Paquin c. 9212-7026 Québec inc. (Auto Max) | 2024 QCCQ 2476 | ||||||
COUR DU QUÉBEC | |||||||
« Division des petites créances » | |||||||
CANADA | |||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||||||
DISTRICT DE | SAINT-FRANÇOIS | ||||||
LOCALITÉ DE | SHERBROOKE | ||||||
« Chambre civile » | |||||||
N° : | 450-32-021278-221 | ||||||
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DATE : | 30 mai 2024 | ||||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | MARTIN TÉTREAULT, J.C.Q. | |||||
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CAROLE ANNE PAQUIN | |||||||
Demanderesse | |||||||
c. | |||||||
9212-7026 QUÉBEC INC. (f.a.s.n. Auto Max) | |||||||
Défenderesse | |||||||
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JUGEMENT | |||||||
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[1] Mme Paquin réclame 5 145,38 $ de la défenderesse (Auto Max) au motif que des frais illégaux lui auraient été facturés lors de l’achat de son véhicule, ce qui contreviendrait à certaines dispositions de la Loi sur la protection du consommateur[1]. Le montant réclamé correspond aux frais supplémentaires illégaux (1 131,93 $) ainsi qu’à des dommages punitifs (4 000 $).
[2] Auto Max conteste en alléguant n’avoir exigé aucun frais additionnel sans l’accord de Mme Paquin.
[3] Pour les motifs qui suivent, le Tribunal arrive à la conclusion que le recours de Mme Paquin doit être accueilli en partie, mais seulement quant au remboursement de certains frais et aux dommages punitifs.
[4] Selon Mme Paquin, Auto Max aurait commis une pratique interdite en lui réclamant les frais supplémentaires suivants lors de l’achat de son véhicule le 28 mai 2022 :
alors que le prix de vente indiqué sur l’étiquette était de 22 995 $[2].
[5] Ceci contreviendrait aux articles 224 alinéa
224. Aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, par quelque moyen que ce soit:
[...]
c) exiger pour un bien ou un service un prix supérieur à celui qui est annoncé.
[...]
Aux fins du paragraphe c du premier alinéa, le prix annoncé doit comprendre le total des sommes que le consommateur devra débourser pour l’obtention du bien ou du service. Toutefois, ce prix peut ne pas comprendre la taxe de vente du Québec, ni la taxe sur les produits et services du Canada. Le prix annoncé doit ressortir de façon plus évidente que les sommes dont il est composé.
230. Aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, par quelque moyen que ce soit:
a) exiger quelque somme que ce soit pour un bien ou un service qu’il a fait parvenir ou rendu à un consommateur sans que ce dernier ne l’ait demandé;
[...]
[6] La détermination du caractère incomplet ou fragmentaire du prix doit être faite de façon objective sans qu’il soit nécessaire d’évaluer si le consommateur a bien compris de quoi est composé le véritable prix ni même s’il a été induit en erreur[3].
[7] Afin d’évaluer objectivement s’il y a eu contravention ou non, il convient de reprendre la section « Remarques » apparaissant sur l’étiquette du véhicule :
« Programme d’esthétique optionnel : $396.00 supplémentaire. Automax1.ca : Le meilleur prix...point final!!! Nous jouons pas avec les prix! Comptant ou financement : même prix! Automatique à 6 vitesses avec ‘’S tronic’’ (AWD), 98,000 km (certifié), Édi... » [4]
[Reproduction intégrale]
[8] À la lumière de celui-ci, on ne peut considérer que le programme d’esthétique était inclus dans le prix affiché de 22 995 $, car il est clairement indiqué que celui-ci est optionnel et qu’il engendre des frais supplémentaires.
[9] Mme Paquin prétend qu’il n’y a eu aucune discussion avec le vendeur à propos du programme d’esthétique et que celui-ci a été inclus dans son contrat de vente sans qu’elle ne s’en aperçoive. Elle ajoute ne pas avoir lu le contrat avant de le signer puisqu’elle était très emballée par le véhicule.
[10] Sa version est contredite par le vendeur et le propriétaire d’Auto Max. Ces derniers affirment que Mme Paquin a effectivement été informée de l’existence de ce programme additionnel et qu’elle en a d’ailleurs profité.
[11] Malgré cette preuve contradictoire, le Tribunal est d’avis que l’étiquette était claire et que Mme Paquin n’a pas payé un prix supérieur à celui annoncé pour le service d’esthétique.
[12] Il n’en va pas de même pour les frais de documentation pour le financement.
[13] En effet, dans le contrat de vente, un montant de 499 $ plus taxes a été inclus à titre de « frais financement documentation »[5].
[14] Or, selon l’étiquette, le prix devait être le même peu importe si l’achat se faisait au comptant ou par financement.
[15] Auto Max peut difficilement prétendre que ces frais de 499 $ plus taxes n’auraient pas dus être inclus dans le prix affiché. Ce faisant, elle est contrevenue à l’article 224 al.
[16] Pour ce qui est des frais de 89,50 $ pour le transfert SAAQ, Mme Paquin prétend qu’aucune explication ne lui a été donnée lors de l’achat du véhicule et qu’elle n’aurait jamais accepté de payer ce prix pour une nouvelle plaque alors que le coût est de 2,45 $ lorsque l’on se rend directement au bureau de la SAAQ.
[17] Les versions du président d’Auto Max, M. José Santos, et de son vendeur, M. Normand Godin, à ce sujet diffèrent.
[18] Selon M. Santos, Mme Paquin aurait été informée qu’il n’y avait pas de frais à la SAAQ si elle se rendait à leur bureau pour obtenir une nouvelle plaque alors que ceux-ci seraient de 89,50 $ s’il s’en chargeait. Mme Paquin aurait opté pour cette dernière option.
[19] Pour sa part, M. Godin, dit avoir mentionné à Mme Paquin qu’il lui en coûterait plus cher si elle se rendait au bureau de la SAAQ pour changer sa plaque plutôt que de faire affaire avec eux. À l’audience, il explique que l’augmentation des coûts pour le client serait due au paiement des taxes liées au transfert.
[20] Outre le fait que la version de M. Godin est contraire à la réalité puisque les frais exigés par la SAAQ lorsque le client se rend sur place sont de loin inférieurs à ceux réclamés par Auto Max, les contradictions entre ce témoignage et celui de M. Santos font en sorte que le Tribunal accorde plus de poids à celui de Mme Paquin quant au fait qu’elle n’aurait eu aucune information sur ce sujet lors de la vente du véhicule et qu’on ne lui a pas demandé de payer ce prix avant de lui charger la somme de 89,50 $ plus taxes. Ceci contrevient à l’article 230 al.
[21] En vertu de l’article
[22] Reste la question des dommages punitifs.
[23] Dans l’arrêt Richard c. Time, la Cour suprême reprend les objectifs liés à l’octroi de dommages-intérêts punitifs en vertu de l’article
[180] Dans le cas d’une demande de dommages-intérêts punitifs fondée sur l’art.
• Les dommages-intérêts punitifs prévus par l’art.
• Compte tenu de cet objectif et des objectifs de la L.p.c., les violations intentionnelles, malveillantes ou vexatoires, ainsi que la conduite marquée d’ignorance, d’insouciance ou de négligence sérieuse de la part des commerçants ou fabricants à l’égard de leurs obligations et des droits du consommateur sous le régime de la L.p.c. peuvent entraîner l’octroi de dommages-intérêts punitifs. Le tribunal doit toutefois étudier l’ensemble du comportement du commerçant lors de la violation et après celle-ci avant d’accorder des dommages-intérêts punitifs.[6]
[24] Dans le présent cas, Auto Max n’en est pas à sa première infraction à la LPC.
[25] En effet, en 2015, elle avait déjà été sanctionnée pour avoir fait défaut d’annoncer qu’un montant indiqué au contrat de vente représentait des prix d’accessoires alors que ce n’était pas le cas, tout en énonçant faussement qu’un montant de 499 $ correspondait à des « frais d’installation, de livraison et autres »[7]. Elle avait alors été condamnée à payer une somme de 2 000 $ à titre de dommages punitifs.
[26] De plus, elle a été condamnée suite à une poursuite pénale instituée en décembre 2020 en raison de frais illégaux réclamés aux clients alors que ses contrats ne le prévoyaient pas.
[27] Dans ces circonstances, le Tribunal considère que ces nouvelles contraventions à la loi sont graves et que l’exemplarité nécessite qu’un montant substantiel soit accordé. Ainsi, comme le montant de 2 000 $ accordé en 2015 ne semble pas avoir porté fruit, il y a lieu d’accorder la somme de 4 000 $ réclamée par Mme Paquin.
[28] Auto Max a la santé financière pour assumer une telle somme.
[29] Par conséquent, le montant payable à Mme Paquin s’élève à 4 676,63 $.
[30] L’intérêt et l’indemnité additionnelle prévue à l’article
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[31] ACCUEILLE en partie la Demande;
[32] CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 4 676,63 $ avec intérêt au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article
[33] AVEC LES FRAIS DE JUSTICE en faveur de la demanderesse.
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| __________________________________ MARTIN TÉTREAULT, J.C.Q. |
[1] RLRQ, c. P-40.1 (LPC).
[2] Pièce P-1.
[3] Union des consommateurs c. Air Canada,
[4] Pièce P-1.
[5] Pièce P-2.
[6] Richard c. Time inc.,
[7] Beji c. 9212-7026 Québec inc. (Auto Max),
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