Décision

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Alfa c. Mega Electronix inc.

2018 QCCQ 8757

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-700077-169

 

 

DATE :

17 avril 2018

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

DOMINIQUE VÉZINA, J.C.Q.

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EL CHERIF ALFA

Demandeur

c.

MEGA ELECTRONIX INC.

Défenderesse

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JUGEMENT

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[1]           El Cherif Alfa (M. Alfa) réclame 2 000 $ à Mega Electronix inc. (Mega) pour divers dommages incluant le plein remboursement du coût du téléviseur qui lui a été vendu et qui a cessé de fonctionner.

[2]           Mega nie devoir tout montant, invoquant l’absence de garantie applicable au moment où le problème du téléviseur est survenu.

QUESTIONS EN LITIGE

A)   M. Alfa a-t-il établi que le téléviseur acheté n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable?

B)   Quels sont les dommages auxquels M. Alfa a droit?

CONTEXTE ET ANALYSE

[3]           En matière civile, celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui justifient ses prétentions[1].

[4]           La charge de la preuve[2] repose sur la partie qui présente une demande. Celle-ci doit présenter une preuve selon la balance des probabilités, aussi appelée preuve prépondérante[3]. Ceci signifie que pour avoir gain de cause, M. Alfa doit démontrer que ses prétentions factuelles sont plus probables que leur inexistence[4].

[5]           Dans le cadre de son analyse, le Tribunal réfère aux faits pertinents qui se dégagent de l’ensemble de la preuve.

[6]           Le 16 mai 2014, M. Alfa et un ami achètent chacun un téléviseur de Mega[5].

[7]           En octobre 2016, M. Alfa note des problèmes de fonctionnement avec son téléviseur. Le 14 octobre 2016, il fait inspecter celui-ci par un technicien de SMT Ordinateur[6] qui note :

DÉTAIL DE LA RÉPARATION

Symptôme : No Vidéo

Solution : Replacement de panel

Coût des pièces : 1,190.71$    Main d’œuvre : 150$                Visite : 0 $

Total : 1,340.71$ plus tax

(Reproduction exacte)

[8]           Le 17 octobre 2016, M. Alfa envoie une mise en demeure à Mega[7] pour que le téléviseur soit remplacé.

[9]           Mega y répond[8]:

[…] Maintenant, étant donner que la garantie a prit fin le 16 mai 2015 nous ne pouvons malheureusement rien faire pour résoudre le problème du téléviseur LG 55’’ reconditionné car celui-ci est causé par une surtension d’électricité selon le technicien consulté a notre ancienne succursale du 8755 langelier à st-léonard.

De plus, nous vous avons proposée des solutions concrète lors de notre discutions téléphonique preuve de notre bonne foie , que vous avez rejeter . Je vous informe suite à notre discution qu’il n’y aura plus de dialogue entre nous et qu’une copie de cette lettre sera remise a mon avocat pour la suite de vos démarches.

(Reproduction exacte)

[10]        Le 21 octobre 2016, M. Alfa achète donc un nouveau téléviseur[9].

A)        M. Alfa a-t-il établi que le téléviseur acheté n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable?

[11]        M. Alfa achète un téléviseur neuf[10] et conteste la prétention de Mega qui déclare plutôt qu’il s’agit d’un appareil reconditionné.

[12]        Les photos déposées par M. Alfa ne démontrent pas que l’appareil est reconditionné. Aucun avis sur la boîte du téléviseur ne l’indique[11].

[13]        M. Alfa conclut un contrat de vente avec Mega, lequel contrat est régi par la Loi sur la protection du consommateur[12] (LPC).

[14]        Le contrat est la loi des parties. Il oblige ceux qui l’ont conclu non seulement pour ce qu’ils y ont exprimé, mais aussi pour tout ce qui en découle d’après sa nature et suivant les usages, l’équité ou la loi[13].

[15]        La LPC prévoit une garantie de qualité et une garantie de durabilité :

37. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.

38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.

[16]        Mega réfère à une garantie conventionnelle d’une durée d’un an, laquelle ne figure même pas à la facture.

[17]        De toute façon, une garantie conventionnelle n’exclut pas les garanties de qualité et de durabilité prévues à la LPC[14].

[18]        L’autre téléviseur similaire acheté le même jour par l’ami de M. Alfa n’a pas présenté de problèmes de mauvais fonctionnement et est toujours utilisé.

[19]        Le Tribunal estime qu’une durée de vie de deux ans pour le téléviseur de M. Alfa n’est pas raisonnable. Ainsi, selon la balance des probabilités, M. Alfa a établi que le téléviseur acheté n’a pas servi à un usage normal pendant une durée raisonnable.

B)        Quels sont les dommages auxquels M. Alfa a droit?

[20]        M. Alfa demande 2 000 $ en dommages.

[21]        Le Tribunal analyse chacune des rubriques réclamées :

a)     Remboursement du coût du téléviseur : 1 149 $

[22]        Aucune preuve n’a été présentée sur la durée de vie usuelle de ce type d’appareil.

[23]        Le prix du téléviseur en soi n’établit pas qu’il s’agissait d’un appareil haut de gamme.

[24]        Considérant que M. Alfa a bénéficié d’un téléviseur fonctionnel pendant une période de deux ans, il ne peut obtenir le plein remboursement.

[25]        Eu égard cependant à la durée de vie qu’un consommateur peut espérer pour ce genre d’appareil, le Tribunal arbitre les dommages et lui alloue un montant de 860 $, ce qui correspond à la valeur résiduelle basée sur une durée de vie utile de huit ans.

b)     Frais d’inspection pour la vérification du téléviseur

[26]        Le Tribunal alloue les montants de 50 $ et de 25 $ réclamés par M. Alfa[15].

c)     Perte de jouissance du téléviseur, troubles et inconvénients : 776 $

[27]        M. Alfa n’a pas apprécié l’attitude de Mega dans le traitement de leur différend. Cependant, la période de non-utilisation du téléviseur a été courte puisqu’il a remplacé celui-ci par un appareil neuf environ dix jours après qu’il ait cessé de fonctionner.

[28]        Le Tribunal n’accorde aucun montant à ce titre.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE en partie l’action du demandeur El Cherif Alfa;

CONDAMNE la défenderesse Mega Electronix inc. à payer 935 $ au demandeur El Cherif Alfa avec l’intérêt légal de 5 % par année et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec, calculés depuis le 17 octobre 2016;

CONDAMNE la défenderesse Mega Electronix inc. à payer au demandeur El Cherif Alfa les frais de justice de 100 $.

 

 

 

__________________________________

DOMINIQUE VÉZINA, J.C.Q.

 

 

Date d’instruction :

19 décembre 2017

 

Mise en délibéré :

4 janvier 2018

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Le Tribunal avise les parties de reprendre possession des pièces produites, si elles le désirent. À défaut, le greffier pourra les détruire un an après la date du jugement; art. 108 Code de procédure civile (C.p.c.)



[1]     Art. 2803 Code civil du Québec (C.c.Q.).

[2]     Art. 265 al. 2 Code de procédure civile (C.p.c.).

[3]     F.H. c. McDougall, 2008 CSC 53, par. 49; Jodoin c. Gibeau, 2010 QCCQ 6803, par. 24-34.

[4]     Art. 2804 C.c.Q.

[5]     Pièce P-1 : Coût du téléviseur 1 149,74 $.

[6]     Pièce P-3.

[7]     Pièce P-4.

[8]     Pièce P-5.

[9]     Courriel du 19 décembre 2017, 16 h 13, avec facture d’achat.

[10]    Pièce P-6.

[11]    Pièces D-1 et D-2.

[12]    RLRQ, c. P-40.1.

[13]    Art. 1434 C.c.Q.

[14]    Vallières c. Boutique du Bureau Gyva inc., 2008 QCCQ 2904.

[15]    Pièces P-2 et P-3.

AVIS :
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