DÉCISION
162889-07-0105
[1] Le 24 mai 2001, Controlnet Service d’entretien d’immeubles inc. (l’employeur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) le 27 avril 2001, à la suite d’une révision administrative.
[2] Par cette décision, la CSST confirme premièrement sa décision du 2 octobre 2000, accepte la réclamation de madame Line Martin (la travailleuse) et déclare que le diagnostic d’entorse lombaire est en relation avec un événement survenu le 20 mars 2000. La lésion n’est pas encore consolidée à cette date et des soins et traitements sont encore requis.
[3] Deuxièmement, la CSST confirme en partie sa décision du 1er février 2001 et déclare que la lésion relative à l’étirement musculaire de la fesse droite est consolidée le 2 mai 2000, sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles. En regard de l’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale, la CSST déclare que cette lésion est consolidée le 8 décembre 2000, sans nécessité de soins ou traitements supplémentaires par la suite. Aussi, pour l’atteinte permanente de cette lésion, la CSST réfère à sa décision du 29 janvier 2001 accordant 2,20 % pour entorse dorso-lombaire, tel que retenu par le médecin qui a charge de la travailleuse, le docteur Villemaire dans son rapport du 18 janvier 2001. Quant aux limitations fonctionnelles résultant de cette lésion, la CSST se déclare liée par l’opinion émise par le docteur Villemaire, dans son rapport du 18 janvier 2001. En outre, la CSST déclare qu’elle est justifiée de poursuivre le versement des indemnités de remplacement du revenu jusqu’à ce qu’elle décide de la capacité de travail.
[4] Troisièmement, la CSST déclare irrecevable la demande de révision produite par l’employeur le 1er février 2001, en contestation de sa décision du 29 janvier 2001, qui accorde 2,20 % à titre d’atteinte permanente reliée au diagnostic d’entorse lombaire, tel que retenu par le docteur Villemaire dans son rapport du 18 janvier 2001.
[5] Quatrièmement, la CSST déclare irrecevable la demande de révision produite par l’employeur le 30 mars 2001, en contestation de sa décision du 26 mars 2001, laquelle reconnaissait la relation entre le diagnostic d’entorse lombaire et l’événement du 20 mars 2000.
181530-07-0204
[6] Le 5 avril 2002, l’employeur dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision rendue par la CSST le 19 mars 2002, à la suite d’une révision administrative.
[7] Par cette décision, la CSST confirme sa décision initiale rendue le 7 septembre 2001 sur l’emploi convenable, sur la mesure de réadaptation autorisée pour y accéder, soit la capitalisation, sur le revenu annuel brut de cet emploi convenable, sur la capacité de la travailleuse à l’exercer à compter du 6 septembre 2001 et sur le droit de la travailleuse à l’indemnité réduite à compter du 6 septembre 2002.
[8] La travailleuse est présente à l’audience et elle est représentée par une conseillère syndicale. L’employeur, pour sa part, y est représenté par procureur.
L'OBJET DES REQUÊTES
162889-07-0105
[9] L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que le diagnostic d’entorse lombaire n’est pas relié à l’événement du 20 mars 2000.
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[10] L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles de déclarer que la travailleuse n’a pas droit aux mesures de réadaptation.
LA QUESTION PRÉLIMINAIRE
[11] L’employeur demande à la Commission des lésions professionnelles, à titre de question préliminaire, de déclarer que l’avis du docteur Duranceau, du Bureau d’évaluation médicale (BEM), rendu le 19 septembre 2000 avec son avis complémentaire rendu le 18 décembre 2000, soient déclarés irréguliers et que les décisions des 2 octobre 2000 et 1er février 2001 de la CSST entérinant ces avis soient déclarées illégales. L’employeur demande également qu’en cas de réponse favorable à sa demande, la CSST ne fasse aucune réclamation ou ne demande aucun remboursement à la travailleuse pour les mesures de réadaptation dont elle a bénéficiées.
LES FAITS EN REGARD DE LA QUESTION PRÉLIMINAIRE
[12] Le 20 mars 2000, la travailleuse subit un accident du travail.
[13] Le 26 juin 2000, le dossier de la travailleuse est soumis au docteur Pierre-Paul Hébert, chirurgien orthopédiste et membre du BEM, pour évaluation. Le docteur Hébert est chargé de se prononcer sur le diagnostic, la date ou la période de consolidation de la lésion et sur la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou traitements administrés ou prescrits en relation avec l’événement du 20 mars 2000. Il évalue la travailleuse le 10 juillet 2000 et formule son avis. Le médecin rapporte, à la section historique, que le 22 mars 2000, le docteur Villemaire a posé un diagnostic de « blessure musculaire à la fesse glutéus droit »; que le 14 avril 2000, ce même médecin écrit « lésion davantage localisable aux facettes lombaires qu’aux muscles - légère faiblesse L5 droite (qui peut n’être qu’antalgique) »; que le 2 mai 2000, le docteur Le Bire, médecin désigné par l’employeur, rapporte une allégation de lombalgie, mais un examen normal; que les 5 mai et 17 mai 2000, le docteur Villemaire pose un diagnostic d’entorse lombaire; que le 13 juin, le docteur Villemaire revient avec le diagnostic de blessure fessière; qu’un rapport de tomodensitométrie réalisé le 15 mai 2000 révèle une minime hernie L5-S1 sans compression radiculaire et que le rapport du 5 juillet, du docteur Villemaire, indique que la travailleuse demeure avec un point douloureux dans la musculature fessière droite près de la crête iliaque. Ayant tenu compte de cet historique et après examen, le docteur Hébert conclut que le diagnostic le plus probable est celui d’étirement musculaire à la fesse droite, lésion qui est consolidée le 2 mai 2000 et pour laquelle les traitements sont adéquats et suffisants à cette date.
[14] Le 20 juillet 2000, la CSST rend une décision conforme à cet avis. L’employeur conteste cette décision.
[15] Le 26 juillet 2000, la CSST désigne le docteur Jean Varin, chirurgien-orthopédiste, pour procéder à l’évaluation de l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles résultant de la lésion du 20 mars 2000, le cas échéant. Le médecin évalue la travailleuse le 4 août 2000. En tenant compte des documents médicaux au dossier, soit ceux des docteurs Villemaire et Le Bire, du rapport du docteur Hébert et après examen, le docteur Varin retient une atteinte permanente à l’intégrité physique de 1.5 % correspondant à une entorse sacro-iliaque avec séquelles fonctionnelles sans changement radiologique (code 102597). Le docteur Varin prévoit également des limitations fonctionnelles.
[16] Le 31 août 2000, la CSST soumet une demande pour une seconde évaluation par un membre du BEM. Au formulaire signé par madame Jocelyne Vallée de la CSST, il est précisé que le diagnostic retenu est un étirement musculaire de la fesse droite, conformément à l’avis du docteur Hébert du BEM. Dans la colonne « rapport du médecin désigné », il est indiqué qu’il s’agit des conclusions du docteur Varin en regard de l’atteinte permanente à l’intégrité physique et des limitations fonctionnelles.
[17] Le docteur Jacques Duranceau, chirurgien orthopédiste, évalue la travailleuse, à titre de membre du BEM le 19 septembre 2000. À la section historique, le docteur Duranceau indique avoir pris connaissance des rapports médicaux des docteurs Villemaire et Le Bire de même que de l’évaluation du docteur Hébert, du BEM, qui conclut à un diagnostic d’étirement musculaire dans la fesse droite, lésion consolidée le 2 mai 2000, sans nécessité de soins ou traitements supplémentaires. Le docteur Duranceau fait également état des conclusions du docteur Varin en regard de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. Il tient compte également d’un rapport du 14 août 2000 du docteur François Racine, physiatre. Après avoir procédé à son examen objectif, le docteur Duranceau se prononce sur le diagnostic en retenant l’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale lombaire. Il est d’avis que cette lésion est une aggravation de la symptomatologie de la travailleuse et il demande à la CSST de se prononcer sur ce nouveau diagnostic. Il écrit que l’entorse lombaire avec la possibilité de hernie discale lombaire n’est pas consolidée, que des soins ou traitements supplémentaires sont nécessaires et que l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles devront être réévaluées.
[18] Le 2 octobre 2000, la CSST rend une décision qui entérine cet avis du BEM, en indiquant qu’elle est liée par cet avis. Elle retient donc le diagnostic d’entorse lombaire, lésion qui n’est pas encore consolidée et pour laquelle des soins ou traitements sont encore justifiés. L’employeur conteste cette décision.
[19] Le 5 octobre 2000, la CSST rend une autre décision à la suite d’une révision administrative en regard du premier avis émis par un médecin du BEM, soit celui produit par le docteur Hébert le 20 juillet 2000. La CSST décide par conséquent qu’il y a relation entre le diagnostic d’étirement musculaire à la fesse droite et l’événement du 20 mars 2000. Cette lésion est consolidée le 2 mai 2000 et aucun traitement ou soins ne sont nécessaires après cette date. La travailleuse conteste cette décision de la CSST le 6 novembre 2000, contestation qui a fait l’objet d’un désistement à la Commission des lésions professionnelles le 26 juin 2003.
[20] Le 18 décembre 2000, le docteur Duranceau révise et complète son avis du 19 septembre 2000. Il ajoute le diagnostic d’« étirement de la fesse droite résolue », consolide cette lésion en date du 2 mai 2000 et détermine qu’aucune atteinte permanente à l’intégrité physique ni limitations fonctionnelles ne résultent de cette lésion. Quant aux conclusions concernant l’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale lombaire, le docteur Duranceau reprend les conclusions de son rapport du 19 septembre 2000.
[21] Le 18 janvier 2001, le docteur Villemaire produit un rapport d’évaluation médicale dans lequel il conclut que la travailleuse demeure avec une atteinte permanente à l’intégrité physique résultant de l’événement du 20 mars 2000. Il s’agit de 2 % pour entorse dorsolombaire avec séquelles objectivées (code 204004). Il retient également des limitations fonctionnelles.
[22] Dans une décision du 29 janvier 2001, la CSST écrit qu’à la suite de la lésion du 20 mars 2000, l’atteinte permanente a été évaluée à 2 %. À ce pourcentage, s’ajoute 0,20 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie, pour un total de 2,20 %. La travailleuse a donc droit à une indemnité correspondant à ce pourcentage. L’employeur conteste cette décision.
[23] Quelques jours plus tard, le 1er février 2001, la CSST entérine l’avis complémentaire émis par le BEM le 18 décembre 2000 et déclare notamment, en regard de l’étirement musculaire de la fesse droite, qu’il n’y a aucune atteinte permanente à l’intégrité physique alors que pour l’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale, il est trop tôt pour se prononcer sur ce sujet. L’employeur conteste cette décision.
[24] Le 26 mars 2001, la CSST rend une autre décision qui reconnaît la relation entre le diagnostic d’entorse lombaire et l’événement du 20 mars 2000. L’employeur conteste cette décision.
[25] Le 7 septembre 2001, la CSST rend une décision suivant laquelle la travailleuse est capable d’exercer un emploi convenable de représentante de commerce. Elle accepte de verser le montant total d’indemnité annuelle de revenu en un seul versement pour l’achat d’un véhicule et de fournitures. L’employeur conteste cette décision.
L'AVIS DES MEMBRES EN REGARD DE LA QUESTION PRÉLIMINAIRE
[26] Le membre issu des associations d’employeurs de même que le membre issu des associations syndicales sont d’avis que la procédure d’évaluation médicale, en regard à l’avis du docteur Duranceau du 18 septembre 2000 complété le 19 décembre 2000 est irrégulière. Ils estiment aussi que les décisions de la CSST qui ont suivi cet avis et son complément sont illégales, du fait que le docteur Duranceau s’est prononcé à nouveau sur le diagnostic de la lésion du 20 mars 2000 alors que la question avait déjà été réglée par le docteur Hébert dans son avis du 10 juillet 2000 et par la décision rendue par la CSST à la suite de cet avis le 20 juillet 2000, décision qui a été contestée et qui a suivi son cours.
LES MOTIFS DE LA DÉCISION EN REGARD DE LA QUESTION PRÉLIMINAIRE
[27] La Commission des lésions professionnelles doit décider si le processus d’évaluation médicale, soit l’avis du docteur Duranceau et son complément, respecte les dispositions de la loi et si les décisions de la CSST qui découlent de ce processus doivent être maintenues.
[28] Rappelons certaines dispositions de la loi qui encadrent le processus d’évaluation médicale, notamment les articles 204, 205.1, 206, 212, 217, 221, 224 et 224.1 qui suivent :
204. La Commission peut exiger d'un travailleur victime d'une lésion professionnelle qu'il se soumette à l'examen du professionnel de la santé qu'elle désigne, pour obtenir un rapport écrit de celui - ci sur toute question relative à la lésion. Le travailleur doit se soumettre à cet examen.
La Commission assume le coût de cet examen et les dépenses qu'engage le travailleur pour s'y rendre selon les normes et les montants qu'elle détermine en vertu de l'article 115.
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1985, c. 6, a. 204; 1992, c. 11, a. 13.
205.1. Si le rapport du professionnel de la santé désigné aux fins de l'application de l'article 204 infirme les conclusions du médecin qui a charge du travailleur quant à l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, ce dernier peut, dans les 30 jours de la date de la réception de ce rapport, fournir à la Commission, sur le formulaire qu'elle prescrit, un rapport complémentaire en vue d'étayer ses conclusions et, le cas échéant, y joindre un rapport de consultation motivé. Le médecin qui a charge du travailleur informe celui‑ci, sans délai, du contenu de son rapport.
La Commission peut soumettre ces rapports, incluant, le cas échéant, le rapport complémentaire au Bureau d'évaluation médicale prévu à l'article 216.
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1997, c. 27, a. 3.
206. La Commission peut soumettre au Bureau d'évaluation médicale le rapport qu'elle a obtenu en vertu de l'article 204, même si ce rapport porte sur l'un ou plusieurs des sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 sur lequel le médecin qui a charge du travailleur ne s'est pas prononcé.
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1985, c. 6, a. 206; 1992, c. 11, a. 13.
212. L'employeur qui a droit d'accès au dossier que la Commission possède au sujet d'une lésion professionnelle dont a été victime un travailleur peut contester l'attestation ou le rapport du médecin qui a charge du travailleur, s'il obtient un rapport d'un professionnel de la santé qui, après avoir examiné le travailleur, infirme les conclusions de ce médecin quant à l'un ou plusieurs des sujets suivants :
1° le diagnostic;
2° la date ou la période prévisible de consolidation de la lésion;
3° la nature, la nécessité, la suffisance ou la durée des soins ou des traitements administrés ou prescrits;
4° l'existence ou le pourcentage d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique du travailleur;
5° l'existence ou l'évaluation des limitations fonctionnelles du travailleur.
L'employeur transmet copie de ce rapport à la Commission dans les 30 jours de la date de la réception de l'attestation ou du rapport qu'il désire contester.
________
1985, c. 6, a. 212; 1992, c. 11, a. 15; 1997, c. 27, a. 4.
217. La Commission soumet sans délai les contestations prévues aux articles 205.1, 206 et 212.1 au Bureau d'évaluation médicale en avisant le ministre de l'objet en litige et en l'informant des noms et adresses des parties et des professionnels de la santé concernés.
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1985, c. 6, a. 217; 1992, c. 11, a. 19; 1997, c. 27, a. 6.
221. Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.
Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.
________
1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.
224. Aux fins de rendre une décision en vertu de la présente loi, et sous réserve de l'article 224.1, la Commission est liée par le diagnostic et les autres conclusions établis par le médecin qui a charge du travailleur relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212.
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1985, c. 6, a. 224; 1992, c. 11, a. 26.
224.1. Lorsqu'un membre du Bureau d'évaluation médicale rend un avis en vertu de l'article 221 dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par cet avis et rend une décision en conséquence.
Lorsque le membre de ce Bureau ne rend pas son avis dans le délai prescrit à l'article 222, la Commission est liée par le rapport qu'elle a obtenu du professionnel de la santé qu'elle a désigné, le cas échéant.
Si elle n'a pas déjà obtenu un tel rapport, la Commission peut demander au professionnel de la santé qu'elle désigne un rapport sur le sujet mentionné aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212 qui a fait l'objet de la contestation; elle est alors liée par le premier avis ou rapport qu'elle reçoit, du membre du Bureau d'évaluation médicale ou du professionnel de la santé qu'elle a désigné, et elle rend une décision en conséquence.
La Commission verse au dossier du travailleur tout avis ou rapport qu'elle reçoit même s'il ne la lie pas.
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1992, c. 11, a. 27.
[29] Notons que le deuxième alinéa de l’article 221 permet au membre du BEM de se prononcer sur chacun des sujets énumérés aux paragraphes 1 à 5 du premier alinéa de l’article 212, et ce, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le médecin désigné par l’employeur ou la CSST ne se sont pas prononcés relativement à chacun de ces sujets. Le tribunal considère que cette disposition ne permet cependant pas à un membre du BEM de se prononcer sur le diagnostic ou les autres sujets alors qu’un autre membre du BEM a déjà exercé ce pouvoir en regard du même événement.
[30] En l’espèce, le docteur Duranceau a donné son avis sur le diagnostic résultant de l’événement du 20 mars 2000 (entorse lombaire avec possibilité de hernie discale), alors que le docteur Hébert avait fait de même en tant que membre du BEM (étirement musculaire de la fesse droite). Signalons que le docteur Hébert avait lui-même écarté le diagnostic d’entorse lombaire pour retenir celui d’étirement musculaire de la fesse droite. Le tribunal constate donc qu’il ne s’agit pas d’un cas où le diagnostic aurait été évolutif et où l’avis d’un deuxième membre du BEM aurait pu être requis. Le docteur Duranceau a indiqué que la condition de la travailleuse s’était aggravée entre la date d’examen du docteur Hébert, le 10 juillet 2000 et la date de son examen du 19 septembre 2000. Soulignons que le dossier ne comporte aucune réclamation pour une nouvelle lésion pour récidive, rechute ou aggravation. Le docteur Duranceau devait se référer à l’événement du 20 mars 2000 pour donner son avis et s’en tenir à l’avis formulé par le docteur Hébert sur les sujets sur lesquels le docteur Hébert s’était déjà prononcé. Puisque le docteur Hébert avait déjà fourni un avis fixant le diagnostic, la date de consolidation et des soins et traitements, il appartenait au docteur Duranceau de se prononcer sur l’atteinte permanente à l’intégrité physique et les limitations fonctionnelles reliées au diagnostic déjà établi, résultant de l’événement du 20 mars 2000, soit l’étirement musculaire de la fesse droite. Le docteur Duranceau a excédé sa compétence en se prononçant à nouveau sur le diagnostic. En outre, le docteur Duranceau a aussi erré en donnant son avis sur une nouvelle date de consolidation et la suffisance des soins et traitements. Le tribunal doit donc écarter l’avis du docteur Duranceau et le déclare irrégulier en regard du diagnostic, de la date de consolidation et de la suffisance des soins et traitements.
[31] De la même manière, le tribunal doit écarter l’avis du docteur Duranceau relativement à l’atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles résultant du diagnostic d’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale. Cependant, l’avis qu’il a fourni sur ces sujets en regard du diagnostic d’étirement musculaire de la fesse droite, est conforme au mandat que le docteur Duranceau devait remplir. Le tribunal retient par conséquent ces conclusions. Il en ressort que l’avis du docteur Duranceau du 19 septembre 2000 est irrégulier et l’avis complémentaire du 18 décembre 2001 est irrégulier pour la partie qui touche le diagnostic d’entorse lombaire.
[32] En conséquence, la Commission des lésions professionnelles déclare que la décision rendue par la CSST le 2 octobre 2000, qui a entériné l’avis irrégulier du docteur Duranceau du BEM du 19 septembre 2000, est illégale. Il en découle que la CSST était liée par les conclusions de l’avis du docteur Hébert du BEM rendues le 10 juillet 2000, conclusions qu’elle a entérinées le 20 juillet 2000. La Commission des lésions professionnelles déclare également que la décision rendue par la CSST le 1er février 2001, qui a entériné l’avis irrégulier du docteur
Duranceau du BEM, en regard des conclusions concernant l’entorse lombaire, du 18 décembre 2000, est aussi illégale relativement à ces conclusions. Quant aux conclusions relatives à l’atteinte permanente et aux limitations fonctionnelles reliées au diagnostic d’étirement musculaire de la fesse droite, la Commission des lésions professionnelles déclare que la CSST était liée par l’avis du docteur Duranceau du BEM émis le 18 décembre 2000. Une contestation ayant été produite par l’employeur quant à ces sujets, la Commission des lésions professionnelles convoquera les parties pour une nouvelle audience afin de disposer du fond du litige en regard de ces questions.
[33] Également, la Commission des lésions professionnelles convoquera les parties pour une nouvelle audience afin de disposer de la contestation de l’employeur en regard du droit à la réadaptation que la CSST a accordé à la travailleuse.
[34] Par ailleurs, l’employeur a demandé que la CSST ne fasse aucune réclamation ni ne demande aucun remboursement à la travailleuse pour les mesures de réadaptation dont elle a bénéficiées, si la Commission des lésions professionnelles en venait à la conclusion que la travailleuse n’a pas ce droit. La Commission des lésions professionnelles considère que cette demande est prématurée puisque le dossier n’a pas encore été entendu au fond, mais rappelle à ce propos que la loi prévoit une disposition qui vise cette situation. L’article 363 se lit ainsi :
363. Lorsque la Commission, à la suite d'une décision rendue en vertu de l'article 358.3, ou la Commission des lésions professionnelles annule ou réduit le montant d'une indemnité de remplacement du revenu ou d'une indemnité de décès visée dans l'article 101 ou dans le premier alinéa de l'article 102 ou une prestation prévue dans le plan individualisé de réadaptation d'un travailleur, les prestations déjà fournies à un s'il s'agit du salaire versé à titre d'indemnité en vertu de l'article 60.
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1985, c. 6, a. 363; 1997, c. 27, a. 19.bénéficiaire ne peuvent être recouvrées, sauf si elles ont été obtenues par mauvaise foi ou
PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :
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ACCUEILLE en partie le moyen préliminaire soulevé par Controlnet Service d’entretien d’immeubles inc., (l’employeur);
ANNULE la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 29 janvier 2001;
ANNULE la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 27 mars 2001;
INFIRME en partie la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 27 avril 2001, à la suite d’une révision administrative;
DÉCLARE que la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 5 octobre 2000, reconnaissant la relation entre le diagnostic d’étirement musculaire à la fesse droite, lésion consolidée le 7 mai 2000 sans nécessité de soins ou traitements supplémentaires, est une décision finale;
DÉCLARE que l’avis rendu par le docteur Jacques Duranceau du BEM, le 19 septembre 2000 est irrégulier;
DÉCLARE que la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 2 octobre 2000 est illégale;
DÉCLARE que l’avis rendu par le docteur Jacques Duranceau du BEM, le 18 décembre 2000 est irrégulier en regard des conclusions concernant le diagnostic d’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale;
DÉCLARE que la Commission de la santé et de la sécurité du travail était liée, le 18 décembre 2000, par l’avis du docteur Jacques Duranceau du BEM, rendu à cette date, en regard de l’atteinte permanente à l’intégrité physique et des limitations fonctionnelles en lien avec le diagnostic d’étirement musculaire de la fesse droite;
DÉCLARE que la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le 1er février 2001, est illégale en regard des conclusions concernant le diagnostic d’entorse lombaire avec possibilité de hernie discale;
CONVOQUERA les parties pour une audience sur les questions de l’atteinte permanente et des limitations fonctionnelles en lien avec le diagnostic d’étirement musculaire de la fesse droite découlant de l’événement du 20 mars 2000.
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ACCUEILLE en partie le moyen préliminaire soulevé par Controlnet Service d’entretien d’immeubles inc.;
CONVOQUERA les parties pour une audience sur les questions du droit à la réadaptation.
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Me Marie Langlois |
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Commissaire |
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Lacroix, Gascon, Avocats |
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(Me Denys Beaulieu) |
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Représentant de la partie requérante |
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U.E.S. Section locale 880 (F.T.Q.) (Rita Plamondon) |
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Représentante de la partie intéressée |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.