requête en révision judiciaire rejetée, Béliveau
c. Comité de discipline du Barreau du Québec, C.S., Mtl, no 500-05-004734-917,
24 mai 1991, J.E. 91-1508, confirmé par 1992 CanLII 3299
(QC CA), [1992] R.J.Q. 1822, à la p. 1825 (C.A.), autorisations de pourvoi
à la C.S.C. rejetées avec dépens, [1993] 1 R.C.S. v; Mario
GOULET, Le droit disciplinaire des corporations professionnelles,
Cowansville, Yvon Blais, 1993, p. 23) qui obéit à ses propres règles,
empruntées parfois au droit pénal, parfois au droit civil (Guy PÉPIN,
« Concordances et dissonances entre les fautes civile et
déontologique », Les journées Maximilien-Caron 1994, Le défi
du droit nouveau pour les professionnels, Montréal, Thémis, 1995,
p. 107). En droit disciplinaire, « la faute s’analyse comme la
violation de principes de moralité et d’éthique propres à un milieu et issus de
l’usage et des traditions » (Yves OUELLETTE, « L’imprécision des
codes de déontologie professionnelle », (1977)
37 R. du B. 669, p. 670). Ensuite, les lois d’organisation
des ordres professionnels sont des lois d’ordre public, politique et moral ou
de direction qui doivent s’interpréter en faisant primer les intérêts du public
sur les intérêts privés (Pauzé c. Gauvin, 1953 CanLII 65
(SCC), [1954] R.C.S. 15; Fortin c. Chrétien, 2001 CSC 45
(CanLII), [2001] 2 R.C.S. 500, paragr. 8 et 21; Coté
c. Rancourt, 2004 CSC 58 (CanLII), [2004]
3 R.C.S. 248, paragr. 10;
J.-L. BAUDOUIN, P.-G. JOBIN et N. VÉZINA, Les obligations,
6e éd., Cowansville, Yvon Blais, 2005, p. 211 et suiv., no 144).
Ainsi, pour analyser le comportement de l’intimé sur le plan déontologique, il
faut se reporter non seulement à la Loi sur les ingénieurs précitée,
mais aussi aux normes contenues au CDI adopté conformément à l’article 87 du Code des professions.
Ces normes s’inscrivent dans l’objectif de protection du public prévue à l’article 23
de ce Code et visent à « maintenir un standard professionnel de haute
qualité » à son endroit (Paquette c. Comité de discipline de la
Corporation professionnelle des médecins, 1995 CanLII 5215
(QC CA), [1995] R.D.J. 301 (C.A.)). Conformément à cet objectif, ces
textes législatifs et réglementaires ont préséance sur les termes d’un contrat
ou d’une règle ou pratique administrative et doivent recevoir une application
large (Loi d’interprétation, L.R.Q., c. I-16, art. 41). Les normes
déontologiques ne visent pas à protéger l’ingénieur, mais bien le public.
[Soulignements ajoutés]
[42]
Le Tribunal des professions abonde dans le même sens,
et ce, dans deux dossiers qui concernent des comptables professionnels agréés. Premièrement,
dans l’affaire Gagnon[35], le Tribunal écrit :
[60] D’autres jugements ont affirmé, qu’en droit disciplinaire, la
règle est qu’il faut préférer une interprétation libérale qui assure l’accomplissement
de la Loi et que la notion de faute disciplinaire doit faire l’objet d’une
interprétation plus souple que restrictive.
[61] C’est d’ailleurs la position qu’adoptait le Tribunal des
professions dans l’affaire Tremblay c. Comptables agréés (Ordre
professionnel des) dans laquelle il écrivait :
« Contrairement à la prétention de l’appelant,
les codes de déontologie doivent recevoir une interprétation souple plutôt que
restrictive, puisqu’ils ont pour objectif la protection du public. »
[43]
Ensuite, plus récemment, dans le dossier Librandi[36], le Tribunal rejette l’appel du professionnel et
souligne :
[44] Voyons maintenant ce qu’il en est du grief de l’appelant contre
le Conseil sur son défaut d’avoir considéré sa compétence en comptabilité
publique et qu’en conséquence, il ne mettait pas en péril la protection du
public. Le Tribunal estime que c’est à bon droit que le Conseil rappelle l’article 5 de la Loi qui oblige les membres de la profession
exerçant la comptabilité publique à détenir un permis. En effet, il précise que
la disposition législative est d’ordre public et qu’elle oblige le
professionnel à réussir un programme de formation en la matière afin d’assurer
la protection du public.
[45] Or, l’appelant
cherche à blâmer l’Ordre pour ses malheurs professionnels. Pourtant, la Loi est sans équivoque et ne souffre pas
d’ambiguïté. En effet, c’est au professionnel qu’incombe la charge de s’assurer
d’obtenir et de détenir les permis requis pour exercer dans des champs
réservés, telle que la comptabilité publique. Au surplus, il ne peut prétendre
ne pas avoir été informé par son Ordre de sa situation irrégulière. Les
conditions d’exigences sont claires et elles visent à la fois à assurer la
compétence du professionnel et la protection du public.
[44]
Dans un jugement fouillé rendu en 2024, soit
postérieurement à l’arrêt Sharp, la Cour du Québec[37] procède à une analyse des arguments portant sur la
territorialité de l’appelante, une courtière en assurance de dommages qui se
pourvoit en appel d’une décision sur culpabilité du Comité de discipline de la
Chambre de l’assurance de dommages l’ayant déclarée coupable de quatre chefs
d’infraction. Parmi les nombreux enseignements de la Cour, le Conseil retient
les suivants :
[49] Une telle détermination découle d’une longue et foisonnante
jurisprudence qui établit, puis réitère à de nombreuses reprises, que la
juridiction en matière disciplinaire est personnelle et non pas territoriale.
Ainsi, cet argument nouveau se situe résolument en porte-à-faux avec le poids
de la jurisprudence à l’effet contraire.
[…]
[52] Les comités de discipline ont repris ces enseignements à de
nombreuses reprises. Le principe de territorialité des lois reçoit une
interprétation beaucoup plus souple en droit disciplinaire.
[53] La Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Global
Securities Corp c. Colombie-Britannique (Securities Commission) reconnaît
d’ailleurs que cette souplesse peut s’étendre aux organismes de réglementation
provinciaux :
42 Deux autres cours d’appel
ont également reconnu que les organismes de réglementation provinciaux peuvent
avoir compétence pour enquêter sur des violations de lois étrangères. Dans Re
Legault and Law Society of Upper Canada (1975), 1975 CanLII 706
(ON CA), 58 D.L.R. (3d) 641, la Cour d’appel de l’Ontario a confirmé le
pouvoir du barreau de cette province d’entendre une plainte sur la conduite
d’un avocat ontarien dans un autre ressort. Comme la cour l’a souligné, à la
p. 643, [TRADUCTION] «la compétence du Barreau à l’égard de ses membres,
qui est de nature personnelle, s’étend sans limite territoriale à leur
conduite». Dans Re Underwood McLellan & Associates Ltd. (1979), 1979 CanLII 2222
(SK CA), 103 D.L.R. (3d) 268 (C.A. Sask.), la cour a, de la même façon,
confirmé le pouvoir de l’Association of Professional Engineers d’examiner la
conduite à l’extérieur de la province, en prenant ses décisions en matière de
permis.
43 Ces deux arrêts
reconnaissent que les organismes de réglementation provinciaux qui régissent
les professions dont le champ d’action dépasse, de façon importante, les
limites d’un ressort doivent pouvoir prendre en considération des faits
survenus à l’étranger. (…)
[…]
[54] La Cour Supérieure, dans l’une des décisions rendues dans
l’affaire Paquette, précitée, rappelait d’ailleurs, dès 1985,
que la juridiction d’une corporation professionnelle en
matière disciplinaire n’est pas limitée aux frontières de la province.
[…]
[68] Le professionnel conserve son titre, son chapeau de
professionnel, peu importe où il se retrouve.
[Références omises]
[45]
Ce jugement de la Cour du Québec évoque également les
quatre critères du test de l’examen de l’applicabilité du point de
vue constitutionnel de l’affaire Unifund[38] rendue par la Cour suprême et plaidée par l’intimé.
[46]
En somme, ce jugement de la Cour du Québec dans l’affaire
Giroux dispose des arguments de l’intimé sous la présente question en
litige.
[47]
L’affaire Coastal contacts
inc.[39] offre peu de secours à l’intimé, puisque la Cour
d’appel du Québec énonce clairement que Coastal n’est pas assujettie au régime
québécois de droit professionnel et est soumise aux lois de la
Colombie-Britannique.
[48]
Il est souligné de nouveau que l’intimé par son
adhésion volontaire à titre de membre de l’Ordre est assujetti au régime
québécois de droit professionnel.
[49]
La jurisprudence de provinces canadiennes offre
également un éclairage sur la question de territorialité soumise par l’intimé.
Dans Eloufy[40], un ingénieur invoque un argument de territorialité à
l’encontre de la compétence de son association professionnelle de la province
de la Saskatchewan pour des actes posés à titre d’ingénieur à l’extérieur de la
province. La Cour du Banc du Roi de la Saskatchewan écrit qu’une restriction
territoriale est contraire à l’objectif premier de la loi qui est de protéger
le public, et rejette ce motif de contestation.
[50]
Dans l’affaire Mema[41], la Cour du Banc du Roi de l’Alberta est aussi saisie
d’une question de territorialité et en dispose comme suit :
[50] Mr. Mema argues,
relying on McCabe and Unifund Assurance Co v
Insurance Crop of British Columbia, 2003 SCC 40,
that to have jurisdiction, the CPPA must prove there is a real and substantial
connection between Alberta and the complaints against Mr. Mema. As the alleged
misconduct occurred in British Columbia, the test for jurisdiction is not met.
[51] With respect, the
cases relied on by Mr. Mema do not apply in this case. The cases relied on by
the Respondent are clear that the jurisdiction of a professional regulatory
body is a personal one, which extends to regulating the member’s conduct
regardless of the province where the conduct occurred. All that is required to
establish jurisdiction is that the applicant is a member of a professional
provincial regulatory body: Legault v Law Society of Upper Canada,
(1975) 1975 CanLII 706 (ON CA), 8 OR (2d) 585 (Ont CA); Black
v Law Society of Alberta, 1989 CanLII 132 (SCC), 1989] 1 SCR 591; Global
Securities Corp v British Columbia (Securities Commission), 2000
SCC 21; Saplys v Ontario Association of Architects, 2019 ONSC 1679.
[Caractères gras dans l’original]
[51] D’un point de vue factuel, il est utile de
souligner les faits suivants qui ne sont pas contestés.
[52] L’intimé est inscrit au tableau de l’Ordre
des comptables professionnels agréés du Québec[42] et
n’est pas inscrit au tableau de l’Ordre des comptables professionnels agréés de
l’Ontario au moment des faits reprochés[43].
[53] Par ailleurs, la preuve documentaire révèle
que l’intimé, dans le cadre de ses différents échanges, inscrit, à la suite de
son nom, le titre de CPA, CMA, et ce, dans les documents transmis et signés et
qui font partie de la preuve documentaire du présent dossier[44].
[54]
Dans le
cadre d’un message texte transmis le 24 octobre 2022 en lien avec le chef 3,
l’intimé écrit à la représentante de Mme B, « […] I don’t know if you aware of that l’m a
Certified Professional Accountant[45] ».
[55] Lors de la rédaction et la transmission de
ces documents, l’intimé est bien au fait de son unique statut de membre de
l’Ordre au Québec et il l’utilise à plusieurs reprises.
[56] Force est de constater que dans la présente
instance, l’intimé en invoquant par ses écrits le titre lui ayant été octroyé
par l’Ordre
des comptables professionnels agréés du Québec, le
seul titre dont il bénéficie, a largement contribué à créer un lien réel et important entre lui,
à titre de membre de l’Ordre, et les faits de la présente affaire.
[57]
Ainsi, bien que l’ensemble de la
trame factuelle en la présente instance se soit déroulée en Ontario, il est
manifeste que les faits mis en preuve, la spécificité du droit disciplinaire,
le caractère d’ordre public des dispositions en cause, la protection du public
et la compétence du plaignant de porter une plainte disciplinaire contre
l’intimé attestent de l’existence d’un lien réel et important entre l’intimé à
titre de membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec et la
présente affaire.
ii)
La réglementation professionnelle québécoise qui
serait applicable à l’intimé contrevient-elle aux principes constitutionnels
d’ordre et d’équité?
Position de l’intimé sous la question ii)
[58] L’intimé indique que
l’application des règles édictées pour l’exercice de la profession de comptable
professionnel agréé au Québec contrevient aux principes constitutionnels
d’ordre et d’équité en ce qu’il est inéquitable de le pénaliser quant à
l’exercice de sa profession en Ontario pour la seule raison qu’il est membre de
l’Ordre.
[59]
L’intimé
plaide que les exigences en matière d’ordre et d’équité sont des impératifs
constitutionnels qui assurent à la fois la justice et la sûreté des opérations.
Le principe d’ordre vise à éviter que deux provinces puissent avoir compétence
législative quant à un seul et même incident, afin de prévenir d’éventuels
conflits entre les règles applicables à celui-ci. Il estime que la plainte
portée contre lui contrevient à ce principe de plusieurs façons[46].
[60] Il invoque qu’appliquer les normes
québécoises et décider de l’issue de la plainte en vertu de ces dernières
outrepasse les normes ontariennes déjà en vigueur et viole les principes d’ordre
et de souveraineté législative provinciale, principes constitutionnels au cœur
de notre fédération[47].
[61] L’intimé demande
d’être en mesure d’exercer sa profession de comptable envers des ressortissants
ontariens alors que cet exercice est soumis à la loi ontarienne sans qu’il
n’ait à respecter des exigences propres à l’exercice de la compatibilité au
Québec[48].
[62] Finalement, le principe d’équité, quant à
lui, implique la considération des intérêts tant du plaignant que du défendeur.
Il ne serait donc pas équitable de le pénaliser quant à sa pratique en Ontario
pour la seule raison qu’il est membre de l’Ordre des comptables professionnels
agréés du Québec[49].
Position du plaignant sur
la question ii)
[63] L’inscription au
tableau de l’Ordre vaut l’acceptation du membre d’un contrôle de l’exercice de sa
profession par son ordre professionnel et la mission de protection du public
doit être interprétée comme la mission de protection de la collectivité[50].
Décision du Conseil sous la
question ii)
[64] Le
Conseil souligne que l’intimé, en
devenant membre de l’Ordre, accepte alors les responsabilités qui en découlent.
Ainsi, à titre de privilèges conférés par la loi, l’intimé a acquis « le
droit exclusif au titre et le pouvoir tout aussi exclusif de poser certains
actes [51] » tout en étant soumis à un
code de déontologie et à l’ensemble des règlements afférents à son statut de
professionnel, membre de l’Ordre.
[65]
Dans l’affaire Jodoin[52], le conseil de discipline de l’Ordre des psychologues
du Québec souligne que le professionnel est « l[e] seul à connaître toutes
les exigences de l’exercice de sa profession, pas son client », et ajoute
« [qu’] en détenant des privilèges de pratique, [il] a l’entière
responsabilité de toute violation des exigences de cette pratique ». Le
conseil appuie sa conclusion sur l’arrêt de la Cour suprême rendu dans R.
c. Fitzpatrick[53] qui rappelle les principes de responsabilité attachés
à la personne qui accepte les conditions d’une activité réglementée, lesquels
sont dégagés par l’arrêt R. c. Wholesale Travel Group Inc.[54].
[66]
En conséquence, les principes constitutionnels d’ordre
et d’équité ne peuvent mener à un acquittement de l’intimé des trois chefs
d’infraction.
iii)
Le fardeau de preuve du plaignant comprend-il une
preuve que les actes reprochés à l’intimé constituent des infractions au sens
de la législation ontarienne?
Position de l’intimé sous la question iii)
[67] L’intimé plaide que
le plaignant ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve en regard de chacun des
trois chefs d’infraction, puisqu’en principe, une loi
provinciale ne saurait s’appliquer à une autre province. En somme, le fardeau
de preuve du plaignant exige qu’il démontre que les actes reprochés constituent
des infractions au sens de la législation ontarienne[55].
[68] Il s’ensuit que le
plaignant devait démontrer qu’il a contrevenu aux dispositions reprochées en
s’appuyant sur la définition de la comptabilité publique prévue à une loi
ontarienne. La preuve ne démontre pas que l’émission et la signature du rapport
qu’il a produit nécessitent un permis spécial selon la loi ontarienne et encore
moins, que son geste répond à la définition de comptabilité publique selon la
loi ontarienne[56].
[69] Sous le chef 1,
la preuve présentée au Conseil ne révèle pas que l’émission et la signature du
rapport qu’il a produit nécessitent un permis selon la loi ontarienne et encore
moins, que son geste répond à la définition de comptabilité publique selon la
loi ontarienne. Sous le chef 2, la preuve du plaignant est muette quant à
la norme ontarienne en matière de comptabilité publique tout comme sous le
chef 3. Il y a donc une absence complète de preuve quant à la définition
de comptabilité publique édictée par la loi ontarienne[57].
[70] Sans une référence de
la part du plaignant à la loi ontarienne applicable en l’espèce et sans la
démonstration d’une contravention à celle-ci, la preuve est insuffisante et
l’intimé conclut qu’il doit être acquitté des infractions reprochées.
Position du plaignant sous la question iii)
[71] Le plaignant plaide qu’il s’est déchargé de son fardeau sous chacune des
dispositions invoquées au soutien des trois chefs d’infraction portés contre
l’intimé ayant prouvé les
éléments constitutifs des infractions reprochées. En somme, il avance que
son fardeau n’inclut pas la preuve d’une infraction à une loi ontarienne,
puisqu’aucune infraction à cette dernière n’est alléguée aux chefs d’infraction.
Décision
du Conseil sous la question iii)
[72]
Le
Conseil estime que cette exigence d’une preuve démontrant une contravention à une
loi ou une norme ontarienne posée par l’intimé ne fait pas partie du fardeau du
plaignant, puisque chacun des chefs d’infraction lui reproche une infraction à
un règlement ou une loi du Québec. Il ne relève pas de la compétence du Conseil
d’analyser le présent dossier en fonction de la loi ontarienne. Cette
conclusion du Conseil est applicable sous les trois chefs d’infraction.
[73]
Le Conseil juge qu’il est manifeste que l’intérêt
public lui commande d’exercer sa compétence pour disposer des trois chefs
d’infraction portés contre l’intimé[58].
B) Le plaignant s’est-il
déchargé de son fardeau de preuve concernant les éléments essentiels de chacun
des chefs d’infraction de la plainte portée contre l’intimé?
[74]
Le plaignant remet des autorités[59] au soutien des trois chefs
d’infraction portés contre l’intimé.
Fardeau de preuve du
plaignant
[75]
À l’égard du fardeau de preuve du
plaignant, le Conseil souligne les enseignements de la Cour d’appel à ce sujet[60] :
[66] Il est bien établi que le fardeau de
preuve en matière criminelle ne s’applique pas en matière civile. Il est tout
aussi clair qu’il n’existe pas de fardeau intermédiaire entre la preuve
prépondérante et la preuve hors de tout doute raisonnable, peu importe le
« sérieux » de l’affaire. La Cour suprême du Canada, dans l’arrêt F.
H. c. McDougall, a explicitement rejeté les approches préconisant une norme
de preuve variable selon la gravité des allégations ou de leurs conséquences.
[67] Cependant, la preuve doit toujours être
claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des
probabilités. Comme démontré plus haut, le Conseil avait bien à l’esprit cette
norme et la proposition des juges majoritaires qui soutient le contraire est,
avec égards, injustifiée.
[68] Comme le rappelle la Cour suprême,
« [a] ussi difficile que puisse être sa tâche, le juge doit trancher.
Lorsqu’un juge consciencieux ajoute foi à la thèse du demandeur, il faut tenir
pour acquis que la preuve était, à ses yeux, suffisamment claire et
convaincante pour conclure au respect du critère de la prépondérance des
probabilités ».
[Références omises]
[76]
Le Conseil souligne également que
la Cour d’appel a réaffirmé le principe énoncé dans Tremblay c.
Dionne[61], à savoir que les éléments
essentiels d’un chef d’une plainte disciplinaire ne sont pas définis par son
libellé, mais par les dispositions du code de déontologie ou des règlements auxquelles le professionnel aurait
contrevenu.
[77]
Le Conseil devra, par
conséquent, décider de la culpabilité ou de l’acquittement de l’intimé en
fonction de chacune des dispositions invoquées aux chefs de la plainte. Cet
arrêt[62] de la Cour d’appel énonce
ce principe en ces termes :
[84] D’une part, les éléments essentiels d’un
chef de plainte disciplinaire ne sont pas constitués par son libellé, mais par
les dispositions du code de déontologie ou du règlement qu’on lui reproche
d’avoir violées (Fortin c. Tribunal des professions, 2003 CanLII 33167
(QC CS), [2003] R.J.Q. 1277, paragr. [136] (C.S.); Béliveau
c. Comité de discipline du Barreau du Québec, précité; Béchard c.
Roy, précité; Sylvie POIRIER, précitée, à la p. 25). […]
[Référence omise]
La faute
disciplinaire
[78]
La faute disciplinaire doit atteindre un niveau de
gravité suffisant pour la qualifier à ce titre[63] :
[43] Pour éviter un exercice
de pondération arbitraire basé sur des facteurs variables au gré des
circonstances de chaque cas, la jurisprudence et la doctrine préconisent de
s’en remettre aux fondements mêmes de la déontologie professionnelle,
c’est-à-dire aux valeurs inspirées par l’éthique, la moralité, la probité,
l’honneur et la dignité nécessaires pour assurer la protection du public.
[79]
Afin de statuer sur la responsabilité déontologique de
l’intimé, le Conseil doit déterminer s’il a commis une faute technique ou une
faute déontologique[64].
[80]
Lorsque la norme est
décrite dans le règlement, la moralité et l’éthique sont nécessairement
enfreintes en cas de manquement[65].
[81]
La faute disciplinaire est décrite comme étant une
violation des principes de moralité et d’éthique.
[82]
Ainsi, l’acte ou le comportement reproché au
professionnel doit être suffisamment grave pour être qualifié de faute
déontologique comme le souligne le Tribunal des professions dans l’affaire Gruszczynski[66] dans laquelle il énonce les exigences requises pour
établir l’existence d’une telle faute :
[42] La
faute déontologique doit être distinguée de la faute technique. Ainsi, dans Ayotte c. Gingras, le Tribunal des
professions écrivait ceci relativement au fait qu’un avocat n’aurait pas agi
avant l’expiration du délai de prescription.
Le Comité de discipline devait décider s’il
s’agissait là d’une faute disciplinaire. À cet égard, il déclare qu’il ne
s’agissait pas là d’une faute disciplinaire, mais d’une faute purement
technique […].
Il y a une distinction à faire entre une faute
technique et une faute disciplinaire.
On ne retrouve pas de définition de la faute
disciplinaire ni au Code des professions ni dans la Loi sur le Barreau. La jurisprudence
a toutefois précisé que :
"La faute disciplinaire est donc une
violation des principes de moralité et d’éthique propres au milieu médical
[…]."
[…].
[43] Dans
cette même affaire, notre tribunal a rappelé ce qu’écrivait le professeur Yves
Ouellette à ce sujet :
En outre, comme la faute disciplinaire réside en
principe dans la violation d’une règle d’éthique inspirée par des sentiments
d’honneur et de courtoisie, une faute purement technique, erreur, maladresse,
négligence, qui peut entraîner une responsabilité civile, ne sera pas
considérée comme une faute disciplinaire en l’absence de texte précis.
[44] L’acte
ou le comportement reproché doit être suffisamment grave pour être qualifié de
faute déontologique.
[45] Le
Tribunal des professions s’exprimait ainsi dans Malo c. Infirmières et infirmiers (Ordre professionnel des) :
[28] La doctrine et la jurisprudence en la
matière énoncent que le manquement professionnel, pour constituer une faute
déontologique, doit revêtir une certaine gravité. Il arrive à tous les
professionnels de commettre des erreurs et la vie de ces derniers serait
invivable si la moindre erreur, le moindre écart de conduite était susceptible
de constituer un manquement déontologique. Ce principe est réitéré par le
Tribunal dans l’affaire Mongrain précitée concernant également l’Ordre
professionnel des infirmières et infirmiers.
[…]
[47] Il
faut distinguer le comportement souhaitable du comportement acceptable, comme
l’écrit le Tribunal des professions dans Architectes
(Ordre professionnel des) c. Duval :
[11] Comme le soulignait le procureur de
l’intimé, il faut distinguer en droit disciplinaire entre le comportement
souhaitable et le comportement acceptable. La faute déontologique naît d’un
comportement qui se situe en-dessous du comportement acceptable. Un
professionnel peut avoir une conduite qui s’éloigne du comportement souhaitable
sans être inacceptable. Dans ce cas, il ne commet pas de faute déontologique.
[Référence omise]
[83]
Selon le jugement du Tribunal des professions rendu
dans Duval[67], il faut distinguer le comportement souhaitable du
comportement acceptable.
[84]
En somme, la faute déontologique résulte d’un
comportement qui atteint un degré de gravité plus élevé par rapport au
comportement acceptable.
Chef 1
[85] Le
chef 1 est ainsi libellé :
1. À Ottawa, le ou vers 19 janvier 2021, l’intimé, Jean Daniel
Badette, CPA, a émis un rapport d’audit des comptes portant sur les états
financiers de la campagne électorale de [Mme A] pour l’exercice financier de la
période de campagne commençant le 16 juillet 2020 et se terminant le 19 novembre
2020, alors qu’il ne détenait pas de permis de comptabilité publique, le tout
en contravention à l’article 5 de la Loi sur les comptables
professionnels agréés, chapitre C-48.1, alors en vigueur ;
[86] Le plaignant invoque que l’intimé a préparé et émis un rapport
d’audit des comptes portant sur les états financiers de la campagne électorale
de Mme A pour l’exercice financier de la période de campagne
commençant le 16 juillet 2020 et se terminant le 19 novembre 2020[68]. L’intimé conteste
cette position.
[87] De plus, selon le plaignant, il n’est pas
contesté que l’intimé n’a jamais détenu de permis de comptabilité publique[69]. Cette
affirmation est exacte.
[88] Le Conseil rappelle le témoignage de
l’intimé sous le chef 1.
[89] L’intimé déclare qu’au cours du mois de janvier 2021, un collègue et ami
CPA lui demande s’il peut aider une de ses clientes, soit une candidate à une
élection municipale, à préparer son rapport financier, ce qu’il accepte. Cet
ami lui transmet alors un formulaire intitulé Financial Statement Auditing
Form 4 qu’il remplit. Il déclare que dans les faits, il a joué le rôle
de Chief Financial Officer pour cette candidate.
[90] Plus tard, il constate que cette candidate a reçu des dons de plus de
10 000 $, il remplit alors un autre formulaire. À son avis, il n’a
jamais été question de signer un rapport d’audit et à aucun moment, il n’en a
signé un.
[91] En ce qui a trait au document signé au bénéfice de la candidate Mme A,
il déclare ne pas avoir signé un rapport d’audit, que le nom du formulaire
porte à confusion, que le contenu ne représente pas un rapport d’audit et qu’il
n’est pas exigé qu’un CPA auditeur signe ce document. Il martèle qu’il n’a pas
rempli un rapport d’audit.
[92] L’intimé demande au Conseil de constater qu’à aucun moment, il n’a agi à
titre de CPA auditeur, que le document complété est en réalité un rapport
financier et qu’à aucun moment, il n’a offert un service d’audit ni s’est présenté comme offrant des services d’audit.
[93] Il mentionne avoir commis des erreurs dans sa déclaration écrite transmise
au plaignant[70].
Décision du Conseil sous le
chef 1
[94] Le Conseil juge qu’il doit écarter le
témoignage de l’intimé, puisqu’il présente une force probante relativement peu
élevée étant donné qu’il offre une version différente, voire contradictoire
avec la preuve documentaire produite sous le présent chef.
[95]
Le plaignant fonde ses reproches sur l’article 5
de la Loi sur les comptables
professionnels agréés[71] qui énonce :
SECTION IV
PERMIS DE COMPTABILITÉ
PUBLIQUE
5. Pour
exercer l’activité professionnelle visée au troisième alinéa de l’article 4, à l’exception de la
mission de compilation qui n’est pas destinée exclusivement à des fins
d’administration interne, le comptable professionnel agréé doit obtenir un
permis de comptabilité publique.
Le
Conseil d’administration lui délivre le permis s’il satisfait aux conditions et
modalités de délivrance fixées dans un règlement pris par le Conseil. Ce
règlement détermine également :
1° les
autorisations légales d’exercer la comptabilité publique hors du Québec qui
donnent ouverture au permis ainsi que les conditions et modalités de délivrance
de ce permis applicables aux titulaires de ces autorisations légales;
2° les
conditions et modalités de délivrance du permis pour donner effet à une entente
conclue par l’Ordre en vertu d’une entente de reconnaissance mutuelle des
compétences professionnelles conclue entre le gouvernement et un autre
gouvernement et doit prévoir une révision de la décision, par des personnes
différentes de celles qui l’ont rendue, refusant de reconnaître qu’une de ces
conditions, autres que les compétences professionnelles, est remplie.
Le
premier alinéa ne s’applique pas si l’activité professionnelle qui y est visée
est exercée par :
1° une
personne en conformité avec les dispositions d’un règlement pris en application
du paragraphe h de l’article 94 du Code des professions (chapitre C-26);
2° un
comptable ou un vérificateur à l’emploi du gouvernement, dans l’exercice de ses
fonctions.
[96]
Le troisième alinéa de l’article 4 de la Loi
sur les comptables professionnels agréés précise ce qui suit :
4. […]
Dans le cadre de l’exercice
de la profession, l’activité professionnelle réservée au comptable
professionnel agréé est la comptabilité publique. Cette activité consiste à :
1° exprimer une
opinion visant à donner un niveau d’assurance à un état financier ou à toute
partie de celui-ci, ou à toute autre information liée à cet état financier; il
s’agit de la mission de certification, soit la mission d’audit et la mission
d’examen ainsi que l’émission de rapports spéciaux;
2° émettre toute forme
d’attestation, de déclaration ou d’opinion sur des informations liées à un état
financier ou à toute partie de celui-ci, ou sur l’application de procédés
d’audit spécifiés à l’égard des informations financières, autres que des états
financiers, qui ne sont pas destinés exclusivement à des fins d’administration
interne;
3° effectuer une
mission de compilation qui n’est pas destinée exclusivement à des fins
d’administration interne.
Rien dans les premier et
deuxième alinéas ne doit porter atteinte aux droits d’un membre d’un autre
ordre professionnel dans le domaine qui lui est reconnu par la loi.
[97]
L’intimé conteste avoir exercé dans le domaine de la
comptabilité publique et conteste avoir réalisé une mission d’audit au bénéfice
de la campagne électorale de Mme A.
[98]
La preuve documentaire révèle que l’intimé complète un
rapport intitulé Independant Auditor’s Report qu’il signe le 19 janvier
2021 avec son prénom et son nom suivis des mentions CPA, CMA, au bénéfice d’une
candidate, Mme A, à une élection municipale s’étant déroulée
dans la province de l’Ontario[72].
[99]
Ce rapport comprend notamment les mentions
suivantes :
JEAN
DANIEL BADETTE, CPA, CMA
INDEPENDANT
AUDITOR’S REPORT
To: City Clerk
Re: [Mme A]
Election Campaign
Qualified Opinion
We have audited the accompanying Forms 4 Financial
Statement of the [Mme A] Election Campaign, which comprise the statement of Campaign Income and
Expenses for the campaign period July 16, 2020 to November 19, 2020 and other
explanatory information.
In our opinion, except for the possible effects
of the matter described in the Basis for Qualified Opinion section of our
report, the accompanying Forms 4 Financial Statement present fairly, in
all material respects, the Statement of Income and Expenses of the [Mme A] Election
Campaign for the campaign period July 16, 2020 to November 19, 2020, and the
result of its operations for the campaign period then ended in accordance with
the financial reporting provision of section 78 of the Municipal Elections
Act, 1996 and City of Ottawa By-Law No.2018-33.
Basis for Qualified Opinion
[…]
We conducted our audit in accordance with
Canadian generally accepted auditing standards. Our responsibilities under those standards are
described in the Auditors’ Responsibilities for the audit of the Forms 4
Financial Statement section of our report. We are independent of the entity in
accordance with the ethical requirements that are relevant to our audit of the
financial statements in Canada, and we have fulfilled our other ethical
responsibilities in accordance with these requirements. We believe that the
audit evidence we have obtained is sufficient and appropriate to provide a
basis for our qualified audit opinion.
[…]
Auditors’ Responsibilities for the Audit of the
forms 4 Financial Statement
Our objectives are to obtain reasonable
assurance about whether the Forms 4 Financial Statement are free from
material misstatement, whether due to fraud or error and to issue and auditors’
report that includes pour opinion. Reasonable assurance is a high-level of
assurance but is not a guarantee that an audit conducted in accordance with
Canadian generally accepted auditing standards will always detect a material
misstatement when it exists. Misstatements can arise from fraud or error and
are considered material if, individually or in the aggregate, they could
reasonably be expected to influence the economic decisions of users taken on
the basis of the Form 4 Financial Statement. As part of an audit in
accordance with Canadian generally accepted audit standards, we exercise
professional judgement and maintain professional skepticism throughout we
audit. […]
[Soulignements ajoutés]
[100]
Cette preuve documentaire est convaincante et confirme
qu’il s’agit dans les faits d’une mission d’audit réalisée par l’intimé.
[101]
Le Conseil conclut qu’en procédant à la rédaction, la
réalisation et la signature de ce rapport[73],
l’intimé effectue une mission d’audit et exerce dans la sphère professionnelle
de la comptabilité publique.
[102] Comme
nous l’avons vu, l’article 5
de la Loi
sur les comptables professionnels agréés impose au professionnel
l’obligation de détenir un permis afin d’exercer la comptabilité publique, sauf
si le membre de l’Ordre effectue une mission de compilation qui est destinée
exclusivement à des fins d’administration interne. Cet article 5 est qualifié de disposition d’ordre public que nul
ne peut ignorer[74].
[103]
L’exigence de détenir un permis de comptabilité
publique a pour but d’assurer la protection du public[75].
Pour ce faire, le membre de l’Ordre doit notamment réussir un programme de
formation professionnelle en comptabilité publique[76].
[104]
Or, l’intimé n’a jamais détenu de permis de
comptabilité publique[77].
[105]
Un
membre de l’Ordre qui ne détient pas un permis de comptabilité publique est
présumé ne pas avoir les qualifications nécessaires à cet égard.
[106] En conséquence, sous le chef 1, le Conseil
juge que le plaignant s’est déchargé de son fardeau concernant l’article 5
de la Loi sur les comptables professionnels agréés et déclare l’intimé
coupable d’avoir contrevenu à cette disposition.
Chef 2
[107]
Le chef 2
se lit :
2. À Orléans (Ontario), le ou vers le 3 février 2021, l’intimé
Jean Daniel Badette, CPA, relativement à sa déclaration annuelle obligatoire
pour la période 2021-2022 à l’Ordre, a fait une déclaration erronée ou
fallacieuse au formulaire en indiquant qu’il n’avait pas exercé la comptabilité
publique entre le 1er avril 2020 et 31 mars 2021, alors qu’il avait
émis et signé un rapport d’audit des comptes portant sur les états financiers
de la campagne électorale d’[Mme A] pour l’exercice financier de la période de
campagne commençant le 16 juillet 2020 et se terminant le 19 novembre
2020, le tout en contravention à l’article 61 du Code de déontologie
des comptables professionnels agréés, chapitre C-48.1, r. 6 alors en
vigueur ;
[108] Relativement au chef 2,
le plaignant soutient que l’intimé, en date du 3 février 2021, dans le
cadre de sa déclaration annuelle obligatoire pour la période 2021-2022 à
l’Ordre a répondu non aux questions 3.1 a), affirmant qu’il n’avait
pas exercé de missions d’audit entre le 1er avril 2020 et le
31 mars 2021. Or, de l’avis du plaignant, cette déclaration est fausse,
puisque le 19 janvier 2021, l’intimé produit et signe un rapport d’audit
des comptes portant sur les états financiers de la campagne électorale de Mme A
pour l’exercice financier de la période de campagne commençant le
16 juillet 2020 et se terminant le 19 novembre 2020[78].
[109] Le Conseil revient sur le témoignage de
l’intimé rendu au sujet du chef 2.
[110] L’intimé déclare qu’il n’a pas transmis une fausse déclaration à l’Ordre,
puisqu’il n’a pas complété un rapport d’audit. La preuve du plaignant ne
démontre pas qu’il s’est présenté à titre de CPA auditeur tout comme il n’a
jamais offert de services d’audit. Il estime que la publication qu’il aurait
fait une fausse déclaration risque de détruire sa carrière.
Décision du Conseil sous le chef 2
[111]
Le
Conseil juge qu’il doit écarter le témoignage de l’intimé, puisqu’il présente
une force probante relativement peu élevée étant donné qu’il offre une version
différente, voire contradictoire avec la preuve documentaire produite sous le
présent chef.
[112]
Le
plaignant fonde ses reproches sur l’article 61 du Code de déontologie
des comptables professionnels agréés[79] (le Code de déontologie) alors
en vigueur qui énonce :
61. Le membre doit s’assurer de
l’exactitude et de l’intégrité des renseignements qu’il fournit à l’Ordre. Il
doit en tout temps respecter ses engagements envers l’Ordre liés au contrôle de
l’exercice de la profession.
[113] La déclaration annuelle obligatoire pour la période
du 1er avril 2020 au 31 mars 2021 produite par l’intimé
indique qu’il n’a pas complété les éléments suivants : a) Missions
d’audit (y compris l’émission de rapports spéciaux) et b) Missions
d’examen (y compris l’émission de rapports spéciaux). Il déclare par
ailleurs avoir exercé dans le domaine de la comptabilité publique dans le cadre
de la rubrique suivante : c) Missions de compilation (pour lesquelles
un avis au lecteur ou un rapport de mission a été ou sera émis) pour cette
même période du 1er avril 2020 au 31 mars 2021[80].
[114] Ainsi, l’intimé dans le cadre de ses réponses sous
le volet Situation professionnelle de sa déclaration annuelle
obligatoire pour la période du 1er avril 2020 au 31 mars
2021 offre des réponses distinctes sous les trois éléments qui concernent le
champ de la comptabilité publique.
[115] L’article 61 du Code de déontologie
alors en vigueur au moment où l’intimé remplit et signe sa déclaration annuelle
exige que le membre s’assure de l’exactitude et de l’intégrité des
renseignements qu’il fournit à l’Ordre.
[116] Le Conseil a déjà déterminé, sous le chef 1,
que l’intimé a réalisé une
mission d’audit des comptes portant sur les états financiers de la campagne
électorale de Mme A pour l’exercice financier de la période de
campagne commençant le 16 juillet 2020 et se terminant le 19 novembre
2020, alors qu’il ne détenait pas de permis de comptabilité publique.
[117] La combinaison de tous les éléments factuels
exposés précédemment mène à la conclusion que l’intimé, le ou vers le 3 février 2021,
relativement à sa déclaration annuelle obligatoire pour la période 2021-2022
à l’Ordre, a omis de s’assurer de
l’exactitude et de l’intégrité des renseignements qu’il a fournis à l’Ordre.
[118]
Le
Conseil juge que le plaignant s’est déchargé de son fardeau concernant
l’article 61 du Code
de déontologie des comptables professionnels agréés[81]
alors en vigueur et déclare l’intimé coupable d’avoir contrevenu à cet
article.
Chef 3
[119] Le chef 3 se lit :
3. Le ou vers le 24 octobre 2022, l’intimé, exerçant sa
profession à Ottawa, a effectué de fausses représentations quant à ses compétences
en laissant croire à ses clients, la campagne électorale de [Mme B], qu’il
détenait les compétences requises pour préparer un rapport d’audit alors qu’il
ne détenait pas de permis de comptabilité publique, le tout en contravention à
l’article 24 du Code de déontologie des comptables professionnels
agréés, chapitre C-48.1, r. 6 alors en vigueur et à l’article 60.2
du Code des professions, RLRQ c. C -26.
[120]
En ce qui concerne le chef 3, le plaignant reconnaît que son fardeau
lui exige de présenter la preuve d’une intention blâmable de la
part de l’intimé, puisqu’il lui reproche d’avoir fait des représentations fausses et
trompeuses[82].
À son avis, cette intention
blâmable peut s’inférer des circonstances, notamment par l’obtention d’un
mandat qui procure un avantage à l’intimé.
[121]
Au sujet du chef 3, le plaignant souligne la trame factuelle suivante.
[122] Le 24 octobre 2022, l’intimé sollicite un mandat auprès d’un
représentant de Mme B, une autre candidate à une élection
municipale, invoquant qu’il possède les compétences requises pour remplir un
mandat d’audit. Par la suite, il accepte d’exécuter ce mandat et demande le
6 novembre 2022 les documents nécessaires afin de produire le rapport
d’audit puis se désiste du mandat le 19 novembre 2022.
[123] Le Conseil souligne le témoignage de
l’intimé rendu sous le présent chef.
[124] Au sujet de la candidate Mme B, il a agi à titre de
bénévole pour sa campagne, notamment en faisant du porte-à-porte. Il déclare au Conseil qu’à un moment donné, il a offert ses services,
mais en aucun temps, il n’a utilisé le titre de CPA auditeur ou n’a offert un
service d’audit, et ce, tant dans ses échanges verbaux qu’écrits.
Décision du Conseil sous le chef 3
[125]
Le
Conseil juge qu’il doit écarter le témoignage de l’intimé, puisqu’il présente
une force probante relativement peu élevée étant donné qu’il offre une version
différente, voire contradictoire avec la preuve documentaire produite sous le
présent chef.
[126]
Le
plaignant fonde ses reproches sur l’article 24 du Code de déontologie
des comptables professionnels agréés, alors en vigueur, et l’article 60.2
du Code des professions[83]
qui énoncent :
24. Le membre doit éviter toute fausse
représentation quant à son niveau de compétence ou quant à l’efficacité de ses
propres services, des services professionnels généralement dispensés par les
autres personnes qui exercent leurs activités professionnelles au sein de la
société dans laquelle il exerce sa profession et de ceux généralement assurés
par les membres de la profession. Si l’intérêt du client l’exige, il doit, sur
autorisation de ce dernier, consulter un autre membre, un autre professionnel
ou une autre personne compétente, ou le diriger vers l’une de ces personnes.
60.2. Un
professionnel ne peut, par quelque moyen que ce soit, faire une représentation
fausse, trompeuse ou incomplète, notamment quant à son niveau de compétence ou
quant à l’étendue ou à l’efficacité de ses services et de ceux généralement
assurés par les membres de sa profession.
[127]
La preuve documentaire révèle que l’intimé, le 24 octobre
2022, transmet le message texte suivant[84] :
Hello
[représentante
de Mme B],
I don’t know if you aware of that l’m a Certified Professional Accountant.
I know [Mme B] will have to prepare the financial report
for city of Ottawa.
I have some experiences, two years ago I prepared this report for [Mme A].
Maybe she will retain my service again this time. Let me know if you want to
use my service to prepare this report.
Thank you
[128] La représentante de Mme B écrit ce qui suit : « I also
appreciate your offer to take care of the audit. Let me chat to our
CFO. Just out of curiosity how much do you normally charge for the audit[85]?». L’intimé lui répond : «I charged 1000$ last
election municipal and I had the cheapest price at that time. For you I plan to
keep it the same[86] ».
[129]
Le 6 novembre 2022, par courriel, la
représentante de Mme B demande à l’intimé d’énumérer les
documents qu’il requiert afin de commencer son travail pour la candidate, Mme B. L’intimé lui répond à cette même date
et demande plusieurs documents[87].
[130]
Le 13 novembre 2022, l’intimé reçoit un courriel d’un
autre représentant de Mme B l’informant que les documents requis dans
son courriel du 6 novembre seront disponibles, que des détails sont à
finaliser et qu’un suivi lui sera fait dans quelques semaines[88].
L’intimé accuse réception de ce courriel dans l’heure qui suit sa réception.
[131] Le 18 novembre
2022, l’intimé est invité par le représentant de Mme B à prendre
connaissance d’un courriel qui mentionne que la comptable professionnelle agréée
qui a réalisé l’audit pour Mme B lors d’une élection précédente est en attente d’une
communication de sa part. Cette demande est ainsi
formulée : « I will fully cooperate with my successor and will wait
for his formal communication as prescribed in our CPA rules of conduct[89] ».
[132]
Le 19 novembre 2022, l’intimé transmet un message
texte à la représentante de Mme B l’informant de ce
qui suit[90] :
Hello
[représentante
de Mme [B]
How are you?
I hope everything is fine for you, family and [Mme B].
unfortunately I will not be able to offer
the audit service to [Mme B] as we agreed because of the
new responsibilities that I have just obtained which will make me unavailable
for the next six months. I sincerely apologize for the inconvenience this may
cause, I hope you can find a replacement as soon as possible. Please pass the
message on to […].
Thank you again.
[Soulignements
ajoutés]
[133]
Ainsi, l’intimé se désiste du mandat qu’il a
sollicité.
[134]
Le plaignant reconnaît que le libellé des articles 24 du Code de
déontologie des comptables professionnels agréés, alors en vigueur, et 60.2
du Code des professions exige qu’il établisse la preuve d’une intention blâmable de la part de l’intimé afin de se
décharger de son fardeau de preuve.
[135]
Dans l’affaire Gauthier[91],
le Tribunal des professions mentionne, au sujet de l’article 60.2 du Code
des professions, que cette disposition vise trois types de représentation :
la fausse, la trompeuse et l’incomplète, en ajoutant que la jurisprudence
établit que dans le cas d’une représentation fausse ou trompeuse, pour qu’il y
ait une contravention déontologique, la preuve de l’intention blâmable doit
être présente.
[136]
Toujours dans l’affaire Gauthier, le
professionnel accepte un mandat pour agir en tant qu’expert en comptabilité
publique. Non seulement il omet de révéler, lors de son témoignage visant à le
déclarer expert, des informations relatives à l’inspection professionnelle
qu’il a subie, mais aussi, il reconnaît avoir omis de le divulguer à son
employeur et à son mandant. Le Tribunal conclut que ce comportement du
professionnel va au-delà de la simple erreur ou inadvertance et révèle sa volonté
d’obtenir un statut d’expert ou une situation avantageuse en ne communiquant
pas ces informations. Dans ces circonstances, le Tribunal souligne qu’il est
permis d’inférer que le professionnel avait une intention blâmable.
[137]
La preuve documentaire du présent dossier révèle que
l’intimé sollicite un mandat « to prepare the financial report for city of
Ottawa » auprès de la représentante de Mme B, souligne
avoir réalisé ce rapport lors d’une élection précédente au bénéfice de Mme A et précise que ses honoraires fixés à
1000 $ sont les plus bas.
[138] Par la suite, il se désiste du mandat en indiquant
unfortunately « I will not be able to offer the audit service to [Mme B]
as we agreed ».
[139] Selon les termes de ce message texte, l’intimé
reconnaît qu’il avait convenu de réaliser un audit.
[140]
Le Conseil rappelle les dispositions invoquées sous le
chef 3, soit l’article 24 du Code de déontologie des comptables
professionnels agréés, alors en vigueur, et l’article 60.2 du Code
des professions qui énoncent :
24. Le membre doit éviter toute fausse
représentation quant à son niveau de compétence ou quant à l’efficacité de ses
propres services, des services professionnels généralement dispensés par les
autres personnes qui exercent leurs activités professionnelles au sein de la
société dans laquelle il exerce sa profession et de ceux généralement assurés
par les membres de la profession. Si l’intérêt du client l’exige, il doit, sur
autorisation de ce dernier, consulter un autre membre, un autre professionnel
ou une autre personne compétente, ou le diriger vers l’une de ces personnes.
60.2. Un
professionnel ne peut, par quelque moyen que ce soit, faire une représentation
fausse, trompeuse ou incomplète, notamment quant à son niveau de compétence ou
quant à l’étendue ou à l’efficacité de ses services et de ceux généralement
assurés par les membres de sa profession.
[141]
L’intimé ne détient pas les compétences requises pour
effectuer le mandat proposé, soit un mandat d’audit comme celui réalisé pour le
compte de Mme A lors d’une élection précédente, puisqu’il n’est
pas titulaire d’un permis de comptabilité publique.
[142] Le Conseil juge que l’ensemble de la trame factuelle rapportée
sous le chef 3 démontre que le comportement de l’intimé va au-delà de la
simple erreur ou inadvertance et révèle la volonté de l’intimé d’obtenir un
mandat d’audit, soit une situation avantageuse. Ce faisant, il omet d’éviter toute fausse représentation quant à son niveau de compétence ou
quant à l’efficacité de ses propres services.
[143] Dans les présentes circonstances, il est permis
d’inférer que l’intimé avait une intention blâmable requise en fonction de l’article 24
du Code de déontologie.
[145] Au surplus, cette même trame factuelle atteste que
l’intimé a fait au mieux une représentation incomplète ou trompeuse, notamment
quant à son niveau de compétence ou quant à l’étendue ou à l’efficacité de ses
services à être rendus à la candidate, Mme B, alors
qu’il a convenu de réaliser un mandat d’audit.
[146] Dans les présentes circonstances, il est aussi permis
d’inférer que l’intimé avait une intention blâmable requise en fonction de l’article 60.2
du Code des professions.
[147] Le Conseil conclut que le plaignant s’est déchargé
de son fardeau concernant l’article 60.2 du Code des professions et
déclare l’intimé coupable d’avoir contrevenu à cet article.
[148]
En application de ces enseignements et de la règle qui
interdit les condamnations multiples[92],
la déclaration de culpabilité quant à l’article 60.2 du Code des
professions fait l’objet d’une
ordonnance de suspension conditionnelle des procédures, comme il est plus
amplement décrit dans le dispositif de la présente décision.
EN CONSÉQUENCE, LE CONSEIL,
UNANIMEMENT :
Chef 1 :
[149]
DÉCLARE l’intimé coupable de
l’infraction fondée sur l’article 5 de la Loi sur les comptables professionnels agréés.
[150] DÉCLARE
l’intimé coupable de l’infraction fondée sur l’article 61 du Code de
déontologie des comptables professionnels agréés, alors en vigueur.
Chef 3 :
[151] DÉCLARE
l’intimé coupable de l’infraction fondée sur l’article 24 du Code de
déontologie des comptables professionnels agréés, alors en vigueur, et
l’article 60.2 du Code des professions.
[152] PRONONCE la
suspension conditionnelle des procédures à l’égard de l’article 60.2 du Code
des professions.
[153] DEMANDE à la secrétaire du Conseil de discipline de l’Ordre des comptables
professionnels agréés du Québec de convoquer les parties à une audition sur
sanction.
|
||
|
__________________________________ Me JULIE CHARBONNEAU Présidente __________________________________ M. GAÉTAN
BUSSIÈRES, CPA Membre __________________________________ M. DAVID PLUTA, CPA
auditeur Membre |
|
|
|
|
Me Sophie Gratton Me Bérengère Laplanche (sauf
les audiences des 26 septembre et 8 novembre 2024) |
||
Sarrazin Plourde, S.A |
||
Avocats du plaignant |
||
|
||
Me Yahia Belhaddad (audiences
des 26 septembre et 8 novembre 2024) |
||
Lambert Avocats |
||
Avocats de l’intimé |
||
|
||
Dates d’audience : |
13 juillet,
22 septembre et 23 novembre 2023 et 20 mars, 26 septembre
et 8 novembre 2024 |
|
[1] Comptables professionnels agréés (Ordre des)
c. Badette, 2024 QCCDCPA 6.
[2] RLRQ,
c. C-25.01.
[3] Procès-verbal
de la conférence de gestion du 4 novembre 2024.
[4] Pièces P-1
et P-1A.
[5] RLRQ,
c. C-48.1.
[6] Pièce P-8.
[7] Pièces P-1
à P-7.
[8] Psychologues
(Ordre professionnel des) c. Fernandez De Sierra, 2005 QCTP 134.
[9] Pièce P-8.
[10] Pièce P-5A.
[11] Sharp
c. Autorité des marchés financiers, 2023 CSC 29; Ordre des
optométristes du Québec c. Coastal contacts inc., 2014 QCCS 5886;
Unifund Assurance Co. c. Insurance Corp. of British Columbia, 2003 CSC 40;
Tolofson c. Jensen; Lucas (Tutrice à l’instance de) c. Gagnon,
1994 CanLII 44 (CSC); Journal des débats de la Commission des
institutions, 38e légis., 1re sess., 6 décembre
2007, Vol. 40, n° 22, consultations particulières sur le projet de
loi n° 46 - Loi modifiant le Code des professions et la Loi sur les
comptables agréés concernant la comptabilité publique; Paquette c. Comité de
discipline de la Corporation professionnelle des médecins du Québec,
1995 CanLII 5215 (QC CA); Autorité des marchés financiers c.
Ballachey, 2008 QCCQ 1152.
[12] Autorité des marchés financiers c. Ballachey, supra, note 11.
[13] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 12 à 14.
[14] Unifund Assurance Co. c. Insurance Corp.
of British Columbia, supra, note 11.
[15] Sharp
c. Autorité des marchés financiers, supra, note 11.
[16] Unifund Assurance Co. c. Insurance Corp.
of British Columbia, supra, note 11.
[17] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 17.
[18] Ordre
des optométristes du Québec c. Coastal contacts inc., supra, note 11.
[19] Appel rejeté par Ordre des optométristes du Québec c. Coastal Contacts Inc., 2016 QCCA 837.
[20] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 20.
[21] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 26 et 27.
[22] Paquette
c. Comité de discipline de la Corporation professionnelle des médecins du
Québec, 1995 CanLII 5215 (QC CA); Comité — médecins — 3, [1987]
D.D.C.P. 161; Black c. Law Society of Alberta, 1989 CanLII 132
(CSC); Goldman c. Avocats (Ordre professionnel des),
2008 QCTP 164; Chambre de la sécurité financière c. Boucher,
2017 QCCDCSF 69; Chambre De La Sécurité Financière c. Brazeau,
2003 CanLII 57205 (QC CDCSF); Autorité des marchés financiers c.
Ballachey, 2008 QCCQ 1152; Giroux c. Chambre de l’assurance de
dommages, 2024 QCCQ 1196; Tribunal Comptables agréés-1,
[1986] D.D.C.P. 153; Breton c. Comité de discipline de l’Ordre
professionnel des travailleurs sociaux du Québec,
2003 CanLII 7204 (QC CS); Eloufy v Association of Professional
Engineers and Geoscientists of Saskatchewan, 2024 SKKB 45; Loi de
2004 sur l’expertise comptable, LO 2004, c. 8; Mema v. Chartered
Professional Accountants of Alberta, 2020 ABQB 486.
[23] Plan
d’argumentation du plaignant, paragr. 36.
[24] Plan
d’argumentation du plaignant, paragr. 37.
[25] Sharp
c. Autorité des marchés financiers, supra, note 11.
[26] Tolofson
c. Jensen; Lucas (Tutrice à l’instance de) c. Gagnon, supra, note 11; Unifund
Assurance Co. c. Insurance Corp. of British Columbia, supra, note 11.
[27] Ordre
des optométristes du Québec c. Coastal contacts inc., supra, note 11;
Autorité des marchés financiers c. Ballachey, supra, note 11.
[28] Pièce C-1.
[29] Global Securities Corp. c.
Colombie-Britannique (Securities Commission), 2000 CSC 21, citant Re
Legault and Law Society of Upper Canada, 1975 CanLII 706 (ON CA) et Underwood
McLellan & Associates Ltd. v. Association of Professional Engineers of
Saskatchewan, Barshel, Ringheim, and Gallinger, 1979 CanLII 2222 (SK
CA); Giroux c. Chambre de l’assurance de dommages,
2024 QCCQ 1196; Eloufy v Association of Professional Engineers and
Geoscientists of Saskatchewan, 2024 SKKB 45; Mema v Chartered
Professional Accountants of Alberta, 2020 ABQB 486; Saplys v.
Ontario Association of Architects, 2019 ONSC 1679; Ewachniuk v. Law
Society of British Columbia, 1998 CanLII 6469 (BC CA); Ordre des
optométristes du Québec c. Coastal Contacts Inc., 2016 QCCA 837.
[30] Ordre
des optométristes du Québec c. Coastal Contacts Inc., supra, note 29.
[31] Sharp
c. Autorité des marchés financiers, supra, note 11.
[32] Unifund Assurance Co. c. Insurance Corp.
of British Columbia, supra, note 11.
[33] RLRQ,
c. C-26.
[34] Tremblay
c. Dionne, 2006 QCCA 1441.
[35] Gagnon
c. Comptables agréés (Ordre professionnel des), 2009 QCTP 48.
[36] Librandi
c. Comptables professionnels agréés (Ordre des), 2023 QCTP 7.
[37] Giroux
c. Chambre de l’assurance de dommages, 2024 QCCQ 1196.
[38] Unifund Assurance Co c. Insurance
Corp. of British Columbia, supra, note 11.
[39] Ordre
des optométristes du Québec c. Coastal contacts inc, supra, note 29.
[40] Eloufy v Association of Professional
Engineers and Geoscientists of Saskatchewan, supra, note 22.
[41] Mema
v. Chartered Professional Accountants of Alberta, supra, note 22.
[42] Pièces P-1
et P-1A.
[43] Pièce P-8,
admission 6.
[44] Pièce P-2B,
p. 19, Pièce P-2D, p. 24, P-5B, p. 44 et 46.
[45] Pièce P-2C.
[46] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 28.
[47] Plan d’argumentation de l’intimé, paragr. 31.
[48] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 32.
[49] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 31 et 32.
[50] Plan
d’argumentation du plaignant, paragr. 39.
[51] Dentistes
(Ordre professionnel des) c. Dupont, 2005 QCTP 7.
[52] Psychologues
(Ordre professionnel des) c. Jodoin, 2011 CanLII 98550
(QC OPQ).
[53] R.
c. Fitzpatrick, 1995 CanLII 44
(CSC), pages 176 et 177.
[54] R. c. Wholesale Travel Group Inc., 1991 CanLII 39 (CSC).
[55] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 36 et 37.
[56] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 36-38.
[57] Plan
d’argumentation de l’intimé, paragr. 39 et 40.
[58] Autorité
des marchés financiers c. Solo International inc.,
2017 QCTMF 114, décision du tribunal de première instance confirmée
par Sharp c. Autorité des marchés financiers, 2023 CSC 29.
[59] Mailloux
c. Fortin, 2016 QCCA 62; Vaillancourt c. Avocats (Ordre
professionnel des), 2012 QCTP 126; Bisson c. Lapointe,
2016 QCCA 1078; Tremblay c. Dionne, 2006 QCCA 1441; Pharmaciens
(Ordre professionnel des) c. Cloutier, 2019 CanLII 24383 (QC
CDOPQ); Ingénieurs (Ordre professionnel des) c. Bilodeau,
2005 QCTP 34; Cuggia c. Champagne, 2016 QCCA 1479; Gauthier
c. Bisson, 2014 QCCS 2821; Simoni c. Podiatres (Ordre
professionnel des), 2008 QCTP 17; Smith c. Dentistes (Ordre
professionnel des), 2015 QCTP 77; Loi sur les comptables
professionnels agréés, RLRQ, c. C-48.1; Règlement sur le permis de
comptabilité publique de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec,
RLRQ, c. C -48.1, r. 26.1; Comptables professionnels agréés (Ordre
des) c. Tamas, 2020 QCCDCPA 43; Comptables professionnels
agréés (Ordre des) c. Gauthier, 2021 QCTP 78; Rancourt c.
Morissette, 2022 QCCDMD 3; Allali c. Barreau du Québec,
2020 QCTP 48; Loi de 1996 sur les élections municipales, LO
1996, c. 32, ann; Cousineau c. Audioprothésistes (Ordre professionnel des),
2018 QCTP 102; Comptables professionnels agréés (Ordre des) c.
Berthony Colas, 2020 QCCDCPA 4; Simoni c. Podiatres,
2002 QCTP 91; Nowodworski c. Guilbault, 2001 QCTP 5.
[60] Bisson c. Lapointe,
2016 QCCA 1078.
[61] Tremblay c. Dionne, supra, note
34; Cuggia c. Champagne, 2016 QCCA 1479; Lapointe c. Chen, 2019 QCCA 1400; John
Changchiang Chen c. Steven Lapointe, ès qualités de syndic du Collège des
médecins du Québec, 2020 CanLII 30 824 CSC.
[62] Tremblay
c. Dionne, supra, note 34.
[63] Médecins (Ordre
professionnel des) c. Bissonnette, 2019 QCTP 51, paragr. 43,
pourvoi en contrôle judiciaire rejeté par Bissonnette
c. Tribunal des professions, 2020 QCCS 3090.
[64] Ayotte
c. Gingras, 1995 CanLII 10936 (QC TP).
[65] Médecins
(Ordre professionnel des) c. Bissonnette, supra, note 63,
paragr. 54.
[66] Gruszczynski
c. Avocats (Ordre professionnel des), 2016 QCTP 143.
[67] Ordre des architectes du Québec c. Duval,
2003 QCTP 144; Salhi c. Médecins vétérinaires (Ordre professionnel
des), 2024 QTP 6, paragr. 59.
[68] Plan d’argumentation du plaignant, paragr. 16.
[69] Ibid,
paragr. 17.
[70] Pièce P-5A.
[71] RLRQ,
c. C-48.1.
[72] Pièces P-2B,
p. 7 à 19 et P-5B, p. 44.
[73] Pièces P-2B,
p. 7 à 19 et P-5B, p. 44.
[74] Comptables
professionnels agréés (Ordre des) c. Acoca, 2018 CanLII 96320
(QC CPA), paragr. 53.
[75] Comptables professionnels agréés (Ordre des)
c. Dubé, 2016 CanLII 57450
(QC CPA), paragr. 23; Comptables professionnels agréés (Ordre des)
c. Lacroix, 2016 CanLII 16815
(QC CPA), paragr. 40-42.
[76] Règlement sur le permis de comptabilité publique de l’Ordre
des comptables professionnels agréés du Québec, RLRQ, c. C -48.1, r. 26.1.
[77] Pièces P-1
et P-1A et P-8, paragr. 3 des admissions signées.
[78] Plan
d’argumentation du plaignant, paragr. 20 et 21.
[79] RLRQ,
c. C -48.1, r. 6.
[80] Pièce P-3,
p. 31 et 33.
[81] RLRQ,
c. C -48.1, r. 6.
[82] Plan
d’argumentation du plaignant, paragr. 23.
[83] RLQQ,
c. C -26.
[84] Pièce P-2C.
[85] Pièce P-2C.
[86] Ibid.
[87] Pièce P-2D.
[88] Pièce P-2D.
[89] Pièce P-2E.
[90] Pièce P-2F,
p. 30.
[91] Comptables
professionnels agréés (Ordre des) c. Gauthier, supra, note 59.
[92] Kienapple
c. R., 1974 CanLII 14 (CSC).
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.