R. c. Nimeri | 2024 QCCQ 1412 | |||||||
COUR DU QUÉBEC | ||||||||
Chambre criminelle et pénale | ||||||||
CANADA | ||||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | ||||||||
DISTRICT DE | MONTRÉAL | |||||||
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N° : |
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DATE : | Le 18 avril 2024 | |||||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | DENNIS GALIATSATOS, J.C.Q. | ||||||
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SA MAJESTÉ LE ROI | ||||||||
Poursuivant - intimé | ||||||||
c.
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MARCUS NIMERI | ||||||||
Accusé - requérant
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JUGEMENT SUR LA REQUÊTE EN EXCLUSION DE LA PREUVE (arts. 8, 9, 24(2) de la Charte canadienne des droits et libertés) | ||||||||
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[1] L’accusé Marcus Nimeri est inculpé d’avoir eu en sa possession une arme de poing prohibée et chargée (art. 95(2)(a) C.cr.), d’avoir porté une arme dissimulée (art. 90(2)(a) C.cr.) et d’avoir entravé des agents de la paix dans l’exécution de leurs fonctions (art. 129(a)(d) C.cr.).
[2] Selon la preuve non contredite, le matin du 17 octobre 2023, il marchait sur un trottoir du centre‑ville de Montréal avec un pistolet de marque Glock-19, chargé et modifié de sorte qu’il soit déchargeable en mode automatique. L’arme était cachée dans un sac en bandoulière de type « man‑purse ».
[3] Au procès, la défense présente une requête sollicitant l’exclusion de l’arme à feu et des munitions saisies. Elle soutient que les policiers n’avaient aucun motif d’interpeller et de détenir l’accusé, qui ne faisait que marcher paisiblement dans un endroit public en pleine journée. Ils n’avaient surtout pas le droit de le fouiller. Foncièrement, plaide la défense, il n’est pas interdit de posséder un man‑purse; ce simple fait ne peut constituer, en soi, un indice d’activité illégale.
[5] Manifestement, les perceptions respectives des parties de cette même trame factuelle sont diamétralement opposées. L’une considère que les policiers ont fait montre d’un comportement oppressif, injuste et arbitraire à l’égard de l’accusé. L’autre y voit plutôt un exemple d’excellent travail policier qui, par sa diligence remarquable, a retiré un outil potentiellement meurtrier des rues de la métropole.
[6] Une entente entre les parties veut que le sort de la requête scelle l’issue du dossier. L’accusé n’a pas témoigné au voir‑dire. La défense a déjà annoncé qu’elle n’aura aucune preuve à présenter au procès au fond et les parties s’entendent que dans l’éventualité où l’arme était admise, la preuve serait versée au fond et un verdict de culpabilité s’ensuivrait[1].
[7] Les agents Nicolas Boivin et Patrick Laleyan étaient en patrouille régulière le matin du 17 octobre 2023 à bord d’un véhicule lettré. Laleyan conduisait; Boivin était passager. C’était une belle journée ensoleillée.
[8] Vers 10h15, les policiers se trouvaient à l’intersection des rues de la Montagne et Saint‑Jacques, au centre‑ville de Montréal, près du Centre Bell. Ils étaient immobilisés à un feu rouge. Au coin nord‑ouest de l’intersection, ils ont aperçu un homme sortant de la succursale de la SAAQ. La sortie de l’immeuble était à une distance d’environ 10‑20 mètres de l’intersection.
[9] L’homme en question, soit l’accusé, marchait vers l’intersection tout en regardant son téléphone cellulaire, qu’il tenait à la main droite. Une fois rendu à l’intersection, son visage faisait face au sud[2] et il attendait pour traverser. Tout son corps était aligné vers le sud[3]. Il était rendu « vraiment au coin »[4] pour traverser[5].
[10] Or, lorsqu’il a levé les yeux, il a remarqué la présence des policiers. Il a aussitôt rebroussé chemin, tourné les talons en faisant un 180° et décidé de marcher vers le nord sur la rue de la Montagne, ce qui a attiré l’attention des policiers.
[11] Ceux‑ci, toujours arrêtés à leur feu rouge, ont donc observé l’accusé.
[12] Nimeri portait un sac à bandoulière de type man‑purse qui pendait sous l’aisselle droite, environ à la hauteur de sa hanche.
[13] Tout en marchant maintenant vers le nord, en utilisant son coude, l’accusé a subtilement poussé le man‑purse un peu vers l’avant, de sorte à le cacher de la vue des policiers (qui étaient positionnés derrière lui). Sa main droite tenait toujours son téléphone cellulaire. Ceci a attiré davantage l’attention des agents. Pendant la manœuvre discrète pour déplacer le sac, le bras de l’accusé est toujours demeuré raide, plié à un angle de 90° au coude.
[14] Les policiers ont constaté qu’alors que l’homme marchait, il faisait preuve d’un « dead‑arm » :
[15] L’agt. Boivin explique que voilà trois ou quatre ans, il avait suivi une formation spécialisée offerte par l’unité ENSALA de la Gendarmerie royale du Canada sur les caractéristiques physiques et comportementales des personnes armées. Le cours sensibilisait les policiers aux indices, tant conscients qu’inconscients, suggérant qu’une personne dissimule une arme à feu sur sa personne. Parmi ces indices figuraient (1) le dead‑arm et (2) le fait de repositionner le sac dans une direction opposée à celle des policiers, de sorte à le cacher de leur champ de vision. Selon la formation, le détenteur pouvait faire de tels mouvements parfois de façon inconsciente, notamment pour vérifier que l’arme était toujours en place. La formation énumérait aussi les endroits les plus fréquents où étaient cachées les armes. Sur la liste figuraient les man‑purses, la ceinture et divers étuis différents. Dans la majorité des cas, les saisies étaient faites dans les man‑purses ou les ceintures. Il est à noter que la formation d’ENSALA était basée sur l’analyse de tous les rapports de saisie d’arme à feu rédigés au Québec. Indépendamment du corps de police, toutes les saisies sont rapportées à ENSALA pour la compilation de données exhaustives.
[16] Depuis cette formation, dans l’exercice de ses fonctions, Boivin a lui‑même personnellement saisi au moins 25 armes à feu dissimulées sur des individus. Ces saisies découlaient toutes de contacts initiés par lui, soit après avoir constaté les indices de dissimulation qui lui avaient été enseignés lors de cette formation. Parmi ces 25 saisies, au moins 80 % des armes étaient dissimulées dans des man‑purses.
[17] En plus de la formation précitée, l’agt. Boivin avait sept ans d’expérience de patrouille au centre‑ville de Montréal. Il s’intéressait aux armes à feu et il suivait les formations qui lui étaient offertes en la matière[6].
[18] L’agt. Laleyan avait suivi la même formation. En expliquant les phénomènes du dead‑arm et de self‑checks, le policier explique qu’il s’agit des mouvements involontaires. D’ailleurs, il les remarque même lorsqu’il observe des policiers en civil qui, eux aussi, ont tendance à faire ces vérifications subconscientes pour confirmer l’emplacement de leur arme à feu dissimulée. Pour sa part, l’agt. Laleyan avait six ans d’expérience de patrouille au centre‑ville de Montréal. Il savait que le quartier autour du Centre Bell est souvent mouvementé, avec une clientèle particulière qui comprend le crime organisé et les gangs de rue, notamment en raison des nombreux restaurants et boîtes de nuit. Dans son secteur de patrouille, il avait très souvent répondu à des appels impliquant des coups de feu, même des tentatives de meurtre par balle. Il estime le chiffre à une centaine d’événements.
[19] Il avait participé à 30 saisies d’armes à feu dissimulées sur des individus, dont la grande majorité était dans des man‑purses. Il sait que de telles sacoches sont propices pour transporter des armes. En effet, lui‑même en a déjà utilisées lorsqu’il travaillait en civil. L’agt. Laleyan a un grand intérêt pour les armes à feu. Il en possède lui‑même à la maison. Il se décrit comme un « maniaque des armes à feu ». Il a été en mesure d’expliquer au Tribunal ce qu’est un dispositif Glock switch.
[20] Toujours en direction nord, s’éloignant de l’auto‑patrouille, l’accusé a brièvement tourné la tête pour voir si les policiers étaient toujours là. Le policier décrit le mouvement comme un « back check ». À ce moment, il y a eu un contact visuel évident entre eux. Nimeri continuait vers le nord, toujours avec son « dead‑arm ».
[21] Il a ensuite ressorti son téléphone cellulaire de sa poche de pantalon, s’assurant de ne pas décoller son coude, et il a remis son bras à un angle de 90°. Il a serré son téléphone une deuxième fois. Cet élément a aussi attiré l’attention de l’agt. Boivin, qui a raisonné ainsi : généralement, si quelqu’un porte un man‑purse, c’est pour y transporter des objets personnels, notamment un téléphone cellulaire. Or, ici, Nimeri ne rangeait manifestement pas son téléphone dans la sacoche. Il devait donc avoir quelque chose d’autre dans le sac.
[22] Lorsque le feu de circulation est tombé au vert, les policiers se sont rendus à sa hauteur. L’accusé maintenait toujours son dead‑arm. Lorsqu’il a aperçu les policiers, il est resté figé. Il regardait les policiers et ses deux bras ont arrêté de bouger.
[23] Les policiers ont décidé de l’interpeller. Sur la base de toutes leurs observations, les deux avaient des motifs raisonnables de soupçonner qu’il transportait une arme à feu dissimulée. Ils voulaient faire un demi‑tour avant l’interception, pour s’assurer que le suspect les voit de face. Ils ne voulaient pas provoquer une mauvaise réaction de sa part, ce qui aurait pu arriver s’ils arrivaient par‑derrière. Au même effet, les policiers voulaient avoir une bonne vue de lui, pour leur propre sécurité, pour qu’ils puissent faire « face à la menace ». Ils voulaient voir ses mains et le sac, puisqu’ils craignaient qu’il soit armé.
[24] Ils ont débuté une manœuvre de demi‑tour, quoique les gyrophares n’étaient pas encore activés. Tout de suite, Nimeri a sorti de sa poche de pantalon gauche sa carte d’assurance maladie, avant que les policiers ne lui demandent quoi que ce soit. Ceci a également indiqué à l’agt. Boivin qu’il devait y avoir quelque chose d’autre dans le man‑purse, car l’accusé n’y entreposait pas ses cartes d’identité non plus.
[25] Les policiers ont débarqué du véhicule et ils se sont approchés à un mètre du suspect. Ils lui ont ordonné de montrer ses mains, ils l’ont informé qu’il était détenu aux fins d’enquête en matière d’armes à feu et ils l’ont informé de son droit à l’avocat. Laleyan surveillait attentivement la sacoche.
[26] Nimeri s’est mis à crier, gesticulant beaucoup et protestant qu’ils n’avaient pas le droit de l’intercepter. Il remettait sa main dans sa poche gauche, malgré les ordres des policiers. De plus, il s’est mis à regarder de gauche à droite, ce que les agents ont perçu comme un signe évident qu’il cherchait des endroits de fuite. Boivin, soupçonnant que Nimeri avait une arme à feu, ne voulait pas qu’il prenne la fuite. Il ne voulait pas que le suspect sorte son arme et le policier ne voulait surtout pas avoir à dégainer son arme non plus, en plein centre‑ville.
[27] Voyant son comportement, pour la sécurité de tous, les policiers ont saisi ses bras. Nimeri résistait et continuait à chercher des points de fuite.
[28] C’est alors que Laleyan a palpé la sacoche pour s’assurer de leur sécurité. Il a tout de suite senti un objet métallique rectangulaire. En palpant le long de la sacoche, au toucher, il a reconnu la forme d’un pistolet.
[29] Il en a aussitôt avisé son collègue en indiquant « gun! ». D’urgence, Laleyan a coupé la sangle du sac pour le retirer du suspect. Il ne voulait pas tenter de l’enlever au‑dessus de sa tête, car une telle démarche pourrait être dangereuse si l’accusé tentait de saisir son arme.
[30] Nimeri criait et résistait tellement agressivement au menottage qu’un autre véhicule de police passant a aperçu l’intervention. Les policiers sont donc arrivés en renfort. Cela a nécessité quatre policiers pour le maîtriser.
[31] En fin de compte, le man‑purse de marque Givenchy contenait effectivement une arme de poing illégale, chargée, décrite ci‑dessous. Sur sa personne, Nimeri avait 5 230 $ en argent comptant.
[32] Même lorsque placé dans l’auto‑patrouille, l’accusé criait sans cesse et il frappait les portières avec ses pieds.
[34] Il est à noter que normalement, il s’agit d’une arme de poing semi‑automatique à autorisation restreinte. Cependant, l’arme de Nimeri avait été modifiée au moyen d’un dispositif Glock switch, faisant en sorte que l’arme puisse tirer en mode automatique, comme une mitraillette. Le pistolet était donc une arme prohibée.
[35] D’ailleurs, le sélecteur du Glock switch était absent, ce qui fait en sorte que l’utilisateur pouvait seulement tirer en mode automatique[7].
[36] Au fil des années, une abondante jurisprudence des tribunaux d’appel du pays a abouti à la reconnaissance en faveur des policiers d’un pouvoir limité de détention aux fins d’enquête en common law. Le critère applicable, antérieurement connu sous l’expression « articulable cause », a été reconnu et clairement délimité par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Mann[8].
[37] Bien qu’étant un critère clairement moins exigeant que les motifs raisonnables et probables requis pour qu’il y ait une arrestation légale, les motifs concrets constituent eux aussi une norme à la fois objective et subjective[9]. La détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suivant une considération objective de l’ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu’il existe un lien clair entre l’individu qui sera détenu et une infraction criminelle récente ou en cours. La question des motifs raisonnables intervient dès le départ dans cette détermination, car ces motifs sont à la base de soupçons raisonnables du policier que l’individu en cause est impliqué dans l’activité criminelle visée par l’enquête[10]. Une simple intuition du policier ne suffira pas.
[38] Comme l’a exprimé la Cour dans Mann, les policiers doivent être habilités à réagir avec rapidité, efficacité et souplesse aux diverses situations qu’ils rencontrent quotidiennement aux premières lignes du maintien de l’ordre.[11]
[39] Cette notion des « soupçons raisonnables » qui servent d’assise à une détention aux fins d’enquête a été expliquée davantage par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Chehil. Encore une fois, une Cour unanime a rappelé que la norme des soupçons raisonnables, bien qu’elle doive être fondée sur des faits objectifs, est moins rigoureuse que celle requise pour justifier une arrestation. Une arrestation requiert des faits qui établissent une probabilité raisonnable d’un crime. Pour sa part, une détention aux fins d’enquête n’évoque que la possibilité raisonnable d’un crime, ce qui est une norme moins rigoureuse[12]. Les motifs doivent révéler la possibilité d’un crime précis[13].
[40] En établissant les paramètres ainsi, la Cour suprême a reconnu l’évidence qu’il s’ensuivait nécessairement que les policiers soupçonneraient raisonnablement, dans certains cas, des personnes innocentes d’être des criminels[14]. Malgré tout, c’est en toute connaissance de cause que la Cour a confirmé ce critère, jugeant qu’il constituait un juste équilibre entre le droit de l’État de déceler et de prévenir le crime et le droit du particulier de ne pas être importuné.
[41] Sous la plume de la juge Karakatsanis, la Cour a expliqué que les soupçons raisonnables doivent être évalués à la lumière de toutes les circonstances. L’appréciation doit prendre en compte l’ensemble des faits objectivement discernables qui donneraient au policier un motif raisonnable de soupçonner une personne d’être impliquée dans le type d’activité criminelle sur lequel porte l’enquête. Cette appréciation doit s’appuyer sur des faits, être souple et relever du bon sens et de l’expérience pratique quotidienne. Les motifs ne sauraient être évalués isolément[15].
[42] Étant donné le fait que le critère repose sur la possibilité et non la probabilité, il est entièrement possible qu’une détention aux fins d’enquête soit justifiée, même si d’autres inférences contraires – et innocentes – auraient pu être tirées[16].
[43] D’ailleurs, à maintes reprises, les tribunaux d’appel du pays ont réitéré que l’on doit éviter de resserrer le critère des soupçons raisonnables, sous le prétexte de la surveillance rigoureuse, de sorte qu’il finisse par constituer le simple reflet du critère des motifs raisonnables et probables[17].
[44] Tel qu’énoncé dans l’arrêt R. c. MacKenzie, l’analyse lors de l’examen par le juge du procès ne saurait se muer en un exercice scientifique ou métaphysique. Le Tribunal doit considérer la formation et l’expérience du policier, surtout lorsqu’elles sont justement dans le domaine de criminalité soupçonnée en litige[18].
[45] Les tribunaux d’appel du pays ont reconnu que la Charte n’impose pas aux policiers l’obligation de travailler dans des conditions qui mettent indûment leur sécurité en péril[19]. La raison d’être de ce principe est évidente : de telles conditions amèneraient inévitablement à une grave pénurie de policiers, ainsi qu’un effondrement compréhensible de motivation de leur part dans l’accomplissement de leurs tâches.
[46] De par la nature de leurs fonctions, les policiers sont souvent placés dans des situations de vulnérabilité. En conséquence, ils doivent bénéficier de toute protection que la loi peut leur fournir[20]. Comme l’a souligné la Cour suprême, les policiers ont le droit d’accomplir leur travail en sachant que les risques sont, dans toute la mesure du possible, réduits au minimum[21].
[47] C’est ainsi qu’une fouille accessoire à la détention aux fins d’enquête peut être exercée dans certaines circonstances. La fouille doit toutefois être effectuée dans un objectif de protection de la sécurité et ne pas reposer sur des inquiétudes « vagues ou inexistantes », ou encore sur le simple instinct ou intuition des agents[22]. Ainsi, une fouille sera jugée non abusive si la façon dont elle a été effectuée est raisonnablement nécessaire pour éliminer la menace de sécurité qui plane sur les policiers ou autrui[23].
[48] Dans R. c. Mann, la Cour suprême a précisé que le devoir de protéger la vie peut, dans certaines circonstances, faire naître le pouvoir de procéder à une fouille par palpation accessoire à la détention aux fins d’enquête. Un tel pouvoir de fouille n’existe pas de manière autonome. Le policier doit croire, pour des motifs raisonnables, que sa propre sécurité ou celle d’autrui est menacée. La décision du policier de procéder à la fouille doit être raisonnablement nécessaire eu égard à l’ensemble des circonstances[24].
[49] Bien que la méthode la plus commune est la fouille par palpation, dix ans après Mann, la Cour suprême a précisé dans l’arrêt R. c. MacDonald que la fouille de sécurité peut prendre d’autres formes aussi, pourvu qu’elle soit la moins intrusive possible et qu’elle exerce uniquement une fonction protectrice[25]. Plusieurs tribunaux d’appel ont également réitéré que la règle dégagée de l’arrêt Mann ne limite pas les policiers à des fouilles par palpation[26].
[50] À cet effet, il est bien établi que le policier pourra – lorsque les circonstances le justifient – fouiller des endroits autres que le corps ou les vêtements du suspect[27]. Au‑delà d’une simple palpation de l’individu, la fouille d’un sac banane (« fanny‑pack »)[28], d’un sac à dos[29] ou d’un man‑purse[30] sera parfois nécessaire et autorisée, pourvu qu’elle soit la moins intrusive possible dans les circonstances. Cela pourra comprendre le fait d’ouvrir le sac et de regarder à l’intérieur[31].
[51] Bien que la Cour suprême ait employé un langage relativement simple, l’arrêt Mann a fait l’objet de vives critiques, tant dans la jurisprudence que dans la doctrine, suggérant que le critère requis pour justifier une fouille était maladroitement formulé.
[52] Le principal reproche récurrent se résume ainsi. Il est établi qu’une détention aux fins d’enquête peut être fondée sur la possibilité d’implication dans un acte criminel, par opposition à la probabilité. Pourtant, même si ce critère est satisfait et le policier soupçonne raisonnablement que la personne porte une arme à feu dangereuse, on pourrait prétendre qu’il n’a toutefois pas le droit de procéder à une fouille préventive, à moins qu’il ait des motifs raisonnables et probables de croire que le suspect est effectivement armé. Ce scénario risque de créer des situations insoutenables pour le policier qui, d’une part, doit rapidement détenir un homme potentiellement armé, mais qui d’autre part, ne pourra rien faire pour assurer sa protection et celle d’autrui. Dans le contexte d’interactions reliées à des armes à feu, cette recette peut aboutir à des résultats absurdes.
[53] La critique de cette approche a bien été résumée par la Cour d’appel du Manitoba dans l’arrêt R. v. McKenzie :
The language in Mann as to the threshold for this warrantless search power was, with respect, imprecise. In several places in the decision, the standard for a protective search was described as “reasonable grounds” that the safety of the officer or others is at risk (at paras. 40, 43, 45). Yet, in the result, the Court said the initial pat‑down search of the detainee in Mann was justified because there was a “logical possibility” that the [detainee], suspected on reasonable grounds of having recently committed a break‑and‑enter, was in possession of break‑and‑enter tools, which could be used as weapons” (at para. 48). Of some significance is the fact that the American case law relied on in Mann to justify the constitutionality of a search incident to an investigative detention is premised on the basis of the reasonable suspicion standard, not the higher standard of reasonable grounds[32].
[soulignement par la Cour d’appel]
[54] D’ailleurs, dans l’arrêt de principe subséquent portant sur la détention aux fins d’enquête, soit R. c. Clayton, la Cour suprême semble avoir ajusté le tir quant à la norme applicable. Dans cette affaire, les policiers ont détenu les suspects, ils les ont fait sortir de leur véhicule et ils les ont fouillés. La Cour a statué que la détention aux fins d’enquête était valide, raisonnant que les faits « ont fait naître objectivement le soupçon raisonnable que les occupants de la Jaguar soient en possession des armes à feu recherchées et, partant, que la vie des policiers et des citoyens soit menacée »[33]. Sur la base de ces mêmes faits, la Cour a conclu que « le souci d’assurer leur propre sécurité justifiait également les policiers d’effectuer les fouilles accessoires à la détention »[34].
[55] En 2013 dans l’arrêt R. c. Chehil, la Cour suprême a confirmé que dans certains cas, une fouille peut être justifiée en application d’une norme moins rigoureuse que celles des motifs raisonnables et probables. En énumérant des exemples, la Cour a notamment mentionné que certaines fouilles sont permises sur la base de soupçons raisonnables, y compris « la fouille limitée accessoire à une détention aux fins d’enquête [en vertu de] R. c. Mann[35] ».
[56] Fait intéressant, le même jour où la Cour suprême a rendu sa décision dans Chehil, la Cour d’appel de l’Ontario rendait sa décision dans l’affaire R. v. Atkins. Après avoir d’abord conclu que les policiers avaient eu des soupçons raisonnables suffisants pour justifier une détention aux fins d’enquête du suspect, la Cour a statué que la fouille par palpation qui a suivi était justifiée pour des fins de sécurité, au motif que ceux‑ci avaient des soupçons raisonnables de penser que l’accusé était en possession d’une arme[36].
[57] Dans l’arrêt R. v. Webber, la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique a respectueusement remarqué que le langage utilisé dans Mann avait soulevé des difficultés d’interprétation. Toutefois, après avoir révisé la jurisprudence postérieure, la Cour d’appel a exprimé l’avis que le critère des soupçons raisonnables constituait un seuil suffisant pour justifier la fouille préventive dans certains contextes, surtout lorsque l’expectative de vie privée est réduite[37].
[58] Par ailleurs, quelques années plus tôt dans l’arrêt R. v. Sheck, cette même Cour, après avoir cité textuellement le critère énoncé dans Mann, mentionnait :
The test for valid investigative detention and a search incident thereto is to be based on the same safety concerns. In the case of the detention, it is to be based on a reasonable suspicion and in the case of the search, it is to be based on a reasonable belief that safety is at risk[38].
[soulignements dans l’original]
[59] Ainsi, même si la dualité de seuils a été maintenue à la surface, les mots soulignés dénotent que pour justifier une fouille préventive incidente à la détention aux fins d’enquête, le policier n’a pas strictement besoin d’avoir des motifs raisonnables de croire que l’accusé porte une arme de poing. Il suffit plutôt qu’il ait des motifs raisonnables de croire qu’il y a un risque que l’accusé soit armé d’une arme de poing. Manifestement, tout est dans les détails.
[60] Dans l’arrêt R. v. Peterkin, la Cour d’appel de l’Ontario a souligné la même nuance. Elle a précisé, en italiques, que Mann requérait des motifs raisonnables de croire que la sécurité des policiers ou d’autres était à risque ou en jeu, ce qui incorporait logiquement la possibilité que le suspect soit armé d’une arme à feu[39].
[61] Bien que cette revue de la jurisprudence offre un aperçu de la perception du critère de Mann auprès des tribunaux d’appel du pays, il va de soi que je suis lié par les précédents de la Cour d’appel du Québec.
[62] Or, dans R. c. Legoute, notre Cour d’appel a également cité des extraits de Mann textuellement. Cependant, curieusement, alors qu’elle concluait que la fouille préventive limitée (accessoire à la détention aux fins d’enquête) était valide, la Cour a subtilement modifié l’expression, un tant soit peu :
Cette fouille préventive limitée s’inscrivait dans « le devoir général des policiers de protéger la vie » et reposait sur des motifs raisonnables de croire que l’intimé pouvait avoir une arme ou un objet contondant sur lui susceptible de le blesser[40].
[gras ajouté]
[63] Selon le soussigné, il y a indéniablement une différence entre :
(1) Des motifs raisonnables et probables de croire que le suspect porte une arme de poing; et
(2) Des motifs raisonnables de croire que le suspect pourrait porter une arme de poing.
[64] Malgré ce qui précède, comme il sera exposé dans les pages qui suivent, l’issue du présent dossier ne dépend pas de la question de la norme applicable. Ayant analysé les circonstances dynamiques qui prévalaient lors de l’intervention du 17 octobre 2023, le Tribunal conclut que l’agt. Laleyan avait bel et bien des motifs raisonnables de croire que leur sécurité était en péril lors de leur interaction avec l’accusé sur le trottoir, satisfaisant ainsi le critère plus exigeant.
[65] Dans l’arrêt R. c. MacDonald[41], la Cour suprême a abordé la question générale des fouilles de sécurité. Dans cette affaire, il n’était pas question d’une quelconque détention. Les pouvoirs en vertu de l’arrêt Mann n’étaient donc pas en litige. Les policiers s’étaient plutôt rendus chez l’accusé à la suite d’une plainte de bruit. L’accusé les a injuriés et il leur a claqué la porte au nez. Lorsque MacDonald l’a entrouverte un peu plus tard, l’un des policiers a constaté que l’accusé tenait quelque chose de noir et brillant dans la main. Le policier a donc poussé la porte, malgré les refus de l’accusé, afin de voir s’il s’agissait effectivement d’une arme. En fin de compte, cette manœuvre lui a permis de confirmer que l’accusé tenait une arme de poing chargée.
[66] Certes, plusieurs portions de la décision dans MacDonald demeurent utiles et généralement pertinentes. Ceci dit, plus particulièrement, la Cour suprême semble avoir introduit un critère préalable supplémentaire de la « menace imminente pour la sécurité » avant qu’une fouille préventive ne puisse être permise[42].
[67] Or, depuis 2014, un courant jurisprudentiel provenant des tribunaux d’appel a énoncé que l’exigence d’un « risque imminent » mentionné dans MacDonald ne s’applique que dans les cas où le suspect n’était pas autrement détenu légalement. Notamment, de manière constante, il a été décidé que MacDonald n’a pas recalibré le critère de Mann permettant la fouille incidente à la détention aux fins d’enquête[43].
[68] Tout récemment dans l’arrêt R. v. Dhillon, la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique, au terme d’une analyse soignée, a réitéré qu’une menace « imminente » n’était pas un prérequis pour qu’une fouille de sécurité accessoire à une détention aux fins d’enquête soit légale[44].
[69] D’ailleurs, dans le récent arrêt R. c. Stairs, la Cour suprême elle‑même semble avoir restreint l’exigence d’imminence aux cas de fouilles de sécurité imprévues, en l’absence de motifs de détenir, dans le domicile où l’expectative de vie privée est particulièrement élevée[45]. De toute évidence, ces variables n’entrent pas en jeu en l’espèce.
[70] Dans l’arrêt R. c. Fadel, la Cour d’appel du Québec rappelait qu’il ne faut pas traiter à la légère la perception des policiers. Ceux‑ci sont formés pour détecter le crime. Lorsqu’ils perçoivent des mouvements, un langage corporel particulier et des types de comportements, ces éléments feront partie du bagage des agents que les tribunaux devront considérer pour déterminer si le seuil des soupçons raisonnables a été atteint[46].
[71] Ces comportements peuvent inclure la nervosité aiguë[47] du suspect, sa surprise ou son étonnement lorsqu’il aperçoit la police[48] ou encore le fait qu’il bifurque lorsqu’il les voit afin d’emprunter un autre chemin[49].
[72] Le fait d’accélérer[50] ou de fuir les policiers[51] appuiera généralement l’inférence que le suspect était impliqué dans une activité illicite. Tout comportement évasif sera pertinent[52].
[73] Certes, le simple fait de s’éloigner des policiers ne crée pas, en soi, des soupçons raisonnables. Toute personne est en droit d’agir ainsi. Toutefois, lorsque considéré ensemble avec d’autres indices de comportement suspicieux, le fait de s’éloigner peut faire en sorte que les simples soupçons franchissent le seuil des soupçons raisonnables[53].
[74] En matière d’infractions relatives à la possession d’arme de poing, la jurisprudence accorde une importance considérable au fait que la personne observée fait des mouvements calculés, contre nature, lorsqu’il aperçoit les policiers, notamment :
(1) En serrant un objet ou un sac contre son corps;[54]
(2) En coinçant son bras ou son coude contre son torse[55];
(3) En oscillant bizarrement – ou en n’oscillant pas du tout – les bras en marchant[56];
(4) En réalignant discrètement son corps dans le but de cacher un objet de la ligne de mire du policier[57]. La jurisprudence utilise le terme anglais « blading » pour décrire cette manœuvre.
(5) En faisant des « self‑pat », soit le fait de s’autopalper momentanément, parfois de manière inconsciente, afin de confirmer que l’objet caché est toujours bel et bien à sa place[58].
(6) En sortant préventivement une pièce d’identité pour l’avoir prête, avant même que les policiers la demandent[59].
(7) En faisant des mouvements plus manifestes compatibles avec le fait de vouloir cacher un objet[60].
[76] Dans l’arrêt R. v. McKenzie, la Cour d’appel du Manitoba a statué que, parmi d’autres faits objectifs dans la constellation, le policier avait raison de se fonder sur les indices suivants en arrivant très rapidement à sa conclusion qu’il avait des motifs raisonnables de soupçonner que l’accusé portait une arme de poing dissimulée dans son sac en bandoulière :
[77] La Cour d’appel a tenu compte du fait que, comme dans le présent dossier, le policier avait suivi une formation considérable et avait une vaste expérience avec les infractions relatives aux armes à feu, y compris sur les différentes manières de porter ou dissimuler les armes. Sur le champ, il croyait que le maniérisme de l’accusé en joggant découlait d’un désir de cacher une arme à feu entre son bras et son corps[62]. À ce moment précis, il a immédiatement décidé de détenir l’accusé aux fins d’enquête reliée à une infraction impliquant une arme. La Cour a conclu que cette détention était bel et bien valide et justifiée par le critère Mann[63], ajoutant que les infractions relatives aux armes à feu constituent une grave menace pour la paix, de sorte qu’il était primordial que le policier agisse vite dans l’intérêt public, même s’il devait entraver la liberté individuelle de l’accusé[64].
[78] Dans l’arrêt R. v. Peterkin[65], la police s’est rendue à une maison de ville dans un quartier à forte criminalité, où un appel au 9‑1‑1 avait été logé, mais tronqué. À leur arrivée vers 3h00, il n’y avait aucun signe de violence ou d’effraction, quoique personne ne répondait à la porte. Ils ont donc attendu que le concierge vienne leur ouvrir la porte du logement. Pendant l’attente, ils ont aperçu un jeune homme qui marchait sur le trottoir. Alors qu’ils l’observaient, l’homme a traversé le patio du plan d’habitation et il est entré dans la cour qui était clôturée, mais dont la porte était ouverte. Quelques instants plus tard, l’homme parlait au téléphone cellulaire.
[79] Les policiers ont décidé de l’aborder afin de voir ce qu’il faisait là. Il leur a dit qu’il attendait que son ami vienne le chercher, pointant au même moment un véhicule qui circulait en direction de l’immeuble. Jugeant que ses réponses étaient insensées, les policiers l’ont détenu aux fins d’enquête relativement à la Loi sur l’entrée sans autorisation provinciale. L’accusé s’est identifié avec son permis de conduire. Alors qu’ils attendaient la confirmation de l’identification sur les ondes, ils ont constaté que l’accusé a tapé sa hanche droite à deux reprises. Pour les policiers, il s’agissait de mouvements dénotant une personne armée. Le suspect s’est alors mis à « blader » (soit de repositionner son corps), il évitait le regard et il devenait de plus en plus nerveux.
[80] Une fois l’identification confirmée, le policier lui a remis son permis de conduire en le tendant vers son côté droit. Or, plutôt que de reprendre le permis normalement, le suspect s’est assuré de garder son coude bien collé à son corps et à sa hanche. Pour reprendre le permis, il a dû maladroitement tourner tout son corps et tendre seulement son avant‑bras.
[81] À la lumière de ces observations, les policiers soupçonnaient qu’il portait une arme à feu. Ils lui ont annoncé qu’ils allaient le fouiller par palpation. L’accusé a aussitôt reculé, saisi sa taille et tenté de fuir. Après l’avoir maîtrisé au sol, les policiers ont trouvé une arme de poing chargée dans son pantalon.
[82] La Cour a conclu que ces indices étaient amplement suffisants pour justifier la détention aux fins d’enquête relativement à la possibilité de possession d’une arme.
[83] Au cours des témoignages des deux policiers, aucune question n’a été posée par quiconque au sujet de la race, l’origine ethnique ou le groupe culturel auquel appartiendrait l’accusé.
[84] Ce sujet n’a même pas été abordé, un tant soit peu, en contre‑interrogatoire. Ce ne fut clairement pas un oubli. C’était par dessein et non par hasard. D’ailleurs, lors des plaidoiries finales, le procureur de la défense a explicitement affirmé qu’il ne soulevait pas un argument de profilage racial[66].
[85] Par ailleurs, peu après a suivi le « cependant ».
[86] La défense soutient, de façon créative, qu’il y a bel et bien eu « profilage », soit un « profilage des gens portant des man‑purses ». Or, cela va de soi, dans une certaine mesure, bien que le mot « profilage » soit un terme trompeur. Sans admette un profilage quelconque, les deux policiers ont effectivement affirmé que le port du man‑purse était un signe pertinent à considérer, parmi tant d’autres et ce, conformément à leur formation spécialisée et leurs multiples expériences pratiques sur le terrain.
[87] Avec égards pour l’avis contraire, ceci n’est pas répréhensible ou même problématique. Physiquement, de par sa conception, le sac en bandoulière est un accessoire de mode qui se prête bien au transport d’une arme de poing. Empiriquement, selon une preuve non contredite au voir‑dire, les man‑purses sont très souvent utilisés pour transporter des armes à feu illégales. Cette réalité ne doit pas être ignorée.
[88] Le Tribunal a donc demandé au procureur en quoi ce « profilage » serait choquant ou indésirable. Certes, le profilage des suspects sera déplorable s’il est basé sur la race, l’origine ethnique, la religion, le sexe, l’orientation sexuelle apparente ou l’appartenance à une classe sociale marginalisée. Par contre, selon le Tribunal, ces principes ne s’appliquent pas à une catégorie d’accessoire de mode. Par analogie, il est utile de rappeler que la discrimination étatique enfreindra l’art. 15 de la Charte seulement si elle est basée sur des caractéristiques personnelles analogues qui sont fondées sur la dignité et l’identité de la personne, ou celles d’un groupe d’individus qui constituent une minorité discrète et isolée, selon l’ensemble du contexte social, politique et juridique[67]. Or, la catégorie de « personnes avec une sacoche » n'est pas une classe protégée et elle ne doit pas le devenir. Ces personnes ne constituent certainement pas une minorité discrète et isolée.
[89] C’est alors que la défense ajoute son argument indirect : selon l’avocat, ce sont surtout des gens « racisés »[68], dont les noirs et les arabes, qui sont susceptibles de porter des man‑purses. Ainsi, si les policiers visent des man‑purses, le résultat net sera le fait de viser les minorités dans leurs enquêtes.
[90] Pour les motifs suivants, le Tribunal rejette cet argument.
[91] D’emblée, l’avocat mentionne que ce sujet ne peut pas faire l’objet de connaissance judiciaire. Cette concession est tout à fait appropriée. Il n’est pas question que le Tribunal conclue, sans aucune preuve à l’appui, que « ce sont surtout les noirs et les arabes qui portent des man‑purses ».
[92] D’abord, nul ne peut prétendre que cette affirmation représente un fait notoire, qui fait l’objet d’un consensus au point de ne pas être l’objet de débats raisonnables ou encore qui peut être vérifié facilement en ayant recours à des sources dont la fiabilité est incontestable[69].
[93] Surtout que le Tribunal considère foncièrement que l’affirmation est carrément erronée. Pourtant, le procureur poursuit en mentionnant que, dans le cadre de son travail en tant qu’avocat, « empiriquement », il a constaté que son affirmation serait vraie. Encore une fois, le Tribunal exprime son profond désaccord. Il s’agit d’une façon de déguiser un argument de connaissance judiciaire en le libellant d’une autre façon.
[94] Je suis pleinement conscient de la mise en garde émise par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Abdullahi, selon laquelle parfois, certaines pratiques apparemment banales peuvent subtilement refléter des normes culturelles de communautés racialisées[70]. Or, le port du man‑purse n’est pas un de ces cas.
[95] Tel qu’il sera exposé dans l’analyse ci‑dessous, l’implication d’un man‑purse, considérée à la lumière de l’ensemble des circonstances (notamment le « bras mort » et le blading), est indubitablement un indicateur pertinent. Selon la preuve non contredite des deux policiers (que le Tribunal retient comme véridique), sur les 30 saisies d’armes de poing qu’ils ont faites, 80 % de celles‑ci étaient dissimulées dans des man‑purses. Il s’agit d’une donnée significative. Au même effet, les données statistiques exhaustives compilées par l’unité ENSALA pour les fins de ses formations confirment la fréquence importante de la dissimulation des armes de poing dans les man‑purses des suspects.
[96] On ne saurait exclure un indice aussi probant sur la seule base de la race de la personne observée.
[97] Pour dissiper toute ambiguïté, les policiers peuvent – et doivent – certainement porter une attention particulière aux man‑purses, à la lumière d’autres indices. En plus de la formation reçue, la preuve au présent dossier établit de façon convaincante que les armes dissimulées s’y trouvent extrêmement souvent. Les chiffres sont criants. Ils démontrent de manière objective et non équivoque que la probabilité qu’une arme se trouve dans un tel sac est élevée. C’est la cachette par excellence, bien plus fréquente que la ceinture avant, la ceinture arrière ou la cheville. Dans les circonstances, si un policier ignorait un tel indice, il ferait preuve d’incompétence, rien de moins.
[98] Si les jeunes hommes sont mécontents de l’attention que les man‑purses attirent de la part des policiers, ils n’ont qu’à ne pas en porter. Cet accessoire de mode n’est aucunement relié à la culture, à l’identité ou à l’intégrité de la personne. Il est loin d’être essentiel. La mode est relativement récente. Depuis des décennies, les hommes se débrouillaient bien sans man‑purses. Qu’ils soient sans crainte : les portefeuilles continuent à exister; les poches de pantalon et de manteau aussi.
[99] Pendant l’audition, la défense a évoqué la décision de l’honorable juge Dalmau dans l’affaire R. c. Chemlal[71]. Dans cette décision, le juge a admis la preuve[72]. La défense résume la pertinence de la décision comme suit.
[100] D’abord, selon la défense, les faits étaient remarquablement semblables à ceux en l’espèce. De plus, l’un des agents impliqués était l’agt. Patrick Laleyan, tout comme dans le présent dossier, quoiqu’il n’était pas le policier qui avait fouillé le suspect[73].
[101] Enfin, selon le procureur de Nimeri, Chemlal aurait présenté un argument semblable devant la Cour d’appel, soit en invoquant le lien entre « personnes racisées et les man‑purses » et le danger d’un profilage racial indirect. Qui plus est, pendant l’audition de l’appel, l’un des juges de la formation aurait tenu des propos qui semblaient avaliser l’argument.
[102] Le Tribunal juge que l’affaire Chemlal est peu pertinente en l’espèce.
[103] D’abord, la décision, rendue oralement et qui s’étend sur 24 pages de transcriptions, révèle que les faits se distinguaient du présent dossier à plusieurs égards.
[104] D’autre part, le fait que l’agt. Laleyan ait été impliqué dans cette autre affaire importe peu. Chaque juge est saisi de la preuve qu’il a devant lui, considérée dans son ensemble. Qu’un autre juge ait conclu – dans un autre dossier – qu’un policier donné a bien agi (ou mal agi), cela ne lie aucunement le juge actuel dans le dossier en l’espèce, surtout lorsque le fondement factuel est différent. Il est fort hasardeux de se fier sur des conclusions factuelles d’un autre juge, rendues dans une autre instance.
[105] Dans le récent arrêt R. c. Accurso, de façon on ne peut plus claire, la Cour d’appel du Québec a énoncé que l’on ne peut pas importer les conclusions de fait tirées dans un autre dossier ou au sujet de la crédibilité d’un témoin puisqu’il s’agit d’une preuve extrinsèque et que, de toute façon, le témoignage d’un témoin peut ne pas être crédible ou fiable dans une affaire, mais l’être dans une autre[74]. Cette règle s’applique, aussi similaires que puissent être les circonstances dans l’autre dossier[75]. Au même effet, un juge ne peut pas considérer qu’un fait est prouvé du simple fait qu’il ait été démontré dans une autre affaire[76].
[106] Dans un autre ordre d’idées, de toute évidence, tout jugement rendu par la Cour d’appel du Québec sera utile, pertinent et contraignant à l’égard des juges de première instance. Or, l’affaire Chemlal est prise en délibéré depuis le mois d’octobre 2023. La décision n’est pas encore rendue et il ne m’appartient pas de tenter d’anticiper comment la Cour d’appel tranchera. Un tel exercice serait imprudent, voire inapproprié. Pour l’instant, la décision du juge Dalmau est présumée valide, quoique je ne m’y fie pas, tel qu’indiqué ci‑dessus.
[107] Enfin, quant aux propos qu’aurait tenus l’un des juges pendant l’audition de l’appel, je ne peux les considérer. D’abord, ils m’ont été rapportés de manière incertaine. Concrètement, je ne sais donc pas ce que le juge aurait dit. De surcroît, même si on connaissait la nature exacte de sa remarque, il est de droit constant que les commentaires ou questions posées par les juges lors de l’audition d’un appel ne forment pas partie de la décision finale[77].
[108] D’un point de vue strictement factuel, le Tribunal croit sans réserve le témoignage des deux policiers. Chacun a relaté les faits de manière claire, précise et spontanée. Aucune contradiction n’a été relevée.
[109] Chacun a été très transparent en exposant ses intentions au moment de l’intervention. Chacun a reconnu qu’il avait initié des contacts antérieurs négatifs avec d’autres personnes (c’est‑à‑dire des interceptions qui se sont avérées négatives, malgré ses soupçons que la personne était armée). À cet effet, chacun a référé les parties à la banque de données M‑IRIS, dans laquelle les contacts négatifs avaient été documentés. Ces témoins n’avaient manifestement rien à cacher.
[110] Enfin, leur preuve est non contredite. L’accusé n’a pas témoigné.
[111] Il est vrai que dans les cas typiques d’application de l’arrêt Mann, il y a déjà une enquête en cours concernant un crime donné lorsque les policiers font contact avec le suspect. C’est au cours de leurs recherches actives qu’ils entrent en contact avec l’accusé, souvent de manière impromptue. Parfois, ils sont déjà à l’affût suite à un appel au 9‑1‑1 dénonçant un crime récent.
[112] Or, ce ne sera pas toujours le cas.
[113] Une enquête préexistante ou des recherches préalables actives ne sont pas des conditions d’application de la détention aux fins d’enquête. Sur ce point, je partage l’opinion de la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique dans l’arrêt R. v. Wilkinson :
Furthermore, as noted above, there is no need for the police to be investigating a specific crime, particularly when they are conducting a community patrol[78].
[114] En l’espèce, autant dans les contre‑interrogatoires que lors des plaidoiries, le procureur de la défense soulevait rhétoriquement la question suivante : « qu’est‑ce qu’ils enquêtaient » à leur arrivée à l’intersection? Il suggère ainsi que puisqu’il n’y avait pas d’enquête proprement dite, de quelque nature que ce soit, ce n’était pas un cas réel de détention aux fins d’enquête.
[115] Le Tribunal ne partage pas cette opinion.
[116] Des motifs justifiant une détention aux fins d’enquête peuvent se matérialiser très vite et ce, après avoir aperçu le suspect pour la première fois. Ce fut justement ce qui est arrivé dans l’affaire R. v. McKenzie. Les policiers effectuaient une interception de la route routinière, non reliée à l’accusé, lorsqu’ils ont vu l’homme faire du jogging de façon suspecte en arrière‑plan. Après avoir observé ses mouvements contre‑intuitifs, notamment le fait qu’il pressait son coude contre son corps en courant, ainsi que sa réaction de surprise en voyant les policiers, ces derniers ont immédiatement acquis des motifs raisonnables de soupçonner qu’il était armé d’une arme à feu. La détention aux fins d’enquête a été jugée valide[79].
[117] C’est également ce qui est arrivé dans l’arrêt R. c. Fadel. Les policiers étaient en patrouille routinière à vélo lorsqu’ils ont aperçu l’accusé de façon impromptue, qui avait un comportement louche. En l’espace de quelques secondes, ils ont vite formé des motifs raisonnables de soupçonner qu’il commettait une fraude impliquant des cartes de crédit falsifiées[80].
[118] Le même scénario s’est produit dans l’affaire R. c. Hizebry, où le policier n’enquêtait rien à l’origine. Il contrôlait la circulation lorsqu’il a aperçu l’accusé, pour ensuite conclure, sur la base de ses observations, que celui‑ci était possiblement armé d’une arme de poing[81].
[120] Avec égards, la défense semble négliger qu’en soi, la possession d’une arme de poing dans un endroit public constitue une infraction criminelle, de surcroît un crime grave qui doit être réprimé.
[121] Au Canada, hormis quelques exceptions statutaires rarissimes, personne ne peut porter une arme à feu dissimulée. L’art. 90 du Code criminel crée une infraction générale, à moins que la personne soit explicitement autorisée à porter l’arme en vertu de la Loi sur les armes à feu[82].
[122] Certes, selon l’art. 117.07 C.cr., les policiers, les membres des Forces armées et certains aspirants policiers (inscrits à l’académie de police) bénéficient d’une exemption dans certaines circonstances. Toutefois, si un simple citoyen désire porter une arme de poing, il doit obtenir une autorisation du Contrôleur des armes à feu en vertu des arts. 20, 65‑66 L.a.f. Ces autorisations, qui sont extrêmement rares, sont généralement limitées aux personnes suivantes :
(1) Les chauffeurs de véhicules blindés qui transportent des quantités importantes d’argent liquide dans le cadre de leur activité professionnelle légale;
(2) Les personnes travaillant dans les régions sauvages éloignées et pour lesquelles l’arme à feu est requise pour se protéger contre les animaux sauvages; ou
(3) Les trappeurs de profession qui sont formés et autorisés par des lois de la province où ils exercent cette profession[83].
[123] D’ailleurs, qu’elle soit dissimulée ou non, en vertu de l’art. 17 L.a.f., un individu ne peut posséder une arme de poing que dans sa maison d’habitation ou dans un autre endroit dûment autorisé par le Contrôleur des armes à feu (tel qu’un champ de tir approuvé). Personne ne peut posséder un pistolet sur la voie publique.
[124] Enfin, si un citoyen désire amener son arme de poing au champ de tir pour faire du tir à la cible, l’art. 19 L.a.f. exige qu’il obtienne une autorisation de transport à cet effet. Même s’il obtient un certificat de transport (pour se rendre au club et pour retourner à la maison), en vertu de l’art. 11(c) du Règlement[84], l’arme de poing doit obligatoirement être transportée dans un contenant verrouillé qui est fait d’un matériau opaque et dont la résistance, la construction et les caractéristiques sont telles qu’on ne peut le forcer facilement.
[125] Compte tenu des dispositions qui précèdent, si un policier dans un centre métropolitain voit ce qu’il soupçonne être un homme qui porte une arme de poing sur la chaussée, cette constatation peut bel et bien engendrer une application de ses pouvoirs de détention aux fins d’enquête. La possession elle‑même est invariablement une infraction criminelle, susceptible et méritant d’être enquêtée sérieusement. La sécurité du public est certainement en jeu.
[126] En ce sens, aucune autre preuve d’une infraction additionnelle extrinsèque n’est requise pour se prévaloir des pouvoirs Mann.
[127] Il appert que les deux policiers en l’espèce étaient avidement conscients de l’étendue de leur pouvoir. Ils avaient raison dans leur interprétation.
[128] Rappelons qu’il faut se garder de disséquer et d’analyser séparément chaque indice considéré par les policiers[85]. Ils doivent plutôt être considérés dans leur ensemble, donnant pleine valeur à leur effet cumulatif et ce, à la lumière de l’expérience particulière des policiers et des circonstances changeantes de l’interaction.
Bien que certains facteurs, comme le fait de voyager sous un faux nom ou celui de fuir les policiers, puissent à eux seuls éveiller des soupçons raisonnables, d’autres éléments d’un ensemble ne donneront naissance à des soupçons raisonnables que s’ils sont combinés à d’autres. Généralement, les caractéristiques qui s’appliquent globalement aux personnes innocentes ne suffisent pas, puisqu’elles ne peuvent révéler que des soupçons généraux. Il en va de même des facteurs qui peuvent aller « dans les deux sens », par exemple le fait qu’une personne regarde ou non quelqu’un dans les yeux. À eux seuls, de tels facteurs ne sauraient fonder des soupçons raisonnables, mais ils le peuvent s’ils s’inscrivent dans un ensemble de facteurs[86].
[gras ajouté]
[130] En l’espèce, le Tribunal accorde une grande importance à la formation et à l’expérience considérable des deux policiers en matière de détection d’armes à feu. Cette formation, statistiques concrètes à l’appui, leur a indiqué où les armes étaient généralement dissimulées sur la personne. De plus, elle leur a exposé les divers comportements humains qui sont révélateurs de port d’arme. Justement, dans le présent dossier, les policiers ont constaté deux indicateurs comportementaux majeurs, qu’ils ont pu directement rattacher à leur formation.
[131] L’incidence d’une telle formation spécifique ne saurait être sous‑estimée dans l’équation. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle les corps de police se donnent la peine d’offrir ces formations. Foncièrement, si les policiers ne peuvent pas s’y fier dans l’exercice de leurs fonctions, quel est donc l’intérêt de dispenser de tels cours?
[132] De plus, les données empiriques non contestées mises en preuve au procès démontrent que cette formation est un succès retentissant. En raison des connaissances acquises, l’agt. Boivin a pu détecter et saisir 25 armes à feu. Qui plus est, au moins 80 % de ces saisies ont été faites dans des man purses. Quant aux 33 interventions initiées par l’agt. Laleyan, 30 d’entre elles ont révélé la présence d’une arme à feu dissimulée. Il s’agit d’un taux de réussite de 91 %!
[133] Ce chiffre doit être lu à la lumière du commentaire de la Cour suprême dans Mann, selon lequel la Cour reconnaissait qu’en raison du critère de la possibilité raisonnable, il arrivera nécessairement que parfois, les policiers soupçonnent – et détiennent – des personnes qui s’avèrent innocentes.
[134] D’ailleurs, dans l’affaire R. c. Hizebry, la juge Weitzman (siégeant alors à la Cour du Québec) a également attribué une importance accrue au fait que le policier avait suivi la même formation ENSALA que celle mentionnée dans le présent dossier. Dans Hizebry, le policier avait une grande expérience en matière d’armes à feu. Depuis 2006, il donnait des cours de tir aux agents correctionnels et aux douaniers. En 2012, il avait suivi une formation pour l’entretien et l’opération d’armes d’assaut. Il avait également suivi le cours ENSALA en lien avec les méthodes de détection d’individus en possession d’armes à feu. Il était lui‑même propriétaire d’armes à feu et il en manipulait quotidiennement.
[135] Le soir des événements, il s’adonnait au contrôle de la circulation autour du Centre Bell après un concert. Au loin, il a aperçu l’accusé qui marchait, portant un man‑purse en cuir opaque. Se fiant à son expérience, sa formation et ses connaissances personnelles, le policier était convaincu que le sac à bandoulière avait la forme précise d’un pistolet. Sur la seule base de la forme du sac, il a interpellé l’accusé et il lui a ordonné d’ouvrir la sacoche[87]. L’accusé a refusé et il a pris la fuite en courant, abandonnant sur son chemin la sacoche qui, comme de fait, contenait un pistolet chargé de calibre 9mm.
[136] Au procès, la Couronne concédait qu’il y avait eu détention immédiatement lorsque le policier a interpellé l’accusé, puisque l’agent n’allait pas le laisser partir, tant qu’il ne vérifie pas le contenu de la sacoche. La juge Weitzman a conclu qu’à la lumière de la formation et de l’expérience du policier, la seule forme observée du sac suffisait pour constituer des motifs raisonnables de soupçonner que l’accusé portait une arme de poing. Les soupçons du policier étaient fondés sur des faits objectivement discernables, allant bien au‑delà d’une intuition généralisée[88]. Qui plus est, puisque le crime soupçonné avait trait à la possession d’une arme à feu dans les rues du centre‑ville, il était raisonnablement nécessaire d’agir[89].
[137] Dans l’affaire R. v. Cadienhead, les policiers avaient suivi une formation semblable sur la reconnaissance de caractéristiques dénotant le port d’une arme de poing dissimulée. En raison de cette formation, ils avaient vu l’accusé faire deux « safety pats » au haut de sa cuisse, ce qu’ils ont reconnu comme un geste subconscient de l’homme armé qui se reconfirme que l’arme est en place. Toujours en raison de leur formation spécialisée, ils ont aussi fait le lien avec le fait qu’il « bladait » son corps lorsque les policiers s’approchaient, de sorte qu’il rendait moins visible le côté sur lequel l’arme était dissimulée[90].
[138] Les observations des agts. Boivin et Laleyan sont presque identiques à celles des policiers dans l’arrêt R. v. Peterkin :
La nervosité.
L’évitement du contact visuel.
Le fait de taper sa hanche deux fois, un indice révélateur d’une personne qui s’assure qu’une arme à feu est bien en place.
Le fait de tourner son corps pour rendre moins visible son côté droit.
Lorsqu’il a récupéré son permis de conduire, le fait qu’il n’a bougé que son avant‑bras, prenant soin de s’assurer que son coude restait collé à son corps.
[139] En l’espèce, les policiers étaient confrontés à la constellation des faits objectivement discernables suivants :
[140] Évidemment, le simple fait de s’éloigner à la vue des policiers n’est pas incriminant en soi. L’agt. Laleyan a candidement reconnu que certaines personnes « n’aiment tout simplement pas les policiers », et cela est correct.
[141] Cependant, à la lumière de l’ensemble de ces comportements louches, considérés de façon cumulative, le Tribunal conclut que les soupçons des policiers que Nimeri était possiblement armé d’une arme à feu étaient amplement raisonnables. La gravité de l’infraction en cause et le risque possible pour la sécurité publique étaient tels que la détention constituait un exercice justifiable des pouvoirs policiers.
[142] Je mentionne d’emblée qu’à mon avis, les observations additionnelles faites par les policiers dans la courte période entre la détention et la fouille sont pertinentes à l’analyse. Elles incluent :
Sa nervosité accrue;
Son état d’agitation et son attitude de confrontation;
Le fait qu’il mettait sa main dans sa poche malgré les ordres des policiers de montrer ses mains;
Le fait qu’il regardait constamment de gauche à droite, comme s’il tentait d’identifier un chemin de fuite pour partir en courant.
[143] La défense suggère implicitement qu’étant donné le fait que l’agt. Laleyan avait déjà décidé qu’il allait palper le man‑purse, ces éléments additionnels devaient être écartés. Je ne partage pas cet avis. Comme l’a précisé la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Clayton :
Le souci d’assurer leur propre sécurité justifiait également les policiers d’effectuer les fouilles accessoires à la détention. Le juge du procès a conclu à la violation des droits de Farmer et de Clayton garantis à l’art. 8 après avoir statué que la décision de les soumettre à la fouille avait été prise avant que les policiers n’aient de motifs objectifs de le faire. C’est oublier, selon moi, que le moment à considérer est celui de la fouille et de la saisie. À ce moment, les agents avaient les motifs subjectifs et objectifs requis. L’intention seule ne permet pas de conclure à l’inconstitutionnalité. Ce n’est que lorsqu’elle s’accompagne d’un acte concret que l’intention subjective devient pertinente[91].
[144] Il est essentiel de donner les coudées franches aux policiers. Ce n’est pas le rôle du Tribunal d’exiger que chacun de leurs gestes soit scruté au microscope électronique à balayage[92]. Les policiers sont appelés à exercer leur jugement et leur discrétion dans des circonstances difficiles et fluides. Le rôle du tribunal qui est chargé de contrôler leur conduite doit trouver un juste équilibre entre, d’une part, les droits des suspects et, d’autre part, les exigences que comporte la prise de mesures efficaces et sans danger visant à assurer le respect de la loi, le tout sans se poser en gérant d’estrade[93].
[145] Lorsque l’infraction soupçonnée implique la possession d’une arme qui présente une dangerosité inhérente et indéniable, par déduction logique, il s’ensuit qu’une fouille accessoire sera généralement justifiée.
[146] C’est justement ce qu’a conclu la juge Weitzman dans l’affaire R. c. Hizebry, décrite ci‑dessus. Puisque le policier avait des motifs raisonnables de soupçonner la présence d’une arme de poing dans le man‑purse, il avait le droit de procéder à une fouille sommaire immédiate au moment de la détention, afin d’éliminer la menace de sécurité qui planait[94].
[147] Adoptant le même raisonnement, dans les arrêts R. v. Thibodeau[95] et R. v. Ferris[96], la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique a statué que lorsque l’assise de la détention aux fins d’enquête est la possibilité que le suspect soit armé d’une arme à feu, le policier aura automatiquement le droit de le fouiller afin de vérifier la présence d’armes.
[148] La Cour d’appel de l’Ontario a abondé dans le même sens dans l’arrêt R. v. Atkins. Dans cette affaire, la veille du jour de l’An, les policiers patrouillaient dans un véhicule banalisé. Ils ont remarqué un jeune homme qui marchait sur le trottoir. Même s’il faisait 7°C, le jeune portait un gros manteau d’hiver bouffant par‑dessus un chandail à capuche. Les policiers considéraient qu’il était vêtu trop chaudement pour cette température. L’homme semblait aussi introverti, alors que les gens dans son entourage étaient plus sociables. Il semblait se cacher dans la foule et il contournait les murs d’un immeuble, ce qui a attiré l’attention des policiers. Lorsque ceux‑ci se sont approchés et lui ont dit « hey buddy », l’accusé s’est mis à courir. Après une poursuite à pied de 300 mètres, les policiers l’ont rattrapé, l’ont fouillé par palpation et ont découvert un pistolet chargé de calibre 9mm.
[149] La Cour d’appel a d’abord conclu qu’en raison de son comportement louche, les policiers avaient des motifs suffisants de le détenir aux fins d’enquête. De plus, la Cour a statué sommairement que la fouille par palpation était justifiée pour des motifs reliés à la sécurité, puisque les policiers soupçonnaient raisonnablement[97] que l’accusé était en possession d’une arme[98].
[150] Dans l’arrêt R. v. McGuffie, la Cour d’appel de l’Ontario a encore énoncé qu’il était suffisant d’avoir des soupçons raisonnables que le suspect porte une arme à feu pour justifier une fouille sommaire par palpation, peu importe l’expression employée pour décrire le critère. Sous la plume du juge Doherty, la Cour s’est exprimée ainsi :
As discussed by the dissent in MacDonald, the majority’s reference to “reasonable” grounds could be confusing. However, in the circumstances of this case, there is no doubt that Constable Greenwood had sufficient grounds to believe there was an imminent threat to his safety should he confront and detain the appellant on the street for investigative purposes. That reasonable belief of an imminent threat could, in my view, be based on the reasonable suspicion that the appellant had the handgun. A cursory pat‑down search of the appellant was justified to eliminate that concern[99].
[gras ajouté]
[151] Dans l’arrêt R. v. McKenzie, précité, la Cour d’appel du Manitoba a statué qu’en raison de la nature de l’infraction soupçonnée, qui impliquait la possession potentielle d’une arme de poing dans un fanny-pack, le policier avait été justifié de saisir l’accusé de force et de l’accoter immédiatement contre le mur d’une maison pour le contrôler[100]. Le fait que l’accusé avait fui au moment de la détention contribuait à la dangerosité de la situation. Au même chapitre, le policier était fondé à ouvrir immédiatement le sac en bandoulière pour vérifier s’il contenait une arme à feu. La démarche avait pour seul but de s’assurer de sa sécurité. Le risque était potentiellement imminent. La situation était volatile et incertaine. Les maniérismes louches de l’accusé suggéraient qu’il était possiblement armé. De plus, le policier était seul, en attente de l’arrivée des renforts et il connaissait la réputation de l’accusé[101].
[154] Le Tribunal conclut non seulement que les agts. Boivin et Laleyan avaient le droit de fouiller le sac de Nimeri, mais ils se devaient de le faire. Ils avaient la responsabilité de protéger la vie des membres du public, ainsi que la leur. Après tout, les citoyens respectueux des lois s’attendent à ce que la police intervienne avec rapidité et détermination pour saisir les armes à feu illégales et empêcher qu’elles soient utilisées dans la commission de crimes[102].
[156] Les policiers ont agi de manière tout à fait appropriée.
REJETTE la requête de l’accusé en exclusion de la preuve.
DÉCLARE admissible la preuve de l’arme à feu, des munitions et du comportement de l’accusé.
VERSE la preuve du voir‑dire au procès.
La pièce VD‑1 devient la pièce P‑1;
La pièce VD‑2 devient la pièce P‑2;
La pièce VD‑3 devient la pièce P‑3.
et
DÉCLARE Marcus Nimeri coupable des infractions reprochées.
| __________________________________ D. Galiatsatos, J.C.Q.
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Me Geneviève Rondeau-Marchand Procureure de la Couronne
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Me David Leclair | ||
Procureur de l’accusé
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Date d’audience : | 21 mars 2024 | |
[1] Courtlog du 2024-03-21 à 9h53.
[2] Courtlog du 2024-03-21 à 10h02, 11h14.
[3] Courtlog du 2024-03-21 à 11h14.
[4] Courtlog du 2024-03-21 à 10h02.
[5] Voir le point 1 sur la carte des lieux (pièce VD-1).
[6] Notamment, après la découverte de l’arme de l’accusé, Boivin a été en mesure de reconnaître immédiatement le dispositif Glock switch apposé à l’arrière de la glissière, qui transformait l’arme en pistolet automatique.
[7] Rapport d’expertise en balistique, daté du 19 mars 2024 (pièce VD-3).
[8] R. c. Mann, [2004] 3 R.C.S. 59.
[9] Ibid. au para. 27.
[10] Ibid. au para. 34.
[11] Ibid. au para. 16. Voir aussi : R. v. McKenzie (2022), 77 C.R. (7th) 313 (C.A.Man.) au para. 13, permission d’appel refusée, [2022] S.C.C.A. No. 64; R. v. Nesbeth (2008), 238 C.C.C. (3d) 567 (C.A.Ont.), permission d’appel refusée, [2009] S.C.C.A. No. 10.
[12] R. c. Chehil, [2013] 3 R.C.S. 220 aux paras. 27-28. Voir aussi : R. v. Molnar (2018), 363 C.C.C. (3d) 350 (C.A.Man.) au para. 35, permission d’appel refusée, [2018] S.C.C.A. No. 319; R. v. Urban (2017), 358 C.C.C. (3d) 55 (C.A.Alta.) au para. 42; R. v. Greaves (2004), 24 C.R. (6th) 15 (C.A.C.B.) au para. 41, permission d’appel refusée, [2004] S.C.C.A. No. 522.
[13] Ibid. au para. 35.
[14] Ibid. au para. 28.
[15] Ibid. au para. 29.
[16] Ibid. au para. 31.
[17] Voir : R. c. MacKenzie, [2013] 2 R.C.S. 250 au para. 84; R. v. Williams (2013), 297 C.R.R. (2d) 292 (C.A.Ont.) au para. 22.
[18] R. c. MacKenzie, [2013] 2 R.C.S. 250 aux paras. 73, 77, 82, 83; R. c. Fadel (2015), 22 C.R. (7th) 210 (C.A.Qué.) aux paras. 12, 29, 31, 38, 39; R. c. Ondo-Mendame, 2023 QCCA 107 au para. 26, permission d’appel refusée, [2023] S.C.C.A. No. 163.
[19] Voir : R. v. Ferris (1998), 126 C.C.C. (3d) 298 (C.A.C.B.) au para. 54; permission d’appel refusée, [1998] S.C.C.A. No. 424.
[20] R. v. Miller (2002), 163 O.A.C. 63 (C.A.Ont.) au para. 7.
[21] R. c. Mann, supra, au para. 43.
[22] R. c. Ondo-Mendame, 2023 QCCA 107 au para. 27, permission d’appel refusée, [2023] S.C.C.A. No. 163; R. c. Wolfson, 2020 QCCA 856 aux paras. 54-55, permission d’appel refusée, [2020] S.C.C.A. No. 316.
[23] R. c. Wolfson, supra, au para. 56, citant R. c. MacDonald, supra, au para. 47.
[24] R. c. Mann, supra, aux paras. 40, 43, 45.
[25] R. c. MacDonald, [2014] 1 R.C.S. 37 au para. 39(3).
[26] R. v. Plummer (2011), 272 C.C.C. (3d) 172 (C.A.Ont.) aux paras. 53, 58; R. v. Ellis (2016), 132 O.R. (3d) 510 (C.A.Ont.) aux paras. 27-28; R. v. Webber (2019), 377 C.C.C. (3d) 1 (C.A.C.B.) au para. 70.
[27] R. v. Ahmed (2022), 418 C.C.C. (3d) 1 (C.A.Ont.); R. v. Patrick (2017), 344 C.C.C. (3d) 137 (C.A.C.B.) au para. 94, permission d’appel refusée, [2017] S.C.C.A. No. 108.
[28] R. v. Sheck (2015), 332 C.C.C. (3d) 199 (C.A.C.B.) au para. 54, permission d’appel refusée, [2016] S.C.C.A. No. 50; R. v. Thibodeau, 2007 BCCA 489, permission d’appel refusée, [2007] S.C.C.A. No. 592; R. v. Lal (1998), 56 C.R.R. (2d) 243 (C.A.C.B.), permission d’appel refusée, [1999] S.C.C.A. no. 28; R. v. Dymkowski (2021), 500 C.R.R. (2d) 135 (Ont.S.C.J.).
[29] R. v. Peters (2007), 427 A.R. 326 (C.A.Alta.).
[30] R. v. McKenzie (2022), 77 C.R. (7th) 313 (C.A.Man.), permission d’appel refusée, [2022] S.C.C.A. No. 64; R. v. Sheck (2015), 332 C.C.C. (3d) 199 (C.A.C.B.) aux paras. 54-55, permission d’appel refusée, [2016] S.C.C.A. No. 50.
[31] R. v. McKenzie, supra; R. v. Peters, supra.
[32] R. v. McKenzie (2022), 77 C.R. (7th) 313 (C.A.Man.) au para. 35, permission d’appel refusée, [2022] S.C.C.A. No. 64.
[33] R. c. Clayton, [2007] 2 R.C.S. 725 au para. 46.
[34] Ibid. au para. 48.
[35] R. c. Chehil, [2013] 3 R.C.S. 220 au para. 23.
[36] R. v. Atkins (2013), 294 C.R.R. (2d) 33 (C.A.Ont.) au para. 15.
[37] R. v. Webber (2019), 377 C.C.C. (3d) 1 (C.A.C.B.) au para. 58.
[38] R. v. Sheck (2015), 332 C.C.C. (3d) 199 (C.A.C.B.) au para. 53, permission d’appel refusée, [2016] S.C.C.A. No. 50.
[39] R. v. Peterkin (2015), 319 C.C.C. (3d) 191 (C.A.Ont.) aux paras. 44, 53, 54.
[40] R. c. Legoute, 2022 QCCA 323 au para. 46.
[41] R. v. MacDonald, [2014] 1 R.C.S. 37.
[42] Voir les paras. 41, 44.
[43] R. v. Smith (2019), 383 C.C.C. (3d) 73 (C.A.Sask.) aux paras. 13-15; R. v. Webber (2019), 377 C.C.C. (3d) 1 (C.A.C.B.) aux paras. 53-61. Dans les arrêts suivants, la Cour a aussi insinué que l’impact de MacDonald était limité à son contexte précis, mais elle a décliné de se prononcer fermement, puisque la fouille des policiers satisfaisait le critère plus rigoureux : R. v. Buakasa (2023), 426 C.C.C. (3d) 279 (C.A.Ont.) aux paras. 39-43; R. v. Sheck (2015), 332 C.C.C. (3d) 199 (C.A.C.B.) aux paras. 56-61, permission d’appel refusée, [2016] S.C.C.A. No. 50; R. v. Peterkin (2015), 319 C.C.C. (3d) 191 (C.A.Ont.) au para. 59; R. v. McKenzie (2022), 77 C.R. (7th) 313 (C.A.Man.) aux paras. 38-41, permission d’appel refusée, [2022] S.C.C.A. No. 64.
[44] R. v. Dhillon (2023), 422 C.C.C. (3d) 330 (C.A.C.B.), permission d’appel refusée, [2023] S.C.C.A. No. 121.
[45] R. v. Stairs, 2022 CSC 11 au para. 76.
[46] R. c. Fadel (2015), 22 C.R. (7th) 210 (C.A.Qué.) au para. 41.
[47] Ibid. au para. 10.
[48] R. c. Legoute, 2022 QCCA 323 au para. 35; R. v. Plummer (2011), 272 C.C.C. (3d) 172 (C.A.Ont.) aux paras. 5, 22-23; R. v. Dhillon (2023), 422 C.C.C. (3d) 330 (C.A.C.B.) aux paras. 7, 9, permission d’appel refusée, [2023] S.C.C.A. No. 121.
[49] R. c. Fadel, supra, au para. 10.
[50] R. c. Legoute, 2022 QCCA 323 au para. 36.
[51] R. v. Wilkinson (2023), 421 C.C.C. (3d) 518 (C.A.C.B.) au para. 55; R. v. Nesbeth (2008), 238 C.C.C. (3d) 567 (C.A.Ont.) au para. 17, permission d’appel refusée, [2009] S.C.C.A. No. 10; R. v. Atkins (2013), 294 C.R.R. (2d) 33 (C.A.Ont.) aux paras. 4, 7, 14; R. v. Williams (2013), 297 C.R.R. (2d) 292 (C.A.Ont.) au para. 25.
[52] R. v. Dene, 2010 ONCA 796 au para. 4; R. v. Dhillon (2023), 422 C.C.C. (3d) 330 (C.A.C.B.) aux paras. 9, 10, permission d’appel refusée, [2023] S.C.C.A. No. 121.
[53] R. v. Darteh, 2016 ONCA 141 au para. 7; R. v. Greaves (2004), 24 C.R. (6th) 15 (C.A.C.B.), permission d’appel refusée, [2004] S.C.C.A. No. 522; R. v. Byfield (2012), 262 C.R.R. (2d) 251 (Ont.S.C.J.) au para. 80.
[54] R. v. Nesbeth (2008), 238 C.C.C. (3d) 567 (C.A.Ont.) aux paras. 5, 18, permission d’appel refusée, [2009] S.C.C.A. No. 10.
[55] R. v. Peterkin (2015), 319 C.C.C. (3d) 191 (C.A.Ont.) aux paras. 18, 28.
[56] R. v. Cadienhead, 2014 ONSC 5816 au para. 23; R. v. Byfield (2012), 262 C.R.R. (2d) 251 (Ont.S.C.J.) aux paras. 14, 19.
[57] R. v. Williams (2013), 297 C.R.R. (2d) 292 (C.A.Ont.) aux paras. 12, 31; R. v. Dhillon (2023), 422 C.C.C. (3d) 330 (C.A.C.B.) aux paras. 20-21, 34, permission d’appel refusée, [2023] S.C.C.A. No. 121; R. v. Thibodeau, 2007 BCCA 489, permission d’appel refusée, [2007] S.C.C.A. No. 592; R. v. Williams (2018), 412 C.R.R. (2d) 32 (Ont.S.C.J.) au para. 112; R. v. Peterkin (2015), 319 C.C.C. (3d) 191 (C.A.Ont.) aux paras. 17, 28; R. v. Cadienhead, 2014 ONSC 5816 au para. 27; R. v. Fountain (2015), 324 C.C.C. (3d) 425 (C.A.Ont.) au para. 31; R. v. Byfield (2012), 262 C.R.R. (2d) 251 (Ont.S.C.J.) aux paras. 14, 24; R. v. Dymkowski (2021), 500 C.R.R. (2d) 135 (Ont.S.C.J.) aux paras. 10, 12, 22.
[58] R. v. Peterkin (2015), 319 C.C.C. (3d) 191 (C.A.Ont.) aux paras. 17, 28; R. v. Williams (2018), 412 C.R.R. (2d) 32 (Ont.S.C.J.) au para. 112; R. v. Cadienhead, 2014 ONSC 5816 aux paras. 21, 28; R. v. Fountain (2015), 324 C.C.C. (3d) 425 (C.A.Ont.) au para. 31; R. v. Byfield (2012), 262 C.R.R. (2d) 251 (Ont.S.C.J.) aux paras. 14, 17; R. v. Dymkowski (2021), 500 C.R.R. (2d) 135 (Ont.S.C.J.) au para. 12.
[59] R. v. Sheck (2015), 332 C.C.C. (3d) 199 (C.A.C.B.), permission d’appel refusée, [2016] S.C.C.A. No. 50.
[60] R. v. Plummer (2011), 272 C.C.C. (3d) 172 (C.A.Ont.) aux paras. 5, 22.
[61] R. v. McKenzie (2022), 77 C.R. (7th) 313 (C.A.Man.) aux paras. 6-7, 27, permission d’appel refusée, [2022] S.C.C.A. No. 64
[62] Ibid. aux paras. 8, 27.
[63] Je note qu’en plus du comportement louche observé chez l’accusé, le policier l’a reconnu comme étant un membre de gang de rue qui était connu pour être armé.
[64] R. v. McKenzie, supra, au para. 29.
[65] R. v. Peterkin (2015), 319 C.C.C. (3d) 191 (C.A.Ont.).
[66] Courtlog du 2024-03-21 à 14h16.
[67] R. c. Turpin, [1989] 1 R.C.S. 1296 aux pp. 1332-1334; R. v. Alton (1989), 74 C.R. (3d) 124 (C.A.Ont.) à la p. 128; Dufour c. R., [1994] R.J.Q. 108 (C.S.) aux paras. 11-13, 18; R. c. Finta, [1994] 1 R.C.S. 701; R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259; R. c. Malmo-Levine, [2003] 3 R.C.S. 571.
[68] Il ne donne pas une définition à ce terme, qui est on ne peut plus vague.
[69] R. c. Spence, [2005] 3 R.C.S. 458.
[70] R. c. Abdullahi, 2023 CSC 19 au para. 92.
[71] R. c. Chemlal (19 novembre 2020), dist. de Montréal 500-01-192513-197 (C.Q.) [motifs rendus oralement et transcrits].
[72] Il a d’abord conclu que la détention initiale n’était pas arbitraire. Toutefois, il a statué que la fouille incidente par palpation était illégale. Cependant, il a tout de même admis la preuve en vertu de l’art. 24(2) de la Charte.
[73] R. c. Chemlal, supra, à la p. 4.
[74] R. c. Accurso, 2022 QCCA 752 au para. 346.
[75] R. c. Fort-Théagène, 2021 QCCA 637 au para. 27.
[76] R. c. Lalancette, 2016 QCCA 1871 au para. 6; R. c. Massoud, 2021 QCCA 21 au para. 46; DPCP c. 3095-2899 Québec Inc., 2021 QCCA 1222 au para. 88, permission d’appel refusée, [2021] S.C.C.A. No. 355; R. c. Daley, [2007] 3 R.C.S. 523 au para. 86.
[77] R. c. Giroux, 2007 QCCA 1670 au para. 10; R. c. Bossé, 2021 QCCA 1829 au para. 26.
[78] R. v. Wilkinson (2023), 421 C.C.C. (3d) 518 (C.A.C.B.) au para. 55.
[79] R. v. McKenzie (2022), 77 C.R. (7th) 313 (C.A.Man.), permission d’appel refusée, [2022] S.C.C.A. No. 64.
[80] R. c. Fadel (2015), 22 C.R. (7th) 210 (C.A.Qué.).
[81] R. c. Hizebry, 2023 QCCQ 2957.
[82] L.C. 1995, c. 39.
[83] Règlement sur les autorisations de port d’armes à feu à autorisation restreinte et de certaines armes de poing, DORS/98-207, art. 3.
[84] Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers, DORS/98-209, art. 11(c).
[86] R. c. Chehil, supra, au para. 31. Voir aussi : R. v. Darteh, 2016 ONCA 141 au para. 7.
[87] R. c. Hizebry, 2023 QCCQ 2957 aux paras. 4-10.
[88] Ibid. aux paras. 29-37.
[89] Ibid. au para. 36.
[90] R. v. Cadienhead, 2014 ONSC 5816.
[91] R. c. Clayton, [2007] 2 R.C.S. 725 au para. 48. Voir aussi : R. c. Desbiens, [1996] J.Q. no. 4036 (C.A.Qué.) aux paras. 17-18; R. v. Ha (2018), 48 C.R. (7th) 297 (C.A.Alta.) au para. 72.
[92] R. c. MacKenzie, [2013] 3 R.C.S. 50 au para. 65 [version anglaise des motifs].
[93] R. v. McKenzie, supra, citant R. c. Cornell, [2010] 2 R.C.S. 142 au para. 24; R. v. Crocker (2009), 247 C.C.C. (3d) 193 (C.A.C.B.).
[94] R. c .Hizebry, 2023 QCCQ 2957 au para. 43.
[95] R. v. Thibodeau, 2007 BCCA 489, permission d’appel refusée, [2007] S.C.C.A. No. 592.
[96] R. v. Ferris (1998), 126 C.C.C. (3d) 298 (C.A.C.B.) au para. 54; permission d’appel refusée, [1998] S.C.C.A. No. 424, cité avec approbation dans R. v. Patrick (2017), 344 C.C.C. (3d) 137 (C.A.C.B.) au para. 87, permission d’appel refusée, [2017] S.C.C.A. No. 108.
[97] Le lecteur constatera que la Cour d’appel de l’Ontario a utilisé la norme des soupçons raisonnables quant à la possibilité que le suspect soit armé, même à la deuxième étape, soit celle de la fouille accessoire à la détention aux fins d’enquête. Elle n’a pas appliqué le critère plus rigoureux des motifs raisonnables de croire.
[98] R. v. Atkins (2013), 294 C.R.R. (2d) 33 (C.A.Ont.) au para. 15.
[99] R. v. McGuffie (2016), 131 O.R. (3d) 643 (C.A.Ont.) au para. 52.
[100] R. v. McKenzie, supra, au para. 29.
[101] Ibid. aux paras. 43 et s.
[102] R. v. Clayton, [2007] 2 R.C.S. 725 aux paras. 36, 43-48.
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