Décision

Les décisions diffusées proviennent de tribunaux ou d'organismes indépendants de SOQUIJ et pourraient ne pas être accessibles aux personnes handicapées qui utilisent des technologies d'adaptation. Visitez la page Accessibilité pour en savoir plus.
Copier l'url dans le presse-papier
Le lien a été copié dans le presse-papier

Chambre de la sécurité financière c. Mercier

2025 QCCDCSF 2

 

comité de discipline

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

canada

province de québec

 

 

 

N°:

CD00-1541

DATE : 17 février 2025

 

le comité :

Me Marie-Josée Bélainsky

Mme Isabelle Provost, Pl. Fin.

M. Philippe-Antoine Truchon-Poliard

Présidente

Membre

Membre

 

 

SYNDIQUE PAR INTÉRIM DE LA CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

 

Partie plaignante

c.

DAVID MERCIER, (numéro de certificat 239854, BDNI 3982011)

 

Partie intimée

 

décision sur CULPABILITÉ ET SANCTION

 

conformément à l’article 142 du code des professions, le comité a prononcé l’ordonnance suivante :

Ordonnance de non-divulgation, non-diffusion, et non-publication de tout renseignement nominatif qui pourrait permettre d’identifier le consommateur ainsi que les informations personnelles et financières de l’intimé, M. David Mercier contenues dans les pièces, étant entendu que la présente ordonnance ne s’applique pas aux échanges d’information prévue à la Loi sur l’encadrement du secteur financier et à la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

APERÇU

[1]               La plainte disciplinaire comptait à l’origine un chef d’infraction qui, à la suite d’une entente entre les parties, a été modifiée afin qu’elle se lise ainsi :

À Beauceville, durant les mois de mars, avril et mai 2021, l’intimé a fait défaut de  mener  ses  activités  professionnelles de manière responsable et avec compétence, notamment en offrant à S.Q., un client de l’institution financière pour laquelle il était employé, de déposer différentes sommes totalisant environ 60 000$ dans  ses  comptes  personnels  afin  de  souscrire  un  investissement, contrevenant  ainsi à l’article  14 du Règlement  sur  la  déontologie  dans  les disciplines de valeurs mobilières.

[2]        Le comité a, séance tenante, accepté le dépôt de la plainte modifiée.

[3]               Les parties déposent un énoncé conjoint des faits lequel est signé par la syndique et l’intimé.

[4]               En contrepartie, l’intimé, représenté par avocat, a plaidé coupable à ce chef d’infraction et a reconnu tous les faits sous-jacents à cette infraction par le dépôt dudit énoncé conjoint des faits.

[5]               Compte tenu du plaidoyer de culpabilité et de l’énoncé conjoint des faits, le comité a déclaré l’intimé coupable, séance tenante, du chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire modifiée.

[6]               Les procureurs ont présenté une recommandation commune de sanction. Le comité doit décider si cette recommandation commune déconsidère l’administration de la justice ou est contraire à l’intérêt public. Pour les raisons qui suivent, le comité a retenu la sanction recommandée par les parties.

CONTEXTE

[7]               Les faits reprochés remontent à 2021 alors que l’intimé était représentant en épargne collective pour la Banque Nationale et S.Q. était client de la Banque Nationale.

[8]               En avril 2021, S.Q. rencontre l’intimé à la Banque Nationale dans le cadre de discussions relatives à un prêt que S.Q. souhaite obtenir. Au-delà de cette relation professionnelle en regard de ce prêt, l’intimé et S.Q. discutent ensemble de leurs investissements personnels respectifs.

 

[9]               Par la suite, l’intimé va proposer à S.Q. de déposer certaines sommes lui appartenant et qu’il désire investir, dans les comptes personnels de l’intimé et ce, pour les fins dudit investissement auquel S.Q. souhaite souscrire.

 

[10]           À cette fin, l’intimé et S.Q. auront plusieurs interactions à l’extérieur de la Banque Nationale, tant par voie de messagerie électronique que par téléphone et en personne.

[11]             Ainsi, S.Q. remettra à l’intimé une somme totale d’environ 60 000$ pour fins d’investissement au nom de S.Q. La perte monétaire reliée à cet investissement, par l’entremise de l’intimé, sera totale.

[12]           L’intimé n’a, a aucun moment, déclaré son comportement à son employeur, la Banque Nationale.

[13]           Suite à la dénonciation de S.Q., l’intimé a été congédié par la Banque Nationale et cette dernière a remboursé la somme totale de 60 000$ à S.Q.

[14]           Par son plaidoyer de culpabilité, l’intimé reconnait qu’il n’était pas approprié ni prudent de discuter d’investissements personnels avec S.Q., client de la Banque Nationale, ni d’accepter le transit de sommes d’argents via ses comptes personnels, alors qu’il était un employé et représentant de la Banque Nationale.

[15]           L’intimé reconnaît également qu’en agissant comme il l’a fait, il a manqué à ses obligations déontologiques, notamment son obligation d’agir de façon responsable et avec compétence.

[16]           Les parties soumettent une recommandation commune de sanction soit une radiation temporaire de 6 mois à être purgée au moment de son inscription ou sa réinscription, le cas échéant, étant entendu qu’il n’est plus inscrit comme représentant en épargne collective depuis le 14 octobre 2021.

QUESTION EN LITIGE

-          La recommandation commune de sanction soumise par les parties est-elle contraire à l’intérêt public ou de nature à déconsidérer l’administration de la justice ?

[17]           Pour les raisons ci-après mentionnées, le comité est d’avis que la recommandation commune de sanction soumise par les parties doit être entérinée, car elle n’est pas contraire à l’intérêt public, ne déconsidère pas l’administration de la justice et est raisonnable eu égard aux circonstances propres à ce dossier.

[18]           Ainsi, le comité imposera donc la sanction recommandée par les parties.

ANALYSE

[19]           Comme mentionné plus haut, les parties recommandent conjointement de condamner l’intimé à une période de radiation de 6 mois. Toutefois, comme l’intimé n’est plus inscrit comme représentant en épargne collective depuis le 14 octobre 2021, les parties recommandent également que la période de radiation soit purgée  au moment de son inscription ou sa réinscription, le cas échéant.
[20]           En matière de sanction disciplinaire, les principes généraux nous rappellent que la sanction ne vise pas à punir le professionnel, mais plutôt à protéger le public, à dissuader le professionnel de récidiver sans oublier le critère de l’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession[1].
[21]           Lorsqu’une sanction fait l’objet d’une recommandation commune des parties, le comité doit y donner suite sauf s’il considère que la sanction est contraire à l’intérêt public ou qu’elle est de nature à déconsidérer l’administration de la justice. Il n’a pas à s’interroger sur la sévérité ou la clémence de la suggestion[2].
La sanction tient compte des différents facteurs dont le Comité doit considérer et qui sont les suivants :
  1.      Facteurs liés à l’intimé :
  1. Au moment de la commission des infractions, l’intimé n’était âgé que de 20 ans ;
  2. il a été congédié par la Banque Nationale et il n’est plus actif dans le domaine financier ou en assurances ayant  procédé à un changement de carrière ;
  3. il a plaidé coupable au chef d’infraction;
  4. compte tenu de l’engagement signé par l’intimé, le risque de récidive est, à toutes fins utiles, inexistant ;
  5. il n’a aucun antécédent disciplinaire.
  1.      Facteurs liés à l’infraction:
i.          Il s’agit d’une infraction à l’occasion de l’exercice de la profession;
ii.     il n’y a aucune intention malicieuse;
iii.     un seul consommateur est visé;
iv.     le consommateur a été totalement remboursé des montants versés;
v.     le consommateur était vulnérable.

 

[22]           Au surplus, l’intimé ayant signé un Engagement[3] en vertu duquel, en aucune circonstance, d’aucune manière et en aucun temps, il ne s’inscrira ou se réinscrira en assurance de personnes, en assurance collective de personnes, en planification financière ou en valeur mobilière démontre clairement que la protection du public est assurée.
[23]           À la lumière de ce qui précède, le comité considère qu’il n’y a pas de disproportion entre la sanction recommandée et celle imposée dans des circonstances de faits analogues. Les autorités[4] soumises au soutien de la recommandation commune imposant de longues périodes de radiation reposent davantage sur des situations factuelles distinctes de la présente affaire.
[24]           Le report de l’exécution de la période de radiation au moment de l’inscription ou la réinscription, le cas échéant, est conforme aux principes de droit et à la jurisprudence[5].
[25]           Considérant ce qui précède, le comité est d’avis que la recommandation commune présentée par les parties doit être entérinée et condamne l’intimé à une période de radiation de 6 mois à être purgée au moment de l’inscription ou la réinscription, le cas échéant.
[26]           Le comité ordonnera la publication d’un avis de la décision et condamnera l’intimé au paiement des déboursés.

 

POUR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE à nouveau du plaidoyer de culpabilité de l’intimé de la plainte modifiée;

RÉITÈRE la déclaration de culpabilité de l’intimé prononcée sous le seul chef de la plainte modifiée pour avoir contrevenu à l’article 14 du Règlement sur  la  déontologie  dans  les disciplines de valeurs mobilières.

ET STATUANT SUR SANCTION :

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé pour une période de 6 mois à être purgée au moment de l’inscription ou la réinscription, le cas échéant;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l’intimé un avis de la présente décision dans un journal circulant dans les lieux où ce dernier a eu son domicile professionnel ou dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément aux dispositions de l’article 156 (7) du Code des Professions;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de ne procéder à cette publication qu’au moment où l’intimé reprendra son droit de pratique et que l’Autorité des marchés financiers ou toute autre autorité compétente émettra un certificat en son nom;

CONDAMNE l’intimé au paiement des débours conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions;

PERMET la notification de la présente décision aux parties par moyen technologique conformément à l’article 133 du Code de procédure civile.

     (S) Me Marie-Josée Bélainsky  

 

Me MARIE-JOSÉE Bélainsky

Présidente du comité de discipline

 

(S) Isabelle Provost

 

MME ISABELLE PROVOST, Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

(S) Philippe-Antoine Truchon-Poliard

 

M. PHILIPPE-ANTOINE TRUCHON-POLIARD

Membre du comité de discipline

 

 

 

Me Claude Leduc

ML AVOCATS

Procureur de la partie plaignante

 

Me Jessie Héroux

BATTISTA TURCOT ISRAEL, s.e.n.c.

Procureur de la partie intimée

Date d’audience : 27 novembre 2024

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

A0112


[1] Pigeon c. Daigneault, 2003 CanLII 32934 (QC CA).

[2] R. c. AnthonyCook, 2016 CSC 43 (CanLII), [2016] 2 RCS 204.

[3]  Voir le procès-verbal de l’audition du 27 novembre 2024

[4]; Chambre de la sécurité financière c. Mayar, 2001 CanLII 27729 (QC CDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Morinville, 2011 CanLII 99444 (QC CDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Nelson, 2020 QCCDCSF 15; Chambre de la sécurité financière c. Singh, 2018 QCCDCSF 7; Chambre de la sécurité financière c. Townend, 2013 CanLII 43424 (QC CDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Turgeon, 2023 QCCDCSF 27.

 

[5] Médecins (Ordre professionnel des) c. Paquin, 2024 QCCDMD 35; Comptables agréés (Ordreprofessionnel des) c. Latraverse, 2010 QCTP 25

AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.