Gougeon et Maçonnerie Marcel Laflamme |
2018 QCTAT 201 |
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Dossier : 589629-07-1511
[1] Le 5 novembre 2015, monsieur Sylvain Gougeon (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue le 28 octobre 2015 par la Commission de la santé et de la sécurité du travail à la suite d’une révision administrative (la CSST).
[2] Par cette décision, la CSST confirme sa décision initiale rendue le 25 juin 2015 à la suite de l’avis du 15 juin 2015 du Bureau d’évaluation médicale (B.E.M.) et déclare qu’elle est justifiée de poursuivre le versement de l’indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle se prononce sur la capacité du travailleur d’exercer son emploi, étant donné que la lésion est consolidée avec des limitations fonctionnelles. Elle déclare également que les soins et traitements ne sont plus justifiés, qu’elle cesse de les payer et que le travailleur a droit à une indemnité pour préjudice corporel étant donné la présence d’une atteinte permanente. De plus, par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a rendue le 6 juillet 2015, déclare que le travailleur conserve une atteinte permanente de 2,20 % et déclare qu’il a droit à une indemnité pour préjudice corporel de 1 928,30 $ plus les intérêts.
Dossier : 592272-07-1512
[3] Le 3 décembre 2015, le travailleur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue le 25 novembre 2015 par la CSST, à la suite d’une révision administrative.
[4] Par cette décision, la CSST confirme la décision qu’elle a rendue le 13 juillet 2015 et déclare qu’elle est justifiée de refuser de rembourser au travailleur les frais d’abonnement mensuel au service internet.
Dossier : 601009-07-1603
[5] Le 17 mars 2016, le travailleur dépose au Tribunal administratif du travail un acte introductif par lequel il conteste une décision rendue le 3 mars 2016 par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (la Commission).
[6] Par cette décision, la Commission confirme la décision qu’elle a rendue le 19 novembre 2015 et déclare que pour les déplacements effectués entre le 9 mai 2012 et le 24 septembre 2013 pour recevoir des traitements de physiothérapie et/ou ergothérapie, le travailleur a droit à un remboursement sur une base de 0,145 $ par kilomètre et déclare que les déplacements pour les journées des 3, 6, 10, 12, 17, 19 et 24 août 2013 ne sont pas remboursables.
Dossier : 601019-07-1603
[7] Le 17 mars 2016, le travailleur dépose au Tribunal administratif du travail un acte introductif par lequel il conteste une décision rendue le 10 mars 2016 par la Commission, à la suite d’une révision administrative.
[8] Par cette décision, la Commission confirme la décision rendue par la CSST le 20 novembre 2015 et déclare que les diagnostics de blessure dorsale et d’entorse cervico-dorso-lombaire ne sont pas en relation l’événement du 17 avril 2012 ni avec une quelconque blessure survenue par le fait ou à l’occasion des traitements de physiothérapie administrés pour la lésion professionnelle du 17 avril 2012. Elle déclare alors que le travailleur n’a pas droit aux prestations prévues à la loi en regard de ces diagnostics. De plus, par cette décision, la Commission confirme sa décision du 25 novembre 2015 et déclare que le trouble d’adaptation n’est pas non plus en relation avec l’événement du 17 avril 2012 et déclare que le travailleur n’a pas droit aux prestations prévues à la loi à l’égard de ce diagnostic. En outre, la Commission confirme sa décision du 25 novembre 2015 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement qu’il réclame pour les médicaments Clonazepan et Effexor.
Dossier : 601015-07-1603
[9] Le 17 mars 2016, le travailleur dépose au Tribunal administratif du travail un acte introductif par lequel il conteste une décision rendue le 1er mars 2016 par la Commission à la suite d’une révision administrative.
[10] Par cette décision, la Commission confirme la décision qu’elle a rendue le 19 octobre 2015 et déclare qu’elle est justifiée de refuser de reconsidérer la décision du 13 juillet 2015.
Dossier : 617572-07-1609
[11] Le 24 septembre 2016, le travailleur dépose au Tribunal administratif du travail un acte introductif par lequel il conteste une décision rendue le 15 septembre 2016 par la Commission, à la suite d’une révision administrative.
[12] Par cette décision, la Commission confirme la décision qu’elle a rendue le 18 avril 2016 et déclare qu’elle est justifiée de refuser le remboursement des frais pour les déplacements effectués par le travailleur pour se rendre à sa formation à la Cité collégiale entre les mois de septembre 2014 et décembre 2015 à un taux de 0,43 $/km, au lieu de 0,145 $/km tel que déjà remboursé.
Dossier : 647337-07-1709
[13] Le 26 septembre 2017, le travailleur dépose au Tribunal administratif du travail un acte introductif par lequel il conteste une décision rendue le 11 septembre 2017 par la Commission, à la suite d’une révision administrative.
[14] Par cette décision, la Commission confirme la décision qu’elle a rendue le 21 décembre 2016 et déclare que l’emploi de commis-vendeur constitue un emploi convenable pour le travailleur, déclare que le travailleur est capable de l’exercer à compter du 20 décembre 2016, déclare que le revenu brut annuel estimé de cet emploi est de 28 000 $, déclare que le travailleur a droit à la poursuite du versement de l’indemnité de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’il travaille comme commis-vendeur ou au plus tard le 20 décembre 2017, moment à partir duquel il aura droit à une indemnité réduite de remplacement du revenu et déclare que cette indemnité réduite de remplacement du revenu est estimée à 13 563,60 $ par année, soit 560,25 $ toutes les deux semaines, qui sera révisée le 20 décembre 2018. Par sa décision, la Commission confirme également sa décision du 24 janvier 2017 et déclare que le travailleur n’a pas droit au remboursement des frais d’entretien pour la tonte de gazon, le ratissage du terrain, l’entretien des fleurs et des plates-bandes, l’épandage d’abrasifs, le nettoyage des gouttières, l’ouverture, la fermeture et l’entretien d’une piscine ou d’un spa, ainsi que pour la coupe de bois, les cordes de bois, le cordage intérieur et le cordage extérieur. Par sa décision, la Commission confirme également sa décision du 17 mars 2017 et déclare que le travailleur n’a pas subi de récidive, de rechute ou d’aggravation le 5 juin 2016 reliée à la lésion professionnelle du 17 avril 2012 et qu’il n’a pas droit aux prestations prévues à la loi pour cette réclamation.
[15] Le 1er janvier 2016, la Loi instituant le Tribunal administratif du travail[1] (la LITAT) est entrée en vigueur. Cette loi crée le Tribunal administratif du travail qui assume les compétences de la Commission des lésions professionnelles et de la Commission des relations du travail. En vertu de l’article 261 de cette loi, toute affaire pendante devant la Commission des lésions professionnelles ou la Commission des relations du travail est continuée devant la division compétente du Tribunal administratif du travail.
[16] De plus, depuis le 1er janvier 2016, la Commission assume les compétences autrefois dévolues à la CSST.
[17] Le Tribunal administratif du travail a tenu une audience le 6 novembre 2017 à Gatineau, en présence du travailleur qui est représenté par une avocate. Maçonnerie Marcel Laflamme (l’employeur) n’a dépêché aucun représentant ni interlocuteur. Quant à la Commission, partie intervenante, elle est représentée par une avocate. Les parties ont demandé au Tribunal de se prononcer uniquement sur un moyen préalable, à savoir la régularité de l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 15 juin 2015, et de renvoyer l’ensemble des contestations pour une audience qui se tiendra les 6 et 7 mars 2018. La présente décision ne portera donc que sur le moyen préalable.
LE MOYEN PRÉALABLE
[18] Le travailleur demande au Tribunal de déclarer que l’avis donné par la docteure Danièle Desloges en sa qualité de membre du Bureau d’évaluation médicale le 15 juin 2015 est irrégulier et il demande à ce que le dossier soit retourné à la Commission pour qu’un nouvel avis du Bureau d’évaluation médicale soit demandé eu égard aux 5 sujets d’ordre médical prévus à l’article 212 de la loi, et ce, à l’égard de l’ensemble des diagnostics.
[19] Il soutient que l’avis de la docteure Desloges est irrégulier parce que celle-ci ne s’est pas prononcée sur l’ensemble des diagnostics posés par le médecin qui a charge du travailleur. Elle s’est prononcée sur la consolidation, les soins et traitements, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles uniquement en regard du diagnostic d’entorse à l’épaule gauche. Le travailleur lui reproche d’avoir omis de se prononcer sur ces questions d’ordre médical pour les autres diagnostics posés, à savoir tendinopathie, tendinite de l’épaule gauche; tendinose à la région supérieure du sus-épineux avec une petite déchirure; fissure au niveau de la cavité glénoïde, entorse de la coiffe des rotateurs à l’épaule gauche greffée sur une condition personnelle de tendinose avec possibilité de déchirure partielle, dorsalgie, entorse cervico-dorso-lombaire et trouble d’adaptation.
[20] La Commission soutient pour sa part que l’avis du Bureau d’évaluation médicale est régulier en ce que les différents diagnostics sont apparentés et ont été tenus en compte par cet avis. Elle ajoute que la question de la régularité du Bureau d’évaluation médicale doit être analysée au moment de la demande d’avis et non pas à la date où l’avis est rendu.
[21] Le Tribunal doit donc déterminer si l’avis du Bureau d’évaluation médicale est régulier. Pour ce faire, il y a lieu de reprendre certains éléments de la preuve.
LA PREUVE
[22] Le 17 avril 2012, le travailleur se blesse à l’épaule gauche en manipulant une palette de briques. N’ayant pas de médecin de famille, il consulte un médecin à l’urgence le 30 avril suivant. Le docteur Labrie pose alors le diagnostic de tendinopathie à l’épaule gauche et recommande des traitements conservateurs de même que des travaux légers.
[23] Le 17 mai 2012, un autre médecin, le docteur Huric, pose le diagnostic d’entorse de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche et prescrit un arrêt de travail complet. Le 28 juin qui suit, le docteur Makusa pose le diagnostic de tendinite à l’épaule gauche. Il constate une légère amélioration et prescrit une échographie de l’épaule gauche. Le 5 décembre 2012, ce médecin constate une tendinopathie à l’épaule gauche sans amélioration et une dorsalgie. Il dirige le travailleur en orthopédie.
[24] Entretemps, le 25 mai 2012, la CSST accepte la réclamation du travailleur pour un accident qui lui a causé une entorse de l’épaule gauche.
[25] Le 15 janvier 2013, la CSST demande au docteur Papadopoulos, chirurgien orthopédiste, d’évaluer le travailleur en sa qualité de médecin désigné et de se prononcer sur l’ensemble des sujets de nature médicale, à savoir le diagnostic, la consolidation, les soins et traitements, l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles. Après examen, le médecin indique sur le plan du diagnostic que « le tableau clinique autour de l’épaule gauche pointe vers une pathologie en relation avec le long tendon du biceps ou le complexe biceps-labrum ». Il est d’avis que le travailleur devrait avoir une résonance magnétique à son épaule gauche pour objectiver le diagnostic. Il indique qu’il est trop tôt pour consolider la lésion et se prononcer sur les séquelles.
[26] Le 12 mars 2013, la résonance magnétique de l’épaule gauche est interprétée comme suit : « Phénomène de tendinose avec possibilité d’un début de déchirure partielle intrasubstance à la région postérieure du tendon sus-épineux au niveau du tendon conjoint. Pas de signe de déchirure transfixiante ».
[27] Le 26 mars 2013, après avoir pris connaissance de l’examen par résonance magnétique, le docteur Papadopoulos pose le diagnostic d’entorse de la coiffe des rotateurs à l’épaule gauche greffée sur une condition personnelle de tendinose avec possibilité de déchirure partielle du tendon du sous-épineux. Selon lui, des traitements de physiothérapie sont requis. La lésion n’est pas encore consolidée.
[28] Le 10 avril 2013, le travailleur voit le docteur Belzile en clinique privée. Celui-ci pose les diagnostics de tendinite de l’épaule gauche de même qu’une entorse cervico-dorso-lombaire. Il dirige à son tour le travailleur en orthopédie. Ce même jour, à sa demande afin d’éliminer un problème de sciatique (R/O sciatica), une imagerie médicale est pratiquée eu égard à la colonne cervicale, la colonne thoracique et la colonne lombo-sacrée. Aucune anomalie significative n’est notée.
[29] Le 25 avril suivant, le docteur Belzile remplit un formulaire « Avis motivé du médecin qui a charge » de la Commission. Il mentionne qu’il n’y a pas d’amélioration avec la physiothérapie et d’ergothérapie, mais recommande la poursuite de ces traitements, jusqu’à ce que le travailleur puisse voir un orthopédiste.
[30] Le 7 mai 2013, le docteur Belzile indique sur le formulaire « Information médicale complémentaire écrite » que le diagnostic de déchirure du sus-épineux est non consolidé. Il précise que le travailleur est en attente de voir un orthopédiste.
[31] Le 5 juin 2013, le docteur Belzile indique que la tendinite de l’épaule gauche est toujours présente. Il ajoute le diagnostic de trouble d’adaptation.
[32] Le 10 juillet 2013, le travailleur est finalement vu en orthopédie par le docteur Gaspard, à la demande du docteur Belzile. Celui-ci pose le diagnostic de tendinose de l’épaule gauche et demande une arthroscopie. Il ajoute : « Il faudrait également référer ce patient en neurochirurgie pour des problèmes cervicaux et dorsolombaires ».
[33] Le 2 octobre 2013, le docteur Belzile maintient le diagnostic de tendinite de l’épaule gauche, mais ajoute qu’il y a une possibilité de déchirure du labrum. Un arthroscan est demandé et il prescrit la cessation des traitements de physiothérapie et ergothérapie.
[34] Le 23 avril 2014, l’arthro-scan de l’épaule est interprété comme ne montrant pas d’évidence de déchirure des tendons de la coiffe, mais la présence d’une fissure cartilagineuse profonde au niveau glénoïdien antérieur, avec une petite déchirure labrale adjacente.
[35] Le 29 avril 2014, la Commission demande au docteur Gaspard de préciser son diagnostic et de formuler son plan de traitement en fonction de ce diagnostic.
[36] Le 7 mai 2014, le docteur Gaspard répond à la demande de consultation du docteur Belzile de la façon suivante : « Résultat d’examen révisé, aucune déchirure de coiffe, aucun traitement à offrir, retour au médecin de famille pour physiothérapie ».
[37] Le 12 mai 2014, le docteur Belzile pose le diagnostic de dérangement interne de l’épaule gauche. Il prévoit une consolidation de plus de 60 jours. Le médecin dirige à nouveau le travailleur au docteur Gaspard. Sur sa note au docteur Gaspard, il écrit : « malgré que coiffe non déchiré désire opinion orthopédique, évaluation quand même, ci-inclus arthro-scan » [sic]. Par ailleurs, le docteur Belzile ajoute le diagnostic de lombosciatalgie et demande une résonance magnétique pour cette condition.
[38] Le 13 juin 2014, le docteur Gaspard revoit le travailleur et pose le diagnostic de fissure au niveau de la cavité glénoïde. Il indique qu’il n’y aura pas de chirurgie et retourne le travailleur à son médecin. Il indique au formulaire rapport médical que la lésion sera consolidée dans plus de 60 jours.
[39] Le 30 juin 2014, une résonance magnétique de la colonne lombaire est interprétée comme ne montrant aucune anomalie significative.
[40] Le 15 juillet 2014, la Commission demande au docteur Papadopoulos d’examiner à nouveau le travailleur et de se prononcer sur la date de consolidation, les soins ou traitements, l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique et les limitations fonctionnelles (sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi) en regard du diagnostic d’entorse à l’épaule gauche. Elle ne lui redemande pas son avis eu égard au diagnostic.
[41] Le 5 novembre 2014, le docteur Papadopoulos exécute, à titre de médecin désigné, le mandat qui lui a été confié par la CSST. Ainsi, après examen, il estime que l’entorse à l’épaule est maintenant consolidée, sans nécessité de soins ou traitements supplémentaires, avec une atteinte permanente à l’intégrité physique de 2 % pour atteinte des tissus mous du membre supérieur et avec des limitations fonctionnelles.
[42] La Commission fait parvenir ce rapport au docteur Belzile en vue du rapport complémentaire. Selon une note au dossier, le docteur Belzile aurait pris sa retraite, de sorte que le 20 janvier 2015, c’est plutôt le docteur Constant qui remplit le rapport complémentaire avec les mentions suivantes :
Impossible de rejoindre le travailleur
- D’accord avec consolidation
- D’accord avec nature nécessité
- D’accord avec APIPP
- D’accord avec L.F.
[43] Le docteur Constant biffe la mention « Je reconnais avoir informé le travailleur du contenu du rapport ».
[44] Le 16 février 2015, la Commission demande un avis du Bureau d’évaluation médicale portant sur la consolidation, les soins et traitements, l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique et les limitations fonctionnelles en fonction du diagnostic d’entorse de l’épaule.
[45] Le 22 avril 2015, le travailleur se présente à l’urgence. La docteure M.P. Lachaîne pose pour sa part les diagnostics de blessure dorsale (selon le témoignage du patient) et de trouble d’adaptation avec humeur dépressive. Elle dirige le travailleur en psychiatrie.
[46] Le 27 avril 2015, le travailleur se présente à nouveau à l’urgence. La docteure Moorjani s’interroge quant à une psychose, une maladie bipolaire en phase maniaque. Le lendemain, 28 avril 2015, le docteur Gouriou, psychiatre, examine le travailleur. Il pose le diagnostic de trouble anxieux avec crise de panique.
[47] Le 19 mai 2015, la docteure Desloges, orthopédiste, évalue le travailleur en sa qualité de membre du Bureau d’évaluation médicale. Conformément au mandat confié par la CSST, elle se prononce sur la consolidation, les soins et traitements, l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique et les limitations fonctionnelles uniquement en fonction du diagnostic d’entorse à l’épaule gauche. La médecin tient compte de la description de l’accident, des rapports médicaux au dossier concernant l’épaule gauche et des examens paracliniques. Elle note d’ailleurs que :
Le bilan radiologique a révélé à la résonance magnétique, une tendinose de l’épaule gauche, une fissure cartilagineuse dans la glène avec déchirure milimétrique du labrum adjacent. Le travailleur a bénéficié de physiothérapie et d’une opinion en orthopédie où on ne retrouvait aucune indication chirurgicale. (...)
[48] Elle examine le travailleur et vérifie les amplitudes articulaires des épaules puis elle effectue une série de manœuvres spécifiques pour la coiffe des rotateurs, la longue portion du biceps, le sous-scapulaire, le labrum, l’articulation acromio-claviculaire et des manœuvres d’instabilité des épaules. À l’instar du docteur Papadopoulos, la docteure Desloges retient le 5 novembre 2014 à titre de date de consolidation justifiant son opinion comme suit :
À mon évaluation, le travailleur décrit des douleurs au niveau de l’omoplate. Il se dit stable de longue date. À mon évaluation, je ne retrouve pas d’accrochage franc. Il y a des crepitus sous-scapulaires. Je n’ai pas retrouvé d’instabilité et il y a un phénomène de lâchage, mais sans douleur aux manœuvres d’O’Brian et de Jobe. Je considère que le plateau thérapeutique est atteint et je suis également d’avis qu’il n’y a pas d’indication chirurgicale.
[49] En regard aux soins et traitements elle écrit ce qui suit :
Il a bénéficié de traitements de physiothérapie, dont il me rapporte qu’ils augmentaient la douleur. Il aurait refusé les infiltrations. Il a été vu en orthopédie par le docteur Gaspard qui jugeait qu’il n’y avait pas d’indication chirurgicale.
À mon évaluation, le travailleur présente des craquements sous-scapulaires. Il ne présente pas de signes d’accrochage franc.
Je juge donc qu’il y a suffisance des traitements, tel que le recommande Docteur Papadopoulos.
[50] Quant à l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, elle se dit en accord avec l’opinion du docteur Papadopoulos compte tenu des douleurs résiduelles et de la manœuvre de Jobe qui est positive. Il en est de même des limitations fonctionnelles émises par le docteur Papadopoulos en raison des douleurs résiduelles.
[51] Le 21 septembre 2015, la procureure du travailleur demande par écrit à la CSST de rendre une décision eu égard à certains diagnostics et leur relation avec l’événement, à savoir : déchirure du sus-épineux, tendinite de l’épaule gauche, tendinite de l’épaule gauche avec possibilité de déchirure du labrum, fissure au niveau de la cavité glénoïde, dorsalgie, entorse cervico-dorso-lombaire, entorse lombaire, trouble d’adaptation et trouble d’adaptation avec humeur dépressive. Cette demande semble avoir été répondue en partie par une décision rendue le 10 mars 2016, dans laquelle la CSST, à la suite d’une révision administrative, déclare que les diagnostics de blessure dorsale, d’entorse cervico-dorso-lombaire et de trouble d’adaptation ne sont pas en relation avec l’événement du 17 avril 2012 (dossier de contestation 601019). Il est à noter que les diagnostics de l’épaule gauche, à l’exception de l’entorse, n’ont fait l’objet d’aucune décision de la CSST.
[52] Par la suite, le travailleur est vu par la docteure Bérubé pour un trouble d’adaptation et un trouble anxieux. Il sera suivi en psychiatrie par la suite.
[53] Le dossier médical fait aussi état de la poursuite du problème à l’épaule gauche. D’ailleurs, une résonance magnétique de l’épaule gauche faite le 8 novembre 2016 fait état d’un problème au niveau de la jointure glénohumérale et de tendinite du sus-épineux décrit comme suit :
Allowing for non-arthrographic study, there is extensive inferior changes consistent with wear / tear. Associated 1.6 cm paralabral cyst formation. Anterior inferior glenoid rim subchondral cyst formation, possibly sequela of remote bony Bankart injury. (...)
Mild supraspinatus tendinosis.
[54] Le 3 août 2017, un nouvel arthro-scan est interprété comme étant compatible avec une déchirure circonférentielle du labrum de type SLAP IX s’accompagnant de délamination du cartilage glénoïdien. À l’instar de l’arthro-scan du 23 avril 2014, l’examen confirme qu’il n’y a pas de déchirure de la coiffe des rotateurs.
LES MOTIFS
[55] Afin d’établir si l’avis du Bureau d’évaluation médicale est régulier, il y a lieu d’apporter certaines précisions.
[56] La Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[2] (la loi) accorde une grande importance au médecin qui a charge du travailleur. Cette notion de médecin qui a charge du travailleur n’est pas définie par la loi. La jurisprudence l’identifie comme celui qui examine le travailleur; qui est choisi par le travailleur, par opposition à celui qui est imposé ou qui n’agit qu’à titre de consultant ou d’expert; qui établit le plan de traitement ; et qui assure le suivi du dossier en vue de la consolidation de la lésion[3].
[57] Un travailleur peut en cours d’évolution de sa condition consulter plusieurs médecins. C’est notamment le cas du travailleur qui n’a pas de médecin de famille, qui consulte différents médecins dans des cliniques sans rendez-vous ou qui se présente à l’urgence ou à la clinique externe d’un centre hospitalier.
[58] Or, en application des articles 199 et suivants de la loi, le travailleur n’a généralement qu’un seul médecin qui a charge à la fois à un moment donné dans le temps en raison notamment de l’effet liant de ses constatations et du risque de l’émission d’avis contradictoires. Par exemple, lorsqu’un travailleur choisit de se présenter à l’urgence ou à la clinique sans rendez-vous pour son suivi médical, le médecin de garde à chacune des visites devient le médecin qui a charge du travailleur, même si le travailleur ne l’a pas choisi spécifiquement[4].
[59] Par ailleurs, dans le cas où plusieurs médecins sont consultés, mais que l’un de ceux-ci le soit davantage que les autres et soit plus impliqué dans le suivi de l’évolution de la lésion, c’est ce dernier qui sera considéré comme le médecin qui a charge du travailleur[5]. En outre, dans le cas d’une lésion multidimensionnelle, plus d’un médecin peut émettre son opinion selon sa spécialité et ceux-ci seront alors considérés comme des médecins qui ont charge du travailleur dans leurs domaines respectifs[6]. Au surplus, la soussignée estime qu’un médecin qui n’aurait jamais vu et examiné le travailleur ne pourrait être considéré comme le médecin qui a charge du travailleur.
[60] En l’espèce, le travailleur consulte différents médecins en 2012. À compter du mois d’avril 2013, selon ce qui ressort du dossier médical, le docteur Belzile prend charge du travailleur. En effet, c’est lui qui recommande les examens paracliniques, qui établit le plan de traitement et qui le dirige en orthopédie pour une opinion experte. Le dernier rapport émis par le docteur Belzile est du 12 mai 2014. Les notes au dossier font état de la retraite du docteur Belzile. On comprend du dossier que le rapport complémentaire qui lui a été adressé a été rempli par un autre médecin, le docteur Constant, probablement en raison de la retraite du médecin. Le docteur Constant aurait peut-être pu être considéré comme le médecin qui a charge du travailleur s’il avait pris le relais à compter de ce moment. Or, le docteur Constant indique au rapport complémentaire qu’il lui a été impossible de joindre le travailleur et qu’il ne l’a pas informé du contenu de son rapport. En somme, il ne l’a donc jamais examiné. Par conséquent, le Tribunal considère que le docteur Constant n’est pas le médecin qui a charge du travailleur.
[61] Le docteur Gaspard, a examiné le travailleur en tant qu’orthopédiste consulté, à la demande du docteur Belzile. Il voit le travailleur pour la dernière fois en juin 2014. Le rapport médical de cette visite laisse voir un diagnostic de fissure au niveau de la cavité glénoïde. Le médecin n’envisage aucune chirurgie et retourne le travailleur à son médecin traitant. Dans ces circonstances, le Tribunal estime que le docteur Gaspard n’est pas non plus le médecin qui a charge du travailleur.
[62] La Commission ne pouvait donc pas être liée ni avec le rapport du docteur Constant ni avec celui du docteur Gaspard, ceux-ci n’étant pas reconnus comme médecins qui ont charge du travailleur.
[63] Il reste le docteur Belzile qui avait clairement la charge du travailleur au moins jusqu’en mai 2014. Par la suite, il est question de trois médecins, les docteurs Lachaîne Moorjani et Gouriou, qui reçoivent le travailleur à l’urgence environ deux semaines avant la visite au Bureau d’évaluation médicale, dans le cadre d’un problème de nature psychiatrique. Tant que le travailleur ne s’est pas constitué un nouveau médecin qui a charge, le Tribunal estime que ces médecins ont assumé à tour de rôle la responsabilité de médecin qui a charge, pour la lésion psychique, et ce, avant l’avis du Bureau d’évaluation médicale en mai 2015.
[64] Afin de se prononcer sur la régularité du Bureau d’évaluation médicale, le Tribunal doit donc vérifier si la procédure prévue par la loi a été suivie.
[65] La loi prévoit à son article 224 que la Commission est liée par l’opinion du médecin qui a charge du travailleur eu égard aux cinq sujets de nature médicale prévus à l’article 212 de la loi. Les dispositions se lisent comme suit :
224. Aux fins de rendre une décision en vertu de la présente loi, et sous réserve de l’article 224.1, la Commission est liée par le diagnostic et les autres conclusions établis par le médecin qui a charge du travailleur relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l’article 212.
__________
1985, c. 6, a. 224; 1992, c. 11, a. 26.
212. L’employeur qui a droit d’accès au dossier que la Commission possède au sujet d’une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l’attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s’il obtient un rapport d’un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l’un ou plusieurs des sujets suivants :
1° le diagnostic;
2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;
3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;
4° l’existence ou le pourcentage d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique du travailleur;
5° l’existence ou l’évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.
L’employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l’attestation ou du rapport qu’il désire contester.
__________
1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.
[66] La loi prévoit également que la Commission peut se prévaloir de la procédure d’évaluation médicale et requérir l’avis d’un médecin qu’elle désigne et ultimement soumettre le dossier au Bureau d’évaluation médicale en vertu des articles 204, 205.1 et 206 de la loi qui se lisent comme suit :
204. La Commission peut exiger d’un travailleur victime d’une lésion professionnelle qu’il se soumette à l’examen du professionnel de la santé qu’elle désigne, pour obtenir un rapport écrit de celui-ci sur toute question relative à la lésion. Le travailleur doit se soumettre à cet examen.
La Commission assume le coût de cet examen et les dépenses qu’engage le travailleur pour s’y rendre selon les normes et les montants qu’elle détermine en vertu de l’article 115.
__________
1985, c. 6, a. 204; 1992, c. 11, a. 13.
205.1. Si le rapport du professionnel de la santé désigné aux fins de l’application de l’article 204 infirme les conclusions du médecin qui a charge du travailleur quant à l’un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l’article 212, ce dernier peut, dans les 30 jours de la date de la réception de ce rapport, fournir à la Commission, sur le formulaire qu’elle prescrit, un rapport complémentaire en vue d’étayer ses conclusions et, le cas échéant, y joindre un rapport de consultation motivé. Le médecin qui a charge du travailleur informe celui-ci, sans délai, du contenu de son rapport.
La Commission peut soumettre ces rapports, incluant, le cas échéant, le rapport complémentaire au Bureau d’évaluation médicale prévu à l’article 216.
__________
1997, c. 27, a. 3.
206. La Commission peut soumettre au Bureau d’évaluation médicale le rapport qu’elle a obtenu en vertu de l’article 204, même si ce rapport porte sur l’un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l’article 212 sur lequel le médecin qui a charge du travailleur ne s’est pas prononcé.
__________
1985, c. 6, a. 206; 1992, c. 11, a. 13.
[Soulignements ajoutés]
[67] Cependant, avant de soumettre le rapport de son médecin désigné au Bureau d’évaluation médicale, la Commission transmet le rapport au médecin qui a charge du travailleur afin que ce dernier ait la possibilité de fournir un rapport complémentaire en application du premier alinéa de l’article 205.1 et 215. L’article 215 de la loi qui se lit comme suit :
215. L’employeur et la Commission transmettent, sur réception, au travailleur et au médecin qui en a charge, copies des rapports qu’ils obtiennent en vertu de la présente section.
La Commission transmet sans délai au professionnel de la santé désigné par l’employeur copies des rapports médicaux qu’elle obtient en vertu de la présente section et qui concernent le travailleur de cet employeur.
__________
1985, c. 6, a. 215; 1992, c. 11, a. 17.
[68] La jurisprudence constante établit que l’étape de transmission du rapport du médecin désigné par la Commission au médecin qui a charge du travailleur est une étape nécessaire et préalable à la demande d’avis du Bureau d’évaluation médicale. À défaut de ce faire, la procédure d’évaluation médicale sera jugée irrégulière[7].
[69] Bien que la loi n’impose pas au médecin qui a charge du travailleur l’obligation d’examiner le travailleur lors de la production du rapport complémentaire, la jurisprudence établit que le médecin doit néanmoins avoir une connaissance de toutes les informations médicales pertinentes afin de pouvoir émettre une opinion éclairée[8].
[70] Commentant le rapport complémentaire du médecin qui a charge, le Tribunal énonce avec justesse dans l’affaire O’Connor que « les nouvelles conclusions du médecin qui a charge auront un caractère liant dans la mesure où elles sont basées sur un examen médical relativement récent ou à tout le moins, sur une connaissance suffisante de la condition médicale du travailleur par ce médecin, qu’elles sont bien étayées et que le travailleur en ait été informé à l’époque de l’émission du rapport »[9].
[71] Ainsi, dans certains cas, il peut arriver que les conclusions apparaissant sur le rapport complémentaire n’aient pas un caractère liant pour la Commission, de sorte que dans ces circonstances, la Commission demeure liée par les conclusions déjà émises par le médecin qui a charge, à moins que la Commission ne requière l’avis du Bureau d’évaluation médicale.
[72] En l’espèce, la Commission exécute son obligation de donner l’opportunité au médecin qui a charge du travailleur de commenter le rapport de son médecin désigné lorsqu’elle envoie le rapport à compléter au docteur Belzile, puisqu’à ce moment, selon toute vraisemblance, le docteur Belzile est toujours en poste. Le problème est que le docteur Constant remplit le rapport complémentaire, après la retraite du docteur Belzile, sans jamais avoir vu, examiné ou suivi le travailleur de quelque façon que ce soit. Tel que vu plus tôt, le docteur Constant ne peut pas être considéré comme le médecin qui a charge du travailleur dans ces circonstances. Au surplus, il ne lui a pas fait part des conclusions qu’il entendait exprimer au rapport complémentaire, à savoir que contrairement à l’avis du docteur Belzile, la lésion était maintenant consolidée à la date retenue par le docteur Papadopoulos, soit le 5 novembre 2014. Par conséquent, la soussignée décide de ne pas tenir compte du rapport complémentaire dans l’analyse des autres éléments du dossier.
[73] Ce rapport étant écarté, il y a maintenant lieu de vérifier si la Commission pouvait valablement saisir le Bureau d’évaluation médicale.
[74] Rappelons qu’avant de soumettre un dossier au Bureau d’évaluation médicale, la Commission doit s’assurer qu’il subsiste véritablement un litige entre l’opinion du médecin qui a charge du travailleur et celle de son médecin désigné. C’est ce que la jurisprudence constante établit[10].
[75] Dans le cas à l’étude, le docteur Belzile n’a pas rempli de rapport final ni de rapport complémentaire, de sorte qu’on ne peut présumer de son accord avec les conclusions du médecin désigné par la Commission, le docteur Papadopoulos.
[76] Par ailleurs, il est clair qu’une divergence d’opinions existait entre ces médecins sur la question de la consolidation de la lésion en plus de celle du diagnostic. Lors de son dernier rapport en mai 2014, le docteur Belzile considère que la lésion n’est pas encore consolidée alors que le docteur Papadopoulos, qui évalue le travailleur le 5 novembre 2014 et se penche uniquement sur le diagnostic d’entorse à l’épaule gauche, consolide la lésion à la date de son examen.
[77] Le Tribunal, constatant la présence d’un litige, considère qu’à la date du rapport du docteur Papadopoulos une demande de Bureau d’évaluation médicale pouvait donc se justifier quant au diagnostic et à la consolidation (sujets 1 et 2 de l’article 212 de la loi). Concernant les autres sujets médicaux, à savoir les soins et traitements, l’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique et les limitations fonctionnelles (sujets 3, 4 et 5 de l’article 212 de la loi), la Commission pouvait requérir l’avis du Bureau d’évaluation médicale sur ceux-ci étant donné que le docteur Belzile ne consolidait pas la lésion, et ce, en vertu de l’article 206 de la loi.
[78] Cependant, était-ce toujours le cas à la date où le Bureau d’évaluation médicale a émis son avis en mai 2015? Le Tribunal peut imaginer des cas où à cause de l’évolution de la condition du travailleur pendant la période d’attente du Bureau d’évaluation médicale, le médecin qui a charge du travailleur se range finalement à l’avis du médecin désigné. Cela aurait pu être le cas en l’espèce, puisqu’il s’est écoulé plusieurs mois entre le dernier rapport du docteur Belzile et l’avis du Bureau d’évaluation médicale. Cependant, cela ne s’est pas produit, le docteur Belzile ayant pris sa retraite, il ne s’est pas prononcé à nouveau sur les questions médicales en litige.
[79] Persistait-il toujours un litige entre l’opinion du médecin qui a charge du travailleur et le médecin désigné à la date où le Bureau d’évaluation médicale a rendu son avis? Le Tribunal estime que c’est le cas.
[80] En effet, rien ne permet de conclure que le litige qui existait entre l’opinion du docteur Belzile et celle du docteur Papadopoulos aurait été réglé par les médecins qui ont pris charge du travailleur après le retrait du docteur Belzile et avant que le Bureau d’évaluation médicale ne rende son avis. Après l’avis du docteur Papadopoulos du 26 mars 2013, le docteur Belzile a posé régulièrement le diagnostic de tendinite et a ajouté, dans son rapport médical du 2 octobre 2013, une possibilité de déchirure du labrum. Puis, dans son dernier rapport du 12 mai 2014, il pose les diagnostics de dérangement interne de l’épaule gauche et de lombosciatalgie. En outre, le seul rapport médical ayant trait à l’épaule gauche produit après cette date et avant l’avis du Bureau d’évaluation médicale est celui du docteur Gaspard le 13 juin 2014 qui considère que la fissure au niveau de la cavité glénoïde de l’épaule gauche n’est pas encore consolidée.
[81] D’autres rapports médicaux sont produits en avril 2015, à la suite d’une consultation à l’urgence pour des problèmes de nature psychiatrique. Aucun autre rapport médical ne fait état de quoi que ce soit en regard de l’épaule gauche du travailleur avant l’examen du Bureau d’évaluation médicale qui a eu lieu en mai 2015. Ainsi, à cette date, le litige demeure entier.
[82] Cela est-il suffisant pour déterminer si l’avis rendu par le Bureau d’évaluation médicale est régulier? Le Tribunal estime qu’il faut pousser l’analyse plus loin.
[83] Le Tribunal entend analyser la question de la régularité du Bureau d’évaluation médicale d’abord en fonction du diagnostic d’entorse à l’épaule gauche, puis en fonction des autres diagnostics de l’épaule gauche et finalement en regard des autres diagnostics ayant trait à la colonne cervico-dorso-lombaire et des diagnostics de nature psychique.
[84] Le travailleur soutient que l’avis du Bureau d’évaluation médicale est irrégulier puisque ce dernier ne s’est prononcé que sur le diagnostic d’entorse de l’épaule gauche alors que plusieurs autres diagnostics étaient posés.
[85] Sur cette question, la Commission soutient que tous les diagnostics se rapportant à l’épaule gauche sont apparentés et qu’ils ont été tenus en compte dans l’avis de la docteure Desloges.
[86] Cet argument de la Commission ne peut être retenu. En effet, il ressort de la preuve médicale que plusieurs diagnostics ont été posés en regard de l’épaule gauche par le docteur Belzile, médecin qui a charge du travailleur, et par le docteur Gaspard, orthopédiste consulté à sa demande au fil de l’évolution de la lésion à l’épaule gauche. Notons la tendinite, la tendinose, la déchirure du sus-épineux qui a été infirmée ultérieurement par l’arthro-scan, la déchirure du labrum et la fissure au niveau de la cavité glénoïde, ces deux derniers diagnostics ayant été confirmés par l’arthro-scan, de même que le dernier diagnostic posé par le docteur Berlzile, à savoir, le dérangement interne.
[87] Le Tribunal estime que les diagnostics posés eu égard à l’épaule gauche sont de différents ordres. En effet, l’entorse est un étirement des ligaments ou de la capsule de l’épaule. La tendinite, la tendinose et la tendinopathie sont des atteintes qui touchent les structures tendineuses. La fissure à la cavité glénoïde et la déchirure du labrum sont des blessures du cartilage et du fibrocartilage. Tous ces diagnostics visent l’épaule, mais des structures différentes.
[88] La Commission a choisi de demander l’avis du Bureau d’évaluation médicale sur les sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi exclusivement pour l’entorse de l’épaule, alors que le docteur Belzile n’a jamais posé ce diagnostic. Pourquoi n’a-t-elle pas demandé au Bureau d’évaluation médicale de trancher l’ensemble des diagnostics de l’épaule?
[89] Elle avait pourtant demandé à son médecin désigné de se prononcer sur le diagnostic lors de la première démarche en janvier 2013 et celui-ci a retenu, après un examen paraclinique, le diagnostic d’entorse de la coiffe des rotateurs sur une condition personnelle de tendinose avec possibilité de déchirure partielle du tendon du sous-épineux. Elle avait également demandé au docteur Gaspard en avril 2014 de préciser le diagnostic. Celui-ci indiquait en juin suivant qu’il y avait une fissure de la cavité glénoïde.
[90] Pour quels motifs la Commission a-t-elle restreint ainsi sa demande d’avis au Bureau d’évaluation médicale au seul diagnostic initialement retenu lors de l’acceptation de la réclamation du travailleur en 2012? Elle avait le pouvoir de demander au Bureau d’évaluation médicale son avis sur l’ensemble des diagnostics, mais, pour des raisons qui lui sont propres, elle a choisi de ne pas le faire et a demandé un avis du Bureau d’évaluation médicale sur un diagnostic qui n’a jamais été posé par le médecin qui a charge du travailleur.
[91] En effet, la docteure Desloges du Bureau d’évaluation médicale se prononce sur la consolidation et les autres sujets d’ordre médical uniquement en fonction du diagnostic accepté initialement par la CSST, soit l’entorse de l’épaule gauche, conformément au mandat que la CSST lui a confié. Même si la médecin procède cependant à faire un examen de l’ensemble des structures de l’épaule, en fin de compte, elle ne s’exprime qu’en regard de l’entorse de l’épaule, donc uniquement en fonction de l’atteinte ligamentaire de l’épaule.
[92] Le Tribunal estime qu’on ne peut inférer de son avis quelque conclusion que ce soit en regard des diagnostics visant les tendons ou le cartilage ou le fibrocartilage. De plus, non seulement il s’agit de structures différentes de l’épaule, mais les traitements pour ces atteintes ne sont pas les mêmes non plus que l’atteinte permanente à l’intégrité physique. En regard du déficit anatomophysiologique, le Règlement sur le barème[11] accorde 2 % pour une entorse de l’épaule sans plus, alors qu’une atteinte des tendons ou du cartilage ou du fibrocartilage peut justifier une atteinte des tissus mous de 2 % en plus de tous les pourcentages supplémentaires pour les ankyloses. Les séquelles de l’entorse ne sont pas les mêmes que celles des autres diagnostics de l’épaule. L’enjeu est réel.
[93] Le Tribunal estime que la procédure d’évaluation médicale suivie et l’avis de la docteure Desloges sont irréguliers pour les motifs énoncés ci-après.
[94] L’article 204 prévoit que la Commission peut exiger qu’un travailleur se soumette à l’examen du médecin qu’elle désigne. Le second alinéa de l’article 205.1 et l’article 206 de la loi établissent que la Commission peut soumettre les rapports de son médecin désigné et de celui du médecin qui a charge du travailleur au Bureau d’évaluation médicale.
[95] La jurisprudence constante[12] énonce à bon droit que la Commission a donc le pouvoir discrétionnaire de soumettre au Bureau d’évaluation médicale ces rapports pourvu qu’il existe un litige sur un des sujets d’ordre médical. Elle n’a pas d’obligation. Si elle décide de ne pas soumettre ces rapports au Bureau d’évaluation médicale, ce qu’elle peut décider en toute légitimité, elle est alors liée par l’opinion du médecin qui a charge en vertu de l’article 224 de la loi.
[96] D’ailleurs, dans l’affaire Levac[13], la Commission des lésions professionnelles s’exprime avec justesse comme suit :
[24] Par l’utilisation du terme « peut » dans ces dispositions [204 et 206] , le législateur confère à la CSST le pouvoir discrétionnaire de décider de l’opportunité d’exiger du travailleur qu’il se soumette à l’examen du professionnel de la santé qu’elle désigne et d’ensuite décider de l’opportunité de soumettre le rapport ainsi obtenu au Bureau d’évaluation médicale.
[25] Aucune disposition de la LATMP n’exige, lorsque la CSST utilise ces pouvoirs, qu’elle le fasse pour tous les sièges de lésion identifiés au dossier. Elle a tout le loisir de décider, ayant le pouvoir discrétionnaire de le faire, de n’utiliser la procédure d’évaluation médicale que pour un seul siège de lésion. Ainsi dans la présente affaire, le fait d’obtenir l’avis du docteur Décarie pour le seul siège de lésion de l’épaule et de diriger le dossier au Bureau d’évaluation médicale sur ce seul aspect ne comporte aucune irrégularité.
[97] Dans l’affaire Domond[14], la Commission des lésions professionnelles écrit :
[41] Il est bien établi par la jurisprudence, et la procureure du travailleur le reconnaît, que la CSST n’est pas obligée de s’adresser au Bureau d’évaluation médicale, qu’il s’agit là d’un pouvoir discrétionnaire compte tenu du terme « peut » utilisé au dernier paragraphe de l’article 205.1 et de l’article 206.
[98] Il en est de même dans l’affaire Brisebois[15]:
[58] Les articles 204, 205.1 et 206 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (la loi) indiquent quand et comment la CSST peut requérir l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale.
[59] Or, aucune de ces dispositions n’oblige la CSST à se prévaloir de cette procédure même en cas de conclusions contradictoires entre le médecin traitant du travailleur et le médecin désigné par la CSST. De plus, rien n’oblige la CSST à poursuivre une procédure amorcée lorsque le membre du Bureau d’évaluation médicale n’a pas encore rendu son avis. En effet, toutes les dispositions législatives qui permettent à la CSST d’initier une procédure d’évaluation médicale utilisent le verbe « peut » et non le verbe « doit ». C’est donc dire que le législateur a voulu donner un certain pouvoir à cet organisme sans toutefois le contraindre à agir en toutes circonstances.
[99] Par ailleurs, certaines décisions établissent que la procédure d’évaluation médicale est irrégulière dans le cas où la Commission demande l’opinion de son médecin désigné notamment sur le diagnostic de la lésion, que cette opinion contredit celle du médecin qui a charge du travailleur et que la Commission exerce sa discrétion de demander l’avis du Bureau d’évaluation médicale, mais ne lui soumet que le diagnostic accepté initialement ou émis par son médecin désigné. Si dans ces circonstances elle décide de requérir l’avis du Bureau d’évaluation médicale, elle ne peut limiter sa demande. Elle se doit nécessairement de lui demander de se prononcer sur le diagnostic, sans quoi, l’avis du Bureau d’évaluation médicale sera irrégulier.
[100] C’est le cas dans l’affaire Place Aylwin My ltée[16] soumise par le travailleur où la Commission des lésions professionnelles déclare irrégulier l’avis du Bureau d’évaluation médicale. Dans cette affaire, le médecin qui a charge de la travailleuse retenait les diagnostics d’entorse lombaire et de contusion lombosacrée. La CSST a demandé au médecin qu’elle a désigné de se prononcer notamment sur la question du diagnostic. Ce dernier a conclu que le diagnostic à retenir est la contusion lombosacrée. Il a également émis un diagnostic de hernie discale pour lequel la CSST, avant de soumettre le dossier au Bureau d’évaluation médicale, a refusé de reconnaître la relation causale avec l’événement. Puis, la CSST a décidé de soumettre le dossier au Bureau d’évaluation médicale en demandant son avis sur la date de consolidation, les soins et traitements de même que l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles (les sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi) eu égard au seul diagnostic de contusion lombosacrée. La CSST n’a donc pas requis l’avis du Bureau d’évaluation médicale sur la question du diagnostic alors qu’un litige persistait entre l’opinion du médecin qui a charge de la travailleuse et le médecin désigné.
[101] La Commission des lésions professionnelles conclut, à bon droit, que l’avis du Bureau d’évaluation médicale est irrégulier puisque cette divergence d’opinions sur le diagnostic n’a pas été soumise au Bureau d’évaluation médicale alors que la question avait été soumise au médecin désigné et que la Commission avait choisi de diriger le dossier au Bureau d’évaluation médicale. La Commission des lésions professionnelles énonce qu’une fois la procédure d’évaluation médicale engagée sur le diagnostic, la CSST ne pouvait choisir le diagnostic à soumettre au Bureau d’évaluation médicale. La Commission des lésions professionnelles énonce avec justesse ce qui suit :
[44] Lorsque l’article 206 de la loi indique que la C.S.S.T. « peut » [soumettre le rapport de son médecin désigné au Bureau d’évaluation médicale], il faut comprendre que la C.S.S.T. a le choix de soumettre ou non ce rapport à un membre du Bureau d’évaluation médicale.
[45] Cependant, conformément aux dispositions de l’article 217, lorsque la C.S.S.T. soumet, au Bureau d’évaluation médicale, les « contestations », elle ne peut choisir quelle contestation elle veut soumettre, éliminant ainsi indirectement un diagnostic ou une autre conclusion « contestée » du médecin qui a charge.
[46] La Commission des lésions professionnelles est d’avis que le sens du mot « contestation » dans cet article correspond à une divergence (le mot « infirme » est utilisé à l’article 205.1) entre l’avis du médecin qui a charge et le médecin désigné. La C.S.S.T. ne peut escamoter ainsi le diagnostic posé par le médecin qui a charge en refusant de le soumettre au test du Bureau d’évaluation médicale. Une fois le processus engagé, la C.S.S.T. doit suivre les règles.
[47] Par ailleurs, à quoi sert l’avis d’un membre du Bureau d’évaluation médicale portant sur des limitations fonctionnelles découlant d’un diagnostic de contusion lorsque le diagnostic qui pourrait lier la C.S.S.T. est une entorse ?
[102] Dans l’affaire Dulong[17], également soumise par le travailleur, la CSST reconnaît que la travailleuse a subi une lésion professionnelle ayant causé une entorse cervicale et lombaire. Subséquemment, un diagnostic de hernie discale L5-S1 et de pied tombant est posé par le médecin qui a charge. Le médecin désigné par la CSST conclut à un diagnostic d’entorses cervicale et lombaire. Suivant la demande de la CSST, le Bureau d’évaluation médicale rend son avis sur les sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi à partir du seul diagnostic d’entorses cervicale et lombaire, et ce, sans se prononcer sur le diagnostic. Comme dans l’affaire Place Aylwin My Ltée[18], la CSST avait demandé à son médecin désigné de se prononcer sur l’ensemble des sujets d’ordre médical, incluant le diagnostic. Puis, elle avait requis l’avis du Bureau d’évaluation médicale uniquement sur les sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi à partir du seul diagnostic accepté et établi par son médecin désigné, en ignorant les diagnostics de hernie discale L5-S1 et de pied tombant retenus par le médecin qui a charge de la travailleuse, malgré la contradiction. Ces diagnostics faisaient clairement l’objet d’un litige avec le médecin désigné. C’est dans ce contexte que la Commission des lésions professionnelles a déclaré irrégulier l’avis du Bureau d’évaluation médicale, et ce, à bon droit.
[103] Des conclusions et un raisonnement similaires sont étayés avec justesse dans l’affaire Khan[19] où les médecins qui ont pris charge du travailleur au cours de l’évolution de sa lésion professionnelle ont retenu plusieurs diagnostics, dont celui de cervico-brachialgie, de douleur myofasciale et d’atteinte des tissus mous à l’épaule et au bras gauche, de problèmes lombaires, de dystrophie réflexe du 1er orteil droit et de problématique au genou. La CSST n’avait pas soumis ces diagnostics au Bureau d’évaluation médicale, malgré le litige entre l’opinion du médecin désigné et celui ayant charge du travailleur sur le diagnostic. « Au contraire, la CSST a jugé approprié de soumettre au membre du Bureau d’évaluation médicale que le seul diagnostic initial de blessure par balles à l’estomac, à la jambe et à la hanche droite. », sans tenir compte des nombreux autres diagnostics. La Commission des lésions professionnelles conclut avec justesse que la procédure d’évaluation médicale est irrégulière.
[104] Dans une toute récente décision, l’affaire Tamang[20], le Tribunal administratif du travail déclare encore là l’irrégularité de la procédure d’évaluation médicale dans des circonstances semblables où le médecin désigné et le médecin qui a charge du travailleur ne s’entendent pas sur le diagnostic et que la Commission ne soumet que le diagnostic de son médecin désigné au Bureau d’évaluation médicale pour l’évaluation des sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi.
[105] Par ailleurs, le travailleur dépose d’autres décisions qu’il y a lieu de commenter.
[106] Dans l’affaire Sanchez[21], le médecin qui a charge du travailleur pose plusieurs diagnostics différents au niveau de la cheville et du pied gauches (fracture du péroné, arthrose de l’articulation astragalo-calcanéenne de la facette moyenne, fasciite plantaire calcanéenne avec épine de Lenoir, œdème au niveau du sinus du tarse, bursite rétro-calcanéenne et arthrose astragalo-calcanéenne avec souris articulaire de la face dorsale de l’articulation). La CSST demande à son médecin désigné de se prononcer sur l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles en regard d’un seul des diagnostics posés par le médecin qui a charge du travailleur, soit celui de fracture du péroné. La même demande est ultimement faite au Bureau d’évaluation médicale. Par ailleurs, environ un an et demi plus tard, la CSST rend des décisions rejetant la relation causale avec le diagnostic de fasciite plantaire et d’épine de Lenoir, mais ne se prononce toujours pas sur l’ensemble des diagnostics retenus par le médecin qui a charge du travailleur. La Commission des lésions professionnelles constate que la procédure d’évaluation médicale n’a permis d’évaluer les séquelles qu’en relation avec le diagnostic de fracture de la cheville gauche et que la CSST ne s’est pas prononcée sur les autres diagnostics émis par le médecin qui a charge. La Commission des lésions professionnelles considère que la CNESST ne pouvait ignorer ces autres diagnostics. Elle énonce ce qui suit :
[59] Des deux avenues qui s’offraient à elle, la CSST a renoncé à rendre une décision sur la relation causale concernant ces diagnostics et a plutôt choisi de se prévaloir de la procédure d’évaluation médicale.
[60] Toutefois, en décidant de requérir la procédure d’évaluation médicale, la CSST devait procéder conformément aux dispositions prévues à la loi.
[61] Le choix de la CSST de requérir l’avis du Bureau d’évaluation médicale plutôt que de rendre une décision sur la relation causale ne lui permet pas d’écarter des diagnostics et ainsi priver les parties de l’exercice de leur droit de contestation en cas d’élimination d’un diagnostic émis par le médecin qui a charge.
[Références omises]
[107] De plus, dans cette affaire, la CSST a omis de demander l’avis du médecin qui a charge via le rapport complémentaire, commettant ainsi une irrégularité au processus d’évaluation médicale. Elle a plutôt soumis directement le dossier du travailleur au Bureau d’évaluation médicale. Sur cette question, la Commission des lésions professionnelles énonce que la jurisprudence a conclu à de nombreuses reprises que cela entraînait l’irrégularité du Bureau d’évaluation médicale. Finalement, la Commission des lésions professionnelles conclut que plusieurs irrégularités entachent la décision rendue par la CSST à la suite de l’avis du Bureau d’évaluation médicale. Par conséquent, elle annule la procédure d’évaluation médicale et la décision qui l’entérinent, retournant le dossier à la CSST pour que les décisions appropriées soient prises eu égard à l’ensemble des diagnostics.
[108] Dans l’affaire Bigras[22] comme dans l’affaire Sanchez[23], la CSST demande à son médecin désigné de se prononcer sur les sujets d’ordre médical 2 à 5 de l’article 212 de la loi en regard des seuls diagnostics qu’elle a retenus, bien que le médecin ayant charge du travailleur ait retenu d’autres diagnostics. Puis, elle dirige le dossier au Bureau d’évaluation médicale avec les mêmes demandes. La Commission des lésions professionnelles déclare irrégulier l’avis du Bureau d’évaluation médicale. Elle énonce que si la CSST décide d’avoir recours à la procédure d’évaluation médicale, elle ne peut limiter sa contestation et reprend le principe émis dans l’affaire Place Aylwin My Ltée[24] suivant lequel « elle doit soumettre au Bureau d’évaluation médicale toutes les questions qui sont contredites par le rapport du médecin désigné ».
[109] Il en est de même dans l’affaire Pneus Chartrand Distribution inc.[25]. Encore là, la CSST demande à son médecin désigné de se prononcer sur les sujets d’ordre médical 2 à 5 de l’article 212 de la loi en regard du diagnostic de contusion à la cheville droite, alors que le médecin qui a charge du travailleur pose également d’autres diagnostics au pied droit. Elle ne lui demande pas de donner son avis sur le diagnostic. Puis, la CSST soumet le dossier au Bureau d’évaluation médicale lui demandant de se prononcer sur les sujets d’ordre médical pour le seul diagnostic de contusion à la cheville droite. Le Tribunal conclut que la procédure d’évaluation médicale est irrégulière. Il s’exprime comme suit :
[67] Le Tribunal retient en effet que, s’il est vrai que lorsqu’elle obtient un rapport médical infirmant celui du médecin traitant, la Commission peut décider de le soumettre ou non à un membre du Bureau d’évaluation médicale. Si elle ne le soumet pas à la procédure d’évaluation médicale, elle est alors liée par le rapport du médecin traitant. Toutefois, si elle décide de soumettre le rapport médical du médecin désigné et celui du médecin traitant au processus d’évaluation médicale, elle ne peut pas choisir parmi les sujets contredits ceux sur lesquels elle désire que le membre du Bureau d’évaluation médicale se prononce.
[Soulignements ajoutés]
[110] Il en est de même dans l’affaire Huard[26] également soumise à l’attention du Tribunal par le travailleur.
[111] La soussignée considère qu’une différence importante existe entre les faits des affaires Place Aylwin My Ltée, Dulong, Khan, Tamang et les affaires Sanchez, Bigras, Pneus Chartrand et Huard de sorte que les principes appliqués et les déclarations d’irrégularité du Bureau d’évaluation médicale énoncés avec justesse dans les premiers ne peuvent s’appliquer dans les seconds.
[112] En effet, dans les quatre premiers cas, Place Aylwin My Ltée, Dulong, Khan et Tamang, il existait un véritable litige entre l’opinion du médecin qui a charge et celle du médecin désigné puisque ce dernier avait le mandat de se prononcer sur le diagnostic et qu’il avait conclu à un diagnostic différent de celui ou ceux retenus par le médecin qui avait charge du travailleur. Il y avait une véritable contestation. La Commission n’était pas obligée de requérir l’avis du Bureau d’évaluation médicale, certes, mais dans la mesure où elle le faisait, elle se devait de demander son avis sur le diagnostic. Le fait que le Bureau d’évaluation médicale n’ait pas été saisi du diagnostic posait donc problème. C’est ce qui explique la déclaration d’irrégularité de l’avis du Bureau d’évaluation médicale. La soussignée adopte ce raisonnement.
[113] Cependant, dans les cas, Sanchez, Bigras, Pneus Chartrand et Huard, il n’existait pas de litige au sujet du diagnostic puisque le médecin désigné ne s’était pas prononcé sur cette question, ayant plutôt pris pour acquis le diagnostic déterminé par la Commission comme cette dernière le lui demandait. Avec respect pour l’opinion contraire, la soussignée estime que, dans ces circonstances où il n’y a pas de contestation sur le diagnostic, l’avis du Bureau d’évaluation médicale portant sur la consolidation, les soins et traitements, l’atteinte permanente à l’intégrité physique et/ou les limitations fonctionnelles est tout à fait régulier en regard du diagnostic en question. L’avis du Bureau d’évaluation médicale étant régulier, ces conclusions lient donc la Commission en regard du diagnostic en question. Quant aux autres diagnostics, la Commission se trouverait liée par les conclusions du médecin qui a charge sous réserve d’une décision sur la relation causale ou d’une nouvelle procédure d’évaluation médicale pour ces autres diagnostics.
[114] Notons cependant que dans l’affaire Sanchez, il y avait une problématique au sujet du rapport complémentaire, qui semble avoir justifié également la décision d’irrégularité du Bureau d’évaluation médicale.
[115] En l’espèce, la soussignée estime que les principes énoncés dans les affaires Place Aylwin, Dulong, Khan et Tamang doivent s’appliquer puisque les faits de la présente affaire sont assimilables en ce que la Commission a requis de son médecin désigné qu’il se prononce sur le diagnostic, mais n’a pas soumis la question du diagnostic au Bureau d’évaluation médicale, alors qu’il existait une contradiction sur cette question.
[116] En effet, dans la présente affaire, en mai 2012, la CSST accepte initialement la réclamation avec le diagnostic d’entorse de l’épaule gauche. Puis, en janvier 2013, elle demande à son médecin désigné, le docteur Papadopoulos, de se prononcer sur le diagnostic. Ce dernier requiert un examen par résonance magnétique et retient en mars suivant, le diagnostic d’entorse de la coiffe des rotateurs sur une condition personnelle de tendinose avec possibilité de déchirure partielle du tendon du sous-épineux. La CSST semble avoir conservé le diagnostic initialement retenu pour l’acceptation de la lésion, soit l’entorse de l’épaule, tout au long du processus, sans jamais tenir compte des diagnostics retenus par le médecin qui a charge du travailleur et des examens paracliniques. Notons qu’eu égard à l’épaule gauche, le docteur Belzile a retenu des diagnostics de tendinite, de déchirure du labrum et le médecin orthopédiste consulté a ajouté celui de tendinose et de fissure de la cavité glénoïde, le tout conformément aux résultats de l’arthro-scan. Le diagnostic de déchirure des tendons de la coiffe des rotateurs initialement envisagé par le docteur Belzile a par ailleurs été écarté par l’arthro-scan. Cependant et cela est primordial, le diagnostic d’entorse n’a pas été retenu ni par le docteur Belzile ni par l’orthopédiste consulté.
[117] Au moment où la CSST soumet le dossier au Bureau d’évaluation médicale, il existait clairement une contradiction entre l’opinion du médecin désigné qui retenait un diagnostic d’entorse et l’opinion du médecin qui a charge du travailleur qui retenait des diagnostics autres que l’entorse. Cette contradiction est complètement ignorée par la CSST. Le diagnostic soumis à l’attention du Bureau d’évaluation médicale n’est aucunement retenu ou même invoqué par le médecin qui a charge du travailleur.
[118] À compter du moment où la Commission décide de diriger le dossier au Bureau d’évaluation médicale alors qu’elle a déjà entamé la procédure d’évaluation médicale sur le diagnostic et qu’un litige subsiste sur cette question, elle ne pouvait pas choisir d’elle-même le diagnostic à soumettre à l’attention du Bureau d’évaluation médicale pour les questions 2 à 5 de l’article 212 de la loi, d’autant plus que ce diagnostic n’avait jamais été posé par le médecin qui a charge du travailleur. Cela entache la régularité de la procédure d’évaluation médicale ainsi que de l’avis du Bureau d’évaluation médicale. Il en aurait été tout autrement si la Commission avait demandé au Bureau d’évaluation médicale de se prononcer sur l’ensemble des diagnostics de l’épaule gauche, mais elle ne l’a pas fait et c’est ce qui porte atteinte à la validité de la procédure.
[119] Par contre, si le médecin qui a charge avait retenu le diagnostic d’entorse de l’épaule, la Commission aurait pu demander l’avis du Bureau d’évaluation médicale à partir de ce diagnostic s’il subsistait un litige à propos des autres questions d’évaluation médicale. L’avis aurait alors été régulier et la Commission aurait été liée par les conclusions du Bureau d’évaluation médicale, en application de l’article 224.1 de la loi qui se lit comme suit :
224.1. Lorsqu’un membre du Bureau d’évaluation médicale rend un avis en vertu de l’article 221 dans le délai prescrit à l’article 222, la Commission est liée par cet avis et rend une décision en conséquence.
Lorsque le membre de ce Bureau ne rend pas son avis dans le délai prescrit à l’article 222, la Commission est liée par le rapport qu’elle a obtenu du professionnel de la santé qu’elle a désigné, le cas échéant.
Si elle n’a pas déjà obtenu un tel rapport, la Commission peut demander au professionnel de la santé qu’elle désigne un rapport sur le sujet mentionné aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l’article 212 qui a fait l’objet de la contestation; elle est alors liée par le premier avis ou rapport qu’elle reçoit, du membre du Bureau d’évaluation médicale ou du professionnel de la santé qu’elle a désigné, et elle rend une décision en conséquence.
La Commission verse au dossier du travailleur tout avis ou rapport qu’elle reçoit même s’il ne la lie pas.
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1992, c. 11, a. 27.
[120] Par conséquent, le Tribunal déclare la procédure d’évaluation médicale irrégulière de même que l’avis de la docteure Desloges rendu le 15 juin 2015. Cela dispose du moyen préalable soumis par le travailleur eu égard à la question de l’entorse de l’épaule gauche.
[121] Qu’advient-il des autres diagnostics retenus par le médecin qui a charge et l’orthopédiste consulté, eu égard à l’épaule gauche, sur lesquels la procédure d’évaluation médicale n’a pas été entamée et pour lesquels le Bureau d’évaluation médicale ne s’est pas prononcé?
[122] Des situations semblables ont été analysées dans la jurisprudence. En effet, lorsque la Commission rend une décision d’admissibilité reconnaissant un diagnostic spécifique comme étant en relation avec un événement, alors que la lésion fait toujours l’objet d’investigation et qu’un nouveau diagnostic est posé en raison de l’évolution de la condition ou des résultats de l’investigation, le Tribunal considère que ce nouveau diagnostic fait l’objet d’une décision implicite favorable de la Commission, sauf si cette dernière a rendu une décision refusant la relation causale ou qu’une procédure d’évaluation médicale est entamée sur le diagnostic en question.
[123] Dans l’affaire Leguerrier[27], la Commission des lésions professionnelles conclut que la CSST a rendu une décision implicite acceptant le diagnostic de hernie discale L3-L4 comme lésion professionnelle. Après l’introduction de ce diagnostic par le médecin traitant, la CSST n’avait jamais rendu une décision le refusant expressément ni entamé la procédure d’évaluation médicale sur cette question. De plus, elle avait autorisé les coûts d’une résonance magnétique et d’un électromyogramme.
[124] En l’espèce, pour une situation similaire, la soussignée estime que les diagnostics de tendinite, tendinose, déchirure labrale et fissure glénoïdienne de même que le diagnostic englobant de dérangement interne de l’épaule gauche ont été retenus implicitement par la Commission puisque ces diagnostics émanent de la preuve prépondérante, qu’elle a autorisé une imagerie par résonance magnétique et un arthro-scan pour investiguer les pathologies à l’épaule gauche, que la Commission n’a jamais refusé la relation causale entre ces diagnostics et la lésion professionnelle ni entamé de procédure médicale sur ces diagnostics.
[125] La Commission ayant donc reconnu implicitement ces diagnostics, ils acquièrent un effet liant en application de l’article 224 de la loi.
[126] Quant à la demande du travailleur de retourner le dossier à la Commission et de lui ordonner d’entamer une nouvelle procédure d’évaluation médicale sur les sujets 2 à 5 de l’article 212 de la loi, sur ces diagnostics liés à des pathologies à l’épaule gauche, la soussignée estime que cette demande est mal fondée.
[127] En effet, comme vu plus tôt, il est bien établi par la jurisprudence[28], que la Commission a toute discrétion pour soumettre ou non un litige au Bureau d’évaluation médicale. Ce pouvoir lui appartient et dans les circonstances du présent dossier, la soussignée estime qu’il n’est pas approprié d’ordonner une telle procédure.
[128] De plus, comme énoncé dans l’affaire Levac[29], « Aucune disposition de la LATMP n’exige, lorsque la CSST utilise ces pouvoirs, qu’elle le fasse pour tous les sièges de lésion identifiés au dossier ». Cependant, dans le cas où elle choisit de ne pas le faire, elle est alors liée par les diagnostics et les autres conclusions d’ordre médical retenus par le médecin qui a charge du travailleur en application de l’article 224 de la loi cité plus tôt.
[129] Dans le cas présent, selon l’information au dossier, le travailleur a continué à être traité et investigué pour les problèmes à l’épaule gauche bien après la date de l’avis du Bureau d’évaluation médicale, tel qu’en font foi la résonance magnétique de 2016 et l’arthro-scan de 2017. En l’absence d’autre preuve et en l’absence de toute nouvelle procédure d’évaluation médicale sur les diagnostics de l’épaule gauche que la Commission pourrait entamer, la soussignée constate que ces lésions apparaissent toujours non consolidées dans l’état actuel du dossier.
[130] Quant aux autres diagnostics concernant la colonne cervico-dorso-lombaire et les diagnostics de nature psychique, la soussignée estime qu’elle ne peut pas ordonner, comme le souhaite le travailleur, que la Commission soumette ces diagnostics au Bureau d’évaluation médicale.
[131] En effet, ces diagnostics n’ont pas été soumis à la procédure d’évaluation médicale. La Commission n’a pas requis d’examen et d’avis de son médecin désigné à ce sujet. La Commission a donc décidé de ne pas entamer de procédure d’évaluation médicale à leur sujet. C’est son choix. Soulignons qu’une telle demande peut également émaner de l’employeur en application des articles 209 et 212 de la loi, ce qui n’est pas non plus le cas dans le présent dossier.
[132] La Commission ayant exercé sa discrétion de ne pas entamer de procédure d’évaluation médicale, il n’appartient pas au Tribunal de lui imposer cette obligation.
[133] Par ailleurs, la Commission a rendu des décisions refusant la relation causale entre ces diagnostics et l’événement de 2012. Ces décisions ont été contestées par le travailleur et maintenues par la Commission à la suite d’une révision administrative et font l’objet d’un litige soumis au Tribunal administratif du travail.
[134] Comme vu plus tôt, ces litiges et l’ensemble des autres litiges aux présents dossiers sont déférés au juge administratif qui sera chargé de l’audience au fond prévue en mars 2018.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU TRAVAIL :
ACCUEILLE le moyen préalable de monsieur Sylvain Gougeon, le travailleur;
DÉCLARE irrégulière la procédure d’évaluation médicale ayant mené à l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 15 juin 2015;
DÉCLARE irrégulier l’avis du Bureau d’évaluation médicale du 15 juin 2015.
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Marie Langlois |
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Me Maryse Casavant |
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Pour la partie demanderesse |
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Me Véronique Ranger |
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PAQUET TELLIER |
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Pour la partie intervenante |
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Date d’audience : 6 novembre 2017 |
[1] RLRQ, c. T-15.1.
[2] RLRQ, c. A-3.001
[3] Marceau et Gouttière Rive-Sud Fabrication inc., C.L.P. 91084-62-9709, 22 octobre 1999, H. Marchand.
[4] Fortin et Société Groupe Emb Pepsi Canada, [2004] C.L.P. 168.
[5] Paul et CPE Les Petits Chatons inc., C.L.P. 312992-08-0703, 27 mars 2008, F. Daigneault.
[6] Blais et Michel Leblanc Construction, C.L.P. 224812-01B-0401, 20 février 2007, J.-P. Arsenault.
[7] Voir entre autres J.J. et Compagnie A, 2011 QCCLP 7820; Bartoul et Sécurité publique Canada, 2013 QCCLP 1428; El Korjie et AJM Promo sportives internationales ltée, 2013 QCCLP 3210; Lévesque et Systèmes intérieurs Mistal 1990 inc., 2014 QCCLP 7080; Chaudhary et Diamond Tea Gown inc., 2015 QCCLP 1875; Binette et Société en commandite Elogia, 2017 QCTAT 1656.
[8] Jean et Belron Canada inc., [2006] C.L.P. 473; Lussier et Berlines RCL inc.,C.L.P. 122844-05-9908, 21 septembre 2000, L. Boudreault; Guillemette et Consortium Cadoret, Savard, Tremblay, Casault, C.L.P. 276152-09-0511, 31 mars 2006, R. Arseneau; O’Connor et Cri Environnement inc., 2011 QCCLP 2977.
[9] O’Connor et Cri Environnement inc., précitée note 8, par.95.
[10] Compagnie de la Baie d'Hudson et Valletta, C.L.P. 334755-61-0712, 14 octobre 2008, D. Martin; Blais et Papineau international SEC, (Transport Lacaille), C.L.P. 326451-04-0708, 11 janvier 2008, A. Quigley; Lazarevic et Brasserie Daniel Lapointe II, C.L.P. 355093-05-0808, 16 novembre 2009, F. Ranger; Lavoie et Dumas Contracting ltd, C.L.P. 317798-71-0705, 24 octobre 2008, Anne Vaillancourt; Chaumont et Ferme Bernex inc., C.L.P. 366337-04B-0812, 9 avril 2010, M. -A. Roiseux; Service Travail-Maison et Bélanger, 2011 QCCLP 1915; Villeneuve et Ressort Idéal ltée, 2012 QCCLP 4923; Denis et Association des handicapés gaspésiens, 2013 QCCLP 780.
[11] Règlement sur le Barème des dommages corporels, RLRQ, c. A-3.001, r. 2.
[12] Levac et Métro Richelieu-Jardin Mérite, C.L.P. 137519-71-005, 12 octobre 2000, L. Crochetière; Domond et Alcatel Cable (Mtl-Est), C.L.P. 156808-61-0103, 29 janvier 2002, L. Nadeau; Brisebois et C.I.S.P., C.L.P. 191844-71-0209, 8 avril 2003, C. Racine; Lévesque et Nortel Networks, C.L.P. 168037-71-0108, 9 mars 2004, J.-P. Arsenault; Béliveau et Chambre de bébé inc. (La) , C.L.P. [2005] C.L.P. 546; Entretien ménager Lyna inc. et Julien, C.L.P. 347329-63-0805, 15 mars 2010 J.-F. Martel (révision accueillie sur un autre point); CSSS du Sud-Ouest-Verdun et Benabdelhak, 2015 QCCLP 2043.
[13] Levac et Métro-Richelieu-Jardin Mérite, précitée, note 12.
[14] Domond et Alcatel Cable (Mtl-Est), précitée, note 12.
[15] Brisebois et C.I.S.P., précitée note 12.
[16] Place Aylwin My ltée et Paquette, C.L.P. 227923-62-0402, 14 février 2005, R. Beaudoin.
[17] Dulong et Résidence St-Jean-sur-Richelieu inc., 2012 QCCLP 3618.
[18] Place Aylwin My ltée et Paquette, précitée, note 16.
[19] Khan et Restaurant Le Taj, C.L.P. 212076-62-0307, 31 janvier 2005, D. Lévesque.
[20] Tamang et Courrier LT, 2017 QCTAT 269.
[21] Sanchez et Service de main-d’œuvre président, C.L.P. 253136-71-0501, 16 juin 2006, F. Juteau.
[22] Bigras et Paysagistes Saro inc., 2015 QCCLP 62.
[23] Sanchez et Service de main-d’œuvre président, précitée, note 21.
[24] Place Aylwin My ltée et Paquette, précitée note 16.
[25] Pneus Chartrand Distribution inc. et Nsimba Makiadi, 2017 QCTAT 2473.
[26] Huard et Fruits de mer Gascons ltée, C.L.P. 192228-01C-0210, 26 mars 2004, R. Deraiche.
[27] Leguerrier et Services Safety Kleen ltée, [2001] C.L.P. 729; voir au même effet MEP Technologies inc. et Lefebvre, C.L.P. 115818-61-9904, 26 octobre 2000, L. Nadeau; Martin et Société des alcools du Québec, C.L.P. 161540-64-0105, 9 avril 2002, J.-F. Martel; Les Viandes Surfine inc. et Boivin, C.L.P. 270085-32-0508, 11 mai 2006, M.-A. Jobidon.
[28] Levac et Métro-Richelieu-Jardin Mérite, précité, note 12; Domond et Alcatel Cable (Mtl-Est), précité, note 12; Brisebois et C.I.S.P., C.L.P. 191844-71-0209, précité, note 15.
[29] Levac et Métro-Richelieu-Jardin Mérite, précitée, note 12.
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