Généreux c. Ville de Brossard | 2022 QCTAT 5249 |
| |||
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL | |||
(Division des relations du travail) | |||
| |||
| |||
Montérégie | |||
| |||
Dossiers : | 1026919-71-1806 1028346-71-1809 1028347-71-1809 1033132-71-1905 1034781-71-1907 1036956-71-1911
| ||
Dossier employeur : | 908550 | ||
| |||
| |||
Montréal, | le 17 novembre 2022 | ||
______________________________________________________________________ | |||
| |||
Mylène Alder | |||
______________________________________________________________________ | |||
| |||
| |||
Josée Généreux |
| ||
| |||
|
| ||
c. |
| ||
|
| ||
Ville de Brossard |
| ||
Partie défenderesse |
| ||
|
| ||
______________________________________________________________________
DÉCISION RECTIFIÉE
______________________________________________________________________
Le texte original a été rectifié le 9 janvier 2023 et la description de la rectification est annexée à la présente version.
L’APERÇU
[1] Josée Généreux, la plaignante, est embauchée par la Ville de Brossard en mai 2013 comme chef de division installations et équipements. Cette division en est une parmi d’autres à la direction des Loisirs, de la culture et de la vie communautaire, la LCVC.
[2] Elle relève directement de la directrice de la LCVC jusqu’en 2017. À partir de ce moment s’ensuivent des modifications organisationnelles qui entraînent pour elle des changements dans ses tâches et la font dorénavant relever d’un directeur adjoint.
[3] En janvier 2018, quelques semaines après avoir reçu un premier avis disciplinaire, elle débute un congé de maladie en raison d’un épuisement professionnel. Deux tentatives de retour au travail s’avèrent ensuite vaines.
[4] Le 29 mars 2018, prenant appui sur l’article 123.6 de la Loi sur les normes du travail[1], la LNT, la plaignante dépose une première plainte de harcèlement psychologique contre la Ville à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, la CNESST. Elle prétend subir un tel harcèlement de la part des deux directeurs adjoints qui l’ont successivement supervisée.
[5] Dans les jours qui suivent, elle dépose une plainte pour pratique interdite par l’article 122 de la LNT. Elle prétend avoir fait l’objet d’une telle pratique, la Ville lui ayant imposé le 5 mars précédent une suspension de cinq jours, de manière concomitante à son absence pour cause de maladie.
[6] Le 6 avril 2018, elle dépose une troisième plainte à la CNESST, cette fois pour congédiement sans cause juste et suffisante selon l’article 124 de la LNT. Elle estime que sa suspension de cinq jours constitue un congédiement déguisé.
[7] En faisant abstraction de ses tentatives de retour au travail au printemps 2018, la plaignante sera absente jusqu’à la mi-décembre cette année-là et reprendra le travail progressivement jusqu’à son retour à temps complet le 21 janvier 2019.
[8] Le 10 avril 2019, la Ville lui impose une suspension avec solde pour fins d’enquête et, la semaine suivante, lui annonce qu’elle met fin à son emploi.
[9] La plaignante contestera sa destitution par une plainte prenant appui sur l’article 72 de la Loi sur les cités et villes[2], la LCV, et déposera deux autres plaintes à la CNESST. Une pour du harcèlement psychologique qu’elle estime subir de la part de la directrice adjointe ainsi qu’en raison de la gestion de son dossier d’invalidité par la Ville. L’autre pour pratique interdite au motif que le dépôt de ses plaintes l’année précédente et leur traitement auraient été considérés par la Ville dans sa décision de la destituer.
[10] Dans un premier temps, la Ville conteste la recevabilité de la plainte pour congédiement sans cause juste et suffisante déposée selon l’article 124 de la LNT, car la plaignante bénéficie d’une procédure de réparation équivalente à l’article 72 de la LCV.
[11] Par ailleurs, la Ville nie tout harcèlement psychologique et prétend avoir sanctionné la plaignante en raison de problèmes d’attitude et de comportements persistants qui lui ont été soulignés à compter de mai 2017. C’est pour ces problèmes qu’elle l’a suspendue en mars 2018 puis destituée en avril 2019, sans lien avec quel qu’exercice de droits que ce soit. Ces problèmes ont perduré à son retour d’absence pour cause de maladie, et cela, bien qu’elle lui ait donné toutes les chances de se corriger et lui ait offert du soutien. Cela a brisé le lien de confiance nécessaire à son poste de chef de division. Aussi, sa décision de la destituer est sérieuse, sage et méritoire et n’a rien à voir avec l’exercice de droits qui lui résultent de la LNT.
[12] Pour trancher l’ensemble du litige entre les parties, le Tribunal doit répondre aux questions suivantes :
A) La plainte pour congédiement sans cause juste et suffisante selon l’article 124 de la LNT est-elle recevable ou, sinon, peut-elle être convertie en plainte pour destitution selon la LCV malgré son dépôt après le délai prévu à cette loi?
B) La plaignante a-t-elle subi du harcèlement psychologique de la part de ses deux derniers supérieurs immédiats ainsi qu’en raison de la gestion de son dossier d’invalidité?
C) La suspension de cinq jours imposée à la plaignante en mars 2018 constitue-t-elle une mesure de représailles en raison de son absence pour cause de maladie?
D) La destitution de la plaignante est-elle une mesure de représailles en lien avec les plaintes déposées en 2018?
E) La destitution de la plaignante était-elle justifiée compte tenu de l’ensemble des circonstances?
[13] La preuve prépondérante amène le Tribunal à rejeter l’ensemble des plaintes pour différents motifs expliqués dans l’analyse qui suit. En résumé, la plainte déposée selon l’article 124 de la LNT est irrecevable et ne peut être convertie en plainte pour destitution selon la LCV, car elle a été déposée tardivement. Quant aux plaintes pour harcèlement psychologique, la preuve ne permet pas de conclure que les supérieurs immédiats de la plaignante ont eu à son égard une conduite vexatoire. Cette dernière tronque la réalité et interprète des paroles et des gestes en les modelant à sa perception qu’elle subit une injustice. Enfin, la Ville a démontré que tant sa suspension que sa destitution n’ont rien à voir avec ses absences pour cause de maladie ou avec le dépôt de ses plaintes à la CNESST. La décision de la destituer est sérieuse, sage et méritoire.
L’ANALYSE
[14] Le litige prend sa source dans une restructuration de la direction LCVC amorcée en 2017, au sein de laquelle la plaignante travaille depuis 2013.
[15] Au terme d’une longue audience durant laquelle fut administrée une preuve abondante, il est apparu manifeste que la plaignante était fragile à l’époque et qu’elle a eu de la difficulté à s’adapter à cette nouvelle structure. Face à ses comportements réfractaires, la Ville en est venue à y voir de l’insubordination et un manque de respect. Elle a sévi en imposant un encadrement et un processus disciplinaire que la plaignante a perçus comme étant du harcèlement psychologique. Cette perception s’est accrue au fil du temps et semble avoir entraîné chez elle une véritable croyance du bien-fondé de sa position. Cela a visiblement teinté son interprétation des événements et altéré la fiabilité de plusieurs pans de son témoignage.
[16] La plaignante a témoigné pendant plusieurs jours. Souvent, elle ne répondait pas directement aux questions qui lui étaient posées. Elle commençait par faire des mises en contexte parfois longues, donnant l’impression de vouloir se justifier plutôt que de répondre à ce qui lui était demandé.
[17] C’est pourquoi le Tribunal a retenu davantage la version des faits des témoins de l’employeur à l’égard de plusieurs événements relatés dans les plaintes.
[18] Par ailleurs, il est ressorti de l’audience que la communication par courriels est un mode de gestion usuel à la LCVC. Cela, même entre gestionnaires et employés qui travaillent dans des bureaux adjacents. Or, c’est bien connu, les courriels ont le ton du lecteur, ce qui peut entraîner des conséquences sur l’interprétation et la compréhension de leur contenu. Dans le cas présent, la perception de la plaignante à l’égard de certains courriels reçus a visiblement été altérée par le ton qu’elle leur a attribué : elle y réfère souvent dans son témoignage en les paraphrasant d’un ton dénigrant. Pourtant, un autre lecteur n’y verrait pas de contenu vexatoire. Nous y reviendrons plus loin.
[19] La plaignante estime faire l’objet d’un congédiement déguisé le 5 mars 2018, lorsque la Ville lui impose une suspension de cinq jours sans traitement. Même si elle est un cadre intermédiaire du domaine municipal occupant son poste depuis plus de six mois, elle ne croit pas pouvoir s’en plaindre en déposant un recours basé sur l’article 72 de la LCV, car elle n’est pas destituée formellement et que sa suspension est de moins de 20 jours. C’est pourquoi elle dépose une plainte selon l’article 124 de la LNT.
[20] Pour avoir droit au recours pour congédiement sans cause juste et suffisante prévu à cette disposition de la LNT, une personne salariée ne doit pas bénéficier d’une procédure de réparation équivalente, autre que le recours en dommages-intérêts.
[21] À juste titre, la Ville plaide que la plaignante, dans la mesure où elle prétend avoir fait l’objet d’un congédiement déguisé, bénéficie du recours prévu à l’article 72 de la LCV et que celui-ci constitue une procédure de réparation équivalente.
[22] En effet, l’article 72 de la LCV se lit comme suit :
72. La résolution destituant un fonctionnaire ou employé visé au deuxième ou au troisième alinéa de l’article 71, le suspendant sans traitement ou réduisant son traitement doit lui être signifiée de la même façon qu’une citation à comparaître en vertu du Code de procédure civile (chapitre C-25.01).
Sous réserve de l’article 89 de la Loi sur la police (chapitre P-13.1), la personne qui fait l’objet d’une mesure visée au premier alinéa peut, dans les 30 jours qui suivent la signification de la résolution, soumettre une plainte par écrit au Tribunal administratif du travail pour qu’il fasse enquête et dispose de sa plainte.
[23] La jurisprudence enseigne qu’il faut donner une interprétation large à la notion de destitution à laquelle réfère ce recours de la LCV[3]. Elle peut prendre diverses formes, incluant une destitution déguisée[4].
[24] Ainsi, dans la mesure où la plaignante prétend avoir fait l’objet d’une destitution déguisée, elle bénéficie du recours prévu à l’article 72 de la LCV pour la contester.
[25] Plusieurs décisions du Tribunal et de la Commission des relations du travail, la CRT, ont statué que ce recours de la LCV constitue une procédure de réparation équivalente à celle prévue à l’article 124 de la LNT[5].
[26] Ainsi, la plaignante ne peut pas exercer le recours pour congédiement sans cause juste et suffisante de la LNT pour contester ce qu’elle estime être une destitution déguisée.
[27] Cela étant, le Tribunal peut convertir une plainte pour congédiement sans cause juste et suffisante déposée en vertu de l’article 124 de la LNT en plainte pour destitution selon l’article 72 de la LCV[6].
[28] Pour ce faire, la plainte initiale doit toutefois avoir été déposée avant l’expiration du délai de 30 jours prévu à la LCV pour contester la destitution[7]. Passé ce délai, le recours est prescrit et ne saurait revivre du seul fait que le cadre municipal dépose ensuite une plainte à la CNESST pour contester cette même destitution.
[29] Dans le cas présent, la plaignante voit dans sa suspension du 5 mars 2018 l’événement qui concrétise sa destitution déguisée. Partant de là, elle avait donc jusqu’au 4 avril pour la contester. Or, ce n’est que le 6 avril qu’elle dépose sa plainte à la CNESST. Il était alors trop tard pour déposer une plainte selon l’article 72 de la LCV.
[30] Néanmoins, l’article 15 de la Loi instituant le Tribunal administratif de travail[8], la LITAT, permet au Tribunal de prolonger un délai ou de relever une personne des conséquences de son défaut de le respecter si elle démontre un motif raisonnable expliquant son retard et que l’autre partie n’en subit pas de préjudicie grave.
[31] Lorsqu’appelée à expliquer les motifs de son retard à exercer son recours, la plaignante déclare qu’elle ignorait les délais impartis par la loi pour ce faire. Elle ajoute que son état de santé était difficile à l’époque.
[32] D’une part, l’ignorance de la loi ne constitue pas en soi un motif raisonnable au sens de l’article 15 de la LITAT, comme l’a maintes fois décidé le Tribunal[9].
[33] D’autre part, la preuve n’établit pas que l’état de santé de la plaignante la rend incapable d’exercer ses droits au printemps 2018. Au contraire, elle dépose à l’époque trois plaintes, dont deux précèdent celle où elle allègue son congédiement déguisé.
[34] Par conséquent, il y a lieu de conclure que la plainte déposée le 6 avril 2018 en vertu de l’article 124 de la LNT pour contester une destitution déguisée est irrecevable. Elle doit donc être rejetée.
[35] La preuve n’établit pas que la plaignante a subi du harcèlement psychologique de la part de ses deux derniers supérieurs immédiats ni en raison de la gestion de son dossier d’invalidité.
[36] Rappelons qu’elle allègue en avoir subi à compter de 2017, et ce, jusqu’à sa destitution en mai 2019. Elle dépose une première plainte à ce sujet en mars 2018, visant des comportements, gestes et paroles tenus à son endroit par ses deux derniers supérieurs immédiats, les directeurs adjoints Éric Luenberger et Marie-Andrée Dériger. Puis, elle en dépose une seconde en mai 2019 dénonçant d’autres conduites vexatoires de cette dernière, survenues après le dépôt de sa première plainte, ainsi qu’en raison de la gestion de son dossier d’invalidité par la Ville et son assureur.
[37] La LNT consacre le droit d’une personne salariée à un environnement de travail exempt de harcèlement psychologique et impose aux employeurs l’obligation de prendre des mesures raisonnables pour prévenir un tel harcèlement ou le faire cesser[10].
[38] Elle définit le harcèlement psychologique comme une « conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne pour celui-ci, un milieu de travail néfaste[11] ». Elle prévoit aussi qu’une seule conduite grave peut constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et produit un effet nocif continu pour la personne salariée.
[39] Il revient à la personne qui s’en plaint de prouver, par prépondérance des probabilités, qu’elle a été victime de harcèlement psychologique au sens de la LNT.
[40] Pour ce faire, elle doit d’abord démontrer l’existence d’une conduite vexatoire à son endroit. La situation doit être analysée globalement, selon le point de vue de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances[12]. Il faut aussi distinguer les conduites vexatoires de celles issues de l’exercice normal des droits de direction par l’employeur[13]. À cette étape, il faut tenir compte du contexte des relations du travail concernées, des rapports sociaux difficiles ou des conflits, le cas échéant, ainsi que du comportement de la personne salariée qui peut révéler une tendance à la victimisation ou à la paranoïa.
[41] En présence d’une conduite vexatoire, il faut ensuite que la preuve révèle que celle-ci a entraîné une atteinte à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychologique de la personne salariée, ainsi qu’un climat de travail néfaste.
[42] Lorsque la preuve démontre que la personne salariée a subi une conduite vexatoire qui a porté atteinte à sa dignité ou à son intégrité et qui a entraîné un milieu de travail néfaste et donc, du harcèlement psychologique, il faut ensuite vérifier si l’employeur a fait défaut de respecter son obligation de prendre les moyens raisonnables pour prévenir ou faire cesser un tel harcèlement[14].
[43] Qu’en est-il dans la présente affaire?
[44] Comme mentionné précédemment, le litige prend sa source dans une restructuration de la direction LCVC amorcée en 2017, au sein de laquelle la plaignante travaille à titre de chef de division, installations et équipements depuis 2013.
[45] Depuis son embauche, la plaignante relève directement de la directrice de la LCVC, Linda Vandal. À titre de chef de division, elle chapeaute une équipe composée d’un superviseur et d’une quarantaine de salariés syndiqués. Au cours de l’année 2016, plusieurs membres de son équipe s’absentent pour de longues périodes, ce qui lui crée une surcharge de travail importante, dit-elle.
[46] À partir de 2017, s’ensuivent des modifications à la structure de la LCVC qui entraînent pour elle quelques changements dans ses tâches et la font dorénavant relever d’un directeur adjoint.
[47] Cette période débute avec la présentation d’un nouvel organigramme de la LCVC en janvier 2017. La Ville crée un nouveau poste de directeur adjoint - sports et logistique sous la directrice, duquel relèvera dorénavant la plaignante. Éric Luenberger, un de ses collègues qui était chef de la division aquatique abolie par cette réforme, est nommé à cette fonction. La division installations et équipements, dans laquelle œuvre la plaignante, devient la division logistique. Elle voit principalement à l’opération de 14 sites d’activités, 84 terrains sportifs, au soutien logistique des événements de la Ville et assure une garde en tout temps. Elle comprend deux superviseurs qui relèvent de la plaignante, ainsi qu’une cinquantaine de salariés sous eux.
[48] Lorsqu’interrogée sur sa réaction face à cette nouvelle structure et à cette nomination, la plaignante dira que la vision de sa division devient « logistique ». Elle estime que son nouveau supérieur ne connaît pas vraiment sa division et que sa vision n’est pas conforme à la réalité des opérations de celle-ci.
[49] La plaignante affirme que dès son entrée en poste, son nouveau supérieur la reçoit dans son bureau en s’accotant sur son dossier de chaise et lui disant : « tsé, j’avais appliqué sur ton poste, t’as eu la job et là, je suis ton boss ». Elle y voit du dénigrement, de l’intimidation.
[50] Pour sa part, le directeur adjoint reconnaît avoir dit à la plaignante qu’il avait postulé pour son poste. Il nie toutefois lui avoir dit « là, je suis ton boss », mais a plutôt ajouté qu’elle aurait bien pu être nommée directrice adjointe à sa place. Il explique que son intention n’est pas de la dénigrer, mais plutôt de la valoriser.
[51] Le Tribunal estime que la version du directeur adjoint est plus vraisemblable. La plaignante a longuement témoigné dans cette affaire. Il est apparu manifeste qu’elle a une tendance à interpréter des propos en y ajoutant des compléments confortant sa perception. De plus, elle admet avoir été « bête » avec son supérieur au moment de sa nomination, précisant toutefois qu’elle était épuisée à cette époque.
[52] Certes, cette entrée en matière du directeur adjoint n’est pas des plus heureuses, mais pas au point où une personne raisonnable placée dans cette situation y verrait une conduite hostile et non désirée. Elle constitue tout au plus une maladresse.
[53] La plaignante prétend que son nouveau supérieur lui fait subir chaque semaine de longues rencontres statutaires, de deux, trois ou même quatre heures, où elle s’est souvent sentie diminuée, humiliée et attaquée.
[54] Elle affirme qu’il lui fait des reproches sans lui expliquer ce qu’elle doit changer dans les faits. Elle estime qu’il fait de la microgestion, ce à quoi elle n’est pas habituée. Elle a de la difficulté à s’adapter à ce style « à cause de sa situation ». Elle réfère ici à son épuisement de l’époque, ainsi qu’au contexte où elle trouve que tout est flou, avec une nouvelle direction et une nouvelle division. À de nombreuses occasions, elle lui expose différentes problématiques et lui demande de prendre des décisions. Or, il se contenterait de la regarder en souriant sans dire un mot ou en se moquant d’elle.
[55] Pour sa part, le directeur adjoint explique avoir instauré ces rencontres avec la plaignante dans l’objectif de faire une mise au point sur l’avancement de ses dossiers et pour préciser les orientations. Celle-ci n’est pas portée à partager l’information et il doit souvent la lui demander. Il ajoute tenir des rencontres statutaires avec les autres cadres sous sa supervision, lesquels lui font habituellement parvenir l’ordre du jour de chaque rencontre. Dans le cas de la plaignante, elle ne le fait pas si bien qu’il finit par le faire à sa place. Il estime que ces rencontres durent environ deux heures.
[56] Encore ici, la preuve prépondérante ne démontre pas que le supérieur immédiat de la plaignante ait eu des conduites vexatoires telles que le décrit cette dernière.
[57] D’une part, les rencontres statutaires entre un cadre et son supérieur sont chose courante à la Ville. Le seul fait d’en tenir ne peut constituer une conduite vexatoire. Quant à leur durée, elle ne permet pas non plus de les qualifier ainsi. Le directeur adjoint relate que beaucoup de points reviennent d’une rencontre à l’autre : quand les dossiers ne vont pas dans le sens souhaité par la plaignante, elle revient sur les orientations déjà prises. De plus, comme mentionné, le Tribunal a observé chez la plaignante une tendance à s’expliquer longuement pour répondre à de simples questions et à se justifier. Tout cela a certainement contribué à prolonger la durée des rencontres.
[58] D’autre part, la plaignante elle-même admet avoir eu besoin que son supérieur lui clarifie davantage les orientations et les attentes. Ces rencontres étaient l’outil privilégié pour ce faire. On ne saurait donc voir dans leur tenue une conduite vexatoire.
[59] Par ailleurs, il est vrai que la preuve révèle l’existence d’une certaine tension lors de ces rencontres statutaires. Le directeur adjoint perçoit que la plaignante ne reconnaît pas sa compétence technique et ne voit pas son encadrement d’un bon œil. Cette perception s’est avérée juste, la plaignante l’ayant confirmé à plusieurs reprises dans son témoignage, notamment pour expliquer pourquoi elle estimait devoir lever des drapeaux.
[60] Cette tension a probablement contribué à rendre ces rencontres difficiles pour la plaignante. Toutefois, c’est l’attitude de cette dernière qui est à l’origine de celle-ci, il serait donc malvenu d’y voir une conduite hostile et non désirée de la part de son supérieur. Les agissements de ce dernier sont de la nature de ceux posés par un employeur pour recadrer un employé éprouvant des difficultés et se situent dans les limites du droit de gérance de la Ville.
[61] Le 11 mai 2017 se tient une rencontre de coordination avec une quinzaine d’employés, cadres et superviseurs à la LCVC. Alors qu’on s’attend à ce que la plaignante suscite l’adhésion des employés à des orientations de la direction sur certains dossiers, celle-ci les remet plutôt en question, ouvertement. La Ville y voit un désaveu qui discrédite la direction.
[62] Le 19 mai 2017, la plaignante rencontre son supérieur et la directrice LCVC. Ils reconnaissent d’emblée qu’elle a toutes les compétences techniques requises, mais lui soulignent son attitude et ses comportements sont problématiques. Plus précisément, ils lui reprochent son attitude négative et le fait qu’elle ne respecte pas toujours les directives et ne se rallie pas aux décisions de la direction.
[63] La plaignante nie avoir l’attitude qu’on lui reproche, tout en admettant ne pas avoir agi « comme elle l’aurait fait normalement ». Elle leur explique être stressée et épuisée en raison d’une surcharge de travail dans sa division et avoir besoin de repos.
[64] Ses supérieurs lui offrent de suivre des cours de savoir-être et du coaching, ce qu’elle refuse. Le directeur adjoint reviendra à la charge avec l’offre de coaching à la fin mai, mais la plaignante maintiendra son refus. Elle suit alors des cours universitaires pour terminer un baccalauréat et veut s’y concentrer. Elle dit aussi devoir se reposer avant d’avoir du coaching.
[65] Il est bien possible que la plaignante ait été en « burn out » à l’époque, comme elle l’affirme. La preuve révèle en effet que plusieurs employés de sa division se sont absentés pour cause de maladie en 2016. Toutefois, elle a choisi de ne pas aller consulter son médecin à ce moment et de continuer à se présenter au travail. La Ville n’a pas à subir les conséquences de ce choix : elle est en droit de s’attendre à ce qu’un employé qui se présente au travail soit apte à donner sa prestation de travail. Et s’il ne le fait pas, elle est en droit de l’encadrer en conséquence.
[66] En ce qui concerne l’affirmation de la plaignante voulant que les reproches que lui fait la Ville ne soient pas fondés, elle n’est pas supportée par la preuve.
[67] D’une part, le témoignage du directeur adjoint, documenté par des notes contemporaines et corroboré par des échanges courriels, convainc que la plaignante a des comportements qui sont problématiques. Elle-même témoigne avoir parfois été raide avec son supérieur, admettant avoir eu des problèmes d’humeur qu’elle impute à son épuisement.
[68] D’autre part, la suite des événements rend probable l’existence des comportements reprochés à la plaignante : des manquements de même nature continueront de se produire et celle-ci persistera à affirmer que les reproches à leurs égards ne sont pas fondés.
[69] En outre, la plaignante explique en partie ses comportements par sa conviction que cela fait partie de son rôle de chef de division de poser des questions et de lever des drapeaux rouges. C’est pourquoi elle estime que les reproches de la Ville ne sont pas fondés et qu’ils constituent des manifestations de harcèlement psychologique. Elle ajoute que le directeur adjoint continuera à lui faire de tels reproches non fondés dans les mois qui suivent.
[70] Par exemple, elle cite un courriel que lui envoie son supérieur le 2 octobre 2017, dans lequel il lui reproche de ne pas avoir donné suite à sa demande du 29 septembre de valider la possibilité de prolonger l’utilisation des terrains de soccer d’une école. Il l’informe l’avoir fait à sa place et conclut ainsi :
Je suis déçu d’avoir à tergiverser avec toi sur plusieurs questions, je perds mon temps. C’est contre-productif. Mon courriel d’origine était clair.
Ce genre de situation se reproduit régulièrement, j’espère que tu comprends que c’est une attitude qui te nuit professionnellement et que des conséquences sont possibles.
[71] Ce sont là des propos durs qui peuvent avoir vexé la plaignante. Cependant, lorsqu’analysés dans leur contexte, ils s’expliquent.
[72] Comme l’indique le directeur adjoint, il s’agit d’une énième situation où la plaignante remet en question sa décision plutôt que d’exécuter la tâche qu’il lui assigne. La lecture de courriels précédents révèle qu’au lieu de faire la validation demandée, elle lui répond qu’une prolongation en octobre pose des problèmes pour l’entretien des terrains et lui recommande de maintenir la formule habituelle. Le directeur adjoint explique que même si la plaignante a raison techniquement, l’objectif de la direction est de se rapprocher du partenaire. C’est pour cette raison que la décision d’aller de l’avant avec la demande de prolongation a été prise et la plaignante doit s’y conformer.
[73] Le directeur adjoint a de plus en plus de difficulté à gérer la plaignante qui conteste continuellement ses demandes. Il admet avoir été impatient à certains moments, car elle est devenue une importante source de stress pour lui. À telle enseigne qu’il a demandé et obtenu de l’aide de la direction et des ressources humaines pour l’aider à la gérer. Il a notamment bénéficié de coaching externe pour ce faire.
[74] Lorsqu’interrogée sur le fait qu’elle remet souvent en question les décisions de son supérieur, la plaignante le nie. Elle répète devoir apporter des éléments et soulever des points à son supérieur à titre de chef de division. Elle ajoute travailler plus en profondeur et préférer les solutions durables, tandis que son supérieur travaille davantage sur le court terme. Elle justifie en outre ses interventions auprès de ce dernier du fait qu’elle a de la difficulté à comprendre où il s’en va avec ses dossiers. « J’ai besoin d’un peu plus d’informations », dira-t-elle.
[75] De telles explications de la plaignante constituent un exemple de ce que la Ville lui reproche : elle nie le comportement reproché, ici remettre en question une décision, puis explique du même souffle pourquoi elle doit le faire.
[76] En décembre 2017, le directeur adjoint s’absente et l’autre directrice adjointe de la LCVC, Marie-Andrée Dériger, assume temporairement ses fonctions. Elle participe à diverses rencontres avec la plaignante, dont une à l’interne avec des employés et une avec des représentants d’un organisme partenaire de la Ville.
[77] Elle relate que chaque fois, la plaignante adopte une attitude fermée, rigide, négative et non collaborative. Par exemple, elle coupe souvent la parole à ses interlocuteurs en disant : « ça ne pourra pas marcher », « ce n’est pas comme ça que ça marche », « ça ne sera pas possible », etc., sans chercher à comprendre les problèmes pour être en mode solution. Cela crée des malaises et nécessite des interventions de la directrice adjointe pour réorienter les discussions sur une voie constructive.
[78] Le 13 décembre, la directrice adjointe écrit un rapport à ce sujet ainsi que sur d’autres réactions de la plaignante face à des demandes précises qu’elle lui fait. Elle conclut ainsi :
En l’absence d’Éric Luenberger, je ne suis pas intervenue auprès de Josée Généreux pour obtenir un changement au comportement ne sachant pas précisément, à ce moment-ci de mon intégration dans l’équipe, les limites de mes interventions.
Néanmoins, je considère que Josée Généreux a été irrespectueuse à quelques reprises. Elle a démontré une attitude négative et peu constructive. Elle démontre peu de respect pour la hiérarchie, voir même pour ses collègues, notamment en écoutant peu et parlant brusquement.
Josée Généreux semble avoir perdu de vue l’approche client interne et externe en priorisant les besoins de sa division et de ses habitudes de gestion au détriment des résultats d’équipe ou d’organisation. Lorsque je tente de comprendre ses processus, elle se ferme précisant spontanément que « le problème n’est pas là » que « c’est les autres qui ne comprennent pas ».
Je te laisse le soin d’analyser la situation et je demeure disponible pour en discuter. Nous pourrions également rencontrer conjointement Josée pour repréciser les attentes et comportements attendus ainsi que les valeurs de l’organisation.
[79] Le 18 décembre 2017, le directeur adjoint remet à la plaignante un avis écrit intitulé « Dernière chance - avis disciplinaire ». Il lui reproche essentiellement de continuer à avoir une attitude négative, fermée et non collaborative, à manquer de leadership et de diligence, ainsi qu’à ne pas respecter certaines directives. Il mentionne lui en avoir fait part à plusieurs occasions et lui avoir offert du coaching professionnel avec un consultant en mai dernier, ce qu’elle a décliné. Il indique que ces comportements et attitudes ont des répercussions négatives sur le fonctionnement de la LCVC et ternissent son image auprès des autres directions et des partenaires externes. Il précise qu’elle doit changer son comportement et son attitude sans délai, à défaut de quoi la Ville devra mettre fin à son emploi.
[80] L’avis contient des précisions sur les comportements reprochés, dont ceux observés par la directrice adjointe en décembre mentionnés précédemment. Il réfère à des événements survenus depuis septembre pour illustrer ses reproches et cite des exemples de réponses qu’elle a fournies qui ne sont pas acceptables pour la Ville :
[Transcription textuelle]
[81] La plaignante est sidérée de recevoir un tel avis disciplinaire. Elle réitère qu’on lui reproche des choses qu’elle doit faire à titre de gestionnaire de la division logistique. Elle ne comprend pas, non plus, pourquoi la Ville lui reproche d’avoir refusé le coaching offert en mai 2017. Pour elle, son supérieur avait « donné son accord » à ce qu’elle n’en reçoive pas à l’époque. En fait, elle infère cette conclusion du fait que la Ville ne le lui a pas reproché à l’époque où elle a refusé.
[82] Encore ici, elle tire une conclusion de sa perception des faits. Ce n’est pas parce que la Ville ne lui a pas expressément reproché de refuser du coaching en mai qu’elle a accepté quoi que ce soit. Par ailleurs, l’avis disciplinaire s’explique et constitue une mesure disciplinaire qui s’inscrit dans un processus de progression des sanctions amorcé quelques mois plus tôt avec l’avertissement verbal donné à la rencontre de mai.
[83] La plaignante qualifie cet avis écrit de vexatoire aussi parce qu’il indique être un « dernier avis », alors qu’elle affirme que c’est son premier avis disciplinaire. À cet égard, elle ne considère pas avoir reçu un avis verbal à la rencontre de mai, qu’elle voyait davantage comme un simple échange. Cette perception surprend, d’autant plus qu’elle reconnaît qu’on lui a alors fait des reproches et offert du coaching.
[84] En fait, elle ne reconnaît aucune responsabilité ou faute dans ce que la Ville lui reproche, si bien qu’elle ne change pas son comportement dans les jours qui suivent.
[85] La plaignante relate que la directrice adjointe l’a humiliée et discréditée devant son équipe lors d’une rencontre le 21 décembre portant sur l’échéancier à respecter pour une publication culturelle de la Ville. Celle-ci lui aurait crié après et dit : « Tu passes ton temps à critiquer et tu ne fais rien. Je vois juste quelqu’un qui n’est pas capable de rien faire. »
[86] Pour sa part, la directrice adjointe nie avoir tenu ces propos, mais admet être intervenue pour interrompre la plaignante et mettre fin à la réunion. Elle explique que la plaignante parle à une salariée sur un ton inapproprié et que cette dernière a les larmes aux yeux. Elle se doit d’intervenir. Son intervention est ferme, mais elle ne crie pas.
[87] Le témoignage de la plaignante à l’audience convainc le Tribunal qu’elle est une personne qui n’aime pas se faire prendre en défaut. Elle tente de justifier vivement tout reproche qu’on lui fait, qu’elle perçoit ou même qu’elle anticipe. Son souvenir est altéré par cette crainte d’être prise en défaut et sa conviction de subir une injustice.
[88] Après le départ de l’équipe, les deux discutent de ce qui vient de se passer. La plaignante pleure et tente de justifier ses actes par le bien-fondé de sa position, ce à quoi la directrice adjointe répond que le problème, « c’est le comment ».
[89] La plaignante revient sur la dernière année, sur sa sanction disciplinaire, sur le fait qu’elle est épuisée et en surcharge de travail. Elle déclare que son supérieur n’a pas les compétences pour être là.
[90] La directrice adjointe lui rappelle que la Ville offre un programme d’aide aux employés, PAE. Elle peut s’y référer au besoin et prendre le temps d’aller consulter son médecin si elle en ressent le besoin. L’organisation va la soutenir. La plaignante témoigne qu’elle sent de l’empathie et de la compréhension de sa part à ce moment.
[91] Le 20 décembre 2017, le directeur adjoint s’absente pour cause de maladie. La directrice adjointe le remplace à nouveau. Elle envoie un courriel aux chefs de division pour les en informer et leur rappeler l’importance de maintenir les communications comme à l’habitude. Elle leur demande de mettre en copie le directeur adjoint dans leurs courriels, la règle du Cc, pour qu’il puisse lire l’évolution des dossiers à son retour.
[92] L’après-midi du 21 décembre, la plaignante finalise une entente avec un partenaire concernant le traçage des pistes de ski de fond dans le parc urbain. Elle envoie l’entente corrigée à la greffière et à un de ses superviseurs, avec des instructions. Elle ne met pas en copie son supérieur, le directeur adjoint, mais seulement la directrice adjointe.
[93] Cette dernière lui écrit donc en soirée pour rappeler la règle du Cc :
Bonjour Josée
Merci pour le suivi et ta prompte collaboration pour la rédaction de l’entente.
Peut-être n’as-tu pas eu le temps de prendre connaissance de tous tes courriels, en conséquence je te souligne plus précisément notre attente à l’égard du fait de placer Éric en cc en tout temps, comme le précisait la directive que je t’ai transmise un peu plus tôt dans la journée.
Ceci s’applique à toutes les communications avec le directeur d’un autre service, ainsi que dans toutes les situations susceptibles de requérir l’attention de Linda, d’un autre directeur, de la direction générale ou des élus. Étant entendu que cette directive s’applique même en l’absence d’Éric, dans lequel cas, que tu me places moi en cc.
Je t’inviterais donc à te conformer dès maintenant à cette directive qui vise l’optimisation de nos opérations.
Merci à l’avance de ta collaboration.
[94] Le 23 décembre, la plaignante récidive en envoyant l’entente signée à un chef de division de la direction des travaux publics, toujours sans mettre en copie son supérieur, le directeur adjoint.
[95] Elle déclare avoir simplement oublié de le mettre en copie dans l’urgence. Elle ajoute n’avoir lu le courriel de rappel de la directrice adjointe qu’en mai 2018, après son retour au travail, puisqu’elle le lui avait envoyé tard en soirée. Elle dépose au soutien de cette affirmation un rapport du logiciel de courriels qui confirme la lecture du message à cette date. C’est ainsi qu’elle explique pourquoi elle n’a pu respecter la directive.
[96] Ces explications ne sont guère convaincantes, considérant que la plaignante a envoyé un courriel le 23 décembre. Elle aurait donc normalement dû voir ses courriels reçus deux jours plus tôt, même en soirée. Quoi qu’il en soit, la suite des événements démontre qu’elle persiste à ne pas respecter la règle du Cc dans plusieurs circonstances.
[97] Le 22 décembre, la plaignante consulte son médecin qui lui remet une attestation prescrivant un arrêt de travail « pour raison médicale » du 4 au 22 janvier 2018. Elle attendra quelques jours avant de le communiquer à la Ville.
[98] Entre temps, elle décide d’assumer la garde du temps des fêtes de sa division, contrairement à la directive en vigueur de l’assigner aux superviseurs. Même si elle se dit épuisée, elle explique vouloir donner un congé mérité à ses superviseurs, qui ont de la famille en région. Elle affirme avoir fait approuver l’horaire de garde par son supérieur. Or, la preuve indique plutôt qu’elle fait approuver l’horaire de garde jusqu’au vendredi 22 décembre 2017.
[99] Pendant sa garde, la plaignante reçoit un appel concernant un problème d’ouverture d’un pavillon d’un parc. Plutôt que de communiquer avec le chef de la division concernée par ce problème, elle appelle un superviseur sous ce dernier pour lui donner des directives. Ce faisant, non seulement elle ne respecte pas la directive de se parler « de chef à chef » en cas de demande visant un employé d’une autre division, mais elle dérange en outre cet employé qui n’est même pas de garde.
[100] La plaignante explique l’avoir fait pour être efficace et rendre service. Elle croyait en outre que le superviseur en question était de garde, car ils l’ont souvent été ensemble dans le passé.
[101] Cet exemple illustre un des comportements reprochés à la plaignante par la Ville : quand elle estime qu’une directive n’est pas appropriée, peu importe ses motifs, elle ne l’applique simplement pas.
[102] À son retour de vacances des fêtes, la directrice adjointe trouve le certificat médical prescrivant l’arrêt de travail de la plaignante sur son bureau. Elle trouve curieux que l’arrêt prescrit soit postdaté après les fêtes, surtout lorsqu’elle constate que la plaignante a assumé la garde entretemps. En outre, il appert que cette dernière n’a pas respecté la procédure à suivre pour une absence pour cause de maladie, car elle devait acheminer l’information à la direction des ressources humaines.
[103] L’assurance invalidité de courte durée est assumée par la Ville qui a mandaté la firme Morneau Shepell pour l’administrer. Le 13 février 2018, cette firme écrit à la plaignante que les renseignements médicaux qu’elle a fournis sont insuffisants pour justifier son absence. On lui donne dix jours pour communiquer de nouveaux renseignements comprenant l’ampleur et la gravité des symptômes selon le diagnostic, les données médicales objectives à l’appui de ce diagnostic, le pronostic, les limitations fonctionnelles l’empêchant d’accomplir les tâches essentielles de son travail ainsi qu’un plan de traitement.
[104] La médecin traitante de la plaignante prolonge l’arrêt de travail de celle-ci une première fois jusqu’au 19 février 2018, puis une seconde fois jusqu’au 1er mars. Les nouveaux certificats médicaux, tout comme celui de décembre, ne précisent pas de diagnostic ni les renseignements demandés par la firme.
[105] Le 1er mars, la plaignante communique deux autres certificats médicaux à la Ville. L’un indique qu’elle pourra recommencer à travailler de façon progressive à compter du 19 mars jusqu’au 16 avril, et l’autre précise un diagnostic de « trouble d’adaptation avec humeur anxio-dépressive secondaire à un épuisement professionnel ». Il s’agit alors du premier diagnostic communiqué à la Ville par la plaignante.
[106] Le 2 mars 2018, Morneau Shepell communique avec la plaignante pour l’informer qu’elle est attendue par son employeur, car les renseignements communiqués demeurent insuffisants pour justifier son absence.
[107] Le même jour, le directeur des ressources humaines de la Ville, Daniel Hébert, convoque la plaignante à une rencontre le 5 mars, à 17 h, avec la directrice adjointe et la chef de division des ressources humaines, Lise Corriveau. Ils feront alors le point sur son retour au travail, discuteront des dossiers qui lui seront attribués les premières semaines ainsi que sur le comportement auquel la Ville s’attend de la part d’un chef de division.
[108] La rencontre a lieu comme prévu. On l’informe que la structure organisationnelle de la LCVC a encore été modifiée et que la directrice Vandal est partie. La directrice adjointe est maintenant directrice par intérim de la LCVC et devient officiellement sa supérieure immédiate. On l’avise aussi qu’elle est suspendue sans salaire pour une période de cinq jours prenant effet immédiatement. Elle pourra revenir au travail le 12 mars, sans que les employés soient informés de cette sanction, cela afin de préserver son autorité.
[109] La Ville lui remet alors une autre lettre intitulée « Suspension de cinq (5) jours – comportements inadmissibles ». Référant à l’avis écrit remis le 18 décembre précédent, elle précise : « Nous croyons avoir été clairs : votre attitude négative, votre fermeture d’esprit et vos insubordinations sont des comportements que nous ne pouvons tolérer qui doivent cesser. » Puis, elle souligne son comportement à la rencontre du 21 décembre, ainsi que son défaut de respecter la politique du Cc et de celle de s’adresser de « chef à chef » en cas de problème impliquant un salarié d’une autre division. Elle se termine ainsi :
Vous comprendrez que cette situation ne peut plus durer. Compte tenu du fait que l’avis écrit du 18 décembre 2017 était un avis disciplinaire de dernière chance, nous avons sérieusement considéré vous congédier. Nous avons finalement opté pour vous donner une ultime chance de nous démontrer que vous pouvez modifier votre comportement. Nous nous attendons à ce que, dorénavant, vous démontrez une excellente collaboration avec vos collègues tant dans votre service que dans les autres. Nous exigeons que vous adoptiez une attitude positive, constructive et que vous soyez TOUJOURS cordiale. Évidemment, toutes les directives doivent être respectées.
Nous serons clairs : IL S’AGIT RÉELLEMENT DE VOTRE DERNIÈRE CHANCE.
Considérant ce qui précède, le Conseil a décidé de vous suspendre pour raison disciplinaire pour une durée de cinq (5) jours, sans rémunération, afin de vous amener à réfléchir au sérieux de la situation. Cette suspension sera effective du 6 au 12 mars 2018 inclusivement.
Nous espérons sincèrement que vous serez en mesure de saisir la chance qui vous est offerte afin de réfléchir à votre comportement et de procéder au changement d’attitude qui s’impose. Prenez par ailleurs avis qu’à défaut par vous de vous conformer à nos demandes, nous n’aurons d’autre alternative que de procéder à votre congédiement.
[Transcription textuelle]
[110] Pour la plaignante, le fait de l’avoir convoquée à cette rencontre du 5 mars, pendant son arrêt de travail, constitue une conduite vexatoire, hostile et non désirée de la part de la Ville.
[111] C’eût peut-être été le cas si, au moment de la convocation et de la tenue de cette rencontre, l’absence pour cause de maladie était reconnue par la Ville. Or, celle-ci reçoit à cette époque l’information de Morneau Shepell que cette absence n’est pas supportée par des renseignements médicaux suffisants. Ce n’est qu’après la convocation à cette rencontre qu’elle fournira certains des renseignements demandés, mais pas tous. Dans ces circonstances, elle ne peut pas reprocher à la Ville de l’avoir convoquée et d’avoir poursuivi le processus disciplinaire entrepris.
[112] La plaignante dénonce aussi cette suspension et les propos tenus à son endroit par la directrice adjointe le 5 mars comme étant des manifestations de harcèlement psychologique. Celle-ci lui aurait notamment déclaré que son ancien supérieur avait été conciliant avec elle, mais qu’avec elle, rien ne sera toléré. Elle aurait ajouté que personne dans l’équipe ne s’est ennuyé d’elle pendant son arrêt de travail et que « tout roule A-1 ».
[113] Encore ici, ce souvenir de la plaignante paraît altéré par sa perception subjective d’être harcelée et par une tendance à la victimisation. La directrice adjointe explique lui avoir plutôt dit de ne pas s’inquiéter de la charge de travail qui l’attendra à son retour, car l’équipe avait fait les suivis dans ces dossiers. Cette explication est plausible et probable.
[114] La suspension de la plaignante est une mesure disciplinaire qui suit la progression des sanctions dans le processus entrepris par la Ville, car celle-ci estime que les comportements problématiques persistent malgré les avis précédents. La preuve prépondérante démontre que ces nouveaux comportements se sont produits.
[115] Par ailleurs, la directrice adjointe explique que la suspension est imposée à la plaignante à ce moment afin de pouvoir être purgée avant que les employés de la division n’apprennent son retour au travail. C’est aussi pour cela que la rencontre du 5 mars a été convoquée à 17 h. Cela, afin de préserver son autorité sur son équipe.
[116] Le matin du 13 mars 2018, la plaignante envoie un courriel à la chef des ressources humaines pour l’informer qu’elle ne retournera pas au travail comme demandé, le tout selon les directives de sa médecin traitante. Cette dernière lui envoie un autre certificat prescrivant un arrêt de travail complet jusqu’au 15 avril 2018.
[117] Le 6 avril 2018, la chef de la division des relations du travail écrit à la plaignante que ce certificat médical n’est pas conforme à la politique de la Ville puisqu’il ne comporte aucun diagnostic ni information sur des limitations fonctionnelles. Elle annexe à sa lettre une copie de la note de service envoyée à tous les employés de la Ville en 2016 faisant état de cette politique. Elle lui demande de fournir un certificat médical conforme dans un délai de cinq jours ouvrables, à défaut de quoi ses prestations d’assurance invalidité seront suspendues.
[118] À l’audience, la plaignante affirmera que c’est la première fois que la Ville l’informe que ses certificats médicaux sont incomplets. Or, cette affirmation est contredite par la preuve documentaire. Comme mentionné précédemment, la plaignante a déjà reçu deux lettres en ce sens de Morneau Sheppel.
[119] En outre, même après avoir reçu cette précision le 6 avril, la plaignante continue de communiquer des certificats médicaux non conformes à la note de service. Ainsi, le 10 avril, elle remet un autre certificat médical prolongeant son arrêt de travail jusqu’au 14 mai « pour raison médicale », encore une fois sans précision.
[120] C’est d’ailleurs en raison de l’insuffisance des documents médicaux communiqués que la Ville décide de la convoquer à une expertise médicale pour obtenir les précisions suivantes : diagnostic, nature, suffisance et nécessité des soins, capacité à reprendre son travail, existence de limitations fonctionnelles et pronostic pour un retour au travail.
[121] Le 7 mai, la Ville lui écrit que l’omnipraticienne qui a réalisé l’expertise l’estime apte à retourner travailler sans limitations fonctionnelles. Elle l’informe autoriser un retour progressif en ces termes :
Toutefois, afin de faciliter votre retour au travail et compte tenu de l’évaluation faite par la médecin, laquelle indique que vous avez des traits de personnalité rigides, votre retour au travail s’effectuera progressivement à compter du mercredi 9 mai 2018. À la recommandation du médecin, votre retour au travail s’établira comme suit :
[…]
Ce retour progressif vous permettra de vous absenter afin d’effectuer un suivi thérapeutique tel que recommandé par la Dre Van Dyke. À ce titre, vous devrez nous fournir les preuves de consultation hebdomadaire afin de justifier vos absences.
[122] La plaignante estime que ce retour au travail forcé, contre l’avis de son médecin, est une autre manifestation de harcèlement. Elle ajoute que l’omnipraticienne mandatée par la Ville ne l’a examinée qu’une heure et que son rapport d’expertise contient des conclusions biaisées qui la discréditent. Cela constitue du harcèlement, dit-elle.
[123] Ces prétentions ne sont pas retenues.
[124] D’une part, la Ville était dans son droit de demander une expertise médicale puisque les certificats médicaux fournis par la plaignante ne contenaient pas les renseignements requis pour justifier son absence. Cette dernière devait le savoir, étant une cadre ayant eu à gérer des absences pour cause de maladie de ses subalternes dans le passé.
[125] D’autre part, il faut garder à l’esprit que l’omnipraticienne mandatée par la Ville est un médecin soumis à un code de déontologie strict. L’on ne saurait présumer que ses conclusions sont biaisées du seul fait qu’elles ne sont pas en accord avec celles du médecin traitant de la plaignante.
[126] Le 9 mai 2018, la plaignante tente un autre retour au travail progressif conformément aux recommandations du médecin de la Ville.
[127] La directrice adjointe lui remet alors un plan de rendement. Rédigé sous la forme de questions-réponses, il indique « la capacité de produire des actions et des réactions adaptées à un milieu professionnel » à la question : « Que veut-on modifier? ». On y lit que la Ville veut observer chez la plaignante de l’écoute active pour être en mesure de comprendre les points de vue de chacun et faire avancer le travail, de l’adaptabilité pour faire face aux imprévus de manière proactive et trouver les meilleures solutions, du soutien aux membres de son équipe, de la consultation pour favoriser la collaboration, ainsi que de la délégation pour responsabiliser et maintenir leur intérêt. Le document explique dans quel contexte ces comportements sont attendus et contient plusieurs exemples de comportements jugés efficaces et ceux qui sont inappropriés.
[128] Le plan comporte un calendrier de réintégration pour son retour au travail. Détaillé, il prévoit des rencontres avec les directions des ressources humaines et de la LCVC, des tâches de lecture, de prise de connaissance des nouvelles politiques, de mise à jour de sa boîte de courriel, d’archivage, de planification pour des rencontres à venir avec son équipe de travail et de préparation d’un plan d’action pour sa division. Il présente les principaux dossiers en cours de la plaignante, en précisant le responsable de chacun.
[129] Enfin, il contient deux pages sur les ajustements requis à ses méthodes de travail, incluant un rappel de la politique de l’usage de la copie conforme, suivie d’une section sur l’accompagnement de la plaignante et son évaluation par la directrice adjointe. À cette fin, il prévoit notamment des rencontres statutaires hebdomadaires entre les deux, ainsi que la présence de la directrice adjointe aux premières réunions de la plaignante avec ses superviseurs ou avec son équipe.
[130] Au cours de la journée, la plaignante craque au travail. Elle déplore l’accueil de la directrice adjointe, estimant qu’elle adopte un ton directif à son égard et a des attentes trop élevées, compte tenu du fait qu’elle revient au travail alors que son médecin traitant l’estime inapte. La directrice adjointe lui rappelle qu’elle a en main une expertise médicale concluant qu’elle est apte au travail. Néanmoins, elle lui permet de rester chez elle pour le restant de la semaine afin de se reposer et l’attend le mardi suivant.
[131] La semaine suivante, la directrice adjointe assiste à une rencontre que la plaignante tient avec ses deux employées superviseures. La rencontre ne se passe pas bien. La plaignante interrompt rapidement une présentation d’une superviseure sur un budget qu’elle a préparé en lui disant qu’il n’est pas confectionné selon la bonne méthode. Cette dernière se met à pleurer et la directrice adjointe intervient pour la soutenir. Elle indique que la méthode utilisée est adéquate, car elle mène au même résultat. Elle demande aux superviseures de s'en aller.
[132] La plaignante blâme sa supérieure de l’avoir interrompue devant ses employés, elle trouve cela inacceptable. La directrice adjointe lui répond qu’elle a agi exactement comme la Ville le lui reproche depuis plusieurs mois : elle critique d’emblée les autres sans leur permettre de s’expliquer, de prendre leur place et leurs responsabilités. Elle lui rappelle que ses deux employées sont des cadres et non de simples exécutantes.
[133] Cette semaine-là, la plaignante retourne à sa clinique et un médecin lui diagnostique une aggravation de ses symptômes, un début de dépression majeure et lui prescrit un arrêt de travail complet. Il remplit un formulaire de réclamation pour lésion professionnelle à la CNESST, que la plaignante fait suivre à la Ville. Cette réclamation sera refusée au début de l’été.
[134] Le 28 mai 2018, la chef de la division des relations du travail écrit à la plaignante que trois séances de psychothérapie ont été ajoutées à son PAE et lui rappelle qu’elle bénéficie aussi d’une couverture à ce sujet en vertu du régime d’assurance collective.
[135] Le 29 mai, Desjardins Assurances, qui assure le salaire pour des absences de longue durée des employés de la Ville, refuse d’indemniser la plaignante au motif que les renseignements dans son dossier ne démontrent pas qu’elle est totalement incapable de faire son travail.
[136] Le 30 mai, la chef de la division des relations du travail écrit à la plaignante que conformément à l’expertise réalisée, la Ville considère son absence injustifiée et qu’elle est en droit de lui demander de revenir au travail. Toutefois, pour des raisons administratives et afin de lui permettre de prendre conscience de la problématique, la Ville lui permet de prendre un congé sans solde de six semaines. Elle ajoute :
Nous profitons de l’occasion pour vous mentionner que votre dernier retour au travail n’a pas été fait de manière satisfaisante et que votre comportement lors de ce retour ne fut pas acceptable. Vous devez vous prendre en main et adapter votre approche auprès de vos collègues de travail. Nous avons été à même de constater durant la courte période de votre retour que vous n’avez pas d’écoute et que vous manquez d’ouverture envers les autres. Votre intransigeance ternit le climat travail et nous avons beaucoup de difficultés à composer avec celle-ci.
Nous comprenons que cette situation soit difficile pour vous et que vous appréhendez la suite des choses. Nous aimerions cependant vous indiquer que l’objectif de l’employeur est de vous permettre, ainsi que tous les employés, d’évoluer dans un milieu de travail agréable et performant. Nos interventions n’ont rien de personnel, mais visent plutôt l’atteinte de cet objectif.
[137] Au terme de ces six semaines, la Ville souhaite faire évaluer la plaignante pour obtenir une seconde expertise médicale. Le 30 août 2018, la plaignante revoit donc la médecin à cette fin. Celle-ci la déclare alors inapte à retourner au travail pour une période indéterminée. Par conséquent, la Ville accepte de prolonger son congé de maladie.
[138] Malgré cela, Desjardins Assurances maintient sa décision de refuser d’indemniser la plaignante. Elle estime qu’aucun nouvel élément ne permet de conclure qu’elle présente une invalidité totale relativement à son emploi de chef de division logistique.
[139] Dans les jours qui suivent, la plaignante informe la Ville qu’elle retournera au travail le 2 novembre suivant. Elle communiquera ensuite un certificat médical de sa médecin traitante lui prescrivant un retour progressif à compter de cette date. Finalement, elle ne retournera au travail qu’en décembre, la Ville l’obligeant d’abord à vider sa banque de vacances, soit 26 jours.
[140] À ce sujet, la plaignante estime aussi vexatoire que la Ville lui impose de prendre ses vacances ainsi. Or, la preuve révèle qu’il s’agit d’une politique en vigueur à la Ville qui s’applique à tous ses employés.
[141] La chef de la division des relations du travail envoie à la plaignante un horaire de travail pour un retour progressif allant du 9 décembre 2018 au 20 janvier 2019, comme prescrit par sa médecin traitante. Elle lui précise qu’au matin de sa première journée, le 11 décembre, elle rencontrera la directrice adjointe ainsi que le directeur des ressources humaines. Elle annexe aussi à son courriel le nouvel organigramme de la LCVC, qui a encore une fois subi quelques changements.
[142] La rencontre du 11 décembre a lieu comme prévu. La directrice adjointe remet à la plaignante un « plan de réintégration au travail ». Celui-ci reprend essentiellement les éléments du plan qui lui avait été remis en mars précédent, à ceci près que le calendrier de réintégration est moins détaillé. Il précise quels seront ses principaux mandats et leur échéancier respectif. Il contient en outre un rappel relativement à la politique d’usage de la copie conforme et prévoit que les semaines 2, 3 et 4 seront consacrées exclusivement à l’appropriation des nouvelles pratiques de la LCVC. On indique par ailleurs à la plaignante que ses employées superviseures relèveront de la directrice adjointe pour le moment, afin de lui permettre de réintégrer le travail en douceur.
[143] La plaignante n’est pas de bonne humeur. Elle explique à l’audience que ce plan est une autre manifestation de harcèlement. À quelques reprises, elle l’appellera d’ailleurs un « plan de redressement ».
[144] La plaignante relève toujours de la directrice adjointe. Toutefois, comme la directrice adjointe le lui avait mentionné lors de sa tentative de retour au travail en mai, on lui a notamment ajouté la supervision des brigadiers. Elle est toujours la supérieure immédiate de superviseurs, maintenant au nombre de trois, eux-mêmes responsables de quelque 50 salariés régis par une convention collective. Il est cependant prévu que pour les premières semaines, elle n’assume pas ses responsabilités de gestion du personnel le temps de se remettre en selle, cela afin de mettre toutes les chances de réussite de son côté et de diminuer temporairement sa charge de travail. La directrice adjointe s’en occupera et elles feront le point en temps opportun.
[145] En janvier 2019, la directrice adjointe est promue officiellement directrice de la LCVC. Elle demeure toujours, pour le moment, la supérieure de la plaignante. Elle lui fixe des rencontres statutaires hebdomadaires pour faire le suivi de ses dossiers et de son plan de réintégration au travail.
[146] Une rencontre a lieu le 17 janvier. À la plaignante, qui lui dit être inconfortable du fait qu’elle assiste à ses rencontres d’équipe, la directrice répond vouloir être rassurée sur son plan de match avant qu’elle ne reprenne ses pleines fonctions et entre en relation de manière constructive avec son équipe.
[147] La directrice adjointe[15] rappelle aussi à la plaignante la directive relativement à l’usage de la copie conforme dans les communications ainsi que l’importance de respecter la hiérarchie.
[148] Au sujet de cette directive, la plaignante dira à l’audience qu’elle est contraire à une formation reçue pour devenir une gestionnaire efficace. Autrement dit, elle amoindrit son geste de ne pas la respecter par sa propre vision qu’elle n’est pas appropriée. Cela démontre son désaccord avec la directive ainsi que son manque de volonté à la suivre. Peu importe sa motivation, elle commet une insubordination en ne la respectant pas.
[149] La plaignante et la directrice adjointe se rencontrent à nouveau le 22 janvier. Celle-ci l’informe avoir constaté ne pas toujours être en copie des courriels qu’elle envoie à ses employés superviseurs, incluant des demandes de suivi. Or, il avait été convenu que ceux-ci relèveraient de la directrice adjointe pour le moment, le temps que la plaignante soit bien en selle. Elle souligne lui avoir rappelé à de nombreuses reprises la règle du Cc, s’attend à ce qu’elle la respecte et ne tolèrera aucun autre écart à ce sujet.
[150] La plaignante lui répond qu’elle ne croyait pas nécessaire de la mettre en copie sur tous ses courriels et ajoute avoir des difficultés de concentration, ce qui l’amène à oublier parfois.
[151] La directrice adjointe lui propose alors de placer un « post it » sur son écran d’ordinateur pour ne pas l’oublier.
[152] La plaignante s’estime infantilisée par cette suggestion et y voit une autre conduite vexatoire de la part de sa supérieure. D’autant plus que son ancien supérieur, le directeur adjoint, assiste en partie à cette rencontre. Elle s’explique difficilement sa présence, puisqu’elle le vise dans sa première plainte de harcèlement psychologique déposée en mars 2018.
[153] La directrice adjointe justifie la présence de ce directeur adjoint par son souhait qu’un témoin assiste à ses rencontres avec la plaignante. Il aurait toutefois été plus avisé de le demander à quelqu’un d’autre dans les circonstances. Toutefois, cet incident est isolé et ne s’est pas répété ensuite.
[154] Au cours de cette rencontre, la plaignante propose à la directrice adjointe de recourir au service des ressources humaines et d’un expert pour les aider à mieux travailler ensemble et se comprendre. Celle-ci lui dit que cette démarche pourrait éventuellement être intéressante, mais estime qu’elles peuvent d’abord travailler à des pistes de solution entre elles.
[155] La directrice adjointe réitère à la plaignante que ses compétences sont précieuses, mais que le savoir-être l’est tout autant. Elle ne réduira pas ses attentes à cet égard au profit de la seule performance. Elle lui indique compter sur elle pour adapter ses comportements à ceux attendus.
[156] Après cette rencontre, la directrice adjointe lui envoie un courriel récapitulatif de celle-ci ainsi que de celle du 17 janvier précédent. Elle termine en écrivant reconnaître sa compétence, mais insiste sur l’importance qu’elle accorde au respect des directives pour le bon fonctionnement de l’équipe et de l’organisation. Elle annexe également à son courriel les plans de réintégration et de rendement qui lui ont été remis en 2018.
[157] La plaignante estime que ces deux plans constituent une manifestation de harcèlement psychologique. Or, la preuve révèle qu’il est d’usage à la Ville de remettre des plans de réintégration aux employés qui reviennent de congé de maladie ou de maternité. Ils visent à faciliter le retour au travail après une longue absence. En outre, dans le cas de la plaignante, ils s’inscrivent aussi dans un processus disciplinaire entrepris avant son absence et dans un contexte où celle-ci semble avoir de la difficulté à comprendre ou réaliser ce que la Ville lui reproche.
[158] Dans les circonstances, la remise de ces plans ne peut constituer une conduite vexatoire au sens de la LNT.
[159] Le 1er mars 2019, la plaignante exprime à la directrice adjointe qu’elle trouve difficile la gestion de son dossier d’invalidité faite par le service des ressources humaines au cours de la dernière année.
[160] À l’audience, elle dira que cette gestion constitue une manifestation de harcèlement psychologique.
[161] La difficulté à se faire indemniser pendant son absence a certainement affecté la plaignante. Toutefois, c’est elle qui a persisté à ne pas fournir les renseignements médicaux suffisants requis par la politique en vigueur à la Ville. Celle-ci était en droit de lui demander de respecter cette politique, commune à tous ses employés, qui s’explique notamment du fait que la Ville agit comme « auto-assureur » pour la couverture d’invalidité de courte durée. En le faisant, elle n’a pas agi de manière déraisonnable. On ne peut y voir là un comportement harcelant.
[162] Quant à la gestion de la couverture d’assurance invalidité de longue durée, c’est Desjardins Assurances, une tierce personne, qui l’assure. On ne peut reprocher à la Ville les décisions prises par celle-ci sur la base des informations médicales que la plaignante doit lui fournir.
[163] Le 26 février 2019, la directrice adjointe transmet par courriel à la plaignante les modalités de retour au travail d’un de ses employés superviseurs qui était absent pour cause de maladie. Elles en discutent aussi le lendemain matin. La planification de ce retour est importante, car il y a eu des tensions entre ce dernier et des membres de l’équipe avant son départ.
[164] Les directives sont claires. La plaignante doit informer dès le lendemain les employés de sa division du retour de ce superviseur, compléter la réflexion sur le partage des tâches avec les deux autres superviseurs, produire un tableau sur ce partage et organiser des rencontres d’équipes les 6 et 8 mars pour en discuter, dont une avec le superviseur qui revient.
[165] Or, la plaignante ne s’y conforme pas. Aucune division des tâches n’est discutée et aucune rencontre d’équipe avec ce dernier n’est planifiée. Le 5 mars, lors de la rencontre d’équipe, les employés ne savent toujours pas que le superviseur revient le lendemain. La directrice adjointe lui rappelle ses demandes et la plaignante répond en évoquant plusieurs motifs pour justifier pourquoi elle n’y a pas donné suite.
[166] La directrice adjointe met fin à la rencontre. Elle en discute ensuite seule avec la plaignante, soulignant que le fait qu’elle remette en question ses demandes et argumente avec elle devant les employés est un comportement qui ne correspond pas du tout à ses attentes. Elle ajoute trouver difficile, voire épuisant, de devoir toujours argumenter avec elle au sujet du respect des politiques et directives.
[167] Pour sa part, la plaignante l’informe de son inconfort à ce qu’elle assiste toujours aux rencontres statutaires avec son équipe et qu’elle souhaiterait les mener seule. Bien qu’elle estime fragile le lien de confiance entre les deux, la directrice adjointe acquiesce à sa demande.
[168] À l’audience, la plaignante relate s’être sentie humiliée devant son équipe lorsque sa supérieure est intervenue pour mettre fin à la rencontre. Elle affirme que cette dernière n’a pas voulu écouter ses explications et lui aurait crié devant son équipe : « Ferme-là! »
[169] Cette affirmation semble encore une fois être un souvenir déformé par la plaignante qui craint d’être prise en défaut. Elle est contredite par le témoignage des deux superviseures qui ont assisté à la rencontre du 5 mars. Celles-ci ont reconnu que la rencontre était tendue, mais n’ont aucun souvenir que la directrice adjointe a manqué de respect à l’endroit de la plaignante. Elles déclarent que celle-ci est exigeante, mais juste, articulée et toujours en contrôle.
[170] Le 7 mars suivant, la plaignante écrit un courriel à un chef de division à la direction des travaux publics, pour l’informer du suivi qu’elle a fait à l’égard d’un incident impliquant un employé de sa division et un de la sienne. La directrice adjointe et ses trois employés superviseurs sont en copie de son courriel, qu’elle termine ainsi :
J’aimerais également porter à votre attention le délai prévu à la convention collective. Nous avons 10 jours pour émettre un avis disciplinaire à un employé col bleu. L’événement a eu lieu le 6 février et nous avons reçu l’info le 18 février (art. 29.02) le fardeau nous incombe après les dix jours. Il est important pour nous soutenir dans notre investigation de signaler très rapidement la problématique afin que nous puissions faire le suivi nécessaire dans les délais requis.
[171] Le chef de division est mécontent de recevoir un tel courriel, qu’il qualifie de directif, dans lequel quatre ressources dont trois paliers de gestion sont en copie. Il s’en plaint à la directrice adjointe.
[172] Celle-ci intervient alors auprès de la plaignante. Elle lui rappelle que les relations sont tendues entre la direction des travaux publics et la LCVC. Par ailleurs, elle lui souligne qu’il n’était pas approprié de mettre les subalternes en copie d’un courriel de ce type destiné à leur supérieur.
[173] La plaignante justifie son geste par la nécessité « d’éduquer » ce cadre dont l’équipe est appelée à travailler régulièrement avec la sienne, afin de pouvoir intervenir lorsque requis. Encore ici, elle s’attarde sur le motif de son geste plutôt que sur la manière dont elle le pose.
[174] Toujours le 7 mars 2019, la directrice adjointe envoie un courriel à la plaignante pour faire un retour sur les événements de la semaine et lui rappeler ses attentes. Elle lui rappelle les interventions de la Ville à l’égard de sa collaboration et de sa capacité à respecter les directives. Elle indique avoir dû intervenir à quelques reprises depuis son retour au travail en décembre dernier pour le lui rappeler et ajoute :
En terminant, je tiens à te partager que je perçois définitivement ta volonté d’adopter une attitude positive au travail, mais malheureusement les décisions qui accompagnent cette attitude ne sont pas en concordance. Il te semble particulièrement difficile de mettre de côté tes opinions et idées pour le bénéfice des directives de la direction et/ou de l’organisation.
Je te recommande donc à nouveau de te référer à des outils que tu possèdes dont notamment ton Plan de réintégration remis le 10 décembre dernier et qui traite particulièrement des comportements attendus par des exemples de comportements appropriés et inappropriés.
[175] Puis, elle termine son courriel en énumérant des exemples de comportements inappropriés. Ces exemples ne sont toutefois pas nécessairement factuels, mais relèvent davantage d’énoncés conceptuels ou de conclusions liés aux conséquences de son comportement :
[176] La plaignante répètera plusieurs fois dans son témoignage qu’elle ne comprend pas quels sont, en pratique, les comportements que la Ville veut qu’elle change. Ce que le Tribunal en comprend, c’est qu’elle aurait souhaité avoir des exemples de comportements reprochés consistant en des faits concrets qui se sont produits et des explications sur comment la Ville aurait préféré la voir agir autrement.
[177] Pourtant, la preuve révèle que la Ville les lui a expliqués abondamment. Elle lui a donné moult exemples et rappels. Il est possible que la plaignante n’en ait pas compris la portée, car elle s’arrête à justifier la raison de ses interventions plutôt que de s’interroger sur la manière dont elle intervient. Cela étant, la Ville n’avait pas à lui réitérer indéfiniment les attentes qu’elle avait à son endroit.
[178] Le 27 mars 2019, une élue envoie une requête pour obtenir de l’information sur le pickleball. À la demande de la directrice adjointe, la plaignante rédige un projet de réponse qu’elle lui envoie pour approbation. Celle-ci le lui retourne le lendemain avec ses corrections.
[179] Le 3 avril, l’élue demande à la directrice adjointe où en est sa requête, car elle n’a pas reçu de réponse. Cette dernière lui promet une réponse pour le lendemain. Elle fait immédiatement un suivi auprès de la plaignante pour savoir ce qu’il en est.
[180] Le lendemain matin, celle-ci lui répond avoir « retransmis » la réponse à l’adresse courriel « services brossard ».
[181] La directrice adjointe comprend de cette réponse que la réponse avait été transmise une première fois et demande à la plaignante de la lui faire suivre pour vérifier ce qui s’est passé.
[182] Dans l’heure qui suit, la plaignante lui écrit croire que la réponse n’avait pas été envoyée à la bonne adresse courriel. Sa supérieure lui rappelle que les requêtes, et particulièrement celles des élus, doivent être traitées avec rigueur et dans un maximum de 48 heures pour un accusé de réception.
[183] En après-midi, la directrice adjointe revient sur le sujet lors d’une rencontre avec une nouvelle directrice adjointe et la plaignante. Cette dernière explique ne pas se souvenir si elle a envoyé ou non la réponse une première fois à l’élue le 28 mars. Elle pensait l’avoir peut-être fait, mais s’est rendu compte ce matin qu’elle ne l’avait pas envoyée immédiatement, pour ensuite le faire à la mauvaise adresse, soit celle de « services brossard » au lieu de « élus brossard ».
[184] Le 10 avril, l’élue écrit à la directrice adjointe qu’elle n’a toujours pas reçu de réponse à sa requête. La directrice reçoit son courriel pendant qu’elle est en rencontre avec la nouvelle directrice adjointe et la plaignante. Elle interroge cette dernière, qui lui affirme l’avoir fait. Elle lui demande de lui montrer le courriel envoyé à ce sujet.
[185] La plaignante trouve seulement son courriel envoyé à la mauvaise adresse, mais confirme l’avoir envoyé aussi à la bonne adresse. Devant l’insistance de sa supérieure qui veut voir le courriel, elle retourne faire des vérifications. Puis, elle revient l’informer qu’elle ne pense pas finalement l’avoir envoyé à la bonne adresse. Elle s’en excuse.
[186] Le même jour, la Ville remet à la plaignante une lettre l’informant qu’elle est suspendue avec traitement pour fins d’enquête pour une durée initiale d’une semaine.
[187] Le 16 avril, le conseil municipal adopte une résolution pour mettre fin à l’emploi de la plaignante. Le lendemain, la directrice lui remet une lettre le lui annonçant, en précisant que « suivant les événements survenus en début avril, [son] comportement et [son] manque de rigueur ne changent pas malgré les multiples avis verbaux et écrits [qu’elle lui a] donnés ». Elle ajoute que l’organisation ne peut tout simplement plus composer avec son manque de leadership, son attitude négative, ses insubordinations et sa propension à remettre en question les directives de ses supérieurs.
[188] La lettre résume le processus disciplinaire entrepris depuis décembre 2017, puis réfère aux faits qui lui sont reprochés par la directrice adjointe lors de leurs rencontres et rappelés dans les courriels de suivi des 17, 22 janvier et 7 mars 2019. Elle indique que les événements entourant la requête de l’élue sur le pickleball sont venus à bout du peu de patience et de confiance qui lui restait envers elle et ont rompu le lien de confiance fragilisé par les incidents des derniers mois.
[189] La lettre précise que la Ville a été patiente et lui a donné plusieurs occasions pour qu’elle amende son comportement, en vain. Elle ne semble pas prendre conscience de la problématique, soit en minimisant ses erreurs ou en adoptant une attitude de confrontation. La directrice adjointe écrit aussi :
La gestion de votre dossier d’employé est devenue pour la soussignée un élément de stress permanent nous poussant constamment dans nos derniers retranchements. Nous constatons que votre présence dans notre service compromet la délivrance d’un service de qualité à la Ville et le fait que vous donniez de fausses informations ne nous permet pas de répondre adéquatement aux attentes. […]
[190] La plaignante invite le Tribunal à conclure que, considérées globalement, les conduites du directeur adjoint et de la directrice adjointe devenue directrice constituent des conduites vexatoires hostiles et non désirées. Il en est de même des conduites des gestionnaires de la Ville en lien avec la gestion du dossier d’invalidité de la plaignante.
[191] Il est vrai que l’analyse globale est l’approche appropriée dans l’analyse des allégations de conduites vexatoires. Une conduite isolée peut en effet ne pas revêtir un caractère vexatoire, alors qu’elle le devient lorsque replacée dans son contexte parmi plusieurs autres conduites.
[192] Cependant, même en analysant globalement les conduites dénoncées par la plaignante dans le cas présent, il n’en ressort pas un caractère vexatoire au sens de l’article 81.18 de la LNT.
[193] Certains propos tenus par les directeurs adjoints ont certes été durs et parfois teintés d’impatience pour la plaignante, une personne visiblement perfectionniste et minutieuse qui n’aime pas être prise en défaut. Néanmoins, ils s’expliquent dans un contexte d’encadrement d’une employée qui remet constamment en question leurs directives.
[194] Si la Ville est intervenue à plusieurs reprises auprès de la plaignante pour l’encadrer, ce n’est pas pour abuser de son autorité comme le prétend cette dernière, mais davantage pour s’acquitter de son obligation de souligner à la plaignante ses lacunes et lui faire réaliser l’importance et l’urgence de se corriger.
[195] Comme le rappelle la CRT dans l’affaire Huot c. Brossard (Ville de)[16] :
[60] En outre, il faut aussi prendre en considération que les dispositions sur le harcèlement psychologique n’ont pas pour effet de faire perdre à l’employeur son droit de gérance, c’est-à-dire son droit d’imposer des mesures disciplinaires pour des motifs valables ou d’obliger le salarié à satisfaire à des exigences propres à la nature de ses fonctions.
[61] Ce qui nous intéresse plus particulièrement ici c’est de savoir si la Ville a abusé de son pouvoir envers le plaignant. Dans son ouvrage L’abus d’autorité au travail : une forme de harcèlement, Éditions Carswell, 2000, l’auteur Jean-Maurice CANTIN affirme que le concept d’abus d’autorité peut être défini en fonction des caractéristiques suivantes :
- un exercice de l’autorité;
- un exercice de façon indue;
- une conduite qu’une personne sait ou aurait dû savoir importune;
- une intention de compromettre l’emploi d’un employé, de nuire à son rendement au travail, de mettre son moyen de subsistance en danger ou de s’ingérer de quelque façon que ce soit dans sa carrière.
[62] En l’espèce, la Ville pourra avoir abusé de son autorité si les décisions prises par le directeur général à l’endroit du plaignant sont injustifiables. Elles le seront notamment si les faits à la base de ces décisions sont faux, exagérés ou inexistants.
[196] Dans le cas présent, la preuve convainc que la Ville a encadré la plaignante dans les limites de son droit de direction, cela ne saurait donc constituer du harcèlement psychologique. Elle n’a pas agi de manière abusive, arbitraire, déraisonnable ou discriminatoire de manière telle qu’une personne raisonnable aurait pu y voir une conduite vexatoire[17].
[197] Par conséquent, il y a lieu de conclure que la plaignante ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver avoir subi du harcèlement psychologique. Ses deux plaintes à ce sujet doivent donc être rejetées.
C- La suspension de cinq jours imposée à la plaignante en mars 2018 constitue‑t‑elle une mesure de représailles en raison de son absence pour cause de maladie?
[198] La preuve convainc le Tribunal que la suspension de cinq jours imposée à la plaignante en mars 2018 n’a aucun lien avec son absence pour cause de maladie.
[199] Rappelons que l’article 122 de la LNT interdit à un employeur de congédier une personne salariée parce qu’elle a exercé un droit qui résulte de cette loi.
[200] Lorsqu’il est prouvé ou admis que la personne ayant déposé une plainte est salariée au sens de la LNT, qu’elle a exercé un droit qui lui résulte de cette loi et que l’employeur lui a imposé une sanction ou l’a congédiée de manière concomitante, elle est présumée avoir fait l’objet d’une pratique interdite au sens de cette loi[18].
[201] Le bénéfice de la présomption de pratique interdite renverse le fardeau de la preuve en faveur de la personne salariée. La motivation illicite de l’employeur dans l’imposition de la sanction est présumée et celui-ci a alors le fardeau de prouver une autre cause juste et suffisante, c’est-à-dire une cause véritable, sérieuse par opposition à un prétexte, complètement étrangère à l’exercice du droit protégé par la LNT[19].
[202] Les faits entourant l’imposition de la suspension de cinq jours à la plaignante sont relatés dans l’analyse de la question précédente. Il convient de s’y référer.
[203] La lettre annonçant à la plaignante cette suspension comporte trois reproches, à savoir : son comportement lors de la rencontre du 21 décembre concernant la brochure culturelle, le non-respect de la directive du Cc et de celle de communiquer de chef à chef, en référence à l’incident où elle a appelé un employé des travaux publics plutôt que son supérieur, le chef de cette division.
[204] Comme expliqué précédemment, l’employeur a démontré de manière prépondérante la survenance de ces fautes. Il ne fait aucun doute qu’elles sont l’unique cause de la suspension imposée à la plaignante et que l’absence pour cause de maladie de cette dernière est complètement étrangère à l’imposition de la mesure.
[205] En effet, la suspension survient dans une continuité de mesures disciplinaires imposées à la plaignante afin qu’elle comprenne les comportements qui lui sont reprochés et qu’elle s’amende. L’employeur a commencé un suivi étroit dès 2017 en lui rappelant ses attentes au niveau de son comportement. La Ville lui a mentionné plusieurs fois que certains de ses comportements avaient des répercussions négatives sur le climat de travail et sur l’image de la LCVC et que cela devait changer. Or, la problématique persiste.
[206] La Ville explique avoir attendu la fin de l’absence maladie de la plaignante pour lui imposer la mesure et l’avoir fait en continuité avec cette absence pour ne pas entacher son leadership auprès de ses employés. Cette explication est probable et écarte tout soupçon de représailles quant au moment de l’imposition de la mesure.
[207] Par ailleurs, le fait que la plaignante se soit absentée pour cause de maladie en cours de processus n’oblige pas la Ville à cesser celui-ci déjà entrepris et à le reprendre à zéro. Comme le rappelle le Tribunal dans l’affaire Laplume[20] :
[151] À l’instar de la décision rendue dans Rabbath c. La Société des Casinos du Québec inc., le Tribunal retient que dans un tel cas « l’exercice d’un droit prévu par la LNT ne devrait pas conférer une immunité à un salarié à l’égard d’une action que l’employeur pourrait prendre à titre de mesure disciplinaire pour réprimer un manquement. L’employeur ne doit pas, et ne devrait pas, agir différemment suivant que le salarié exerce ou non un droit ».
[Note omise]
[208] La plaignante prétend que l’admission de la directrice adjointe d’avoir été irritée en trouvant son premier certificat médical sur son bureau à son retour du congé des fêtes en janvier 2018 tend à confirmer que la Ville lui a imposé sa suspension en représailles de son absence pour cause de maladie.
[209] Cette prétention n’est pas retenue. En effet, la directrice adjointe a plutôt déclaré avoir été irritée par le fait que la plaignante a assumé la garde des fêtes alors que le 22 décembre, son médecin lui prescrivait un arrêt de travail postdaté au 2 janvier. De plus, en remettant son certificat médical sur son bureau plutôt que de communiquer avec la direction des ressources humaines, la plaignante ne respectait pas la procédure en place pour les absences pour cause de maladie. Ainsi, ce n’est pas l’exercice du droit de la plaignante qui l’irrite, mais plutôt le non-respect des consignes en place.
[210] Ainsi, la Ville satisfait son fardeau de prouver que l’imposition de la suspension à la plaignante le 5 mars 2018 procède d’une autre cause juste et suffisante qui n’a rien à voir avec son absence pour cause de maladie. La première plainte pour pratique interdite doit donc être rejetée.
[211] L’employeur a démontré que la destitution de la plaignante n’a aucun lien avec les plaintes qu’elle a déposées l’année précédente.
[212] En effet, la destitution constitue l’aboutissement du processus disciplinaire entrepris en 2017 et interrompu pendant le congé de maladie.
[213] Les faits entraînant la destitution sont relatés dans l’analyse des prétentions de harcèlement psychologique à la seconde question. Il convient de s’y référer.
[214] D’emblée, la Ville souligne qu’il ne semble pas y avoir concomitance entre l’exercice du droit allégué par la plaignante et la destitution. Plus d’une année s’est écoulée entre le dépôt de sa première série de plaintes. De plus, le fait qu’il devait y avoir une médiation à la CNESST « quelque part en hiver » ne permet pas de conclure comme l’invite la plaignante.
[215] La plaignante conteste cette position, soulignant que la Ville a admis les conditions d’application de la présomption en début d’audience et ne peut donc pas y revenir dans sa plaidoirie.
[216] Effectivement, ce revirement de position pose problème dans la mesure où la plaignante a administré une preuve en tenant compte des admissions faites par la Ville en début d’audience. Toutefois, cet argument est somme toute théorique, car la preuve convainc le Tribunal que la destitution est imposée à la plaignante sans lien avec un quelconque exercice de droit qui lui résulte de la LNT.
[217] Comme expliqué précédemment, la Ville a entrepris un processus disciplinaire depuis plusieurs mois auprès de la plaignante. Il a été interrompu pendant son absence pour cause de maladie, mais s’est poursuivi à son retour. Or, la preuve révèle que celle-ci a continué d’avoir des comportements problématiques qui font l’objet de ce suivi.
[218] Pour la Ville, l’histoire de la réponse à la requête de l’élue sur le pickleball constitue l’incident culminant qui a rompu le lien de confiance entre elle et la plaignante. Son manque de rigueur à cet égard et son attitude à la rencontre du 10 avril ne s’expliquent pas dans un tel dossier, pas plus que les explications contradictoires qu’elle donne à sa supérieure pour répondre à ses questions.
[219] Cette prétention est vraisemblable, justifiée et soutenue par la preuve. Peu importe sa motivation, la plaignante a trompé sa supérieure sur le suivi de sa demande, et ce, à plus d’une reprise cette semaine-là. Conséquemment, cette dernière s’est compromise deux fois plutôt qu’une devant une élue. Dans les circonstances, un tel comportement, survenant après ceux persistants qui lui sont reprochés depuis plusieurs mois, s’avère être la goutte qui a fait déborder le vase.
[220] À l’audience, la plaignante dira aussi que lorsqu’elle se plaint à sa supérieure de la gestion de son dossier d’invalidité par la direction des ressources humaines, celle-ci lui aurait alors déclaré : « On ne mord pas la main qui nous nourrit » et lui aurait demandé d’admettre ses torts auprès des employés des ressources humaines et de s’excuser. Elle aurait en outre ajouté : « Ça serait dommage que ça finisse par un congédiement. »
[221] La directrice adjointe nie avoir tenu de tels propos, indiquant plutôt l’avoir encouragée à aller en parler auprès des personnes concernées aux ressources humaines pour en discuter.
[222] Avec égards, le Tribunal ne retient pas la version de la plaignante sur cette conversation. Il est bien plus probable qu’ici encore, elle ait interprété la réponse de sa supérieure à travers le prisme de sa conviction profonde qu’elle est une victime. Le témoignage de la directrice adjointe rapporte une version plus crédible et vraisemblable à la lumière des faits prouvés et de ce que le Tribunal a observé à l’audience.
[223] La Ville satisfait son fardeau de prouver qu’elle a destitué la plaignante pour une cause juste et suffisante qui n’a rien à voir avec l’exercice de droit qui lui résultent de la LNT. La seconde plainte pour pratique interdite doit donc aussi être rejetée.
[224] Contrairement à la prétention de la plaignante, la preuve révèle que sa destitution en avril 2019 était justifiée dans le cadre d’une saine administration de la justice.
[225] Rappelons que le recours prévu à l’article 72 de la LCV pour contester une destitution existe pour contrer celles qui sont arbitraires ou dictées par des motifs politiques. Pour évaluer si une destitution est justifiée, le Tribunal doit en apprécier le sérieux, la sagesse et le bien-fondé[21].
[226] La plaignante plaide que l’absence d’enquête sérieuse précédant sa destitution est fatale et indique que la Ville a agi de manière arbitraire.
[227] Or, la preuve révèle que l’utilisation de l’expression « suspension pour fins d’enquête » utilisée par la Ville dans l’avis précédant la destitution est en réalité une formulation d’usage lorsqu’elle est en attente d’une résolution du conseil municipal.
[228] Par ailleurs, il aurait été plus sage et respectueux pour la Ville de rencontrer la plaignante pour discuter des reproches qu’on lui adresse. Toutefois, la jurisprudence plus récente a décidé qu’un conseil municipal n’a plus l’obligation d’entendre son fonctionnaire avant de le destituer depuis l’arrêt Dunsmuir[22]. Cette lacune n’est plus fatale[23].
[229] Dans l’affaire Dansereau c. Montréal (Ville de)[24], après une revue de la jurisprudence, la CRT résume ainsi l’état du droit sur son intervention, lorsqu’appelée à vérifier la justification d’une destitution d’un cadre municipal selon que celle-ci procède de motifs administratifs ou disciplinaires :
[274] Ainsi, nous sommes en présence d’une destitution administrative lorsque les motifs invoqués découlent de manquements involontaires du cadre municipal ou encore d’une réorganisation administrative. Il s’agit d’une destitution disciplinaire lorsque les motifs visent à corriger un comportement fautif ou un manquement volontaire.
[275] Dans les deux situations, la Commission doit apprécier le sérieux, la sagesse et le mérite de la décision de destituer, suspendre sans traitement ou réduire le traitement d’un fonctionnaire municipal. Pour une destitution administrative et une réduction de traitement, la Commission peut apprécier si les motifs et la décision sont raisonnables, non arbitraires ou non discriminatoires. Pour une destitution disciplinaire ou une suspension sans traitement, la Commission peut apprécier l’opportunité de la décision et y substituer la sienne au besoin.
[230] Comme mentionné précédemment, la Ville invoque plusieurs motifs, principalement disciplinaires, pour justifier sa décision de destituer la plaignante. Ce sont principalement l’insubordination, l’absence d’introspection et le refus de reconnaître ses manquements, qui dénotent une absence de volonté réelle d’amender son savoir-être.
[231] Les faits entraînant la destitution sont relatés dans l’analyse des questions précédentes. Il convient de s’y référer. Comme mentionné, la preuve prépondérante établit l’existence des principaux comportements reprochés à la plaignante.
[232] Concernant l’insubordination, soulignons que la preuve révèle que la plaignante ne suit pas les directives qu’elle désapprouve. Par exemple, elle omet souvent de mettre en copie ses supérieurs dans des courriels importants, estimant que la pratique du Cc n’est pas une pratique de gestion efficace. Elle ne respecte pas la directive de parler de chef à chef, estimant que c’est plus efficace de s’adresser directement à un salarié d’une autre division.
[233] Même en tenant pour acquis que la plaignante était surchargée de travail comme elle l’affirme, il reste que la preuve démontre sa tendance à faire de la microgestion qui explique certainement une partie de cette surcharge. D’ailleurs, chaque fois que la Ville tente d’alléger ses tâches en lui retirant des responsabilités, comme la supervision d’une adjointe et la révision des feuilles de temps, elle l’interprète négativement. Il devient impossible pour la Ville de l’aider à ce niveau.
[234] Il est manifeste que la plaignante refuse de reconnaître ses torts. Elle continue d’ailleurs à les nier à l’audience. Elle tronque la réalité et interprète des paroles en les modelant à sa perception des faits. Cela la conforte dans sa conviction qu’elle n’a pas tort et l’empêche de faire une introspection qui lui aurait permis de corriger ses comportements problématiques.
[235] La plaignante estime que la Ville ne lui a pas donné de véritables chances de se corriger, car elle n’a pas appliqué une progression des sanctions suffisante. Elle souligne que plusieurs des avis écrits invoqués en plaidoirie par la Ville sont en réalité des notes de suivi de rencontre qui ne lui ont jamais été présentées comme des avis disciplinaires.
[236] La destitution étant « la peine capitale » en matière disciplinaire, la Ville se doit de respecter une progression des sanctions en l’absence d’une faute grave, même pour un cadre municipal. Toutefois, il faut tenir compte de la position hiérarchique de ce cadre dans cette évaluation. Selon la jurisprudence, un employeur n’a pas à suivre une progression des sanctions disciplinaires aussi stricte que pour un simple salarié. Ultimement, il s’agit de vérifier si la Ville lui a transmis formellement son insatisfaction, lui a fait comprendre ses attentes, lui a accordé un délai pour corriger la situation et l’a avisée de la possibilité de perdre son emploi en l’absence d’amendement[25].
[237] Comme le rappelle la CRT dans la décision Sincennes [26], le cadre a une obligation de loyauté plus importante et l’employeur est en droit de s’attendre à ce qu’il corrige sa conduite rapidement, sans devoir lui imposer toute la gamme de mesures intermédiaires : il faut examiner si le cadre « a été suffisamment avisé de ce qu’on lui reprochait pour être en mesure de corriger sa conduite, et s’il a fait des efforts en ce sens ».
[238] Dans le cas présent, la preuve révèle que la plaignante a reçu un avis écrit formel et une suspension avant sa destitution. La Ville l’a également avisée verbalement à plusieurs reprises dès 2017, notamment lors des rencontres statutaires entre elle et ses supérieurs. Plusieurs de ces avertissements verbaux sont consignés dans des courriels de suivi qui lui sont envoyés. Cette progression permet de conclure que la Ville a satisfait son obligation dans les circonstances. Elle lui a de plus offert du coaching, ce que la plaignante a refusé.
[239] Malgré toutes les démarches effectuées, les comportements problématiques de la plaignante demeurent. La directrice adjointe affirme qu’il est devenu inutile de lui servir d’autres avis disciplinaires, si bien qu’elle va recommander une fin d’emploi. Elle considère que la plaignante compromet la délivrance, par la direction LCVC, d’un service de qualité. En outre, tout comme le premier directeur adjoint, elle déclare que ces comportements l’épuisent et la démobilisent.
[240] Lorsque considérés dans leur ensemble, les comportements de la plaignante démontrent une problématique importante et persistante qui justifiait sa destitution. Ceux‑ci se sont répétés, bien qu’elle ait changé de supérieure en 2018, et rien ne permet de croire qu’elle les corrigerait. Au contraire, elle continue de nier avoir des problèmes et rejette toute responsabilité sur ses supérieurs.
[241] Les événements entourant la demande de l’élue sur le pickleball ont été l’incident culminant, la goutte qui a fait déborder le vase. En ne voulant pas être prise en défaut, la plaignante n’a pas joué franc jeu avec sa supérieure, ce qui a brisé le lien de confiance déjà ténu entre les deux en raison des circonstances.
[242] Compte tenu de la nature des fautes reprochées à la plaignante, de l’absence d’amendement et de son refus de reconnaître ses torts, la Ville était justifiée de la destituer.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :
REJETTE les plaintes.
| |
| Mylène Alder |
| |
| |
| |
Mme Josée Généreux | |
Pour elle-même dans les dossiers 1026919-71-1806 et 1033132-71-1905 | |
| |
Me Marie-Eve Tavarozzi | |
PINEAULT AVOCATS CNESST | |
Pour la partie demanderesse dans les dossiers 1028346-71-1809 1028347-71-1809, 1034781-71-1907 1036956-71-1911 | |
| |
Me Orélie Landreville | |
LORANGER MARCOUX, S.E.N.C.R.L. | |
Pour la partie défenderesse | |
| |
| |
/dk
Rectification apportée le 9 janvier 2023 :
Les numéros de dossiers ont été écrits au complet.
[1] RLRQ, c. N-1.1.
[2] RLRQ, c. C-19.
[3] Bonhomme c. Montréal (Ville de), [1984] AZ-84011073 (C.A.).
[4] Haulard c. Ville de Hudson, 2017 QCTAT 2852.
[5] Vallière c. Val-d'Or (Ville de), 2016 QCTAT 2367; Tremblay c. Montréal (Ville de), 2006 QCCRT 0498; Themens c. Montréal (Ville de), 2014 QCCRT 0548.
[6] Vallière c. Val-d’Or (Ville de), précitée, note 5; Pilon c. Bristol (Municipalité de), 2003 QCCRT 0270.
[7] Corbi c. Ville de Montréal, 2017 QCTAT 4614. Requête en révision rejetée, 2019 QCTAT 2341. Pourvoi en contrôle judiciaire rejeté, 2020 QCCS 1784. Requête pour permission d’appeler accueillie, 2020 QCCA 1536. Appel rejeté, 2021 QCCA 1899.
[8] RLRQ, c. T-15.1.
[9] Voir notamment Brunette c. Unifor, section locale 233, 2018 QCTAT 3138; Charbonneau c. Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec inc., 2017 QCTAT 3853.
[10] Art. 81.19 de la LNT.
[11] Art. 81.18 de la LNT.
[12] Bangia c. Nadler Danino, s.e.n.c., 2006 QCCRT 0419; Breton c. Compagnie d’échantillons «National» ltée, 2006 QCCRT 0601. Requête en révision judiciaire rejetée, 2008 QCCS 1621 et requête pour permission d’appeler rejetée, 2008 QCCA 1401.
[13] Fomékong c. Genivar, s.e.c., 2012 QCCRT 0164.
[14] Article 81.19 de la LNT.
[15] Afin d’éviter toute confusion, celle-ci sera désignée à titre de directrice adjointe tout au long de la décision malgré son entrée en fonction à titre de directrice en janvier 2019.
[16] 2013 QCCRT 0213. Requête en révision judiciaire, règlement hors cour (C.S., Montréal, 500‑17‑077506-130, 22 août 2014).
[17] Laplume c. Résidence Berthiaume-Du Tremblay, 2019 QCTAT 2650, par. 20.
[18] Articles 123.4 de la Loi et 17 du Code du travail, RLRQ, c. C-27.
[19] Voir l’arrêt de principe Lafrance c. Commercial Photo Service Inc., [1980] 1 R.C.S. 536. Voir aussi Boisvert c. Hydro-Québec, 2017 QCTAT 32.
[20] Précitée, note 17.
[21] Larose c. Ville de Chambly, 2020 QCTAT 4215. Requête en révision rejetée, 2021 QCTAT 3291; Coyne c. Ville de Montréal, 2021 QCTAT 3089.
[22] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9.
[23] Houle c. St-Basile-le-Grand (Ville de), 2010 QCCRT 0390. Requête en révision judiciaire rejetée, 2011 QCCS 3152.
[24] 2014 QCCRT 0420.
[25] Renaud c. Château-Richer (Ville de), 2016 QCTAT 1629.
[26] Sincennes c. Val-des-Monts (Municipalité de), 2010 QCCRT 0221.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.