Décision

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Modèle de décision CLP - juin 2011

Dulong et Résidence St-Jean-sur-Richelieu inc.

2012 QCCLP 3618

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Saint-Jean-sur-Richelieu

5 juin 2012

 

Région :

Richelieu-Salaberry

 

Dossiers :

402394-62A-1002   444754-62A-1107

 

Dossier CSST :

133779363

 

Commissaire :

Claire Burdett, juge administratif

 

Membres :

Ronald G. Hébert, associations d’employeurs

 

Alain Lefebvre, associations syndicales

 

 

Assesseur :

Paul Asselin, médecin

______________________________________________________________________

 

Nathalie Dulong

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

Résidence St-Jean-sur-Richelieu inc.

 

Partie intéressée

 

 

 

et

 

 

 

Commission de la santé

et de la sécurité du travail

 

Partie intervenante

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

Dossier 402394-62A-1002

[1]           Le 19 février 2010, madame Nathalie Dulong (la travailleuse) dépose une requête auprès de la Commission des lésions professionnelles à l’encontre d’une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 16 février 2010 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme la décision initialement rendue le 20 janvier 2010 faisant suite à l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale du 7 janvier 2010 et déclare que la travailleuse est capable d’exercer son emploi à compter du 3 novembre 2009, puisque sa lésion professionnelle du 5 novembre 2008 est consolidée sans limitations fonctionnelles.

[3]           En ce qui a trait à l’indemnité de remplacement du revenu reçue par la travailleuse pour la période du 3 novembre 2009 au 19 janvier 2010, la CSST déclare qu’elle est justifiée de ne pas recouvrer cette somme étant donné la bonne foi de la travailleuse.

[4]           Enfin, la CSST déclare qu’elle doit cesser de payer les soins et les traitements puisqu’ils ne sont plus justifiés et déclare que la travailleuse n’a pas droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné l’absence d’atteinte permanente.

Dossier 444754-62A-1107

[5]           Le 26 février 2011, la travailleuse dépose une requête auprès de la Commission des lésions professionnelles à l’encontre de la décision rendue par la CSST le 19 juillet 2011 à la suite d’une révision administrative.

[6]           Par cette décision, la CSST déclare irrecevable la demande de révision de la travailleuse du 27 avril 2011 parce que cette demande a été faite après l’expiration du délai prévu à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi) pour contester la décision rendue le 1er mars 2011. La CSST déclare également qu’aucun motif raisonnable n’a été démontré permettant de relever la travailleuse de son défaut.

[7]           La Commission des lésions professionnelles a tenu une audience à Saint-Jean-sur-Richelieu le 24 janvier 2012. La travailleuse est présente et représentée par maître Michel Charrette. Résidence St-Jean-sur-Richelieu inc. (l’employeur) est présent, mais non représenté. À la suite de l’audience, un délai est accordé à la travailleuse pour lui permettre de produire certains documents médicaux. Un délai supplémentaire est accordé à la travailleuse et à l’employeur pour la production de leur représentation écrite. Dans l’intervalle, le tribunal a reçu une lettre le 16 mars 2012 de maître Marie-Claude Poirier, comparaissant au dossier pour le compte de l’employeur et demandant une prolongation de délai en vue d’écouter l’enregistrement de l’audience et de transmettre ses représentations écrites. Une prolongation a finalement été accordée au 3 avril 2012, date de la réception de l’argumentation écrite de la représentante de l’employeur et date de la mise en délibéré du présent dossier.

L’OBJET DES CONTESTATIONS

Dossier 402394-62A-1002

[8]           La travailleuse soulève que l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale du 7 janvier 2010 est irrégulier parce qu’il n’a pas été saisi de trancher la question du diagnostic, rendant ainsi caduque la décision rendue le 1er mars 2011 refusant de reconnaître le diagnostic de hernie discale L5-S1 en relation avec la lésion professionnelle du 5 janvier 2008.

[9]           La travailleuse demande donc à ce que son dossier soit retourné à la CSST et soumis de nouveau au Bureau d'évaluation médicale.

[10]        Subsidiairement, la travailleuse invoque qu’elle présente une hernie discale avec pied tombant, consolidée le 30 novembre 2011 avec un déficit anatomo-physiologique de 2 % et des limitations fonctionnelles de classe II.

Dossier 444754-62A-1107

[11]        Dans un premier temps, la travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que la décision de la CSST du 1er mars 2011 est prématurée et caduque en raison de l’irrégularité de l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale et demande à ce que le dossier soit retourné à la CSST.

[12]        Subsidiairement, la travailleuse demande à la Commission des lésions professionnelles de reconnaître l’existence d’un motif raisonnable permettant au tribunal de la relever du défaut d’avoir produit sa demande de révision à l’extérieur du délai prévu à la loi et de reconnaître la relation entre le nouveau diagnostic de hernie discale L5-S1 et l’événement du 5 novembre 2008.

LES FAITS

[13]        La travailleuse est préposée aux bénéficiaires pour le compte de l’employeur depuis trois ans. L’employeur exploite une résidence privée pour personnes semi-autonomes ou en réadaptation.

[14]        La travailleuse n’a aucun problème de santé physique et mène une vie active.

[15]        Le 5 novembre 2008, la travailleuse subit une lésion professionnelle en donnant le bain à une bénéficiaire.

[16]        Dans sa réclamation, la travailleuse décrit l’événement comme suit :

Je me suis dirigée à la chambre de madame Contant pour lui donner son bain (nouvelle résidente). Le bain s’est déroulé normalement, mais quand est venu le temps pour madame Contant de sortir du bain, elle s’est raidie et n’était plus capable de se lever. J’ai pratiqué mon p.b.s.t. pour la première tentative et j’ai appelé de l’aide au CB, pas de réponse. Deuxième tentative, j’ai glissé et a été obligé d’embarquer dans le bain avec madame, elle s’est accrochée après moi, c’est à ce moment que je me suis blessée. [sic]

 

 

[17]        À l’audience, la travailleuse explique qu’elle devait donner un bain à une bénéficiaire pesant de 200 à 240 livres. Elle donne le bain à cette bénéficiaire dans la salle de bain de son appartement qui dispose d’un bain traditionnel. Au moment de sortir du bain, la bénéficiaire panique et s’accroche au cou de la travailleuse et se met à crier qu’elle a très peur.

[18]        La travailleuse explique être tombée dans le bain avec la bénéficiaire sous une partie du corps de cette dernière. Sa hanche gauche frappe le rebord du bain lors de la chute. La travailleuse réussit à se relever et sort de l’appartement de la bénéficiaire en courant pour appeler de l’aide. Elle revient dans l’appartement, remonte dans le bain et tente de relever la bénéficiaire en vain. C’est à ce moment précis qu’elle ressent une brûlure au bas du dos à la région lombaire de même qu’un fourmillement à la jambe droite. La travailleuse présente aussi une douleur à la hanche gauche.

[19]        La travailleuse déclare l’accident le même jour et se rend à l’hôpital.

[20]        Le docteur Duchéné diagnostique un dérangement intervertébral mineur cervical et lombaire, prescrit du repos, de la glace, et des anti-inflammatoires et relaxant musculaire. Il recommande un arrêt de travail. Dans ses notes de consultation, le médecin note que l’accident est survenu en forçant auprès d’une bénéficiaire. Il note que la travailleuse se plaint d’une douleur cervicale et lombaire avec irradiation aux deux jambes.

[21]        Le 11 novembre 2008, la travailleuse consulte le docteur D’Argy qui diagnostique une entorse cervicale et lombaire avec beaucoup de raideur. Il prescrit des traitements de physiothérapie et maintient les autres traitements ainsi que l’arrêt de travail.

[22]        Le 9 décembre 2008, le docteur D’Argy maintient les diagnostics d’entorse cervicale et lombaire, mais ajoute que la travailleuse présente une hernie discale et un pied tombant à droite. Il prescrit une résonance magnétique lombaire ainsi qu’un électromyogramme.

[23]        Le 12 décembre 2008, le docteur D’Argy remplit le formulaire d’Avis motivé du médecin qui a charge visant à tenir informée la CSST de l’évolution du bilan fonctionnel de la travailleuse. Le docteur D’Argy précise :

Au niveau du cou : gain au niveau de la douleur, mais demeure quand même constante et augmentée à l’effort, mais gain au niveau de la mobilité.

 

Au niveau lombaire : douleur encore très importante, empêche le sommeil, pied droit devenu positif faible au niveau des releveurs du pied.

 

 

[24]        Le 12 décembre 2008, la travailleuse passe une radiographie lombaire qui révèle un pincement intervertébral L5-S1 sans fracture ni anomalie osseuse suspecte.

[25]        Le même jour, la travailleuse passe une résonance magnétique lombaire qui révèle une discopathie dégénérative associée à une hernie discale centrale venant en contact avec le sac dural postérieurement sans sténose spinale ni foraminale significative. Le radiologue conclut donc à une hernie discale centrale en L5-S1 sans sténose spinale ni foraminale à corroborer aux données cliniques et paracliniques.

[26]        Le 13 janvier 2009, le docteur D’Argy cesse les traitements de physiothérapie qui n’apportent aucune amélioration. Sur son rapport médical, il note que la hernie discale L5-S1 explique le pied tombant droit. Il recommande une consultation en orthopédie. Dans ses notes manuscrites, il note que la travailleuse se plaint de douleurs au mollet droit depuis trois jours, qualifiées de sensations de coup de poignard. Il note qu’elle présente toujours un pied tombant en levant le pied droit. À l’examen objectif, il note que la travailleuse marche avec une canne, qu’elle présente un pied tombant à droite avec une perte de force au niveau du releveur du pied ainsi que l’absence de réflexe achilléen droit. Il conclut donc à une hernie discale L5-S1 avec pied tombant et recommande la cessation des traitements de physiothérapie et une consultation en orthopédie pour un traitement par épidurale.

[27]        Le 14 janvier 2009, la travailleuse est examinée par le docteur Michel Leroux, chirurgien orthopédiste, qui maintient le diagnostic de hernie discale L5-S1 et de pied tombant droit. Il recommande un électromyogramme. Dans ses notes manuscrites, le docteur Leroux précise que le signe de Tripode est positif alors que le Lasègue est négatif.

[28]        Le 22 janvier 2009, la travailleuse est examinée par le docteur Tudorescu, neurologue, qui procède à l’électromyogramme. À l’historique, il note que la travailleuse a noté l’apparition des douleurs tout au long de sa colonne cervico-dorsolombaire irradiant vers la fesse droite sur la face postérieure de la cuisse et de la jambe droite dès l’événement du 5 novembre 2008. Elle ne présente aucun symptôme aggravé à l’effort de toux, de défécation ou avec la manœuvre de Valsalva. Elle n’a pas de trouble sphinctérien. Il note que la travailleuse a développé un pied tombant depuis cette période. À l’examen clinique neurologique, il constate que la travailleuse présente des réflexes rotuliens et achilléens préservés avec une faiblesse distale au niveau de son pied, qui dépasse nettement les territoires de la racine L5. Il ajoute que la travailleuse a une faiblesse pour la dorsiflexion du pied et des orteils intermittente avec une faiblesse pour l’inversion et l’éversion du même pied intermittente ainsi qu’une faiblesse intermittente pour la planti-flexion du pied et des orteils droit. Enfin, il semble que la travailleuse ait une faiblesse pour la flexion de la jambe et aussi pour l’extension de la jambe droite, mais avec des réflexes qui sont normaux. Il constate une hypoesthésie tactile et thermo-algésique qui dépasse le territoire L5 droite sur la face interne, latérale et postérieure de la jambe droite et aussi sur la face plantaire et dorsale du même pied. La travailleuse a eu une boiterie à la marche avec le membre inférieur droit, mais il semble qu’elle soit capable de marcher sur le talon et la pointe du pied droit. Le signe de Lasègue est positif à 45° pour le membre inférieur droit et la travailleuse ne présente aucun trouble sphinctérien ni anesthésie péri-anale. À la lumière de l’étude électrophysiologique, le docteur Tudorescu ne trouve aucun signe d’atteinte radiculaire L5/S1 pour le membre inférieur droit. Il ne trouve aucun signe d’atteinte du nerf sciatique droit ni des nerfs tibiaux postérieurs ou sciatique poplitée externe droit. Même si la travailleuse présente une hernie L5-S1, il s’agit selon le docteur Tudorescu d’une hernie qui est postérieure, sans aucune obstruction foraminale où est le point de sortie des racines lombaires. Le reste de l’examen neurologique est normal.

[29]        Le 3 février 2009, le docteur D’Argy prescrit une orthèse pour le pied tombant toujours pour un diagnostic de hernie discale L5-S1 avec pied tombant.

[30]        Le 25 février 2009, la travailleuse est examinée par le docteur Corriveau, chirurgien orthopédiste, qui maintient le diagnostic de hernie discale L5-S1. Il recommande une épidurale. Dans ses notes de consultation, il note que la travailleuse se plaint d’une lombosciatalgie droite depuis cinq mois. Il se questionne quant à son pied tombant droit. Il note un Straight Leg Raising négatif et l’absence de trouble sphinctérien.

[31]        Le 28 février 2009, le docteur Corriveau réfère le travailleur pour une infiltration par épidurale qui n’apportera finalement aucun soulagement des symptômes de la travailleuse.

[32]        Le 14 mai 2009, le docteur François Cartier, médecin-conseil régional à la CSST, procède à un bilan téléphonique auprès du docteur D’Argy. Suivant ce bilan, le docteur D’Argy est toujours enclin à favoriser le diagnostic de hernie discale L5-S1 malgré le rapport du neurologue ayant interprété l’électromyogramme.

[33]        Le 20 mai 2009, le docteur Corriveau diagnostique des séquelles de hernie discale L5-S1 avec un pied tombant malgré les résultats de l’électromyogramme qui se sont avérés négatifs.

[34]        Le 21 mai 2009, le docteur François Cartier de la CSST procède à un bilan téléphonique auprès du docteur Corriveau. La travailleuse passe une résonance magnétique cérébrale et cervicale visant à expliquer la faiblesse aux membres supérieurs droits et aux membres inférieurs droits et éliminer une hernie discale cervicale. Le radiologiste conclut à une résonance magnétique sans particularité au niveau cérébral. Aucune sténose spinale ni hernie discale n’est mise en évidence au niveau cervical. La travailleuse revoit le docteur Corriveau le même jour.

[35]        Le 2 juin 2009, le docteur François Cartier, médecin-conseil à la CSST, procède à un bilan téléphonique auprès du docteur Corriveau. Ce dernier fait état du fait qu’il a vu la travailleuse le jour précédent. Il estime que le tableau clinique est incompréhensible. L’imagerie par résonance magnétique identifie une petite hernie en L5-S1, mais localisée centralement. Dans ce contexte et celui de l’électromyogramme normal, le tableau du pied tombant demeure inexpliqué. Le docteur Cartier suggère une expertise en neurochirurgie et s’entend avec le docteur Corriveau quant au choix du médecin spécialiste.

[36]        Le 22 juillet 2009, le docteur Corriveau maintient cependant que la travailleuse présente des séquelles d’une hernie discale lombaire et qu’elle a toujours une faiblesse au membre inférieur droit. Il recommande un électromyogramme de contrôle. Dans ses notes de consultation, il note que la travailleuse est toujours très souffrante.

[37]        Le 21 août 2009, la travailleuse subit une scintigraphie osseuse qui laisse voir un léger foyer d’hyperconcentration à l’arc antérieur de la septième côte droite, représentant très probablement une atteinte post-traumatique ancienne.

[38]        Le 22 septembre  2009, le docteur Jacques Lenis, médecin-conseil régional à la CSST, écrit au docteur Corriveau pour lui demander des informations complémentaires. Dans sa lettre, le docteur Lenis écrit ce qui suit :

Docteur Corriveau,

 

      Vous agissez à titre de médecin à charge de madame Nathalie Dulong que vous suivez pour une entorse cervicale et lombaire suite à un événement survenu le 5 novembre 2008.

 

      La travailleuse vous a été référée par son médecin traitant, le docteur Marie-Claude D’Argy à la suite d’une investigation pour un pied tombant droit, mis en évidence le 9 décembre 2008 par I.R.M. de la colonne lombaire en date du 22 décembre 2008 qui aurait montré une maladie discale dégénérative au niveau de L5-S1 avec une hernie centrale postérieure avec contact avec le sac dural sans sténose foraminale ou spinale et sans atteinte radiculaire semble-t-il. Vous l’avez évaluée la première fois en date du 14 janvier 2009.

 

Un E.M.G. a été effectué le 22 janvier 2009. […] des reflexes rotuliens et achilléens normaux, une faiblesse distale au niveau du pied intermittente qui dépasse nettement le territoire de L5 soit faiblesse intermittente de la dorsi-flexion du pied et des orteils, faiblesse intermittente de l’inversion et l’éversion du pied et faiblesse intermittente de la planti-flexion du pied […].

 

[…]

 

      Nous sommes déjà à 10 mois post-entorse lombaire avec un problème de pied tombant qui ne semble pas évoluer. Je comprends que vous considérez que le tableau clinique du pied tombant droit ne s’explique pas par la présence de la hernie discale L5-S1. Si l’investigation à venir permet d’établir une étiologie du pied tombant autre que neurologique périphérique, n’y aurait-il pas lieu de consolider l’entorse lombaire et cervicale.

 

 

[39]        Dans l’intervalle, le 24 septembre 2009, la travailleuse passe un électromyogramme de contrôle et une consultation en neurologie auprès du docteur Tudorescu. Comme la première fois, l’électromyogramme s’avère dans les limites de la normale.

[40]        Le 29 septembre 2009, le docteur D’Argy maintient le diagnostic de hernie discale et note une augmentation des douleurs de la travailleuse depuis les deux à trois dernières semaines. Il ajoute des analgésiques à la médication en cours.

[41]        Le 5 octobre 2009, le docteur Corriveau répond à la demande d’information complémentaire du docteur Lenis. Il précise que la travailleuse présente un pied tombant d’origine inconnue pour lequel il n’a pas d’explication. Il donne congé à la travailleuse quant à son suivi en orthopédie.

[42]        Le 16 octobre 2009, le docteur Corriveau maintient néanmoins son suivi médical. Il note que la travailleuse présente des séquelles de pied tombant secondaire à une hernie discale. Il recommande un retour au travail progressif léger. Il s’agit du rapport contesté dans la procédure d’évaluation médicale qui sera amorcée par la CSST.

[43]        Le 3 novembre 2009, la travailleuse est examinée par le docteur Gariépy, neurochirurgien, à la demande de la CSST.

[44]        Au niveau de l’historique des symptômes, il rapporte que la travailleuse a ressenti une sensation de brûlure au moment de l’événement surtout à la région lombaire ainsi qu’à la région cervicale et dorsale. Par la suite, lorsque dirigée en physiothérapie, la travailleuse rapporte l’apparition d’un gonflement au niveau de son genou droit avec l’apparition de petites lésions ecchymotiques au niveau des deux jambes et sous les genoux. Ces lésions apparaissant sans aucun traumatisme et disparaissant d’elle-même. Il semble que la travailleuse ait noté l’apparition d’une douleur au niveau de sa jambe droite constante et augmentée dans les positions fixes et à la marche s’accompagnant parfois de crampe au niveau de son mollet droit pouvant irradier dans toute sa jambe. C’est alors que la travailleuse a remarqué une faiblesse au niveau de son pied droit. Les lésions ecchymotiques se manifesteraient encore à l’occasion. À l’examen objectif, il note que la travailleuse boite sur sa jambe droite tout en gardant le genou légèrement fléchi en oscillant son bassin de gauche à droite et de droite à gauche.

[45]        Quant à la faiblesse présentée par la travailleuse, le médecin note qu’elle arrive à bloquer ses genoux de façon tout à fait normale et à marcher sur la pointe des pieds en indiquant que la planti-flexion du côté droit lui semble plus faible, mais jamais le talon ne touchera au sol. Lorsqu’il demande à la travailleuse de marcher sur les talons, le même phénomène se reproduit sans qu’elle ne note aucune douleur au niveau de sa jambe droite de type sciatalgie. À la palpation, la travailleuse ne rapporte qu’une sensibilité aux interlignes épineuses de L4-L5 et de L5-S1 sans douleur au niveau des masses musculaires paravertébrale. Les mouvements du rachis lombaire sont normaux. Il en va de même quant à l’examen complet du rachis. Il note plus précisément que la force du quadriceps est conservée faisant référence à la racine de L4 et que la dorsiflexion du pied gauche et son éversion (racine de L5) sont normales. Au pied droit, l’examen de la dorsiflexion et de l’éversion du pied varie selon le moment et la résistance qu’on lui oppose. La planti-flexion et l’inversion du pied gauche (racine de S1) sont normales. La planti-flexion et l’inversion du pied droit varient selon la résistance qu’on lui oppose. Il note que les réflexes ostéotendineux rotuliens et achilléens sont présents et symétriques. Enfin, du côté droit, la travailleuse rapporte une légère hypoesthésie touchant surtout la face dorsale de son pied droit et du tiers distal du tibia, mais aussi une hypoesthésie de la face latérale externe du pied droit, ce qui impliquerait une atteinte sensitive des deux racines, soit les racines de L5 et de S1.

[46]        Il conclut donc que le tableau clinique milite surtout en faveur d’une douleur prédominante à caractère axial et mécanique au niveau lombaire avec irradiation à la jambe droite, mais sans signe clinique d’une irritation radiculaire pouvant suggérer une hernie discale clinique. Quant au phénomène de faiblesse au niveau du pied droit s’accompagnant d’ecchymoses et d’œdème au niveau du mollet et du genou, il estime que cette symptomatologie suggestive n’est pas corroborée par les examens objectifs effectués par le docteur Tudorescu et les différents tests diagnostiques. Aucune pathologie vasculaire ne peut expliquer les ecchymoses sous-cutanées au niveau des mollets en particulier, d’autant plus qu’une telle réaction ne pourrait venir d’une entorse lombaire. Le docteur Gariépy précise qu’il est possible de voir des manifestations vasculaires lors d’une compression radiculaire aiguë, mais qu’il ne s’agit aucunement d’un tel cas. Tous les tests diagnostiques ont éliminé une pathologie d’origine dégénérative ou tumorale, ou d’origine centrale ou périphérique. Quant à la région lombaire, une petite hernie discale en L5-S1 ne peut expliquer un pied tombant qui provient habituellement d’une compression au niveau de la racine L5. Il estime donc que les entorses cervicale et lombaire sont résolues et qu’il n’y a aucune manifestation de séquelles résiduelles ou d’ankyloses au niveau cervical et lombaire, l’examen neurologique s’avérant tout à fait normal de même que l’examen cérébral, médullaire ou radiculaire. Il conclut donc à un diagnostic d’entorse cervicale et lombaire qu’il estime consolidée le 3 novembre 2009 avec un déficit anatomo-physiologique de 0 % pour l’entorse cervicale et de 0 % pour l’entorse dorsolombaire.

[47]        Le docteur Gariépy se dit étonné de voir que la travailleuse n’a pas développé d’atrophie musculaire en un an chez une travailleuse qui boite de façon aussi impressionnante. Il juge plutôt qu’il n’y a aucune utilité à ce que la travailleuse continue à porter une orthèse pour un pied tombant qui objectivement est discutable et dont il ne connaît pas la cause. Il ne recommande donc aucune limitation fonctionnelle résultant de la lésion professionnelle.

[48]        Le 20 novembre 2009, le docteur Corriveau remplit le formulaire de rapport complémentaire après avoir pris connaissance de l’expertise du docteur Gariépy. Il indique que la travailleuse présente des séquelles de l’entorse cervicale et lombaire en plus d’un pied tombant droit pour lequel elle a besoin d’une orthèse.

[49]        Le 24 novembre 2009, le docteur Corriveau note une augmentation des douleurs cervicales et lombaires à la suite du retour au travail.

[50]        Le 27 novembre 2009, la CSST amorce le processus d’évaluation médicale et transmet une demande au Bureau d'évaluation médicale, uniquement sur les points 2 à 5 de l’article 212 de la loi, soit sur la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion, la nature et la nécessité et la suffisance ou la durée des soins ou traitements administrés ou prescrits, l’atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique et les limitations fonctionnelles.

[51]        Le 17 décembre 2009, la travailleuse est examinée par le docteur Pierre Bourgeau, neurologue et membre du Bureau d'évaluation médicale. L’avis écrit est daté du 7 janvier 2010. À l’anamnèse, la travailleuse raconte au docteur Bourgeau qu’alors qu’elle donnait un bain à une résidente, utilisant le siège habituel, lorsqu’est venu le temps de sortir la résidente du bain, celle-ci se serait raidie et aurait paniqué et se serait accrochée à la travailleuse par le cou, laquelle aurait été obligée de faire des efforts importants pour tenter de relever la résidente âgée s’infligeant par le fait même des douleurs au niveau cervical et dorsolombaire de même que des douleurs costales et au genou droit. À l’état actuel, la travailleuse précise qu’elle constate toujours des douleurs cervicales intermittentes sous forme de raideur et des douleurs lombaires constantes sous forme de pression et d’élancement à la région médiane basse lombosacrée. La travailleuse nie totalement toute douleur aux membres inférieurs, aux fesses et aux cuisses et l’absence de problème sphinctérien. Elle évoque cependant de légers engourdissements au niveau des mains de façon intermittente depuis plusieurs mois. À l’examen objectif, le docteur Bourgeau constate que la travailleuse demeure assise sur une chaise droite sans difficulté tout au long de l’entrevue, sans souffrance apparente présentant une gestuelle de la tête et des membres supérieurs strictement normaux. L’examen des nerfs crâniens s’avère normal. L’examen des membres inférieurs s’avère également normal. La sensibilité superficielle et profonde demeure normale au niveau des membres inférieurs, de même que la motricité. Cependant, à l’examen de la motricité contre-résistance, une faiblesse tant de la dorsiflexion que de la planti-flexion et l’éversion du pied droit, révèle ce qui suit :

Madame étant fortement résistante à effectuer tous les mouvements de son pied et résistant très peu à tous les efforts de l’examinateur pour s’opposer à ces mouvements, offrant beaucoup de relâchement alors que l’effort est extrêmement variable et fluctuant, ceci dans tous les plans de dorsiflexion, planti-flexion ou éversion.

 

 

[52]        Il retient un examen sensitif du membre inférieur droit strictement normal de même qu’une flexion tout à fait normale lors de la stimulation nociceptive du cutané plantaire à droite. Le pincé-roulé du rachis dorsolombaire est allégué comme étant très douloureux à tous les niveaux bilatéralement en regard de la région lombaire basse L4, L5 et S1 avec absence de spasmes. À l’étude de la mobilité du rachis lombaire, la travailleuse présente maintenant une limitation à 50° en flexion antérieure et à 20° dans tous les autres mouvements d’extension, flexion et rotation.

[53]        Le docteur Bourgeau retient un examen neurologique et un examen global strictement normaux alors que la faiblesse présentée par la travailleuse, en regard de la dorsiflexion et de la planti-flexion de son pied droit, demeure impossible à retenir comme crédible à l’évaluation clinique objective. En effet, la travailleuse est en mesure d’offrir une démarche sur la pointe et les talons essentiellement dans les limites de la normale, ce qui permet d’observer une dorsiflexion et une planti-flexion adéquate lors de la marche, de même que lors de la démarche. Il note que la travailleuse est également en mesure d’offrir une démarche en tandem tout à fait dans les limites de la normale et adéquate et de conserver un équilibre parfaitement intact. L’examen du rachis cervical s’avère strictement normal. En conséquence, malgré la limitation de la mobilité dorsolombaire lors des mouvements actifs, il ne peut retenir comme crédible et de nature organique la réduction des amplitudes de la mobilité à ce niveau à l’examen clinique objectif, et ce, compte tenu des nombreux éléments paradoxaux et discordants à l’examen dirigé comparé aux mouvements spontanés et considérés comme normaux.

[54]        Selon le docteur Bourgeau, le pied tombant droit demeure impossible à considérer comme étant de nature organique compte tenu des examens cliniques et l’ensemble des examens complémentaires effectués. La faiblesse du pied droit de la travailleuse ne peut être logiquement imputée à une lésion de nature organique selon le docteur Gariépy et selon le docteur Bourgeau. En conséquence, il ne retient aucun déficit objectif crédible de nature organique chez la travailleuse, particulièrement en regard du pied tombant droit, alors que l’examen du rachis cervical est strictement normal. Ainsi, en tenant compte des diagnostics retenus par la CSST d’entorse cervicale et lombaire, il estime que la date de consolidation à retenir est celle du 3 novembre 2009 avec suffisance de soins ou traitements, absence d’atteinte permanente et de limitations fonctionnelles.

[55]        Le 7 janvier 2010, le docteur Corriveau maintient dans ses notes de consultation le diagnostic de hernie discale L5-S1 et note que la travailleuse est toujours très souffrante. Au rapport médical, il note qu’il suit la travailleuse pour son pied tombant et précise que la douleur persiste.

[56]        Le 13 janvier 2010, la travailleuse subit à nouveau une résonance magnétique de sa colonne lombaire. La radiologiste conclut à une discopathie dégénérative connue à L5-S1 avec bombement discal à large base venant s’appuyer directement sur le sac dural antérieurement. Par contre, il ne note aucune sténose spinale ni aucun compromis radiculaire. Il ajoute qu’il n’y a pas d’extrusion de matériel discal et qu’il n’y a pas de détérioration depuis l’imagerie effectuée en décembre 2008 dont l’aspect est relativement comparable.

[57]        Le 20 janvier 2010, la CSST rend une décision faisant suite à l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale du 7 janvier 2010 et conclut que les soins et traitements ne sont plus justifiés depuis le 3 novembre 2009, que la lésion n’a pas entraîné d’atteinte permanente. Compte tenu de la date de consolidation de la lésion et de l’absence de limitations fonctionnelles, la CSST conclut que la travailleuse est capable d’exercer son emploi et cesse donc le versement des indemnités de remplacement du revenu à compter du 3 novembre 2009. Pour la période du 3 novembre 2009 au 19 janvier 2010, la CSST conclut que la travailleuse a reçu des indemnités s’élevant à 3 071,64 $ et qu’en raison de la bonne foi de la travailleuse, la CSST juge équitable qu’elle n’ait pas à rembourser cette somme. La travailleuse demande la révision administrative de cette décision, laquelle est confirmée par la révision administrative le 16 février 2010, d’où l’objet du présent litige.

[58]        Le 27 janvier 2010, le docteur Corriveau revoit la travailleuse. Dans ses notes de consultation, il diagnostique une hernie discale avec discopathie L5-S1 et un pied tombant à droite. Il dirige la travailleuse au docteur Jarzem.

[59]        Le 10 février 2010, le docteur Michel Leroux diagnostique une discopathie L5-S1.

[60]        Le 22 avril 2010, le docteur Corriveau revoit la travailleuse pour sa hernie discale L5-S1.

[61]        Le 21 juillet 2010, le docteur Corriveau note la persistance du pied tombant.

[62]        Le 27 octobre 2010, la travailleuse subit un électromyogramme de contrôle et d’un suivi d’examen en neurologie auprès du docteur Tudorescu. Ce dernier revient sur le fait que la travailleuse présente un pied tombant gauche (le tribunal estime compte tenu du reste du rapport que le médecin fait erreur et qu’il voulait plutôt parler d’un pied tombant droit) avec un déficit moteur qui dépasse nettement le territoire radiculaire L5 chez une patiente qui a des réflexes rotuliens et achilléens normaux. Il constate que la travailleuse présente toujours une marche bizarre, étant capable de marcher sur la pointe des pieds et sur les talons. Cependant, l’électromyogramme demeure normal sans atteinte du nerf sciatique et sans signe suggestif d’une atteinte radiculaire L5-S1 droite.

[63]        Le 3 décembre 2010, le docteur Corriveau maintient son diagnostic de séquelle de pied tombant et de séquelle d’entorse lombaire.

[64]        Le 31 janvier 2011, le docteur Corriveau produit un rapport médical final dans lequel il estime que la travailleuse présente des séquelles d’une hernie discale L5-S1 avec pied tombant qu’il estime consolidée au 31 janvier 2011 avec atteinte permanente et limitations fonctionnelles à prévoir.

[65]        Le 7 février 2011, la travailleuse subit de nouveau une résonance magnétique ou le radiologiste conclut toujours à une hernie discale postéro-centrale L5-S1, sans compromis radiculaire ni canalaire.

[66]        Une première date d’audience devant la Commission des lésions professionnelles est prévue le 18 février 2011. Cependant, la travailleuse a demandé la remise de l’audience aux motifs qu’elle désire produire un rapport d’évaluation médicale.

[67]        Le 22 février 2011, la travailleuse se présente à la CSST pour demander une décision sur le diagnostic de hernie discale à la demande de la Commission des lésions professionnelles. Une chef d’équipe de la CSST se présente à la travailleuse et explique qu’elle n’a pas estimé nécessaire de déférer la question du diagnostic au Bureau d'évaluation médicale puisque les deux médecins sont d’accord pour retenir l’entorse cervicale et lombaire.

[68]        La chef d’équipe a communiqué avec la Commission des lésions professionnelles pour comprendre la requête de la travailleuse. Suivant les informations, la Commission des lésions professionnelles a expliqué que la travailleuse a remis le rapport médical final daté du 31 janvier 2011 à l’occasion de l’audience avec un diagnostic de hernie discale L5-S1. La Commission des lésions professionnelles explique que le juge administratif au dossier a mentionné que la CSST ne s’est pas prononcée sur ce diagnostic et de vérifier le tout avec l’agente au dossier.

[69]        En conséquence, la CSST conclut qu’elle n’a pas à se prononcer sur le diagnostic de hernie discale L5-S1 parce qu’elle juge que ce diagnostic n’est pas un nouveau diagnostic émis par le docteur Corriveau et que suite au rapport complémentaire, il n’y a pas de litige au niveau du diagnostic entre le médecin expert et le médecin traitant, soit le docteur Corriveau.

[70]        Le 1er mars 2011, la CSST rend une décision refusant la relation entre le diagnostic de hernie discale L5-S1 et l’événement du 5 novembre 2008.

[71]        Le 3 mars 2011, le docteur Corriveau reprend du suivi médical de la travailleuse pour ses séquelles de hernie discale L5-S1.

[72]        Le 17 mars 2011, le docteur Lionel Doucet procède à l’évaluation des séquelles de la travailleuse pour sa hernie discale L5-S1 avec un pied droit tombant. À l’examen objectif, il constate que la palpation est positive au niveau paravertébral droit plus qu’à gauche en regard des vertèbres L3 à L5. Il ne perçoit pas de spasme de la sous-musculature. Cependant, il note qu’il y a une déviation de la colonne en flexion avec convexité gauche. Les épreuves de Valsalva et d’Ely sont négatives et le Tripode et le Lasègue sont positifs en deçà de 70°. Le signe de Trendelenburg est présent. Le reste de l’examen est normal. Il ne constate aucun signe d’atrophie. Les réflexes rotuliens et achilléens sont diminués à droite. Lors de son examen, la marche sur la pointe des pieds et sur les talons est impossible. Cependant, la station unipodale gauche est normale. Il retient donc un déficit anatomo-physiologique de 2 % pour hernie discale non opérée prouvée radiologiquement et attribue des limitations fonctionnelles correspondant à la classe II de l’IRSST[2].

[73]        Le 15 avril 2011, la travailleuse subit un accident d’automobile qui entraîne une douleur cervicale et des paresthésies au niveau du membre supérieur droit et la diminution des amplitudes de mouvement au niveau de la colonne cervicale et lombaire.

[74]        Une deuxième audience devait être tenue en date du 27 avril 2011, mais a dû être remise à la demande de la travailleuse. En effet, en début d’audience, l’employeur dépose la décision rendue par la CSST le 1er mars 2011 par laquelle elle refuse la relation entre le diagnostic de hernie discale L5-S1 et la lésion professionnelle. La Commission des lésions professionnelles a accepté la demande de remise de la travailleuse en considération du diagnostic retenu dans le rapport d’évaluation médicale du docteur Doucet et en considération du fait que la travailleuse croyait que le tribunal est saisi de la question du diagnostic de hernie discale L5-S1. La question du diagnostic étant importante à trancher et étroitement reliée aux questions en litige dans le dossier devant la Commission des lésions professionnelles, le tribunal a jugé opportun d’accorder la demande de remise pour permettre à la travailleuse de demander la révision administrative de la décision rendue le 1er mars 2011.

[75]        Le même jour, la travailleuse a logé une demande de révision à l’encontre de la décision du 1er mars 2011.

[76]        Le 19 juillet 2011, la direction de la révision administrative déclare irrecevable la demande de révision logée par la travailleuse le 27 avril 2011 à l’encontre de la décision rendue le 1er mars 2011 parce que logée en dehors des délais prévus à la loi. La travailleuse conteste cette décision à la Commission des lésions professionnelles, d’où l’objet du second litige dont est saisi le tribunal.

[77]        Sur la question du délai, la travailleuse fait témoigner son conjoint, monsieur Marc Dumberry. Ce dernier explique qu’il s’occupe de son dossier administratif. Il se souvient d’avoir reçu la décision rendue le 1er mars 2011 et d’en avoir discuté avec la travailleuse. Il dit avoir parlé avec l’agente au dossier le lendemain de la réception de cette décision. Lors de cet entretien, il mentionne à l’agente que le diagnostic de hernie discale est là depuis le début du suivi médical. Il dit alors avoir expliqué qu’une audience est prévue devant la Commission des lésions professionnelles en date du 27 avril 2011. L’agente lui a alors expliqué que c’est la Commission des lésions professionnelles qui traiterait de la décision et que la travailleuse n’a pas besoin d’écrire une lettre pour contester le tout. Le tribunal note que la survenance d’une discussion relativement au diagnostic de hernie discale figure bien au dossier de la CSST. Cependant, le contenu de l’entretien et des instructions données n’est pas détaillé.

L’AVIS DES MEMBRES

Dossiers 402394-62A-1002 et 444754-62A-1107

[78]        Les membres issus des associations syndicales et d’employeurs sont d’avis de déclarer l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale du 7 janvier 2010 irrégulier. Ils sont d’avis que la question du diagnostic aurait dû être soumise au membre du Bureau d'évaluation médicale, d’autant plus que ce dernier devait évaluer les conséquences résultant de la lésion professionnelle. Il y avait donc lieu de faire préciser le diagnostic pour ensuite évaluer les conséquences découlant de cette pathologie. La CSST pourrait alors trancher la question de la relation entre ce diagnostic et l’événement en cause dans sa décision faisant suite à l’avis du Bureau d'évaluation médicale.

[79]        De ce fait, les membres sont d’avis que la décision refusant la relation entre la hernie discale L5-S1 et la lésion professionnelle du 5 novembre 2008 était prématurée.

[80]        À cet égard, les membres sont d’avis que la demande de révision de la travailleuse est recevable. Il y a donc lieu, selon les membres, de retourner le dossier à la CSST afin que soit évalué l’ensemble des sujets prévus à l’article 212 de la loi et que soit analysée la question de la relation entre le ou les diagnostics retenus par le Bureau d'évaluation médicale.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

Dossier 402394-62A-1002

[81]        La Commission des lésions professionnelles doit déterminer si l’avis rendu par le membre du Bureau d'évaluation médicale en date du 7 janvier 2010 est régulier.

[82]        Les dispositions pertinentes à la procédure d’évaluation médicale sont les suivantes :

199.  Le médecin qui, le premier, prend charge d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle doit remettre sans délai à celui-ci, sur le formulaire prescrit par la Commission, une attestation comportant le diagnostic et :

 

1° s'il prévoit que la lésion professionnelle du travailleur sera consolidée dans les 14 jours complets suivant la date où il est devenu incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, la date prévisible de consolidation de cette lésion; ou

 

2° s'il prévoit que la lésion professionnelle du travailleur sera consolidée plus de 14 jours complets après la date où il est devenu incapable d'exercer son emploi en raison de sa lésion, la période prévisible de consolidation de cette lésion.

 

Cependant, si le travailleur n'est pas en mesure de choisir le médecin qui, le premier, en prend charge, il peut, aussitôt qu'il est en mesure de le faire, choisir un autre médecin qui en aura charge et qui doit alors, à la demande du travailleur, lui remettre l'attestation prévue par le premier alinéa.

__________

1985, c. 6, a. 199.

 

 

200.  Dans le cas prévu par le paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 199, le médecin qui a charge du travailleur doit de plus expédier à la Commission, dans les six jours de son premier examen, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport sommaire comportant notamment :

 

1° la date de l'accident du travail;

 

2° le diagnostic principal et les renseignements complémentaires pertinents;

 

3° la période prévisible de consolidation de la lésion professionnelle;

 

4° le fait que le travailleur est en attente de traitements de physiothérapie ou d'ergothérapie ou en attente d'hospitalisation ou le fait qu'il reçoit de tels traitements ou qu'il est hospitalisé;

 

5° dans la mesure où il peut se prononcer à cet égard, la possibilité que des séquelles permanentes subsistent.

 

Il en est de même pour tout médecin qui en aura charge subséquemment.

__________

1985, c. 6, a. 200.

 

 

201.  Si l'évolution de la pathologie du travailleur modifie de façon significative la nature ou la durée des soins ou des traitements prescrits ou administrés, le médecin qui a charge du travailleur en informe la Commission immédiatement, sur le formulaire qu'elle prescrit à cette fin.

__________

1985, c. 6, a. 201.

 

 

202.  Dans les 10 jours de la réception d'une demande de la Commission à cet effet, le médecin qui a charge du travailleur doit fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport qui comporte les précisions qu'elle requiert sur un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 .

__________

1985, c. 6, a. 202; 1992, c. 11, a. 12.

204.  La Commission peut exiger d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle qu'il se soumette à l'examen du professionnel de la santé qu'elle désigne, pour obtenir un rapport écrit de celui-ci sur toute question relative à la lésion. Le travailleur doit se soumettre à cet examen.

 

La Commission assume le coût de cet examen et les dépenses qu'engage le travailleur pour s'y rendre selon les normes et les montants qu'elle détermine en vertu de l'article 115 .

__________

1985, c. 6, a. 204; 1992, c. 11, a. 13.

 

 

205.1.  Si le rapport du professionnel de la santé désigné aux fins de l'application de l'article 204 infirme les conclusions du médecin qui a charge du travailleur quant à l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, ce dernier peut, dans les 30 jours de la date de la réception de ce rapport, fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport complémentaire en vue d'étayer ses conclusions et, le cas échéant, y joindre un rapport de consultation motivé. Le médecin qui a charge du travailleur informe celui-ci, sans délai, du contenu de son rapport.

 

La Commission peut soumettre ces rapports, incluant, le cas échéant, le rapport complémentaire au Bureau d'évaluation médicale prévu à l'article 216 .

__________

1997, c. 27, a. 3.

 

 

206.  La Commission peut soumettre au Bureau d'évaluation médicale le rapport qu'elle a obtenu en vertu de l'article 204, même si ce rapport porte sur l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 sur lequel le médecin qui a charge du travailleur ne s'est pas prononcé.

__________

1985, c. 6, a. 206; 1992, c. 11, a. 13.

 

 

212.  L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la Commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l'attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s'il obtient un rapport d'un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l'un ou plusieurs des sujets suivants :

 

1° le diagnostic;

 

2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;

 

3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;

 

4° l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur;

 

5° l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.

 

L'employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l'attestation ou du rapport qu'il désire contester.

__________

1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.

 

 

221.  Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.

 

Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.

__________

1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.

 

 

[83]        Il est vrai dans le présent cas que le diagnostic posé initialement est celui d’entorse cervicale et lombaire. Cependant, dès le 9 décembre 2008, le médecin qui a charge de la travailleuse diagnostique une hernie discale et un pied tombant à droite pour lequel il réclame une investigation radiologique. À partir de cette date, le diagnostic de hernie discale L5-S1 et de pied tombant sera maintenu tout au long du suivi médical. De même, le docteur Corriveau maintient que la travailleuse présente des séquelles de pied tombant secondaire à une hernie discale dans son rapport du 16 octobre 2009, rapport qui est contesté dans le cadre de la procédure d’évaluation médicale qui est amorcée par la CSST.

[84]        Le docteur Gariépy s’estime plutôt lié par les diagnostics retenus par la CSST, soit ceux posés initialement d’entorse cervicale et lombaire dans le cadre de son rapport d’expertise effectué à la demande de la CSST en application de l’article 204 de la loi.

[85]        Le 20 novembre 2009, le docteur Corriveau remplit le formulaire de rapport complémentaire en application de l’article 205.1 de la loi. Selon lui, la travailleuse présente toujours des séquelles d’entorse cervicale et lombaire en plus d’un pied tombant. Déjà, il y a une contradiction entre les diagnostics retenus par le docteur Gariépy et ceux retenus par le docteur Corriveau.

[86]        De plus, le tribunal estime que le docteur Corriveau attribuait les séquelles de pied tombant à la hernie discale dans son rapport précédent du 16 octobre 2009. La contradiction entre les diagnostics est d’autant plus présente dans le présent dossier.

[87]        La CSST aurait donc dû soumettre la question du diagnostic au membre du Bureau d'évaluation médicale. Cette question de cerner le bon diagnostic est d’autant plus importante que le tribunal doit statuer sur l’ensemble des conséquences résultant de la lésion professionnelle. Or, comme le rappelle la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Martin et Société des alcools du Québec[3], il est important d’identifier correctement le diagnostic puisque « c’est justement le diagnostic qui décrit avec précision la lésion professionnelle subie par la victime d’un accident du travail . Les conséquences de la lésion sont donc intimement liées au diagnostic ».

[88]        À cet égard, le présent tribunal fait sien le raisonnement développé par la Commission des lésions professionnelles dans l’affaire Martin et Société des alcools du Québec[4] et ceux développés plus précisément dans l’affaire Khan et Restaurant le Taj[5], qui s’exprime comme suit :

[80]      À ce sujet, il y a lieu de rappeler que le législateur a accordé une grande importance au diagnostic principalement lorsque la CSST est appelée à rendre une décision en vertu des articles 224 et 224.1de la loi12

 

[81]      La loi reconnaît, dans un premier temps, la primauté du diagnostic posé par le médecin qui a charge du travailleur, notamment aux articles 199, 200 et 203 de la loi.

 

[82]      Dans un deuxième temps, si la CSST est en désaccord avec le diagnostic du médecin ayant charge, elle peut alors désigner un médecin, comme elle l’a fait dans le présent cas soit le docteur Desnoyers, afin d’obtenir son avis écrit sur toute question relative à la lésion professionnelle, comme le prévoit l’article 204 de la loi.

 

[83]      Dans un tel cas, l’article 205.1 de la loi stipule que ce rapport du médecin désigné en vertu de l’article 204 doit infirmer les conclusions du médecin qui a charge quant à l’un ou plusieurs sujets mentionnés à l’article 212 de la loi.

 

[84]      En cas de désaccord entre les conclusions du médecin désigné et celles du médecin qui a charge, la CSST peut alors se prévaloir du mécanisme de référence à un membre auprès du Bureau d'évaluation médicale, selon les modalités prévues aux articles 204, 206, 212, 217 et 221 de la loi.

 

[85]      Ce n'est que lorsque ces dispositions prévues à la loi sont respectées que la procédure d’évaluation médicale est considérée dès lors conforme, et qu’ainsi le diagnostic et les autres conclusions médicales retenus par le membre du Bureau d'évaluation médicale dans son avis vont lier la CSST aux fins de rendre sa décision conformément aux articles 224 et 224.1.

 

[…]

 

[89]      Certes, la Commission des lésions professionnelles constate que la preuve médicale fait état de nombreux diagnostics, posés par plusieurs médecins ayant eu charge du travailleur, au cours de plusieurs années et concernant de nombreux sites anatomiques. Toutefois, ces difficultés particulières ne permettaient pas à  la CSST d’éviter de déterminer si les diagnostics étaient reliés à la lésion professionnelle initiale. La CSST doit tenir compte des diagnostics évolutifs et des investigations médicales plus poussées dans le but de déterminer les diagnostics éventuels reliés à la lésion professionnelle.

 

[…]

 

[117]    Au surplus, la Commission des lésions professionnelles constate qu’il y avait pourtant clairement divergence entre le médecin qui avait charge, soit le docteur Ware à qui on avait demandé un rapport complémentaire, et le médecin désigné par la CSST, le docteur Desnoyers. Dans un tel contexte juridique, puisqu’il y avait divergence sur les diagnostics à retenir avec la lésion professionnelle, la CSST aurait dû soumettre le tout au membre du Bureau d'évaluation médicale.

 

[118]    Dans un tel contexte, vu la multiplicité des diagnostics et la complexité médicale, comment la CSST pouvait-elle informer le membre du Bureau d'évaluation médicale qu’il y avait juste un diagnostic de retenu alors que la question du diagnostic était si problématique et controversée dans ce dossier?

 

[…]

 

[121]    Dans le présent dossier, il est manifeste de la preuve que le travailleur a  été brimé dans ses droits, puisqu’il n’a pas été en mesure de se prévaloir de ses droits de contestation concernant les diagnostics reliés à la lésion professionnelle.

 

[122]    C’est d’ailleurs à une conclusion similaire à laquelle en est arrivée la Commission des lésions professionnelles dans la cause Perron et Agence John Dougherty19, conclusion que partage la soussignée :

 

            [36]        Pour protéger les droits des parties, la CSST devait au minimum soumettre le diagnostic au Bureau d'évaluation médicale ou encore rendre une décision sur la relation entre l’événement accidentel et le diagnostic d’entorse lombaire, démarches non faites dans le présent dossier.

               […]

 

                [44]        La Commission des lésions professionnelles conclut que l’ensemble de ces erreurs entachent d’irrégularités le processus de contestation soumis au Bureau d'évaluation médicale, surtout dans un contexte où la CSST n’a jamais rendu de décision sur la relation causale entre l’événement accidentel et plusieurs des diagnostics posés par le médecin traitant.

 

                [45]        Compte tenu des irrégularités portant sur une question aussi fondamentale que le diagnostic, il y a lieu de retourner le dossier à la CSST afin qu’elle rende les décisions s’imposant sur les diagnostics qu’elle reconnaît en lien avec l’événement traumatique, le tout dans le respect des dispositions de la loi.

 

[123]    La soussignée en arrive à la même conclusion dans le présent dossier. En présence d’erreurs commises par la CSST et d’un processus irrégulier d’évaluation médicale résultant de l’inaction de la CSST qui n'a jamais rendu de décision pour déterminer si les nombreux diagnostics posés par les médecins ayant charge sont reliés à la lésion professionnelle, il y a lieu de retourner le dossier à la CSST pour qu’elle rende les décisions appropriées sur les diagnostics tout en respectant la loi.

________________________________

12          Afin de faciliter la lecture de la décision, les articles de loi sont cités en annexe de la présente décision.

[…]

19                   C.L.P.  220128-62-0311, 29 octobre 2004, S. Mathieu.

 

[89]        Dans le présent dossier, c’est à la suite d’une première demande de remise et d’une seconde demande de remise que la travailleuse a entrepris des démarches formelles pour faire rendre une décision relativement à la relation entre la hernie discale L5-S1 et sa lésion professionnelle initiale.

[90]        Même à l’occasion de ces démarches, la CSST se croyait toujours justifiée de ne pas rendre de décision sur ce diagnostic. D’ailleurs, l’agente a fait même quelques vérifications auprès du tribunal quant à la nature des propos tenus à l’occasion de cette audience ajournée pour permettre à la travailleuse de produire le rapport d’évaluation médicale et de faire statuer sur la question de la relation entre le diagnostic de la hernie discale L5-S1 et la lésion professionnelle initiale.

[91]        Il est vrai cependant que le tribunal est saisi de cette question de relation dans le deuxième litige sur lequel il est appelé à statuer. Cependant, cette décision devient prématurée puisque l’avis du membre du Bureau d'évaluation médicale est irrégulier.

[92]        En effet, pour donner un poids probant aux conclusions du membre du Bureau d'évaluation médicale concernant la nature et la nécessité des soins ou traitements, la date de consolidation, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles découlant de la lésion professionnelle, il y a lieu de cerner les diagnostics précis découlant de cette lésion professionnelle pour statuer sur les conséquences en découlant.

[93]        La Commission des lésions professionnelles estime donc que l’avis rendu par le membre du Bureau d'évaluation médicale le 7 janvier 2010 est irrégulier et que les décisions rendues par la CSST entérinant les conclusions du membre du Bureau d'évaluation médicale sont illégales et que la décision refusant la relation entre le diagnostic de hernie discale L5-S1 est par conséquent prématurée. Il y a donc lieu de retourner le dossier à la CSST pour qu’elle rende les décisions appropriées sur les diagnostics, le tout, en respect des dispositions prévues à la loi.

[94]        La CSST pourra alors s’assurer du suivi concernant les différents diagnostics en relation avec la lésion professionnelle et déterminer la nature des conséquences médicales en découlant et soumettre le tout, le cas échéant, au Bureau d'évaluation médicale.

[95]        Dans l’intervalle, la CSST devra reprendre le versement de l’indemnité de remplacement du revenu en considération des conclusions médicales retenues par le médecin qui a charge de la travailleuse jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité de la travailleuse d’occuper son emploi prélésionnel ou un autre emploi équivalent ou convenable en conformité avec la loi.

Dossier 444754-62A-1107

[96]        Dans ce dossier, le tribunal est d’avis que la décision refusant la relation entre la hernie discale L5-S1 est rendue de façon prématurée étant donné l’irrégularité de l’avis du Bureau d'évaluation médicale et qu’il y a lieu de retourner le dossier à la CSST.

[97]        Par ailleurs, le tribunal aurait relevé la travailleuse du défaut de ne pas avoir logé sa demande de révision dans le délai prévu à l’article 358 de la loi en présence d’un motif raisonnable.

[98]        De l’avis du tribunal, la travailleuse a toujours eu l’impression que la Commission des lésions professionnelles était saisie de la question de l’ensemble des conséquences médicales résultant de sa lésion y incluant l’aspect diagnostic.

[99]        C’est d’ailleurs dans ce contexte qu’une première demande de remise lui a été accordée pour lui permettre de produire un rapport d’évaluation médicale pour tenir compte de l’ensemble des conséquences médicales résultant de sa lésion professionnelle pour laquelle un diagnostic de hernie discale L5-S1 avec pied tombant est posé par le docteur Doucet. La travailleuse a été très diligente dans le dépôt du rapport d’évaluation médicale du docteur Doucet à la suite de l’octroi de la première demande de remise. Lors de la seconde mise au rôle, la travailleuse a toujours l’impression que la question du diagnostic est entre les mains du tribunal. C’est lors de cette deuxième audience du 27 avril 2011 que la Commission des lésions professionnelles explique la nature de la contestation logée par la travailleuse et les restrictions relatives à cette contestation qui ne porte que sur les points 2 à 5 de l’article 212 de la loi. La travailleuse a dès lors manifesté son intention de contester le refus du diagnostic de sa hernie discale L5-S1, ce qu’elle a fait le même jour auprès de la CSST.

[100]     Le tribunal est d’avis qu’il s’agit là d’un motif raisonnable permettant de relever la travailleuse du défaut de ne pas avoir logé sa demande de révision administrative à l’intérieur du délai prévu à la loi. Sa demande est donc recevable, mais la décision sur le fond est prématurée.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

Dossier 402394-62A-1002

ACCUEILLE la requête de madame Nathalie Dulong, la travailleuse;

INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 16 février 2010 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE irrégulier l’avis rendu par le membre du Bureau d'évaluation médicale le 7 janvier 2010;

DÉCLARE nulle la décision initiale de la Commission de la santé et de la sécurité du travail du 20 janvier 2010;

RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle rende les décisions en conséquence;

DÉCLARE, par conséquent, que madame Nathalie Dulong a droit au versement de l’indemnité de remplacement du revenu.

Dossier 444754-62A-1107

ACCUEILLE la requête de madame Nathalie Dulong, la travailleuse;

INFIRME la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 19 juillet 2011 à la suite d’une révision administrative;

DÉCLARE recevable la demande de révision de madame Nathalie Dulong du 27 avril 2011;

DÉCLARE que la décision rendue initialement le 1er mars 2011 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail refusant la relation entre le diagnostic de hernie discale L5-S1 et la lésion professionnelle du 5 novembre 2008 est prématurée;

RETOURNE le dossier à la Commission de la santé et de la sécurité du travail afin qu’elle rende les décisions en conséquence;

 

 

 

__________________________________

 

Claire Burdett

 

 

 

 

 

Me Michel Charette

Sylvestre Fafard Painchaud

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Marie-Claude Poirier

ADP Santé et sécurité au travail

Représentante de la partie intéressée

 

 

Me Josée Picard

Vigneault Thibodeau Bergeron

Représentante de la partie intervenante

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           Claire LAPOINTE et INSTITUT DE RECHERCHE EN SANTÉ ET EN SÉCURITÉ DU TRAVAIL DU QUÉBEC, Procédure d'intégration professionnelle à l'usage du conseiller en réadaptation , coll. « Étude/Bilan de connaissances », Montréal, IRSST, 1991, pag. mult.

[3]          C.L.P. 161540-64-0105, 9 avril 2002, J.-F. Martel.

[4]          Id.

[5]          C.L.P. 212076-62-0307, 31 janvier 2005, D. Lévesque.

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